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  • L’extrême centre ? Un danger totalitaire...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Jean-Yves le Gallou cueilli sur Polémia et consacré à l'extrême-centre.

    Ancien haut-fonctionnaire, Michel Geoffroy a publié le Dictionnaire de Novlangue (Via Romana, 2015), en collaboration avec Jean-Yves Le Gallou, et deux essais, La Superclasse mondiale contre les Peuples (Via Romana, 2018), La nouvelle guerre des mondes (Via Romana, 2020), Immigration de masse - L'assimilation impossible (La Nouvelle Librairie, 2021), Le crépuscule des Lumières (Via Romana, 2021)  et dernièrement Bienvenue dans le meilleur des mondes (La Nouvelle Librairie, 2023).

     

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    L’extrême centre ? Un danger totalitaire

    L’extrême centre est un terme apparu récemment dans l’espace de la dissidence politico-médiatique et popularisé notamment par Mathieu Bock-Côté. Contrairement aux apparences, ce n’est pas un terme polémique mais un outil de compréhension du réel qu’on peut résumer ainsi :
    1 – Il y a une idéologie du centre. Celle de la doxa médiatique.
    2 – Cette idéologie est de plus en plus poussée aux extrêmes dans ses applications pratiques.
    3 – Cette idéologie s’impose dans l’espace public par la propagande, la censure et les interdits professionnels sur un modèle peu éloigné de celui qui prévalait à la fin du communisme soviétique.
    Reprenons.

     

    Les cinq piliers de l’idéologie du centre

    1. L’idéologie du centre n’est pas (ou n’est plus) la prise en compte modérée et nuancée de ce qui viendrait de la gauche et de la droite. Non, c’est une idéologie conforme à la doxa médiatique et construite autour de cinq projets :

    • l’immigrationnisme, doctrine selon laquelle l’immigration est bienfaisante en soi et doit se poursuivre à l’infini, d’autant que l’immigration zéro serait impossible ;
    • le libre-échangisme qui conduit à aller vers une toujours plus grande ouverture des frontières à la circulation des marchandises, du capital et des hommes ;
    • l’affirmationnisme diversitaire, c’est-à-dire la soumission aux revendications des minorités ethniques, religieuses, sexuelles visant à leur obtenir une place toujours plus grande dans l’espace public ;
    • l’obligation de « transition énergétique » pour sauver la planète d’un réchauffement climatique, certes réel, mais de surcroît présumé catastrophique et supposé d’origine anthropique ;
    • l’hygiénisme obsessionnel qui consiste à répandre la peur des épidémies (H1N1, COVID, variole du singe) dans les populations ;
    • l’otanisme, c’est-à-dire l’alignement des politiques diplomatiques et militaires et du discours médiatique sur la ligne de l’État profond américain et de son lobby militaro-industriel.

    Ces cinq points sont sanctuarisés par « l’état de droit », autre nom du pouvoir des juges – internationaux, constitutionnels, administratifs et de droit commun – de valider ou non les textes de loi au regard de la doxa. Et imposés dans l’opinion grâce au complexe médiatico-associatif, c’est-à-dire la reconnaissance comme « experts » des représentants d’associations subventionnées, invités à répandre la bonne parole dans les médias.

    Le cercle de déraison

    2. Cette idéologie du centre est désormais mise en œuvre de manière de plus en plus extrême, c’est le cercle de déraison.

