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  • Et si demain nous étions coupés du monde ?...

    Les éditions Flammarion viennent de publier un roman de Bernard Quiriny intitulé Le village évanoui. Professeur de droit public, Bernard Quiriny écrit là son deuxième roman, mais a également à son actif trois recueil de nouvelles, dont les savoureux Contes carnivores (Seuil, 2008), hantés par Gould son personnage fétiche...  Nous reproduisons l'entretien qu'il a donné au Figaro à l'occasion de la parution de ce roman.

     

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    Bernard Quiriny: «Et si demain  nous étions coupés du monde?»

    LE FIGARO. - Comment avez-vous eu l'idée d'imaginer ce que deviendrait  un village français contemporain soudain coupé du monde?

    Bernard Quiriny. - J'avais envie de poser des questions sur notre place dans le grand capharnaüm où nous vivons actuellement et sur ce qui se passera quand nous en serons coupés, ce qui finira forcément par arriver. Il y a cent ans, nous vivions dans un environnement qui allait jusqu'aux bourgs voisins ; aujourd'hui, il s'est élargi à la planète. Nous sommes distraits en permanence de notre vie par des événements lointains. Et nous dépendons de la terre entière. Cela m'amusait de montrer qu'en cas de crise qui nous couperait du monde, les valeurs seraient renversées: l'intellectuel serait démonétisé, l'informaticien aussi, tandis que la cote des paysans et des savoir-faire pratiques remonterait en flèche. Par ailleurs, nous vivons dans un pays centralisé où tout est organisé par l'État. Face à l'obligation de se prendre en main collectivement, comme mes villageois, comment réagirions-nous?

    Pourquoi avez-vous choisi de faire cette expérience imaginaire  dans un village et pas dans un quartier de Paris, par exemple?

    Dans un arrondissement comme le VIe, où nous sommes, les protagonistes auraient tenu deux semaines, après ils se seraient tous entretués faute de vivres, puisqu'on ne peut pas manger des chemises Armani. Le roman aurait donc tourné court. Cette situation d'autarcie ne pouvait être viable que dans un village, avec des ressources et des terres cultivables. Et puis j'avais envie d'un roman à la Clochemerle…

    Au fond, vos personnages  se retrouvent en l'espace d'une nuit dans une configuration féodale?

    Oui, à ceci près que si les conditions spatiales redeviennent féodales, les mœurs, elles, sont d'aujourd'hui. Ce qui crée des frictions… Mais c'est vrai, et je ne l'avais pas prémédité, qu'au bout d'un temps, un paysan plus volontaire que les autres crée une sorte de seigneurie où ceux qui le veulent peuvent venir travailler et vivre, tandis qu'une poignée de jeunes gens crée un monastère. Si le prix du baril de pétrole flambait et que l'énergie vînt à manquer - finis les avions et les voitures -, nous pourrions en revenir à cette géographie quasi féodale. Que se passerait-il?

    Vous confrontez deux figures d'hommes politiques.

    En quelque sorte. Il fallait un trouble-fête pour faire rebondir l'histoire: j'ai donc imaginé ce paysan qui fait sécession pour empêcher la municipalité de réquisitionner ses stocks. Face à lui, le maire, qui est un brave gestionnaire. Dans un premier temps, les habitants se satisfont de cet édile qui gère prudemment la crise et fait en sorte que ses administrés ne meurent pas de faim. Mais à mesure que le temps passe et qu'ils perdent l'espoir d'être un jour reconnectés au monde, ils ont besoin d'un chef plus charismatique, qui leur donne une perspective. La gestion à la corrézienne ne suffit plus, il leur faut l'appel de Londres. On voit aussi que, selon leur caractère, certains préfèrent le côté rassurant du gestionnaire, et d'autres, l'homme qui prend des risques mais donne un élan. Je n'aimerais pas trop vivre une telle crise parce que j'aime la stabilité. La moindre panne de courant me panique. Mais si ça arrivait, je serais curieux de voir comment les politiques réagiraient.

    Vous n'êtes pas tendre avec l'homme de gauche qui propose de tout mettre en commun…

    C'est un idéologue. C'est amusant de mettre en scène des imbéciles. Je voulais montrer aussi les différentes options en cas de pénurie. En réalité, ceux qui sont communisants dans ces moments-là sont d'abord ceux qui ont faim.

