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Métapo infos - Page 4

  • Comme l’URSS, la France ne peut pas être réformée de l’intérieur...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Michel Geoffroy, cueilli sur Polémia et consacré à l'endettement massif de la France lié à l'incurie des tenants du Système depuis cinquante ans....

    Ancien haut-fonctionnaire, Michel Geoffroy a publié le Dictionnaire de Novlangue (Via Romana, 2015), en collaboration avec Jean-Yves Le Gallou, ainsi que plusieurs essais, dont La Superclasse mondiale contre les Peuples (Via Romana, 2018), La nouvelle guerre des mondes (Via Romana, 2020), Immigration de masse - L'assimilation impossible (La Nouvelle Librairie, 2021), Le crépuscule des Lumières (Via Romana, 2021), Bienvenue dans le meilleur des mondes (La Nouvelle Librairie, 2023) et, dernièrement Occident go home ! - Plaidoyer pour une Europe libre (Via Romana, 2024).

     

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    Comme l’URSS, la France ne peut pas être réformée de l’intérieur

    Les perspectives budgétaires du gouvernement Bayrou, qualifiées de « propositions choc » par les médias complaisants, nous démontrent clairement que, comme autrefois l’URSS, la France, usée par 50 ans de socialisme, n’est plus réformable.

    Une audace prétendue

    La prétendue audace budgétaire du gouvernement Bayrou consiste en effet à faire comme les précédents : donc à augmenter les prélèvements, à bloquer des revalorisations ou des remboursements, et à imposer un rabot budgétaire indifférencié. Même si la perspective de suppression de quelques jours fériés sert à détourner l’attention.
    Bref, on prend des décisions déflationnistes, alors même que notre dynamique économique est en panne, comme l’illustrent les faillites industrielles et une « croissance » dérisoire, qui ne produiront donc que des effets encore plus déprimants sur notre dette. C’est à cela que l’on reconnaît un Mozart de la Finance.
    Mais derrière l’écran de fumée médiatique, on se garde bien de s’attaquer aux vaches sacrées du Système : immigration incontrôlée, versements croissants à l’UE, subventions aux associations et aux médias militants, coût de la « transition énergétique », foisonnement bureaucratique, etc. Ni, bien sûr, d’apporter la moindre réponse aux questions qui préoccupent la majorité de la population.

    La tyrannie du statu quo

    Soyons juste avec François Bayrou : il ne fallait pas s’attendre à ce que des apparatchiks mettent à bas un Système qui leur assure pouvoir, notoriété et prébendes. Car leur intérêt de classe consiste à maintenir coûte que coûte un statu quo qui leur réussit si bien.
    Alors on continue comme avant : en faisant payer, une fois de plus, Nicolas, qu’il soit actif ou retraité. Puisque Nicolas se laisse toujours tondre.
    Car il n’y a plus de véritable opposition en France : tous les partis représentés au Parlement vont désormais dans le même sens, même ceux que la propagande qualifie d’extrémistes pour mieux les inciter à la soumission.
    Même la prétendue droite, forte en gueule, mais qui finit toujours par venir piteusement au secours de la macronie.

    Les innombrables collabos du Système

    Mais comme autrefois en URSS ou en RDA, le Système s’appuie aussi sur d’innombrables collaborateurs pour dénoncer ceux qui pensent mal et les envoyer, sinon au Goulag, du moins devant les Juges : pour dénoncer ceux qui ne respectent pas les règles de confinement, ceux qui tiennent un « discours de haine » vis-à-vis de l’immigration, ceux qui ne croient pas à l’alarmisme climatique, ceux qui critiquent le gouvernement israélien ou ceux qui ne sont pas assez russophobes. Pour surveiller la Vie des Autres donc.
    Autant de collaborateurs appointés ou bénévoles qui tiennent le Système à bout de bras et qui rendent impossible toute réforme.
    Pour cette raison, il est bien naïf de laisser croire que le renouveau national se réduirait à une simple échéance électorale, en admettant que nos oligarques acceptent le résultat des urnes. Ce qui devient de plus en plus douteux en Europe.

