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totalitarisme - Page 5

  • L'inventeur du totalitarisme...

    Les éditions Perrin viennent de publier une biographie politique du chef des bolcheviks, Vladimir Ilitch Oulianov, signée par Stéphane Courtois et intitulée Lénine, l'inventeur du totalitarisme. Historien, Stéphane Courtois reste l'homme qui dirigé la publication du Livre noir du communisme (Fayard, 1997), ouvrage au retentissement mondial.

     

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    " La biographie politique de Lénine, l'homme qui a fait basculer le monde dans le XXe siècle – l'époque des totalitarismes communistes, fascistes et nazi – par Stéphane Courtois, le maitre d'œuvre du Livre noir du communisme, best-seller mondial.

    La biographie la plus attendue du centenaire de 1917, fruit d'une vie de travail consacrée à l'étude du communisme.
    A rebours de l'idée dominante qui dédouane Lénine pour mieux accabler Staline, Stéphane Courtois établit comment le jeune intellectuel radical – marqué au fer rouge par l'exécution de son frère aîné – a pensé, voulu puis instauré une dictature idéologique impitoyable, inventant les concepts (révolution mondiale, dictature du prolétariat, parti-État, centralisme démocratique, économie planifiée, terreur de masse) et les instruments (parti unique, police politique, Armée rouge, goulag...) du totalitarisme qui devait signer les horreurs du XXe siècle.
    D'emblée, Vladimir Ilitch Oulianov se distingue des autres opposants au tsarisme en s'opposant non seulement aux libéraux et aux démocrates, mais aussi à toutes les mouvances socialistes, qu'il vitupère à coups d'écrits et de discours incendiaires. Aidé par une force de conviction peu commune, il choisit de s'appuyer sur une minorité de révolutionnaires professionnels dévoués plutôt que sur l'agrégation des masses. Cette faiblesse apparente fait sa force : elle lui permet d'avancer dans l'ombre pour mieux se préparer à l'exercice du pouvoir, qu'il conquiert à la hussarde en octobre 1917. Nourri des échecs de la Révolution française puis de la Commune, il le conserve en l'étendant par un recours systématique à la violence conjugué à un rare opportunisme politique. Ainsi parvient-il à gagner la guerre civile puis à assurer son emprise sur la société, faisant table rase au profit de son disciple et successeur.
    Une prose limpide au service d'une démonstration implacable. "

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  • Les complices...

    Les éditions Grasset viennent de publier, sous le titre Les complices, le troisième tome d'Une histoire mondiale du communisme, ouvrage monumental signé par Thierry Wolton. Journaliste et historien, Thierry Wolton a publié de nombreux ouvrages consacré au communisme comme Le KGB en France (Grasset, 1985) ou Le Grand recrutement (Grasset, 1993).

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    " Après Les Bourreaux (tome 1, le communisme d’en haut, du côté du pouvoir) et Les Victimes (tome 2, le communisme d’en bas, du côté de la société), Thierry Wolton achève sa monumentale trilogie «  Une histoire mondiale du communisme  » par ce dernier volume  : Les Complices (le communisme dans les têtes).
    L’auteur s’attache, dans ce volet de son essai d’investigation historique, à tous ceux qui ont permis au communisme de prospérer avec un tel succès dans l’espace et avec une telle longévité dans le temps.
    Les dizaines de PC dans le monde avec leurs millions d’adhérents  ; l’aveuglement idéologique de la quasi-totalité des intellectuels de l’époque  ;   la complaisance de la plupart des responsables politiques occidentaux à l’égard des régimes marxistes-léninistes  ; l’aide apportée par les capitalistes cupides aux économies socialistes  : autant de visages et de formes de complicité.
    A l’heure du bilan, maintenant qu’il est établi que l’espoir s’est mué en tragédie, les responsabilités apparaissent multiples et planétaires, ce qui rend ce passé si douloureux et la volonté de l’oublier impérieuse. Regarder ces vérités en face, sans honte mais sans concession, est pourtant une nécessité si l’on veut comprendre notre époque, héritage direct de ce siècle communiste achevé.
    Fidèle à sa méthode, Thierry Wolton brosse ici un grand récit ponctué de témoignages, d’anecdotes, d’analyses qui viennent compléter sa réflexion. Il montre aussi combien cette aventure humaine a façonné le visage de notre nouveau siècle, faisant de cette Histoire mondiale du communisme un livre au présent. 
    Sa trilogie, saluée par la critique et les meilleurs spécialistes, fait déjà date dans l’historiographie du communisme. "

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  • La boucle est bouclée...

