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Films

  • Fight club, vingt-cinq ans plus tard...

    Nous reproduisons ci-dessous un article de Bernard Van Beuseghem, consacré au film Fight Club, que son auteur a publié dans la revue flamande TeKoS et qui a été traduit par le site Euro-Synergies.

     

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    25 ans plus tard - "Notre grande guerre est une guerre spirituelle. Notre grande dépression est notre vie" (Tyler Durden - Fight Club)

    Il y aura 25 ans cette année que Fight Club, adaptation cinématographique du roman culte de Chuck Palahniuk, est sorti en salles. Le film a suscité une énorme controverse en raison de sa violence, de la subversion du machisme par l'acteur principal Brad Pitt et de son humour noir déconcertant. L'un des éléments les plus choquants de cette grandiloquence cinématographique est sans aucun doute la provocation narrative dans laquelle l'excès de graisse des femmes aisées, aspiré par liposuccion, renaît sous la forme d'un rituel grotesque, celui des savons précieux. Satire macabre de la culture de consommation et de l'obsession de la perfection extérieure, le corps lui-même devient une marchandise, une sculpture d'autoglorification dans le temple dystopique du capitalisme. Des critiques influents comme Roger Ebert, lauréat du prix Pulitzer, l'ont qualifié de "film de stars le plus direct et le plus joyeusement fasciste depuis Death Wish". Alexander Walker l'a qualifié d'attaque intolérable contre la décence personnelle et la société elle-même.

    Malgré la déception financière au box-office, Fight Club est devenu, grâce aux ventes de DVD, un film culte, une symphonie subversive qui, 25 ans plus tard, résonne encore dans les sombres cavernes de l'esprit cinéphile.

    L'histoire

    Même dans ce crépuscule contemporain, Fight Club conserve son pouvoir inéluctable, en tant qu'artefact d'une époque particulière: les années 1990. Une période imprégnée de "fin de l'histoire", où les idéologies ont très vaguement subsisté comme des graffitis effacés sur les murs de la conscience collective. L'apogée du capitalisme, sans contrepoids, s'est répandu à travers le monde comme une ombre imparable, et Fight Club est devenu un écho de cette époque, un reflet brut du vide existentiel qui s'est manifesté au milieu de la façade clinquante de l'excès consumériste.

    L'œuvre de Palahniuk et son pendant cinématographique pénètrent le cœur sinistre d'une époque où l'individu est pris dans les paradoxes de la liberté et de l'aliénation, dans un monde où le seul "club" qui sévit est celui des consommateurs. À la fin des années 1990 aux États-Unis, le consumérisme semble proliférer comme un cancer, une entité globale qui imprègne le tissu de la civilisation occidentale au point que la publicité ne se voit plus, mais qu'elle est devenue un élément incontournable de l'atmosphère, aussi invisible et omniprésent que l'air que nous respirons sans y penser. Le narrateur, un trentenaire anonyme, dépourvu d'identité et empêtré dans les réseaux de ce qu'il décrit cyniquement comme son "cocooning Ikea", lutte contre les nuits blanches, au cours desquelles l'obsession de la multinationale suédoise pour les meubles domine ses pensées comme un mantra irrésistible. Il chuchote au spectateur la vacuité désespérante de son existence, dans laquelle l'ombre de la superficialité agit comme un compagnon constant. Le narrateur, interprété par Edward Norton, travaille comme coordinateur de "rappel" et s'occupe des réclamations, ce qui l'oblige à beaucoup voyager professionnellement. Le spectateur assiste à une succession d'aéroports, de chambres d'hôtel et de bars. Tout se ressemble. Le lecteur attentif devrait regarder le début du film et lire les premières pages de ce livre-culte que fut Le Système à tuer les peuples de feu Guillaume Faye. On y trouve de fortes et curieuses similitudes (1).

    Il y règne un individualisme pathologique, où les émotions authentiques se noient dans un océan d'aliénation. Pour le narrateur, le réveil n'est pas une transition en douceur, mais plutôt une confrontation brutale avec la réalité déchirante d'un monde où les sens sont enivrés par l'odeur enivrante de la superficialité. Son voyage commence dans l'ombre de l'anonymat, là où les autres malades du cancer des testicules s'unissent comme des guerriers silencieux dans une guerre contre un ennemi invisible. Une métaphore, implacable et tranchante comme un couteau chirurgical, de la castration que subissent les hommes dans cette société contemporaine. À l'époque, la "masculinité toxique" n'avait pas encore été élue terme hipster de l'année.