    • Sur le libre-échange : malgré la désindustrialisation, la perte d’une culture technique et les risques sur la souveraineté alimentaire, de nouveaux accords de libre-échange (Canada, Mercosur, etc.) sont sans cesse signés et mis en œuvre sans discernement malgré les promesses électorales contraires.
    • Sur l’immigration : des entrées chaque année de plus en plus nombreuses, 500 000 entrées d’étrangers supplémentaires (hors Union européenne) chaque année en France, plus d’un million en Grande Bretagne. Jusqu’à quand ?
    • S’agissant du droit des minorités, on est passé de l’égalité des chances à la « discrimination positive » et, dans les faits, au racisme antiblanc. Puis des Gay Pride tolérées aux Gay Pride subventionnées, enfin aux Gays Pride imposées comme lors de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques de Paris. Sans même parler de la promotion de la transsexualité dans l’Éducation nationale.
    • La « transition énergétique » sert de justification au saccage des paysages (avec les éoliennes et les panneaux solaires) et du patrimoine immobilier (avec des normes bannissant les préoccupations esthétiques). C’est aussi un moyen commode de créer de nouveaux impôts et d’imposer de nouvelles normes réduisant la liberté de propriété et s’ingérant à l’intérieur même des domiciles.
    • L’hygiénisme conduit à appliquer aux humains les méthodes de la médecine vétérinaire : confinement, vaccination obligatoire, voire éradication des malades (comme cela fut le cas avec l’usage du Rivotril dans les EHPAD au début de l’épidémie de COVID).
    • Quant à l’otanisme, il fait fi des intérêts nationaux élémentaires comme on l’a vu avec le sabotage par nos alliés (sic) du gazoduc Nord Stream.

    Tout cela s’accompagne d’un vocabulaire guerrier : guerre au « racisme », guerre à l’« homophobie », guerre aux virus, guerre au réchauffement climatique, guerre au méchant Poutine. « Nous sommes en guerre », répète souvent le président Macron, mais la première victime de la guerre, c’est la vérité, la deuxième, c’est la liberté.

    Une liberté pour les citoyens que les juges renoncent alors à défendre « au nom des circonstances ». Tout en poussant au-delà des limites du possible les règles d’accueil des étrangers : ainsi la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) a ouvert un droit systématique à l’asile à la « communauté des femmes afghanes » (20 millions de personnes) et à « la communauté des homosexuels togolais » (400 000 personnes ?), les uns et les autres pouvant ensuite faire jouer le regroupement familial pour faire venir leurs proches. Au fou ! Le prétendu « cercle de raison » n’est rien d’autre qu’un cercle de déraison.

    La déraison, c’est aussi l’endettement et le « quoi qu’il en coûte ». À force de « faire la guerre » au « racisme », aux virus, au réchauffement climatique, à Poutine, les déficits se creusent : en 2024, 180 milliards de déficit vont venir s’ajouter aux 3 100 milliards de dette existants. Là aussi, jusqu’à quand ?

    La tenaille du centre

    3 – Propagande et censure : la tenaille totalitaire

    En France, un couple résume à lui seul la tenaille totalitaire : à ma gauche, Caroline Roux omniprésente sur les chaînes du service public (France 5, France 2), c’est elle qui arbitre (!) les débats électoraux : à elle, la propagande. Son mari, c’est Laurent Solly, le patron de Meta France et Meta Europe : à lui, la censure des comptes qui déplaisent au gouvernement sur Facebook et Instagram, y compris des comptes de médias alternatifs comme Frontières.

    En France, la propagande est massive : à l’Éducation nationale, dans les universités, dans les entreprises (à travers les chartes), dans la publicité, dans les programmes culturels, dans les films, dans les séries, dans l’édition. Cette propagande est d’autant plus puissante qu’elle s’appuie sur la quasi-totalité des médias, les médias publics comme ceux des grands oligarques privés : les médias Bouygues (le bétonneur immigrationniste), les médias Saadé (l’armateur libanais), les médias Niel (principal hébergeur de vidéos pédophiles), les médias Arnault (le luxe mondialisé), les médias Kretinsky (le charbonnier tchèque).

    Mais la propagande ne suffit pas pour imposer les dogmes de l’extrême centre : il lui faut le complément de la censure pour empêcher l’expression d’opinions divergentes. C’est pourquoi la police de la pensée ne chôme pas.

    • En août 2024, la France n’a pas de gouvernement mais la police de la pensée n’a jamais été aussi active :
    • retrait des canaux TNT de C8 et NRJ 12 ;
    • pressions de l’Arcom sur CNews ;
    • censure de nombreux comptes par Meta ;
    • arrestation du fondateur de la messagerie Telegram, Pavel Durov, à qui on reproche de protéger le secret de la correspondance de cette messagerie cryptée.

