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Métapo infos - Page 183

  • Finance, croissance et transition...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'Hervé Juvin, cueilli sur son site personnel et consacré à la transition écologique.

    Économiste de formation et député européen, Hervé Juvin est notamment l'auteur de deux essais essentiels, Le renversement du monde (Gallimard, 2010) et La grande séparation - Pour une écologie des civilisations (Gallimard, 2013). Il a également publié un manifeste localiste intitulé Chez nous ! - Pour en finir avec une économie totalitaire (La Nouvelle Librairie, 2022).

     

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    Finance, croissance et transition

    À Paris, dans une discrétion remarquable, des chefs d’État ont parlé du financement de la transition écologique en cette fin de juin 2023. Tout forum international se doit de respecter quelques points de passage obligés.

    Le premier est de répéter encore et encore à quel point le dérèglement climatique est une réalité qui menace le futur de la planète et demande des réponses globales – entendez ; laissez-le pouvoir à des organismes supranationaux, non élus et non contrôlés, ils sauront mieux que les États ce qu’il faut faire. Le pouvoir que s’est arrogé le WHO ( World Health Organization), qui n’a rien fait pour mériter le respect, mais fait bénéficier ses dirigeants d’une impunité bien utile, et dépossédé les États de leur mission de protéger la santé de leurs citoyens, en donne l’exemple.

    Le second est d’appeler au développement, plus convenable que la croissance, un développement fondé sur les infrastructures, et bien entendu, un développement vert – « go green ». Et, en Asie comme en Afrique, de dérouler la liste des projets qui assureront les conditions d’un développement fort, effectif et durable ; des aéroports, des ports, des routes et des autoroutes, le tout réuni sous le mot de connectivité, sous l’idée de l’intégration des continents à eux-mêmes, porté par l’intérêt supérieur du commerce. Plus de marchandises allant plus vite, plus loin, et surtout, partout – dans tous les sens à travers les nouveaux continents unis par le commerce ; plus d’hommes dans les avions, les trains, les metros, allant plus souvent et plus vite partout, pour le travail, pour le loisir, ou pour rien. Et plus de proximité, de contacts, d’uniformisation et de conformité – mêmes hôtels, mêmes enseignes, même multinationales, puisque le destin du voyageur, est de demeurer partout chez lui – de bouger sans jamais partir.

    Le troisième est de faire appel à l’investissement. Car il en coûte de l’argent de construire des infrastructures, de financer ces projets et de les maintenir. Car il en coûte de l’argent de verdir les activités, de remplacer les moteurs thermiques par de l’électrique, de changer les chauffages, de refaire les immeubles et les maisons, les universités et les bureaux, et de mettre en place les systèmes d’expertise, de classements et de normes, de contrôle et de sanctions qui rendront le verdissement réels – feront obéir la société au chemin choisi pour elle, et imposé de l’extérieur. Il en coûte de détruire ce qui a été construit, d’abandonner l’ancien, pour répondre aux normes, aux concepts et aux modes.

    Et il en coûte encore plus d’argent d’assurer aux gestionnaires de capitaux les rendements attractifs qui leur feront oublier le risque, les pertes sur les « actifs échoués », ces investissements passés que le « go green » rend sans valeur, et qui paieront l’immense appareil à mettre en place pour rendre effectif le verdissement dans tous les secteurs et tous les domaines de l’activité et de la vie. Il n’y a pas de prix pour se verdir, et maints entrepreneurs dans les éoliennes, le solaire, ou les formations aux renouvelables et la certification des logements ont dégagé des rentabilités supérieures à 30 % annuels – puisque c’est pour le bien ! Qui s’étonne que les plus grands gérants mondiaux, qui contrôlent le capital des multinationales, aient adopté avec enthousiasme l’agenda Vert ?

    Il serait malvenu de faire trois remarques, qui pourtant vont s’imposer très tôt.