    Nous reproduisons ci-dessous un texte de Slobodan Despot publié dans le n°80 d'Antipresse, lettre d'information gratuite, disponible par abonnement et financée par les dons de ses lecteurs. Editeur et écrivain, Slobodan Despot vient de publier, après Le miel (Gallimard, 2014), un deuxième roman intitulé Le rayon bleu (Gallimard, 2017).

     

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    La boucle est bouclée

    Ce que j’ai cru comprendre du temps où nous sommes

    Bref retour aux origines

    Je suis né dans un pays sans liberté. L’économie y était contrôlée par l’État, à l’exception des toutes petites entreprises. L’éducation y était affaire d’État, sans exception. L’information y était affaire d’État. Tout, en somme, y était affaire d’État, et l’État était socialiste. Il œuvrait en théorie au bonheur futur de tous et en pratique à la satisfaction immédiate de quelques-uns. Les autres devaient se taire et faire semblant de ne pas voir ce qui crevait les yeux: qu’ils subissaient au nom de l’égalité et du progrès un système de castes dramatiquement sclérosé.

    Cela dit, ne tombons pas dans le pathos. Ce n’était pas si grave que ça. On était dans la Yougoslavie de Tito. Comme me l’a résumé une amie roumaine: «Pour nous, sous Ceausescu, la Yougoslavie, c’était l’Amérique!» Le dictateur socialiste était habile et jouisseur. Pourquoi se priver? On construisait l’avenir radieux avec le sale pognon du capitalisme. On se faisait photographier en costume blanc, cigare au bec, une Sophia Loren pendue au bras. Les vedettes de la jet-set croisaient à bord du Galeb, le yacht du nabab rouge, à quelques encablures de Goli Otok, l’«Ile nue» de l’Adriatique où ce bon vivant avait organisé l’enfer sur terre pour ses opposants qui s’y surveillaient et s’y torturaient entre eux, presque sans l’aide de personne. Admirable économie de moyens!

    Mais même cela n’était pas grave. La part de répression brute était négligeable. Tout le monde profitait un peu de la poussière d’étoiles semée dans le sillage du beau bateau blanc. Il suffisait de connaître la ligne rouge — ne jamais parler politique —, et l’absence de liberté se trouvait compensée par un agréable éventail de libertés.

    Or, c’est cela qui compte. Si la liberté est un sujet pour les philosophes, les libertés sont l’affaire de M. Tout-le-monde. En même temps qu’il s’endettait pour des siècles auprès des Américains, le dictateur avait ouvert les frontières, s’assurant ainsi un flux de cash venu du travail des gastarbeiter, cette première vague d’immigrés yougos qui convertissaient leur sueur dépensée sur les chantiers d’Allemagne en maisons prétentieuses et bagnoles kitschdu côté de Belgrade et de Sarajevo.

    Cette alliance déjantée entre l’utopie et le carpe diem a façonné une époque folle, indescriptible et passionnante à vivre. Le cinéma yougoslave se permettait des audaces qui le rendent aujourd’hui improjetable sur une chaîne de grand public. Le rock s’était développé en une contreculture de masse à l’époque où les Polonais et les Russes écoutaient Brassens sous leur couette. Le succès mondial d’un Goran Bregović ne repose que sur le resuçage, à la sauce world-music, de son propre patrimoine rock and roll des années 1970. Et ne parlons pas du paysage halluciné des films d’Emir Kusturica, dont les plans les plus surréalistes, les plus sardoniques, ne sont que des tranches de vie puisées dans ce happening permanent qu’était la Yougoslavie des dernières années. Comme l’a observé quelque part un connaisseur, Patrick Besson, les jeunes Yougoslaves étaient trop occupés à faire l’amour pour penser à l’avenir du pays.

