Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

etats-unis - Page 68

  • La vraie cause de la crise ukrainienne : la guerre économique ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Guillaume Faye, cueilli sur son site J'ai tout compris et consacré aux causes de la crise ukrainienne.

     

    Obama Barroso.jpg

    Vraie cause de la crise ukrainienne : la guerre économique

    Les sanctions économiques stupides contre la Russie prises par les USA et l’Union européenne sont une énorme erreur qui va d’abord nuire à l’Europe et surtout… à la France. Elles sont un moyen pour Washington de casser le lien économique euro-russe en construction. Voilà les vraies raisons, économiques, de la crise ukrainienne, provoquée par l’Occident (USA et EU soumise) à son bénéfice.  

    Les sanctions anti-russes (complètement contraires au droit international, par ailleurs) nuisent d’abord à l’économie russe, qui souffre de son manque de diversification et de sa trop grande dépendance du secteur énergétique pétrogazier, en favorisant une fuite des capitaux russes. La Banque centrale russe a déjà enregistré 50 milliards de dollars d’actifs désertant Moscou. (1)

     Les États-Unis poussent à l’accord de libre-échange avec l’UE, accord inégal qui les favorisera grandement, et que la Commission européenne n’ose pas contrecarrer. Leur but est d’éviter à tout prix  une zone de libre échange euro-russe incluant l’Ukraine, et la naissance d’un espace économique continental euro-russe qui pourrait marginaliser et affaiblir la position économique dominante américaine.

    L’accord d’association entre l’Union européenne et l’Ukraine, concocté par la Commission européenne sans mandat clair, fut la provocation  qui déclencha la crise actuelle (voir autres articles de ce blog). Cet accord était économiquement irréalisable, invivable, l’Ukraine n’étant même pas au niveau économique d’un pays émergent. Il violait des conventions passées entre la Russie et l’Ukraine. La crise fut déclenchée lorsque, sous pression du Kremlin, l’ancien pouvoir de Kiev revint en arrière et renonça à l’accord proposé par Bruxelles. Le nouveau pouvoir ukrainien russophobe par idéologie (illégitime au regard du droit international puisque issu d’un coup d’État) entend reprendre cet accord absurde avec l’UE. Les mesures russes de rétorsion contre l’Ukraine (fin du tarif gazier préférentiel et facturations rétroactives) semblent peut-être dures mais elles sont conformes à toutes les pratiques commerciales internationales, par exemple celles qui ont toujours été pratiquées par l’Opep – Organisation des pays exportateurs de pétrole.

    Petit rappel historique : début 2012, une zone de libre échange euro-russe avait été programmée par Paris et Moscou, avec l’accord du gouvernement Sarkozy et du Kremlin, incluant l’Ukraine et la Communauté des États indépendants (CEI). Berlin était d’accord, vu que l’Allemagne est dépendante du gaz russe et investit énormément en Russie. Mais Washington et Londres étaient très inquiets, vieux réflexe géopolitique anglo-saxon. D’autant plus que la France avait passé des accords d’exportation de navires militaires de type BPC Mistral avec la marine russe, ce qui constitue pour l’Otan une entorse aux règles implicites, une ligne rouge à ne pas franchir.

    La Russie était d’accord pour entrer dans l’Organisation mondiale du commerce en échange d’un partenariat privilégié avec l’UE.  Cet objectif est inacceptable pour Washington : en effet, les Américains exigent la signature de l’accord (inégal) de libre échange avec l’UE qui favorise tous leurs intérêts.

    En décembre 2012, Manuel Barroso, président de la Commission européenne,  a rejeté la proposition de M. Poutine d’une zone de libre-échange euro-russe incluant l’Ukraine ; puis, il a proposé  à l’Ukraine de s’associer à l’UE pour une future adhésion, solution qu’il savait impossible. Mais Manuel Barroso, outrepassant ses fonctions et violant juridiquement son mandat, est-il un simple agent de Washington ? N’aurait-t-il pas volontairement provoqué la crise, afin de briser dans l’œuf une union économique euro-russe ?  

