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Métapo infos - Page 32

  • Entre ici Bardamu !...

    Les éditions Livr'arbitres viennent de publier un ouvrage de Jean Guenot intitulé Entre ici Bardamu !. Jean Guenot, né le 20 janvier 1928 à Paris, est un universitaire et écrivain français. Dès 1958 il publie des romans policiers sous la plume Albert Sigusse. Au milieu des années 1970, il publie sous son patronyme plusieurs romans, recueils de nouvelles et essais Céline, écrivain arrivé  (Guenot Éditions, 1993) et , Louis-Ferdinand Céline damné par l’écriture (Guenot Éditions, 1973)

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    " Célébré partout depuis 2022, Louis-Ferdinand Céline sort agrandi de l’oubli. Serait-il « panthéonisable » à titre posthume ? Avec Malraux revenu sur les marches où il accueillit Jean Moulin, entendrions-nous Dur-de-Mèche proclamer de sa voix de bronze :

    Entre ici, Bardamu

    Céline, écrivain de génie, est ici présenté par les réponses de Jean Guenot (qui rendit visite au Vieux de son vivant à Meudon en 1960) aux questions de son petit-fils Gabriel Guenot.

    Dès parution de Voyage au bout de la nuit en 1932, Céline s’imposa dans l’histoire de la littérature française. On le fit disparaître de tout écho dans la presse à partir de 1944. Il fut exclu de son siècle. Et voici qu’on le reconnaît partout, que ressortent des manuscrits disparus avec l’épuration. Et c’est la réussite. Céline est désormais immense. Il atteint enfin un lectorat à l’ampleur de son génie.

    Entre ici, Bardamu est un apéritif pour élargir le cercle de ses amateurs en dehors de la vénération, vers les plaisirs de la rigolade en savourant du Céline. "

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  • La percée du nationalisme en Europe de l’Est est-elle liée à une nostalgie des régimes communistes ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Lionel Baland, cueilli sur le site de la revue Éléments et consacré à la spécificité de l'ancienne Allemagne de l'Est, dont on voit la population voter majoritairement pour deux partis populistes anti-immigration, l'un de droite et l'autre de gauche...

     

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    La percée du nationalisme en Europe de l’Est est-elle liée à une nostalgie des régimes communistes ?

    Si la montée en puissance des idées nationalistes en Europe de l’Ouest s’explique par l’arrivée massive d’immigrants posant des problèmes graves et par la désindustrialisation produite par la mondialisation effrénée, elle questionne en Europe de l’Est où les étrangers non-européens sont, pour le moment, encore peu nombreux et où l’économie est en plein développement.

    Parmi les endroits situés au sein de l’ancien bloc de l’Est où le nationalisme monte, l’Est de l’Allemagne présente la particularité, pour le moment unique, de combiner le fait d’avoir, d’une part, connu le communisme et, d’autre part, d’être confronté à la présence importante de migrants, arrivés après l’ouverture en 2015 des frontières par la chancelière fédérale démocrate-chrétienne (CDU) de l’époque, Angela Merkel, qui a ensuite réparti ceux-ci dans l’ensemble de son pays, y compris au sein de la partie orientale.

    Cette zone voit désormais deux partis de type nationaliste y obtenir des résultats éclatants : une version de droite appelée Alternative für Deutschland (Alternative pour l’Allemagne – AfD) et une de gauche anti-immigration, le Bündnis Sahra Wagenknecht – Für Vernunft und Gerechtigkeit (Alliance Sahra Wagenknecht – Pour la raison et la justice – BSW), dont la figure de proue et co-présidente est Sahra Wagenknecht. Si l’AfD est patriote ; dans l’Est, elle peut être qualifiée clairement de nationaliste et son programme, qui est libéral d’un point de vue économique et social au niveau fédéral (avec comme fer de lance de cette tendance la co-présidente fédérale du parti Alice Weidel), est dans l’Est plus axé sur le « patriotisme solidaire » théorisé par l’écrivain de la Nouvelle Droite allemande Benedikt Kaiser dans son ouvrage Solidarischer Patriotismus. Die soziale Frage von rechts (« Patriotisme solidaire. La question sociale vue de droite ») paru en 2020.

