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Points de vue - Page 120

  • La crise du coronavirus, le fruit des défaillances de la France d’en haut...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Maxime Tandonnet, cueilli sur Figaro Vox et consacré à la faillite des élites, brutalement mise en lumière par la crise du coronavirus. Ancien haut-fonctionnaire, spécialiste des questions d'immigration, et désormais enseignant, Maxime Tandonnet a été conseiller à l'Elysée sous la présidence de Nicolas Sarkozy. Il a donné un témoignage lucide et éclairant de cette expérience dans Au cœur du volcan (Flammarion, 2014).

     

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    Coronavirus: « La crise qui nous frappe est aussi le fruit des défaillances de la France d’en haut »

    Cette crise du coronavirus confirme une fois de plus le fossé qui sépare les élites médiatiques et dirigeantes de la majorité silencieuse et du pays profond. Le discours dominant, celui de la France dite d’en haut, proféré sur les grands médias radio-télévision, ne lésine pas sur la culpabilisation de la population. Que n’a-t-on pas entendu depuis quelques jours? «Les gens sont irresponsables, indisciplinés, inconscients, idiots.» À l’appui de ces propos, les journaux télévisés ont montré, dimanche 15 mars, des centaines de personnes avec leurs enfants rassemblées dans les parcs ou au bord de la Seine. Les mêmes médias ont accablé les foules de Parisiens à la gare, en quête d’un train gagnant la province… Et depuis peu, les queues devant les magasins ou les pharmacies et les achats massifs de personnes craignant la pénurie.

    Signes irréfutables de la panique populaire ou d’un manque de solidarité? De fait, les images accusatrices ne préjugent en rien du sentiment profond du pays. D’ailleurs, dès lors que l’état de guerre a été annoncé par les plus hautes autorités de la nation, comment reprocher à des mères et pères de famille de vouloir quitter Paris avec leur famille et de faire des provisions de vivres et de médicaments? Ne s’agit-il pas de réflexes naturels en temps de guerre? Certes, les réseaux sociaux fourmillent de petites vidéos montrant des scènes scandaleuses, comme des bagarres devant des commerces. Ces comportements caricaturaux ne doivent évidemment pas préjuger de l’état d’esprit général d’une nation.

    De fait, jusqu’à jeudi 12 mars, le discours dominant, de la part des médecins et scientifiques s’exprimant sur les médias ainsi que des autorités du pays, était plutôt à la dédramatisation. Il était question, malgré la tragédie italienne, d’une sorte de grippe sans danger pour les personnes bien portantes et de confiance a priori dans le système de soin français supposé capable de faire face à une situation de crise. Certaines personnalités s’étaient même affichées publiquement dans la foule s’offrant ainsi en exemples de sang-froid. La prise de conscience de la gravité de la situation et le changement de ton sont intervenus entre le 12 et le 15 mars.

    Peut-on reprocher à la population, ou à une partie d’entre elle de s’être trop longtemps fiée à ce message optimiste? D’avoir continué de s’entasser dans les transports en commun, rassurée par la parole scientifique et officielle? D’être sortie dans les parcs, demeurés ouverts et autorisés, pour profiter d’une belle journée printanière? La mode est aussi à fustiger les 45% de Français qui se sont rendus aux urnes dimanche et auraient ainsi fait preuve d’inconscience plutôt que de sens civique. Si l’abstention des personnes fragiles est évidemment compréhensible, il est incongru de montrer du doigt les électeurs qui ont accompli leur devoir de citoyen dès lors que le scrutin était ouvert et les conditions de sécurité annoncées comme draconiennes.

    «Toute société qui souffre a besoin de boucs émissaires à qui imputer son mal» écrit en 1983 Raoul Girardet, dans Mythes et mythologie politiques, à l’image de ces grandes épidémies de jadis qui donnaient lieu à d’effroyables chasses aux sorcières. La majorité silencieuse, anonyme, la «vile multitude», comme disait Thiers en 1850, serait-elle aujourd’hui le nouveau coupable idéal? Mais surtout, le pays dans son ensemble doit-il devenir le bouc émissaire des défaillances de la France dite «d’en haut», les élites médiatiques, scientifiques, dirigeantes, à anticiper et prévenir une catastrophe qui s’est déclenchée en Chine à la fin de l’année 2019?

    Relisons L’étrange défaite de Marc Bloch, qui n’a pas vieilli d’une ride. «Quoi que l’on pense des causes profondes du désastre, la cause directe fut l’incapacité du commandement [qui] n’a pas su ou pas voulu comprendre le rythme, accordé aux vibrations accélérées, d’une ère nouvelle. [L’ennemi croyait] à l’action et à l’imprévu. Nous avions donné notre foi à l’immobilité et au déjà fait.» Pour l’auteur de ce chef-d’œuvre, la débâcle de 1940 fut avant tout le produit du déclin intellectuel des élites dirigeantes, de l’affaiblissement de la culture générale, historique et littéraire, qui permet de disposer du recul nécessaire face aux évènements en cours et par là même, d’en lire le mécanisme, de les interpréter et d’anticiper au mieux face à l’imprévisible: «Le passé a beau ne pas commander le présent tout entier, sans lui, le présent demeure inintelligible. Pis encore peut-être: se privant délibérément, d’un champ de vision et de comparaison assez large, notre pédagogie historique ne réussit plus à donner, aux esprits qu’elle prétend former, le sens du différent ni celui du changement.» Bien entendu, la crise actuelle, par sa nature et son ampleur, ne peut être comparée avec la débâcle de juin 1940. Les deux ont cependant un point commun: à la base, une faillite intellectuelle.

