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Métapo infos - Page 1477

  • Une promenade idéologique passionnante...

    Fondateur de Polémia, Jean-Yves Le Gallou a lu et apprécié Mémoire vive, le livre d'entretiens d'Alain de Benoist avec le journaliste François Bousquet. Nous reproduisons ci-dessous le compte rendu qu'il en a fait sur son site.

    Nous vous rappelons, par ailleurs, que Mémoire vive, publié aux éditions de Fallois, est disponible en librairie ainsi que sur le site de la revue Eléments.

     

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    Mémoire vive est un livre singulier : c’est une promenade intellectuelle à travers le dernier demi-siècle, et qui remonte même bien au-delà. Car Alain de Benoist est un « intellectuel engagé » qui s’intéresse aux origines et à la généalogie. Celle de sa famille éclaire son parcours. De père aristocrate et de mère issue d’un milieu populaire, il n’a guère d’ancêtres bourgeois ; encore moins de sympathie avec l’esprit bourgeois, en qui il voit la domination de l’argent : « L’argent (…), cet équivalent universel qui transforme la qualité en quantité. » Le refus de Mammon sera une constante du parcours d’Alain de Benoist. Tout comme son goût pour les périphéries régionales, son attachement aux racines locales, sa méfiance à l’égard des jacobinismes.

    Pic de la Mirandole avec un clavier

    Son parcours, Alain de Benoist l’a commencé enfant dans les années 1950. Des années frugales. C’est l’époque des « Dinky toys » où un jeune garçon n’avait guère plus d’une dizaine de voitures miniatures, des jouets qui le suivaient de l’enfance à l’adolescence. Aujourd’hui, son fils ou son petit-fils en aura des dizaines qui se succéderont les unes aux autres : à peine achetées, sitôt jetées ! Belle initiation à la société de consommation, une société de consommation qui ne s’est épanouie qu’à partir des années 1960.

    Ceux qui sont nés plus tard l’ignorent et ceux qui ont vécu ces années-là l’ont oublié : mais, jusqu’en 1960, « la grande césure », la moitié des Français n’avaient pas l’eau courante au robinet et les plus riches – ceux qui avaient des maisons de campagne ou des châteaux – allaient tirer l’eau au puits durant leurs vacances. Alain de Benoist évoque, avec sensibilité, cette époque avec « des façons de parler, des sentiments et même des types humains aujourd’hui quasiment disparus », balayés par la modernisation et le confort qui sont des « avancées » très récentes.

    Pour autant, le jeune Alain de Benoist s’est d’emblée frotté à la technologie : dès huit ans, il tapait ses devoirs à la machine à écrire. Acquérant dans l’art de la frappe une dextérité extraordinaire qui l’aide aujourd’hui à diriger deux (voire trois ?) revues, écrire plusieurs livres à la fois et travailler sur de nombreux articles, tout en répondant courtoisement aux courriels de ses très nombreux correspondants. Alain de Benoist, c’est Pic de la Mirandole avec un clavier.

    Doué d’une intelligence précoce, Alain de Benoist a aussi connu un engagement précoce : « une jeunesse agitée » qui, sur les ruines de l’Algérie française, lui fait découvrir le militantisme (la ronéo) et le combat intellectuel dès l’âge de quinze ans. De ce militantisme il dit qu’ « il est une école de discipline, de tenue, d’exaltation et d’enthousiasme, une école de don de soi (…) Un creuset d’amitié comme il y en a peu. »

    Depuis 1960, la presse française a eu deux grandes écoles de formation.

    • – l’école d’extrême gauche, qui s’est constituée, à partir de 1968, dans les fanzines communistes, maoïstes ou trotskystes et qui, par « reproduction » successive, contrôle aujourd’hui une bonne partie des médias ;
    • – l’école issue de la Fédération des étudiants nationalistes (FEN), qui est née entre 1962 et 1967. Deux jeunes hommes y firent leurs premières armes : Amaury de Chaunac-Lanzac (François d’Orcival) et Alain de Benoist (Fabrice Laroche) qui publièrent ensemble Le Courage est leur patrie et Rhodésie, pays des lions fidèles, préfacé par Ian Smith, héros de l’indépendance blanche de la Rhodésie*.

    François d’Orcival évoluera ensuite vers le combat libéral, le soutien à la droite parlementaire et un atlantisme pro-israélien. C’est aujourd’hui une éminente personnalité du monde de la presse, décoré de la Légion d’honneur et membre de l’Institut.