    Le monde irréel des oligarques

    Comme autrefois en URSS, tous les apparatchiks communient dans la même idéologie, et celui qui s’en écarterait se suiciderait socialement : politiques, administrateurs, syndicalistes, grands patrons, médiacrates, cultureux, prélats, tous ont désormais la carte du même parti : le parti immigrationniste, mondialiste, atlantiste, européiste et laxiste, qui a pris le pouvoir en France dans les années 1980 et qui n’entend pas le lâcher.
    Tous répètent en chœur le même credo, les mêmes erreurs et soutiennent les mêmes politiques : mais qu’importe, puisque cela leur assure pouvoir et notoriété. Après, ce sera le Panthéon pour eux, et le déluge pour les autres !
    Comme autrefois en URSS, nos oligarques vivent dans un monde à part, bien au chaud dans leurs datchas ou leurs appartements avec digicode : celui des joies du « vivre ensemble », de l’UE « qui nous rend plus forts », du niveau « qui monte » dans nos universités et nos écoles, de l’emploi qu’il est facile de trouver « en traversant la rue », de la start-up France, des joies de la circulation à trottinette et des menus végans.
    Un monde officiel mais de plus en plus imaginaire, et surtout de plus en plus en décalage avec la marche du monde réel.
    Pour cette raison, il est vain d’attendre que le renouveau vienne d’une oligarchie aussi aveugle et aussi corrompue.

    La France s’enfonce, mais plus vite que l’URSS

    L’URSS a mis 80 ans pour disparaître, mais après avoir remporté la Grande Guerre Patriotique et réalisé de grandes avancées scientifiques et structurelles. Et de nos jours, la Fédération de Russie est redevenue une puissance mondiale.
    Au bout de 50 années de socialisme mondialiste, ayant au contraire accumulé défaites sur défaites, la France, elle, est exsangue, sans perspectives et sans ressort.
    Non, le Système français n’est pas réformable car, pour reprendre une formule célèbre, s’il gouverne mal, il se défend bien. Il a encore plein de leviers pour garder le pouvoir : la dictature des juges, la spoliation des épargnants, le changement démographique, la mise en place du fédéralisme « européen » ou encore le contrôle numérique et bancaire de la population. Car, dans ce domaine, l’imagination est effectivement au pouvoir !

    Hélas, dans un tel contexte, cela signifie que l’URSS française ne sera mise à bas que par un bouleversement catastrophique. Comme toutes les républiques utopiques en France depuis 1792 se sont effondrées dans une défaite.
    C’est une triste perspective, mais c’est faire preuve de réalisme que de s’y préparer.

    Michel Geoffroy (Polémia, 23 juillet 2025)

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  • Notre amie la gauche...

    Les éditions Via Romana viennent de publier un essai de Jean-François Chemain intitulé Notre ami la gauche, avec une préface de Mathieu Bock-Côté.

    Agrégé et docteur en Histoire, Jean-François Chemain enseigne en établissement supérieur. Il a publié notamment Tarek, une chance pour la France ? (Via Romana, 2017) et Bellum iustum - Aux origines de la conception occidentale de la guerre juste (Apopsix, 2018).

     