    Faut-il ajouter une proposition de loi (loi Lefèvre), votée en première instance à l’Assemblée nationale, prévoyant de criminaliser les propos privés tenus au domicile, dans les fêtes de famille ou au restaurant d’entreprise. Incroyable ? Mais, hélas, vrai.

    Voilà où en est la France, terre de libertés et patrie des droits de l’homme…

    Il est vrai que cette dérive est celle de l’ensemble de l’Occident.
    Le commissaire européen Thierry Breton menace ouvertement Elon Musk et le réseau social Twitter.
    En Allemagne, l’Office fédéral de protection de la constitution (la police politique) s’est arrogé le droit de valider les recrutements d’attachés parlementaires.
    En Grande-Bretagne, le gouvernement travailliste a fait libérer 500 criminels, souvent étrangers, pour pouvoir embastiller 500 patriotes anglais hostiles à sa folle politique d’immigration, et souvent pour de simples posts. Un exemple supplémentaire d’anarcho-tyrannie.

    L’Europe, c’est la civilisation des libertés. L’extrême centre est une menace existentielle pour elle.

    Jean-Yves Le Gallou (Polémia, 28 août 2024)

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  • La géopolitique, grande oubliée du récent épisode électoral...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Jean-Philippe Duranthon, cueilli sur Geopragma et consacré à l'absence des questions géopolitiques dans les débats politiques des élections. Jean-Philippe Duranthon est haut-fonctionnaire et membre fondateur de Geopragma.

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    La géopolitique, grande oubliée du récent épisode électoral

    Bien sûr on a parlé d’Europe : difficile de ne pas le faire quand on élit le Parlement européen.

    Mais on n’est guère allé au-delà de l’opposition facile entre une Europe-paradis et une Europe prison. On n’a guère discuté de la façon dont l’Europe peut stopper son affaiblissement économique et stratégique ; du rôle qu’une région dont le poids démographique diminue peut à l’avenir jouer dans le monde ; de ce que signifient pour les peuples extra-européens des « valeurs » que l’Europe revendique fièrement et voudrait universelles. Bref, on n’a guère débattu de ce que l’Europe veut faire d’une souveraineté qu’elle réclame sans relâche sans lui donner grand contenu.

    Bien sûr on a échangé des invectives à propos du caractère terroriste du Hamas, de la reconnaissance d’un Etat palestinien ou de la tragédie à Gaza. Mais on n’a guère discuté sérieusement des cheminements susceptibles de déboucher, sinon sur une paix durable au Moyen-Orient, du moins sur un apaisement salvateur en Palestine, et l’on ne s’est pas demandé ce que la France, au-delà de déclarations souvent grandiloquentes, pourrait faire concrètement pour y contribuer.

    La guerre en Ukraine n’a pas non plus suscité beaucoup de débats. On aurait pu s’attendre à ce que l’annonce par le Président Macron, fin février, de l’envoi officiel d’instructeurs français sur le sol ukrainien puis, plus récemment, l’autorisation donnée aux Ukrainiens d’utiliser des armes fournies par la France pour frapper le territoire russe, donnent lieu à des échanges nourris ; les frémissements de dialogue (ou d’esquisse de l’acceptation de l’éventualité d’un dialogue) constatés de la part des protagonistes et des pays qui leur sont proches et, à l’inverse, le souhait de certains membres de l’OTAN de faire en sorte que l’Ukraine soit traitée de facto comme un membre de l’organisation avant de l’être de jure, auraient aussi pu faire réfléchir à la façon dont la France doit se positionner.

    De même, n’aurait-il pas fallu, à quelques jours du 75ème anniversaire de la création de l’OTAN et à l’occasion du remplacement du secrétaire général de l’organisation, s’interroger sur l’avenir des relations transatlantiques ? N’aurait-il pas fallu débattre des évolutions possibles ou souhaitables compte tenu des déclarations du candidat Donald Trump ? Faut-il accepter que l’OTAN coordonne l’envoi des armes occidentales à l’Ukraine ? La France doit-elle continuer à se replier sur un Occident dominé par les Etats-Unis tout en voyant se renforcer un bloc de réprouvés (Chine, Russie, Iran…) dont le récent sommet du groupe de Shangaï et le déplacement du président Modi à Moscou montrent le pouvoir d’attraction sur le reste de la planète ?

