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Métapo infos - Page 4

  • Les vacances...

    Les éditions Les sept couleurs viennent de publier un roman inédit de Robert Brasillach intitulé Les vacances, avec une préface de Philippe d'Hugues et une postface, ainsi que des notes, d'Alain Lanavère.

    Écrivain et journaliste à l'Action française et Je suis partout, Robert Brasillach, à qui l'on doit, notamment, Les sept couleurs et Comme le temps passe, mais aussi une Histoire du cinéma (avec son beau-frère Maurice Bardèche), a été une des principale victimes de l'épuration des intellectuels et est mort le 6 février 1945, dans les fossés du fort de Montrouge, sous les balles d'un peloton d'exécution.

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    "Le lecteur va découvrir ici une bien singulière pépite qui n’était pas destinée à être exhumée quatre-vingts ans après la mort de son créateur, alors jeune homme de 19 ans. Dans ce texte inédit que Brasillach qualifiait de « semble-roman », on peut déjà déceler les ébauches des thèmes qui nourriront son œuvre future.
    Sans être autobiographique, cet ouvrage s’inspire évidemment de la vie de son jeune auteur. Les familiers de Robert Brasillach reconnaîtront Sens, Collioure, la plage de Canet; ils identifieront certains visages venus de camaraderies estudiantines toutes fraîches ; ils retrouveront les goûts littéraires du khâgneux. Les autres seront sensibles à la peinture un peu surannée de la jeunesse représentative de la classe moyenne des années trente.
    Avec une sorte de nonchalance paresseuse, parfois lascive, le personnage principal, André Vérane, s’épanche sur les vacances, la mer, les jeunes filles en fleur – à une époque où les garçons regardaient ces créatures comme autant d’êtres attirants et mystérieux. Il médite longuement sur l’amitié, la vraie, celle de Montaigne et La Boétie, qu’il découvre cette année-là, reflet de celle qui unira pour la vie Robert Brasillach à Maurice Bardèche. Et, surtout, André Vérane a le goût de sa propre jeunesse: âgé de dix-huit ans, il se souvient de ses seize ans; il nous invite à savourer les heures qui s’écoulent, avec un bonheur teinté d’inquiétude, déjà soucieux du souvenir qu’il en gardera, comme d’une nostalgie future.
    La préface est de Philippe d’Hugues, enthousiasmé par cette découverte littéraire. Une postface du professeur Alain Lanavère, suivie de notes abondantes, vient éclairer le texte par une étude critique montrant tout ce qui est en gestation dans le travail du romancier en herbe qui deviendra un des meilleurs espoirs des lettres françaises avant de finir tragiquement face à un peloton d’exécution, 17 ans plus tard."

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  • Briser les chaînes de l’usure : Gesell et l’économie franche...

    Nous reproduisons ci-dessous un article de Clément Lemerle, cueilli sur le site de l'Institut Georges Valois et consacré à l'économiste hétérodoxe germano-argentin Silvio Gesell.

     

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    Briser les chaînes de l’usure : Gesell et l’économie franche

    Nous vivons sous le règne invisible d’une loi non écrite : celle de l’argent qui commande aux hommes. Intérêts, rentes, plus-values : ces prélèvements permanents paraissent naturels, comme si toute société était condamnée à nourrir la rente. Pourtant, il n’en a pas toujours été ainsi, et ce n’est pas une fatalité. Au tournant du XXᵉ siècle, un homme, à la fois commerçant, autodidacte et réformateur social d’inspiration proudhonienne, osa concevoir un système monétaire et foncier destiné à briser la domination des rentiers. Silvio Gesell, économiste germano-argentin, nomma son projet l’« économie franche ». Son ambition : que l’argent soit « un serviteur docile », et que le travail productif recouvre sa primauté sur la spéculation.

    Né en 1862 à Saint-Vith, alors prussienne, Gesell connut très tôt les aléas du commerce international. Installé en Argentine à la fin du XIXᵉ siècle, il observa la paralysie d’une économie étranglée par la thésaurisation, les crises monétaires et la spéculation foncière. Il en conclut que le mal résidait non dans les abus d’un système, mais dans ses fondements mêmes : la monnaie et la propriété du sol.