    Les intérêts économiques européens en Russie  dépassent de très loin ceux des USA, ce qui dérange ces derniers. La moitié des investissements en Russie sont européens. Même proportion pour les exportations russes.

    Les sanctions contre Moscou, décidées en fait à Washington et à Bruxelles – l’UE jouant le rôle peu reluisant de filiale des USA –  vont d’abord nuire aux investissements européens et français en Russie et à leurs exportations industrielles et de services. Les sanctions anti-russes risquent de mettre en péril non seulement les importations vitales de gaz russe mais de nombreuses participations françaises dans l’économie russe : industries ferroviaire, automobile, pharmaceutique, travaux publics, luxe, viticulture, aéronautique, agro-alimentaire, grande distribution, défense. Au moment même où la France a un besoin vital d’exporter pour rééquilibrer sa balance des paiements déficitaire et créer des emplois.

    Le gouvernement socialiste français, dont la diplomatie est dirigée par l’atlantiste Laurent Fabius (qui n’a pas de doctrine précise à part la vacuité des ”Droits de l’homme”) a enterré la position gaullienne et indépendante de la France. Il s’est aligné, contre les intérêts de la France et de l’Europe (la vraie, pas celle de l’UE) sur la position de Washington. En réalité, Washington et l’UE ont instrumentalisé l’Ukraine au seul bénéfice des intérêts économiques américains.

    Il existe un autre aspect fondamental : tout se passe, par ces sanctions économiques anti russes,  comme si Washington voulait créer une crise des approvisionnements gaziers russe en Europe, afin d’y substituer les exportations américaines de gaz de schiste liquéfié, nouvelle source d’énergie extrêmement juteuse pour l’économie américaine. 

     D’un point de vue géostratégique, l’axe Paris-Berlin-Moscou est le cauchemar  des milieux atlantistes, ainsi que son corollaire, un espace économique de complémentarité mutuelle ”eurosibérien”, ainsi qu’une coopération militaro-industrielle franco-russe. Le président russe a eu le tort pour Washington de vouloir esquisser cette politique.

    C’est pourquoi la crise ukrainienne – latente depuis longtemps – a été instrumentalisée, entretenue, amplifiée par les réseaux washingtoniens (2) pour tuer dans l’œuf un grand partenariat économique et stratégique euro-russe. Pour découpler l’Europe de la Fédération de Russie.

    N’en voulons pas aux USA et ne sombrons pas dans l’anti-américanisme dogmatique. Ils jouent leur carte dans le poker mondial. Seuls responsables : les Européens, qui sont trop mous, faibles, pusillanimes pour défendre leurs intérêts, qui laissent la Commission européenne  décider – illégalement – à leur place.  De Gaulle doit se retourner dans sa tombe.

     Mais il n’est pas évident que cette stratégie de la tension avec la Russie et que cette réactivation de la guerre froide soient dans l’intérêt des USA eux-mêmes.  Car cette russophobie – qui prend prétexte du prétendu ”impérialisme” de M. Poutine (3), cette désignation implicite de la Russie comme ennemi principal ne sont pas intelligentes à long terme pour les Etats-Unis. Pour eux, le principal défi au XXIe siècle est la Chine, sur les plans économique, géopolitique et stratégique globaux. Pékin se frotte les mains de cette crise, en spectateur amusé.

    Dans l’idéal, il reviendrait à la France et à l’Allemagne (négligeant le Royaume–Uni aligné sur les USA et la Pologne aveuglée par une russophobie émotionnelle et contre-productive) de négocier, seules, avec Moscou, un compromis sur la crise ukrainienne. En passant par dessus la technocratie bruxelloise qui usurpe la diplomatie européenne et qui, comme toujours, marque des buts contre le camp européen. On peut toujours rêver.   

    Guillaume Faye (J'ai tout compris, 20 avril 2014)

    Notes :

    1. AFP, 15/04/2014

    2. Barack Obama, qui est un président faible de caractère et indécis, ne voulait plus impliquer son pays dans les affaires européennes et russes, préférant se tourner vers l’Asie. Ce qui était réaliste. Mais il a dû s’incliner devant les lobbies qui ont toujours  dirigé la politique étrangère américaine, souvent plus pour le pire que pour le meilleur.