    Maxime Tandonnet (Figaro Vox, 18 mars 2020)

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  • Lutte contre la contamination du coronavirus : florilège des annonces médiatisées...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de l'Observatoire du journalisme consacré aux annonces cacophoniques du gouvernement à propos de l'épidémie de coronavirus...

     

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    Lutte contre la contamination du coronavirus : florilège des annonces médiatisées

    Depuis le début de la propagation du coronavirus, les membres du gouvernement multiplient dans une certaine cacophonie les déclarations et les mesures visant à endiguer la pandémie. Il nous a paru utile de rapprocher certaines d’entre elles. C’est surtout dans les réseaux sociaux que nous avons trouvé de l’impertinence et de l’esprit critique vis-à-vis de la gestion de la crise, que nous vous laissons le soin de qualifier. Situation au 16 mars 2020.

    Un risque de propagation « très faible »

    À partir du 22 janvier 2020, l’épidémie du coronavirus commence à se développer en Chine et connait un pic le 7 février. L’épidémie se propage rapidement en Europe.

    Le rédacteur en chef de L’Incorrect nous rappelle le 14 mars les propos tenus le 24 janvier par la Ministre de la santé, Agnès Buzyn : « Le risque d’importation depuis Wuhan est quasi nul. Le risque de propagation du Coronavirus dans la population est très faible ». Heureusement, la radio d’État France Info est là pour prendre la défense de la Ministre le 9 mars : « C’est vrai, mais le contexte de l’époque est bien différent ». Le 16 février, alors que la contamination se propage en France, la Ministre de la santé annonce sa démission, pour se présenter aux élections municipales à Paris.

    Des masques envoyés en Chine

    Le 19 février, le ministère de l’Europe et des affaires étrangères annonce dans un communiqué de presse largement médiatisé l’envoi de 17 tonnes de fret médical en solidarité avec la Chine à destination des structures hospitalières de Wuhan et de la province du Hubei : combinaisons, masques, gants, etc.

    Dès la mi-février, la pénurie de masques en France, en particulier pour les professionnels de santé (FFP2), est manifeste. Ils s’en inquiètent selon Sciences et avenir le 7 mars.

    Le 4 mars, des médecins généralistes annoncent qu’ils vont attaquer l’État devant le tribunal administratif de Paris pour obtenir des masques selon Egora.fr, un site d’informations médicales.

    Le même jour, la porte-parole du gouvernement Sibeth Ndaye déclare en direct de l’Élysée : « Cela me semble peu probable que la France atteigne jamais le stade 3 ».

    Le 14 mars, les autorités sanitaires françaises annoncent que le pays passe en stade 3.

    Le 5 mars, l’émission sur France 2 Envoyé spécial consacre un reportage à l’épidémie de coronavirus, en particulier à Creil, où est morte en France la première personne en raison de cette maladie. On y apprend que ce sont des militaires de la base militaire de Creil qui ont participé au rapatriement de français basés à Wuhan, en Chine.

    Surtout ne pas renoncer aux terrasses, aux salles de concert et aux fêtes de soir

    Le 11 mars, le Président de la République s’exprime sur Twitter :

    « Nous ne renoncerons à rien. Surtout pas à rire, à chanter, à penser, à aimer. Surtout pas aux terrasses, aux salles de concert, aux fêtes de soir d’été. Surtout pas à la liberté. Surtout pas à notre esprit de résistance qui fait la République si grande, la France si forte ».

    Le 14 mars, le Premier ministre annonce la fermeture à compter du 15 mars de nombreux lieux publics : restaurants, bars, cinéma, discothèques, etc.
    Il estime qu’ « il n'y a à ce jour pas suffisamment de prise de conscience par les Françaises et les Français de l'importance de leur rôle face au virus. C'est urgent, c'est maintenant qu'il faut changer de comportement ».

    Les frontières « ne servent à rien »

    France 24 rappelle le 14 mars que le Président de la République n’a - au cours de son allocution télévisée du 12 mars - pas annoncé la fermeture des frontières nationales. La chaine mentionne la défense de cette décision par le ministre de la santé : « Un virus n’a pas de frontières. Il circule en Italie, en Espagne, en Allemagne mais aussi dans des pays qui ont déjà des frontières, comme la Suisse. (…). Scientifiquement cela n’a pas d’ intérêt ».

    Alors que les frontières de la France avec ses voisins européens ne sont toujours pas contrôlées au 15 mars, on apprend par plusieurs médias dont Libération que de nombreux pays ont déjà annoncé un strict contrôle de leurs frontières nationales : Pologne, Autriche, Italie, Danemark, Russie, Pologne, Norvège, Lituanie, Slovénie, etc.

    Les écoles restent ouvertes ou fermées ?

    Dans la journée du 12 mars, le Ministre de l’Éducation exclut sur BFMTV la fermeture totale des écoles, qui ne serait pas une stratégie adaptée et préconise la fermeture dans des zones « ciblées ».