    De cette intuition naquit sa doctrine en trois volets, le Freiwirtschaft :

    1. Freigeld « monnaie franche » – une monnaie soumise à une légère dépréciation régulière afin d’empêcher son stockage improductif et d’obliger sa circulation.

    2. Freiland « terre libre » – suppression de la propriété privée spéculative du sol, remplacée par des baux publics ou collectifs, garantissant l’usage sans la rente.

    3. Freihandel « commerce libre » – échanges libérés des manipulations monétaires et du parasitisme financier, mais soumis à l’intérêt collectif.

       

    Freigeld

    Pour Gesell, l’argent n’a pas vocation à être une marchandise que l’on détient pour le simple privilège de la détenir. Sa célèbre formule, extraite de L’Ordre économique naturel, résume l’esprit de sa réforme :

    « De l'argent qui vieillit comme un journal, qui se gâte comme les pommes de terre, qui rouille comme le fer, qui s'évapore comme l'éther, un tel argent peut seul convenir comme moyen d'échange pour les pommes de terre, les journaux, le fer et l'éther ; un tel argent ne sera préféré à la marchandise ni par le vendeur, ni par l'acheteur. »

    Concrètement, la monnaie franche est soumise à une dépréciation périodique d’environ 1 % par mois, matérialisée par l’apposition d’un timbre ou d’une marque de renouvellement sur chaque billet. Ce mécanisme, appelé demurrage (« taxation périodique des moyens de paiement »), empêche la thésaurisation et stabilise le pouvoir

    d’achat en régulant à la fois la masse monétaire et sa vitesse de circulation. Cette monnaie fondante retire à l’épargne liquide son pouvoir de rançon. Elle pousse les détenteurs de capitaux à investir dans l’économie réelle ; l’intérêt privé retrouve alors sa juste place — non plus celle d’un créancier vivant de l’effort d’autrui, mais celle d’un producteur qui met ses moyens au service de la communauté.

    Dès les années 1930, des communautés locales eurent l’audace de briser le monopole bancaire pour sauver leur économie. À Schwanenkirchen, en Bavière, le wära sauva temporairement une mine de lignite et ranima le commerce ; à Wörgl, en Autriche, les certificats de travail financèrent routes, ponts et chantiers publics, réduisant le chômage au moment où Vienne s’enlisait dans l’impuissance. La Fédération de l’économie libre du Liechtenstein tenta l’expérience et diffusa une monnaie fondante dans les communes de Triesen, Schaan et Eschen. Chaque fois, la renaissance fut immédiate : industries et chantiers rouverts, familles stabilisées, dignité rendue au travailleur. Chaque fois aussi, la finance et l’État central vinrent briser l’élan. Berlin, Vienne ou Vaduz invoquèrent la « défense de l’unité monétaire » — formule hypocrite derrière laquelle se cachait l’unique volonté de protéger les rentiers, les spéculateurs et l’ordre stérile du capital dormant.

    En France, frappée elle aussi par la crise, des poches de résistance surgirent dans les années 1930 et 1950. À Nice, le valor permit de soutenir les commerces de proximité ; dans le Cher, la « Commune libre » de Lignières-en-Berry relança le commerce local et freina l’exode rural grâce à ses bons d’achat fondants ; à Marans, en Charente-Maritime, des bons d’échange circulèrent pour arracher l’économie locale aux griffes des réseaux centralisés. Partout, la population accueillit ces monnaies nouvelles avec enthousiasme : elles donnaient aux paysans, aux artisans, aux familles une force de respiration face à l’étranglement financier. Mais là encore, le couperet tomba. En 1958, une ordonnance gouvernementale interdit toute monnaie parallèle sur le sol français, sacrifiant l’intérêt des villages à celui des créanciers et du capital oisif. Chaque fois que la France paysanne et laborieuse reprenait son souffle, Paris et la haute banque l’étouffaient.