    Les rencontres avec ces guerriers anonymes constituent un rituel de renaissance, une initiation à un monde où les émotions brutes de l'existence humaine ne sont plus étouffées par le capitalisme. En embrassant des étrangers, le narrateur découvre une humanité perdue, une rébellion subtile contre l'isolement qui maintient l'homme moderne dans la prison qu'il s'est lui-même créée.

    La conscience naissante de sa propre aliénation, comme un voile qui se lève lentement, prend vie. Son alter ego, Tyler Durden (Brad Pitt), prononce des mots qui résonnent comme un écho dans les cavernes de son âme: "Les objets que nous possédons nous possèdent en fin de compte". Une révélation qui dénoue les chaînes de la possession et de la consommation, dans laquelle le narrateur se reconnaît comme une marionnette entre les mains d'un jeu capitaliste qui détermine ce qu'il possède et, en fin de compte, ce qui le possède.

    Dans ce cauchemar éveillé, le narrateur réalise que la véritable liberté ne réside pas dans l'accumulation de biens matériels, mais dans la libération de l'âme de l'emprise étouffante du culte de la consommation. Il s'agit d'une quête d'authenticité dans un monde imprégné d'illusions, où l'étreinte d'un étranger peut avoir plus de sens que le confort apparent des possessions. Face à son propre démantèlement, le narrateur commence enfin à découvrir ce que signifie être vraiment humain, dans toute sa vulnérabilité et sa beauté.

    Dans l'ombre d'un monde imprégné de dogmes capitalistes, le désir de libération germe comme une graine qui attend le bon moment pour pousser. La prise de conscience s'impose: l'identité, telle une marionnette suspendue aux ficelles des multinationales, doit être détruite pour laisser place à l'émergence d'une réalité nouvelle et brute. Mais l'esprit, englué dans l'alliance toxique du consumérisme et des antidépresseurs, se révèle un guide peu fiable dans cette quête d'une existence éveillée.

    Ce n'est donc pas sur l'esprit qu'il faut agir en premier lieu, mais sur le corps prisonnier du cocon étouffant de la consommation et de l'apathie. C'est là que commence la catharsis de la chair, une renaissance radicale qui se déploie sous la forme du Fight Club. Le refoulement de pulsions longtemps cachées devient un volcan d'émotions brutes, où le narrateur et ses compagnons brisent les normes d'une civilisation occidentale dominée par le contrôle de soi et la retenue.

    Le claquement des poings, le bruit des corps qui s'entrechoquent comme une symphonie de chaos non censuré, deviennent des rituels de rébellion contre les limites rigides d'une société qui étouffe la liberté individuelle. Dans la violence apparente du Fight Club, le narrateur découvre une forme paradoxale de maîtrise de soi, un retour aux instincts primitifs qui définissaient autrefois les humains avant qu'ils ne soient étouffés par les chaînes de la civilisation.

    La phase du Fight Club est considérée comme une auto-inflammation rituelle qui réveille le corps et le libère des entraves qui le maintenaient en cage. Mais ce n'est qu'un prélude, un prélude à un projet plus vaste, le projet "Chaos". Ici, le corps est transformé en arme, un instrument qui suscite l'émotion et transcende la raison. Dans cette révolte de la chair et des sentiments, un nouvel ordre naît, non pas de la raison, mais des forces primitives qui sommeillent dans l'ombre de l'âme humaine.

    Analyse et critique

    Inévitablement, au fil des années, nous avons eu droit à d'innombrables analyses du livre et du film. Le philosophe et sociologue Herbert Marcuse (1898-1979) et même Friedrich Nietzsche (1844-1900) y ont été mêlés comme si de rien n'était. Certains l'ont qualifié de film contre la société de consommation et ont cité le philosophe français Jean Baudrillard (1929-2007). D'autres ont qualifié le film de nihiliste, de carrément fasciste et de reflet d'un national-socialisme "à venir". Bon, mais qu'est-ce qui ne l'est pas de nos jours ?

    Ce que Fight Club nous apprend finalement, selon d'autres, c'est qu'un projet révolutionnaire sans vision réelle de ce que serait une société post-capitaliste est voué à l'échec. On fait souvent le parallèle avec le magistral Joker de Todd Philipps, sorti 20 ans plus tard. Après tout, le monde dépeint dans les deux films est aussi celui des masses à la recherche d'un leader autoritaire en temps de crise. Il est d'ailleurs frappant de constater qu'à la sortie de Joker, les opinions ont soudain commencé à changer. Soudain, il s'agissait d'un film "dangereux, sombre", etc.

