Dans cette nouvelle vidéo, Ego Non nous fait découvrir le philosophe allemand Max Scheler et son essai, L'homme du ressentiment récemment réédité.
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Dans cette nouvelle vidéo, Ego Non nous fait découvrir le philosophe allemand Max Scheler et son essai, L'homme du ressentiment récemment réédité.
Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Dominique Jamet cueilli sur Boulevard Voltaire et consacré à la décision prise par la Justice visant à évincer Marine le Pen de l'élection présidentielle.
« Une décision de justice n’est jamais politique… » Ainsi s’est exprimé, ces jours derniers, non pas Zarathoustra mais, nettement moins célèbre jusqu’il y a peu, M. Aurélien Martini, secrétaire général adjoint de l’Union syndicale des magistrats (USM), organisation majoritaire au sein de l’honorable corporation des juges. M. Martini entendait-il concourir aux prochains Molière de la profession, dans la catégorie « Tartufferies » ? Les magistrats qui, après avoir tous (à deux exceptions près) prêté serment de fidélité au maréchal Pétain, siégèrent et statuèrent dans les trop fameuses sections spéciales de Vichy, ceux (parfois les mêmes) qui jugèrent et condamnèrent, à la Libération, à la Haute Cour de justice ou dans les chambres civiques de l’épuration, ceux qui siégèrent, de 1954 à 1962, dans les tribunaux devant lesquels comparurent les militants du FLN, puis les chefs et les soldats de l’OAS, auraient été plus que surpris par le plaider non coupable de M. Martini.
Disons-le simplement : les trois juges qui viennent de confirmer les réquisitions déjà exceptionnellement sévères du parquet dans l’affaire des assistants parlementaires du FN ne prétendaient nullement diriger le procès et rendre leur sentence depuis la lointaine, étincelante et impartiale étoile Sirius, mais bien au contraire accomplir un devoir civique dont elles étaient les premières à proclamer les motifs, à revendiquer la légitimité, à prévoir et à assumer les conséquences sur l’élection présidentielle à venir, c’est-à-dire sur l’orientation de la vie politique de notre pays, en fonction de la personne, des idées et du programme de celui – en l’occurrence de celle - à qui le peuple français pourrait librement et souverainement confier, au plus tard en 2027, les rênes du pouvoir.
Des sanctions lourdes
L’arrêt rendu par Mme Bénédicte de Perthuis et ses deux « assesseuses » comporte deux volets bien distincts dans leur nature et dans leurs suites. D’une part, des peines de prison, des amendes lourdes, des restrictions aux droits civiques, sanctions lourdes et globalement conformes aux réquisitions des procureurs, mais dont on ne saurait contester qu’elles sont prévues par les dispositions de la loi que les accusés s’étaient bien légèrement dispensés de respecter. Même si la loi Sapin II ignore superbement la nature de la vie politique, la réalité des rapports entre les élus assistés et les militants qui les assistent, à telle enseigne qu’elle a été violée, à peine entrée en vigueur, par des partis et des dirigeants aussi divers que Bayrou et son MoDem, Mélenchon et son Parti de gauche, Jean-Marie puis Marine Le Pen et le FN de l’époque. Même si le séisme déclenché par l’arrêt des trois Parques a fait ressortir la nécessité, voire l’urgence, de revenir sur le contenu d’un texte conçu et voté en urgence dans la foulée de l’affaire Cahuzac, on ne peut dire, si sévères qu’aient été les juges, qu’ils aient outrepassé les pouvoirs que leur conférait la loi.
Il n’en est évidemment pas de même du point désormais central, du point désormais litigieux qui est au centre du verdict rendu, lundi dernier, par la 11e chambre correctionnelle, à savoir l’exécution provisoire (provisoire, en l’espèce, ressemble fort à un synonyme de définitif) de la peine d’inéligibilité effectivement prévue, mais sans obligation, par la loi.