    Le 12 mars, à 20 heures, lors d’une allocation télévisée, le Président de la République annonce la fermeture pour une durée illimitée de toutes les écoles, crèches et universités.

    Le 10 mars, plusieurs médecins généralistes annoncent qu’il ont décidé de porter plainte contre l’État, nous apprend France info. Deux d’entre eux dénoncent sur France 3 le manque de moyens financiers et humains et estiment que l’épidémie est prise à la légère.

    Alors que le journal Les Échos tente le 14 mars de dresser la liste des pays où les français ne peuvent plus ou difficilement voyager, l’animateur et créateur du site Les Crises, revient le 12 mars sur la chaine RT France sur les mesures, « dramatiquement insuffisantes » prises par la France (…). La France est le pire élève de la planète ».

    D’ici à ce que le Président de la République accuse une nouvelle fois des organes de presse étrangers de répandre des « contre-vérités infamantes » comme en 2017… il n’y a qu’un pas que nous n’osons franchir.

    Observatoire du journalisme (OJIM, 16 mars 2020)

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  • Coronavirus : la faillite de trois idéologies...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Renaud Girard cueilli sur Geopragma et consacré au coronavirus comme révélateur des faillites du  communisme, de l’européisme et du mondialisme... Renaud Girard est correspondant de guerre et chroniqueur international du Figaro.

     

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    Coronavirus : La faillite de trois idéologies

    Géopolitiquement, la pandémie de maladie à coronavirus, née en Chine en 2019 (Covid-19), a mis en lumière la faillite de trois idéologies : le communisme, l’européisme, le mondialisme.

    Le parti communiste chinois (PCC) porte une très lourde responsabilité dans la naissance et la dissémination initiale de cette maladie très contagieuse. D’origine animale, le virus a été transmis à l’homme à Wuhan, grande ville du centre de la Chine. Cette transmission s’est faite sur le marché de Huanan, à la fin du mois de novembre 2019. C’était un marché où l’on vendait des animaux sauvages et domestiques vivants, dont les cages étaient entassées, dans des conditions d’insalubrité répugnantes. Le virus a été au départ transmis par une chauve-souris, qui l’a passé à un pangolin. Les riches Chinois sont friands d’animaux sauvages, consommation à laquelle ils prêtent quantité de qualités imaginaires (augmentation de la force physique, de la puissance sexuelle, etc.). Le virus Ebola provenait lui aussi d’une chauve-souris. Le virus du sida a été transmis à l’homme par un chimpanzé.

    Le problème est que les autorités chinoises n’ont tenu aucun compte d’une précédente alerte. En novembre 2002, une épidémie de SRAS (syndrome respiratoire aigu sévère, dû à un coronavirus) était née dans la province du Guangdong (sud-est de la Chine), sur un marché vendant lui aussi des animaux sauvages et domestiques vivants. Tous les scientifiques connaissent le danger des zoonoses (maladies infectieuses des animaux vertébrés transmissibles à l’homme).

    Plus grave encore que cette imprudence, la deuxième faillite du PCC est venue de son addiction au mensonge d’Etat et à la dissimulation. Obsédé par son impératif de garantir à tout prix la « stabilité sociale », le PCC de la région de Hubei a préféré au départ fermer les yeux. Il a même sanctionné des médecins de l’hôpital central de Wuhan pour avoir sonné l’alerte. Le PCC n’a toujours pas expliqué au monde pourquoi il avait abruptement ordonné la fermeture du laboratoire de santé publique de l’Université Fudan (Shangaï) le 12 janvier 2020. La veille, ce laboratoire de pointe avait publié le séquençage du virus Covid-19 sur virological.org, un forum scientifique de discussion sur les virus, en libre accès. C’est la publication de ces données sur le génome qui a permis la mise au point d’un nouveau kit de test pour diagnostiquer le virus.

    Les cadres du PCC ont fait, pendant trois semaines, passer la logique d’un pouvoir prétendument infaillible avant la vérité médicale. Ces trois semaines perdues dans le combat initial contre le virus pèsent aujourd’hui très lourd. Si la maladie avait été traitée dès qu’elle a surgi, il n’y aurait pas aujourd’hui de pandémie.

    Comme si ce n’était pas suffisant, le PCC a ajouté le « fake news » au mensonge et à la dissimulation. Le 13 mars 2020, Zhao Lijian, le nouveau porte-parole du ministère chinois des affaires étrangères a osé tweeter que « l’armée américaine pourrait avoir apporté l’épidémie à Wuhan ». En octobre 2019, des soldats américains avaient participé aux jeux militaires mondiaux, qui s’étaient déroulés à Wuhan. Les autorités communistes chinoises sont aujourd’hui très nerveuses car elles saisissent que leur peuple sait parfaitement qu’elles lui ont, au départ, menti, et qu’elles n’ont lancé que tardivement leur implacable – et apparemment réussie – offensive contre le virus.

