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Métapo infos - Page 17

  • La remigration : légitimité, nécessité, possibilité...

    Nous reproduisons ci-dessous l'intervention de Jean-Yves Le Gallou au Sommet européen pour la remigration, organisé par Martin Sellner, qui s'est tenu le 17 mai.

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    La remigration : légitimité, nécessité, possibilité

    I. Légitimité

    Une identité européenne ancrée dans l’histoire et la génétique

    L’Europe est le continent des Européens. Le peuplement de l’Europe remonte à 40 000 ans avec l’expansion des peuples de chasseurs-cueilleurs. Nous, Européens contemporains, portons les mêmes gènes que les artistes pariétaux des grottes de Lascaux en France, d’Altamira en Espagne, de Hohle Fels en Allemagne ou de Fumane en Italie. Ce peuplement initial a été partiellement modifié, en particulier dans le sud de l’Europe, par l’arrivée d’agriculteurs anatoliens il y a 8 000 ans. Puis il a été complété par l’expansion des Yamnayas, un peuple de chasseurs-cueilleurs venu des steppes pontiques, il y a 5 000 ans. Une migration apportant les langues indo-européennes que nous parlons encore aujourd’hui à travers les rameaux grecs, romains, celtiques, germaniques ou slaves ; ainsi qu’une cosmogonie et une organisation sociale, la tripartition, qui n’a cessé d’irriguer la civilisation européenne, y compris après la christianisation (oratores, bellatores, laboratores).

    Si je rappelle cela – fort brièvement – c’est pour réaffirmer cette évidence : la grande ancienneté du peuplement de l’Europe par les Européens : 40 000 ans pour l’essentiel du substrat génétique, 5 000 ans pour le cœur de l’identité culturelle, 2 000 ans pour l’appartenance religieuse.

    Un peuple premier menacé

    C’est essentiel. Au moment où les conventions internationales protègent les « peuples premiers », Indiens d’Amazonie, Mélanésiens ou Wallisiens du Pacifique, il est enfin temps de défendre le droit des Européens – peuple premier d’Europe – à défendre leur droit sur leurs terres ancestrales. Le droit à défendre leur identité ethnique et civilisationnelle, le droit à refuser l’invasion de populations venues d’ailleurs. Oui, la déclaration des Nations unies (2007) sur les droits des peuples autochtones doit aussi s’appliquer aux Européens menacés par une envahissante colonisation de peuplement.

    II. Nécessité

    Une submersion démographique en cours

    À ce titre, la remigration est légitime. Elle est aussi indispensable. Tout simplement pour prévenir la submersion, éviter le devenir minoritaire des Européens sur leur propre terre.
    En France, nous avons longtemps disposé d’un indicateur de la proportion des populations extra-européennes parmi les naissances : le dépistage des nouveau-nés à la drépanocytose, une maladie génétique rare qui peut toucher les populations venues d’Afrique, du Maghreb, des Caraïbes, d’Amérique latine, d’Asie du Sud. En 2000, 20 % des naissances étaient dépistées pour cette maladie en France métropolitaine. 40 % en 2022. Et 100 % en 2024… parce que le gouvernement a décidé de casser le thermomètre et de dépister tout le monde pour éviter – je cite – les « stigmatisations » ! Reste que si les tendances actuelles se poursuivent, les nouveau-nés européens de souche seront minoritaires dans les maternités françaises en 2035 ou 2040.

    Projections inquiétantes

    Pour évaluer l’impact de l’immigration, on peut utiliser d’autres calculs et extrapoler la progression de la part de la population d’origine étrangère extra-européenne dans les différents pays d’Europe de l’Ouest. Et constater qu’à données inchangées, les Européens seront minoritaires dans certains pays à partir de 2060, en Suède par exemple.
    Ce phénomène s’explique de deux manières :
    • L’entrée d’étrangers extra-européens toujours plus nombreux ;
    • Des taux de fécondité beaucoup plus élevés chez les femmes non européennes, en particulier chez les primo-arrivantes.
    Il est à noter que même sans entrées nouvelles, les populations étrangères extra-européennes ont vocation à croître par simple dynamique interne.