    Pourtant, certaines expériences ont traversé les décennies et continuent de défier l’ordre rentier. En Suisse, la Banque WIR, née en 1934, s’organisa en réseau coopératif interentreprises et survit encore aujourd’hui. Plus au nord, les caisses JAK suédoises et danoises, issues du même esprit, instaurèrent des prêts sans intérêt adossés à l’épargne mutuelle des membres, rappelant que le crédit doit être un service au travail, et non une rente prélevée par une caste de parasites. Enfin, en Bavière, le chiemgauer, lancé en 2003, démontre qu’une monnaie locale à perte programmée peut irriguer son territoire, financer associations et écoles, et replacer l’argent au service du peuple. Ces expériences, si différentes dans le temps et l’espace, disent toutes la même vérité : chaque fois que la monnaie retourne à la communauté, la vie reprend ; chaque fois qu’elle est reprise par l’État central et les banques, c’est l’immobilisme des rentiers qui triomphe.

    Freiland

    Dans un système franchiste, le terrain ne serait plus jamais vendu à titre privé. La collectivité en resterait propriétaire et l’affermerait par adjudication publique, selon un mécanisme clair : les baux (d’un an, cinq ans, dix ans ou à vie pour l’agriculture ; sans durée fixe mais révisables périodiquement pour l’habitat) seraient attribués au plus offrant, c’est-à-dire à celui qui s’engage à verser à la collectivité le montant le plus élevé de rente foncière. Cette rente, loin d’aller dans la poche d’un propriétaire absentéiste, reviendrait intégralement aux caisses locales pour financer voirie, écoles, entretien, services collectifs. Chaque renouvellement de bail permettrait d’ajuster le montant à la valeur réelle du sol, empêchant toute spéculation et assurant que la richesse du terrain profite toujours à la communauté qui l’entoure.

    Des garanties protègent les familles : tant que les obligations du bail sont remplies, nul ne peut les expulser ; les héritiers disposent d’un droit de priorité sur le renouvellement (avec un rabais possible de 10 %), et l’appauvrissement volontaire du sol est interdit par contrat. Dans ce cadre, les ménages achèteraient uniquement le bâti (maison, annexes, ateliers), à son prix réel et non gonflé par la bulle foncière. Un crédit modeste de dix à quinze ans suffirait, avec des mensualités proportionnées aux salaires. La maison se transmettrait sans dette écrasante, tandis que le bail du terrain resterait attaché à la collectivité.

    Henry George exprimait un objectif similaire. Cependant, là où George propose de taxer lourdement cette rente pour la redistribuer, Gesell veut aller plus loin : retirer purement et simplement le sol du marché spéculatif. L’un corrige, l’autre reconquiert. Dans un cadre nationaliste, cette mesure garantit à chaque famille de travailleurs un toit stable, rapidement payé et transmissible sans dette, tout en soustrayant les terres au capital transnational et en renforçant l’enracinement des foyers français sur leur sol.

    Freihandel

    Pour Gesell, le véritable libre-échange n’est pas le marché dérégulé vanté par les anarcho-capitalistes, mais un échange purifié de ses parasites : la rente, le monopole, la spéculation. Tant que la monnaie peut être thésaurisée et le sol accaparé, la “liberté” du commerce n’est qu’un masque pour l’oppression des puissants. Briser ces deux chaînes, c’est ouvrir la voie à un commerce réellement libre, où le petit producteur comme le grand peuvent vendre à égalité d’armes. Le freihandel gesellien n’abolit pas la propriété privée : il la libère de ses déformations. En supprimant la rente foncière et l’usure monétaire, la propriété productive cesse d’être un instrument de domination pour redevenir un outil de travail. Nul ne peut alors accumuler des terres ou du capital inactif simplement pour les retenir et en tirer un revenu : ils doivent circuler vers ceux qui les emploient réellement. Si la monnaie et la terre ne peuvent plus être retenues pour en tirer un revenu il ne restera au capital que la fonction productive. Ainsi se répartira naturellement la propriété sur un grand nombre, car rien ne pourra l’agréger artificiellement.