    Le parcours d’Alain de Benoist a été plus chaotique : après une grande notoriété dans les années 1970, il a vécu dans une sorte d’exil intérieur, davantage invité à l’étranger qu’en France. Il suivra un parcours de vrai dissident, n’hésitant pas à choquer ses amis ou ses soutiens : alors collaborateur à Valeurs actuelles, il avait écrit, en 1976, qu’il « préférait porter la casquette de l’Armée rouge que manger des hamburgers à Brooklyn », un propos qui pouvait paraître un peu désordre en pleine Guerre froide… Alain de Benoist s’en explique d’ailleurs avec une certaine insistance : il n’a pas « choisi une stratégie pour ses idées, de peur d’avoir les idées de sa stratégie ». Pour lui, le travail d’un intellectuel n’a de sens que s’il exprime réellement sa pensée indépendamment de calculs opportunistes.

    Le printemps de la « Nouvelle Droite »

    Le morceau de choix du livre est le long chapitre consacré à la « Nouvelle Droite ».

    C’est une période très féconde de recherche intellectuelle qui démarre avec la fondation du GRECE et la création de Nouvelle Ecole en (mars !) 1968. C’est dans les années 1970 que furent posés les jalons d’une idéologie centrée sur les origines (« Tout est beau dans les origines ») : biologiques (la question de la race n’est alors pas éludée), culturelles, civilisationnelles. On retiendra notamment les travaux sur les fêtes et les traditions, la prise en considération de l’héritage païen de l’Europe, la redécouverte des sources celtiques et nordiques, l’importance accordée aux thèses de Georges Dumézil sur l’univers trifonctionnel des Indo-Européens et le nécessaire équilibre entre les fonctions de souveraineté, de défense et de production. Nous en sommes loin aujourd’hui avec le primat absolu (et pathologique) pris par la fonction marchande.

    Alain de Benoist revisite cette période-clé avec un mélange de distance et de bienveillance. Il estime excessive la part d’explication alors accordée au déterminisme biologique. Il est vrai que l’inné n’est rien sans l’acquis et que « l’homme est par nature un être de culture » (Arnold Gehlen). Pour autant, comment expliquer, aujourd’hui, autrement que par le facteur racial, que, sur les cinq continents et dans toutes les cultures, les enfants d’origine asiatique réussissent (en moyenne) scolairement, économiquement et socialement mieux que les enfants d’origine africaine ? Bien sûr, ce constat statistique est atrocement politiquement incorrect et il est évidemment plus facile d’interdire ou d’occulter son expression que de la contester. Il n’empêche : les faits sont têtus !

    Néanmoins, Alain de Benoist reste intellectuellement fidèle à cette période : il a publié en 2006 un brillant essai, Nous et les autres : une problématique de l’identité, et vient de consacrer les deux derniers numéros de Nouvelle Ecole aux Grecs et aux Romains, un intéressant retour aux fondamentaux. Dans les années 1970 les humanités classiques étaient encore au cœur de l’enseignement ; remettre en mémoire les héritages celtes ou germaniques c’était élargir la vue du monde européen. Aujourd’hui que les humanités ont disparu des collèges et des lycées le retour aux Grecs et aux Romains est une urgence !

    Heurs et malheurs du Figaro-Magazine

    La « Nouvelle Droite », « cette belle aventure de l’esprit », ce sera aussi une formidable histoire de presse, avec la création du Figaro-Dimanche en 1977, puis du Figaro-Magazine en 1978 : un journal au contenu intellectuel brillant et aux lecteurs nombreux, jusqu’à 800.000 exemplaires hebdomadaires. C’est précisément le succès en termes de lectorat du Figaro-Magazine qui le condamna à mort. Le magazine dirigé par Louis Pauwels fit l’objet de deux attaques massives : la campagne de l’été 1979 contre la « Nouvelle Droite », première campagne française de diabolisation ; puis, en octobre 1980, la campagne de sur-diabolisation qui suivit l’attentat contre la synagogue de la rue Copernic (attentat d’origine proche-orientale attribué à « l’extrême droite »), attentat que Jean Pierre-Bloch, à l’époque président de la LICRA, imputa au « climat intellectuel » créé par le Figaro-Magazine.

    Le résultat de cette campagne fut une épuration progressive du Figaro-Magazine sous la pression des milieux bien-pensants, à la Jean d’Ormesson, et des publicitaires, en particulier Maurice Lévy, de Publicis (aujourd’hui patron de l’AFEP, la très puissante Association française des entreprises privées). Louis Pauwels dut mettre de l’eau dans son vin, se séparer de plusieurs journalistes, renvoyer son rédacteur en chef, Jean-Claude Valla, et remiser Alain de Benoist à la rubrique vidéo (ce qui revient à laisser une Ferrari au garage !).

