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europe - Page 156

  • Retour au Camp des Saints...

     « La pitié ! La déplorable, l’exécrable pitié, la haïssable pitié ! Vous l’appelez : charité, solidarité, conscience universelle, mais lorsque je vous regarde, je ne distingue en chacun de vous que le mépris de vous-mêmes et de ce que vous représentez. […] En pariant sur la sensibilité, que vous avez dévoyée, des braves gens de chez nous, en leur inculquant je ne sais quel remords pour plier la charité chrétienne à vos étranges volontés, en accablant nos classes moyennes prospères de complexes dégradants […], vous avez créé de toutes pièces au coeur de notre monde blanc un problème racial qui le détruira, et c’est là votre but. »

     

    Les éditions Robert Laffont viennent de rééditer Le Camp des Saints, l'extraordinaire roman de Jean Raspail, publié initialement en 1973, qui met en scène l'invasion pacifique d'un Occident impuissant par le Tiers-Monde. Visionnaire, prophétique, le livre l'était en identifiant les maux dont souffre notre civilisation et qui provoquent son effondrement : irénisme, veulerie, bienpensance, haine de soi, lâcheté... L'auteur a fait précéder cette nouvelle édition d'une longue préface, particulièrement incisive, intitulée Big Other, qui se veut un dernier cri d'alarme avant la submersion définitive.

    Nous reproduisons ci-dessous un entretien de l'auteur avec Bruno de Cessole, publié par l'hebdomadaire Valeurs actuelles.

     

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    Jean Raspail : “Ouvrir les yeux sur les mensonges”

    Revenant sur l’étonnante aventure de son livre, Jean Raspail raconte sa genèse comme les raisons de son audience, et confie ses ultimes convictions.

    Votre livre le Camp des saints, qui est réédité ce mois-ci avec une importante préface inédite, a été publié la première fois en 1973. Comment s’est imposé à vous ce que l’on peut considérer com­me votre premier grand ro­man ?

    Effectivement, j’avais publié auparavant deux romans de jeunesse qui n’avaient pas eu beaucoup d’écho, et des récits de voyage qui avaient touché un assez large public. L’image qu’ils donnaient de moi était celle d’un écrivain voyageur, qui se penchait avec intérêt et sympathie sur des peuples étrangers ou des minorités oubliées. Le Camp des saints tranchait de façon radicale à la fois avec cette image et avec la nature de mes précédents ouvrages, et même tranche avec mes romans ultérieurs. Si un livre m’a été “donné” ou “inspiré”, ce fut bien celui-là, encore que je n’accorde pas une considération particulière à la notion romantique de l’écrivain “mage et prophète”…

    On m’avait prêté une villa au bord de mer, dans le Midi. De la pièce que j’avais choisie pour écrire j’avais une vision à 180° sur l’horizon. Un jour que je contemplais cette vue idyllique, je me suis dit : « Et s’Ils arrivaient de la mer ? » Je me suis vu à la place du vieux professeur qui, du haut de sa terrasse, aperçoit dans sa longue-vue une armada de rafiots en ruines avec leur cargaison d’émigrants misérables rêvant à la Terre promise de l’Occi­dent.

    Je n’avais aucune idée de ces “Ils”, et pas davantage des personnages du roman, de l’intrigue et moins encore de sa fin. J’ai commencé à écrire, sans aucun effort, ce qui ne m’était pas naturel, et deux ans plus tard le livre était achevé. Le titre m’est venu de la lecture de l’Apocalypse, du chapitre 20, qui annonce qu’au terme de mille ans, des nations innombrables venues des quatre coins de la Terre envahiront « le camp des saints et la Ville bien-aimée ».

    En aucune façon vous n’avez été sensible à la pression de l’actualité ?

      Nullement, car on parlait peu à cette époque des flux migratoires. C’est sous la présidence de Giscard qu’a été inaugurée la politique de regroupement familial, qui a généré ces flux. Le Camp des saints ne fait pas référence à une communauté précise d’émigrants. Il n’est question ni des populations du Maghreb ni de l’Afrique, et aucunement d’une communauté religieuse particulière.

    Les migrants que j’évoque représentent le tiers-monde dans son ensemble. Si je les appelle les « gens du Gange », c’est que l’idée de multitude innombrable était liée dans mon esprit au continent indien. Quant à l’armada de bateaux hors d’âge sur lesquels ils embarquent, il s’agit d’une réminiscence de l’Exodus et aussi du phénomène plus récent des boat people, à cette exception près que les raisons de l’exode de ces derniers étaient politiques.

    Quelles ont été les réactions de l’éditeur à la réception de votre manuscrit, puis de la presse et du public à la sortie du livre ?