    Les nombreuses questions que pose la montée des tensions en Asie n’ont, elles non plus, pas été débattues. Comment faire face à l’influence grandissante et aux revendications croissantes d’une Chine dont il est, du point de vue économique, difficile de négliger le marché ? La France doit-elle se contenter d’être un simple observateur entre, d’une part une Chine renforçant ses liens avec la Russie ou l’Inde et grignotant îlots ou archipels, et, d’autre part, une alliance des pays anglo-saxons associés au Japon ? Le fait que l’embrasement de la Nouvelle-Calédonie ait été « oublié » pendant la campagne électorale signifie-t-il que la France se désintéresse du Pacifique, ou n’a plus les moyens de s’y intéresser ?

    Enfin, n’aurait-il pas été logique de se demander comment la France, après avoir tant investi, financièrement et militairement, pour aider les pays africains, doit agir aujourd’hui face à la déliquescence ou l’autoritarisme de certains régimes et face à la prise de contrôle, militaire ou financière, du continent par la Russie et la Chine ? Les déboires qu’Orano rencontre au Niger sont-ils un cas isolé ?

    Les interrogations, les inquiétudes et les décisions à prendre, on le voit, sont nombreuses. Pourtant, la géopolitique a été quasiment absente des débats électoraux de ces dernières semaines. Comment l’expliquer ?

    Ecartons bien sûr l’hypothèse selon laquelle la politique étrangère ferait l’objet, comme cela a parfois pu être le cas dans le passé, d’un consensus national : il y a bien longtemps que ce n’est plus le cas.

    On peut aussi penser que les Français aimeraient pouvoir influer sur les choix mondiaux mais éprouvent un sentiment d’impuissance à l’égard des évolutions du monde et des décisions des pays proches ou lointains : il est malheureusement vrai que la France, à force d’additionner maladresses et erreurs stratégiques, joue un rôle de plus en plus limité dans le dialogue international.

    Reste l’hypothèse selon laquelle les Français ne sont pas conscients de ce que leur vie dépend étroitement de décisions prises, soit dans le cadre interétatique, soit à un niveau supranational. L’irréalisme des programmes économiques que les partis ont élaborés pour séduire les électeurs est une autre expression de cette erreur d’analyse ou de cette inconscience.

    A moins qu’il ne s’agisse d’un étrange sentiment de supériorité : la France, à qui l’on doit les Lumières et l’Idéal Révolutionnaire, personnifie la Raison, le Droit et le Bien, il lui suffit d’exprimer une opinion pour que la terre entière s’y rallie.

    Les désillusions succèdent toujours aux illusions ; reste à savoir si elles seront bénignes ou douloureuses.

    Tout cela, bien sûr, va changer dans quelques jours : la France va montrer à la planète entière sa capacité à organiser des JO « modernes, solidaires, engagés, responsables, inclusifs… » (mais pas très planet friendly). Reconnaissons toutefois que le message universel véhiculé par des compétitions sportives est un peu maigrichon par rapport à celui que portaient jadis les Lumières. Reconnaissons aussi qu’il serait plus enthousiasmant de former de futurs médaillés Fields que de fabriquer les médailles destinées à quelques athlètes méritants.

    Jean-Philippe Duranthon (Geopragma, 15 juillet 2024)

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  • Guerre en Ukraine : Vers l’escalade ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Philippe Condé cueilli sur Geopragma et consacré à l'escalade de plus en plus ouvertement assumée des pays de l'OTAN à l'encontre de la Russie. Philippe Condé est docteur en économie et spécialiste de la Russie.

     

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    Guerre en Ukraine : Vers l’escalade ?

    Chaque jour qui passe, de nouveaux pays de l’OTAN autorisent les frappes sur le territoire russe avec leurs armes.

    Pourtant, le secrétaire général de l’OTAN assure que l’Organisation n’est pas en guerre contre la Russie et ne recherche pas l’escalade.