    Lorsqu'il accuse le paysan  qui a fait sécession d'être sectaire, vous écrivez qu'il projette  sur l'autre sa propre intolérance.

    Rien n'est plus intolérant qu'un ­apôtre de la tolérance. Le réel finit toujours par mettre à mal ses bons sentiments. Il prône l'indulgence universelle, puis, le jour où on lui vole son portefeuille, il réclame le ­retour de la guillotine.

    Vous décrivez avec une certaine ironie le regain de foi des habitants.

    Face à un événement qui nous dépasse, il est naturel de se poser des questions spirituelles, auxquelles nous réfléchissions jadis le dimanche, avant de préférer faire nos courses ce jour-là. Un choc peut provoquer une conversion. Cela dit, aller à la messe pour des raisons utilitaires, comme les villageois du roman, ce n'est pas en­core une conversion.

    Vous semblez néanmoins  éprouver une certaine sympathie pour votre prêtre.

    J'aime bien les personnages de curés.

    Au début du roman, on a le sentiment que le retour à un espace à taille humaine vous stimule et vous réjouit: les habitants montrent qu'ils ont des ressources, ils s'entraident. Puis l'hiver arrive et ça dérape.  Vous avez une vision pessimiste  de la nature humaine?

    Réaliste, plutôt: ils ont fait ce qu'ils ont pu. Il est inutile d'en demander trop à l'homme. Il est capable de réalisations grandioses, mais, face à la nature, et a fortiori au surnaturel, il reste un vermisseau. Alors oui, on peut voir ça comme une satire de l'orgueil, de l'homme qui se croit capable de tout et qui se veut souverain.

    Au fond, vos villageois baissent  les bras quand ils n'espèrent plus rien?

    Oui. Et je ne leur jette pas la pierre. Après la stupeur initiale et les efforts déments pour s'adapter, ils prennent la mesure de leur petitesse. Que la planète soit grande ou minuscule, le fond de l'homme reste le même.

    Bernard Quiriny (Le Figaro, 13 février 2014)

     

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  • L'école ne fabrique plus des hommes libres, mais des incultes !...

    Nous reproduisons ci-dessous un entretien avec Natacha Polony, cueilli dans le Figaro et consacré à la crise de l'école. Journaliste et agrégée de lettres modernes, Natacha Polony est l'auteur d'un essai critique sur la politique scolaire, Le pire est de plus en plus sûr (Mille et une nuits, 2011).

     

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    Natacha Polony : «L'école ne fabrique plus des hommes libres, mais des incultes !»

    Polémique autour de la théorie du genre, dérives communautaires, résultat catastrophique au classement Pisa, l'école Française est en crise. Dans votre dernière chronique pour le Figaro, vous écrivez, «l'école n'instruit plus, n'éduque plus, elle rééduque». Qu'entendez-vous par là?

    Natacha Polony - Le vieux débat entre instruction et éducation est complexe. Pour les tenants de l'instruction, dont je fais partie, l'école doit transmettre des savoirs universels. C'était le projet de Condorcet qui est le premier à avoir pensé l'école de la République à travers ses cinq mémoires sur l'instruction publique. A l'époque, on parlait bien d'instruction et non d'éducation, cette dernière revenant aux familles. Certes, l'école transmettait aussi des valeurs, mais celles-ci passaient par l'histoire, la littérature, les textes. Et c'est en cela qu'elles étaient émancipatrices puisqu'elles étaient le fruit d'un savoir. Au cours de la seconde moitié du XXe siècle cet équilibre a été bouleversé. Les savoirs ont peu à peu été abandonnés au profit de ce que les «pédagogistes» appellent le «savoir être». Dans le socle commun de connaissances et de compétences définit par l'Education nationale, les grands textes officiels du savoir sont mis sur le même plan que certaines «compétences» qui relèvent de l'éducation des familles tel que «le savoir vivre ensemble» ou «le savoir respecter autrui». La polémique autour de la théorie du genre, bien qu'elle ait été instrumentalisée par certains extrémistes, illustre la propension de l'école à vouloir concurrencer la vision du monde transmise aux enfants par leurs parents. Il me paraît plus urgent d'apprendre aux élèves à lire, écrire et compter. En tant qu'héritier des Lumières, Condorcet misait sur l'intelligence pour élever les esprits. C'est par là que passe le combat pour l'émancipation et non par un vague catéchisme moralisateur.

    La focalisation de l'école sur les questions de société n'est-elle pas justement un moyen de masquer son échec sur l'apprentissage des savoirs fondamentaux?