    3. ”Impérialisme” minuscule face aux interventions armées des USA et de l’Otan (mais toujours pour la bonne cause) depuis la fin de l’URSS.

    Lien permanent Catégories : Géopolitique, Points de vue 1 commentaire Pin it!
  • Obama contre Poutine : la parabole de la paille et de la poutre...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'Arnaud Imatz, cueilli sur le site du Cercle Aristote et consacré à la vertueuse indignation des Américains après la récupération de la Crimée par la Russie... Docteur en sciences politiques, Arnaud Imatz est l'auteur de deux ouvrages importants, José Antonio : la phalange espagnole et le national-syndicalisme (Albatros, 1981) et La guerre d'Espagne revisitée (Economica, 1993).

    Selser.jpg

     

    Obama contre Poutine : la parabole de la paille et de la poutre

    À l’occasion de l’intervention russe en Crimée, le président Barack Obama n’a pas manqué de s’indigner violemment. La Russie « est du mauvais côté de l’histoire », a-t-il  fulminé, condamnant « l’acte d’agression » de Poutine « avec la plus grande fermeté ». Rendons-nous à l’évidence : Obama a une parfaite maîtrise de son rôle. Cela dit, sa leçon de « morale politique », énième illustration de la parabole de la paille et de la poutre, est-elle crédible ?

    Depuis Monroe jusqu’à Clinton, en passant par Wilson, F. D. Roosevelt, Bush et aujourd’hui Obama, les discours des présidents américains se nourrissent de convictions simples : le peuple des États-Unis est « élu et prédestiné », « le destin de la nation américaine est inséparable du Progrès, de la Science, du Bien, de l’Humanité, de la Démocratie et de la volonté de Dieu ».  La démocratie libérale américaine, est le « meilleur des régimes », la « meilleure forme de modernité » applicable universellement. Des articles de foi qui légitiment à eux seuls le « leadership mondial » états-unien et la croisade planétaire en faveur des droits de l’homme.

    Ces idées, ces valeurs, sont partagées plus ou moins consciemment par tous les américanolâtres.  L’histoire des États-Unis se confond, selon eux, avec la liberté, la tolérance, la prospérité, la démocratie et la civilisation. Dès lors, ils interprètent la moindre réserve comme le signe du ressentiment, de l’ingratitude, de l’esprit de décadence, pire, de la haine obsessionnelle du libre marché et de la démocratie libérale. Obsédés et aveugles, ils se condamnent toujours à tordre la réalité pour l’adapter à leur idéologie.

    À coté de ce point de vue moraliste des américanolâtres patentés, il y a bien sûr les analyses des historiens et des géopolitologues qui s’efforcent de circonscrire le débat sur un plan géostratégique. Ceux-là soulignent que, depuis deux siècles, la politique étrangère nord-américaine ne cesse d’osciller entre deux interprétations opposées de la doctrine de Monroe (1823).

    Il y a, disent-ils,  d’une part, ceux qui défendent le concept de « grand espace », de continent américain, délimité et interdit à toute ingérence étrangère, et, d’autre part, ceux qui revendiquent son antithèse, la politique de sécurité des voies de communication et le droit d’intervention dans n’importe quel espace traversé par ces communications. D’une part, le panaméricanisme, l’idéologie supranationale, d’autre part, la politique d’ingérence, instrument de pénétration du capitalisme américain en particulier sur les marchés d’Asie et d’Europe.

    Ce point de vue réaliste permet de voir des analogies étonnantes avec l’attitude des russes dans la crise de l’Ukraine. Mais une différence demeure : Poutine ne veut pas la domination du monde, simplement, il n’a pas envie d’être menacé par des bases américaines à ses frontières.

    En la matière, tout semble affaire de perspective. Pour mes amis historiens et géopolitologues hispano-américains la distinction classique entre les deux interprétations de la doctrine de Monroe, si chère aux politologues européens, n’a pas vraiment lieu d’être. Pour eux, les grands principes énoncés par la diplomatie états-unienne [doctrine de Monroe (1823), idéologie de la Destinée manifeste (1845), politique du Big Stick de Théodore Roosevelt (1901), politique de bon voisinage de Franklin Roosevelt (1932), théorie de la sécurité nationale de Truman (1947), projet de zone de libre-échange des Amériques (ZLEA) de Bush, etc.]aboutissent tous à une seule et même fin que résume ces mots : « L’Amérique aux Américains… du Nord ».