    Cette demande, forte d’un point de vue électoral de plus de solidarité et de plus de protection face à la mondialisation et à l’immigration de masse, est-elle liée à une nostalgie de l’époque de la République démocratique allemande (RDA) communiste ? L’historien allemand Ilko-Sascha Kowalczuk, qui est un des experts les plus renommés de l’histoire de la République démocratique allemande et qui s’oppose à la montée en puissance de l’AfD et du BSW dans l’Est de l’Allemagne, qu’il lie au phénomène illibéral représenté par le Premier ministre hongrois Viktor Orbán, publie un ouvrage au sein duquel il tente d’éclairer cette question : Freiheitsschock. Eine andere Geschichte Ostdeutschlands von 1989 bis heute (« Choc de la liberté. Une autre histoire de l’Allemagne de l’Est de 1989 à aujourd’hui »).

    Le choc de la transformation

    Ilko-Sascha Kowalczuk estime que, lors de la chute du mur de Berlin et du rideau de fer, la population d’Allemagne de l’Est a subi un choc face à l’arrivée de la société ouverte, théorisée par le penseur libéral Karl Popper au sein de son ouvrage La Société ouverte et ses ennemis (1945) ; et de nombreuses personnes n’ont pas perçu ce changement en tant que libération. De plus, les habitants de l’Est ont pensé que la société ouverte apporte nécessairement la prospérité économique, ce qui n’est pas le cas.

    Après la chute du communisme, à la fin de l’année 1989, et la réunification de l’Allemagne survenue moins d’un an plus tard, les habitants de l’Est, qui s’attendaient à de lentes modifications, à l’impact limité, se sont retrouvés face à des transformations radicales. De nombreuses personnes ont été déçues et désillusionnées par ces changements et la précarité qui en a découlé. De plus, en République démocratique allemande, la société civile était quasi inexistante, sauf au sein des Églises, et n’était pas souhaitée par le parti politique dominant, le SED, et la Sécurité d’État, la Stasi. Le nationalisme était, en fait, répandu au sein de la RDA. Dans l’Est, l’ancrage des partis politiques reste faible et la banalisation du passé communiste et national-socialiste y est plus développée. Inutile de dire que la réunification y a laissé des traces, car elle a créé de nombreuses injustices. Elle est perçue comme une opération ayant permis la vente à la découpe de l’économie est-allemande à des intérêts financiers de l’Ouest de l’Allemagne. Les Allemands de l’Est, les « Ossis », se sentent considérés comme des citoyens de seconde zone qui ont été discriminés tant à l’Ouest de l’Allemagne (car considérés comme « arriérés » et non-adaptés aux exigences productivistes de l’économie de marché) que chez eux où des personnes arrivées de l’Ouest du pays réunifié ont mis la main sur des postes importants au sein de l’appareil d’État ou y ont implanté des commerces et entreprises en disposant de fonds financiers dont étaient dépourvus les habitants de l’Est du pays. Un fait à noter donc : la dénonciation des élites par l’AfD porte avant tout sur celles de l’Ouest. Bien que né en ex-RFA, ce parti obtient ses meilleurs scores dans l’ancienne RDA. La presse du Système, perçue comme une émanation de l’Ouest, y est déclarée « mensongère ».

    La voix de l’Est

    Alors que, lors des dernières élections législatives de 2021, le parti post-communiste Die Linke n’a décroché que 4,9 %, n’atteignant pas le seuil électoral des 5 %, et ne doit sa présence à la Chambre des députés – en recevant 39 sièges – qu’à l’obtention de trois mandats directs dans l’Est, Sahra Wagenknecht, qui est issue de ce parti et a annoncé le quitter en octobre 2023 pour former le BSW, bénéficie d’un grand nombre de passages dans les médias nationaux car elle est perçue comme la voix de l’Est du pays.

    « Beaucoup de ce que l’AfD ou le BSW représentent, par exemple un État fort, une posture anti-occidentale liée à une proximité avec des États autoritaires comme la Russie, l’aspiration à une société homogène, une orientation nationale-ethnique de la politique sociale, des frontières fermées, un rejet de l’Europe et de l’euro, la mise en avant du principe de “L’Allemagne d’abord” et un point final aux débats épuisants sur l’histoire allemande obtiennent une grande résonance dans l’Est de l’Allemagne, par-delà le clivage entre les partis », résume Ilko-Sascha Kowalczuk (p. 182).