    Si l’on veut que les Européens – peuple premier de l’Europe – restent maîtres de leur destin, il n’y a donc pas d’autre option que la remigration.

    III. Possibilité

    Fermeté et progressivité

    Légitime et indispensable, la remigration est possible, contrairement à ce qu’affirment les artisans du malheur de l’extrême gauche ou les modérés intimidés.
    Comment ? En procédant de manière progressive.
    Ex. : expulsant d’abord les clandestins et les délinquants. Pourquoi est-ce essentiel de commencer par eux ? Parce que, comme l’a bien vu l’écrivain français Renaud Camus, l’homme du constat du Grand Remplacement, les délinquants sont le bras armé du colonisateur. Si on les met hors d’état de nuire et qu’on les expulse, tout devient possible.
    Ensuite, il faut renvoyer ceux qui ne vivent que d’aides sociales et d’allocations. Cela fait du monde dans nos pays à l’État-providence généreux. Rien n’interdit non plus de ne pas renouveler à leur expiration – voire d’interrompre – les titres de séjour imprudemment attribués à certains ressortissants des nationalités les moins désirables.

    Restera un dernier problème, le plus sensible : que faire des non-Européens présents depuis deux ou trois générations sur notre sol ? La question est plus délicate, d’autant que dans de nombreux pays – la France, la Belgique, la Grande-Bretagne, mais aussi l’Allemagne – certains ont pu acquérir la nationalité du pays d’accueil.

    Il faut, me semble-t-il, distinguer trois catégories :
    • Ceux qui ne sont pas assimilés et qui développent une attitude hostile au pays qui les a accueillis ;
    • Ceux qui, sans être assimilés, respectent les mœurs et les hommes et les femmes du pays d’accueil ;
    • Ceux qui sont assimilés.

    Le renvoi des hostiles – y compris en leur retirant une nationalité qu’ils usurpent – doit être une priorité. Car leur hostilité en fait, là aussi, les soldats du colonisateur. Un colonisateur qu’il faut désarmer par une répression sans faille de ses délinquants. Et ce, quelle que soit leur nationalité.
    À contrario, les descendants d’étrangers pleinement assimilés méritent la nationalité qu’eux et leurs parents ont acquise.

    Voilà quelles me paraissent être les grandes lignes d’une politique de reconquête de l’Europe par les Européens.

    IV. L’Union européenne et la souveraineté

    Identitaires européens, unissez-vous

    Un dernier point mérite d’être abordé. C’est celui de l’Union européenne. Beaucoup d’entre nous ont, c’est bien légitime, un tropisme souverainiste. Mais ce serait une erreur de croire que l’Union européenne est seule responsable. Comme si Macron valait mieux que Delors, ou Merkel et Merz mieux que Von der Leyen. Idéologiquement, ce sont les mêmes !

    Des pays comme la France, les Pays-Bas, la Grande-Bretagne ont engagé des politiques immigrationnistes bien avant que l’Union européenne ne s’en mêle, dès les années 1970, alors même que l’Union européenne n’a acquis la compétence sur l’immigration que dans les années 2000/2010. L’Union européenne peut être un accélérateur, elle n’est pas la cause. D’ailleurs, la Suisse, la Norvège et l’Islande ont des problèmes d’immigration comparables sans être dans l’Union européenne. Et le Brexit n’a pas amélioré, bien au contraire, la situation de la Grande-Bretagne.

    Tout simplement parce que dans tous nos pays, les juges – avec ou sans l’Union européenne – ont pris le pouvoir. C’est ainsi qu’au nom de principes généraux, de conventions internationales et d’inventions jurisprudentielles, nos pays sont passés d’un droit de l’immigration à un droit à l’immigration. D’un droit de l’immigration qui faisait prévaloir l’intérêt général du pays à un droit à l’immigration qui se place exclusivement du point de vue de l’intérêt du migrant : on l’a vu avec le changement de la nature de Frontex, passé d’organisme de protection des frontières à celui d’accueil des migrants.