    Certainement, mais à l'inverse la focalisation sur les questions de société est aussi l'une des causes de la crise actuelle de l'école. En effet, un collégien de troisième d'aujourd'hui cumule deux ans de retard de cours de Français par rapport à un élève des années 1970. La volonté de l'école de tout faire, l'hygiène, l'antiracisme, la sécurité routière, l'éloigne de ses missions originelles. J'ai noté le cas concret d'une classe qui a fait appel à 11 intervenants extérieurs en une semaine. Dans ces conditions, comment dégager du temps pour apprendre aux élèves à lire? Il faut effectuer des choix. Cette focalisation sur les questions de société est aussi une manière de tromper les élèves sur leur niveau réel. Pour ne pas faire de sélection, l'école nivelle par le bas en sacrifiant les savoirs fondamentaux au profit de choix pédagogiques démagogiques et accessoires.

    Hormis cette dérive sociétale, quelles sont les causes profondes de cette faillite de l'école de la République?

    Il y a deux problèmes qui se conjuguent. Le premier dépend de l'école elle-même. Depuis les années 70, les pédagogies constructivistes, d'après lesquelles c'est l'enfant qui construit lui-même son savoir, ont pris le pouvoir dans l'enseignement. Par exemple en ce qui concerne l'apprentissage de la lecture, les neurosciences prouvent que la méthode syllabique est plus efficace que les méthodes mixtes ou globales. C'est pourtant ces dernières qui sont privilégiées par la majorité des enseignants. Pour lutter contre l'illettrisme, il faut revenir d'urgence aux méthodes classiques et arrêter de caresser les élèves dans le sens du poil.

    Le second problème est le fruit de la société. Les parents qui ont une vision consumériste de l'école se déchargent de leurs responsabilités. Gavés de télévision, les enfants ne sont plus habitués à contrôler leurs pulsions et à obéir. Ils sont donc plus difficiles à gérer pour les professeurs. Comme l'explique Marcel Gauchet, l'évolution de l'individualisme contemporain rend très difficile la transmission. L'école est confrontée à ce délitement du lien républicain.

    Avec le rapport puis la feuille de route sur l'intégration, la gauche a relancé le débat sur l'interdiction du voile et plus largement sur le multiculturalisme à l'école. Le risque n'est-il pas de faire de cette dernière l'otage de tous les communautarismes?

    La problématique du voile à l'école remonte à 1989 lorsque Lionel Jospin, alors ministre de l'éducation nationale, saisit le Conseil d'Etat après l'exclusion à Creil de deux collégiennes portant le tchador, puis publie une circulaire statuant que les enseignants ont la responsabilité d'accepter ou de refuser le voile en classe, au cas par cas. Or il existait déjà une circulaire, la circulaire Jean Zay du 15 mai 1937 qui rappelait la laïcité de l'enseignement public et demandait aux chefs d'établissements de n'admettre aucune forme de prosélytisme dans les écoles. Il y a donc eu carence de l'État. Le rôle des pouvoirs publics était d'affirmer la validité de cette circulaire et de faire respecter l'esprit et la lettre de la loi de 1905. Cela nous aurait évité de perdre un temps considérable et d'en passer par une nouvelle loi sur la laïcité en 2004. Venir réveiller cette question aujourd'hui est une bêtise effarante qui montre qu'une partie de la gauche a encore la tête farcie d'idées délirantes! Cette gauche-là a renoncé au projet d'intégration allant jusqu'à nier la préexistence du pays d'accueil, à nier son identité. Il n'y a plus d'hôte, plus d'accueilli. Or, une nation ne peut se perpétuer que lorsqu'elle transmet son héritage. Nous avons cessé de transmettre, pas seulement aux étrangers, à tous nos enfants.

    Dans une interview accordé à Libération, Vincent Peillon en appelle pourtant à la défense de l'école républicaine… Qu'en dites-vous? Cela va-t-il dans le bon sens?