On ne fera pas l’injure à trois magistrates expérimentées et parfaitement conscientes des enjeux en cours de leur accorder la moindre circonstance atténuante, ignorance du dossier ou de leur responsabilité. L’inéligibilité de Marine Le Pen était certes automatiquement liée à sa condamnation, sauf à l’en dispenser en fonction de critères spécifiques. Or, ces critères étaient patents, et connus de tous. Comme la majorité des Français, comme la totalité de la classe politique, comme tous ceux - juges, avocats, journalistes, simples militants, grand public - qui avaient suivi le procès dont elles maîtrisaient pleinement le dossier, les trois juges savaient pertinemment que la présidente du RN, désormais le premier parti de France, trois fois candidate à la présidence de la République, deux fois finaliste et battue seulement au second tour, était lors de la prochaine échéance assurée d’arriver en tête au premier et susceptible de l’emporter au second. Le tribunal a décidé de passer outre la réalité, quitte à sortir de la neutralité inhérente à sa mission et, donc, d’y perdre sa légitimité. Son verdict constitue une immixtion délibérée, brutale, grossière et insupportable du judiciaire dans le politique, au mépris du principe fondamental de la séparation des pouvoirs.
Trouble à l’ordre public ?
En tant que citoyennes, les trois magistrates ont bien entendu (et gardent) le droit d’avoir leurs choix personnels, leurs sympathies, leurs préférences et leurs détestations. En tant que juges, elles avaient le devoir de les oublier. Ce qu’elles n’ont pas fait, comme en attestent des attendus qui, relevant visiblement de leurs opinions, interfèrent dans une sphère dont la justice, dans une démocratie, devrait s’interdire l’accès. Si Marine Le Pen est seule, pour l’instant, à être durement frappée, ce sont au minimum entre onze et quinze millions d’électeurs, voire davantage, et peut-être même la majorité, dont trois personnes, chargées de rendre la justice, se sont permis de restreindre avec leur liberté de choix les droits civiques. Cet attentat, pour n’être pas physiquement violent, n’en constitue pas moins une atteinte, aussi grave et aussi lourde de conséquences que le geste meurtrier d’un terroriste à la régularité, à la crédibilité et donc à la légitimité du processus déjà engagé dans la perspective de l’élection qui est et demeure la clef de voûte de nos institutions.
Au premier rang des attendus qui prétendent justifier l’intrusion éhontée et calamiteuse de la 11e chambre correctionnelle dans un paysage politique déjà tourmenté figure la crainte du supposé « trouble à l’ordre public » que constituerait la quatrième tentative de Marine Le Pen de solliciter pacifiquement l’onction du suffrage universel. Le trouble à l’ordre public ? Nous y sommes du fait de trois apprenties sorcières. L’éventuelle conjonction des deux oppositions de droite et de gauche faisait déjà planer une menace permanente sur le gouvernement titubant de François Bayrou. L’éventuelle éviction de Marine Le Pen ne fait qu’ajouter de la fragilité à la fragilité. Deux épées de Damoclès, c’est beaucoup, pour une seule République. C’est trop.
Dominique Jamet (Boulevard Voltaire, 4 avril 2025)
Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Jean-Philippe Duranthon, cueilli sur Geopragma et consacré aux déclarations guerrières du Président de la République. Jean-Philippe Duranthon est haut-fonctionnaire et membre fondateur de Geopragma.
« Hâtez-vous, généreux guerriers… »
Il eut été logique qu’il revêtit un uniforme, tel de Gaulle en 1960, ou se présentât en pull kaki, tel Zelensky depuis trois ans : le 5 mars dernier Emmanuel Macron nous a déclaré que « nous rentrons (sic) dans une nouvelle ère », que « la Russie est devenue au moment où je vous parle et pour les années à venir une menace pour la France et pour l’Europe » et que, « quoi qu’il en advienne, il nous faut nous équiper davantage ».
Il nous faut donc accroître notre effort militaire, nous réarmer, nous remilitariser. Soit. Mais les conditions dans lesquelles les modalités de cette remilitarisation sont annoncées surprennent.
1/ Rappelons-nous tout d’abord qu’en juin 2022 le même Macron avait déclaré, en inaugurant le salon de Satory, que « nous allons durablement devoir nous organiser… dans une économie de guerre ». Pourquoi donc tenir en 2025 des propos voisins de ceux de 2022 ? La réponse est évidente : parce que nous ne sommes pas passés en « économie de guerre ». Certes, la production des célèbres canons Caesar a été multipliée par trois, mais il s’agit là d’une brillante exception : aucune commande massive n’a été passée aux entreprises de la BITD (base industrielle et technologique de défense) et les industriels, ne sachant quand les commandes leur seraient passées, et même si elles le seraient, n’ont pas accru leur outil de production. Le gouvernent n’a-t-il pas voulu faire le nécessaire, ou ne l’a-t-il pas pu ? Et pourquoi le voudrait-il maintenant, ou le pourrait-il ? Le président de la République a, le 17 mars, annoncé l’acquisition de trente Rafale supplémentaires : quand les commandes seront-elles passées ?