    L’auteur pense que l’actuelle percée de l’AfD dans l’Est, avec des cadres politiques venus de l’Ouest, se répercutera aussi, demain, dans la partie occidentale.

    La population de l’Est a compris, à la suite du crash financier de 2008, que tout ne va pas de soi dans le capitalisme et se trouve face à l’instabilité créée par le défi de l’évolution due à la digitalisation. Elle se tourne en conséquence vers la sécurité et le passé. Or, l’Est de l’Allemagne dispose d’une longue tradition autoritaire : Empire allemand, République de Weimar, Troisième Reich, RDA. Ainsi les Allemands de l’Est se sentent-ils solidaires avec la Russie car ils voient en Vladimir Poutine le représentant d’une position anti-occidentale et anti-américaine.

    Deux ouvrages qui ont rencontré un grand succès, et qui n’apportent selon Ilko-Sascha Kowalczuk rien de nouveau en termes de contenu, ont dernièrement façonné le débat : Der Osten : Eine west-deutsche Erfindung (« L’Est : une invention Ouest-allemande ») du professeur de littérature Dirk Oschmann et Diesseits der Mauer. Eine neue Geschichte der DDR 1949-1990 (« De ce côté du mur. Une nouvelle histoire de la RDA 1949-1990 ») de l’historienne Katja Hoyer. Le premier rend responsable l’Ouest de tout ce qui ne va pas depuis 1990 et innocente l’Est. Le deuxième présente la société de la RDA comme ayant été harmonieuse et éloignée des dirigeants dictatoriaux dont elle se souciait peu. L’Ostalgie – nostalgie de l’Allemagne de l’Est communiste – a pris le dessus sur le souvenir des désagréments de l’époque.

    La lutte est lancée

    Ilko-Sascha Kowalczuk estime que le système libéral est menacé dans de nombreux pays d’Europe, le Danemark constituant à ses yeux une exception, car les sociaux-démocrates y ont repris et appliqué une partie de la rhétorique des partis patriotiques, leur coupant ainsi l’herbe sous les pieds.

    Lui, qui a connu le régime communiste de la RDA, puis sa chute et le triomphe du libéralisme, craint fortement que le système actuel ne tombe à son tour. En effet, dans l’Est de l’Allemagne – et peut être aussi à l’avenir à l’Ouest –, les partis politiques du Système, représentant la société ouverte libérale, peuvent perdre la bataille contre les trois partis anti-système qui prétendent renouer avec la grandeur du passé : les nationalistes de l’AfD, les nationaux-bolcheviks du BSW et les post-communistes de Die Linke. Le match est lancé et il n’y aura qu’un vainqueur.

    Lionel Baland (Site de la revue Éléments, 24 octobre 2024)

     

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  • La grande rupture...

    Les éditions Tallandier viennent de publier un essai de Georges-Henri Soutou intitulé La grande rupture (1989-2024) - De la chute du mur à la guerre d'Ukraine.

    Professeur émérite d'histoire contemporaine à l'université de Paris-Sorbonne et membre de l'Académie des sciences morales et politiques, Georges-Henri Soutou est l'un des meilleurs connaisseurs européens de l'histoire des relations internationales. Il a notamment été l'auteur, avec Martin Motte, d'un ouvrage consacré aux vues de Charles Maurras sur la politique extérieure de la France, Entre la vieille Europe et la seule France : Charles Maurras, la politique extérieure et la défense nationale (Economica, 2009), et a aussi été l'un des contributeurs du traité de stratégie de l’École de guerre, La mesure de la force (Tallandier, 2018). Plus récemment, on lui doit une étude passionnante intitulée Europa ! - Les projets européens de l'Allemagne nazie et de l'Italie fasciste (Tallandier, 2021).

     

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    " À partir de 1989, la chute du mur de Berlin, puis la fin de l’URSS et du communisme suscitèrent un grand optimisme en Occident. Aujourd’hui, à l’heure de la guerre en Ukraine, on en est loin. La Russie, qui paraissait prête à s’inscrire dans le nouvel ordre mondial libéral, s’en est progressivement éloignée, jusqu’à le provoquer ouvertement.