    De toute façon, on y pensait pour eux. Au-dessus des stades bondés, des concerts en plein air, des plages interminables de l’Adriatique où l’on copulait à toute heure, veillaient des hommes mornes en manteaux noirs dont le seul souci était que personne ne lève la tête ni n’ouvre les yeux. L’économie stagnait ou s’effondrait par pans entiers. D’Argentine ou d’Allemagne, les oustachis croates injectaient dans le pays des terroristes fanatisés tandis que leur branche «sortable» restée au pays préparait l’insurrection nationaliste en commençant par ergoter sur l’appellation de la langue serbo-croate. Au Kosovo, le programme de conquête des Albanais s’étalait au grand jour dans des manifestations violentes. Mais dans une société gouvernée par le plaisir et le rêve, rien n’apparaît plus irréel que la blessante rugosité des faits.

    L’illusion dura jusqu’à la mort de Tito dont on différa l’aveu de plusieurs mois, tout le système étant fondé sur son immortalité. Il y eut quelques années de flottement. Puis, du jour au lendemain, les grandes claques dans le dos qu’on s’administrait d’une communauté à l’autre devinrent des coups de poignard ou de kalachnikov. Les mass media qui jusqu’alors n’avaient servi qu’à bercer les foules se transformèrent en dresseurs de chiens de combat. Les doux anesthésistes d’hier — les mêmes journalistes et bateleurs! — se mirent à haranguer les meutes enragées et à leur pointer les prochaines cibles.

    Les paradis brouillés

    On l’aura deviné, je ne déterre ce passé que pour parler du présent. Je ne fais que combattre l’amnésie. L’oubli instantané, le ravalement de la mémoire aux capacités de stockage du reptilien, est un outil clef de la manipulation des masses. Ironie de l’histoire: le souvenir de cette culture de l’oubli est le meilleur vaccin contre les illusions du temps présent.

    Quand on a vécu l’expérience du totalitarisme, ce ne sont pas les théories et les concepts qui remontent à la conscience, mais bien plutôt des ambiances et des comportements. La bienveillance obligatoire, l’irénisme — le «personne-ne-nous-en-veut-et-tout-ira-bien» —, et la réticence à appeler le mal par son vrai nom font partie des éléments inamovibles de ce décor. D’instinct, l’on sait quels sont les «sujets qui fâchent» — voire qui tuent — et comment les éviter. La censure n’a pas grand-chose à voir là-dedans. L’autocensure est infiniment plus efficace, parce que spontanée. Rien de tel que le principe de confort égoïste contre les lancées de fièvre idéaliste.

    L’obligation de concilier le réel avec le souhaitable ressemble à la conduite d’une bicyclette. Tant qu’il y a de l’allure, on roule sans effort. Les régimes idéologiques forts n’ont pas trop de mal avec cela. La chape de plomb marxiste de l’URSS n’a pas empêché les savants de penser ni les artistes de créer. Pas autant, du moins, qu’on aurait pu le croire. On adopte un certain (double) langage, on sacrifie quelques chèvres sur l’autel de la doctrine officielle et l’on poursuit son travail dans son coin. Leurs fatwas officielles stipulant que la Terre est plate n’empêchent pas les principautés obscurantistes arabes d’avoir des compagnies aériennes tout à fait concurrentielles. La vie réelle est faite d’accommodements.

    La situation est plus complexe dans les régimes en perte de vitesse. Quand l’allure faiblit, on finit par investir toute son énergie dans le maintien de l’équilibre. Plus il devient évident que le roi est nu, et plus il devient vital d’empêcher ses sujets de voir ce qu’ils voient. A la longue, l’illusionnisme et la manipulation deviennent les occupations prédominantes du pouvoir.

    A force de s’accommoder, les peuples vivant sous le communisme avaient développé une résilience particulière, faite d’humour noir, de lucidité et de débrouillardise. On avait un masque public et un discours assorti, et puis, rentré chez soi, l’on se démaquillait et l’on se racontait des horreurs sur le régime. Personne n’était dupe. Personne n’aurait parié un sou sur la «réforme» d’un tel système. Le mieux qui pouvait lui arriver, c’était l’effondrement. C’est du reste ce qui est arrivé, et plus tôt que prévu.