    La deuxième faillite est celle de l’idéologie européiste, qui considère la construction européenne (et sa religion d’ouverture des frontières) comme un idéal en soi, au lieu de n’en faire qu’un usage pragmatique, dans l’intérêt concret des différentes nations de l’UE. Le 13 mars 2020, la présidente de la Commission européenne a critiqué la fermeture des frontières décidées par certains pays de l’UE pour lutter contre la pandémie. Le lendemain, le pays natal d’Ursula von der Leyen adoptait une telle mesure de bon sens… Les Chinois ont bien « fermé » les frontières du Hubei, province cinq fois plus étendue que la Hollande ! La décision de Trump de fermer dès la fin janvier ses frontières aux voyageurs en provenance de Chine, explique le retard de la maladie en Amérique par rapport à l’Europe.

    Enfin, est aussi en faillite l’idéologie du mondialisme, qui croit aux vertus d’une absolue division internationale du travail, n’obéissant qu’aux lois classiques du libéralisme économique. Il est inacceptable que nous dépendions aujourd’hui d’un pays aussi lointain et différent de nous que la Chine pour la fabrication de nos médicaments ; et que la Maison Blanche ait essayé de soudoyer le patron du laboratoire allemand CureVac, afin d’accaparer le vaccin qu’il est en train de mettre au point. Quand nous sortirons de cette pandémie, nous devrons établir d’urgence un réel souverainisme économique européen !

    Renaud Girard (Geopragma, 17 mars 2020)

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  • Face à l’invasion, les Grecs peuvent compter sur la solidarité des peuples européens !...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Paul Tormenen, cueilli sur Polémia et consacré à la menace d'invasion migratoire qui pèse sur l'Europe à la frontière de la Grèce avec la Turquie. Paul Tormenen est juriste.

     

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    Face à l’invasion, les Grecs peuvent compter sur la solidarité européenne

    La France est un pays formidable. Alors qu’en ce début du mois de mars, un pays européen est agressé par la Turquie, les médias français de grand chemin réduisent cet événement majeur à un entrefilet présentant tout au plus des « incidents » à la frontière gréco-turque. L’annulation d’épreuves sportives à cause du coronavirus semble bien plus importante dans la hiérarchie de l’information que la défense du territoire grec.
    Il y a pourtant des motifs d’espérer : les soutiens au peuple grec dans sa résistance à la tentative de submersion migratoire organisée par le gouvernement turc sont nombreux. Et ils ne se limitent pas à un soutien humanitaire, comme celui proposé par les institutions européennes, qui refusent de comprendre que l’on ne défend pas un continent avec de bons sentiments et en donnant de l’argent au pays qui vous agresse.

    Les douaniers grecs, rapidement débordés par la manœuvre du président Erdogan, qui a poussé des milliers de migrants vers la frontière grecque, ont pu compter rapidement sur de nombreux soutiens. Ces soutiens prennent de multiples formes : renforts à la frontière avec la Turquie, propositions d’appui logistique, manifestations, déclarations de solidarité au peuple grec, etc.

    Le renfort en Grèce

    Rapidement après l’annonce du président Erdogan le 29 février de laisser ouverte la frontière gréco-turque et ses manœuvres pour pousser les migrants vers la Grèce, le gouvernement grec déploie l’armée et la police à la frontière. Le 2 mars, l’agence de garde-frontières et de garde-côtes FRONTEX envoie une mission d’intervention rapide en Grèce. Ces renforts « officiels » sont rapidement complétés par de très nombreuses initiatives de pays et de citoyens souhaitant défendre l’intégrité territoriale menacée de la Grèce.

    Le soutien de la population

    De nombreux Grecs sont venus prêter main-forte aux forces de l’ordre : agriculteurs, éleveurs, pêcheurs, retraités, ils sont plusieurs milliers à patrouiller à la frontière. Ils arrêtent parfois des clandestins qui veulent passer illégalement. Ils bénéficient d’un large soutien de la population, qui apporte des vivres aux forces de l’ordre. À Évros, de nombreux agriculteurs sont venus avec leurs tracteurs pour éclairer la frontière et faciliter le travail des douaniers. Le 7 mars, le chef de l’Église orthodoxe grecque est venu bénir les soldats qui patrouillent à la frontière.Le chef des gardes-frontières d’Évros affirme : « Il y a une grande unanimité et de nombreuses expressions de soutien, une solidarité touchante[…].Des bénévoles, des entrepreneurs, des associations culturelles soutiennent activement les gardes-frontières. » « L’État turc transporte les migrants, les criminels libérés, et parfois ses propres compatriotes aux frontières », ajoute un journaliste de Tichys Einblick, un site d’information allemand.

    Le soutien international

    Rapidement, un soutien international s’organise. Le hashtag #Istandwithgreece sur Twitter rencontre un grand succès et permet à de très nombreux internautes de marquer leur solidarité avec le peuple grec.

    Des militants identitaires allemands sont venus sur place manifester leur solidarité avec les Grecs. Ils se font agresser par des antifas sur l’île de Lesbos le 7 mars. Le chef du parti Les Démocrates de Suède est venu distribuer des tracts aux migrants à la frontière : « Ne venez pas chez nous. Nous ne pouvons pas vous donner plus d’argent ou vous fournir un logement. Désolé. »À Paris, des militants identitaires manifestent le 7 mars leur soutien au peuple grec. Certains sont arrêtés et passent la nuit au poste de police.À New York le 9 mars, plusieurs centaines d’Américains d’origine grecque manifestent leur soutien à la Grèce. L’organisateur de la manifestation affirme qu’il veut envoyer un message fort et amical aux Grecs qui protègent leurs frontières.