    D’abord, signaler l’éclatante contradiction qui veut que tant de ports, d’aéroports, de trains et d’autoroutes soient compatibles avec l’obligatoire lutte contre le dérèglement climatique. Éclatante surtout quand des forums ont lieu à Dacca, Delhi ou Singapore, et qu’il fait 45 dehors ! Il n’y a pas d’énergie qui ne contribue pas au réchauffement – même le nucléaire, pourtant le plus décarboné de tous. Il n’y a pas de transport, pas de mobilité qui n’entraînent pas un réchauffement ; c’est vrai de la marche à pied comme de la ronde des porte-conteneurs ou de la charge des véhicules électriques, et il n’est pas d’infrastructure qui quelque part n’a pas demandé des consommations de ressources naturelles – le seul bénéfice écologique du moteur électrique étant qu’il pollue ailleurs, là où l’électricité est produite, là où les batteries sont produites, là où les terres rares ou le lithium sont produits ; à ce titre, le moteur électrique est le symbole même de la globalisation – faire faire ailleurs ce qu’on ne veut pas chez soi ! Et il n’y a pas de commerce au-delà des frontières, par-delà les océans, les montagnes et les frontières, qui ne contribue pas au dérèglement du climat. 

    Ensuite, d’en appeler à des solutions globales, entendez ; mises en place par ceux qui contribuent le plus au dérèglement du climat. Aux coupables de réparer leurs crimes ! Le dérèglement du climat n’est pas venu de l’activité des entreprises locales ou régionales, des communautés travaillant à satisfaire leurs besoins quotidiens et à maintenir ou améliorer leur cadre de vie tel que des siècles d’adaptation réciproque de l’homme à son environnement et de son environnement à l’homme l’ont déterminé. Le dérèglement procède d’abord de la mondialisation des échanges, de la globalisation du modèle de consommation de masse, et de l’extension planétaire des échanges et des transports commerciaux qui sont les raisons d’une croissance de tout – plus d’énergie, plus de matériaux, plus de plastiques, plus de chimie, plus d’animaux dans les élevages, et plus de population dans le monde.

    Sans moteur, pas de dérèglement climatique d’origine humaine. Sans révolution industrielle, pas d’anthropocène. Le porte container, la multinationale et la religion du développement – qui a le droit de ne pas se développer ? – sont les coupables impunis du dérèglement climatique. Et ils en sont les bénéficiaires, puisque la globalisation des questions climatiques se déroule entièrement à leur avantage, contre l’intérêt des artisans, des petits commerçants, des PME prises au piège des normes globales – et de la captation réglementaire que les lobbys assurent au sein d’institutions qui n’ont rien de démocratiques, ni de transparent. Le changement climatique est une bonne affaire pour les multinationales, pour les myriades de sociétés de « conseil » qui prolifèrent sru l’escroquerie de la RSE et de l’ESG, pour les institutions supranationales qui s’arrogent le monopole du Bien pour en finir avec la souveraineté des Etats et avec la démocratie – que la fille de John Kerry, si prompt à rappeler à l’ordre les peuples européens, soit chargée de faire le lien entre lutte contre le dérèglement climatique et l’OMS n’est pas une bonne nouvelle pour l’Europe ! 

    Enfin, de se satisfaire d’un désordre monétaire et financier qui fait danser ses acteurs au-dessous du volcan qu’ils ont rallumé. D’abord parce que des rendements supérieurs à quelques % sont incompatibles avec les taux de renouvellement naturel des ressources et des organismes vivants, et signifient l’extinction de ces ressources et du vivant – l’agriculture industrielle comme celle de précision inventée par les agrochimistes avec la complicité de Google, signifie d’abord la stérilisation des terres, à moins d’une génération.

    Ensuite, parce que l’enrichissement sans mesure autorisé par de tels rendements nourrit des comportements dévastateurs fréquemment dénoncés, jamais réellement limités – des superyachts aux avions privés, la consommation n’a plus les limites que l’appartenance, la décence ou la loi imposaient. Ceux qui sont de nulle part, sans origine, sans histoire et sans liens, n’ont que leur argent pour exister. Enfin et surtout, parce que la création monétaire qui facilite ces investissements, et qui est le deus ex machina derrière les montants faramineux des investissements réalisés dans la transition écologique, signifie un chèque blanc donné sur la nature – si un dollar de 2023 vaut un dollar de 2000, alors que la masse des dollars en circulation a plus que doublé, cela signifie que deux fois plus de produits, de ressources, d’énergie, de tout, peuvent être achetés par ces dollars, donc que la pression sur les ressources a doublés. Comment ne pas rappeler Milton Friedman, comme le faisait récemment Philippe d’Arvisenet ;  « too much money, too few goods ».