    A ce jour, dix pays européens ont donné l’autorisation de frapper le territoire russe avec leurs armes (Allemagne, Danemark, France, Pays Baltes, Pays-Bas, Pologne, République Tchèque et Royaume-Uni) ainsi que les Etats-Unis (utilisation de missiles à courte portée sur les régions russes frontalières de la région de Kharkov).

    Pour le Danemark et les Pays-Bas, leurs avions F-16, une fois livrés à l’Ukraine, pourront frapper le sol russe sans restriction.

    En réponse à ces autorisations, le 5 juin lors d’une Conférence de presse avec des journalistes étrangers, en ouverture du Forum économique international de St Petersburg, le président russe a annoncé que la Russie pourrait armer avec des missiles longue portée des pays en conflit avec l’Occident. On pourrait imaginer que Moscou livre des missiles à l’Iran ou aux rebelles Houthis afin de frapper les intérêts occidentaux au Proche Orient. Cela constituerait une réponse asymétrique de la part du Kremlin.

    Lors de son intervention du 6 juin, Emmanuel Macron a annoncé la formation de 4500 soldats ukrainiens sur le sol français ainsi que la livraison de cinq Mirages 2000-5 et la formation des pilotes ukrainiens. En outre, les Mirage 2000 pourront, une fois livrés à l’Ukraine, frapper le territoire russe. La mise en garde russe de la veille ne semble pas avoir été entendue.

    Une autre réponse asymétrique de la part de Moscou serait d’envoyer des bâtiments de guerre sur le continent américain, par exemple au Venezuela, au Nicaragua ou à Cuba. Ainsi du 12 au 17 juin, la frégate Amiral Gorshkov accompagnée du remorqueur Nikolaï Chiker, du pétrolier Akademik Pashin et du sous-marin à propulsion nucléaire Kazan pouvant embarquer des missiles hypersoniques, ont fait escale à La Havane. Les côtes de Floride ne sont qu’à 180 kilomètres.

    Le risque d’escalade devient chaque jour plus grand d’autant plus que les dirigeants occidentaux continuent de faire la sourde oreille aux propos de Moscou.

    Mais vu d’Occident, la Russie est l’ennemi à abattre. L’Ukraine n’est que l’instrument, l’arme de ce projet, ses soldats ne sont que des consommables.

    Cependant, Moscou se dit chaque jour prête à négocier en tenant compte de la réalité sur le terrain.

    Le 14 juin, lors d’un discours devant le corps diplomatique russe, soit la veille de la Conférence de paix qui se tiendra en Suisse, sans la Russie, Vladimir Poutine présente un Plan de paix en cinq points.

         1. Retrait total des troupes ukrainiennes du territoire administratif des régions de Lougansk (RPL), Donetsk (RPD), Zaparojié, Kherson. Le statut de ces régions russes, ainsi que de la Crimée et de Sébastopol devra être reconnu par des traités internationaux.

          2. Engagement de l’Ukraine à ne pas adhérer à l’OTAN.

          3. Statut neutre, non aligné et non nucléaire de l’Ukraine.

          4. Démilitarisation sur la base des accords d’Istanbul.

          5. Protection des droits des russes en Ukraine.

    Il ajoute que si ces conditions sont rejetées, la responsabilité de la continuation du bain de sang incombera à l’Occident.

    Sans surprise, ce plan de paix est aussitôt rejeté par le président ukrainien, le considérant comme un ultimatum mais aussi par l’OTAN, et les Etats-Unis, proclamant que cela ne ramènerait pas la paix et permettrait d’atteindre les objectifs russes.

    Or ce plan semble plutôt réaliste et reprend les principales demandes russes formulées en janvier 2022, soit un mois avant le lancement de l’Opération militaire spéciale. La principale différence se trouve dans le premier point, c’est-à-dire la reconnaissance de la souvenait russe sur les régions de RPL, RPD, Zaparojié et Kherson. Ces dernières ont adhéré par référendum (23-27 septembre 2022) à la Fédération de Russie. Cette consultation est considérée comme une annexion et donc non reconnue par l’Occident.  Etant donné le rapport des forces sur le terrain, où l’armée russe continue d’avancer sur l’ensemble du front, ces régions semblent perdues pour l’Ukraine.