    Pour couper court à tout appel d’air qui serait également préjudiciable à la Grèce, le gouvernement hongrois annonce suspendre les demandes d’asile et interdit l’accès à ses centres aux nouveaux requérants. Le Premier ministre autrichien annonce le déploiement de 2 200 soldats pour assurer la protection des frontières autrichiennes. Le 5 mars, la route des Balkans semble fermée.

    Plusieurs pays manifestent rapidement leur soutien à la Grèce.

    Le gouvernement estonien propose deux patrouilleurs et vingt gardes-frontières. C’est le cas également de plusieurs pays d’Europe de l’Est, qui savent ce qu’est une invasion : la Hongrie, la Pologne qui propose 100 gardes-frontières et 100 policiers, la Slovaquie et la République tchèque.

    Le Premier ministre autrichien envoie à la frontière gréco-turque plusieurs policiers, l’équivalent du RAID, un drone et un véhicule blindé. Il ne mâche pas ses mots : « Il s’agit d’une agression contre l’Union européenne et la Grèce. » Le Premier ministre hongrois Viktor Orbán se réjouit le 5 mars au sommet du V4 à Prague que l’UE adopte sa politique de migration. « Nous étions les premiers à prendre des mesures contre l’immigration musulmane. » Un député européenpolonais, Dominik Tarczynski, met en ligne une vidéo expliciteà l’attention des clandestins : « Ne venez pas à la frontière polonaise[…].Si vous avez des problèmes avec nos forces de l’ordre, c’est parce que vous essayez de transgresser les lois de notre pays. »

    Le 4 mars, le gouvernement danois propose un soutien au gouvernement grec sous la forme de surveillance aérienne. Le ministre danois des Affaires étrangères affirme que son pays n’acceptera pas une répétition de la situation de 2015.

    Le soutien politique

    Alors que les Verts allemands font pression pour l’ouverture des frontières, c’est une personnalité politique de gauche, Sahra Wagenknecht, qui juge cette position « malhonnête et facile ».

    Le Bundestag allemand vote le 4 mars contre l’accueil d’un contingent de 5 000 migrants en provenance des îles grecques.

    Le Rassemblement national lance début mars une pétition pour le contrôle de nos frontières. Le député européen Jordan Bardella, accompagné par Jérôme Rivière, se rend le 10 mars à la frontière gréco-turque menacée. Sur son fil Twitter, il témoigne : « Agressions, saccages d’église et pillages ont lieu dans la région, obligeant les habitants à s’organiser eux-mêmes pour assurer leur sécurité. Ces migrants ont un seul objectif : l’Europe de l’Ouest[…].Des élus et militaires grecs confirment que les Syriens sont ultra-minoritaires. Les migrants sont en fait Afghans, Pakistanais, Marocains, Somaliens, etc. »

    Si cette liste d’actes et de témoignages de solidarité avec le peuple grec n’est pas exhaustive, elle reflète un fort mouvement populaire européen de soutien à un pays agressé. Contrairement à 2015, la prise de conscience des enjeux d’une immigration débridée a progressé en Europe. Elle s’est manifestée dans les urnes, ce qui prouve que le vote a toute son importance. Gageons maintenant que le rapport de force engagé par le président Erdogan tourne en faveur de la Grèce. Il y va de l’avenir de l’Europe.

    #IstandwithGreece

    Paul Tormenen (Polémia, 11 mars 2020)

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  • Délinquance des mineurs étrangers : un phénomène isolé pour les médias de grand chemin...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de l'Observatoire du journalisme consacré au traitement par les médias du phénomène massif que constitue la délinquance des mineurs étrangers.

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    Délinquance des mineurs étrangers : un phénomène isolé pour les médias de grand chemin

    Les derniers chiffres du ministère de l’intérieur le montrent : la délinquance est en pleine expansion. Parmi les délinquants, les jeunes étrangers qui se prétendent mineurs sont de plus en plus nombreux. L’analyse des articles des médias consacrés à ce sujet est riche d’enseignements.

    Des faits isolés selon de nombreux médias

    Les journaux et sites d’information régionaux consacrent de nombreux articles à la délinquance des mineurs étrangers, parfois appelés « mineurs non accompagnés ». On peut parler d’un véritable phénomène de société, mais qui n’est pas décrit comme tel : en effet, aucun lien n’est donné entre les différents faits relatés. Ceci bien qu’ils aient les mêmes caractéristiques.

    Les pharmacies particulièrement visées

    Plusieurs titres de presse ou sites d’information en font état : un peu partout en France, des pharmacies sont cambriolées par des mineurs étrangers. Certains ne mentionnent pas la nationalité des délinquants, comme les cambriolages commis par des « mineurs » en Seine et Marne selon Actu.fr, à Montpellier selon France bleu, à Laon selon Le Courrier picard, etc. Actu.fr relate l’arrestation de mineurs isolés et cambrioleurs à Rambouillet et au Perray.

    Certains médias, plus rares, ne cachent pas la nationalité des jeunes délinquants. Le Courrier picard fait état en janvier de trois mineurs marocains interpellés lors du cambriolage d’une pharmacie à Chantilly. À Orange, en septembre 2019, ce sont selon Le Dauphiné des jeunes marocains qui sont interpellés alors qu’ils s’en prennent à une pharmacie. À Chalons, en décembre 2019, un jeune « d’origine étrangère » est jugé pour avoir cambriolé des pharmacies selon L’Union, etc.