    Il faut changer de logiciel, rendre aux citoyens leur souveraineté, rétablir le droit des peuples européens à préserver leur identité, reprendre le pouvoir aux juges et fonder un droit de la remigration.
    Ne nous y trompons pas : une telle entreprise ne sera pas possible dans un seul pays. Elle ne sera possible que si un mouvement de fond traverse le continent. Les Européens doivent réacquérir leur identité. C’est un combat essentiel, mené en France par l’Institut Iliade, en Italie par l’Institut Enéide, en Espagne par l’Institut Charles Quint. Cette réappropriation est essentielle. Identitaires européens, unissez-vous !

    Jean-Yves Le Gallou (Polémia, 17 mai 2025)

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  • Passeurs culturels et politiques du fascisme italien en Europe: 1922-1943...

    Les Presses universitaires de Rennes ont récemment publié Passeurs culturels et politiques du fascisme italien en Europe : 1922-1943, un hors-série de la Revue d'histoire politique dirigé par Olivier Dard et Jérémy Guedj.

    Professeur d'histoire contemporaine à l'université de Paris-Sorbonne, Olivier Dard est l'auteur de nombreux ouvrages, dont Voyage au coeur de l'OAS (Perrin, 2005), Charles Maurras - Le maître et l'action (Armand Colin, 2013) ou, avec Jean Philippet, Février 1934 - L'affrontement (Fayard, 2024).

     

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    " Le fascisme s’est d’abord pensé comme un mouvement italien, mais il a rapidement regardé au-delà de ses frontières pour devenir un phénomène européen. En 1932, à l’occasion des dix ans de la « marche sur Rome », Mussolini pouvait même fièrement prophétiser : « Dans dix ans, l’Europe sera fasciste ou fascisée. » L’Italie fasciste s’est donc dotée, dès les années 1920 et encore plus dans la décennie suivante alors que le nazisme la concurrençait sérieusement, de relais et d’organisations affirmant sa présence dans le monde, à commencer par l’Europe. Elle parvint à mettre en place de nombreux réseaux d’influence et de propagande s’adressant aux Italiens comme à tous les Européens qui avaient de la sympathie pour le fascisme ou pour l’Italie. C’est à ces « passeurs » individuels et collectifs, qui agissaient dans les sphères politiques et culturelles, que s’intéresse ce hors-série. De l’Espagne à la Roumanie, en passant par l’Allemagne et la France, il vise à retracer les trajectoires de celles et ceux qui firent du fascisme un mouvement transnational, s’affranchissant des frontières pour créer un espace politique et culturel commun, à l’heure où le modèle italien était considéré comme une alternative à des démocraties fragilisées. Célèbres ou obscurs, ces « passeurs » répondaient à des motivations et objectifs variés. Ils devinrent les agents d’une Internationale informelle et d’une autre Europe, dont Rome aurait été l’épicentre. "

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  • Fabrice Leggeri : "L’UE a encouragé l'arrivée de millions de migrants !"

    Le 17 mai 2025, Garen Shnorhokian recevait, dans la matinale de Frontières, Fabrice Leggeri, ancien directeur de Frontex et eurodéputé du RN, pour évoquer avec lui  la politique migratoire de l'Union européenne.

     

                                             

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  • Les belles-mères sont-elles de droite ?...

    Les éditions de La Nouvelle Librairie viennent de publier un nouveau recueil de chroniques ironiques et désopilantes de Richard de Seze intitulé Les belles-mères sont-elles de droite ? - Nouvelles considérations essentielles. Directeur de la rédaction de Radio Courtoisie, Richard de Seze est déjà l'auteur de Le rond de serviette est-il de droite ? - Et autres considérations essentielles (La Nouvelle Librairie, 2022).

