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peuple - Page 11

  • Réquisitoire contre la Super-Classe Mondiale...

    Le 5 février 2018, Martial Bild recevait, sur TV libertés, Michel Geoffroy pour évoquer son essai intitulé La Super-Classe mondiale contre les peuples (Via Romana, 2018). Contributeur régulier sur le site de la Fondation Polémia, Michel Geoffroy est aussi l'auteur, avec Jean-Yves Le Gallou, du Dictionnaire de novlangue (Via Romana, 2015).

     

                                     

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  • La Super-classe mondiale contre les peuples...

    Les éditions Via Romana viennent de publier un essai de Michel Geoffroy intitulé La Superclasse mondiale contre les peuples. Énarque, essayiste et contributeur régulier au site de la Fondation Polémia, Michel Geoffroy est l'auteur avec Jean-Yves Le Gallou du Dictionnaire de Novlangue (Via Romana, 2015).

    Le livre est disponible à la commande sur le site de Via Romana.

     

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    " En Occident on ne vit plus en démocratie mais en post-démocratie : les gouvernements ne gouvernent plus mais obéissent aux marchés et aux banques, les puissances d’argent dirigent les médias et les peuples perdent leur souveraineté et leurs libertés.
       Pourquoi ? Parce que depuis la chute de l’URSS le pouvoir économique et financier s’affranchit du cadre national et veut gouverner à la place des États. Parce que la fin du communisme nous a libérés de la Guerre froide, et lui a succédé la prétention obstinée du messianisme anglo-saxon à imposer partout sa conception du monde, y compris par la force.
       Ce double mouvement s’incarne dans une nouvelle classe qui règne partout en Occident à la place des gouvernements : la super classe mondiale.
       Une classe dont l’épicentre se trouve aux États-Unis mais qui se ramifie dans tous les pays occidentaux et notamment en Europe. Une classe qui défend les intérêts des super riches et des grandes firmes mondialisées, sous couvert de son idéologie : le libéralisme libertaire et cosmopolite. Une classe qui veut aussi imposer son projet : la mise en place d’un utopique gouvernement mondial, c’est-à-dire la mise en servitude de toute l’humanité et la marchandisation du monde. Une classe qui manipule les autres pour parvenir à ses fins, sans s’exposer elle-même directement.
       Avec La Superclasse mondiale contre les peuples, Michel Geoffroy dresse un portrait détaillé, argumenté et sans concession de la superclasse mondiale autour de cinq questions : que recouvre l’expression superclasse mondiale ? Que veut-elle ? Comment agit-elle ? Va-t-elle échouer dans son projet de domination ? Quelle alternative lui opposer?
       Un ouvrage de référence pour comprendre les enjeux de notre temps. "

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  • La question corse : autonomie, souveraineté, localisme...

    Vous pouvez découvrir ci-dessous L'Hebdo politique de TV Libertés, présenté par Élise Blaise, qui, le 10 février 2018, recevait Laurent Ozon, pour évoquer la question corse après la visite dans l'île d'Emmanuel Macron... Essayiste et analyste politique, tenant d'une écologie localiste et identitaire, Laurent Ozon est l'auteur de l'excellent essai intitulé France, années décisives (Bios, 2015)...

     

                                 

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  • Enquête sur le populisme européen...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Richard Dessens cueilli sur Eurolibertés et consacré à la question du populisme. Docteur en droit et professeur en classes préparatoires, Richard Dessens a notamment publié La démocratie travestie par les mots (L'Æncre, 2010).

     

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    Enquête sur le populisme européen

    Dans l’acception imposée par ses adversaires, le populisme est une injure qui a succédé avantageusement à leurs yeux aux épithètes « nazi » ou « fascisme », un peu éculées. Ses ennemis ont tout de même conservé l’adjonction « extrême-droite » toujours vendeuse, à « populisme ».

    « Populisme » est plus moderne, le terme apparaît plus neuf, tout en étant chargé, en arrière-plan, de relents que l’on veut suggérer nauséabonds de manière subliminale. Tout est dans la finesse… Une finesse toutefois hasardeuse.

    Vouloir donner au populisme la version méprisante du mot « peuple » dont il est issu est déjà une première approche de l’esprit de ceux qui l’utilisent ainsi. On y instille le vieux « populo », ou la « populace », écervelée, en proie à ses pulsions primaires, tellement loin de la hauteur intellectuelle de l’élite – démocratique sans conteste – qui gouverne une grande partie de l’Europe.