    Ce mécanisme opère comme une redistribution organique, sans confiscation bureaucratique ni nivellement forcé. Les grandes concentrations de fortune se dissolvent d’elles-mêmes, et la propriété se répand comme une pluie fine sur le sol de la nation. L’ouvrier qualifié, l’artisan, le paysan peuvent alors, par leur travail et leur épargne, acquérir leurs outils et leur logement sans être captifs d’une dette éternelle. Le franchisme gesellien ne se contente pas de libérer les échanges : il assure que les instruments de production restent entre les mains de ceux qui les utilisent, et non de ceux qui les possèdent par héritage ou par spéculation. En ce sens, c’est un socialisme organique : il ne nie pas l’initiative individuelle, mais la protège contre les concentrations artificielles. Cette vision peut aussi rallier une forme de nationalisme économique, car un peuple dont la propriété productive est largement distribuée ne craint ni la mainmise du capital étranger, ni la guerre des monopoles transnationaux.

    Silvio Gesell offre une boîte à outils intellectuelle et conceptuelle pour ceux qui veulent penser une économie nationale libérée de la mainmise financière. À une époque où les États reculent devant la toute-puissance des marchés et où la mondialisation uniformise nos modes de vie, ses idées méritent d’être redécouvertes comme piste de travail pour l’avenir. L’enjeu n’est pas d’ériger son système en dogme, mais de l’envisager comme un réservoir de concepts exploitables. Gesell rappelle que la monnaie et le foncier ne sont pas neutres et peuvent être armes d’asservissement ou instruments de libération.

    En articulant ces trois piliers Gesell entend construire un système cohérent qui n’est ni le capitalisme libéral classique, ni le collectivisme marxiste. « L’économie monétaire libre » qu’il propose « n’est pas le laisser-faire, mais n’est pas non plus le communisme. Ce serait plutôt une économie de marché sans capitalisme, c’est-à-dire sans capitalisme financier », résume l’économiste Werner Onken. Gesell se situe ainsi dans une troisième voie originale : individualiste sur le plan entrepreneurial (il croit en l’initiative privée, la concurrence et l’esprit d’entreprise) mais anti-capitaliste sur le plan monétaire et foncier (il refuse que la possession de l’argent ou de la terre confère un pouvoir d’exploitation). Il s’inspire en cela autant du proudhonisme (l’anarchisme mutualiste opposé à la propriété lucrative) que des théories des physiocrates, tout en innovant sur le terrain monétaire. Cette synthèse inédite vise une société où la liberté d’entreprendre cohabite avec la justice sociale, grâce à des règles du jeu économiques empêchant l’accumulation indéfinie et l’asservissement des faibles par les puissants.

    Appliquer ces idées, même partiellement, bouleverserait aussi la structure sociale. En supprimant l’usure et les rentes excessives, on réduirait les écarts artificiels de richesse ; la réussite découlerait du travail et du talent, et non de la spéculation ou de l’héritage foncier. Les ressources issues de la socialisation des rentes pourraient alors soutenir la famille, la santé, l’éducation – des piliers de la cohésion nationale. Finalement,

    l’économie franche de Gesell ne se présente pas comme une panacée, mais comme un ensemble d’outils à explorer, à adapter, à discuter. Elle ouvre des perspectives : reprendre la main sur la monnaie, protéger le sol national, rééquilibrer les échanges et replacer l’économie sous l’autorité du politique. Pour les milieux attachés à la souveraineté et à l’identité, c’est un terrain fertile pour réfléchir, débattre et expérimenter. Comme le rappelle la maxime : l'argent est un bon serviteur et un mauvais maître.

    Clément Lemerle (Institut Georges Valois, 14 novembre 2025)

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  • Les sociétés du silence: l'invisibilité du crime organisé...

    Les éditions Fayard viennent de publier un nouvel essai de Jean-François Gayraud intitulé Les sociétés du silence - L'invisibilité du crime organisé.

    Commissaire général, Jean-François Gayraud est déjà l'auteur de plusieurs études marquantes comme Showbiz, people et corruption (Odile Jacob, 2009), La Grande Fraude. Crimes, subprimes et crises financières (Odile Jacob, 2011), Le nouveau capitalisme criminel (Odile Jacob, 2014), L'art de la guerre financière (Odile Jacob, 2016), Théorie des Hybrides - Terrorisme et crime organisé (CNRS, 2017) et La mafia et la Maison blanche (Plon, 2023).