C’est que les armes coûtent cher et que nous sommes démunis. E. Macron a présenté comme une grande victoire l’autorisation donnée aux Etats par Ursula von der Leyen d’augmenter, au-delà des limites permises jusqu’alors, leur déficit budgétaire pour financer, dans la limite de 1,5 % du PIB, leurs dépenses militaires. Curieuse victoire : autorisation ou pas, un tel accroissement augmentera une dette qui est dès aujourd’hui explosive. Réjouissons-nous donc comme le ferait un malade qui, alors qu’il a 40 degrés de fièvre, s’entendrait dire pas son médecin qu’un traitement ne lui sera nécessaire que lorsque sa température atteindra 41,5 degrés. Autre « victoire » étonnante : la décision annoncée par la même van der Leyen d’emprunter au niveau communautaire 150 M€ pour allouer des prêts bonifiés aux Etats [1]. Pour s’en réjouir il faut oublier que la France finance 17 % du budget européen, si bien que l’amortissement du nouvel emprunt communautaire se traduira par une augmentation de la contribution de la France à ce budget. Alors qu’un député européen, rapporteur du budget, a récemment remarqué que « nous n’avons toujours pas clarifié comment nous allons rembourser le grand emprunt commun qui a financé le plan de relance post Covid », ajouter une couche d’emprunt communautaire est-il si enthousiasmant ?
Ne se trompe-t-on pas, d’ailleurs, de cible ? Un récent audit [2] indique que « les entreprises… présent(ent) une structure financière et économique plus fragile dans la BITD que dans le reste de l’économie, avec des marges plus faibles, une capacité moindre à créer de la valeur, un endettement plus élevé et une potentielle sous-capitalisation ». Ce ne sont point tant les subventions et prêts qui sont nécessaires que des augmentations de capital. D’où la création par BPI France d’un nouveau fonds spécialisé destiné à accueillir l’épargne des particuliers ; mais, les généreux donataires, qui seront « collés » pendant cinq ans, ne bénéficiant en échange d’aucun avantage fiscal ou autre, on peut craindre que ce nouvel outil ne séduise guère et n’ait que des vertus d’affichage. D’où l’appel adressé aux fonds d’investissement privés afin qu’ils contribuent à l’effort demandé à la nation.
Le problème est que ces fonds interviennent au sein d’un écosystème financier auquel on demande de privilégier les investissements « verts » luttant contre le changement climatique et répondant aux critères ESG [3], et que les bureaucrates et les bonnes consciences ont classé la Défense dans la catégorie des parias. Le sujet est connu depuis longtemps [4] et la Commission comme le gouvernement reconnaissent la nécessité d’agir. Mais les actions concrètes se font attendre. La « taxonomie » qui, comme l’a fait remarquer le Délégué Général à l’Armement, « classe la Défense dans la même catégorie que la pornographie », et les directives européennes incitant les fonds à investir dans des domaines dont la Défense est exclue, n’ont pas été modifiées ; les PME et ETI du secteur qui cherchent à financer leurs besoins en fonds de roulement s’entendent dire par leurs banques qu’elles ne satisfont pas les critères d’investissement responsable ; la BEI (Banque Européenne d’Investissement) envisage d’étendre son champ d’action mais se refuse à financer la fabrication de munitions et armes létales (on se croirait revenu en 1981, lorsque F. Mitterrand inaugurait le salon aéronautique du Bourget après avoir demandé que les avions et hélicoptères soient présentés désarmés). Aussi le « monde de la finance » semble-t-il considérer que les déclarations ne suffisent pas : Euronext a prévenu, à la mi-mars, Airbus, Safran et Thales qu’il allait les exclure du CAC 40 ESG et n’y a renoncé qu’au dernier moment ; Ardian et Eurazeo affirment refuser tout investissement dans la Défense, la seconde se référant explicitement à la problématique ESG. Restent les fonds spécialisés de Tikehau et Weinberg mais ceux-ci n’ont pas attendu ces dernières semaines pour se mobiliser et ne suffiront pas à dégager les sommes nécessaires.