    Le régime sous lequel nous vivons en Europe de l’Ouest aujourd’hui ressemble beaucoup à celui de la Yougoslavie déclinante. Il a su ménager, autour des centres inaccessibles du pouvoir, de vastes parcs de détente et de bien-être où les sujets peuvent évacuer leurs frustrations. Il les fait même voter. Mais il est en perte de vitesse et donc il se raidit. Là-bas, l’absence de liberté théorique était compensée par la multiplication des libertés. Ici, la Liberté est constitutionnellement garantie, mais ce sont les libertés qui fondent au jour le jour. A force de restreindre ses champs d’application, elles rendent la Liberté (avec L majuscule) vide de tout sens.

    Pour le reste, l’analogie — à mes yeux — est frappante, du moins jusqu’à un certain point. Au-delà, nous sommes en terre inconnue. Mais commençons par ce qui nous est familier.

    Le grand voyageur et magnifique écrivain Sylvain Tesson a lancé l’autre jour sur France Inter un aphorisme qui a fait mouche: «La France est un paradis peuplé de gens qui se croient en enfer». Il le disait en considération de sa riche expérience du reste du monde, et il avait raison. Du moins pour l’instant présent: un pays magnifique, béni de Dieu, où la nourriture, l’eau et l’énergie abondent, où les terrasses restent pleines et les destinations de vacances surbookées. Des problèmes d’insécurité? Certes. Mais ne devait-on pas se munir de pistolets sur la route de Paris à Versailles, du temps de Chateaubriand? Des problèmes de cohabitation avec l’immigration islamique? Certes. Mais qu’on les compare, par exemple, avec la situation des joviaux Indiens avec leurs 150 millions de musulmans et leur extermination mutuelle il y a deux générations. Un déclin économique inexorable? Un chômage endémique? Certes. Mais on a trouvé le moyen de les évacuer des esprits. De leur enlever toute pesanteur!

    Comme des rats entraînés par un joueur de flûte

    Comment? Comme certains médecins préconisent de traiter les douleurs chroniques: par la diversion. En les masquant d’une douleur aiguë. Quelqu’un se rappelle-t-il de nos grands soucis d’il y a huit ans? De l’angoisse profonde que nous inspirait la récession économique de 2008? Vaguement. Irréellement. Car entretemps, nous avons eu droit à l’élixir d’oubli: l’irruption concomitante et proliférante du terrorisme, de la vague migratoire et du modèle de société islamique. Entre ces trois questions, nous avons pratiquement épuisé les sujets de préoccupation actuels des Français et des Européens de l’Ouest. Le reste du menu est meublé par des enjeux d’une haute importance morale mais d’un impact existentiel quasi nul: le sort des minorités sexuelles ou le réchauffement climatique contre lequel nous ne voulons (ni ne pouvons) rien entreprendre de concret.

    Ajoutez à cela une cascade inépuisable de décrets et de règlements de contrôle et de surveillance motivés par l’alignement idéologique, justifiés par le principe de précaution et rendus possibles par les avancées technologiques, et vous aboutissez à une société où l’Homme tel que défini par la charte des droits du même métal n’est plus qu’un souvenir baroque et encombrant remplacé dans la vie réelle par des unités calibrées et interchangeables, sans aspérités et sans volonté propre légitime.

    Comme dans le communisme, mais sans répression explicite et sans la lourde rhétorique d’un système de pensée, on a créé une humanité docile et hypocrite chez qui les sourires doucereux et la bienveillance obligatoire dissimulent l’annihilation des personnalités. L’humour qui protégeait l’homo sovieticus comme un sous-vêtement pare-balles n’existe pas en Occident. Il n’a pas eu le temps de s’installer. A sa place, règne un désespoir plus amer encore que derrière le Rideau de Fer, car on n’ose même pas souhaiter l’effondrement du système présent et encore moins lui envisager une alternative. L’ingéniérie sociale et la reprogrammation psychologique en milieu libéral-capitaliste ont atteint une profondeur de pénétration dans l’intimité des individus dont les «ingénieurs des âmes» marxistes pouvaient seulement rêver. La différence abyssale des réactions face à l’islam, au flux des migrants ou au terrorisme entre les «bons élèves» de la façade atlantique et les peuples de l’ex-bloc soviétique (ceux du «groupe de Višegrad», par exemple) est symptomatique de cette «réussite». On ne voit pas quel est ce stade de négation de soi, individuel ou collectif, que l’Européen occidental n’acceptera pas de franchir. Le voici déjà à se demander pour de bon — juste parce qu’on lui a ordonné de le faire — s’il est vraiment homme ou femme…