    Fight Club, dans toute sa gloire sardonique, embrasse la folie comme une rencontre avec l'essence brute et non polie de l'existence. Tyler Durden, tel un mentor démoniaque, chuchote des suggestions à l'oreille du narrateur, braquant les projecteurs sur l'hypocrisie de la façade humaine. "Soyez authentique dans le monde déshumanisant du capitalisme", peut-on lire dans la philosophie intrépide qui serpente dans le film comme un œil qui cligne de l'œil. Une philosophie qui semble moins destinée à plaire qu'à provoquer. Restons-en là.

    Bernard Van Beuseghem (Euro-Synergies, 3 février 2024)

     

    Notes:

    (1) Guillaume Faye, Le Système à tuer les peuples, Editions Copernic 1981, Paris, 189 pp.

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  • Une cinémathèque idéale...

    Les éditions Critérion viennent de publier un ouvrage de Laurent Dandrieu intitulé Une cinémathèque idéale - Que regarder en famille de 5 à 16 ans.

    Critique de cinéma de Valeurs actuelles, Laurent Dandrieu est déjà l'auteur d'un excellent Dictionnaire passionné du cinéma (Editions de l'Homme nouveau, 2013).

     

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    " Regarder un film en famille est un moment privilégié pour s'amuser, s'émouvoir, s'émerveiller, réfléchir ensemble. Mais l'on peut se sentir perdu dans la masse considérable qui existe, et ne pas se sentir très sûr de leur adéquation avec ses valeurs familiales et avec l'âge des enfants. Cet ouvrage très pratique, rédigé par un critique cinéma reconnu, se propose d'aider les parents à faire le meilleur choix. Classé par genre (comédie, SF, religion, animation, etc.) et par tranche d'âge, chaque film est accompagné d'une petite notice qui en résume le contenu et en indique l'intérêt. Chaque genre est lui-même présenté avec une volonté permanente de synthèse et de clarté. Des encadrés apportent enfin quelques précisions sur des points bien précis. En résumé, un outil très maniable vraiment pensé pour les parents, afin de les aider à enrichir toute la famille, les petits comme les grands. "

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  • La Terreur, une ZAD historique pour la gauche ?...

    Vous pouvez découvrir ci-dessous un point de vue de Thierry Lentz cueilli sur Figaro Vox et consacré à la polémique montée par les médias de gauche autour du film Vaincre ou mourir, de Vincent Mottez et Paul Mignot, qui met à l'honneur le chef vendéen Charette.

    Historien, directeur de la Fondation Napoléon, Thierry Lentz est l'auteur de nombreux ouvrage sur l'Empereur et le 1er Empire, dont dernièrement Pour Napoléon (Perrin, 2021). Mais, on lui doit également une enquête passionnante sur l'assassinat du président des Etats-Unis John Kennedy ainsi qu'une étude intitulée Le diable sur la montagne - Hitler au Berghof 1922-1944 (Perrin, 2017).

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    Pour une certaine gauche, la Terreur reste une ZAD historique intouchable

    Les déconstructeurs de l'histoire de France, pour qui il n'y a en l'espèce qu'un « roman », qu'une intoxication séculaire voire un outil d'extrême-droitisation des esprits, ne dorment jamais, nous le savons. La chasse à tout ce que le général de Gaulle aurait trouvé « grand, beau et généreux » dans notre passé ne doit jamais s'arrêter. Et lorsque le cinéma produit un long métrage qui permet de cracher encore un peu plus dans la soupe nationale, la presse de gauche (qui se croit la seule à avoir de la hauteur et à parler vrai) se régale et se gargarise du « courage » du réalisateur ou de l'acteur. Foin des qualités et défauts cinématographiques ou esthétiques, pas question de tenter de trier le bon grain de l'ivraie historique : le film est forcément une œuvre qui échappe à l'examen critique et provoque l'extase obligatoire. Œuvre de l'esprit, œuvre de l'artiste car œuvre militante… du bon côté.