    Et voilà où le scénario explose. Soit les dollars ne valent plus que la moitié de ceux de 2020, et à leurs porteurs de se réveiller de leur songe ; ils n’ont que la moitié du pouvoir d’achat qu’ils croient avoir. Soit les dollars doivent garder leur valeur, et tout l’or, tout le pétrole et le gaz, toutes les terres et les arbres, les légumes et les bêtes qu’elles portent, n’y suffisent pas – et tout ce qui est réel doit être converti en argent. Le scénario réaliste est double. A la fois la pression sur les ressources va continuer d’augmenter, et la transition aura seulement été un moyen de la bonne conscience, ajouté à des manipulations stratégiques ciblées pour détruire les économies adverses ou concurrentes. À la fois la valeur de la monnaie de confiance, la fiat monnaie en circulation, nos dollars, euros ou yuan, va s’effondrer, et avec elle, les dettes libellées en monnaie – les obligations d’État comme les dettes privées. Voilà bien pourquoi les banques centrales s’emploient à remplacer les monnaies par leur monnaie digitale de banque centrale, indéfiniment manipulable, et voilà pourquoi des accidents financiers de grande ampleur deviennent crédibles, que ce soit en Chine, où nous ne savons à peu près rien de la sortie de la crise immobilière et des cessations de paiements des banques régionales, ou dans des pays occidentaux drogués à la dette publique et privée pour laquelle le reste du monde ne veut plus payer, ni fournir.

    Et sur un monde en révolution, ou en flammes, quelqu’un plantera un drapeau vert.    

    Hervé Juvin (Site officiel d'Hervé Juvin, 28 juin 2023)

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  • Enquête sur les martyrs de l'idéologie trans...

    Le numéro 66 du mensuel conservateur L'Incorrect est en kiosque. On peut notamment découvrir à l'intérieur un dossier central consacré à l'intelligentsia européenne conservatrice, une enquête sur les enfants cobayes de l'idéologie trans, et un entretien consacré à Barrès avec son biographe Emmanuel Godo, ainsi que les rubriques habituelles "Monde", "Essais", "Culture", et "La fabrique du fabo"...

    Le sommaire complet est disponible ici.

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  • Émeutes communautaires : c’est l’ennemi qui vous désigne !...

    Vous pouvez découvrir ci-dessous une chronique de François Bousquet dans l'émission Ligne Droite sur Radio Courtoisie, datée du 5 juillet 2023, dans laquelle il évoque les émeutes communautaires au cours desquelles certains ont découvert que pour les occupants des banlieues de nos villes, l’ennemi, c’est nous autres Français...

    Journaliste, rédacteur en chef de la revue Éléments, François Bousquet a aussi publié Putain de saint Foucauld - Archéologie d'un fétiche (Pierre-Guillaume de Roux, 2015), La droite buissonnière (Rocher, 2017), Courage ! - Manuel de guérilla culturelle (La Nouvelle Librairie, 2020) et Biopolitique du coronavirus (La Nouvelle Librairie, 2020).

     

     

                                             

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  • Le futur était déjà fini !...

    Les éditions L'esprit du temps ont publié à l'automne dernier un essai de Fabrizio Tribuzio-Bugatti intitulé Le futur était déjà fini - Essai sur la lotocratie

    Juriste et journaliste engagé, Fabrizio Tribuzio-Bugatti a dirigé pendant sept ans la revue pasolinienne Accattone.