    Ainsi donc, si vous voulez encore cultiver vos traditions familiales, vanter les richesses de votre peuple et de votre littérature, fumer et pisser à l’aise dans votre jardin, voire balancer tous les gros mots qui vous viennent à l’esprit sans aussitôt vous retourner pour voir qui écoute, il ne vous reste plus qu’à émigrer vers l’Amérique du Sud ou, plus sûrement encore, vers l’Europe de l’Est, chez les vaccinés.

    Le Rideau de Fer a renversé ses barbelés et la boucle du communisme est ainsi bouclée. Un grand éclat de rire diabolique résonne de l’Atlantique à l’est de Vienne…

    Slobodan Despot (Antipresse, 11 juin 2017)

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  • Ernst Nolte et les fondements historiques du national-socialisme...

    Les éditions Desclée de Brouwer viennent de rééditer un ouvrage d'Ernst Nolte, désormais classique, Les fondements historiques du national-socialisme, dans une nouvelle traduction assurée par Philippe Baillet. Historien et philosophe, élève d'Heidegger, Ernst Nolte a étudié le phénomène totalitaire à travers le bolchévisme, le fascisme et le nazisme. Il est notamment l'auteur du Fascisme dans son époque (Bouquins, 2008) et de La guerre civile européenne 1917-1945 (Perrin, 2011), ouvrage important qui a suscité de très vifs débats lors de sa parution.

     

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    " Auteur de livres célèbres sur les guerres mondiales, civiles et idéologiques du xxe siècle, Ernst Nolte tente ici de caractériser et de définir les fondements historiques du national-socialisme. Il démontre que ni Hitler ni son mouvement ne peuvent être pensés comme un phénomène simplement « produit » par les circonstances, même exceptionnelles, au sein desquelles ils sont apparus et ont pu prendre les aspects que nous leur connaissons.
    Selon Nolte, le plus grand danger historiographique consiste à réinterpréter les circonstances de départ à la lumière de leur point d'arrivée. Il renverse l'analyse et tourne son attention vers les racines de tous les thèmes idéologiques et historico-politiques qui se sont nourris, avec une efficacité et une virulence extraordinaires, de ces circonstances. La diffusion dans la société (pas uniquement allemande) de l'antisémitisme, du darwinisme social, du nationalisme à base raciale et du bolchevisme ; leur nature idéologique ; leur déformation ultérieure dans l'idéologie de Mein Kampf, etc. : tels sont les grands thèmes d'un ouvrage où se déploie l'analyse noltienne des fondements du national-socialisme. "
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  • Un fonctionnaire de la Grande Terreur...

    Les éditions Gallimard viennent de publier une étude biographique signée par Alexeï Pavlioukov et intitulée Le fonctionnaire de la Grande Terreur : Nikolaï Iejov. Alexeï Pavlioukov est chercheur à l'institut de sociologie de l'académie des sciences de Russie.

