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  • L'affolement du monde...

    Les éditions Tallandier viennent de rééditer en collection de poche un essai récent de Thomas Gomart intitulé L'affolement du monde - 10 enjeux géopolitiques. L'ouvrage est très riche, équilibré et agréable à lire. Et on notera que dans son chapitre consacré à la lutte pour le contrôle des espaces, l'auteur fait largement référence à Carl Schmitt !

    Historien et directeur de l'Institut français des relations internationales, Thomas Gomart est membre des comités de rédaction de Politique étrangère, de la Revue des deux mondes et d'Etudes.

     

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    " Plus rien ne régule la bonne marche de la planète : rupture d'accords, alliances fragilisées, affaiblissement des démocraties, basculement géoéconomique vers l'Asie, menaces nationalistes et écologiques... le monde est-il devenu incontrôlable ? Avec son double regard d'historien et de spécialiste des relations internationales, Thomas Gomart souligne la mutation inédite des rapports de force ― ascension de la Chine, unilatéralisme des États-Unis, fragmentation de l'Europe, retour de la Russie ― et des sujets transversaux comme l'énergie et le climat, les transformations de la guerre, le cyber ou la pression démographique et migratoire. Avec une grande clarté, il invite les Européens à un exercice de lucidité sur un monde de moins en moins à leur image. "

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  • Délinquance des mineurs étrangers : un phénomène isolé pour les médias de grand chemin...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de l'Observatoire du journalisme consacré au traitement par les médias du phénomène massif que constitue la délinquance des mineurs étrangers.

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    Délinquance des mineurs étrangers : un phénomène isolé pour les médias de grand chemin

    Les derniers chiffres du ministère de l’intérieur le montrent : la délinquance est en pleine expansion. Parmi les délinquants, les jeunes étrangers qui se prétendent mineurs sont de plus en plus nombreux. L’analyse des articles des médias consacrés à ce sujet est riche d’enseignements.

    Des faits isolés selon de nombreux médias

    Les journaux et sites d’information régionaux consacrent de nombreux articles à la délinquance des mineurs étrangers, parfois appelés « mineurs non accompagnés ». On peut parler d’un véritable phénomène de société, mais qui n’est pas décrit comme tel : en effet, aucun lien n’est donné entre les différents faits relatés. Ceci bien qu’ils aient les mêmes caractéristiques.

    Les pharmacies particulièrement visées

    Plusieurs titres de presse ou sites d’information en font état : un peu partout en France, des pharmacies sont cambriolées par des mineurs étrangers. Certains ne mentionnent pas la nationalité des délinquants, comme les cambriolages commis par des « mineurs » en Seine et Marne selon Actu.fr, à Montpellier selon France bleu, à Laon selon Le Courrier picard, etc. Actu.fr relate l’arrestation de mineurs isolés et cambrioleurs à Rambouillet et au Perray.

    Certains médias, plus rares, ne cachent pas la nationalité des jeunes délinquants. Le Courrier picard fait état en janvier de trois mineurs marocains interpellés lors du cambriolage d’une pharmacie à Chantilly. À Orange, en septembre 2019, ce sont selon Le Dauphiné des jeunes marocains qui sont interpellés alors qu’ils s’en prennent à une pharmacie. À Chalons, en décembre 2019, un jeune « d’origine étrangère » est jugé pour avoir cambriolé des pharmacies selon L’Union, etc.

    Des vols et agressions en tous genres

    Les méfaits de certains jeunes étrangers ne s’arrêtent pas là. Ce sont des vols et des agressions en tous genres que relatent les médias régionaux.

    À Nancy, des « mineurs non accompagnés » (traduire : de jeunes étrangers) commettent selon 20 Minutes le 27 janvier des vols de portables avec violence.

    À Nantes selon Ouest-France comme ailleurs, les interpellations des jeunes délinquants ne sont pas suivies d’effet.

    À Pont Sainte Maxence, le maire est obligé d’instaurer un couvre-feu pour les mineurs selon Actu.fr L’objectif est de faire cesser l’arrivée des jeunes étrangers qui viennent de région parisienne pour commettre leurs méfaits.

    En Gironde, la délinquance est en hausse et les mineurs étrangers ne sont pas en reste selon France 3. À Montpellier, les « mineurs » délinquants sont finalement majeurs selon Actu.fr.