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    " Le brushing est-il plus réactionnaire que les canifs ? La chaise longue cache-t-elle un conservatisme rampant ? Le risotto est-il un plat identitaire ? Sans oublier cette question cruciale : les belles-mères sont-elles de droite ? Dans ce deuxième volume aussi rigoureux que farfelu, Richard de Seze poursuit son exploration méthodique des objets, gestes, concepts et figures de notre quotidien à la lumière d’un impératif catégorique : savoir ce qui est de droite – et agir en conséquence. Car à l’heure où le ticket de caisse ou le béret deviennent sujets à polémique, l’innocence n’est plus une option. Tour à tour traité d’ontologie politique, manuel de savoir-vivre idéologique et anthologie du bon sens ironique, Les belles-mères sont-elles de droite ? nous offre une boussole facétieuse pour s’orienter dans le flou de l’époque. Un livre à glisser dans votre sac de plage, votre cartable ou votre serviette en cuir – selon que vous êtes de gauche, du centre ou de droite. "

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  • Turbo-capitalisme financier: comment tout nous est volé...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Diego Fusaro, cueilli sur Euro-Synergies et consacré au capitalisme financiarisé. Élève de Costanzo Preve, philosophe et essayiste, Diego Fusaro est une des figure intellectuelle de la mouvance populiste italienne.

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    Turbo-capitalisme financier: comment tout nous est volé

    Le turbo-capitalisme financier pourrait être décrit comme une industrie extractive, bien que sui generis. Il s'agit en effet d'un puissant appareil d'abstraction, de centralisation et de captation des biens communs et de la valeur sociale, selon la figure de « l'accumulation par dépossession » évoquée par David Harvey dans Une brève histoire du néolibéralisme, en référence au paradigme néolibéral et à la transition entre le capitalisme producteur manufacturier bourgeois et le capitalisme prédateur financier post-bourgeois.

    Cette accumulation se fait souvent avec la médiation du gouvernement dans sa version libérale, par des manœuvres telles que le remplacement des organismes de retraite par des assureurs privés, ou encore par le dé-financement du secteur public. Le crédit est ainsi présenté comme le principal système par lequel le turbo-capital financiarisé peut extraire la richesse de la population. Il utilise de multiples stratagèmes pour mettre en œuvre son projet d'extraction des richesses et d'expropriation de l'argent au profit de la classe dirigeante déjà hyper-possédante. Tous s'articulent autour de pratiques prédatrices astucieuses qui s'appuient formellement sur la loi, en la rédigeant ex novo ou en la pliant simplement à leurs interprétations, de manière à garantir de manière stable - pour parler comme Thrasymaque (La République, 339a) - « l'intérêt du plus fort ». Ainsi s'expliquent les taux d'intérêt usuraires des cartes de crédit, les saisies d'entreprises privées de liquidités en cas de difficultés, la promotion de l'actionnariat, la fraude aux entreprises, la manipulation des marchés et l'utilisation de systèmes pyramidaux comme la fameuse « pyramide de Ponzi ».

    Pour reprendre le titre du chef-d'œuvre de Weber, on pourrait à juste titre parler d'accumulation par expropriation et du nouvel esprit de l'ordre capitaliste. Cette dépossession ne se limite d'ailleurs pas aux leviers de l'extraction financière, mais se détermine - explique Harvey - également dans de nombreuses autres figures connexes (« privatisation », « gentrification », « réclusion de masse ») ; au premier rang de celles-ci - surtout après 1989 et l'effondrement du Weltdualismus (dualisme mondial) - figure le retour de l'impérialisme atlantiste sous ses formes les plus brutales. Harvey lui-même le reconnaît dans Perpetual War (2003) et, à côté de lui, Giovanni Arrighi dans The Long Twentieth Century (1994) et dans Adam Smith in Peking (2007) : hors des frontières de l'Occident, le capital utilise à nouveau la violence de l'expropriation directe, appelée pieusement « privatisation », sous des formes qui ne sont pas si différentes de celles étudiées par Marx, à propos de l'« accumulation originelle », dans le chapitre 24 du premier livre du Capital. Marx lui-même, en revanche, nous enseigne que « l'hypocrisie profonde et la barbarie intrinsèque de la civilisation bourgeoise apparaissent devant nous sans voile lorsque de la métropole, où elles revêtent des formes respectables, nous tournons les yeux vers les colonies, où elles sont nues ».