    Pour Moscou, c’est un fait accompli d’autant plus que des investissements considérables sont réalisés comme la restauration des villes (Marioupol étant le symbole), la construction de nouvelles routes et de voies ferrées permettant d’intégrer ces nouveaux territoires au reste de la Fédération. La liaison ferroviaire, en voie d’achèvement, reliant Rostov sur le Don à Djankoi (Crimée) via Marioupol (RPD), Berdyansk et Melitopol (Zaparojié), constitue le plus grand symbole.         

    Ces régions, au même titre que la Crimée, ne sont donc plus négociables. Elles font partie intégrante de la Fédération de Russie. D’ailleurs, selon Piotr Tolstoï, vice-président de la Douma, c’est la dernière proposition de paix de la Russie. La prochaine proposition sera la capitulation.

    Sans surprise, la Conférence de paix qui s’est tenue en Suisse (15-16 juin) en l’absence de la Russie, mais aussi de la Chine, n’a apporté aucun élément nouveau permettant de mettre fin au conflit.

    Sur les 90 délégations, environ la moitié n’était pas constituée de membres de haut rang, notamment les pays du Sud global. Les Etats-Unis étaient représentés par la vice-présidente Kamala Harris et le conseiller à la sécurité nationale Jake Sullivan.

    Seuls 78 Etats ont signé la déclaration finale (l’Inde, le Brésil, l ‘Arabie Saoudite, les Emirats arabes unis, membres des BRICS, n’ont pas signé), qui apporte le soutien à la « souveraineté, l’indépendance et l’intégrité territoriale » ukrainienne mais reconnait aussi qu’il faudra inviter la Russie afin de parvenir « à une paix juste et durable ». Par ailleurs, le communiqué final appelle à garantir la liberté de navigation en Mer Noire et en Mer d’Azov (totalement contrôlée par Moscou) afin de sécuriser le commerce des produits alimentaires (notamment le blé). Enfin, les participants demandent que l’Ukraine reprenne le contrôle total de la centrale nucléaire d’Energodar (contrôlée par les russes depuis mars 2022) et exigent la libération de tous les prisonniers de guerre. Le communiqué n’appelle donc pas au retrait des forces russes ni au paiement de réparations, pourtant point clés du plan de paix Zelenski.

    En somme pour le président ukrainien, les conclusions de cette conférence constituent un échec, auquel s’ajoute l’absence de la Chine et de Joe Biden. Les hostilités sur le terrain continuent donc sans espoir de voir la fin prochaine.

    Pourtant, comme l’a affirmé, à plusieurs reprises déjà, le Haut représentant aux affaires étrangères européen, Josep Borell, il suffirait que l’Europe arrête de fournir des armes à l’Ukraine pour que la guerre se termine.  Aveuglés par une russophobie maladive, les européens et les occidentaux en général ne veulent (ne peuvent) reconnaître leurs erreurs…car ce conflit aurait pu être évité s’ils avaient accepté les Accords d’Istanbul début avril 2022.

    Mais l’arrogance Occidentale, anglo-saxonne en particulier (le fameux voyage du 1er Ministre britannique Boris Johnson le 9 avril 2022), décida que l’occasion était trop belle pour détruire une fois pour toutes la Russie.

    Cependant, deux plus tard, la Russie n’est pas détruite et tient fermement debout sur ses deux jambes en dépit des plus de 20 000 sanctions occidentales.

    Ainsi en 2023, son taux de croissance a atteint 3,2% et a dépassé 5% au premier trimestre 2024.

    La Russie est devenue la quatrième économie mondiale en 2023 en PIB PPA (parité de pouvoir d’achat), derrière la Chine, les Etats-Unis et l’Inde mais devant le Japon. Le taux de chômage est inférieur à 3%, l’économie est en pénurie de main-d’oeuvre, ce qui constitue le principal problème aujourd’hui. Afin de résorber cette situation, il faudra augmenter la productivité du travail et/ou augmenter la robotisation des entreprises et/ou faire appel à de la main d’œuvre étrangère. Les autorités semblent privilégier les deux premiers facteurs.