    Des vols et agressions en tous genres

    Les méfaits de certains jeunes étrangers ne s’arrêtent pas là. Ce sont des vols et des agressions en tous genres que relatent les médias régionaux.

    À Nancy, des « mineurs non accompagnés » (traduire : de jeunes étrangers) commettent selon 20 Minutes le 27 janvier des vols de portables avec violence.

    À Nantes selon Ouest-France comme ailleurs, les interpellations des jeunes délinquants ne sont pas suivies d’effet.

    À Pont Sainte Maxence, le maire est obligé d’instaurer un couvre-feu pour les mineurs selon Actu.fr L’objectif est de faire cesser l’arrivée des jeunes étrangers qui viennent de région parisienne pour commettre leurs méfaits.

    En Gironde, la délinquance est en hausse et les mineurs étrangers ne sont pas en reste selon France 3. À Montpellier, les « mineurs » délinquants sont finalement majeurs selon Actu.fr.

    Le 21 février selon Le Parisien, « quinze mineurs isolés (ont été) interpellés pour plusieurs cambriolages dans les Yvelines ». Algériens ou marocains, les jeunes étrangers ont fait l’objet d’un …rappel à la loi bien qu’ils aient reconnu les faits.

    Des tentatives d’analyse circonscrites géographiquement

    Les médias qui essaient d’analyser le phénomène sont rares. Quand les tentatives d’explications existent, elles ne dépassent pas un cadre géographique restreint : la ville ou le département.

    L’Obs consacre un article à l’explosion des vols et des violences à Paris, « en grand partie le fait de mineurs ». Si les termes utilisés ne cachent pas la gravité de la situation, l’hebdomadaire de gauche bon teint s’attarde sur… « le difficile travail quotidien de la section des mineurs du parquet de Paris ». Un peu de compassion pour les victimes n’aurait pas nui…

    Le Préfet de Police de Paris évoque sur Public Sénat une « violence inquisitive, de voie publique, particulièrement significative ». Il parle sur la chaine parlementaire d’« une réelle spécificité à Paris » et se garde bien d’évoquer un phénomène national.

    Dans le département de l’Héraut, Le Midi libre mène une enquête sur la délinquance dans le département. « La problématique des mineurs délinquants est très prégnante sur la ville (Montpellier) ». Ils représentaient 41% de la population délinquante en 2019 contre 34% en 2018, nous informe le quotidien régional.

    Selon Sud-Ouest le 22 février, quatre frères « écoulaient le butin » dérobé par des jeunes étrangers à Bordeaux. « Le phénomène Mineurs Non Accompagnés empoisonne la justice et la police bordelaise depuis plus de trois ans ». Arrachages de chaines de cou ou de téléphones, cambriolages, squats : le quotidien régional nous informe qu’il ne s’agit pas de faits isolés mais bien de plusieurs centaines d’objets (téléphones, colliers, montres, etc.) qui sont volés chaque semaine.

    Si certains titres essaient de dépasser le traitement ponctuel de faits de délinquance, aucun média ne recoupe les informations éparses sur ces bandes de jeunes délinquants étrangers qui semblent opérer leurs méfaits dans une quasi impunité, au point d’en faire un phénomène de société en pleine expansion mais à bas bruit médiatique.

    La réforme de la justice pénale des mineurs

    Face à la délinquance de plus en plus précoce de jeunes, le gouvernement a entrepris une réforme de la justice pénale des mineurs. Son objectif serait selon l’Union de « juger mieux et plus vite ».

    C’en est déjà trop pour la gauche castafiore qui donne de la voix : à Caen, selon Ouest-France, des éducateurs de la Protection Judiciaire de la Jeunesse manifestent contre la réforme. La photo de la banderole de la manifestation montre une franche opposition à l’enfermement. France culture parle d’une « réforme à marche forcée ». On craint le pire. France bleu couvre une grève d’éducateurs à Carpentras tandis que L’Humanité évoque une « justice plus expéditive pour les mineurs ».

    Une fermeté en trompe l’œil pour un pédopsychiatre bien isolé

    Alors que la réforme de la justice pénale pour les mineurs est soumise au Parlement, un pédopsychiatre, Maurice Berger, estime dans une tribune parue dans Le Figaro du 23 février 2020 que celle-ci n’apportera pas les réponses nécessaires à la délinquance des mineurs. Il rappelle qu’un fait de violence gratuite a été commis toutes les 44 secondes en 2018 et que la part des mineurs dans ces violences qui peuvent causer la mort est importante. Il cite plusieurs dispositions qui ne vont pas dans le sens de la fermeté : « présomption de non discernement pour les moins de 13 ans », droit du mineur à l’accompagnement par les parents lors de l’enquête judiciaire, fin de la prison ferme pour les peines inférieures à un mois, etc. La liste est longue.

    Un remake de la loi Asile et immigration ?

    Le jeu des acteurs dans cette réforme relayé par les médias de grand chemin ressemble étrangement à celui qui a été tenu lors du débat sur la loi Asile et immigration en 2018. Un jeu médiatisé sans grand recul dans les médias.