    Le peuple, quelle horreur ! s’il n’est pas correctement éduqué par ceux qui savent où est son bonheur. De gré ou de force. À l’image du christianisme, qui au nom de la célèbre parole œcuméniste « allez enseigner toutes les nations », alla en effet « convertir » de gré, mais surtout de force, au prix de millions de morts bêtement attachés à leur religion naturelle, les survivants de ses prêches impératifs.

    L’élite démocratique, ou prétendue telle, ne tue plus pour convaincre. Elle assassine seulement socialement. La modernité a de ces nuances subtiles et civilisées…

    Les élites ont bien pris garde de ne pas évoquer le terme « démagogues » ou « démagogie », aux connotations de l’Antiquité grecque, et dont la réception dans l’opinion aurait pu être ambiguë. Ces élites ont bien raison car démagogie n’a rien à voir avec populisme d’une part, et, d’autre part, l’accusation de démagogie est déjà très répandue dans l’opinion à l’endroit des hommes politiques en place ! Le terme aurait prêté à confusion ! En outre, si le démagogue prend des décisions qui flattent le peuple, le populiste, lui, fait sienne, la volonté populaire. Ce n’est pas du tout la même chose. Et c’est bien cela qui exaspère les élites européennes.

    En effet, faire sienne la volonté populaire est normalement le but et la finalité même de la… démocratie. Cette démocratie dont les dirigeants et intellectuels sont censés être les champions à l’exclusion de tout autre. Mettre en avant que nos démocraties postmodernes ne sont pas, ou plus, l’expression de la volonté populaire, est impardonnable et inexpiable. Cela déclenche une avalanche de haine et de mépris contre ce « populisme » qui prétend être la vraie démocratie, contre celle, travestie, d’élites dictatoriales, qui veulent le faire taire à tout prix.

    Système électoral, matraquage médiatique univoque, complaisant et complice, mise au ban de la société des « déviants » écartés de toute fonction sociale, associative, culturelle d’importance reconnue : tout cela concourt à ostraciser le populisme et ceux qu’on lui identifie. Car les « populistes » refusent eux-mêmes ce terme, sauf Andrzej Duda en Pologne. Ce sont des démocrates qui sont en communauté d’idées avec la volonté populaire qui ne peut pas s’exprimer correctement dans des élections et à travers un climat qui en faussent la réalité.

    Qu’y a-t-il « d’extrême-droite » dans le fait de s’accorder avec la volonté populaire ? En Pologne, Hongrie, Slovaquie, Tchéquie, des « populistes » ont accédé au Pouvoir. Ailleurs, où les « démocraties » postmodernes sont plus sophistiquées et beaucoup mieux armées pour faire taire leurs opposants, il faudra plus de temps…

    En réalité, ce qui est insupportable c’est que le populisme marche sur les plates-bandes d’une démocratie devenue virtuelle et accaparée par un petit nombre, financiers, médias, intellectuels, arrivistes et opportunistes de tout poil.

    Démocratie rationnelle-légale telle que Max Weber la dépeignait, faite de la traduction de la raison (comprendre l’intelligence supérieure des élites) par la loi, et réservant la violence « légitime » à un tel État, c‘est-à-dire à ses dirigeants et inspirateurs. Remettre en cause ce schéma, le remplacer par un pays légal représentant un pays réel, c’est là le vrai, et nouveau, danger qui inquiète les dirigeants européens. La peur d’être débordés par… la démocratie elle-même, dont le populisme est le fruit, là où ses adversaires atterrés veulent faire croire qu’il est celui de la « dictature ».

    N’est-ce pas la démocratie postmoderne qui est devenue une dictature latente et insidieuse qui a fini par anesthésier ses citoyens-consommateurs ?

    Richard Dessens (Eurolibertés, 26 septembre 2017)

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  • Les dernières années de la démocratie en Europe ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un excellent texte de réflexion de Laurent Ozon consacré à l'épuisement de la forme démocratique face aux enjeux actuels. Chef d'entreprise et essayiste, Laurent Ozon est l'auteur de France, années décisives (Bios, 2015).

     

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    Les dernières années de la démocratie en Europe ?