    Pourtant, dans ce jeu de massacre de notre histoire, il reste encore quelques ZAD auxquelles il est défendu de toucher. En histoire contemporaine, avec la révolution bolchévique et le Front populaire, la Terreur et ses œuvres sont au cœur de ce camp retranché. Ici, de vaillants et grincheux défenseurs résistent encore et toujours à la critique ou aux recherches récentes, lorsqu'ils ne nient pas des faits établis depuis des lustres. Ils sont peu nombreux et rarement à jour, mais dès qu'une proie se présente, ils sortent du bois en meute et, à la guerre comme à la guerre, ne reculent devant rien pour préserver la zone.

    On en a eu la preuve cette semaine avec la campagne menée par les médias privés et publics de gauche contre le film Vaincre ou mourir, consacré aux guerres de Vendée et à l'un de leurs « géants » (Napoléon dixit), Charette.

    Même adversaire des républicains, nul ne peut contester à François-Athanase Charette de La Contrie d'avoir été un des grands chefs vendéens lors du soulèvement de cette contrée (plus large que le département actuel) dans lequel il fut presqu'entraîné à son corps défendant. Chef courageux et généreux envers ses adversaires, il fut finalement capturé et fusillé par les « Bleus ». C'est cette épopée romantique que raconte Vaincre ou mourir. Pas de quoi fouetter un chat me direz-vous : de la guerre, de l'amour et un héros, de quoi faire un bon film. Mais il y a plusieurs hics.

    Le premier est que l'épisode des guerres de Vendée a eu lieu pendant la période de la Terreur, zone à défendre puisque c'est celle de Robespierre et de Saint-Just. Ajoutons-y que dans cette affaire, il n'y a pas de quoi glorifier la république jacobine, malgré sa victoire. Car une fois la guerre « chaude » terminée, la Convention et le Comité de Salut public ordonnèrent une impitoyable répression, avec le massacre systématique de 120 à 150 000 hommes, femmes, enfants et vieillards. Des villages furent rasés, les champs dévastés, on fusilla, on guillotina, on noya dans la Loire, on crucifia sur des portes de granges, on immola dans les églises (ce qui nous rappelle les douloureux souvenirs de la Deuxième Guerre mondiale). Ce fut ce que le révolutionnaire Gracchus Baboeuf appela un « populicide ». C'est ce que certains osent appeler un « génocide », provoquant les hauts cris des robespierristes. Traiter d'un sujet aussi sensible – est en soi une intolérable attaque contre le mythe de la Révolution en marche, la seule qui compte, celle des jacobins. Ce qui justifie donc que montent au créneau quelques gardes rouges journalistiques, plein de certitudes et vides des connaissances de base sur l'épisode.

    Ils se sentent d'autant plus en mission – voici notre deuxième hic - que la société de production à l'origine de ce petit film à 4 millions de budget est une filiale du Puy du Fou, l'extraordinaire parc historique et culturel créé par Philippe de Villiers et dirigé par son fils Nicolas. Il n'en faut pas plus pour hurler à la contre-révolution pis : à la zémmouri-lepénisation des esprits. Puisqu'il y a du Puy du Fou dans l'affaire, le film est forcément mensonger, bassement politique et subversif. Et le chœur des vierges rouges-vertes d'entonner un chant qui, dans leur gorge, sonne faux : défendons l'histoire de France, la vraie, la seule, la révolutionnaire ! On pourra ainsi lire dans un récent numéro de Libération, élégamment titré « Le Puy du Fourbe », un amoncellement de billevesées où l'erreur historique et la méchanceté gratuite en disputent aux arguments wokes les plus inattendus sur un tel sujet. Un régal pour les Insoumis et les Verts qui ont fait de Robespierre leur héros absolu (après avoir abandonné Trostky et Mao). Leurs féaux socialistes emboîtent le pas, tandis que la radio publique, qui s'était mise en quatre pour le film Tirailleurs, fait comme si Vaincre ou mourir était un simple documentaire égaré dans les salles obscures et indigne du prix d'une entrée.

    Si le film, par manque de moyens, n'est pas exempt de critiques esthétiques, si le choix de l'ouvrir par des interventions contemporaines rend le tout un peu inhabituel, on ne voit pas pourquoi ses thèses – d'ailleurs acceptables pour un historien - auraient moins droit de cité que celles d'autres productions cinématographiques.

    On devrait même se réjouir qu'enfin, le cinéma français traite un sujet pareil, ne serait-ce que pour continuer la discussion sur ces terribles et peu reluisantes guerres et exactions de Vendée. Mais la ZAD de la Terreur, sachant sa position historiquement faible, ne voudra jamais en entendre parler. C'est la seule chose qui est sûre.