    Vincent Peillon se veut un ministre philosophe et connaisseur de l'histoire de l'école. Mais il se paie de mots et se réfugie derrière les valeurs et les principes pour mieux pratiquer l'ambiguïté. Les grandes déclarations sont pour lui un moyen d'éluder les vraies questions qui sont la refonte du système des mutations, pour que les jeunes professeurs ne soient plus parachutés dans les classes les plus difficiles, et celle des méthodes d'apprentissage. Comme ses prédécesseurs, il préfère se concentrer sur des questions annexes et dérisoires: les rythmes scolaires, les 60 000 postes supplémentaires ou encore la théorie du genre. Pendant ce temps-là, l'école est incapable d'apprendre aux élèves à lire et à écrire. Elle ne fabrique plus des citoyens, plus des hommes libres, mais des incultes qui seront dépendants des discours les plus idiots! Si 80 % d'une classe d'âge va jusqu'au baccalauréat aujourd'hui, l'école est pourtant plus inégalitaire que jamais. Les statistiques sont terribles. Dans les années 60, 14 % des élèves des milieux défavorisés accédaient aux grandes écoles. Ils ne sont plus que 6 % aujourd'hui.

    Natacha Polony (Le Figaro, 14 février 2014)

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  • Le procès d'un talent fou...

    Le douzième numéro de la revue trimestrielle Spécial Céline, publiée par les éditions Lafont Presse, est disponible en kiosque ou sur les sites de vente de presse. Consacrée à l'auteur du Voyage au bout de la nuit, cette revue est réalisée avec le concours d'Eric Mazet.

     

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    Au sommaire :

    Polémique
    Céline... anar ou facho , par Éric Mazet


    Analyse
    Voyage aux boues de la nuit - De l'angélus de Ferdinand à la terre de Bardamu, par Serge Kanony


    Retrospective
    Après l'orage du Goncourt, essai de chronologie des faits et des idées, par Eric Mazet


    Document
    Quand Denoël raconte Céline, par Henri Thyssens

     

    Polémique
    Qui veut la peau de Céline ?, par Marc Alpozzo

    Analyse
    Le silence et le cri, ou les points de suspension dans l’œuvre de Céline, par Agnès Hafez-Ergaut

    Correspondance
    La question du statut des lettres publiques de Céline, par Sonia Anton

     
    Fiction
    « Fallait-il fusiller Céline » (2ème partie) , par Jacques Milliez

     

     

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  • Comment les USA vont continuer de dépecer l’Europe…

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'Alain de Benoist, cueilli sur Boulevard Voltaire et consacré à la question du Grand marché transatlantique (GMT)...

     

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    GMT : comment les USA vont continuer de dépecer l’Europe…

    Alors que François Hollande vient tout juste d’annoncer, depuis les États-Unis, une accélération des négociations concernant le Grand marché transatlantique (GMT), Alain de Benoist revient pour Boulevard Voltaire sur les conséquences dramatiques d’un tel Traité…

    Le GMT, gigantesque zone de libre-échange entre l’Europe et les États-Unis, est le grand projet du moment. Mais les médias n’en parlent que fort peu. Pourquoi ?

    Parce que l’opinion est tenue à l’écart, et que les négociations se déroulent à huis-clos. C’est pourtant une affaire énorme. Il s’agit en effet de mettre en place, en procédant à une déréglementation généralisée, une immense zone de libre-échange, correspondant à un marché de plus de 800 millions de consommateurs, à la moitié du PIB mondial et à 40 % des échanges mondiaux. Le projet porte le nom de « Partenariat transatlantique de commerce et d’investissements ». S’ajoutant au « Partenariat transpacifique » également lancé en 2011 par les États-Unis, il vise à créer la plus grande zone de libre-échange du monde grâce à une vaste union économique et commerciale préludant à une « nouvelle gouvernance » commune aux deux continents.

    En créant une sorte d’OTAN économique, l’objectif des Américains est d’enlever aux autres nations la maîtrise de leurs échanges commerciaux au bénéfice de multinationales largement contrôlées par leurs élites financières. Parallèlement, ils veulent contenir la montée en puissance de la Chine, aujourd’hui devenue la première puissance exportatrice mondiale. La création d’un grand marché transatlantique leur offrirait un partenaire stratégique susceptible de faire tomber les dernières places fortes industrielles européennes. Elle permettrait de démanteler l’Union européenne au profit d’une union économique intercontinentale, c’est-à-dire d’arrimer définitivement l’Europe à un grand ensemble « océanique » la coupant de sa partie orientale et de tout lien avec la Russie.

    Ces négociations se font à haut niveau, sans que les gouvernements concernés aient leur mot à dire. Nouvelle défaite du personnel politique ?