    Les dernières élections marquent un nouveau recul de la participation au processus électoral. Les citoyens ont compris que leur vote n’a plus le pouvoir de transformer leur monde et que d’autres pouvoirs travaillent notre environnement et influent sur notre vie de quartier, familiale, professionnelle, etc. Ces autres pouvoir ne sont pas démocratiques. Face à eux, le pouvoir politique semble  impuissant et le vote comme acte politique, encore davantage. Le peuple qui est théoriquement la puissance agissante et simultanément, le destinataire de cette puissance, est transformé en profondeur par l’action de ces pouvoirs non démocratiques. Ce constat aboutit logiquement à un désengagement massif des citoyens à l’endroit du processus électoral. 

    La démocratie est un principe de gouvernement défini habituellement comme le « gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple ». « Gouvernement du peuple » signifie que le pouvoir tient sa légitimité du peuple qui l’incarne et est souverain. « Pour le peuple » signifie que les choix politiques sont dédiés aux intérêts du peuple ; et « par le peuple », qu’il exerce lui-même ce pouvoir par des mécanismes de décision, participation, délégation, contrôle, élection et de révocation.

    Dans les faits, cette définition, souvent invoquée pour définir le fonctionnement démocratique, est issue du discours de Gettysburg d’Abraham Lincoln. La démocratie athénienne accorde cette légitimité non au peuple mais au citoyen, qui ne l’est pas automatiquement du fait de son lieu de résidence ou de son appartenance à l’espèce humaine, mais le tient de son appartenance à la « Cité », c’est –à-dire à une institution politique selon des critères variables (naissance, fidélité supposée à l’institution, services rendus, âge, sexe, etc.). En synthèse, la démocratie définit, dans un processus récursif, les contours d’un acteur politique (le peuple, constitué par la somme de ses citoyens) qui est en lui-même la finalité de sa propre action et simultanément le moyen de la réaliser. 

    Cet idéal démocratique est dans les faits, contraint ou limité par trois paramètres :  1 - les compétences réelles des acteurs (peuvent-ils, par l’expression de leur volonté, réaliser leurs intérêts ?), 2 - leur nature (selon quels critères sont-ils admis à en être acteurs et donc décisionnaires et à en déterminer les finalités) et 3 - leurs moyens (par quels moyens exercent-ils leur volonté). 

    Le système démocratique présente un certain nombre de défauts bien identifiés depuis des siècles et sur lesquels je ne m’étendrai pas. Le premier d’entre eux est son caractère acompétent et donc d’un certain point de vue, irrationnel, dans la mesure où il institue le pouvoir d’une majorité, non d’une compétence ou d’une connaissance. D’autre part, les confrontations de pouvoir et d’influence, la recherche de l’assentiment des citoyens, favorisent logiquement la démagogie et/ou la trahison des promesses faites en période de campagne pour se faire élire. Enfin, comme les autres formes de gouvernement, sa corruptibilité introduit de nombreux biais dans son mode de fonctionnement. La démocratie ne fonctionne pas non plus de la même façon dans une société simple, homogène et de petite taille que dans une société complexe pour des multitudes hétérogènes. Dans une société complexe, la multiplication des institutions, des contre-pouvoirs, des lois et des règles rend l’exercice des institutions inaccessible au plus grand nombre et entraîne une professionnalisation de l’exercice du pouvoir et de fait aussi, un ralentissement de la prise de décision et de la mise en œuvre de ces décisions. C’est à cette tendance que semble répondre le processus de dé professionnalisation  de la vie politique engagé par Emmanuel Macron.

    Une fois énumérés ces reproches, il reste encore deux arguments lourds à l’encontre de la démocratie occidentale.

    Pour définir le pouvoir du peuple, par le peuple et pour le peuple, encore faut-il définir ce qui fait pouvoir. La population votante est aujourd’hui travaillée par des pouvoirs sur lesquels elle n’a pas prise. De fait, le « pouvoir » évoqué par Lincoln est devenu une partie de plus en plus faible des formes de pouvoir en concurrence dans la société complexe industrielle moderne. La plupart des autres formes de pouvoir ne subissent pas la contrainte des principes démocratiques.