Les conditions financières d’une politique de réarmement ne semblent donc pas réunies aujourd’hui. Mieux vaudrait faire moins d’annonces et de grand-messes et, d’une part supprimer les freins aux investissements dans l’industrie de défense (c’est-à-dire modifier les textes ESG), d’autre part créer les conditions d’un financement durable (c’est-à-dire non pas à contractant de nouvelles dettes, mais en réduisant ou supprimant enfin les dépenses publiques inutiles ou inefficaces – comme nos voisins l’ont fait).
2/ Par ailleurs, il ne suffit pas d’avoir des matériels performants, encore faut-il disposer des personnels pour les utiliser. L’armée peine, aujourd’hui, à fidéliser ceux qui la servent. Que compte-t-on faire pour qu’on y parvienne désormais ?
3/ Le 5 mars dernier, E. Macron a également déclaré que « L’Europe de la Défense, que nous défendons depuis huit ans, devient donc une réalité ». Encore une grande victoire de la France, doit-on comprendre.
Notre pays dispose de nombreux éléments légitimant une place fondamentale dans cette « réalité » encore bien irréelle : une armée de militaires aguerris et maîtrisant les technologies de pointe (sans doute la seule armée digne de ce nom en Europe) ; des industriels de premier plan dans chaque domaine, s’appuyant sur un riche réseau de sous-traitants ; la possession de l’arme nucléaire. On aurait pu penser que la France aurait cherché, pour le bien de l’Europe comme celui du pays, à valoriser ces trois éléments et à faire de la reconnaissance de la préférence communautaire un préalable à toute action de sa part ; il semble qu’elle ait adopté une autre posture et préféré une approche institutionnelle. E. Macron semble chercher à la fois à porter au niveau communautaire les responsabilités aujourd’hui exercées avec efficacité au niveau national et à prendre la tête, avec la Grande-Bretagne, d’un étrange groupement de pays bien incapables d’influer sur le cours des évènements.
Cette approche est particulièrement étonnante pour ce qui concerne l’arme nucléaire, pour laquelle la président a indiqué que, « répondant à l’appel historique du futur chancelier allemand, (il a) décidé d’ouvrir le débat stratégique sur la protection par notre dissuasion de nos alliés du continent européen ». Depuis l’origine il est acquis – le général de Gaulle l’a dit explicitement – que l’intérêt vital national ne se limite pas aux frontières du pays et prend en compte les menaces pesant sur nos voisins. Mais s’étend-il à l’ensemble du « continent européen » ? Faut-il associer explicitement « nos alliés », et sans doute la Commission, aux décisions ? Suffit-il d’affirmer que « quoi qu’il arrive, la décision a toujours été et restera entre les mains du Président de la République, chef des armées », pour échapper à la mécanique communautaire et être en mesure d’agir rapidement ? Pourra-t-on reconnaître qu’on « protège » un pays et lui interdire de « décider » son sort ? Ne sera-t-on pas obligé de formaliser a priori les cas de recours à l’arme nucléaire, alors que l’incertitude sur l’usage de l’arme est une condition de son efficacité, de la dissuasion ? Serait-il normal que nos voisins bénéficient soudain d’un outil financé depuis cinquante ans par les seuls contribuables français ?
Tout cela est bien étonnant, et bien inquiétant.
4/ Certains commentateurs voudraient chanter, comme dans l’opéra Dardanus de Rameau :
« Il est temps de courir aux armes,
Hâtez-vous, généreux guerriers,
Allez, au milieu des alarmes,
Cueillir les plus brillants lauriers ».
Ne faisons pas trop de théâtre : n’oublions pas que dans la vraie vie il y a de vrais soldats et de vraies morts.
N’oublions pas non plus que, si elles ont une frontière à l’Est, l’Europe et en particulier la France ont aussi une frontière au Sud.
Jean-Philippe Duranthon (Geopragma, 30 mars 2025)
Notes :
[1] Ces prêts ne pourront bénéficier qu’à des projets associant plusieurs Etats. Cela laisse augurer de jolis délais pour mettre en œuvre ce programme au bel acronyme : SAFE, pour Security Action for Europe.
[2] Réalisé par le Trésor et l’Observatoire économique de la Défense. https://www.tresor.economie.gouv.fr/Articles/ea3a6a07-04a8-4ec4-af34-1d066bd794af/files/8293e924-b180-4aa4-9575-06331ed76b0f
[3] Critères environnementaux, sociaux et de gouvernance.