    Le 21 février selon Le Parisien, « quinze mineurs isolés (ont été) interpellés pour plusieurs cambriolages dans les Yvelines ». Algériens ou marocains, les jeunes étrangers ont fait l’objet d’un …rappel à la loi bien qu’ils aient reconnu les faits.

    Des tentatives d’analyse circonscrites géographiquement

    Les médias qui essaient d’analyser le phénomène sont rares. Quand les tentatives d’explications existent, elles ne dépassent pas un cadre géographique restreint : la ville ou le département.

    L’Obs consacre un article à l’explosion des vols et des violences à Paris, « en grand partie le fait de mineurs ». Si les termes utilisés ne cachent pas la gravité de la situation, l’hebdomadaire de gauche bon teint s’attarde sur… « le difficile travail quotidien de la section des mineurs du parquet de Paris ». Un peu de compassion pour les victimes n’aurait pas nui…

    Le Préfet de Police de Paris évoque sur Public Sénat une « violence inquisitive, de voie publique, particulièrement significative ». Il parle sur la chaine parlementaire d’« une réelle spécificité à Paris » et se garde bien d’évoquer un phénomène national.

    Dans le département de l’Héraut, Le Midi libre mène une enquête sur la délinquance dans le département. « La problématique des mineurs délinquants est très prégnante sur la ville (Montpellier) ». Ils représentaient 41% de la population délinquante en 2019 contre 34% en 2018, nous informe le quotidien régional.

    Selon Sud-Ouest le 22 février, quatre frères « écoulaient le butin » dérobé par des jeunes étrangers à Bordeaux. « Le phénomène Mineurs Non Accompagnés empoisonne la justice et la police bordelaise depuis plus de trois ans ». Arrachages de chaines de cou ou de téléphones, cambriolages, squats : le quotidien régional nous informe qu’il ne s’agit pas de faits isolés mais bien de plusieurs centaines d’objets (téléphones, colliers, montres, etc.) qui sont volés chaque semaine.

    Si certains titres essaient de dépasser le traitement ponctuel de faits de délinquance, aucun média ne recoupe les informations éparses sur ces bandes de jeunes délinquants étrangers qui semblent opérer leurs méfaits dans une quasi impunité, au point d’en faire un phénomène de société en pleine expansion mais à bas bruit médiatique.

    La réforme de la justice pénale des mineurs

    Face à la délinquance de plus en plus précoce de jeunes, le gouvernement a entrepris une réforme de la justice pénale des mineurs. Son objectif serait selon l’Union de « juger mieux et plus vite ».

    C’en est déjà trop pour la gauche castafiore qui donne de la voix : à Caen, selon Ouest-France, des éducateurs de la Protection Judiciaire de la Jeunesse manifestent contre la réforme. La photo de la banderole de la manifestation montre une franche opposition à l’enfermement. France culture parle d’une « réforme à marche forcée ». On craint le pire. France bleu couvre une grève d’éducateurs à Carpentras tandis que L’Humanité évoque une « justice plus expéditive pour les mineurs ».

    Une fermeté en trompe l’œil pour un pédopsychiatre bien isolé

    Alors que la réforme de la justice pénale pour les mineurs est soumise au Parlement, un pédopsychiatre, Maurice Berger, estime dans une tribune parue dans Le Figaro du 23 février 2020 que celle-ci n’apportera pas les réponses nécessaires à la délinquance des mineurs. Il rappelle qu’un fait de violence gratuite a été commis toutes les 44 secondes en 2018 et que la part des mineurs dans ces violences qui peuvent causer la mort est importante. Il cite plusieurs dispositions qui ne vont pas dans le sens de la fermeté : « présomption de non discernement pour les moins de 13 ans », droit du mineur à l’accompagnement par les parents lors de l’enquête judiciaire, fin de la prison ferme pour les peines inférieures à un mois, etc. La liste est longue.

    Un remake de la loi Asile et immigration ?

    Le jeu des acteurs dans cette réforme relayé par les médias de grand chemin ressemble étrangement à celui qui a été tenu lors du débat sur la loi Asile et immigration en 2018. Un jeu médiatisé sans grand recul dans les médias.

    Censée résoudre un problème – la délinquance croissante des jeunes mineurs – grâce à une accélération des procédures, la réforme fait l’objet d’un tir de barrage de la gauche castafiore. Des syndicalistes et des militants de gauche utilisent les médias comme un porte-voix à leur opposition à tout durcissement de la loi applicables aux mineurs. Pour faire passer sa réforme, le gouvernement donne des gages à la gauche, notamment en évitant soigneusement de revenir sur une mesure essentielle : la dispense pour les mineurs d’avoir un titre de séjour, qui rend l’expulsion des mineurs étrangers délinquants très difficile voire impossible.