    En somme, des performances économiques très honorables sous de très fortes contraintes, pour une station service déguisée en pays, selon les termes de l’ancien sénateur républicain et héros américain du Vietnam John Mc Cain.  

    Or, un certain embarras semble, tout de même, gagner les capitales occidentales puisque l’économie russe ne s’est pas effondrée comme l’avait très imprudemment prédit Bruno Lemaire, le 1er mars 2022.

    Que faire ? C’était la question que se posait Lénine dans son traité politique publié en 1902.

    Elle s’applique totalement à la Russie s’agissant de la politique actuelle des pays occidentaux

    Mais au lieu de se poser la bonne question comme Lénine à l’époque, les dirigeants occidentaux préfèrent la fuite en avant, l’escalade dans le conflit.

    Ainsi, on continue de ne pas prendre au sérieux les mises en garde du Kremlin concernant l’utilisation éventuelle de bombes nucléaires tactiques (la Russie en possède plus de 4000).

    La doctrine militaire russe est pourtant très claire : en cas de menace pour l’intégrité et la souveraineté du pays, la Russie se réserve le droitd’une frappe nucléaire.

    Comme l’a fait remarquer John Mearsheimer dès le mois de mai 2022 : on ne joue pas impunément avec une puissance nucléaire. Ajoutons que la Russie est la première (5889 ogives) devant les Etats-Unis (5244 ogives) et très loin devant la France (290 ogives).

    Pendant ce temps, l’Europe se perd, la France en tête. Le 31 mai, Standard and Poor’s a dégradé sa note de AA à AA-, en raison notamment de son taux élevé d’endettement (110,6% du PIB, soit plus de 3000 milliards d’euros) et de déficit budgétaire (5,5% du PIB en 2023, en hausse de 0,8 point par rapport à 2022). La croissance européenne reste inférieure à 1% par an, l’inflation reste supérieure à 2%, qui est la cible de la BCE. La désindustrialisation guette l’Allemagne puisqu’elle importe son énergie deux à trois fois plus chère que lorsqu’elle l’achetait à la Russie. La France ayant perdu son industrie depuis la crise de 2008.

    L’écart économique entre l’UE et les Etats-Unis ne cesse de se creuser depuis la crise des subprimes.

    Entre 2008 et 2022, le taux de croissance de l’UE a été de 2,8% contre 72% aux Etats-Unis.

    De ce fait, l’économie européenne ne représente plus que 65% de son homologue américaine alors qu’elles étaient équivalentes en 1990. 

    Dans les différents Etats membres, les campagnes pour les élections européennes n’ont pas été à la hauteur des enjeux. En France, on a vu beaucoup de listes (vingt-neuf) pour très peu d’Europe.

    Victor Hugo n’est plus qu’un lointain souvenir brumeux. Absence de vision, absence de projet fédérateur, alors que l’UE cumule les retards dans les domaines de l’intelligence artificielle ou de l’automobile électrique face à ses rivaux américain et chinois.

    Les résultats des élections européennes du 9 juin ont encore obscurci l’horizon du vieux continent.

    Les partis d’extrême droite ont gagné en France, en Belgique, en Autriche et se sont classés deuxième en Allemagne et aux Pays-Bas. Emmanuel Macron s’est résolu à dissoudre l’Assemblée nationale entrainant le pays dans une incertitude totale.

    Ces résultats constituent un signal aux pouvoirs en place : problèmes de pouvoir d’achat, avenir du système social, montée des inégalités, mais aussi la guerre en Ukraine qui est une situation perdante pour l’UE. Il y a donc urgence à prendre en compte ces problèmes lors des prochaines législatures française et européenne.

    Dans les prochains mois, l’Occident, et l’UE en particulier, devra revoir radicalement son agenda en Ukraine.

    La situation actuelle, après plus de deux ans de conflit, largement provoqué et alimenté par l’Occident, risque de conduire à une escalade et à un élargissement du théâtre des opérations. Le danger nucléaire n’est pas à exclure.