[4] Voir mon article du 20 mai 2024 : https://geopragma.fr/drole-deconomie-de-guerre/
Nous reproduisons ci-dessous un article de François-Xavier Consoli cueilli sur le site de la revue Éléments et consacré au grand remplacement qui se prépare en Ukraine pour "palier" les pertes provoquées par le conflit et l'effondrement démographique...
Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Michel Geoffroy, cueilli sur Polémia et consacré à l'activisme belliqueux du président de la république et de ses affidés qui cherche à s'opposer à l'ouverture de négociations dans le conflit russo-ukrainien...
Ancien haut-fonctionnaire, Michel Geoffroy a publié le Dictionnaire de Novlangue (Via Romana, 2015), en collaboration avec Jean-Yves Le Gallou, ainsi que plusieurs essais, dont La Superclasse mondiale contre les Peuples (Via Romana, 2018), La nouvelle guerre des mondes (Via Romana, 2020), Immigration de masse - L'assimilation impossible (La Nouvelle Librairie, 2021), Le crépuscule des Lumières (Via Romana, 2021), Bienvenue dans le meilleur des mondes (La Nouvelle Librairie, 2023) et, dernièrement Occident go home ! - Plaidoyer pour une Europe libre (Via Romana, 2024).
Activisme belliqueux de Macron : les minets jouent aux durs
Il y a deux États profonds : la maison mère, située aux États-Unis et sa succursale en Europe, qui s’appelle Union européenne. La nouvelle administration républicaine entreprend de réduire le pouvoir de l’État profond nord-américain. Alors l’oligarchie néo-conservatrice entend ériger sa succursale européenne en bastion anti-Trump et en bantoustan woke. L’activisme belliqueux d’Emmanuel Macron et de certains dirigeants européens, purs produits de l’État profond, s’inscrit dans cette grossière et puérile manœuvre transatlantique. Mais les minets européens ne brassent que du vent.
Torpiller la paix russo-américaine ?
L’agitation macronienne et « européenne » pour continuer de soutenir envers et contre tout l’Ukraine, malgré une défaite de plus en plus évidente, a pour but principal de torpiller les initiatives de paix de l’administration Trump. Avant tout, en promettant de confier à des troupes européennes le respect d’un futur cessez-le-feu avec la Russie.
Nul ne peut ignorer en effet que cette perspective constituerait un chiffon rouge pour Moscou qui n’a eu de cesse d’indiquer ne pouvoir accepter la présence de troupes de l’OTAN, quel qu’en soit le drapeau, en Ukraine.
Macron le sait et c’est bien pourquoi il pousse dans cette voie tout en agitant à la télévision la menace russe qui serait à nos portes.
L’idéal serait bien sûr aux yeux des néo-cons que la Russie en tire argument pour rejeter tout cessez-le-feu, que le conflit s’éternise et que Trump échoue dans ses négociations.Le rêve d’un enfant gâté
Une implication européenne directe dans le conflit russo-ukrainien permettrait aussi à Emmanuel Macron de réaliser son rêve politique : celui d’un troisième mandat présidentiel, adossé ou non à la mise en œuvre de l’article 16, avec la bénédiction du Conseil constitutionnel. Et vraisemblablement d’une bonne partie des parlementaires aussi, puisqu’en France l’opposition institutionnelle à la macronie n’existe tout simplement pas.
Et un conflit permettrait de museler durablement toute dissidence accusée de « faire le jeu de la Russie ».
Un rêve d’enfant gâté ? Mais, comme dit l’Ecclésiaste, « malheur à la ville dont le prince est un enfant ».Réarmer l’Europe ou déconstruire la France ?
Emmanuel Macron aimerait bien aussi profiter du prétendu « réarmement européen » qui, si l’on comprend bien Mme von der Leyen, doit surtout nous conduire à acheter rapidement du… matériel américain, pour faire avancer son agenda antinational.
Macron a pour mission en effet de déconstruire la France, de la faire rentrer dans le rang, et force est de reconnaître qu’en sept ans il a déjà bien avancé : destruction des services publics, déficits et dette abyssaux, immigration massive, insécurité galopante, désindustrialisation, plus de 20 % de la population au chômage, natalité en berne.