    Robert Laffont, mon éditeur, et toute son équipe lui ont réservé un accueil très chaleureux. Du côté de la presse, qui, au début, n’a pas été très abondante, les journaux de gauche sont restés silencieux et, dans la presse de droite, le livre, s’il a été loué par Valeurs actuelles, sous la plume de Pol Vandromme, a été éreinté par le Figaro

    En fait, la critique s’est surtout manifestée lors de la réédition de 1985, pour laquelle j’avais donné une préface, sous le premier septennat de François Mitterrand. C’est alors que j’ai fait l’objet d’un tir de barrage et qu’on m’a décrété infréquentable. Il y a eu de vio­lentes attaques, notamment celle de Max Gallo, qui, depuis, a quelque peu changé d’avis…

    À l’étranger, le Camp des saints a été traduit dès 1975 aux États-Unis chez Charles Scribner’s Sons à New York et a suscité quantité d’articles. Le livre a été bien accueilli du public, et même des universitaires, qui l’ont inscrit au programme de plusieurs établissements. Dans la foulée, de nombreuses traductions étrangères ont suivi… En France, le livre s’est écoulé à 15 000 exemplaires, moins que ce qu’espérait Laffont, puis, vers la fin de 1974, alors qu’il aurait dû achever sa carrière, les commerciaux, à leur surprise, ont observé qu’il poursuivait sa progression. Jusqu’à la réédition de 1985, quelque 8 000 exemplaires par an, en moyenne, se sont vendus grâce au bouche à oreille. Je n’ai jamais rencontré un seul de ses lecteurs qui n’en en ait acheté qu’un exemplaire. Ils le prê­taient, on ne le leur rendait pas, ils en acquéraient un autre. Ainsi le Camp des saints a-t-il élargi son audience pour atteindre, toutes éditions et traductions confondues, près de 500 000 exemplaires jusqu’à aujourd’hui.

    Attachez-vous un prix particulier à cette réédition de 2011 et à la préface “musclée” que vous avez rédigée, sous le titre : « Big Other »?

    Cette réédition revêt pour moi une importance plus haute que les précédentes car il me semble que le moment où elle s’inscrit est crucial. La vi­sion développée dans le roman sera sans doute une réalité au­tour de 2050. La plupart des démographes sont d’accord sur le caractère inéluctable du phénomène, qui touche d’autres pays d’Europe. Les minorités dites visibles seront alors des majorités et ce sont les Français dits de souche qui seront minoritaires. Des pans entiers de ce pays seront peuplés de Français d’origine extra-européenne.

    On me dira que la France a été constituée par des vagues d’immigration successives. Certes, mais l’immigration des siècles précédents était composée d’immigrés d’origine européenne, qui, en deux ou trois générations, se sont intégrés dans le modèle français. Or, le modèle d’intégration républicain se révèle inopérant depuis au moins une décennie. On assiste à la prolifération du communautarisme, à la juxtapo-sition de groupes revendiquant leurs différences ethniques, religieuses, culturelles, qui ne se reconnaissent pas dans le “vouloir vivre ensemble” qui fait le ciment d’une nation, comme le soulignait Renan.

    Je défie nos gouvernants de prétendre qu’il s’agit là d’un progrès. Nous sommes ou serons confrontés à un retour à la tribalisation, qui m’apparaît comme le contraire de la civilisation. On a beaucoup parlé, récemment, de la nature de l’identité française, des limites de notre capacité assimilatrice, et puis on a enterré le débat dès que Big Other a froncé le sourcil. Qu’est-ce que Big Other ? C’est le produit de la mauvaise conscience occidentale soi­gneusement entretenue, avec piqûres de rappel à la repentance pour nos fautes et nos crimes supposés –  et de l’humanisme de l’altérité, cette sacra-lisation de l’Autre, particulièrement quand il s’oppose à notre culture et à nos traditions. Perversion de la charité chrétienne, Big Other a le monopole du Vrai et du Bien et ne tolère pas de voix discordante.

    Je n’ai jamais été un écrivain engagé, mais je n’ai jamais, non plus, dissimulé mes convictions, et j’aimerais que le Camp des saints ouvre les yeux des lecteurs sur les mensonges et les illusions qui pervertissent notre vie publique. Depuis sa parution, j’ai reçu énormément de courrier, et j’ai discuté avec nombre d’hommes po­litiques, de droite et de gau­che. Ce qui m’a frappé, c’est le contraste entre les opinions exprimées à titre privé et celles tenues publiquement. Double langage et dou­ble conscience… À mes yeux, il n’y a pire lâcheté que celle devant la faibles­se, que la peur d’opposer la légi-timité de la force à l’illégitimité de la violen­ce.

    Je crains, hélas ! que l’épilogue de la pièce ne soit déjà écrit, mais j’aurai au moins joué mon rôle d’estafette et essayé de libérer le pouvoir de la parole. À l’âge que j’ai, du reste, je n’ai plus rien à perdre : cette réédition est ma dernière “sortie”. L’occasion de rappeler, sans mépris et sans haine, que l’Autre, contrairement à ce qu’assurait François Mitterrand, n’est pas totalement chez lui chez moi !

    Propos recueillis par Bruno de Cessole (Valeurs actuelles, 10 février 2011)

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  • Pourquoi la crise continue ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un article, cueilli sur Flashblog, de Pierre Le Vigan, consacré à la crise et à la guerre des monnaies qui va l'amplifier...