    Les interventions et les agressions des États-Unis dans le monde luso-hispanique au cours des deux derniers siècles se comptent, ne l’oublions pas, par centaines pour les majeures et par milliers pour les mineures. La bibliographie sur le sujet est considérable. On ne citera ici qu’un seul exemple : le travail encyclopédique de l’historien argentin Gregorio Selser, Chronologie des interventions étrangères en Amérique Latine [Cronología de las intervenciones extranjeras en América Latina, 4 tomes, México, CAMENA, 2010]. Ce livre, produit d’un dur labeur de trente ans, a permis de réunir et d’ordonner des milliers de fiches, chacune sur une intervention ou une agression étrangère dont 90 % a été le fait des États-Unis. Une œuvre qui, en raison de son ampleur, ne sera vraisemblablement jamais traduite en français.

    « La Russie est du mauvais côté de l’histoire » nous dit donc M. Obama. Comme une image vaut mieux qu’un long discours, j’invite le lecteur à observer quelques secondes la photo des quatre tomes de l’œuvre de Selser. La seule vue de ces énormes volumes permet de balayer bien des doutes sur la question et de replacer l’attitude de la diplomatie nord-américaine face à la crise ukrainienne dans sa correcte perspective.

    En matière d’intervention étrangère, à l’évidence la Russie de Poutine a des leçons à prendre outre-Atlantique.

    Arnaud Imatz (Cercle Aristote, 5 mars 2014)

    Lien permanent Catégories : Points de vue 0 commentaire Pin it!
  • Tour d'horizon... (65)

    Indien observation.png

    Au sommaire cette semaine :

    - sur le site de la revue Défense nationale, Alain Corvez souligne avec brio la faiblesse de l'Europe et sa soumission aux États-Unis dans la crise ukrainienne...

    Crise ukrainienne et impuissance européenne ?

    Soumission européenne.jpg

    - sur le site du Monde diplomatique, Régis Genté analyse les conséquences de l'exploitation du gaz de schiste sur la géopolitique de l'énergie...

    Le gaz de schiste chamboule la géopolitique

    Le-gaz-de-schiste.jpg

     

    Lien permanent Catégories : Tour d'horizon 0 commentaire Pin it!
  • Le gouvernement du ciel...

    Les éditions Les prairies ordinaires viennent de publier un essai de Thomas Hippler intitulé Le gouvernement du ciel - Histoire globale des bombardements aériens. Philosophe et historien, maître de conférences à Sciences-Po Lyon, Thomas Hippler est notamment l’auteur de Soldats et citoyens. Naissance du service militaire en France et en Prusse (PUF, 2006) et de Bombing the People: Giulio Douhet and the Foundations of Air-Power Strategy, 1884-1939 (Cambridge University Press, 2013).

     

    Gouvernement du ciel.jpg

    " L’aviation incarne, dès son invention, le rêve cosmopolitique d’une paix perpétuelle entre les nations de la terre, dont le revers n’est autre que le cauchemar d’une puissance meurtrière sans précédent. Puissance qui s’exerce d’abord à l’encontre de populations jugées un peu trop remuantes par les colonisateurs, dans le cadre d’opération de maintien de l’ordre, avant de s’abattre sur les villes européennes et japonaises, durant le second conflit mondial.
    Mais surtout, la guerre aérienne brouille définitivement les frontières entre guerre et paix. Ce brouillage constitue un symptôme de la « démocratisation » de la guerre. Car c’est désormais le peuple que l’on prend directement pour cible, le peuple soutien de l’effort de guerre, et le peuple souverain, identifié à l’État. Ainsi s’enclenche un mouvement politique qui nous conduit aujourd’hui à une gouvernance mondiale sous hégémonie états-unienne, définie par une « guerre perpétuelle de basse intensité », qui frappe pour l’instant des régions comme le Yémen ou le Pakistan mais pourrait s’étendre demain à l’ensemble de la population mondiale.
    La guerre aérienne croise ainsi les grands thèmes du siècle passé : la nationalisation des sociétés et de la guerre, la démocratie et les totalitarismes, le colonialisme et la décolonisation, le tiers-mondisme et la globalisation, l’État social et son déclin face au néolibéralisme. L’histoire des bombardements aériens constitue un point de vue privilégié pour écrire une histoire globale du XXe siècle. "

    Lien permanent Catégories : Livres 0 commentaire Pin it!
  • Vers un nouvel équilibre mondial...