    Les régimes démocratiques sont en principe organisés selon le principe de la séparation des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire, théorisé par Montesquieu, afin d’éviter leur concentration entre les mains d’une seule personne. Certaines Constitutions privilégient la stricte séparation des pouvoirs ; d’autres leur permettent, tout en étant distincts, de disposer de moyens de contrôle les uns à l’égard des autres. Ces trois pouvoirs se neutralisent d’ailleurs souvent entre eux.

    La démocratie dans une société complexe impliquant la représentation et la délégation, ne donne pas d’autre pouvoir au peuple que celui de choisir des représentants. Mais ceux-ci sont triés et littéralement "vendus" par d’autres pouvoirs (médiatiques, financiers  etc.) à un corps électoral dans un processus qui ressemble plus à celui de The Voice qu’à celui de l’Agora.

    La surdétermination des pouvoirs médiatiques, économiques ou technoscientifiques, soumet les citoyens à des rapports de force contre lesquels les lois, polices ou armées sont largement inopérantes. La transformation des sociétés est le fait de pouvoirs non-démocratiques et les systèmes démocratiques s’adaptent à des contraintes sur lesquelles ils n’ont pas prise mais qui eux, exercent leur puissance sur la source de la légitimité : le peuple. De fait, l’impératif de souveraineté à la base du principe démocratique (peuple souverain) est vidé de sa substance. Si la somme des pouvoirs qui impriment leurs capacités de transformation sur notre société ne sont pas démocratiques, la société démocratique, ne pouvant plus compenser ses faiblesses endogènes (loi du nombre, corruptibilité, lenteur, irrationalité, compétences, démagogie) expose les « citoyens » à toutes les expérimentations sociales, économiques, culturelles ou normatives. Le processus électif n’est alors plus que la courroie de transmission des véritables pouvoirs, de ceux qui les détiennent, et des objectifs de ceux qui les déterminent.Il est à peine exagéré de dire que la démocratie parlementaire est la forme de gouvernement qui abandonne le plus de puissance aux pouvoirs non-démocratiques.

    Le deuxième argument qui peut nous faire sérieusement douter des vertus de la démocratie parlementaire occidentale est plus définitif. Dans la mesure où elle fait du peuple en état de voter, la source légitime et la destination de son action, elle est devenue un processus de légitimation perpétuel d’un existant anthropologique « travaillé" par des pouvoirs non-démocratiques.

    Explications. Chaque critère (essence : qui est le peuple ? projet : quelle est sa volonté ? méthode : comment réalise-t-il cette volonté ? outils : via quelles institutions ?) rétroagit sur l’autre. C’est dans ce processus de rétroaction facilité que se situe la spécificité du système démocratique. Et nous avons vu que le mode de gouvernement démocratique occidental, est récursif puisqu’il définit les contours d’un acteur politique (le peuple, constitué par la somme de ses citoyens) qui est en lui-même la finalité de sa propre action et simultanément le moyen de la réaliser. 

    De fait, les transformations affectant l’un de ces quatre paramètres (essence, projet, méthode et outils), modifient les autres et justifient des adaptations permanentes sous la pression des rapports de forces. Cette capacité d’adaptation des formes de gouvernement démocratiques à leurs contraintes historiques (épidémies, transformation de la composition de la population, évolution culturelles, économie, etc.) peut être perçue comme une force mais forge par ailleurs une instabilité de nature particulière. 

    Les redéfinitions de ce qui constitue le « peuple », les « nationaux » ou « citoyens » sont permanentes, soit du fait de l’évolution naturelle de sa composition, soit du fait des manipulations par des représentants politiques de la composition de la population en attribuant le statut de citoyen ou « national » selon leurs objectifs électoraux ou leurs visions idéologiques. L’immigration massive modifiant la composition du « peuple », a bien transformé simultanément la nature de ses besoins, l’expression de sa volonté et ainsi, les moyens de parvenir à le servir.

    Winston Churchill évoquait la démocratie comme « la pire forme de gouvernement à l'exception de toutes celles qui ont été essayées au fil du temps » ; elle est aujourd’hui le paravent de toutes les autres formes de gouvernement de l’histoire et de nouveaux pouvoirs, dissimulés derrière le masque de la souveraineté populaire. Ces pouvoirs en s’exerçant, « travaillent » en profondeur le peuple, et modifient en profondeur la source initiale de la légitimité. La démocratie est un mécanisme de gouvernement rétroactif qui assure la continuité de ses institutions et de ses méthodes de gouvernement en les adaptant à une population changeante ou en sacrifiant ses méthodes, ses principes et ses populations initiales au rapport de force majoritaire, et ce qui en découle. 