     

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    Pourquoi la crise continue... et pourquoi menace une guerre des monnaies

    Fin janvier, au forum de Davos en Suisse il a été question une nouvelle fois de réguler l’économie mondiale. Président temporaire du G20 et du G8, Nicolas Sarkozy n’est jamais le dernier à afficher de grandes ambitions dans ce domaine. Preuve que la régulation automatique du marché ne satisfait personne. A vrai dire, les théories de l’économie de marché ont souvent fait sourire. Elles supposent des agents rationnels, et ils ne le sont pas toujours. Elles consacrent peu de place à l’Etat, or il est omniprésent dans l’économie depuis la guerre de 1914 voire avant. Bref, ces théories paraissaient irréalistes.

    Une économie de casino ?
    Pourtant elles le sont de moins en moins. Pourquoi ? Parce que le monde réel ressemble de plus en plus à une économie de marché. Parce que l’économie de casino devient le fond réel de l’économie de marché « pure et parfaite ». Les Etats pèsent désormais moins, beaucoup moins, que les multinationales et que la finance. L’industrie n’est plus nationale. Et elle est à la remorque de la finance. Les investissements industriels, par définition à moyen et long terme, sont moins rentables que les spéculations financières, par définition à court terme. Les peuples et leurs représentants ne pèsent désormais plus grand-chose. On a pu dire des réunions du G20 que c’était un groupe d’anciens alcooliques qui se réunissaient pour décider de ne plus boire et qui se séparaient sans rien avoir décidé mais… en ayant pris un dernier verre. Ce dernier verre, c’est la dette mais plus encore la cause de la dette : la finance prédatrice, l’hyperclasse exigeant son taux de rentabilité.

    Jacques Attali remarque justement : « une économie de marché sans Etat, surtout si l’information est imparfaite, ne trouve son équilibre qu’à un niveau de sous-emploi des facteurs. » (Slate.fr, 12 novembre 2010). Autrement dit, l’ajustement se fait sur la base d’une compression de la demande. Nous en sommes là. Avec en prime la guerre des monnaies.

    La Chine ne veut pas réévaluer son yuan (ou renminbi selon son nom officiel). La monnaie chinoise n’est pas convertible donc pas soumise à des tensions ce qui accessoirement empêche toute démocratisation au sens occidental quand bien même le gouvernement chinois en aurait le goût. Plus de la moitié du PIB chinois est exporté : c’est dire l’enjeu. Puisque les Américains veulent maintenir leur dollar bas, les Chinois doivent maintenir bas le taux de change de leur yuan.

     

    La Chine avec un yuan faible, et une main d’œuvre de plus en plus qualifiée reste donc hyper-compétitive. Elle exporte de plus en plus, accroit son excédent donc son déséquilibre commercial avec l’Amérique, et investit cet excédent en bons du Trésor américain et fonds de pension. La Chine est donc le premier créancier des USA qui eux mêmes ont tout intérêt à un dollar sous-évalué. Pour deux raisons : rester un tant soit peu compétitif, et diminuer la valeur de leur dette.

    Chine et EUA : les deux ont intérêt à un euro surévalué. Les deux craignent que le premier marché mondial, la zone euro, devienne la première force mondiale. Mais qui mène le bal ? Philippe Dessertine note : « Le coupable premier, actuellement, ce sont les Etats-Unis, comme ils sont d’ailleurs généralement à l’origine de la dette folle ayant créé la crise de 2007-2008 et se prolongeant dans la crise économique et dans la crise de la dette souveraine actuelle. La Chine a d’abord financé la dette américaine, acceptant de devenir le premier détenteur de dette publique américaine (en dollars), avec comme contrepartie la possibilité d’asseoir sa croissance sur des exportations massives. » (« si la guerre des monnaies se poursuit… », Le Monde, 12 novembre 2010).

    La finance de plus en plus loin de l’économie réelle
    Or depuis la crise de 2008 l’économie réelle, l’économie de production ne s’est pas rapprochée de l’économie financière. Au contraire. Début 2007, la Banque centrale européenne détenait 900 milliards d’euros, elle en détient prés de 2000 fin 2010. La FED soit la banque centrale américaine est passée dans le même temps de 1200 à 2300 milliards de dollars. Un doublement en trois ans ce n’est pas la croissance de l’économie réelle c’est l’emballement de la financiarisation. Et l’un des indices de cela, c’est que les banques centrales ont du garder les actifs dépréciés qu’elles ont acquis. Sauvant ainsi le système bancaire privé avec l’argent public.

    La crise continue pour plusieurs raisons. Dans l’économie réelle les délocalisations se poursuivent. Depuis 2002 la hausse du prix des matières premières a été considérable. Pétrole et métaux sont de plus en plus couteux à extraire : cette hausse est donc structurelle. Cette hausse des matières première a accru les réserves de changes des pays producteurs. Elles ont été multipliées par 5 de 2002 à 2007. Total mondial des réserves de change : dans les 9000 milliards de dollars, soit 14 % du PIB mondial. Des réserves de change en dollar, et en bonne part détenues par la Chine, à hauteur de 2500 milliards de dollars : près du tiers des réserves mondiales. De cet excédent de liquidités se sont ensuivis des produits financiers parasites créant des bulles spéculatives qui ont fini par éclater avec la crise des ‘’subprimes’’ c’est-à-dire des prêts à hauts risques. Exemple de ces produits financiers : la titrisation soit le refinancement de dettes à long terme.