    Les innombrables ouvrages publiés le plus souvent à la hâte depuis deux ans et demi sur la guerre en Ukraine négligent la nécessaire profondeur historique qu’il faut observer pour bien comprendre la genèse du conflit. Or Georges-Henri Soutou, historien spécialiste des relations internationales, est probablement le mieux placé pour expliquer cette histoire sur le temps long : les questions de nationalités en Europe orientale et dans les Balkans, la brutalité de la Seconde Guerre mondiale et de la guerre froide, la transition démocratique manquée de la Russie après 1991, l’échec des tentatives pour mettre les relations entre l’Occident et la Russie sur un nouveau pied après 1991. La gestion calamiteuse des relations internationales depuis 1989-1990 a fait le lit de la guerre actuelle.

    Dans ce désastre, les responsabilités sont partagées. La Russie a été de plus en plus agressive mais l’Occident a été souvent provocateur et toujours trop sûr de lui.

    L’issue du conflit est encore incertaine mais, de toute façon, le retour de la guerre sur notre continent est une catastrophe. Le troisième suicide de l’Europe depuis 1914… "

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  • Un an de frappes à Gaza, le chaos s’étend...

    Pour son émission sur TV Libertés, Chocs  du monde, Edouard Chanot reçoit Pierre Conesa, pour évoquer avec lui la guerre menée par Israël à Gaza et au  Liban et ses répercussions dans tout le Proche-Orient.

    Agrégé d'histoire et énarque, Pierre Conesa a fait partie dans les années 90 de la Délégation aux affaires stratégiques du Ministère de la défense. Il est l'auteur de plusieurs essais, dont, notamment, Dr. Saoud et Mr. Djihad - La diplomatie religieuse de l'Arabie saoudite (Robert Laffont, 2016), Hollywar - Hollywood, arme de propagande massive (Robert Laffont, 2018), Le lobby saoudien en France - Comment vendre un pays invendable (Denoël, 2021), Vendre la guerre - Le complexe militaro-intellectuel (L'aube, 2022) et État des lieux du salafisme en France (L'aube, 2023).

     

                                              

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  • Vers le grand basculement ?...

    Nous vous signalons la parution du numéro 101 (Équinoxe d'automne) de la revue Terre & Peuple, dirigée par Jean-Patrick Arteault, dont le dossier est consacré à la fébrilité du système face à la menace d'un grand basculement populiste. On y trouvera des textes de Robert Steuckers, Jean-Patrick Arteault, François-Xavier Robert, Gabriel Adinolfi, Georges Feltin-Tracol, Roberto Fiorini et Robert Dragan.

    Vous pouvez commander cette revue sur le site de Terre & Peuple.

    Robert Steuckers, Jean-Patrick Arteault, François-Xavier Robert, Gabriel Adinolfi, Georges Feltin-Tracol, Roberto Fiorini, Robert Dragan, système, populisme

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  • Le Pancapitalisme, le retour du social dans le national...

    Vous pouvez découvrir ci-dessous un point de vue de Gérard Fugnat, cueilli sur le site de l'Institut Georges Valois et consacré à la participation et au pancapitalisme...

     

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    Le Pancapitalisme, le retour du social dans le national

    Prime d’intéressement, prime de participation, plan d’épargne entreprise si comme 11 millions de salariés, vous êtes concernés alors ces dénominations vous sont familières. Ceux pour qui cela reste un mystère, ces termes désignent tous une forme de redistribution des bénéfices des entreprises à leurs salariés, soit sous forme de prime, soit sous forme d’épargne et d’actionnariat salarial. Mais savez-vous que tout ceci n’est qu’une forme lointaine et atténuée d’un projet économique bien plus ambitieux cherchant à redistribuer équitablement les moyens de production sans porter atteinte au principe de propriété privée ? Ce projet fut connu sous le nom de « Participation », fer de lance de la doctrine économique du gaullisme dans les années 1960, mais la théorie économique à la base de ce projet d’envergure se nommait « pancapitalisme » et c’est de cela dont nous allons parler en détail dans cet article.