    L’UE devrait donc convoquer une Conférence de paix afin de mettre fin à cette tragédie. Car la paix, c’est la vocation de l’Europe !

    A défaut, la situation post-apocalyptique décrite par Dmitry Glukovsky dans le cadre de sa Trilogie Métro (2033, 2034, 2035) où les survivants d’une guerre nucléaire se terrent misérablement dans le métro de Moscou, depuis vingt ans, pourrait alors devenir réalité…

    Philippe Condé (Geopragma, 3 juillet 2024)

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  • Requiem pour un empire...

    Les éditions du Cerf viennent de publier un essai de John Christopher Barry intitulé Requiem pour un empire - Les Etats-Unis et le piège afghan  2001-2021.

    Diplômé des universités de New York et Los Angeles, docteur de l'EHESS à Paris, chercheur et enseignant en géopolitique, John Christopher Barry a été chargé de cours pendant huit ans à l'École militaire de Saint-Cyr Coëtquidan et siège à la rédaction d'Inflexions, la revue de réflexion de l'armée de Terre.

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    " Août 2021, les États-Unis quittent en catastrophe l'Afghanistan. Les images de cette débâcle font le tour du monde. C'est la fin de l'hyperpuissance. Jusqu'où ira la chute de l'empire américain ? Spécialiste des questions géopolitiques, John Christopher Barry a franchi l'Atlantique et choisi la France. Il nous livre ici une enquête sans précédent sur la machine de guerre américaine. Sur son invasion et son retrait de l'Afghanistan. Il nous révèle les secrets des stratèges du Pentagone à Washington et les confidences des militaires de l'OTAN à Kaboul. Il nous dévoile les rêves des diplomates et les cauchemars des commandos. Il nous montre comment l'éternel tombeau des empires a mis au jour les erreurs répétées et les errances récurrentes de la République impériale. Cette investigation, menée sur le terrain, constitue aussi un implacable réquisitoire. Non, on ne peut pas imposer la démocratie à coup de bombes, privatiser la guerre au profit d'un complexe militaro-industriel, corrompre une nation au nom de l'argent-roi. Oui, les autochtones finissent toujours par se rebeller et chasser l'occupant. Ce livre-choc, aux révélations explosives, donne les clés de l'irrésistible déclin de l'Amérique. Et explique l'actuel incendie planétaire. "

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  • Jacques Hogard : « Macron et l'OTAN ont "des muscles en papier" »

    Pour son émission sur TV Libertés, Chocs  du monde, Edouard Chanot reçoit Jacques Hogard pour évoquer avec lui les échecs du soutien occidental à l'Ukraine.

    Ancien officier de Légion, au prestigieux 2ème REP, Jacques Hogard a servi au Kosovo, au sein du Commandement des opérations spéciales (COS), et est désormais expert en intelligence stratégique. Il vient de publier La guerre en Ukraine - Regard critique sur les causes d’une tragédie (Hugo Doc, 2024).

     

                                             

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  • Russie / Ukraine : La propagande des va-t-en guerre

    Vous pouvez découvrir ci-dessous Le samedi politique de TV Libertés, diffusé le 9 mars 2024 et présenté par Élise Blaise, qui recevait Pierre Conesa pour évoquer la propagande des va-t-en-guerre de plateaux TV, ces membres du complexe militaro-intellectuel, qui poussent au crime depuis leurs postes bien protégés...

    Agrégé d'histoire et énarque, Pierre Conesa a fait partie dans les années 90 de la Délégation aux affaires stratégiques du Ministère de la défense. Il est l'auteur de plusieurs essais, dont, notamment, Dr. Saoud et Mr. Djihad - La diplomatie religieuse de l'Arabie saoudite (Robert Laffont, 2016), Hollywar - Hollywood, arme de propagande massive (Robert Laffont, 2018), Le lobby saoudien en France - Comment vendre un pays invendable (Denoël, 2021), Vendre la guerre - Le complexe militaro-intellectuel (L'aube, 2022) et État des lieux du salafisme en France (L'aube, 2023).

     

                                              

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