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    " Depuis la Révolution française, où la notion de « gauche » est apparue, une caste de clercs prétend exercer sur la démocratie un magistère intellectuel et moral. Elle était à l’origine essentiellement issue du clergé, mais s’est élargie à de nombreuses autres fonctions, c’est pourquoi on parlera plutôt de « cléricature ». Ces fonctions ont plusieurs points communs : une autorité, un statut privilégié, un financement public, et se répartissent les tâches visant à éduquer un peuple considéré comme incapable, intellectuellement et moralement, de prendre les bonnes décisions. La cléricature enseigne, éduque, informe, distrait le peuple, elle lui dit le Vrai, le Bon et le Bien, et elle le punit quand il s’en écarte. Elle a pris la place du clergé d’Ancien Régime dans sa prétention à dominer l’État, et sa conception de la laïcité consiste moins dans une séparation que dans une absorption par l’État de la mission moralisatrice de l’Église.
    Volontiers utopique, la gauche considère que tous les moyens, même les plus coercitifs, sont bons pour marcher vers les lendemains radieux qu’elle promet. Les innombrables crimes de masse qu’elle a pu commettre ne sont à ses yeux que les inévitables douleurs de l’accouchement d’un monde meilleur. Elle ne se les reproche jamais, tant, pétrie de morale cléricale, elle ne voit dans ses opposants que pécheurs et hérétiques à corriger ou éliminer.
    On peut être inquiet quand on la voit, aujourd’hui, sans cesse souffler sur les braises des incendies qui couvent, mettre du sel sur les plaies des blessures de la société.
    La Révolution n’est pas terminée, répète-t-elle à l’envi. Mais elle ne le sera que quand le tiers-état se sera enfin délivré de la tyrannie de cet avatar du clergé qu’est la cléricature. "

     

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  • La guerre sans Etats ? Mercenaires, gangs et auto-défense...

    Le 15 juillet 2025, Elise Blaise recevait, sur TV libertés, Bernard Wicht à l'occasion de la publication de son essai intitulé Guerres en Europe - Gangs contre milices privées (Perspectives libres, 2025).

    Universitaire, historien des idées et spécialiste en stratégie, Bernard Wicht a récemment publié Une nouvelle Guerre de Trente Ans (Le Polémarque 2011), Europe Mad Max demain ? (Favre, 2013), L'avenir du citoyen-soldat (Le Polémarque, 2015), Citoyen-soldat 2.0 (Astrée, 2017), Les loups et l'agneau-citoyen - Gangs militarisés, État policier et citoyens désarmés (Astrée, 2019) Vers l'autodéfense - Le défi des guerres internes (Jean-Cyrille Godefroy, 2021).

     

     

                                           

    " Dans cet entretien, Bernard Wicht explique comment guerre et Etat restent deux concepts étroitement liés, reprenant la célèbre formule de Charles Tilly : "la guerre fait l’Etat et l’Etat fait la guerre". Bernard Wicht montre que l’effondrement ou la prise de distance de l’Etat entraîne des conflits de plus en plus décentralisés (insurrections, terrorisme, gangs armés). Il s’appuie sur la théorie de l’effondrement de Joseph Tainter pour souligner qu’au-delà d’un certain point de complexité "le retour marginal sur investissement diminue", conduisant inévitablement à la rupture d’un système social. Bernard Wicht évoque également la privatisation du conflit avec la montée du mercenariat et des sociétés militaires privées qui reflète une "libéralisation de la défense" face au monopole étatique de la violence en voie de délitement, multipliant les acteurs belligérants hors du contrôle des Etats. L’auteur questionne également les questions de "Capital guerrier" et d’autodéfense, estimant que les jeunes générations ne se mobilisent plus pour l’armée ni l’Etat, mais migrent vers des milices ou réseaux marginaux. La perte de sens collectif et la "guerre par procuration" en découlent. Bernard Wicht conclut sur la nécessité pour chacun de se préparer à l’autodéfense pour parer à l’impuissance d’un Etat qui a déjà renoncé à assurer la sécurité de ses populations."

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  • Pourquoi les intellectuels se trompent...

    Les éditions de l'Observatoire ont récemment publié un essai de Samuel Fitoussi intitulé Pourquoi les intellectuels se trompent. Essayiste, entrepreneur et chroniqueur au Figaro, Samuel Fitoussi est déjà l’auteur de Woke Fiction (Le cherche midi, 2023).

     

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    " Certaines idées sont tellement absurdes que seuls les intellectuels peuvent y croire, disait George Orwell. Et il avait raison, soutient Samuel Fitoussi, car non seulement l’intelligence ne protège pas de l’erreur, mais elle peut y prédisposer !