    La réussite de cette stratégie fut au rendez-vous : le Figaro-Magazine perdit les trois quarts de ses lecteurs et… augmenta ses recettes publicitaires : preuve, s’il en est besoin, qu’en matière de presse les logiques de pouvoir sont infiniment plus fortes que les logiques économiques. Les règles du marché… ne sont pas celles que l’on croit. « C’est Tartuffe, Trissotin et Torquemada qui font la loi » (Michel Mourlet).

    Un chemin de pensée dans l’adversité

    A partir de 1980/1981, Alain de Benoist entame une longue traversée du désert. Du désert médiatique français, s’entend, car il publie beaucoup à l’étranger et y intervient souvent à la télévision, notamment italienne. Il ne se plaint pas de son sort, reprenant la devise de la reine d’Angleterre : « Never complain, never explain. » Il forge des concepts nouveaux promis à un bel avenir (la pensée unique) ou dénonce (avec Guillaume Faye) « le système à tuer les peuples ».

    Il analyse le caractère « liquide » de la pensée post-moderne. Pour lui, « la vie n’est pas neutre », d’où sa critique du libéralisme quand ce dernier « fait l’apologie d’un Etat qui resterait neutre par rapport aux choix des citoyens quant aux différentes conceptions de la “vie bonne”. Cette neutralité est illusoire. D’ailleurs, vouloir rester neutre, c’est encore s’engager, car la neutralité fait toujours le jeu de quelqu’un ».

    Alain de Benoist condamne toujours l’égalitarisme et l’idéologie de la « mêmeté ». Mais sa réflexion le porte de plus en plus sur la critique du capitalisme et de la « forme-capital », instrument de destruction de toutes valeurs traditionnelles s’opposant au culte de l’argent. C’est une analyse qu’on peut qualifier de très schumpetérienne.

    En désaccord avec toute forme de « libéralisme national » (Henry de Lesquen), Alain de Benoist juge vain d’opposer ou de distinguer libéralisme politique, économique et sociétal. Pour lui, l’un se nourrit de l’autre : reconnaissons que l’alliance médiatique du trotskysme de salles de rédaction et du capitalisme financier conforte ce point de vue.

    Alain de Benoist a aussi été parmi les premiers à mettre en avant le local par rapport au global.

    Une madone de vitrail ? Non, un intellectuel debout !

    Certes, ce païen qui dédicace son livre à l’abbé de Tanoüarn n’est pas une madone de vitrail. Sa tendance à aimer choquer ceux qui pourraient le soutenir est parfois irritante. Sa dialectique qui consiste à se démarquer de la « xénophobie », de la critique de l’immigration et de « l’extrême droite » en en reprenant les caricatures diabolisantes est à la fois facile et peu élégante. Et certains silences ne sont que des prudences.

    Reste qu’Alain de Benoist peut légitimement écrire : « Je suis fier d’être resté un esprit libre. Je suis fier de n’avoir jamais déserté la pensée critique. (…) Je n’ai jamais abandonné le désir de voir “de l’autre côté du miroir”. Je ne suis pas l’homme de la repentance ou de la Téchouvah. C’est aussi une chose dont je suis fier. » Enfant, Alain de Benoist a lu la fable de Jean de La Fontaine surLe Loup et le Chien. Il a choisi son camp. Nous aussi.

    Jean-Yves Le Gallou (Polémia, 4 mai 2012)

    Note :

    *En 1965, la Rhodésie du Sud à gouvernement blanc était l’un des pays les plus calmes et les plus prospères d’Afrique. Le pouvoir fut transféré à la majorité noire et à Robert Mugabe en 1980. Devenue Zimbabwe, la Rhodésie se classe aujourd’hui au dernier rang de l’indice du développement humain de l’ONU.

    Sauf indications contraires les citations sont extraites de Mémoire vive.

    Alain de Benoist, Mémoire vive/ Entretiens avec François Bousquet, Editions de Fallois, Collection Littérature, 2 mai 2012, 330 pages.

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  • Et la sécurité ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Xavier Raufer, cueilli sur Valeurs actuelles, dans lequel il déplore le silence des candidats à l'élection présidentielle sur la lutte contre les bandes criminelles armées et l'échec total de la «politique de la ville»... 

     

     

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    Campagne : et la sécurité ?