    Il est plus que probable que les médias continuent à l’avenir d’évoquer ponctuellement l’augmentation continue de la délinquance des jeunes étrangers, sans se poser outre mesure des questions dérangeantes. Des jeunes qui plus que jamais considéreront la France comme un pays de cocagne où un simple rappel à la loi est souvent le solde de tout compte de vols à répétition…Sans que cela provoque outre mesure une bronca médiatique.

    Observatoire du journalisme (OJIM, 2 mars 2020)

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  • Le Capitán Alonso de Contreras...

    Les éditions Viviane Hamy viennent de rééditer les Mémoires du Capitán Alonso de Contreras, avec une préface d'Ernst Jünger. Alonso de Contreras (1582-1633) a mené la vie aventureuse et guerrière d'un capitaine de l'Ordre de Malte au début du XVIIe siècle.

     

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    " « Je naquis en la noble ville de Madrid le 6 janvier 1582. Je fus baptisé en la paroisse de San Miguel ; mes parrain et marraine furent Alonso de Roa et Maria de Roa, frère et soeur de ma mère. Mes parents se nommaient Gabriel Guillén et Juana de Roa et Contreras. Je voulus prendre le nom de ma mère lorsque j'allai servir le Roi, étant enfant, et quand je m'aperçus de l'erreur que j'avais commise, je ne la pus réparer parce que dans mes états de services il y avait "Contreras". J'ai vécu jusques aujourd'hui et suis connu sous ce nom, et nonobstant qu'au baptême on m'ait appelé Alonso de Guillén, moi, je m'appelle Alonso de Contreras. » Les Mémoires du capitan Alonso de Contreras, découverts à la fin du XIXe, sont un splendide et captivant récit d'aventures, vécues sur terre et sur mer par un capitaine de l'ordre de Malte au début du XVIIe siècle. Il nous raconte la guerre des galères en Méditerranée, les abordages entre les galions espagnols et les corsaires anglais, sans oublier les expéditions sous le soleil des côtes barbaresques. Alonso de Contreras a séduit, de son vivant, Lope de Vega qui lui dédia sa pièce Le Roi sans royaume.

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  • France : le retour de la guerre idéologique ?...

    Vous pouvez ci-dessous découvrir un entretien avec François-Bernard Huyghe, réalisé par Edouard Chanot pour son émission Parade - Riposte et diffusé le 9 mars 2020 sur Sputnik,  à l'occasion de la sortie de son essai intitulé L'art de la guerre idéologique. Spécialiste de la stratégie et de la guerre de l'information, François-Bernard Huyghe enseigne à la Sorbonne et est l'auteur de nombreux essais sur le sujet, dont, récemment, La désinformation - Les armes du faux (Armand Colin, 2015), Fake news - La grande peur (VA Press, 2018) et, avec Xavier Desmaison et Damien Liccia, Dans la tête des Gilets jaunes (VA Press, 2019).

     

                                  

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  • Enquête sur le lobby LGBT...

    Le numéro 29 du mensuel conservateur L'Incorrect est arrivé en kiosque. On peut découvrir à l'intérieur, notamment, un dossier consacré au lobby LGBT et à ses pratiques d'intimidation, des entretiens avec, notamment, l'avocat du grand banditisme, Maître Pandelon, la présidente de Fratelli d'Italia, Giorgia Meloni, le romancier Benoît Duteurtre et l'auteur d'une biographie d'Alphonse Boudard, Dominique Chabrol, ainsi que les rubriques habituelles "L'époque", "Politique", "Monde" "Essais", "Culture" et "La fabrique du fabo"...

    Le sommaire complet est disponible ici.

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  • Pandémie: le prix d’un monde sans limites ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Thibault Isabel cueilli sur le site de L'Inactuelle et consacré à la pandémie de coronavirus. Docteur ès lettres, rédacteur en chef pendant plusieurs années de la revue Krisis, Thibault Isabel a publié plusieurs essais ou recueils d'articles comme Le champ des possibles (La Méduse, 2005), La fin de siècle du cinéma américain (La Méduse, 2006) , Le paradoxe de la civilisation (La Méduse, 2010), Pierre-Joseph Proudhon, l'anarchie sans le désordre (Autrement, 2017) et dernièrement Manuel de sagesse païenne (Le Passeur, 2020).