    Tribuzio-Bugatti_Le futur était déjà fini.jpg

    " Cet essai propose une analogie politique au travers d’un épisode de L’Odyssée d’Homère : les Lotophages que rencontrent Ulysse et ses compagnons. 
    Mangeurs de lotus, ils font sombrer les héros dans l’oubli, et Homère fait coïncider l’oubli de soi avec l’oubli des origines.
    Les Lotophages présentent de nombreux traits singuliers qui se prêteraient à une analogie politique d’un temps moderne analogue au passé.  
    Les Lotophages ne sont-ils finalement pas la plus belle image que l’on puisse faire de notre société de consommation? 
    La culture lotophage est une norme qui s’est établie partout en Occident. 
    L’état, la politique, la liberté, l’égalité, ou ce qu’il en reste, tout n’est qu’au service de cette quête perpétuelle de satisfactions de  nos désirs ?"

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  • La France au milieu des émeutes...

     

     

    Alain de Benoist : la France au milieu des émeutes

    IL GIORNALE : Les manifestations de ces jours-ci témoignent de l’échec du multiculturalisme. Comment en est-on arrivé là ?

    ALAIN DE BENOIST. Elles manifestent bien sûr un échec du multiculturalisme, mais s’en tenir là serait réducteur. Les violentes émeutes urbaines auxquelles nous assistons en ce moment témoignent aussi d’un pays divisé et fragmenté, non à cause des immigrés, mais en raison d’une idéologie dominante qui a substitué, dans la population générale, la loi du profit aux règles morales. Dans une société dominée par les valeurs marchandes, qui créent structurellement les conditions de la fragmentation et de la déliaison sociale, il ne faut pas s’étonner que personne ne se soucie du bien commun.

    Dans ces émeutes, la gauche a surtout vu une révolte sociale (contre la discrimination, l’exclusion, le chômage, etc.), tandis que la droite a parlé de révolte ethnique annonciatrice d’une guerre civile. Il y a du vrai dans ces deux interprétations, mais elles sont l’une et l’autre à courte vue. Depuis quarante ans des dizaines de milliards d’euros ont été investies dans la « politique de la ville » et la remise en état des « quartiers difficiles » sans aucun résultat. D’autre part, une guérilla urbaine n’est pas une guerre civile. Dans une guerre civile, deux fractions armées de la population s’affrontent, la police et l’armée étant également divisées, ce qui n’est pas le cas ici.

    D’une façon générale, ce sont les interprétations strictement politiques qui s’avèrent incapables de prendre la pleine mesure du problème. Les actuelles émeutes urbaines n’ont aucun caractère politique. Les émeutiers n’ont aucune revendication à faire valoir. Ils veulent seulement détruire et piller. Lorsque des représentant de la gauche ou de l’extrême gauche se rendent dans les cités pour faire savoir qu’ils « comprennent la colère » des émeutiers, il se font expulser ou cracher au visage !

    Dans quelle mesure la crise de l’identité française et européenne influence-t-elle les manifestations ?

    La population française a aujourd’hui perdu tout sentiment d’appartenance à une communauté. Les émeutiers en ont une – ou croient en avoir une. La crise de l’identité française a des racines anciennes. Elle est la résultante de l’emprise d’une idéologie à la fois individualiste et universaliste, qui croit que les hommes sont « partout les mêmes », et que les facteurs ethnoculturels n’ont pas d’importance. Aucune société ne peut résoudre ses problèmes par la seule addition du contrat juridique et de l’échange marchand.

    L’État français est-il remis en cause parce que de nombreux immigrés ne reconnaissent pas l’autorité des institutions françaises ?

    Les émeutiers ne se soucient pas de l’État français, qui les indiffère. Quand ils attaquent les policiers avec des mortiers d’artifice, quand ils incendient des mairies ou des casernes de pompiers, c’est moins parce qu’ils voient en eux des représentants de l’autorité que parce qu’ils les perçoivent comme des intrus. Ils raisonnent en termes de territoire (la « frontière invisible »), de façon purement tribale. Ils s’attaquent d’ailleurs aussi bien aux écoles, aux librairies, aux épiceries, aux boutiques, aux voitures. Ils se regardent comme une bande attaquée par une bande rivale.