    Censée résoudre un problème – la délinquance croissante des jeunes mineurs – grâce à une accélération des procédures, la réforme fait l’objet d’un tir de barrage de la gauche castafiore. Des syndicalistes et des militants de gauche utilisent les médias comme un porte-voix à leur opposition à tout durcissement de la loi applicables aux mineurs. Pour faire passer sa réforme, le gouvernement donne des gages à la gauche, notamment en évitant soigneusement de revenir sur une mesure essentielle : la dispense pour les mineurs d’avoir un titre de séjour, qui rend l’expulsion des mineurs étrangers délinquants très difficile voire impossible.

    Il est plus que probable que les médias continuent à l’avenir d’évoquer ponctuellement l’augmentation continue de la délinquance des jeunes étrangers, sans se poser outre mesure des questions dérangeantes. Des jeunes qui plus que jamais considéreront la France comme un pays de cocagne où un simple rappel à la loi est souvent le solde de tout compte de vols à répétition…Sans que cela provoque outre mesure une bronca médiatique.

    Observatoire du journalisme (OJIM, 2 mars 2020)

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  • Pandémie: le prix d’un monde sans limites ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Thibault Isabel cueilli sur le site de L'Inactuelle et consacré à la pandémie de coronavirus. Docteur ès lettres, rédacteur en chef pendant plusieurs années de la revue Krisis, Thibault Isabel a publié plusieurs essais ou recueils d'articles comme Le champ des possibles (La Méduse, 2005), La fin de siècle du cinéma américain (La Méduse, 2006) , Le paradoxe de la civilisation (La Méduse, 2010), Pierre-Joseph Proudhon, l'anarchie sans le désordre (Autrement, 2017) et dernièrement Manuel de sagesse païenne (Le Passeur, 2020).

     

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    Pandémie: le prix d’un monde sans limites

    Le jeudi 27 février, alors que l’Italie s’apprêtait à décréter l’interdiction de tous les rassemblements publics et la fermeture de toutes ses écoles dans plusieurs régions, les autorités transalpines incitaient encore malgré tout les ressortissants étrangers à fréquenter sans crainte leur industrie touristique. En dépit de cinq-cents cas déjà déclarés d’infection au nouveau coronavirus, Luigi Di Maio déclarait avec aplomb : « Nos enfants vont à l’école. Si nos enfants vont à l’école, alors les touristes et les entrepreneurs peuvent également venir. » On connaît la suite.

    Il faut dire que le tourisme pèse 13% du PIB italien et que l’obsession contemporaine pour la croissance s’accommode mal d’un tel manque à gagner. Quand on est un homme d’Etat responsable, on se doit de préserver coûte que coûte l’économie. A quel prix, donc ? La contamination des touristes assez naïfs pour croire ce que les gouvernants leur racontent.

    De la crise sanitaire à la crise économique.

    En France, comme partout en Europe, l’attitude est sensiblement la même. Le plan de communication du gouvernement d’Edouard Philippe vise à souffler le chaud et le froid pour satisfaire ceux qui sont effrayés par la prolifération du virus autant que ceux qui font mine de continuer à vivre normalement. Mais, sur le fond, tout a été planifié d’abord pour limiter l’impact économique de la crise sanitaire. On laisse les frontières toutes grandes ouvertes, on tente même d’interdire le droit de retrait aux employés des secteurs non vitaux, comme le tourisme, et on limite les tests de dépistage afin de ne pas provoquer de « psychose ».

    Les personnels hospitaliers ont de quoi se plaindre : plusieurs d’entre eux ont été contaminés après avoir soigné des cas de pneumonie sans précaution, parce que la consigne avait été donnée en haut-lieu de ne pas dépister les patients tant que le virus ne circulait pas sur le territoire. Pourtant, il circulait. Tout circule dans une économie mondialisée de libre-échange.

    Il n’est pas question de sous-estimer l’impact économique potentiel du coronavirus. Quand on voit l’onde de choc planétaire que provoque le moindre ralentissement des flux dans une zone circonscrite du globe, on n’ose imaginer l’effet d’une paralysie massive de la production et de la consommation à l’échelle des cinq continents, pour une durée probable de plusieurs mois. La crise économique qui nous attend fera peut-être davantage de morts que le virus lui-même.

    Une maladie des flux.

    Reste qu’il est difficile de sacrifier l’endiguement de la crise sanitaire au nom du risque de crise économique. Selon les experts, si rien n’était fait pour contrôler la pandémie, elle pourrait toucher à terme entre 30% et 50% de la population mondiale. Avec un taux de létalité évalué à 2%, il serait pour le moins cynique de comparer la situation à une simple grippe. Les beaux esprits disent que le coronavirus touche en premier lieu les personnes âgées ou fragilisées, dont l’espérance de vie résiduelle est de toute façon faible. Mais nous parlons statistiquement ici d’au moins 50 millions d’êtres humains, comportant une proportion non négligeable d’individus en parfaite santé. La majeure partie d’entre eux ne seront sauvés que parce que les Etats ne restent pas sans rien faire, et parce que la Chine a eu le courage de sacrifier son économie pour mettre une province entière à l’arrêt.