     

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    Pandémie: le prix d’un monde sans limites

    Le jeudi 27 février, alors que l’Italie s’apprêtait à décréter l’interdiction de tous les rassemblements publics et la fermeture de toutes ses écoles dans plusieurs régions, les autorités transalpines incitaient encore malgré tout les ressortissants étrangers à fréquenter sans crainte leur industrie touristique. En dépit de cinq-cents cas déjà déclarés d’infection au nouveau coronavirus, Luigi Di Maio déclarait avec aplomb : « Nos enfants vont à l’école. Si nos enfants vont à l’école, alors les touristes et les entrepreneurs peuvent également venir. » On connaît la suite.

    Il faut dire que le tourisme pèse 13% du PIB italien et que l’obsession contemporaine pour la croissance s’accommode mal d’un tel manque à gagner. Quand on est un homme d’Etat responsable, on se doit de préserver coûte que coûte l’économie. A quel prix, donc ? La contamination des touristes assez naïfs pour croire ce que les gouvernants leur racontent.

    De la crise sanitaire à la crise économique.

    En France, comme partout en Europe, l’attitude est sensiblement la même. Le plan de communication du gouvernement d’Edouard Philippe vise à souffler le chaud et le froid pour satisfaire ceux qui sont effrayés par la prolifération du virus autant que ceux qui font mine de continuer à vivre normalement. Mais, sur le fond, tout a été planifié d’abord pour limiter l’impact économique de la crise sanitaire. On laisse les frontières toutes grandes ouvertes, on tente même d’interdire le droit de retrait aux employés des secteurs non vitaux, comme le tourisme, et on limite les tests de dépistage afin de ne pas provoquer de « psychose ».

    Les personnels hospitaliers ont de quoi se plaindre : plusieurs d’entre eux ont été contaminés après avoir soigné des cas de pneumonie sans précaution, parce que la consigne avait été donnée en haut-lieu de ne pas dépister les patients tant que le virus ne circulait pas sur le territoire. Pourtant, il circulait. Tout circule dans une économie mondialisée de libre-échange.

    Il n’est pas question de sous-estimer l’impact économique potentiel du coronavirus. Quand on voit l’onde de choc planétaire que provoque le moindre ralentissement des flux dans une zone circonscrite du globe, on n’ose imaginer l’effet d’une paralysie massive de la production et de la consommation à l’échelle des cinq continents, pour une durée probable de plusieurs mois. La crise économique qui nous attend fera peut-être davantage de morts que le virus lui-même.

    Une maladie des flux.

    Reste qu’il est difficile de sacrifier l’endiguement de la crise sanitaire au nom du risque de crise économique. Selon les experts, si rien n’était fait pour contrôler la pandémie, elle pourrait toucher à terme entre 30% et 50% de la population mondiale. Avec un taux de létalité évalué à 2%, il serait pour le moins cynique de comparer la situation à une simple grippe. Les beaux esprits disent que le coronavirus touche en premier lieu les personnes âgées ou fragilisées, dont l’espérance de vie résiduelle est de toute façon faible. Mais nous parlons statistiquement ici d’au moins 50 millions d’êtres humains, comportant une proportion non négligeable d’individus en parfaite santé. La majeure partie d’entre eux ne seront sauvés que parce que les Etats ne restent pas sans rien faire, et parce que la Chine a eu le courage de sacrifier son économie pour mettre une province entière à l’arrêt.

    Le coronavirus est une maladie des flux. Le siècle qui vient de s’écouler a d’ailleurs connu davantage de pandémies que n’importe quel siècle passé. La peste noire du XIVe siècle fut sans doute déjà importée d’Orient par les Mongols à l’occasion d’importants mouvements de troupes, dans un contexte de guerres coloniales contre l’Empire génois, et donc dans le cadre d’un premier mouvement de mondialisation. La grippe espagnole de 1918-1919 fut elle aussi transportée par les armées en marche à la fin du premier conflit mondial de l’histoire de l’humanité. Il n’y a plus besoin de guerres aujourd’hui pour intensifier les risques de contamination ; le commerce s’en charge très bien, y compris en temps de paix militaire.