    Ce serait une autre erreur de croire que les émeutiers ne veulent connaître aucune règle. Il y a au contraire des règles qu’ils respectent très bien : les leurs ! La plupart d’entre eux viennent de cultures et de sociétés familiales de type clanique, et ils continuent de se comporter de manière clanique. Si l’un d’entre eux est victime de la « violence policière », tous s’estiment victimes aussi. C’est ce que les pouvoirs publics, prisonniers de leur idéologie, ne parviennent pas à comprendre : la mère d’un enfant tué après avoir commis une attaque à main armée ne dira jamais que son fils s’est mal comporté. Elle dira qu’à travers lui, c’est tout le clan qui a été attaqué. C’est le principe même du tribalisme clanique : les miens ont toujours raison puisque ce sont les miens.

    Pourquoi les deuxième et troisième générations sont-elles plus radicalisées que les précédentes ?

    Elles sont plus radicalisées parce qu’elles souffrent d’un déficit identitaire beaucoup plus marqué. De telles émeutes ne sont jamais le fait d’immigrés de la première génération, qui sont venus s’installer en France volontairement tout en conservant une claire conscience de leurs origines, et donc de leur identité. Les deuxième, troisième ou quatrième génération se  considèrent comme algériens, maliens, marocains, sénégalais, etc., même lorsqu’ils ont la nationalité française, mais ils ne connaissent pratiquement rien des pays d’où sont venus leurs parents ou grands-parents. Ils ne se sentent pas français, mais n’ont qu’une identité de rechange artificielle ou fantasmée. Leur frustration est totale. Ils ne peuvent plus exprimer ce qu’ils sont que par la violence et la destruction.

    Dans ce contexte, le système judiciaire français, souvent accusé d’être trop laxiste à l’égard des immigrés qui comment des délits, a-t-il joué un rôle à votre avis ?

    Le laxisme du système judiciaire est bien réel. Les émeutiers savent bien qu’au fond ils ne risquent pas grand-chose, car la loi n’est pas appliquée. Un refus d’obtempérer assorti d’un délit de fuite peut théoriquement valoir jusqu’à dix ans de prison, mais de telles peines n’ont jamais été prononcées. De surcroît, il n’y a plus de places dans les prisons ! Cela contribue à la démoralisation des policiers.

    En 2005 déjà, de graves manifestations avaient eu lieu en France. Qu’est-ce qui a changé par rapport à la situation d’il y a presque vingt ans ? La situation s’est-elle aggravée ?

    Entre 2005 et 2023, il y a des différences. La plus grande ampleur des émeutes, qui en cinq jours ont déjà fait plus que de dégâts de celles de 2005 qui avaient duré trois semaines, s’explique d’abord par le simple fait que les populations immigrées d’où sont issus le émeutiers sont aujourd’hui beaucoup plus nombreuses. Le rôle aujourd’hui prédominant des réseaux sociaux est aussi à prendre en compte. En 2005, les émeutes s’étaient concentrées dans les grandes métropoles, elles touchent aujourd’hui les petites villes. Les émeutiers sont également beaucoup plus jeunes (un tiers de ceux qui ont été interpellés ont entre 13 et 15 ans et étaient inconnus des services de police) et beaucoup plus violents. Dans les cités, une culture de la violence gratuite s’est développée : ce n’est plus seulement pour voler quelque chose que l’on a recours à la violence, mais pour un « mauvais regard », pour un refus de cigarette ou tout simplement pour rien – sinon pour le plaisir. Et l’on monte rapidement aux extrêmes : on continue à frapper qui est déjà à terre, on n’hésite pas à tuer. En France, selon une enquête de l’INSEE, on enregistre une agression gratuite toutes les 44 secondes…

    Le problème de l’immigration ne concerne pas seulement la France, mais aussi d’autres grandes nations européennes comme l’Allemagne où, pourtant, des phénomènes de cette ampleur ne se sont jamais produits. Qu’est-ce qui n’a pas fonctionné dans le modèle français en matière d’immigration ?