    A titre d'exemple, il suffit de rappeler le travail de la civilisation du dollar dans l'Irak occupé par les troupes de l'impérialisme en 2003. Le politicien Paul Bremer a publié quatre ordonnances prévoyant la privatisation totale des entreprises d'État, la propriété privée totale des activités économiques irakiennes par des sociétés étrangères, le rapatriement total des bénéfices réalisés par les sociétés étrangères, l'ouverture des banques irakiennes au contrôle étranger, l'égalité de traitement entre les sociétés étrangères et les sociétés nationales et la suppression de la quasi-totalité des obstacles au commerce. Le premier laboratoire de ces stratégies soutenues par Washington avait été le Chili de Pinochet.

    En résumé, l'oligarchie ploutocratique néolibérale se présente comme une aristocratie extractive, puisqu'elle s'enrichit en extrayant la richesse du corps social sans contribuer d'aucune manière à sa production. Elle apparaît ainsi, à toutes fins utiles, comme la Parasitenklasse (classe parasitaire) évoquée par Marx. L'accumulation par dépossession - ou, si l'on préfère, « l'accumulation dominée par la finance » (finanzdominierte Akkumulation) - propre à la phase absolue, repose sur l'hypothèse que la forme la plus rapide et la plus immédiate d'enrichissement consiste à soustraire de la richesse ou, plus précisément, à l'extraire par la contrainte: cela s'obtient, concrètement, en spoliant les épargnants et les investisseurs, en vidant les banques (après avoir empêché l'utilisation des liquidités et, donc, la fuite de l'épargne), en pillant les « actifs » (les « assets », comme les appelle le néo-langage) des entreprises et des Etats par le recours à des emprunts meurtriers.

    In specie, le système de crédit tisse une toile d'obligations pour le débiteur de telle sorte que, finalement, la personne endettée n'a pas d'autre choix que de céder ses droits de propriété au prêteur. Cette stratégie, en revanche, était déjà connue de Marx, qui la mentionne fréquemment dans le troisième livre du Capital. Par exemple, lorsque des hedge funds - fonds spéculatifs - prennent le contrôle d'entreprises pharmaceutiques, ils achètent d'immenses quantités de maisons saisies et les mettent ensuite à la disposition des consommateurs qui en ont besoin à des prix exorbitants, organisant scientifiquement l'accumulation par l'expropriation. Il arrive souvent, en effet, que les crises laissent dans leur sillage une masse d'actifs dévalués, qui peuvent ensuite être obtenus à des prix avantageux par ceux qui ont les liquidités pour les acheter : c'est ce qui s'est passé en 1997-1998 en Asie de l'Est et du Sud-Est, lorsque des entreprises parfaitement saines ont fait faillite par manque de liquidités et ont été rachetées par des banques étrangères, pour être ensuite revendues avec des profits impressionnants.

    Si la bourgeoisie entrepreneuriale générait la richesse par le travail et son exploitation, les élites mondialistes sans frontières s'enrichissent par la dépossession aux dépens des travailleurs et des classes moyennes non libéralisées. Elles extraient la richesse du corps social productif et ne contribuent pas à la production de cette richesse : en d'autres termes, elles ne participent pas au travail qui la produit, ce qui les rapproche - mutatis mutandis - de l'ancienne aristocratie de l'Ancien Régime. Les maîtres de la finance techno-féodale, qui gèrent la création monétaire privée à des fins privées (cachées et exemptes de toute responsabilité), dirigent la domination parasitaire et extractive du produit et du travail d'autrui. En vue de cet objectif conforme à leur domination de classe, les globocrates - habitués à vivre « sur l'argent des autres », pour reprendre la formule de Luciano Gallino - opèrent le détournement prédéterminé du crédit de l'économie productive vers la finance spéculative, processus qui est suivi par la désindustrialisation, le désinvestissement, la baisse des salaires et les licenciements.