    De ce fait, le système démocratique occidental ne peut constituer un système de gouvernement protecteur pour la population qui l’institue. Ceci pour une raison simple : ce système redéfinit ce qui constitue le peuple, la nature des pouvoirs sur lesquels il a prise, et les moyens de ses institutions.

    Une population ainsi modifiée décide inévitablement de changer la définition de ce qui le constitue. Le changement de définition de ce qu’est le peuple est le processus auto-correctif par lequel les institutions, leurs représentants qualifiés et la masse du corps électoral modifié assoit les transformations et même le remplacement du peuple autochtone, par une masse votante, dirigée par des élites triés par des pouvoirs non-démocratiques. 

    En conclusion, la démocratie occidentale est l'exercice du droit du plus fort (les plus riches et / ou les plus nombreux) et non un mode de gouvernement capable d’assurer la continuité d’un projet civilisationnel, d’une culture ou d’une population initiale. Elle est simultanément la plus corrompue par les influences des pouvoirs non-démocratiques et la moins conservatrice sur le plan des fondamentaux anthropologiques, civilisationnels et culturels. Les institutions démocratiques présentent l’avantage d’être dynamiques, récursives et auto-correctrices et l’inconvénient de ne pas protéger l’humus des sociétés : les populations qui les ont fait advenir dans l'histoire..

    Sapée par l’élargissement et la complexification des sociétés, la démocratie ne pourra retrouver sa pertinence comme mode de gouvernement que dans des formes d’organisations relocalisées et simplifiées. Compte-tenu de la nature des enjeux prioritaires auxquels nombre de peuples devront faire face en Europe dans les années à venir, la démocratie parlementaire, devenue une cybernétique sociale à l’usage de l’Etat profond occidental, laissera probablement la place à des formes de gouvernement plus adaptées aux enjeux et aux besoins des Européens.

    Ce désengagement de l'Europe à l'égard de la forme démocratique parlementaire aura des conséquences importantes dans nombre de zones qui ont subi les influences de son hardpower puis de son softpower ces cent dernières années. En particulier les pays qui ont transposé, souvent sous la contrainte, le fétichisme organisationnel occidental. Ce désengagement, enfin, pourrait marquer le début d'une reprise de la digestion institutionnelle et politique du parlementarisme démocratique, par des pays qui disposent de leur génie politique propre. Car la condition sine qua nonde la renaissance du principe démocratique sous une forme modifiée  sera encore qu'il existe des peuples vivants pour le rendre possible...

    Laurent Ozon (Century news, 13 juin 2017)

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  • Elites installées, élites naturelles et populisme...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue cueilli sur le site Idiocratie, qui rappelle avec talent la différence entre la technocratie prédatrice et l'aristocratie organique...

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    Élites installées, élites naturelles et populisme

    Dans le langage officiel sans cesse martelé, celui des élites installées, le « populisme » semble synonyme d'immaturité politique. Mais, peut-on se demander, ce travers d'immaturité, à quoi conviendrait-il de le reconnaître ? A la fâcheuse volonté de poser certaines questions, notamment celles qui renvoient à des enjeux décisifs ? Curieuse immaturité ! Pourtant, c'est ce qu'expriment nombre de dirigeants politiques, le plus souvent à mots couverts, mais parfois directement comme le fit un jour Ségolène Royal.

     
    Celle-ci répondit en effet à un journaliste qui l'interrogeait quant à la possibilité d'un référendum sur le maintien de la France dans l'UE : « nous croyons en la démocratie, mais nous croyons aux bonnes questions par rapport aux bonnes réponses ». Autrement dit, nous, classes dirigeantes, décidons unilatéralement quelles sont les bonnes réponses. Résultat : il n'y a pas vraiment de questions, pas autrement que pour la forme. Ce qui témoigne d'une vision purement oligarchique de la démocratie et énonce la vérité profonde du système. A ce titre, on ne saurait trop remercier Ségolène Royal pour l'inégalable candeur dont elle fait preuve dans l'expression du cynisme. Pour cela, nul doute, on la regrettera.
     