    Dans ce qui aura constitué le sommet de la campagne présidentielle, Nicolas Sarkozy et François Hollande se sont affrontés dans un âpre duel télévisé. Ordre du jour supposé : l’avenir de la France dans tous les domaines vitaux et, dans ce cadre, les grandes oppositions droite-gauche. Tous, vraiment ? Non, hélas, car jamais dans les 170 minutes du débat il ne fut question de sécurité.

    S’est-il seulement agi d’un incroyable et mutuel oubli ? D’un implicite (ou explicite) souci d’occulter ce qui fâche et de balayer la poussière criminelle sous le tapis ? Une criante absence en tout cas – et d’autant plus malheureuse qu’en matière de sécurité, la France n’est pas en bon état.

    Infiniment plus qu’un rabâchage convenu qui n’aura rien appris de nouveau aux Français sur les positions économiques respectives des deux finalistes de la présidentielle, deux sujets au moins auraient mérité une attention soutenue, en raison à la fois de leur gravité et de leur coût : l’explosion criminelle marseillaise et la tragique “politique de la Ville”.

    Marseille d’abord. Ces dernières décennies, l’exubérance criminelle, la dimension proprement politique du grand banditisme régional provoquaient une seule réaction des élus et officiels locaux : à chaque drame, ils bêlaient en cœur “Marseille n’est pas Chicago” puis, ce rituel de conjuration accompli, retournaient à leurs combines. Or aujourd’hui, Marseille, c’est Chicago en pire : les jours pairs, des bandits s’entre-tuent à l’aide d’un inépuisable arsenal d’armes de guerre et les jours impairs, on exhume des cadavres calcinés des futaies alentour.

    Au fait, à quand remonte le début de la tuerie ? Une amusante coïncidence se constate avec la tenue, au printemps 2010, d’un “atelier professionnel” voulu et financé par la Mairie de M. Gaudin (dite “de droite”), sur le thème “Trafic de drogue et intervention sociale dans les quartiers populaires”. Cet incroyable hymne à la culture de l’excuse produisit alors l’effet d’une hormone de croissance sur les “bandits des cités” marseillaises, présentés comme autant de victimes, dont les trafics et les exactions résultaient « de la débrouille et de la pauvreté » et constituaient (je cite toujours) « des formes d’accès aux ressources » (voir ma chronique du 11 mars 2010, "De la limite des tables rondes").

    Ce que les calamiteux élus de la “droite” marseillaise ignoraient, c’est qu’en pareil cas, les “débrouillards” se coalisent forcément en bandes pour “accéder aux ressources” sur “leur” territoire. Et qu’entre eux éclatent vite des guerres – on y est – d’autant plus meurtrières que la côte grouille d’armes libyennes, bradées par des milices tribales et des trafiquants africains.

    Partant du désastre marseillais, des échanges auraient ainsi été les bienvenus entre candidats : que faire contre cette prolifération des gangs ? Comment interdire les flux d’armes de guerre entre les deux rives de la Méditerranée ? Comment constituer un outil performant de renseignement criminel ? Mais rien.

    Autre sujet majeur – et lié au précédent : celui de la “politique de la Ville”, la pire catastrophe des trente dernières années, cogérée dans l’opacité par les partis de gouvernement. Désastre ? Et comment ! Rappelons que, dès l’origine, la très idéologique “politique de la Ville” avait pour objet exclusif de « mettre un frein à la poussée des ghettos, à la dérive insécuritaire et à la montée en puissance du Front national » (le Figaro du 23 mai 1990). On voit le résultat.

    Des milliards ont depuis lors été engloutis dans l’aventure : « Les pouvoirs publics n’ont pas ménagé leurs efforts. Des centaines de millions d’euros investis dans la rénovation urbaine pour… reconstruire des quartiers entiers » (le Monde du 4 novembre 2011). Pour 2004-2013, le “plan Borloo” aura ainsi coûté 42 milliards d’euros – ou même 45, selon les sources. Cependant, toujours plus de communautarisme, de drames et de kalachnikovs – car le syndrome marseillais tend à contaminer la périphérie d’autres métropoles. Et tous le savent, le Monde du 17 mars dernier qualifiant même cruellement la rénovation urbaine de « ghetto, mais en plus propre ». Donc, silence sur les gangs et la “politique de la Ville” : sur les banlieues, « les candidats à la présidentielle sont en panne d’idées », lisait-on dans les Échos, en mars.