    Thierry Lentz (Figaro Vox, 26 janvier 2023)

     

                        

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  • Wakanda...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue publié sur le site Idiocratie et consacré à Black Panther - Wakanda forever la dernière production en date des studios Marvel, instruments du soft power américain...

     

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    Wakanda

    Le ridicule ne tue pas, sauf entre les mains des Etats. Là, il devient assurément une arme létale, d’autant plus mortelle qu’elle se confond avec un instrument de divertissement, partagé par la planète entière. En 1990, le politologue Joseph Samuel Nye théorise le concept de softpower et le définit comme la capacité d’un Etat à obtenir ce qu’il souhaite d’un autre Etat, ou à faire en sorte que cet autre Etat veuille la même chose que lui sans le contraindre. A la différence de la propagande, qui ne s’embarrasse pas de subtilité et qui est le fait d’un gouvernement, le softpower prend les formes les plus diverses et est construit par de multiples acteurs, étatiques ou non. A l’ère de l’information de masse, le cinéma est un instrument privilégié du softpower et la franchise de films MCU – pour Marvel Cinematic Universe – produite par les studios Marvel, propriété de Walt Disney, constitue sans nul doute le navire amiral de la flotte de guerre culturelle hollywoodienne. En un peu plus de vingt ans et plus de trente films, la franchise Marvel a rapporté plus de trente milliards de dollars et rendu la planète accro aux super-humains bodybuildés en collants. Après avoir essoré les superstars comme Spiderman ou Iron Man, les studios Marvel doivent désormais aller piocher parmi les seconds couteaux, tout en s’efforçant d’être dans l’air du temps. Depuis quelques années déjà, la mode est à la cancel culture et le fond de l’air est woke. La Panthère noire (« Black Panther » en version originale), super-héros créé par le scénariste Stan Lee et le dessinateur Jack Kirby et apparu pour la première fois dans le 52e opus des aventures des Fantastic Four en juillet 1966, était donc le candidat parfait pour incarner le nouveau super-symbole conscientisé de l’ère Trump. 

    Le softpower américain est un instrument économique, géopolitique et idéologique, soigneusement calibré pour répondre aux attentes du public américain. En 1954, quand le magazine de comics Jungle Tales présente le héros « Waku, le prince Bantu », son éditeur, Atlas Comics (nom utilisé par Marvel Comics à l'époque), suit avec précision l’actualité du moment et le combat pour les droits civiques. En 1966, l’héritier de Waku, rebaptisé « Black Panther », s’adresse directement aux lecteurs noirs américains en mettant en scène ce super-héros qui règne sur le Wakanda, royaume imaginaire situé en Afrique, très avancé technologiquement, seul endroit au monde possédant des mines de vibranium, métal extrêmement rare aux propriétés fantastiques. Dans les années 1960, cette Panthère Noire rencontre un tel succès auprès du lectorat afro-américain qu’elle aurait même inspiré le nom du Black Panther Party, créé en octobre 1966. Cinquante ans plus tard, la Panthère noire a donc logiquement repris du service pour coller à une autre actualité, celle de #metoo et Black lives Matter. Et le pari de Marvel a été payant. Le film Black Panther, sorti en 2018, a été un succès planétaire. Il a coûté 200 millions de dollars et en a rapporté 1,3 milliard et son protagoniste principal est devenu une icône pop culture du nouveau combat pour les droits civiques dans le climat de tensions ethniques et de violences qui a marqué le mandat de Donald Trump.

    En 2022, Marvel tente de rééditer l’excellente opération commerciale du premier film. Malheureusement, l’acteur principal, Chadewick Boseman, interprète du roi T’Challa, souverain du Wakanda, alias The Black Panther, est tragiquement décédé en août 2020 d’un cancer du côlon. Qu’à cela ne tienne, le nouvel opus de Black Panther sera non seulement un film de super-héros afro-américains mais également dominé par les femmes. Et les nouveaux ennemis du Wakanda sont les anciennes puissances coloniales qui tentent de lui voler son vibranium. Nous ne gâcherons pas la surprise des quelques lecteurs qui n’auraient pas encore vu Black Panther : Wakanda Forever (c’est le titre) en révélant que l’on apprend dès le début du film le nom de cette odieuse nation sans foi ni loi : la France. La toute première scène du film montre les forces spéciales françaises qui tentent de s’attaquer à une base avancée du Wakanda… au Mali. Confrontés aux fières guerrières wakandaises, les soldats de l’ancienne puissance coloniale sont facilement vaincus et capturés et amenés pieds et poings liés face à l’assemblée des Nations-Unies devant laquelle ils sont forcés de se mettre à genoux. 