    Nous reproduisons ci-dessous un excellent point de vue de Jean-Paul Baquiast et de François Vadrot, cueilli sur Europe solidaire et consacré à l'émergence d'un nouvel équilibre mondial et au rôle que pourrait jouer l'Europe si les pays qui la composent avaient à leur tête de véritables hommes d'état.Jean-Paul Baquiast est l'animateur du site Europe solidaire, ainsi que du remarquable site d'actualité technoscientifique Automates intelligents.

     

    Equilibre mondial.jpg

    Effondrement prévisible des Etats-Unis et reconfiguration de l'équilibre mondial

    On peut pronostiquer que nous sommes à la veille d'un effondrement partiel voire total des Etats-Unis. Le pronostic est encore peu partagé, tout au moins dans les opinions dites occidentales. Néanmoins tout ceux qui nourrissent des projets économiques ou politiques devraient y porter la plus grande attention. Il est difficile de préciser la date à laquelle cet effondrement se produirait: d'ici un an ou 5 ans. Mais très certainement pas 10 ou 20 ans, vu l'accélération de l'histoire.

    Les Etats-Unis courent à l'effondrement du fait de faiblesses internes de plus en plus évidentes. Nous ne les énumérerons pas dans cet article. Mais la raison principale de cet effondrement est qu'ils adoptent une posture internationale de plus en plus agressive. Ceci en dépit et peut-être à cause de ces perspectives d'effondrement. Ces agressions croissantes vont provoquer contre eux une véritable coalition des autres puissances mondiales. Une telle coalition ne fera pas l'objet, sauf exceptionnellement, d'alliances diplomatique, telle la Triple Alliance célèbre dans l'Histoire. Elle résultera de rapprochements initialement fortuits d'Etats de plus en plus inquiets des conflits locaux, voire des risque de guerre généralisée, provoqués par une diplomatie américaine toujours aussi impérialiste, d'autant plus impérialiste d'ailleurs que s'accumulent les difficultés du pays.

    Pour que cependant se produise la réorganisation du monde mentionnée dans le titre, il faudra que s'esquissent spontanément de nouvelles structures. On pourrait évoquer le concept de monde multipolaire, mais il n'a pas de sens précis, à moins de désigner une simple anarchie.  On ne parlera pas non plus d'un monde bipolaire résultant d'une opposition entre Amérique et Russie, celle-ci ne cherchant pas dorénavant, comme nous le verrons, à réendosser le rôle joué par l'URSS avant sa chute, face à l'Amérique.

    Certes, des pôles doivent émerger, en substitution du monde monopolaire formé par les Etats-Unis et les pays sous leur influence. L'importance croissante de la Chine et de l'Inde, forte chacune de plus d'un milliard de citoyens, en fera nécessairement deux des pôles du futur monde multipolaire. Mais ceci ne devrait pas suffire à provoquer une véritable réorganisation. Une réorganisation supposerait plus que des pôles nouveaux. Elle supposerait des lignes de structuration nouvelles.

    Dans les prochaines décennies, le monde subira des changements pouvant être bénéfiques, mais dont la plupart seront liés à des catastrophes, réchauffement climatique, surpopulation, migrations massives, résurgence des guerres de religion...Ces phénomènes entraineront une instabilité généralisé et sans doute une angoisse profonde, analogue à celle ayant accompagné les épidémies de peste du Moyen-Age. De nouvelles lignes de fractures en résulteront. Aucun continent ne pourra rester à l'écart de ce phénomène. Mais corrélativement, de nouvelles lignes de recomposition ou de refondation en découleront, car les sociétés ne résisteraient pas à une déstabilisation permanente.