    Une panne de mauvais augure, car dans cet oubli du réel et dans l’occultation systématique de ce qui fâche, un précédent existe : le face-à-face George Bush-Al Gore organisé lors de campagne présidentielle américaine de 2000. Un face-à-face qui démontre une fois de plus que, dans la société de l’information, le plus dangereux, c’est ce qu’on n’a pas pu ou pas voulu voir.

    Lors de ce face-à-face, composé de trois débats d’une heure chacun, l’ensemble des sujets vitaux pour l’avenir des États-Unis devait en effet être abordé. De la fiscalité à l’agriculture en passant par l’éducation, ils le furent tous, effectivement. Tous, sauf un, radicalement oublié : le terrorisme.Moins d’un an plus tard, le 11 septembre 2001, la foudre tombait sur New York.

     Xavier Raufer (Valeurs actuelles, 17 mai 2012)

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  • Une vision du monde réactionnaire ?...

    Les éditions du Cerf ont publié récemment  L'Écologie politique - Une vision du monde réactionnaire ?, un essai de Stéphane François. Chercheur au CNRS dans le domaine de l'histoire des idées, l'auteur a notamment publié La musique europaïenne (L'Harmattan, 2006), Les Néo-paganismes et la Nouvelle droite (Arche, 2008) et Le néo-paganisme : une vision du monde en plein essor (La Hutte, 2012).

     

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    "L'écologie politique est devenue depuis le milieu des années 1980 une force politique majeure dans notre pays, et dans d'autres pays occidentaux. Cependant, elle recouvre des sensibilités idéologiques très diverses allant du progressisme au conservatisme, voire à une attitude réactionnaire. La diversité du tissu associatif montre la pluralité de l'expression. Le mérite de Stéphane François est de nous aider à saisir ces nuances en donnant une présentation précise, érudite même, et pourtant claire des groupes et courants concernés. Son propos pourra parfois apparaître un peu provocateur : alors qu'il est de bon ton de considérer que l'écologie politique se situe à gauche du spectre politique, il présente des aspects de droite qui animent aussi celle-ci, ou qui même déterminent une part importante de sa conception du monde. Cet ouvrage souligne, en effet, les aspects nostalgiques, technophobes et parfois antilibéraux, qui s'expriment dans les textes et les discours. Il montre aussi l'existence d'une écologie d'extrême droite, voire néo-païenne, assez vivace qui coexiste avec des formations plus établies. Cette approche novatrice permet de comprendre cette configuration droitière de l'écologie politique, sans pour autant porter de jugements sommaires sur les discours analysés."

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  • Vote ethnique ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Michel Geoffroy, cueilli sur Polémia et consacré à l'analyse des excellents résultats obtenus par François Hollande dans les banlieues des villes importantes.

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    L'immigration est aussi une chance pour les socialistes !

    On abordait jusqu’alors la question de l’immigration du point de vue économique : l’impact de l’immigration sur le chômage et sur les comptes sociaux. L’immigration a aussi été approchée du point de vue du « droit » au séjour et à la nationalité, lors de la question des « sans papiers » et du « droit du sol ». Malgré la censure des médias, l’immigration a aussi été évoquée sur le registre de l’insécurité et celui de la délinquance. La question de l’abattage hallal a enfin conduit à poser en termes concrets la question de l’islamisation de notre société et à renouveler le débat sur la laïcité.

    Mais l’immigration n’avait jusqu’alors pas été abordée sous l’angle de la souveraineté politique, sauf par Guillaume Faye dans son livre La Colonisation de l’Europe (paru en 2000), qui lui valut d’ailleurs des poursuites judiciaires. Mais, à la lumière de l’élection présidentielle de 2012 et de la victoire de F. Hollande, on ne peut plus esquiver la question.

    La présidentielle de 2012 renouvelle la question

    Le sujet était jusqu’alors délicat car peu d’études permettaient de l’approcher. En outre, l’idée que les personnes d’origine immigrée répartissaient leurs suffrages d’une façon diversifiée ou bien s’abstenaient majoritairement était largement répandue. G. Faye pensait pour sa part que le vote ethnique ou religieux s’affirmerait et ne profiterait pas aux partis en place. Mais ce n’est pas ce qui s’est passé en 2012.

    Les images des drapeaux africains et maghrébins agités sur la Place de la Bastille au soir du 6 mai 2012, comme dix ans auparavant au soir du second tour de l’élection présidentielle de 2002, illustrent le fait que nous avons changé d’époque. Comme le montraient aussi les réunions du candidat F. Hollande où l’assistance était nettement plus « ethnique », comme on dit en novlangue, que celle des réunions de N. Sarkozy. Elles ont apporté la preuve visuelle, en effet, que les électeurs issus de l’immigration, et notamment des musulmans, ont voté en très grande majorité pour le candidat socialiste.