    Le coronavirus est une maladie des flux. Le siècle qui vient de s’écouler a d’ailleurs connu davantage de pandémies que n’importe quel siècle passé. La peste noire du XIVe siècle fut sans doute déjà importée d’Orient par les Mongols à l’occasion d’importants mouvements de troupes, dans un contexte de guerres coloniales contre l’Empire génois, et donc dans le cadre d’un premier mouvement de mondialisation. La grippe espagnole de 1918-1919 fut elle aussi transportée par les armées en marche à la fin du premier conflit mondial de l’histoire de l’humanité. Il n’y a plus besoin de guerres aujourd’hui pour intensifier les risques de contamination ; le commerce s’en charge très bien, y compris en temps de paix militaire.

    Ici-bas, tout a toujours un prix. Tout excès conduit à une compensation mortifère dans le sens opposé. La mondialisation des échanges et la société d’hyper-communication aboutissent donc sporadiquement à des situations de crise où les échanges doivent brutalement s’interrompre pour rétablir l’équilibre. C’est ce que nous sommes en train de vivre. Le prix à payer de la mondialisation a pour nom « pandémie ». Celle que nous connaissons ne sera pas la dernière. Quand on constate les ravages causés par la variole jusqu’au XIXe siècle (30% de taux de létalité), imagine-t-on quel cataclysme provoquerait l’apparition d’une maladie du même genre à notre époque ?

    Les dangers d’une mondialisation sans limite.

    Il est devenu moins onéreux de faire fabriquer nos médicaments en Chine plutôt qu’en France, et de voyager à l’autre bout de la planète plutôt qu’à deux cents kilomètres de chez nous. L’écosystème n’est pas fait pour soutenir une telle intensité de déplacements. Les conséquences s’en font sentir en termes de pollution atmosphérique, mais aussi en termes viraux – et même à vrai dire en termes de déséquilibres économiques, sociaux, culturels. L’humain est devenu un animal hors de contrôle, un animal parasitaire, pour la simple raison qu’il n’est plus encastré dans un milieu, mais qu’il s’affranchit de toute forme de limites. Le fantasme du progrès illimité et de la croissance folle est en train de nous conduire dans un abîme, sous l’effet d’un vaste mouvement de régulation naturelle qui tentera de compenser notre prolifération déraisonnable. La nature n’est pas toute-puissante face à la démesure humaine, mais elle a des moyens pour se défendre. Le premier coup de semonce vient de nous être envoyé.

    L’entendrons-nous ? Rien n’est moins sûr. Il est plaisant d’acheter ses médicaments à bon marché – sans se soucier des conditions de travail des Chinois – ou de participer tous les ans au carnaval de Venise. C’est une belle vie, dont nous aurons tous du mal à nous priver. Mais nos aïeux n’étaient pas malheureux pour autant. L’heure est venue de faire la part des choses entre les progrès techniques réellement utiles au bonheur de l’humanité – il y en a beaucoup – et ceux futiles dont nous pourrions nous passer.

    Vers un retour de l’ordre naturel.

    Dans ce monde de flux illimités, de communications permanentes et d’échanges généralisés, les pandémies nous obligent, l’espace de quelques mois, à vivre dans la distance, le confinement et la solitude. Nous subissons un mouvement de balancier en sens inverse, donc. Mais qui peut dire que ce n’est pas au fond notre lot quotidien ? Bien que les sociétés modernes laissent tout circuler, l’anonymat urbain n’a jamais été aussi grand. Bien que nos smartphones nous connectent avec le monde, nous ne savons plus comment s’appelle notre voisin. La pandémie ne fait que révéler l’envers des temps modernes : l’isolement. Le juste milieu implique que nous rapprenions le sens du voisinage. L’économie en circuit court, la vie citoyenne locale, l’action associative, l’enracinement familial : ces valeurs nous protègent de l’anonymat, tout en nous dissuadant de céder aux chimères d’un monde sans limites.

    De tout temps, c’est vrai, les hommes ont voyagé. Le voyage n’en était pas moins autrefois un long chemin initiatique à travers le monde, réservé aux plus curieux d’entre nous. Lorsqu’on inventa les congés payés, avant-guerre, on n’avait pas en tête de faire exploser son empreinte carbone en trajets aériens low-cost. Quelle diversité de paysages avons-nous encore à découvrir, quand nous sommes parqués dans des clubs de vacances en Egypte ou des paquebots au large de San Francisco et du Japon ?

    Nous avons voulu la mondialisation ; nous avons eu en même temps l’individualisme, le réchauffement climatique, le dumping social, la standardisation culturelle, le mercantilisme, la guerre pour les parts de marché, le terrorisme, l’élevage industriel ou la dévastation des sols surexploités – et nous avons maintenant aussi le SARS-CoV-2. Cette cure forcée de quarantaine va nous contraindre à méditer, comme des moines en ascèse, sur le monde que nous sommes en train de créer. Dans des conditions dramatiques, malheureusement. Malgré les mesures prophylactiques et les progrès de la technique médicale, nous allons perdre des proches. Certains d’entre nous ne serons plus là pour tirer le bilan, qui devrait pourtant d’ores et déjà couler de source. Tout a une logique. L’ordre naturel des choses finit par reprendre ses droits. Et il y a toujours un prix à payer.

    Thibault Isabel (L'Inactuelle, 9 mars 2020)

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