    « C’est là où se situe la principale dérive du système : rajouter un endettement qui a pour seul objectif d’améliorer le rendement. »  écrit Jean-Hervé Lorenzi (slate.fr, 27 octobre 2010). La crise de confiance dans le système bancaire depuis 2007 amène une baisse des crédits accordés, et la récession qui va avec. Le noeud de la crise est un excès d’épargne, un excès d’exigence de rentabilité des investisseurs, et une insuffisance de la demande. La crainte de la faillite d’un Etat surendetté (Grèce ou Irlande) amène à des hauts niveaux de primes de risque. Elle amène aussi à une guerre des monnaies. Une guerre dans laquelle l’Europe est désarmée. Car l’écart se creuse entre les BRIC, qui vont vers une croissance de 6 à 10 %, et les EUA et l’Europe, qui stagnent. Aux EUA l’immobilier ne repart pas, le crédit est rare, le chômage reste considérable (9%). Les fonds de pension US qui doivent financer la retraite des Américains manquent de 6600 milliards de dollar soit 45 % du PIB américain. Mais les plans de relance gouvernementaux vont limiter les dégâts et la monnaie américaine reste la principale monnaie de réserve mondiale. Les Américains produisent autant de dollar que nécessaire pour eux : un privilège qu’ils sont seuls à détenir. Il en est tout autrement pour l’Europe. Tout son flanc sud (Grèce, Espagne, Portugal…) est menacé par la montée des dettes souveraines.

    Dans ce contexte, la Chine joue le rachat des dettes. C’est le moyen pour elle de soutenir la monnaie des autres pays à un niveau au dessus de la sienne. Une façon là encore de sous évaluer son yuan. Le yuan faible est en effet « la garantie de la puissance chinoise » (Moises Naim) : il permet les exportations chinoises, et en rendant très chers les produits importés, il protège leur marché intérieur de la concurrence étrangère. Et c’est pourquoi la Chine peut avoir des réserves de change de la Chine égales à prés de la moitié de son PIB (40 %), le 2eme du monde avec 5500 milliards de dollars.

    Que faire ? C’est la question qui se pose aux Américains mais aussi à l’Europe. Rétorsion ? Taxation des exportations chinoises ? Les Américains le peuvent, mais la Chine ne manque pas de rappeler que ceux qui s’y risqueraient porteraient la responsabilité d’une crise sociale majeure dans un pays d’1,3 milliards d’habitants. Qui veut jouer avec cela ? Si les grands pays industriels ne veulent pas se lancer dans le protectionnisme, trop inquiets d’une contraction brusquée des échanges, l’arme monétaire reste une tentation. A défaut d’obtenir une substantielle réévaluation du yuan les Américains peuvent toujours maintenir le dollar le plus bas possible, ce qui limite l’invasion de leur marché par les produits chinois.

    Reste que tant que la Chine achète les dettes des occidentaux, le monde, et d’abord les USA, connait un trop plein de liquidités d’où des taux d’intérêt très bas, et donc une incitation au surendettement des ménages. Or, plus chacun s’endette, plus il y a de dettes à racheter. Solution : que chaque pays reconquiert son marché intérieur et que la production chinoise s’oriente vers… le marché chinois.

    Bref il faut plus d’économie autocentrée et moins de mondialisation pour limiter les risques de conflagration et de répercussions en chaine des crises des uns et des autres. Il faut certainement aussi une Europe plus autocentrée au niveau financier, d’où l’idée qui chemine d’un Trésor européen. Anton Brender, chef économiste de la banque Dexia note : « Il faut quelqu’un qui achète les dettes ; or, même à l’échelle de la zone euro, il n’existe pas de Trésor commun. Voilà toute l’ambiguïté de l’Union monétaire européenne. Elle est dotée d’une même monnaie, mais la Banque centrale européenne ne dispose d’aucune autorité en matière prudentielle vis-à-vis des banques ». (Le Figaro, 24.09.08). En d’autres termes : intervenir, prévenir la spéculation et mutualiser les risques. C’est déjà ce qu’affirmait Pierre Hillard dans La marche irrésistible du nouvel ordre mondial, F-X de Guibert, 2007).