    Dans un ouvrage stimulant, érudit et impertinent, l’auteur examine les mécanismes sociaux, culturels et cognitifs qui conduisent les intellectuels à l’aveuglement, parfois au détriment de la société qu’ils prétendent éclairer. L’idéologie empêche le cerveau de fonctionner correctement, la virtuosité argumentative est souvent mise au service de la mauvaise foi, et le conformisme, le désir d’approbation et les excès de certitudes détournent de la quête de vérité. Quant à l’Université, autrefois temple du savoir, elle risque de devenir un monde clos, autoréférentiel, où la réalité ne pénètre plus.

    Nourri à la pensée de George Orwell, Jean-François Revel, Thomas Sowell, Raymond Aron, ou Steven Pinker, s’appuyant sur une riche littérature scientifique et une foule d’exemples historiques, Samuel Fitoussi nous met en garde : il est toujours plus facile de déceler les égarements du passé – une fois l’histoire écrite – que les aveuglements collectifs du présent !…
Plus que jamais d’actualité. "

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  • La guerre à l’heure des grands blocs civilisationnels...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Frédéric Saint-Clair, cueilli sur le site de la revue Éléments et consacré à l'illusion humanitaire et à celle du droit international à l'heure des conflits entre blocs civilisationnels.

    Politologue et analyste en stratégie et en communication politique, Frédéric Saint-Clair a publié un essai incisif intitulé L’Extrême Droite expliquée à Marie-Chantal (La Nouvelle Librairie, 2024).

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    La guerre à l’heure des grands blocs civilisationnels

    La guerre est, aujourd’hui plus que jamais, un phénomène médiatique. Elle est commentée heure par heure, minute par minute, sur les chaînes d’info en continu. Chaque Français est devenu fin connaisseur des régions les plus reculées de l’Ukraine autant que des missiles longue portée iraniens. Et pour ambiancer le tout, les journalistes se survoltent, passent en mode « breaking news », saturent les ondes, chaque fois qu’ils ont l’impression de vivre un moment historique, un moment décisif pour l’avenir du monde : envoi massif de drones sur Kiev, salve de missiles iraniens sur Tel-Aviv… Pendant ce temps, Athéna, la déesse de la guerre, les regarde en ricanant. Car depuis l’invasion de l’Ukraine jusqu’au pilonnage de Gaza, elle n’a pas bougé un sourcil. C’est qu’il y a, dans la mythologie grecque, deux dieux de la guerre : Arès et Athéna. Le premier est attaché à la force brute, au choc frontal et à la destruction ; la seconde est l’incarnation de la mètis qu’elle a héritée de son père, Zeus ; elle s’occupe de stratégie, de la dimension politique de la guerre. Elle a inspiré à Clausewitz, entre autres, sa conception de la guerre comme continuation de la politique par d’autres moyens. La seule question qui devrait nous occuper en ce moment est : à quoi pense Athéna lorsqu’elle regarde les guerres du XXIe siècle ?