    Les classes moyennes et populaires, quant à elles, sont contraintes de travailler et de payer des impôts très élevés pour enrichir une classe financière mondiale qui a le monopole de la création des symboles monétaires et qui, en échange de ses prêts, retient, sous la formule de l'intérêt usuraire, une grande partie du produit du travail. La finance elle-même, dans sa dynamique essentielle, opère en favorisant le passage de la fabrication bourgeoise à l'hégémonie des multinationales post-bourgeoises et de leurs monopoles. Cela conduit à cette inversion mortelle entre la finance et l'industrie déjà décrite, dans ses caractéristiques les plus particulières, par Lénine et, bien que d'une manière différente, par Rudolf Hilferding dans son Finanzkapital (1923).

    Tous deux, bien que dans des perspectives différentes, avaient pleinement décrypté le quid proprium du capital financier et son remplacement de la primauté des industriels par celle des banquiers. L'industriel bourgeois est impliqué et proche des processus productifs, et dirige la coopération (dans le chapitre XXIII du Capital, Marx utilise l'exemple du chef d'orchestre) ; le banquier, en revanche, est éloigné de la production et n'est pas lié à ses éventuelles tragédies (en fait, il a souvent tout intérêt à ce qu'elles se produisent).

    Comme toutes les activités de rente, la finance fonctionne aussi selon la figure de l'actio in distans: elle s'abstrait de la production et gouverne à distance, sans se montrer, en agissant de manière parasitaire par rapport à la production réelle et à la société dans son ensemble. La finance, en outre, ne s'intéresse pas à la construction de la stabilité et, en fait, vit de l'instabilité et de la précarité, selon les fondements de la nouvelle forme d'accumulation flexible que nous avons analysée dans notre livre Histoire et conscience du précariat (Ed. esp. 2021).

    Contrairement à ce que le regard idéologiquement contaminé détecte habituellement, le capital financier n'opère pas dans une terra nullius indéterminée, ni ne génère de la richesse à partir de rien : en réalité, il extrait de la valeur du bien commun de la société et, en général, de la « classe qui vit du travail », c'est-à-dire du serf précarisé. Le capital financier liquide se présente ainsi comme un puissant appareil d'expropriation faussement anonyme. Il opère en transférant des biens publics tels que les chemins de fer et l'eau, les lignes téléphoniques et le patrimoine culturel dans des mains privées, libérées de toute localisation nationale. On peut également en déduire l'analogie avec les processus d'« accumulation originelle » décrits par Marx dans Le Capital.

    Ce n'est qu'à cette lumière que l'on peut expliquer la soi-disant crise américaine de 2007, ainsi que - pour rester en Europe - la perte d'environ quarante pour cent du pouvoir d'achat du peuple italien avec le passage de la lire à la monnaie unique de l'euro (on peut dire à peu près la même chose du peuple espagnol). Le capitaliste bancaire-monétaire apparaît comme un faiseur d'argent et, en même temps, comme un donneur d'argent : il crée de l'argent ex nihilo et le prête dans le but évident d'endetter les « bénéficiaires ». Elle prélève non seulement les fruits du travail, mais aussi l'épargne de l'ensemble de la classe dominée.

    Par essence, la finance produit de la « richesse » en créant de l'argent à coût nul. Mais en réalité, elle crée du papier et non de la richesse : avec la conséquence évidente que la richesse qu'elle obtient doit être soustraite, par des impôts et des artifices usurocratiques, à ceux qui la produisent réellement, c'est-à-dire au précariat en tant que classe qui vit du travail. Dans son aspiration à dominer la planète entière au nom du profit et de la croissance infinie, la classe mondiale des seigneurs de la finance a imposé des modifications de la fiscalité à son profit exclusif. En Occident, la progressivité de l'impôt diminue progressivement, depuis 1989, au fur et à mesure que l'on s'élève dans la hiérarchie des comptes bancaires. La classe moyenne bourgeoise en voie d'illicitisation se voit prélever en moyenne 45% de ses modestes revenus. Bref, dans une synthèse plausible, alors que le travail est de plus en plus taxé, la spéculation financière et les grandes affaires de l'aristocratie financière restent non taxées et non contrôlées, le plus souvent sous la forme d'une véritable légalisation de l'évasion fiscale.