    Déjà en 2007

    Cette situation était déjà apparue pour l’élection présidentielle de 2007.

    Le sondage CSA/La Croix du 22 avril 2007 montrait que le comportement des électeurs se déclarant « musulmans » différait radicalement de celui des autres : 78% pour la gauche et l’extrême gauche, contre 35% au plan national. L’analyse des résultats des villes phares de l’immigration en Ile-de-France, en Isère et dans le Rhône donnait des résultats comparables : la candidate socialiste recueillant de 60 à 70% des voix ; une analyse plus fine des bureaux de vote montrait que, dans les quartiers à forte immigration, la candidate socialiste recueillait 80% des voix.

    Une adhésion massive du vote ethnique

    L’élection de 2012 confirme la tendance mais en l’amplifiant.

    Le sondage Opinion Way/Fiducial/le Figaro du 6 mai révèle une adhésion massive des électeurs musulmans en faveur de F. Hollande : 93% des voix. Déjà, au premier tour, la même étude montrait que 59% des ces électeurs avaient voté pour F. Hollande et 23% en faveur de J.L. Mélanchon, N. Sarkozy ne rassemblant que 4% de leurs voix.

    Le score du candidat socialiste dans les départements d’outre-mer (de 62% en Guyane à 71,9% en Guadeloupe) témoigne d’un positionnement comparable : les Antilles et La Réunion lui ont apporté 600.000 voix en effet, un apport qui n’était pas mince alors que l’écart des voix avec N. Sarkozy s’établissait à 1.400.000. De même, le site Guineenews du 28 avril 2012 révélait le démarchage dont la « communauté » guinéenne de France avait fait l’objet de la part du candidat socialiste dans la perspective du second tour de la présidentielle. D’autres « communautés » ont dû faire l’objet du même démarchage. Car d’après certaines études il y aurait 4,5 millions de Noirs de France : une autre cible politique pour la gauche !

    En 2007 le vote préférentiel des musulmans en faveur du candidat socialiste avait pesé mais pas trop, car la candidature de N. Sarkozy était portée par une dynamique forte. Mais en 2012, alors que F. Hollande n’a pas obtenu la majorité des votants et que l’écart avec N. Sarkozy était faible, il en va tout autrement.

    La stratégie de niche ethnique de la gauche

    La stratégie de niche adoptée par la gauche qui, depuis les années 1980, a fait de l’immigré et de « l’autre » – à condition qu’il ne soit pas d’origine européenne – un prolétariat de rechange, a donc porté.

    La droite a, au contraire, adopté une position fluctuante vis-à-vis de la question de l’islam et de l’immigration : tantôt libérale et favorable à « l’immigration choisie » et aux régularisations d’immigrés en situation irrégulière, pour complaire au patronat ; tantôt favorable à un « islam à la française » pour donner le change aux laïcs ; tantôt tentée par un discours plus restrictif pour séduire l’électorat populiste.

    Mais la gauche, elle, n’a pas eu ces hésitations idéologiques et a clairement fait le choix de la préférence ethnique. L’itinéraire d’H. Désir, fondateur de SOS Racisme dans les années 1980 et aujourd’hui cacique du PS, illustre ce positionnement de longue durée.

    En effet, par égalitarisme, la gauche nie tout caractère structurant aux différences humaines : l’immigré, qu’il soit malien, suédois ou algérien, n’est-il pas un homme ayant des droits « imprescriptibles » ?

    Prétendre attacher de l’importance aux différences ethniques, religieuses ou culturelles ne serait donc à ses yeux qu’une preuve de « racisme », « d’islamophobie » ou de « xénophobie ». Un peu d’intégration « républicaine » et tout ira bien ! Laïque par tradition, la gauche est portée aussi à minorer le poids des divergences religieuses ; et tout ce qui nuit à la religion catholique la satisfait de surcroît. Son credo égalitaire ne pouvait enfin que séduire des minorités qui se considèrent, à tort ou à raison, comme victimes de « discriminations » de la part des Français de souche.

    Le remplacement des classes populaires par les classes ethniques

    La gauche a en outre adopté une vision compassionnelle du bon immigré victime des méchants « racistes » et dont le sort serait solidaire de celui des travailleurs exploités. Cette attitude lui a, certes, aliéné une partie de l’électorat populaire autochtone qui souffre de l’immigration, car à la différence des bobos, celui-ci n’a pas la possibilité de se mettre à l’abri. Mais, en contrepartie, la gauche a gagné le soutien d’un groupe en expansion démographique : les personnes d’origine immigrée, d’origine africaine et celles de religion musulmane.