    Mais avant de rentrer dans le cœur de cette doctrine économique, un peu d’histoire. Le principe d’alliance entre le capital et le travail, d’actionnariat salarial ou de participation aux bénéfices de l’entreprise ne date pas du gaullisme. On en retrouve des traces dès les XIXème siècle, notamment chez les catholiques sociaux et les figures d’Albert de Mun ou encore de René De la Tour du Pin et même chez certains libéraux comme Tocqueville ou encore chez des socialistes comme Jaurès.

    Mais les traces les plus concrètes et les plus formelles se trouvent dans le syndicalisme jaune et notamment au sein de la Fédération nationale des jaunes de France (FNJF) et leur programme économique nommé le « propriétisme ». La FNJF, active de 1902 à 1912, entretint d’étroites relations avec les milieux nationalistes, dont l’Action française ou Edouard Drumont et son journal La Libre Parole. Ce syndicat jaune considérait que la corporation était le meilleur modèle de défense sociale pour les travailleurs. Ils prônaient donc le « propriétisme » une forme d’association « capital-travail » où les travailleurs devenaient propriétaires de leurs moyens de production via l’acquisition d’actions de leur entreprise. On y voit déjà la colonne vertébrale de l’idée pancapitaliste. Ils défendaient aussi le système des « chambres de capacité », sortes d’assemblées locales où les représentants du monde professionnel pouvaient discuter des affaires socio-économiques du pays et servaient de contre-pouvoir à l’Assemblée nationale.

    Malgré la disparition de ce syndicalisme jaune et avec lui, la disparition de la doctrine « propriétiste » l’association entre le capital et le travail comme base d’une doctrine économique continua de faire son bout de chemin. Et c’est au sein des cadres des Croix-de-Feu puis du Parti Social Français (PSF) que survit cette idée de participation des masses prolétaires aux bénéfices des entreprises. Vue comme une forme de « proto-gaullisme » par certains historiens, et dont certains membres s’inspirèrent du catholicisme social, il n’est donc pas anormal d’y rencontrer une défense de ce principe de participation parmi les cadres de ce mouvement.

    Maintenant, faisons un saut dans le temps jusqu’aux Trente Glorieuses. Un certain Marcel Loichot polytechnicien, fils d’instituteur, pied-noir, PDG de la 1ère entreprise française de conseil économique et gaulliste social, a, durant cette décennie, réfléchi à un modèle socio-économique novateur pour offrir une troisième voie qui protégerait les travailleurs de l’aliénation capitaliste libérale tout en protégeant les entreprises et les entrepreneurs de la collectivisation soviétique castratrice pour l’innovation et le progrès technique et économique.

    En 1966 sortit son livre La réforme pancapitaliste dans lequel il écrit ceci : « En un mot, le Pancapitalisme propose que le travailleur le plus humble bénéficie non plus théoriquement, mais effectivement, de la fonction économique et sociale de l'investissement. C'est-à-dire qu'il reçoive sa part dans la création des richesses futures ou, si l'on veut, des moyens supplémentaires de production qu'il contribue à créer par son travail. Et cette manière d'obtenir la désaliénation conserve intégralement la notion de propriété, tant pour le salarié que pour le possédant antérieur. »

    Voilà comment Marcel Loichot résuma le principe pancapitaliste. Il élargit le principe de propriété généralisée à la France industrialisée des Trente Glorieuses. Il effectua sans le savoir une actualisation du principe proudhonien de petite propriété pour tous, élargit aux entreprises de plus de 10 salariés, la taille des usines et entreprises ne permettant plus à un petit nombre restreint de posséder dans l'intégralité leurs outils de travail. Sans spolier les investisseurs antérieurs, le pancapitalisme propose d'élargir la propriété de l'entreprise à tous les travailleurs via la possession d'actions. De cette manière, chacun devient partiellement propriétaire de son outil de production.