    C’est précisément la preuve que le seul multiculturalisme ne suffit pas à expliquer les émeutes. Ce qui est particulier à la France, c’est qu’elle a été pionnière en matière d’immigration : le problème se posait déjà chez elle alors que l’immigration commençait à peine dans des pays comme l’Italie, l’Allemagne, l’Espagne ou le Royaume-Uni. Il y a aussi le fait que l’immigration en France reste associée au souvenir de la période coloniale, qui a fait naître des rancœurs qui ne sont pas éteintes. On ne peut exclure enfin que certaines techniques de maintien de l’ordre qui se sont révélées ailleurs les plus efficaces ne sont pas toujours employées par la police française. La façon dont, pendant des décennies, on s’est acharné à nier l’existence des problèmes a eu des conséquences explosives.

    Les protestations de ces jours-ci auront-elles également des conséquences politiques en vue des élections européennes de l’année prochaine en renforçant la droite ?

    Oui, c’est évident. Des troubles comme ceux auxquels nous assistons en ce moment contribuent à faire ouvrir les yeux. Le Rassemblement national est déjà devenu le premier parti de France, et les sondages le donnent vainqueur des prochaines élections européennes. L’opinion française est excédée, elle n’en peut plus. Elle voit que le gouvernement est totalement dépassé par ce qui se passe. Une majorité de Français voudraient voir l’armée intervenir dans les banlieues. Emmanuel Macron se voit reprocher de n’avoir pas instauré l’état d’urgence, comme cela avait été fait en 2005. Le symbole le plus significatif est l’incroyable succès de la cagnotte lancée sur les réseaux sociaux pour venir en aide à la famille du policier auteur des coups de feu qui ont déclenché les émeutes : en moins de quatre jours, elle a dépassé le million et demi d’euros (avant d’être clôturée) ! Du jamais vu.

    La France est-elle perdue à jamais ou existe-t-il une chance de mettre un terme à cette situation ?

    Il ne faut jamais dire jamais ! Les vieux pays d’Europe ont connu dans le passé des épreuves bien plus graves, et s’en sont toujours relevés. Tout ce qui s’actualise potentialise une réaction en sens contraire. L’histoire est imprévisible. Elle est par définition le domaine de l’imprévu.

    Pensez-vous que ce qui se passe aujourd’hui en France puisse également se produire en Italie ?

    C’est possible, sinon probable. Toute la question est de savoir si le gouvernement italien saura tirer les leçons de ce qui se passe aujourd’hui de l’autre côté des Alpes.

     

    Alain de Benoist (Site de la revue Éléments, 7 juillet 2023)

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  • L'art de détruire les livres...

    Les éditions J'ai lu viennent de rééditer un essai de Michel Onfray intitulé Autodafés - L'art de détruire les livres.

    Philosophe populaire, polémiste, tenant d'un socialisme libertaire, Michel Onfray a publié de nombreux ouvrages, dont dernièrement sa trilogie  Cosmos (Flammarion, 2015), Décadence (Flammarion, 2017) et Sagesse (Flammarion, 2019), Théorie de la dictature (Robert Laffont, 2019), La nef des fous - Des nouvelles du Bas-Empire (Bouquins, 2020) ou, dernièrement, Anima (Albin Michel, 2023).

     

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    " Omerta, chasse aux sorcières et calomnie…
    Qui donc organise la censure par le silence, promeut de mauvais livres par la connivence idéologique, organise la désinformation par le discrédit ?

    Ce dernier demi-siècle a connu de grandes polémiques où la pensée dominante a défendu les idéologies qui lui servent de fondations : le maoïsme que Simon Leys démontait dans Les Habits neufs du président Mao (1971) ; le marxisme que renversait L’Archipel du Goulag (1973) de Soljenitsyne ; l’antiracisme que Paul Yonnet dénonçait dans Voyage au centre du malaise français (1993) ; l’impérialisme islamiste dont Samuel Huntington prophétisait la menace dans Le Choc des civilisations (1996) ; la psychanalyse que ridiculisait Le Livre noir de la psychanalyse (2005) ; le mythe d’un islam civilisateur de l’Occident que décomposait Aristote au mont Saint-Michel (2008) de Sylvain Gouguenheim.
    Michel Onfray raconte l’histoire de ce qu’Orwell, dans 1984, nommait les « crimes par la pensée ». "

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