    Ici-bas, tout a toujours un prix. Tout excès conduit à une compensation mortifère dans le sens opposé. La mondialisation des échanges et la société d’hyper-communication aboutissent donc sporadiquement à des situations de crise où les échanges doivent brutalement s’interrompre pour rétablir l’équilibre. C’est ce que nous sommes en train de vivre. Le prix à payer de la mondialisation a pour nom « pandémie ». Celle que nous connaissons ne sera pas la dernière. Quand on constate les ravages causés par la variole jusqu’au XIXe siècle (30% de taux de létalité), imagine-t-on quel cataclysme provoquerait l’apparition d’une maladie du même genre à notre époque ?

    Les dangers d’une mondialisation sans limite.

    Il est devenu moins onéreux de faire fabriquer nos médicaments en Chine plutôt qu’en France, et de voyager à l’autre bout de la planète plutôt qu’à deux cents kilomètres de chez nous. L’écosystème n’est pas fait pour soutenir une telle intensité de déplacements. Les conséquences s’en font sentir en termes de pollution atmosphérique, mais aussi en termes viraux – et même à vrai dire en termes de déséquilibres économiques, sociaux, culturels. L’humain est devenu un animal hors de contrôle, un animal parasitaire, pour la simple raison qu’il n’est plus encastré dans un milieu, mais qu’il s’affranchit de toute forme de limites. Le fantasme du progrès illimité et de la croissance folle est en train de nous conduire dans un abîme, sous l’effet d’un vaste mouvement de régulation naturelle qui tentera de compenser notre prolifération déraisonnable. La nature n’est pas toute-puissante face à la démesure humaine, mais elle a des moyens pour se défendre. Le premier coup de semonce vient de nous être envoyé.

    L’entendrons-nous ? Rien n’est moins sûr. Il est plaisant d’acheter ses médicaments à bon marché – sans se soucier des conditions de travail des Chinois – ou de participer tous les ans au carnaval de Venise. C’est une belle vie, dont nous aurons tous du mal à nous priver. Mais nos aïeux n’étaient pas malheureux pour autant. L’heure est venue de faire la part des choses entre les progrès techniques réellement utiles au bonheur de l’humanité – il y en a beaucoup – et ceux futiles dont nous pourrions nous passer.

    Vers un retour de l’ordre naturel.

    Dans ce monde de flux illimités, de communications permanentes et d’échanges généralisés, les pandémies nous obligent, l’espace de quelques mois, à vivre dans la distance, le confinement et la solitude. Nous subissons un mouvement de balancier en sens inverse, donc. Mais qui peut dire que ce n’est pas au fond notre lot quotidien ? Bien que les sociétés modernes laissent tout circuler, l’anonymat urbain n’a jamais été aussi grand. Bien que nos smartphones nous connectent avec le monde, nous ne savons plus comment s’appelle notre voisin. La pandémie ne fait que révéler l’envers des temps modernes : l’isolement. Le juste milieu implique que nous rapprenions le sens du voisinage. L’économie en circuit court, la vie citoyenne locale, l’action associative, l’enracinement familial : ces valeurs nous protègent de l’anonymat, tout en nous dissuadant de céder aux chimères d’un monde sans limites.

    De tout temps, c’est vrai, les hommes ont voyagé. Le voyage n’en était pas moins autrefois un long chemin initiatique à travers le monde, réservé aux plus curieux d’entre nous. Lorsqu’on inventa les congés payés, avant-guerre, on n’avait pas en tête de faire exploser son empreinte carbone en trajets aériens low-cost. Quelle diversité de paysages avons-nous encore à découvrir, quand nous sommes parqués dans des clubs de vacances en Egypte ou des paquebots au large de San Francisco et du Japon ?

    Nous avons voulu la mondialisation ; nous avons eu en même temps l’individualisme, le réchauffement climatique, le dumping social, la standardisation culturelle, le mercantilisme, la guerre pour les parts de marché, le terrorisme, l’élevage industriel ou la dévastation des sols surexploités – et nous avons maintenant aussi le SARS-CoV-2. Cette cure forcée de quarantaine va nous contraindre à méditer, comme des moines en ascèse, sur le monde que nous sommes en train de créer. Dans des conditions dramatiques, malheureusement. Malgré les mesures prophylactiques et les progrès de la technique médicale, nous allons perdre des proches. Certains d’entre nous ne serons plus là pour tirer le bilan, qui devrait pourtant d’ores et déjà couler de source. Tout a une logique. L’ordre naturel des choses finit par reprendre ses droits. Et il y a toujours un prix à payer.

    Thibault Isabel (L'Inactuelle, 9 mars 2020)

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