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    "Et si la puissance des grandes organisations criminelles se comprenait d’abord par leur art du silence ?
    Jean-François Gayraud nous dévoile l'univers secret des mafias, bien au-delà du simple crime organisé. Ces sociétés ne sont pas uniquement des associations de malfaiteurs, mais des contre-pouvoirs maniant une arme redoutable : la capacité de se faire oublier.
    De l'infiltration des loges maçonniques aux stratégies d'invisibilité politique, l'auteur révèle comment Cosa Nostra, Ndrangheta, Camorra et Sacra Corona Unita ont développé une véritable maîtrise de la dissimulation.
    À travers l’analyse de grandes figures mafieuses, comme Toto Riina ou John Gotti, les témoignages de repentis et l'influence du cinéma, Jean-François Gayraud dessine une géographie secrète du pouvoir. L'omerta n'est pas une absence de parole, mais une langue complexe aux règles impitoyables, où chaque mot peut tuer et chaque silence gouverner.
    Ce talent pour se fondre dans l’ombre ne peut plus être ignoré car, depuis la fin du siècle dernier, la France est confrontée à un fait inédit : de puissantes structures clandestines s’emparent de pans entiers de son territoire, de sa vie politique, économique et sociale, au risque de les corrompre durablement.
    Une enquête saisissante sur ces sociétés parallèles qui transforment le silence en instrument de domination absolue."

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  • Julien Rochedy : identité interdite ?

    Vous pouvez découvrir ci-dessous un entretien donné par Julien Rochedy à Régis Le Sommier sur Omerta, dans lequel il évoque son dernier essai Qui sont les Blancs ? - Généalogie d'une identité interdite (Hétairie, 2025).

     

                                             

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  • Enrico Mattei, architecte d’une souveraineté énergétique moderne...

    Les éditions de la Nouvelle Librairie, en collaboration avec l'Institut Iliade, viennent de publier un court essai de Filippo Burla intitulé Enrico Mattei - Architecte d’une souveraineté énergétique moderne.

    Filippo Burla, né en 1987 et diplômé en sciences politiques, est, depuis 2013, responsable de la rubrique économie du quotidien Il Primato Nazionale. Avec Valerio Benedetti, il a dirigé l’édition de l’ouvrage collectif Corporativismo del III millennio (Aga, 2013) et est l’auteur de Tornare potenza - Dieci tesi economiche per l’Italia (Altaforte Edizioni, 2021).

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    " Dans l’Italie d’après-guerre, un industriel italien a bousculé l’ordre pétrolier mondial : Enrico Mattei. Patron hors norme et stratège, il a proposé aux pays producteurs des accords plus justes, construit des réseaux pour alimenter usines et foyers, et rendu l’approvisionnement énergétique de l’Italie moins à la merci des grandes compagnies étrangères. Surtout, il a défié les « sept sœurs », le cartel informel des groupes pétroliers anglo-saxons qui régentaient alors les prix et les concessions. Visionnaire, Mattei a pensé l’énergie comme un levier de souveraineté nationale autant qu’un outil de développement partagé. Si son destin s’est brisé en 1962, son héritage, lui, demeure.

    Aujourd’hui, son intuition inspire de nouveau l’Italie, en particulier la politique de Giorgia Meloni. Le Plan Mattei relance l’idée de partenariats gagnant-gagnant avec l’Afrique et d’un rôle de carrefour énergétique en Méditerranée : renforcement des sources, des liaisons et de la formation. Ce livre raconte l’histoire de cet homme, éclaire l’actualité et montre surtout comment ce Plan peut devenir un premier jalon concret pour bâtir l’indépendance énergétique de l’Europe."

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  • Le guerrier impie...

    Nous reproduisons ci-dessous un article de Ralf van den Haute cueilli sur Euro-Synergies et consacré au mythe indo-européen du guerrier impie.