     

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    " Le nom de Iejov, ministre du NKVD, la police politique soviétique, est associé pour toujours au moment le plus sinistre de l’histoire russe, celui de la Grande Terreur (1937-1938) et de ses millions de victimes.
    Alexeï Pavlioukov a eu accès aux archives centrales du FSB (les services de police politique), habituellement fermées aux chercheurs, et en particulier aux dossiers d’instruction de Iejov lui-même et de ses plus proches collaborateurs, quand ils furent à leur tour arrêtés. Cherchant à se disculper, tous racontèrent dans le détail comment la machine avait été mise en marche sur ordre de Staline, et comment elle avait fonctionné pendant un peu moins de deux ans avec ses quotas de victimes planifiés.
    Iejov, personnalité banale, sinon falote, apprenti tailleur, soldat adhérant pendant la révolution au parti bolchevik dont il devient un fonctionnaire, s’élève peu à peu à l’intérieur de l’appareil grâce à une vertu que très vite relèvent ses chefs : l'aptitude à exécuter coûte que coûte les ordres reçus, sans états d’âme autres que la promesse d’une promotion. Petit, timide, piètre orateur, inculte, il serait probablement depuis longtemps oublié s’il était resté un homme de l’appareil du parti responsable des cadres et n'avait pas été, par la volonté de Staline, appelé à s’occuper de la police politique.Le lecteur suit pas à pas cette ascension, puis la chute quand Staline décide de mettre fin à la Grande Terreur et de se débarrasser de ses exécutants.
    Iejov fut un rouage essentiel de la Grande Terreur ; sa biographie est en réalité celle d’un système avec la part de hasards, de rencontres, d’opportunités de carrière, de logique bureaucratique et d’effets sanguinaires, dictés tant par l’aveuglement idéologique que par les circonstances d’une réalité qui échappe aux plans et se montre rétive aux programmes. C’est, somme toute, la biographie scrupuleuse d’une criminalité de bureau. "

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  • Quand on sonne les cloches à Richard Millet...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Jean-Paul Brighelli, cueilli sur son blog Bonnet d'âne et consacré au dernier épisode en date de la chasse à l'homme lancée par la bien-pensance contre l'écrivain Richard Millet...

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    Quand on sonne les cloches à Richard Millet, ce n’est pas l’angélus !