    Pourquoi Athéna méprise les discours de paix de l’Europe occidentale

    Soyons clairs : Athéna ne se soucie pas de l’utilisation de drones, ni de l’obsession technologique de la guerre de manière générale, dont elle ne nie pourtant pas l’importance. Elle ne soucie pas davantage de la querelle sémantique : Hamas, mouvement de résistance ou groupe terroriste ? Selon elle, il s’agit d’un mouvement de résistance. Non pas pour les raisons évoquées par LFI, mais pour des raisons théoriques, parce que le terrorisme est un moyen, pas une fin. Tout comme la guerre d’ailleurs. Le Hamas est, à ce titre, plutôt un mouvement de résistance engagé dans une guérilla, menant parfois une guerre irrégulière contre une armée régulière, Tsahal, et parfois organisant des attaques terroristes contre les populations civiles. Athéna se dit que, de toutes façons, ceci a peu d’importance ; la question qui l’occupe en ce moment est : jusqu’à quand l’Occident soutiendra-t-il une solution impossible à deux États ? Quand le nationalisme islamique et le nationalisme hébreux, tous deux habités par le principe d’un seul État, se retrouveront-ils face à face ? Il ne peut en être autrement. Et la guerre ne cessera pas tant qu’une solution territoriale quasi unitaire ne sera pas trouvée. Ce que l’Occident nomme « radicalisation » du conflit israélo-palestinien est en réalité une clarification inédite et salutaire. La confrontation Iran-Israël est à ce titre un grand pas en avant vers une solution négociée puisqu’enfin les deux véritables protagonistes sont face à face, à couteaux tirés. Quelle place les pays de la région sont capables de faire à une diaspora palestinienne refusant de vivre sous un État israélien quasi global et accueillant la part du peuple palestinien désireux d’y résider en paix est l’unique nœud que le dialogue diplomatico-militaire Israël-Iran mérite de trancher. Athéna le sait, même si elle n’en parle pas… car personne n’est encore prêt à l’entendre.

    Mais revenons un instant au réalisme politique d’Athéna, et à la question plus globale de la guerre au XXIe siècle. Rappelons que l’entrée du monde dans le XXIe siècle se fait par deux chocs consécutifs : les attentats du 11 septembre 2001 et l’entrée de la Chine dans l’OMC au mois de décembre de la même année.

    1°) L’irruption du Choc des civilisations dans la grammaire des relations internationales.

    2°) Le basculement à l’Est de l’ordre du monde signant la défaite du projet néo-libéral formalisé dix ans plus tôt par Francis Fukuyama.

    Fin de partie pour les idéalistes

    Voilà plus de vingt ans que cela s’est produit, et on entend encore, tous les dimanches sur France Culture, le même vieux discours libéral-idéaliste d’un Bertrand Badie. Athéna, qui ne pense pas de manière « morale », s’en agace parfois. Elle s’irrite de l’habitus idéaliste de l’Europe de l’Ouest : « La guerre c’est mal » ; « Nous devons œuvrer résolument à l’établissement de la paix » ; « La première condition est d’obtenir un cessez-le-feu » ; « Il faut protéger les populations civiles à tout prix » ; « Le droit international a été bafoué » ; « Les criminels de guerre doivent être traduits en justice ». Or, Bertrand Badie, icône du social-libéralisme intellectuel en matière de relations internationales, prend toujours l’exact contre-pied d’Athéna. Pour s’en convaincre, deux ouvrages, entre autres : La Fin des territoires (en 1995) et L’Impuissance de la puissance (en 2004). Autant dire qu’il a faux sur toute la ligne. Mais il persiste ! Voici deux citations qui ne résument pas seulement sa pensée, mais celle de toute la classe politique progressiste française : « Penser le monde à travers une filiation où se succèdent Hobbes, Metternich, Clausewitz, Carl Schmitt et Kissinger ne permet plus d’accéder à la complexité du jeu international qui a cours aujourd’hui » et « Dès les « quatorze points », Wilson réintroduisait le rôle équilibrant des sociétés… L’ancien professeur de Princeton était certain que l’ordre triompherait par la démocratie, et donc par le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, complété des vertus de la délibération collective. Les nations libres devaient décider entre elles de la marche du monde, selon les codes naissants d’un multilatéralisme que la SDN devait annoncer. »

    Rappelons-le, encore et encore : si, Hobbes, Clausewitz, Schmitt et Kissinger sont essentiels pour comprendre notre monde ! Et, pour ceux qui souhaitent poser un regard pertinent sur le conflit russo-ukrainien, La Grande Rupture de Georges-Henri Soutou est sans nul doute l’ouvrage à lire : revisiter l’époque Eltsine en Russie ; se remémorer le rejet de la greffe libérale à la fois par les communistes post-URSS et par les nationalistes ; comprendre le changement de paradigme résolument impérialiste de Bill Clinton, dont le wokisme actuel est largement issu ; rappeler les contradictions de l’Europe occidentale, une Europe de l’Ouest que Robert Kagan associe à la faiblesse quand les États-Unis – démocrates et républicains confondus – persistent dans une logique de puissance. C’est l’idéal wilsonien, lequel anime autant un Badie qu’un Macron, qui est mort ! Les penseurs de la puissance sont, à l’inverse, plus vivants que jamais ; indispensables pour comprendre un monde où se superposent deux logiques : une logique civilisationnelle oubliée du XXe siècle, principalement lors de la guerre froide, mais omniprésente au XXIe, et une logique impérialiste réhabilitée.