    La « libéralisation » totale des échanges commerciaux est un vieil objectif des milieux financiers et libéraux. Le projet de grand marché transatlantique a discrètement mûri pendant plus de vingt ans dans les coulisses du pouvoir, tant à Washington qu’à Bruxelles. Les premières négociations officielles se sont ouvertes le 8 juillet 2013. Les deuxième et troisième rounds de discussion ont eu lieu en novembre et décembre derniers. Une nouvelle réunion est prévue à Bruxelles en mars prochain. Les partenaires espèrent parvenir à un accord d’ici 2015. Les gouvernements européens ne sont pas partie prenante aux discussions, qui sont exclusivement menées par les institutions européennes. Les multinationales y sont en revanche étroitement associées.

    Sachant qu’à l’heure actuelle, quelque 2,7 milliards de biens et de services s’échangent déjà tous les jours entre l’Europe et les États-Unis, la suppression des derniers droits de douane va-t-elle vraiment changer quelque chose ?

    La suppression des droits de douane n’aura pas d’effets macro-économiques sérieux, sauf dans le domaine du textile et le secteur agricole. Beaucoup plus importante est l’élimination programmée de ce qu’on appelle les « barrières non tarifaires » (BNT), c’est-à-dire l’ensemble des règles que les négociateurs veulent faire disparaître parce qu’elles constituent autant « d’entraves à la liberté du commerce » : normes de production sociales, salariales, environnementales, sanitaires, financières, économiques, politiques, etc. L’objectif étant de s’aligner sur le « plus haut niveau de libéralisation existant », « l’harmonisation » se fera par l’alignement des normes européennes sur les normes américaines.

    Dans le domaine agricole, par exemple, la suppression des BNT devrait entraîner l’arrivée massive sur le marché européen des produits à bas coûts de l’agrobusiness américain : bœuf aux hormones, carcasses de viande aspergées à l’acide lactique, volailles lavées à la chlorine, OGM (organismes génétiquement modifiés), animaux nourris avec des farines animales, produits comportant des pesticides dont l’utilisation est aujourd’hui interdite, additifs toxiques, etc. En matière environnementale, la réglementation encadrant l’industrie agro-alimentaire serait démantelée. En matière sociale, ce sont toutes les protections liées au droit du travail qui pourraient être remises en cause. Les marchés publics seront ouverts « à tous les niveaux », etc.

    Il y a plus grave encore. L’un des dossiers les plus explosifs de la négociation concerne la mise en place d’un mécanisme d’« arbitrage des différends » entre États et investisseurs privés. Ce mécanisme dit de « protection des investissements » doit permettre aux entreprises multinationales et aux sociétés privées de traîner devant un tribunal ad hoc les États ou les collectivités territoriales qui feraient évoluer leur législation dans un sens jugé nuisible à leurs intérêts ou de nature à restreindre leurs bénéfices, c’est-à-dire chaque fois que leurs politiques d’investissement seraient mises en causes par les politiques publiques, afin d’obtenir des dommages et intérêts. Le différend serait arbitré de façon discrétionnaire par des juges ou des experts privés, en dehors des juridictions publiques nationales ou régionales. Le montant des dommages et intérêts serait potentiellement illimité, et le jugement rendu ne serait susceptible d’aucun appel. Un mécanisme de ce type a déjà été intégré à l’accord commercial que l’Europe a récemment négocié avec le Canada.

    Alain de Benoist, propos recueillis par Nicolas Gauthier (Boulevard Voltaire, 13 février 2013)

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  • Tour d'horizon... (62)

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    Au sommaire cette semaine :

    - sur le site du Point, journal qui abrite le bloc-note de BHL, Armin Arefi produit un article embarassé à propos du rapport établi par le Massachusets Institute of Technology sur l'utilisation du gaz sarin dans la banlieue de Damas...

    Attaque chimique en Syrie : le rapport qui dérange

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    - sur le site de Causeur, Laurent Cantamessi rappelle les lourdes responsabilités de l'Union européenne dans la dégradation de la situation en Ukraine...

    Ukraine : Poutine : un coupable si idéal...

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  • Dérapages européens...

    Dans cette excellente chronique, mise en ligne sur Realpolitik.tv,  Hervé Juvin s'inquiète du mépris des eurocrates vis-à-vis des choix démocratiques des peuples qui s'est vu à l'occasion du référendum suisse sur l'immigration mais également dans la décision prise d'autoriser la culture des OGM.

     


    Dérapages européens, par Hervé Juvin par realpolitiktv

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