    Indépendance européenne ou nouvel ordre mondial ?
    L’ennui, c’est que beaucoup voient toute action européenne comme une simple étape vers une gouvernance mondiale, et que celle-ci dans l’état actuel des choses ne peut être autre chose que la pérennisation de la domination de l’hyper-classe. Alors, comment fait-on ? Et si on revenait aux idées simples ? L’Europe souveraine, l’Europe protectrice de ses nations plutôt que l’Europe tremplin vers le grand marché mondial. Jean-François Jamet suggère de son coté que l’intérêt des pays émergents (surtout les BRIC – Brésil, Russie, Inde, Chine -, et la Turquie) serait d’évaluer leur monnaie non par rapport au seul dollar mais par rapport à un panier de monnaies. « Ce panier pourrait par exemple inclure le dollar, l’euro, le yen – éventuellement la livre britannique et le franc suisse – à proportion du poids de chacune des zones monétaires correspondantes dans les échanges de ces pays. » (Les Echos, 17 décembre 2010). Un usage multipolaire de la monnaie. Ce qui ouvrirait la voie vers un autre ordre mondial. Mais ce n’est pas seulement d’un rééquilibrage dont le monde a besoin. C’est d’une autre conception de la place de l’économie. Le président du forum économique de Davos, Klaus Schwab, constate : « Cette année, l’économie mondiale va croître de 5%. Si ce rythme se maintient, elle doublera de taille en quinze ans, ce qui signifie aussi que l’utilisation des ressources sera multipliée par deux, sauf si bien sur, on parvient entre temps à améliorer l’efficacité énergétique. Dans ces conditions, nous allons être confrontés à un problème de pénurie, un thème qui sera présent dans nos discussions de Davos. » (La Tribune, 26 janvier 2011). La hausse des prix des matières premières y compris les plus vitales, celles des produits alimentaires, est un signe. Ses conséquences politiques, nous les voyons déjà au Maghreb. Parce que cela commence toujours par les plus fragiles. Avant de remonter vers les pays faussement solides. La France par exemple. Développer l’homme et non seulement les biens matériels et l’argent : un sacré défi.

    Pierre Le Vigan (Flashblog, 10 février 2011)

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  • Que reste-t-il de l'Europe ?...

    Les éditions Le retour aux sources, dirigées par Michel Drac, publient autour d'une équipe composée de Pierre-Yves Rougeyron, Romain Bessonnet, Julien Auba, Philippe Arondel, Alain Rohou et Maurice Gendre le premier numéro de la nouvelle collection de la revue Libres.

     

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    Le paysage éditorial français se divise entre chapelles jalouses qui se disputent les âmes désarmées à coup de chacun chez soi. Revue de droite, de gauche, libérale ou non, autant de ghettos mentaux qui ne peuvent rendre compte de l’incroyable vivacité de l’esprit français. Les seigneurs du ghetto veillent à ce que les croyants soient bien gardés, et les commissaires aux idées propres font respecter la dure ligne partisane. Un entre-soi confortable ponctué de quelques trublions comme autant d’alibis du pluralisme et de garantie de ventes : tout dialogue ouvert devenu suspect, de nouvelles infractions à la bienséance de l’esprit sont inventées au fur et à mesure que leur possibilité apparaît. Et gare aux contrevenants !

    Ce que vous vivez n’existe pas : telle est la profession de foi d’une caste sourde autant à la vie de l’esprit qu’à celle du peuple. Un constructivisme délirant devenu guerre de l’information : voilà ce qu’il faut attendre d’une bonne partie de « l’élite » intellectuelle et médiatique. Mensonges et lynchages sont désormais les règles de survie d’une meute déstructurée, mais mystérieusement capable de reconnaître au premier coup d’œil qui peut parler, et qui doit se taire. Frapper tous au même endroit et au même moment au nom de la morale commune, avec, toujours, un alibi commode pour cacher des intérêts bien compris : voilà le mot d’ordre.

    C’est en réaction à cette situation de moins en moins supportable que nous avons décidé d’interroger les sans voix, ces intellectuels et chercheurs que les médias traditionnels n’interrogent pas, ou peu, car on ne saurait les ranger dans les cases commodes de la pensée officielle, sclérosée et, volontairement, sclérosante. Notre critère de sélection est donc tout trouvé : les hommes et les femmes qui participeront à notre aventure seront choisis pour la liberté de leur pensée, dans toute la diversité que ce choix implique.

    Nous essayerons sans doute aussi, en mêlant les contributions de jeunes auteurs à celles des plumes confirmées, de participer à la définition d’une vision actualisée des enjeux à venir. Nous promettons, à ceux qui voudront bien nous suivre, une réflexion sur les enjeux stratégiques, qui permettra de traiter les questions d’actualité à froid, pour laisser à l’esprit son temps de délibération. Mais plus l’arc est bandé plus la flèche est vive, et nous espérons prouver la véracité de cet adage.

    Il est temps de réaffirmer que la culture française permet de fonder une réflexion fructueuse, à partir de concepts et de catégories qu’elle définit souverainement. Il ne s’agit pas ici de nier les apports étrangers, mais de réapprendre, ensemble, à penser en français, proprement, nettement. Nous nous tiendrons loin de la repentance qui voudrait effacer l’avenir, parce que, précisément, c’est l’avenir qui nous intéresse. Nous préférons l’histoire des héros à la mémoire des salauds, et il n’est d’hommes dignes à nos yeux que ceux qui sont encore capables d’admirer, ce que nous ne manquerons pas de faire en rendant hommage aux géants d’hier et d’aujourd’hui.