    Les propositions faites en vue du droit de vote des « résidents » aux élections locales s’inscrivent d’ailleurs dans la continuité de cette logique. Car, comme le faisait remarquer N. Sarkozy lors de son débat avec F. Hollande le 2 mai, ce ne sont pas les Suédois qui vont profiter de cette mesure ! Ce sont avant tout les résidents africains ou maghrébins et des musulmans. Ce qui renforcera d’autant le vote à gauche.

    Le vote ethnique a fait la différence

    Alors que le candidat socialiste n’a pas rassemblé la majorité des votants il a au contraire regroupé la majorité des électeurs ethniques.

    En d’autres termes la gauche a commencé de recueillir en 2012 les fruits de sa stratégie de niche ethnique.

    Dans un électorat autochtone qui, malgré le rejet de N. Sarkozy, est resté majoritairement ancré à droite, cela a fait la différence en faveur du candidat socialiste. En effet, dans une élection au suffrage majoritaire, ce qui compte ce n’est pas de s’acharner à mobiliser un électorat dispersé mais au contraire de rassembler le plus de groupes de pression possibles.

    Afrique/islam/socialistes même combat ?

    Il faudrait aussi se demander pourquoi les électeurs musulmans ou d’origine africaine votent socialiste. Sans doute pas parce qu’ils sont séduits par le programme, en particulier en matière de mœurs ! Mais parce qu’ils pensent que la gauche leur sera plus favorable dans la durée : plus favorable en matière de lutte contre les « discriminations », plus favorable en matière « d’égalité des droits » à revendiquer contre les autochtones. Car ces droits sont en réalité des droits créances que l’on exerce à l’encontre de la majorité de la population, comme le démontre la « discrimination positive » dont le concept a été apporté par N. Sarkozy.

    D’après Julien Goarant, directeur d’études chez Opinion Way, les électeurs musulmans auraient aussi voulu sanctionner la « stigmatisation » et « l’instrumentalisation » de leur religion : une réaction lourde de menaces pour l’avenir, quand on sait qu’une majorité d’Européens et de Français estiment de leur côté que l’islam est de plus en plus présent dans l’espace public et que les musulmans s’intègrent mal.

    Mais en votant socialiste, les électeurs musulmans et d’origine africaine ont surtout préféré plus de laxisme en matière d’immigration. En d’autres termes, ces électeurs comptent sur la gauche pour laisser se renforcer le poids de la population d’origine étrangère et de religion musulmane en France. C'est-à-dire pour renforcer leur influence dans la société.

    Sans doute aussi visaient-ils le maintien des avantages que leur offre l’économie-providence. Lors des émeutes de 2005 c’est une économie de rentes qui s’était révoltée. En 2012, c’est une économie de rentes qui s’est mobilisée.

    C’est donc une stratégie à long terme, même si elle profite aux deux parties dans l’immédiat : à la gauche et aux minorités ethniques ou religieuses. Mais on doute qu’elle profite aux Français autochtones !

    Car F. Hollande a été élu grâce à l’appoint des électeurs ethniques et musulmans qui a clairement fait défaut à N. Sarkozy. Ceux-là vont certainement se rappeler à son bon souvenir le moment venu.

    Et surtout cela doit nous interpeller quant à la nature de la « grande substitution » provoquée en Europe par l’immigration de peuplement. Après l’espace économique, après l’espace religieux, c’est maintenant l’espace de la souveraineté politique qui pourrait échapper aux Français de souche.

    Bienvenue dans le XXIe siècle !

    Michel Geoffroy (Polémia, 15 mai 2012)

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  • La beauté de l'imperfection...

    Les éditions Arléa viennent de publier Les Lieux et la poussière - Sur la beauté de l'imperfection, un essai de Roberto Peregalli, dans lequel il dénonce la laideur froide et sans défaut de l'habitat moderne. Architecte milanais, Roberto Peregalli a suivi des études de philosophie et a été influencé par sa lecture d'Heidegger. Il est  déjà l'auteur d'un essai intitulé  La cuirasse brodée (Le Promeneur, 2009).

     

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    "Les Lieux et la poussière est un essai en douze chapitres sur la beauté et la fragilité. La beauté de notre monde périssable, la fragilité des choses et des vies, la nostalgie qui habite les objets etles lieux.