    Empire et bloc civilisationnel

    Les blocs civilisationnels ont ceci de spécifique qu’ils mélangent habilement hard power et soft power. Ces grands espaces se conçoivent comme des empires à part entière. L’Union européenne ne fait d’ailleurs pas exception. L’obsession macroniste visant à nier la souveraineté propre de la France pour faire de celle-ci une région de l’Europe – si possible la principale ; la multiplication des discours de propagande affirmant que telle ou telle question (immigration, industrialisation, etc.) ne peut pas être réglée au niveau national, mais seulement au niveau européen, sont autant de signes témoignant d’une volonté impériale européenne. Une spécificité : l’annexion territoriale ne se fait pas par la guerre, mais par l’adhésion contrôlée des pays postulant. Pas de coercition dans l’univers idéologique wilsonien, mais une coopération basée sur l’accord des peuples (et quand ils ne veulent pas, les responsables politiques progressistes les aident un peu…). Le trumpisme, aux États-Unis, rime également avec néo-impérialisme. Le moyen et la fin sont tout autres en revanche. Le projet d’hyper-puissance demeure, mais il a muté : on ne parle plus seulement d’imposer un régime démocratique et libéral à la planète par les armes – en n’oubliant jamais les contreparties financières –, mais aussi d’annexion territoriale en bonne et due forme, de prise de terre, pour parler comme Carl Schmitt : Canal de Panama, Canada, Groenland… La logique russe n’est pas très différente. Le moyen seul diffère. À ce titre, la guerre russo-ukrainienne n’est pas un objectif militaire en soi, ni même strictement politique. Seule la guerre civilisationnelle sous-jacente importe – d’un côté comme de l’autre d’ailleurs, pour la Russie comme pour les pays membres de l’Otan.

    Parce que les empires mélangent habilement soft et hard power, aucune forme de puissance ne mérite d’être négligée. C’est ainsi que nous vivons probablement le siècle non pas de la « guerre totale » – dont Ludendorff est le théoricien et qui n’a rien à voir avec cela –, mais de la puissance totale. Le soft power civilisationnel a été reconnu par les blocs chinois, russe et islamique comme le fondement de toute puissance digne de ce nom. Ils ont retrouvé ce que l’Occident romain avait rangé sous le vocable imperium et qui comprenait une dimension éminemment spirituelle. Dimension que l’Europe de l’Ouest, sous l’influence combinée du matérialisme athée socialiste et du sécularisme « laïc » libéral, a détruite. Dès lors, comprendre la guerre russo-ukrainienne, c’est comprendre la réaffirmation de la dimension eurasienne de la Russie au travers du conflit, avec en ligne de mire l’offensive idéologique woke d’une partie de l’Europe et des États-Unis. L’incompatibilité entre le modèle de développement progressiste occidental et le trio Russie-Chine-Islam est désormais totale. La recomposition du monde en blocs civilisationnels adverses suppose une concurrence féroce dans la constitution de ces blocs. Et s’il faut la guerre, il y aura la guerre. Car l’économie se reconstruit, parfois avec une étonnante facilité. La civilisation et son socle spirituel, non. La fracture idéologique qui traverse l’Ukraine – et qui est politiquement affichée depuis l’Euromaïdan de novembre 2013 – ne pouvait pas ne pas poser la question de la fracture territoriale du pays. Si Poutine a échoué à ramener Kiev à lui. S’il a échoué à imposer militairement la supériorité de la Russie. Il a en revanche réussi à tracer une frontière culturelle, civilisationnelle, encore politiquement imprécise à ce jour, car tout se décide en ce moment-même, mais dont on sait d’ores et déjà que l’Histoire retiendra qu’elle est la nouvelle ligne de démarcation de la guerre civilisationnelle globale ouverte en 2001. L’objectif ? Convaincre ou annexer. Dominer. Refaçonner de nouveaux hegemon. Et surtout, mettre un terme à une époque, celle des Badie & Co, celle du droit international sacralisé, celle des institutions internationales vénérées, celle même des droits de l’Homme divinisés. Celle du progressisme occidental. Athéna sait que la morale progressiste ne fera pas le poids face au soft power des centres spirituels russes, chinois et islamique. D’où ce léger ricanement que l’on entend parfois lorsqu’on éteint les chaînes d’info en continu.