    Multidisciplinaires, sans enfermement partisan et indifférents au cloaque mental que devient progressivement le débat public, nous sommes et nous resterons Libres.

    Le premier numéro est consacré au thème : Que reste-t-il de l'Europe ?

    La crise de l’Europe donne lieu à des commentaires contrastés – entre l’effondrement prédit par les euroréalistes, qui posent que toute construction hors-sol est vouée à disparaître, et l’emballement des euro-inconditionnels, pour qui la faillite de l’idée européenne n’est tout simplement pas pensable. Il faut dire que si les plans de sortie de crise, de remise à plat même, existent bel et bien, ils ne sont pas portés par des élites au pouvoir. Lesquelles, nouveaux médecins de Molière, savent mieux saigner que sauver leur patient.

    Et pourtant les échéances arrivent à terme. La crise de l’Euro, comme l’explique Jean-Luc Gréau, va remettre en cause l’équilibre communautaire. Les questions sociales (Philippe Arondel) et géostratégiques (Jean-François Susbielle) se feront de plus en plus présentes dans un contexte général de destruction des États (David Mascré et Pierre Hillard).

    Plus profondément les essentielles questions d’identité se sont effacées du débat (Bernard Bruneteau). C’est sur ces questions que reviennent, dans un magnifique échange, Jean-François Mattéi et Françoise Bonardel.

    L’exhaustivité n’est pas de ce monde, mais nous souhaitons en tout cas que les jalons ici posés soient, pour nos lecteurs, d’utiles munitions à l’heure de repenser l’idée européenne.

    Avec les interventions de :

    Sur l’hypothèse d’une culture européenne
    Entretien avec Françoise Bonardel et Jean-François Mattéi

    Sortons de l’Europe
    Entretien avec Guillaume Bigot

    La destruction des nations d’Europe
    Entretien avec Pierre Hillard

    Le concept d’Europe
    Entretien avec Jean-François Susbielle (École militaire)

    Modèle social européen : le temps de toutes les déconstructions
    Par Philippe Arondel

    Triomphe des nationalistes flamands, une Europe en voie de désagrégation
    Par David Mascré, essayiste

    L’agonie de l’euro
    Par Jean-Luc Gréau, économiste

    L’Europe des fantasmes, « gouvernance » et « peuple européen »
    Par Véronique Hervouët, psychanalyste

    La conjonction de deux grands paradigmes économiques sur la protection des économies nationales : Keynes ET Allais
    Par Frédéric Poulon

    L’audace politique des commencements
    Par Philippe Arondel

    Religion, raison et ruse : formes du discours et milieu carcéral
    Par Lucas Degryse

    Quelle souveraineté pour quelle identité ?
    Par Francis Choisel

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  • Dix questions sur les "révolutions arabes"...

    Se poser des questions, c'est commencer à réfléchir !... Nous reproduisons ci-dessous l'éditorial de Polémia, daté du 2 février 2011, qui pose de bonnes bases de départ pour analyser ce flot d'images et de paroles qui nous submerge depuis plusieurs semaines.

      

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    Dix questions sur les "révolutions arabes"


    Que sait-on vraiment ?

    Des manifestations, des émeutes, des morts, un dictateur en exil, un autre fragilisé. Voilà ce que nous savons. Mais pour le reste « les écrans font écran » à la réalité et les interrogations sont multiples : peut-on croire à la spontanéité des manifestations ? Quelle est l’ampleur des pillages ? Et quelle est leur origine ? Que se passe-t-il en dehors des capitales et dans les provinces rurales ? Quels sont les jeux des différents groupes d’intérêts ? Quel est le poids des ingérences étrangères ?

    Quelles sont les raisons de l’asymétrie médiatique ?

    Les médias français – et occidentaux – ont été plus « allants » sur la Tunisie que sur l’Algérie et l’Egypte : 50 ans après l’indépendance, le FLN algérien et l’armée algérienne, quasi maffieuse, continuent de bénéficier d’une image « progressiste » ; quant à l’Egypte, il est difficile d’oublier son rôle de partenaire privilégié d’Israël et des Etats-Unis, pays qui souhaitent une « transition ordonnée ». Ce qui conduit les médias dominants à davantage de prudence sur l’Egypte que sur la Tunisie, pays moins stratégique.

    Jusqu’où ira l’impérialisme américain ?

    Au nom du « devoir d’ingérence » humanitaire les chancelleries occidentales prennent position publiquement dans les processus politiques en cours dans les pays arabes. Les Américains vont plus loin : en Tunisie, ils ont provoqué le départ de Ben Ali – qu’ils préparaient depuis trois ans – en s’appuyant sur le chef de l’armée, le général Rachid Ammar ; en Egypte, les mêmes Américains promeuvent simultanément le général Suleiman, chef des services de renseignement et jugé proche d’Israël, et Mohamed El Baradeï. Les pays européens s’alignent sur ces positions : il est vrai que la lecture des dépêches diplomatiques américaines publiées par Wikileaks fait apparaître bien des dirigeants politiques allemands, britanniques et français comme de simples « fantoches » des Américains.