     

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    Le guerrier impie

    C’est Georges Dumézil qui, par son travail monumental en mythologie comparée, a donné à cette discipline ses lettres de noblesse scientifiques, encourageant les jeunes chercheurs Claude Sterckx et Frédéric Blaive [1] à suivre leur intuition et à démêler le mythe indo-européen du «guerrier impie».

    La pertinence de ce thème, largement abordé dans la revue Ollodagos – Actes de la Société belge d’études celtiques, dans Studia Indo-Europaea et dans Latomus – revue d’études latines, se reflète dans le nombre de philologues qui ont poursuivi la recherche académique sur ce sujet, principalement du côté francophone : Alexandre Tourraix, Dominique Briquel, Marcel Meulder et Bernard Sergent.

    Le mythe du guerrier impie est partagé par plusieurs peuples parlant une langue indo-européenne et semble totalement absent en dehors de cette aire linguistique. Blaive et Sterckx ont d’abord trouvé de nombreux exemples indiens, iraniens, scandinaves et latins de ce mythe. Plus tard, des exemples ont été découverts dans la plupart des langues indo-européennes, même celles dont les plus anciens documents manquent, comme l’antiquité slave, les ballades ossètes, certains textes de la littérature médiévale. Ce mythe ne semble en tout cas pas exister en dehors de l’aire indo-européenne : aucun exemple chinois, arabe, berbère, ouralien ou turco-mongol n’est connu.

    Une autre particularité de ce mythe : Blaive et Sterckx, familiers de la structure trifonctionnelle de la mythologie indo-européenne, constatent que les trois avertissements ou erreurs qui précèdent la fin du guerrier impie ne peuvent être assimilés à cette structure trifonctionnelle. La triade, en tant que telle, se retrouve en effet, indépendamment de la structure trifonctionnelle propre aux mythes indo-européens, aussi fréquemment ailleurs.

    Outre le mythe du guerrier impie, il existe aussi un mythe autour des trois péchés du guerrier, qui sont liés aux trois fonctions de Dumézil [2] : un meurtre, un viol (ou rapt ?) et un sacrilège, qui reflètent respectivement la deuxième, la troisième et la première fonction. Les trois péchés du guerrier précèdent le mythe du guerrier impie, qui commet d’abord ces trois péchés, s’attire ainsi une malédiction, puis est confronté aux présages de cette malédiction, les ignore et finit par mourir.

    L’un des plus anciens exemples connus d’un tel héros négatif est Ravana, dans l’épopée hindoue du Ramayana. Ravana tue un messager, enlève une femme et défie les dieux. S’ensuivent les présages de sa mort : une pluie de sang, des chevaux qui trébuchent et pleurent. Le cheval apparaît d’ailleurs fréquemment dans les différentes manifestations de ce mythe.

    Dans la mythologie grecque, le héros Achille de l’Iliade semble, après examen, répondre à plusieurs critères du guerrier impie. Son cheval ne prédit-il pas sa mort devant les portes de Troie s’il tue Hector ? Mais il y a plus : Achille est connu pour ses accès de colère incontrôlables, d’abord contre Agamemnon, puis contre Hector, et il menace à plusieurs reprises le dieu Apollon.

    L’une des traditions indo-européennes les plus archaïques, la celtique, connaît une variante particulière de ce mythe: les Celtes impies commettent évidemment aussi les erreurs qui mènent à leur perte, mais les commettent à contrecœur et sous la contrainte absolue d’une obligation supérieure. Dans la légende irlandaise Togail Bruidhne Dhadhearga, le haut roi Conaire Mor est soumis à une série de tabous qu’il ne peut que transgresser progressivement jusqu’à sa chute finale.