    Avec beaucoup de cynisme et fort peu de nuance, les studios Marvel s’efforcent de séduire un public soucieux de saupoudrer la bûche de Noël hollywoodienne d’une pincée de conscientisation ethno-différentialiste et soi-disant anticoloniale. L’industrie du cinéma a la mémoire courte évidemment et on se souviendra qu’il y a vingt ans, en 2003, c’est un autre héros de comics, Captain America, qui traitait les Français de lâches, pour avoir eu l’audace de refuser de soutenir l’intervention de l’Oncle Sam en Irak. Bien sûr, en refourguant aussi grossièrement leur clinquante camelote, les studios Marvel insultent la mémoire des 58 soldats français, tués au cours des opérations Serval et Barkhane au Mali, dont le sacrifice a permis d’éviter la contagion islamiste dans toute l’Afrique de l’ouest et au Mali de conserver son intégrité territoriale, mais Marvel estime peut-être que la présence des mercenaires de Wagner est préférable à celle des soldats français au Mali…Le softpower des studios Marvel n’est, certes, pas directement responsable de la mort de 58 soldats français au Mali mais pour des raisons bassement mercantiles, dissimulées derrière le politiquement correct le plus lourdaud qui soit, il insulte la mémoire de ceux qui sont morts entre autre pour que les films de merde de la Marvel puissent être projetés dans les salles de cinéma de Tombouctou, tant que les islamistes d’AQMI n’ont pas encore mis la main dessus. Souhaitons aux maliens de trouver leur bonheur avec les miliciens de Wagner maintenant que l’odieuse ex-puissance coloniale a plié bagage.

    Des idiots (Idiocratie, 21 janvier 2023)

     

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  • Objectif 500 millions !...

    « On n'est pas encore mort ! Et le diable marche avec nous... »

    « Il n'y a que trois métiers pour un homme : roi, poète ou capitaine... »

    « Il y a longtemps que nous sommes rentrés dans le royaume de la mort... »

    Propos du capitaine Reichau dans Objectif 500 millions

     

    Les éditions Studio Canal viennent de rééditer Objectif 500 millions, un film de Pierre Schoendoerffer, avec Bruno Cremer. La réédition est accompagnée d'un commentaire passionnant de François Angelier. Le film est sombre et tendu, et, d'une certaine manière, prolonge La 317e section. On y retrouve Bruno Cremer, remarquable, dans le rôle du capitaine Reichau, un guerrier de la trempe de l'adjudant Willsdorf, passé, au sortir de la guerre d'Indochine, par l'Algérie, le putsch, les commandos Delta de l'OAS et la prison...

    PS : Il y a bien un lien formel avec La 317e section, puisque le personnage de Delpierre, le pilote du Dakota de Royal Air Cambodge qui approvisionnait par parachutage la section du lieutenant Torrens, intervient dans le scénario...

     

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    " Incarcéré pour avoir pris part au putsch de 1961, le capitaine Reichau, un ancien d'Algérie, recouvre la liberté. Douard, un ami qui a servi sous ses ordres, lui offre son aide, en vain. Puis une jeune femme, Yo, lui propose de participer à un hold-up, mais l'affaire se révèle plus compliquée que prévu... "

     

     

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  • J'ai nom Jeanne la Pucelle...

    Les éditions Artus viennent de publier en DVD le film de Walter Ucicky intitulé Jeanne d'Arc (Das Mädchen Johanna), produit par les studios UFA et sorti en 1935. Le DVD est accompagné d'un livret de 80 pages de David Didelot, « J'ai nom Jeanne la Pucelle ». Une "réussite esthétique indéniable", comme l'écrivait Jacques Siclier, en 2006, dans Le Monde, qui mérite d'être découverte !

     

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    A la fin de la Guerre de Cent ans, la France va de défaites en défaites face aux Anglais. Seule la ville d’Orléans résiste, défendue par La Trémoille, Dunois, et d’Alençon. A Domrémy, en Lorraine, une jeune fille de 17 ans, Jeanne, entend la voix de l’archange Michel. Il lui dit d’aller retrouver le dauphin Charles pour le faire couronner à Reims. Après le sacre, lui seul pourra bouter les Anglais hors de France.

     

                                                          

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