    Quelle est la géopolitique des populations ?

    Partout ce sont des masses de jeunes hommes qui se mettent en mouvement. L’âge médian des populations est de 30 ans en Tunisie, de 24 ans en Egypte. Pourtant la situation de ces deux pays paraît nettement différente : la Tunisie est en transition démographique depuis 1990, le taux de fécondité y est inférieur à 2 enfants par femme et Tunis n’a que 700.000 habitants. Le Caire, 16 millions ! Et il naît encore en Egypte plus de 3 enfants par femme. Et 10% des Egyptiens sont des chrétiens coptes. Le potentiel explosif de l’Egypte est donc très supérieur à celui de la Tunisie.

    Quelles sont les insuffisances du modèle économique mondialiste ?

    La Tunisie et l’Egypte sont insérées dans les échanges mondialisés. Plutôt bien pour la Tunisie. Les taux de croissance du PIB y sont élevés, de l’ordre de 5% par an, jusqu’à 7% en Egypte. Cela ne suffit pas pour mettre ces pays à l’abri du chômage ni de disettes sur des produits essentiels ; encore moins d’une urbanisation totalement anarchique. Au contraire, le libre-échange mondial déstabilise des pans entiers des économies locales notamment paysannes, ce qui amplifie les problèmes alimentaires et les difficultés urbaines. Et les personnalités les plus impopulaires sont les affairistes liés à la superclasse mondiale. Enfin le système économique mondialisé n’offre guère de sens.

    Jusqu’où ira la recherche de sens ?

    Le manque de sens, c’est précisément la faiblesse du système. Le sens, c’est justement la force des islamistes, l’islam étant à la fois une religion et un programme politique. D’où la force du simplissime slogan : « L’islam est la solution. » C’est pour cela qu’en l’état actuel, dans tous les pays arabo-musulmans, les élections démocratiques lorsqu’elles ont lieu font le jeu des partis islamiques. D’où la contradiction de « l’Occident » réclamant davantage de démocratie… tout en craignant les Frères musulmans.

    Le sabre et/ou le Coran ?

    Sur les ruines des régimes en crise politiquement autoritaires et économiquement libéraux, deux forces semblent émerger : les islamistes d’un côté, l’armée de l’autre. C'est-à-dire deux « archaïsmes », deux structures hiérarchiques, deux institutions porteuses de sens, deux lieux de liens et de promotions sociales.

    Jusqu’où iront les révolutions arabes ?

    Les leçons de l’histoire sont claires : en règle générale des périodes longues de grande stabilité alternent avec des périodes révolutionnaires de changement rapide : de Mirabeau à Robespierre puis Bonaparte ; de Rodzyanko au prince Lvov, puis de Kérensky à Lénine ; de Chapour Bakhtiar à Khomeiny ; de Gorbatchev à Eltsine puis Poutine. Il est donc plus que probable que les hommes aujourd’hui au pouvoir à Tunis et au Caire n’y sont pas durablement !

    Quels risques pour l’Europe ?

    Vues du nord de la Méditerranée, les révolutions arabes présentent des aspects inquiétants : le risque du chaos économique et politique motivant de nouvelles vagues migratoires. Et ce alors même que les législations européennes se placent du point de vue des droits des individus (à immigrer) et non du droit des peuples à défendre leurs intérêts et leur identité. C’est le syndrome du « Camp des saints ».

    Quelles chances pour l’Europe ?

    A contrario, les peuples européens peuvent avoir des raisons de se réjouir de l’affaiblissement possible du suzerain américano-israélien et de la mise en échec des oligarchies mondialistes. Car ce sont ces mêmes oligarchies mondialistes qui leur imposent la délocalisation de leurs activités économiques et l’immigration de masse. D’autant qu’en Europe les nouveaux moyens de communication sont encore plus présents que dans les pays arabes et qu’ils y sont moins facilement neutralisables. Par nature les révolutions sont imprévisibles. Mais un rejet du système mondialiste est d’autant plus envisageable que, s’il survenait d’abord dans un pays, il pourrait par contagion s’étendre aux autres. Car comme aime à le rappeler le grand historien Dominique Venner : « L’histoire est le lieu de l’inattendu. »

    Polémia
    2 février 2011

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  • Un avenir de sang et de guerre ?...

    Auteur de plusieurs ouvrages de stratégie particulièrement intéressants comme Comprendre la guerre (Economica, 2001), Décider dans l'incertitude (Economica, 2004) ou encore La guerre probable (Economica, 2008), le général Vincent Desportes s'est surtout fait connaître du grand public pour avoir formulé, en juillet dernier, sur la guerre d'Afghanistan et sur la participation de la France à celle-ci des opinions hétérodoxes, qui ont déclenché l'ire du chef des armées et lui ont valu d'être sanctionné à quelques semaines de son passage en deuxième section.

    Dans cet article publié par le Figaro du 26 janvier 2011, il rappelle quelques évidences : la guerre n'a pas disparu, et elle fait même partie de notre avenir...