    Le plus célèbre héros celtique, Cuchulainn, subit un destin similaire le dernier jour de sa vie: il ignore les incantations des femmes qui sentent sa mort approcher et d’autres présages sombres, comme sa propre fibule qui tombe de ses mains et blesse son pied, son cheval Liath Macha qui refuse d’être attelé et lui montre trois fois son flanc gauche. Il part néanmoins combattre l’armée ennemie qui ravage l’Ulster. En chemin, il rencontre trois sorcières qui font rôtir un chien sur un feu de branches de sorbier. Elles aspergent le chien de poison et prononcent des malédictions. Cuchulainn est soumis à un geis, un tabou qui lui interdit de passer devant un feu sans partager le repas qui y est préparé. Un autre tabou lui interdit de manger la viande de son homonyme : or, le surnom du héros irlandais est justement « chien de Culann ». Cuchulainn fait mine de ne pas remarquer les sorcières, mais elles l’interpellent et lui offrent de la main gauche – autre mauvais présage – un morceau du chien. Cuchulainn ne peut que l’accepter, ce qu’il fait de la main gauche, et le mange. Il perd aussitôt la moitié de sa force. Il part tout de même au combat, mais ses ennemis parviennent à le placer à nouveau devant un dilemme fatal, et il succombe finalement, désarmé.

    La plupart des épopées mythiques indo-européennes connaissent un héros négatif sous la forme d’un guerrier au caractère excessif et arrogant, pour qui rien ni personne n’est sacré et qui ne respecte aucun ordre, même divin. La vie d’un tel guerrier ne peut être que criminelle jusqu’à ce que le champion du camp opposé le vainque et rétablisse l’ordre du monde.

    La nature fatale et prophétique du cheval dans différentes cultures indo-européennes a déjà été décrite à la fin du XIXe siècle, principalement par des philologues allemands. Le présage du cheval qui pleure ou trébuche (tombe) est fréquent et annonce la mort du guerrier impie. Meulder a constaté que l’absence totale de ce motif dans d’autres cultures, comme la tradition populaire hongroise ou chez les Kirghizes où c’est au contraire un bon présage, confirme qu’il s’agit d’un mythe purement indo-européen.

    Le mythe du guerrier impie a des prolongements dans la littérature européenne. Chez Jacob Grimm, par exemple, le faux pas du cheval annonce un malheur. Dans la Njallsaga norvégienne, la saga de l’incendie de Njall, cela arrive à Gunnar, un guerrier impie. Mais aussi dans la Saga du roi Harald de la Heimskringla, le cheval du roi Harald se cabre au moment où celui-ci veut attaquer l’Angleterre. Le roi d’Angleterre espère à haute voix que cela signifie la fin de la chance de Harald. Et en effet, celui-ci est mortellement touché par une flèche.

    Il existe encore de nombreux exemples où le motif du guerrier impie semble pertinent : l’empereur païen Julien dans sa lutte contre les Parthes, Charlemagne, Jules César. Tout guerrier qui semble impie ne l’est pas forcément : il convient de noter que les historiens romains étaient particulièrement habiles à noircir les dernières années de vie de leurs adversaires politiques, ce qui peut donner l’impression que le mythe du guerrier impie est très présent dans la culture latine – alors que les formes archaïques de la mythologie indo-européenne étaient à peine encore présentes dans l’Empire romain.

    Cette contribution n’est rien de plus qu’une brève introduction à ce mythe indo-européen fascinant. Ceux qui souhaitent en savoir plus sur ce sujet devront principalement se tourner vers la littérature francophone des auteurs mentionnés plus haut. Une certaine familiarité avec le mythe du guerrier impie et celui des trois péchés du guerrier devrait permettre de découvrir soi-même ces motifs dans les textes archaïques.

    Ralf Van den Haute (Euro-Synergies, 21 novembre 2025)

     

    Notes:

    [1] Frédéric Blaive en Claude Sterckx : Le mythe Indo-européen du guerrier impie, L’Harmattan, Parijs 2014

    [2] Georges Dumézil (1898-1986) a réussi, grâce à la mythologie comparée, à ouvrir une nouvelle voie et à mettre au jour les structures idéologiques sous-jacentes des mythes auxquelles ceux-ci doivent leur cohérence interne. Le résultat en est la découverte du système trifonctionnel comme idéologie principale dans la pensée indo-européenne archaïque. Dumézil a principalement étudié des textes sources de l’Inde archaïque, de Rome et de la Scandinavie : ces textes sont accessibles et contiennent des couches mythologiques très anciennes et bien conservées.

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