    Dans le pancapitalisme, la moitié des bénéfices serait utilisée pour autofinancer les innovations de l'entreprise et dépendre au minimum d'investissements étatiques, privés ou étrangers. La seconde moitié des bénéfices serait partagée à 50%/50% dans la génération d'actions pour les actionnaires antérieurs et la génération d'actions pour les travailleurs. Celles-ci seraient distribuées proportionnellement au salaire et à la place dans l'entreprise de chacun. De cette manière, aucune spoliation ne prendrait place. Durant les Trente Glorieuses, la croissance économique annuelle moyenne d’une entreprise était de 6%, avec ce taux, il n’aurait fallu que 25 ans aux travailleurs pour devenir actionnaires majoritaires. De nos jours, les PME de plus de 10 salariés, composant la majorité de notre tissu économique, ont eu un taux de croissance annuel de 3,5% en 2022, il faudrait alors une quarantaine d’années pour que les travailleurs deviennent actionnaires majoritaires.

    En plus des dividendes générés par ces actions, la possession de ces dernières ouvrirait l'accès au Conseil d'Administration (CA) et donc à la participation aux prises de décisions de l'entreprise pour les travailleurs. La participation salariale serait totale, tant économique, que politique au sein de l'entreprise. On vivrait alors une réelle émancipation des travailleurs et une réelle décentralisation et organicité de l'appareil économique des grandes entreprises.

    Les idées de Marcel Loichot ont pu, et peuvent toujours, sembler candide. Elles n'ont d'ailleurs ni survécus à l'ordonnance de 1967, ni au référendum de 1969, référendum dans lequel le Général De Gaulle souhaitait implanter politiquement la Participation. La faute tant à la bourgeoisie qui n'a pas vu d'un bon œil que les classes moyennes et populaires puissent s'asseoir à la même table qu'eux dans le champ économique. Mais également la faute de la gauche vivant de la rente de la lutte des classes, car le pancapitalisme était vu tant par ses promoteurs que par ses détracteurs, comme un outil efficace pour supplanter la lutte des classes, faisant travailler main dans la main patronat et prolétariat dans un seul et même but avec les mêmes outils.

    Plus proche de nous, Claude Mineraud, ancien PDG d’entreprise du CAC40, a lui aussi développé sa vision de la Participation et du pancapitalisme à travers son ouvrage « Le capitalisme populaire ». Sa volonté est claire, contrer le néo-libéralisme, et fort de son expérience de terrain, il a écrit ce petit guide à destination des (futurs) chefs d’entreprises nationalistes.

    Lui aussi se base sur trois axes pour développer son modèle économique :

    1. Actionnariat salariale : 20% des actions sont destinées aux cadres fondateurs de l’entreprise, 55,1% aux travailleurs et 24,9% des actions sont réservées aux actionnaires extérieurs.

       

    2. Participation au conseil d’administration de l’entreprise : 40% des voix sont détenues par les cadres fondateurs, 35,1% par les travailleurs et 24,9% par les actionnaires extérieurs.

    3. Grille salariale limitée : le chef d’entreprise ne peut gagner plus de 8 fois le salaire de l’employé le plus bas dans la hiérarchie.

    Ce livre est un parfait guide technique et juridique pour les entrepreneurs ou patron voulant se lancer dans une aventure pancapitaliste. Une large partie de l'ouvrage est très technique et juridique. Claude Mineraud a réussi à s'accommoder des législations en vigueur pour adapter à sa manière les principes théorisés par Marcel Loichot 60 ans plus tôt. Véritable guide politique et économique pour toute personne cherchant à actualiser la pensée économique nationaliste et populaire au sein de son appareil économique.

    Ces expériences, intellectuelles pour Marcel Loichot et pratiques pour Claude Mineraud, sont les preuves qu’une forme de « troisième voie française », adaptée à notre époque, à notre système économique et notre système juridique, est possible. Dans une France qui cherche à s’émanciper du carcan néo-libéral, où les Gilets Jaunes nous ont rappelé que le peuple français existe et aspire à plus de liberté, mais également plus de justice, où chaque crise sociale nous rappelle que les Français cherchent à reformer des corps sociaux jugés illégitimes et non-représentatifs de leurs aspirations. Le pancapitalisme est un outil crucial pour que nous, nationalistes français, repensions la question sociale et économique au sein de nos organisations et surtout, au sein de notre pays.

    Gérard Fugnat (Institut Georges Valois, 14 octobre 2024)

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