    Frédéric Saint-Clair (Site de la revue Éléments, 15 juillet 2025)

     

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  • Les griffes de Staline sur l'Espagne républicaine...

    Les éditions Dualpha viennent de publier une étude historique de Michel Festivi intitulée Les griffes de Staline sur l'Espagne républicaine (1936/1939), avec une préface de l'historien espagnole, spécialiste de la guerre civile, Pio Moa.

    Avocat honoraire et ancien bâtonnier de l'ordre, Michel Festivi a déjà publié trois ouvrages historique consacrés à l'Espagne de la première moitié du XXe siècle.

     

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    " À partir du mois de septembre 1936, les hommes de Staline et de la IIIe internationale vont investir la zone révolutionnaire espagnole, avec le soutien des socialistes et communistes locaux. Ils vont s’y répandre et combattre férocement tous ceux qui s’opposeront à eux : les anarchistes, les poumistes et autres antistaliniens, qui seront anéantis, grâce aux appuis des structures du NKVD et du Kominterm, présentes dans toutes les strates de l’Espagne Front-populiste. Certains chefs socialistes espagnols qui finalement tenteront de leur faire barrage, seront aussi écartés et vaincus politiquement.

    Par quels procédés les hommes de Staline ont-ils réussi à enserrer dans leurs griffes la zone espagnole révolutionnaire ? L’auteur décrit l’arrivée des envoyés du Komintern, la rafle de l’or de la Banque d’Espagne, la nature et le rôle des Brigades internationales, les crimes de masse, des tchékas partout, la terreur rouge, les génocides contre les opposants, le clergé, les catholiques, l’élimination ou l’éviction de ceux qui ne suivaient pas la ligne stalinienne, les procès de Barcelone, à l’égal de ceux de Moscou, et leurs conséquences nationales et internationales.

    Mais quels étaient les buts géopolitiques de Staline en Espagne, et sa stratégie ? Quelle fut la nature de cette guerre civile ? Peut-on parler de la première bataille de la IIe Guerre mondiale ? Comment se comporta a contrario Franco vis-à-vis d’Hitler et de Mussolini ? Quelles ont été les actions de la France du front populaire au soutien des révolutionnaires espagnols ? En cas de victoire des front-populistes sur les nationaux, aurait-on assisté en Espagne, à un premier essai de démocratie populaire ? C’est à toutes ces questions et à bien d’autres encore, que l’auteur apporte des réponses en s’appuyant sur une bibliographie abondante et souvent inconnue en France, qui remet totalement en cause la vision dorée d’une « république » auréolée, qui se serait faite attaquer et anéantir par des « fascistes ».

    Enfin, Michel Festivi revient sur le rôle des intellectuels, des écrivains, dans cette guerre si particulière, intellectuels qui jouèrent une partition si spécifique, et l’impact des lois mémorielles actuelles espagnoles sur la liberté d’écrire l’histoire de cette période si dense politiquement mais si tragique. Mais au-delà de l’Histoire, le lecteur revisite les comportements et les méthodes révolutionnaires, qui ont toujours cours de nos jours, en France, en Espagne, en Europe. "

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