    De Richard Millet, je ne sais pas grand-chose. Nous fîmes une émission ensemble chez Ardisson en 2005, je venais de sortir la Fabrique du crétin, et lui le Goût des femmes laides — un joli roman fort bien écrit sur un sujet somme toute assez peu labouré, sinon par Brassens dans une chanson moins connue que d’autres.
    Puis il a disparu de mon radar jusqu’en 2012. Cette année-là, il publiait Langue fantôme, un pamphlet sur l’état assez peu littéraire de la langue littéraire actuellement en usage en France, suivi d’un (très court) Eloge d’Anders Breivik, éloge paradoxal qui lui servait de prétexte à fustiger cette Europe ouverte à toutes les migrations. Et non, comme ont voulu le croire tous ceux qui ne l’avaient pas lu, à célébrer le tueur norvégien.
    Emoi dans Boboland ! Annie Ernaux se fendit aussitôt dans le Monde d’une tribune-pétition, co-signée par une foule d’écrivains connus (Le Clézio, dont Millet cultive une sainte horreur depuis vilaine lurette) et inconnus (tous les autres) réclamant la tête de l’imprécateur de ce vivre-ensemble que la rue de Grenelle, à la même époque, érigeait opportunément en totem de l’Education. Millet, qui vivait essentiellement d’un poste de lecteur chez Gallimard (à qui il a tout de même permis d’obtenir le Goncourt au moins en deux occasions, pour les Bienveillantes et pour l’Art français de la guerre) se trouva fragilisé, marginalisé, et confiné dans une léproserie. En attendant le prochain faux-pas qui permettrait de lui coller douze balles dans la peau et la tête dans la lunette de la Veuve.
    Du coup, je m’étais intéressé aux écrits polémiques de ce garçon un peu trop chrétien pour moi, qui se la joue « hanté pénultième » selon le joli mot d’un critique, mais qui dit des choses justes sur l’état actuel de la littérature française (pas très loin de ce qu’avaient asséné en leur temps Pierre Jourde dans la Littérature sans estomac et Jourde & Naulleau dans leur Précis de littérature du XXIème siècle) et l’apocalypse molle dans laquelle on engloutit la langue, littéraire ou non — dans une déconstruction dont j’ai moi-même analysé la chronologie, les intentions et les effets dans Voltaire ou le jihad.
    Sur ce, Millet, briguant manifestement la palme du martyre, a accumulé aux éditions Pierre-Guillaume de Roux ou Fata Morgana les petits essais assassins. Evidemment, la Bien-pensance Unique ne l’avait pas lâché, et il ne l’a pas lâchée. Ainsi, quand notre homme, dans un article publié dans la Revue littéraire et intitulé « Pourquoi la littérature française est nulle », a récemment tiré à vue le dernier livre de Maylis de Kerangal (qui ça ?), ex-signataire de la pétition Ernaud — une dame très bien du tout-Paris qui compte —, le petit peuple des écrivains en cour a supplié Antoine Gallimard de se débarrasser enfin du trublion… Tous (BHL en tête, qui ne s’en serait douté ?) ou presque tous — Sollers par exemple a intelligemment continué à dialoguer avec Millet, expliquant que « Richard Millet a eu un tort, celui de mêler à ses considérations sur la littérature des idées politiques, et des idées politiquement incorrectes. Elles ont permis à l’opinion, surtout l’opinion militante, se voulant extrêmement engagée, de l’accuser, avec des mots injurieux, d’être révisionniste et d’avoir écrit une immondice ; allant jusqu’à s’en prendre aux éditions Gallimard en s’exclamant : « Comment avez-vous pu publier une chose pareille ?! » Cette immédiateté de la réaction inquisitoriale, et je dirais même stalinienne, m’amène à dire que désormais, n’importe quelle interprétation peut avoir lieu sur des motifs « politiques » – je mets des guillemets – où on accuse d’emblée l’autre de racisme, d’ antisémitisme, etc., et je trouve que ça commence à bien faire. Pas vraiment parce que ça m’indigne « personne ne ment davantage qu’un homme indigné », a dit Nietzsche – mais parce qu’il y a une volonté d’éviter le débat de fond, c’est-à-dire ce que Richard Millet voit comme un désenchantement, un effondrement, une dévastation de la littérature, et sur quoi je suis en partie d’accord.»Pour avoir écrit ces lignes, il sera beaucoup pardonné à Sollers.
    Comme nous l’avons vu avec Kamel Daoud, la pétition-indignée-fatwa est l’actuel substitut du couteau de boucher dans le Nouveau Totalitarisme de l’Impensée-Unique. Antoine Gallimard, qui a un côté anarchiste bourgeois, avait longtemps fait le gros dos devant les hurlements des pintades. Mais bon, Mme de Kerangal est un auteur-maison, il y avait comme une déloyauté à pointer sa vacuité tout en travaillant pour la rue Sébastien-Bottin — désormais rue Gaston Gallimard…
    Aux dernières nouvelles, rapportées par Jérôme Béglé dans le Point, Millet prend la porte. Pas content, le bougre.

    Qu’on me comprenne bien.
    Comme Pierre Jourde qui a écrit sur le sujet des choses sensibles et définitives, je suis très loin de co-signer toutes les déclarations de Millet. Mais qu’un quarteron de littérateurs s’arroge le droit de demander sa tête me révulse. Que le trio infernal Louis / Lagasnerie / Eribon pense avoir le droit de dire qui doit vivre (les homos de gauche ?) et qui doit mourir (les hétéros de droite ?) me paraît symptomatique d’une époque qui faute de savoir se colleter au réel s’en remet encore une fois à l’idéologie : c’est vrai en littérature, en Education et en Economie, sans parler des Affaires étrangères. La question n’est même pas de savoir si Millet a raison de dénoncer comme il le fait l’emprise de l’Islam et le métissage — il y a dix mille manières de le dire. Le problème est qu’on lui interdise de parler — quoi qu’il dise. Qu’on lui interdise de vivre — quoi qu’il fasse. Que les petits marquis de la Gauche (je reviendrai quelque jour sur ce que le Point, il y a peu, appelait finement « la gauche Finkielkraut ») profitent bien des micro-particules de pouvoir qu’ils pensent aujourd’hui posséder. Le retour de bâton pourrait être terrible, et je ne lèverai pas le petit doigt pour leur épargner la géhenne — comme dirait Millet qui pense Bible en main, Belzébuth m’en préserve !

    Jean-Paul Brighelli (Bonnet d'âne, 4 mars 2016)

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