    Dans beaucoup de cas, il pourra s'agir d'un effort pour conserver ou retrouver les traditions et les valeurs des sociétés menacées, y compris à travers les révolutions technologiques et scientifiques.. Des aires géographiques nouvelles se construiront, autour des héritages linguistiques, culturels et plus largement civilisationnels.

    La Russie nouvelle

    Or il est tout à fait possible de supputer que la Russie, dirigée par des hommes aussi énergiques et prudents que se révèle être Vladimir Poutine, sera l'une de ces aires géographiques. Certes, elle souffrira d'un certain nombre de handicaps, mais ceux-ci ne seront pas supérieurs à ceux affectant la Chine, l'Inde et a fortiori des Etats-Unis en voie d'effondrement. Qu'en sera-t-il de l'Europe?

    Si celle-ci ne se débarrasse pas rapidement des liens de sujétion imposés par l'Amérique après la seconde guerre mondiale, elle suivra celle-ci dans sa chute. Les atouts de puissance qu'elle conserve encore ne la sauveront pas. Ils seront rendus inefficaces par une Amérique ne voulant pas que l'Europe lui dispute la direction du monde dit occidental. Pour recouvrer son indépendance et sa souveraineté, l'Europe devra donc cesser, précisément, de se revendiquer comme occidentale. Ce terme désigne en effet l'ensemble formé par l'Amérique et des Etats vassaux, embrigadés dans l'Otan et englués au sein d'une Union européenne que phagocytent quotidiennement les influences dites atlantistes.

    L'Europe devra dorénavant se revendiquer comme européenne au sens historique du terme, c'est-à-dire incluant la Russie. Nous avons ici dans des articles précédents, montré l'intérêt que présenterait pour chacune des partenaires une alliance euro-russe. Il ne s'agirait évidemment pas d'une fusion, mais de la mise en commun d'atouts complémentaires. Dans une telle alliance, l'Europe apporterait, outre une puissance économique ne demandant qu'à être relancée, des traditions dites démocratiques que la Russie ne manquerait pas, avec un peu de temps, d'adopter.

    Mais pour bâtir une alliance euro-russe, il faut être deux. Nous pensons que Poutine et le gouvernement russe, s'ils pouvaient être convaincus que l'Europe ne serait plus le faux nez de l'Amérique et de l'Otan, joueraient à fond cette carte de développement. Mais qu'en serait-il des gouvernements européens, composés de véritables ectoplasmes sans la moindre vision stratégique en propre. Ils n'attendent pour agir, comme l'a montré l'affaire ukrainienne, que les instructions de sous-fifres américains tels John Kerry et Jo Biden.

    S'il se trouvait en Europe quelques chefs d'Etat de la trempe de Vladimir Poutine, y compris avec les prétendus défauts que la propagande occidentale lui prête, alors l'Europe pourrait, en marge de l'effondrement prévisible des Etats-Unis, jouer avec la Russie un rôle digne des qualités de ses populations dans la reconfiguration de l'équilibre mondial. Si cela ne pouvait être l'Union européenne dans ses institutions actuelles, il pourrait s'agir de quelques pays volontaristes s'alliant en ce sens.

    De tels chefs d'Etat potentiels ne sont pas visibles aujourd'hui. Mais en cas de crise, les hommes nécessaires apparaissent sans prévenir. Souvenons nous pour ce qui nous concerne de Charles de Gaulle en 1940.

    Jean-Paul Baquiast et François Vadrot (Europe solidaire, 21 mars 2014)

     

    Lien permanent Catégories : Points de vue 0 commentaire Pin it!
  • Le point de vue d'Alain de Benoist sur la Crimée...

    Alain de Benoist, directeur des revues Nouvelle Ecole et Krisis et éditorialiste de la revue Eléments, répond aux questions de la radio iranienne francophone, IRIB, à propos des réactions des Etats-Unis et de l'Union européenne  après la décision de Vladimir Poutine d'accepter l'entrée de la Crimée au sein de la Fédération de Russie.

     

    Lien permanent Catégories : Entretiens, Multimédia 0 commentaire Pin it!