La dramatisation de la menace russe doit alors permettre de s’attaquer, au nom de l’Europe bien sûr, au dernier pan de la souveraineté française : l’arme nucléaire et le siège permanent de la France au Conseil de sécurité des Nations unies. En attendant l’armée européenne. De façon à tirer un trait définitif sur l’héritage gaullien.Une absurde mutualisation
Emmanuel Macron a donc lancé l’idée, absurde, d’une mutualisation de l’arme nucléaire française pour protéger l’Europe contre la Russie, tout en promettant de garder pour lui seul… le bouton nucléaire. Proposition d’autant plus irréaliste que notre armement nucléaire est dimensionné pour les enjeux français, pas pour couvrir le continent européen.
Et promesse trompeuse car on voit mal pourquoi des pays européens accepteraient de financer en partie l’arsenal nucléaire français sans avoir la moindre garantie quant à son utilisation pour les protéger.
Peut-on enfin sérieusement penser que les Français accepteraient le risque de vitrification pour défendre l’Estonie ou la Pologne ? Alors même qu’on doute sérieusement en Europe de la réalité du parapluie nucléaire américain.Bref, toute cette agitation nucléaire et guerrière n’est qu’un vain brassage de vent télévisuel. Une spécialité macronienne, il est vrai.
La revanche de Laval sur De Gaulle
Le but réel d’Emmanuel Macron n’est donc pas la défense de l’Europe, encore moins celle de la France ; mais bien d’essayer de placer la stratégie nucléaire française sous la tutelle de fait de l’Allemagne et donc de la Commission européenne. Comme le projet de « réarmement européen » permet à la Commission européenne de s’immiscer dans les budgets de défense des États, au mépris des traités européens.
Et derrière l’arme nucléaire se profile évidemment la question du siège permanent de la France au Conseil de sécurité des Nations unies, que l’Allemagne, depuis des années, souhaite qu’il soit « européanisé » c’est-à-dire également partagé. Une perspective qui ne choquerait pas le mondialiste Emmanuel Macron, même s’il reste pour le moment peu disert sur la question. Peut-être pour un troisième mandat ?
Si ces projets se concrétisaient, ils traduiraient en quelque sorte la revanche posthume de Laval contre De Gaulle : la revanche de la gauche collaborationniste, obnubilée par le front de l’Est, sur les dissidents de l’indépendance nationale et de la grandeur de la France.
Quel beau programme, en effet !Les minets jouent aux durs
Il y a quelque chose de tragi-comique de voir tous ces minets déconstruits, qui n’ont même pas fait de service militaire, jouer au « chef de guerre » et tripoter Zelensky devant les caméras.
Comme de voir tous ces partisans d’un monde sans frontières nous inviter maintenant à prendre les armes pour défendre – un peu tard, il est vrai – celles de l’Ukraine.À vrai dire, on aimerait bien voir tous ces minets aller vraiment crapahuter, avec 20 kg de matériel sur le dos, en Ukraine où l’on ne peut pas marcher 100 mètres sur le front, sans risquer de recevoir un drone ou une bombe planante sur la tête. Au lieu d’essayer d’y envoyer les autres.
Heureusement que, pendant que les minets jouent aux durs dans la cour de récréation, les grands – les États-Unis, la Russie, l’Inde, la Chine, la Turquie, l’Arabie Saoudite et tous les BRICS – prennent les vraies décisions. Et préparent le monde de demain, mais sans nous, hélas.Comme le dit une célèbre réplique du film Les Tontons flingueurs[1], « quand les hommes parlent, les gonzesses se taillent »…
Michel Geoffroy (Polémia, 21 mars 2025)
Note :
[1] De Georges Lautner, sorti en 1963.
Vous pouvez découvrir ci-dessous la chronique de David Engels sur Ligne droite, la matinale de Radio Courtoisie, datée du 21 mars 2025 et consacrée aux conséquences durables du poison wokiste...
Historien, essayiste, enseignant chercheur à l'Instytut Zachodni à Poznan, à l'Institut Catholique de Vendée ainsi qu'au Mathias Corvinus Collegium de Bruxelles, David Engels est l'auteur de trois essais traduits en français, Le Déclin - La crise de l'Union européenne et la chute de la République romaine (Toucan, 2013), Que faire ? - Vivre avec le déclin de l'Europe (La Nouvelle Librairie, 2024) et, dernièrement, Défendre l'Europe civilisationnelle - Petit traité d'hespérialisme (Salvator, 2024). Il a également dirigé deux ouvrages collectifs, Renovatio Europae - Plaidoyer pour un renouveau hespérialiste de l'Europe (Cerf, 2020) et Aurë entuluva! (Renovamen-Verlag, 2023), en allemand, consacré à l’œuvre de Tolkien.