    De leur côté, les multinationales, leurs actionnaires et leurs PDG paient des impôts fixés à des chiffres dérisoires, allant régulièrement de 1 à 5% (et qu'ils évitent, quand ils le peuvent, en utilisant les « paradis fiscaux »). Tout employé du colosse Amazon est taxé dix fois plus que la même multinationale multimilliardaire pour laquelle il travaille. Sous cet aspect, la lutte contre l'évasion fiscale, toujours invoquée comme une figure de la justice universelle, est ponctuellement menée par l'Etat libéral contre les classes moyennes et populaires au profit de la classe financière mondiale. Loin d'être une garantie de justice universelle, la « lutte contre l'évasion fiscale », telle qu'elle est gérée par l'ordre néolibéral, apparaît comme l'un des nombreux instruments du massacre des classes opéré par les cagoulards de la finance et par l'Etat libéral à leur service.

    En témoigne le fait que la possibilité d'évasion fiscale des classes moyennes et populaires, quand elle n'est pas rendue impossible par une fiscalité qui pille les salaires avant même qu'ils ne soient perçus (c'est le cas de l'emploi public, en voie de démantèlement au nom de la raison libérale), est poursuivie comme une règle de droit, là où l'évasion des géants du commerce cosmopolite, des usuriers de la finance spéculative et des multinationales massives, est admise comme une règle de droit. Cela confirme, pour la énième fois, que le droit, dans l'ordre des rapports capitalistes, ne garantit pas la justice universelle, mais les intérêts de la classe dominante, dont il « juridifie » et « légalise » la domination.

    Diego Fusaro (Euro-Synergies, 16 mai 2025)

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  • Décadence ?...

    Le numéro 58 de la revue Krisis, dirigée par Alain de Benoist, avec pour rédacteur en chef Thomas Hennetier, vient de paraître. Cette nouvelle livraison est consacrée à la question de la décadence...

    Vous pouvez commander ce nouveau numéro sur le site de la revue Éléments.

    Bonne lecture !

     

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    Au sommaire :

    Entretien avec Pierre-André Taguieff / « La grande illusion est de croire qu’on ne peut en finir avec le catéchisme progressiste qu’en adoptant le catéchisme décliniste. »

    Jerónimo Molina / Une « banalité oubliée » : la décadence selon Julien Freund.

    Michel Lhomme / La décadence, dernière catin de l’extrême dévastation.

    David Engels / L’Europe du xxie siècle entre Rome et la Grèce, réflexions au sujet du déclin civilisationnel.

    Baptiste Rappin / Heidegger : décadence, nihilisme et commencement.

    Dominique Wohlschlag / René Guénon et le « kali-yuga ».

    Juan Asensio / « Les Français de la décadence » : André Lavacourt vit-il encore dans la plus secrète mémoire des hommes

    Entretien avec Michel Onfray / « La décadence advient quand la mémoire identitaire de la civilisation est perdue. »

    Document : Juvénal / Rome, sauve qui peut !

    Sylvain Gouguenheim / La fin des empires médiévaux.

    Arnaud Imatz / Hégémonie et décadence de l’empire hispanique.

    Juan Asensio / Très brève méditation sur la décadence dans quelques textes de Jean Cau.

    Philippe Barascud / Et « À rebours » fut. Huysmans et la « bible de la décadence ».

    Jacques Bressler / L’idée de décadence chez Gobineau.

    Le Texte : Edward Gibbon / Observations générales sur la chute de l’empire romain dans l’Occident.

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