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    Ne craignons plus le mot "guerre"

    Appelons les choses par leur nom : ne craignons plus le terme « guerre ». C’est à tort que nous autres idéalistes, enfants des Lumières et de la civilisation, pensons régulièrement que la guerre est morte. 

    Ce n’est pas parce que nous, Européens, repus de guerre jusqu’à l’indigestion, avons réussi à la repousser loin de nos territoires que la nature des hommes a changé. Depuis toujours, la guerre et l’homme forment un couple indissociable parce que les hommes sont volontés - volonté de vie et volonté de domination - et que la confrontation est dans la nature même de leurs rencontres.

    La dernière des guerres, aussi sanglante fût-elle, n’a été qu’un jalon de plus dans l’histoire de l’humanité qui est aussi l’histoire des guerres.

    Ni la SDN, mort-née, ni l’ONU, fille d’un nouvel espoir, n’ont pu, bien sûr, tuer la guerre, parce que si la guerre tue, elle ne meurt pas. La guerre n’est pas morte à Versailles en 1919, pas plus qu’à San Francisco en 1945, pas plus que des espoirs nés de la dissuasion nucléaire ou de la chute du mur de Berlin. Au contraire, elle se répand et se renforce aujourd’hui d’avoir été, un temps, contenue. Vieilles querelles assoupies, nouvelles volontés de puissance, simples nécessités de survie, rareté des ressources et accroissement des besoins se conjuguent aujourd’hui aux fondamentalismes pour donner aux affrontements humains une force nouvelle.

    La guerre revient et le réarmement l’accompagne : la planète ne cesse de se réarmer, les dépenses militaires mondiales ont dépassé aujourd’hui le niveau de la guerre froide. L’effondrement de l’empire soviétique nous a laissé croire, un temps, à « la fin de l’histoire ». Aveuglés par la fausse bonne idée des dividendes de la paix, nous avons réduit à la hache le format de nos armées. Le mot guerre, soudain, était devenu incorrect ; on lui substituait celui de crise, de conflit, voire d’opérations de paix… Implacable, pourtant, la guerre - tribunal de la force, (la guerre) forme extrême de l’affrontement des volontés humaines et politiques - est revenue s’imposer à nous sous d’autres visages, s’emparant de nouveaux espaces. Puisque l’éthique et la nouvelle transparence du monde contraignaient l’usage destructeur des armes classiques, la guerre s’est placée « hors limites » pour contourner la puissance militaire : « guerre contre le terrorisme », où la dissymétrie peine contre l’asymétrie ; « guerre économique », utilisant l’arme de la monnaie pour conquérir de nouveaux marchés, usant de l’espionnage industriel organisé par les États ou les grands groupes, faisant du commerce international un véritable « combat » ; «cyberguerre » désorganisant les marchés financiers ou perçant les secrets de défense les mieux gardés ; « guerre de l’information » pour manipuler la psychologie des marchés et des foules ; « guerres virtuelles », univers des adolescents accrochés à leurs consoles ; « guerre des banlieues », avec de véritables embuscades militaires. Dans un monde où les rapports humains se brutalisent, un monde hanté par la montée des égoïsmes et les crises de confiance, où le sens du bien commun s’amenuise, la violence est redevenue une valeur en soi.

    Et le mot « guerre », hélas, a retrouvé son actualité, sa noblesse peut-être.

    Les champs de guerre ont changé, ses moyens aussi : mais la guerre est là, qui nous cerne. L’espoir de paix comme horizon de l’homme lui est aussi consubstantiel que la guerre elle-même ; mais si nous nous contentons, benoîtement, d’observer la guerre depuis notre balcon, la violence, retenue encore devant notre porte, franchira vite son seuil. Nous devons nous préparer à la guerre et accepter que l’idée d’Europe n’ait pas tué le fait de guerre. 

    Nous assoupir dans notre bulle artificielle  de sécurité, ce serait nous préparer de difficiles réveils lorsque, demain ou plus tard, de manière probablement imprévisible, la guerre reviendra chez nous, sous ses nouvelles formes armées. Il faut donc se réjouir

    Il faut donc se réjouir qu’après deux années d’efforts et de persuasion, le Collège interarmées de défense, qui forme le corps de direction des armées, ait retrouvé jeudi dernier l’appellation « École de guerre ».  Dénomination simple et claire pour l’institution qui a la charge de préparer aux plus hautes responsabilités humaines l’élite militaire, celle qui, aux heures noires de l’avenir , pourrait porter à nouveau sur ses épaules le destin de la nation. Ne nous berçons pas d’illusions : si la guerre est notre passé, si elle est notre présent, elle est aussi notre futur.

     

    Général Vincent Desportes (Le Figaro, 26 janvier 2011)

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  • La Chine va-t-elle manger le monde ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un entretien avec Hervé Juvin réalisé par Realpolitik.tv le 20 janvier 2011 et consacré à la Chine.


    La Chine va-t-elle manger le monde ?
    envoyé par realpolitiktv. - L'info internationale vidéo.

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