    Roberto Peregalli voit les façades des maisons comme des visages. Il regarde le blanc, le verre, ou la lumière des temples, descathédrales, de la pyramide du Louvre. Il dénonce l’effroi provoqué par le gigantisme et l’inadaptation de l’architecture moderne, la violence de la technologie. Il s’attarde sur le langage et la splendeur des ruines, de la patine et et de la pénombre. Il dénonce l’incurie de l’homme quant à son destin.

    Roberto Peregalli nous renvoie à notre condition de mortel. Il nous rappelle combien tout est fragile dans notre être et notre façon d’être. Combien tout est poussière. Combien nous oublions de prendre soin de nous dans notre rapport aux choses et au monde.

    Son texte a la force soudaine de ces objets qu’on retrouve un jour au fond d’un tiroir et qui disent de façon déchirante et immédiate tout ce que nous sommes, et que nous avons perdu.

    À la façon de Tanizaki, dans Éloge de l’ombre, il dévoile avec sensibilité et intelligence l’effondrement de valeurs qui sont les nôtres et qui méritent d’être en permanence repensées et préservées."

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  • Vers une ruée sur les banques ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de l'économiste Jaques Sapir, cueilli sur le site du magazine Marianne, qui évoque le risque d'une véritable ruée des populations grecques et espagnoles sur les banques en vue d'y retirer du numéraire, ruée qui provoquerait immanquablement un effondrement de la zone euro...

     

     

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    «Bank run» en Europe

    La situation économique dans la zone Euro continue de se dégrader rapidement. 

    En Grèce, avec la double annonce de la suspension des négociations avec le FMI et de la suspension des prêts de la BCE aux banques, le « bank run » modéré que l’on connaît actuellement peut à tout moment s’amplifier et devenir incontrôlable. Il faut se souvenir qu’en Russie, en 1998, ce fut un « bank run » qui sonna la fin pour le système économique eltsinien. En 5 jours, les banques étaient exsangues et le gouvernement contraint de déclarer un défaut et de laisser flotter le Rouble, ce qui aboutit à sa dévaluation de 50%. 

    Si le système bancaire grec s’effondre dans les prochains jours, il n’y aura plus d’arguments (autres que politiques) pour refuser un défaut et une sortie – à terme – de l’Euro. 

    En Espagne, l’adjudication aujourd’hui d’une somme de 2,54 milliards d’euros s’est faite dans de mauvaises conditions. Les taux à 4 ans sont montés au-dessus de 5% et les taux à dix ans atteignent 6,3%. Le rapprochement rapide des taux « courts » avec les taux « longs » est un symptôme indubitable d’une crise de liquidité. L’Espagne est, désormais, dans la même situation que début novembre dernier. La dégradation de la note de 16 banques espagnoles est logique quand on sait que le pourcentage de crédits qui ne sont pas remboursés atteint désormais 8,1% de l’encourt total. Encore, ce chiffre est une moyenne. Dans certaines banques, on atteint des taux de plus de 10%. Le pays est coincé entre une récession qui provoque un taux de chômage historique et une crise bancaire massive, qui vient de l’insolvabilité des ménages. Ceci avait été annoncé en septembre dernier. La solution est que l’État prenne à son compte les dettes privées, mais la somme atteint désormais de 170 à 250 milliards. Sous la menace d’un « bank run » qui peut se déclencher très rapidement, le gouvernement ne pourra plus tergiverser et devra demander rapidement à bénéficier de l’aide européenne (FESF). 

    La situation espagnole se traduit par une aggravation rapide de la crise en Italie (ou les taux à 10 ans ont atteint 5,8%), au Portugal (déjà sous perfusion du FESF) mais aussi de la France, dont l’écart des taux avec l’Allemagne a atteint aujourd’hui 1,4% (142 points de base). 

    La mécanique de la crise de l’Euro s’est bien remise en marche (en fait dès la fin du mois de mars). Cette crise s’accélère et devient généralisée avec la concomitance des problèmes grecs et espagnols. Si un « bank run » survient en Espagne, ou si le même mécanisme s’accélère en Grèce, la question d’un effondrement a très court terme de la zone Euro ne pourra plus être éludé. 

    Faute de réponses structurelles, aujourd’hui impossible tant pour des raison politiques qu’institutionnelles, une dissolution ordonnée de la zone apparaît comme la seule solution susceptible de préserver l’avenir et de permettre la survie de mécanismes de coordination monétaire.

    Jacques Sapir (Marianne, 20 mai 2012)

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