    Remarquons-le, si l'élite dirigeante prétend ainsi exercer une tutelle éclairée sur la communauté politique, c'est précisément parce qu'elle se considère éclairée : elle posséderait d'emblée les bonnes réponses. A vrai dire, le mode de connaissance qu'elle revendique ainsi implicitement procède d'une fonction oraculaire, vieille comme le monde mais jamais disparue. C'est le tropisme archaïque des initiés qu'ont notamment vécu les Romains pendant quelque temps avec les fameux pontifes, détenant seuls la connaissance mystérieuse des règles applicables, et dont la communauté civique s'est par la suite libérée au profit des jurisconsultes et de l'élaboration ouverte du droit. C'est cette tendance récurrente, dans l'histoire des sociétés, selon laquelle se forment périodiquement des castes se voulant productrices et dépositaires d'un savoir, non pas issu d'un effort dialectique, comme toute connaissance exigeante, mais d'un savoir autogène et imposé comme tel. Aujourd'hui, il y a là un trait qui ne trompe pas, quant à la nature oligarchique de l'élite qui nous gouverne.
    Or, barricadée dans ce fantasme oraculaire, cette élite tente constamment de disqualifier le courant populiste. Non seulement en déniant tout jugement lucide au commun de la population sur ce qui le concerne, mais encore en laissant planer l'idée suivante : le peuple - qui, en pratique, correspond à l'ensemble de la communauté nationale, interclassiste par définition - serait dépourvu d'élites par nature. En somme, l'excellence serait du côté du système (haute finance, grands médias et gouvernants) et la médiocrité dans le camp de ceux qui le subissent. On doit le constater, il s'agit bien là d'une vision dualiste de la communauté politique, dans laquelle existerait ainsi une séparation étanche entre les meilleurs et les autres, vision relevant d'un biais cognitif proprement oligarchique.
     
    De fait, la sécession des élites, évoquée par Christopher Lasch, est d'abord une sécession accomplie dans les représentations. L'oligarchie ne conçoit la cité qu'à travers une division de principe : d'un côté, une caste qui, forte du magistère qu'elle n'hésite pas à s'attribuer, exerce un pouvoir unilatéral, de l'autre, une masse indifférenciée. Sur la base de cet imaginaire, cette même oligarchie entretient avec la cité un rapport ambivalent. Elle est dans la cité, mais sans en jouer le jeu. Elle est à la fois à l'intérieur et en dehors, son but, en tout état de cause, n'étant pas de détruire la cité mais de l'instrumentaliser à son profit.
     
    Selon une conception traditionnelle de type aristocratique, apparaît au contraire un tout autre rapport entre les meilleurs et les autres, entre le petit nombre et le grand nombre. Prenons ici la notion d'aristocratie non au sens sociologique mais en référence au principe d'excellence réelle. Principe que, comme l'enseigne la moindre expérience, certains individus incarnent mieux que d'autres (d'où une inégalité foncière, différenciation irréductible qui constitue sans doute l'invariant anthropologique le plus embarrassant pour notre époque).
     
    L'excellence à la place des oracles
     
    On peut observer que, dans le monde hellénique et romain, toutes considérations de statut mises à part, les meilleurs (aristoï, en grec) sont, idéalement, ceux qui pratiquent le mieux les vertus de courage, de sagesse pratique (phronesis) et de justice. Il faut insister ici sur la notion de phronesis. Disposition de la personne au jugement perspicace non dogmatique et sens aigu des limites, elle constitue « l'une des facultés fondamentales de l'homme comme être politique dans la mesure où elle le rend capable de s'orienter dans le domaine public, dans le monde commun », selon les termes d'Hannah Arendt. Cette phronesis, comme l'avait antérieurement montré Aristote, s'inscrit dans une conception délibérative de l'action et notamment de l'action commune. A ce titre, notons-le particulièrement, elle apparaît comme un précieux garde-fou contre toute velléité de sécession.

     

    Pour bien saisir à quel point une telle vertu favorise un engagement non faussé dans la vie de la cité, il faut situer la question au niveau des modes de perception commune. Il apparaît en effet qu'en pratiquant la vertu prudentielle de phronesis, les meilleurs, s'ils cultivent une exigence singulière, n'ont pas pour autant un rapport au réel foncièrement différent de celui du peuple en général. Ils procèdent là pleinement de la matrice communautaire. De ce point de vue, il n'y a donc pas de fossé entre les meilleurs et le grand nombre, tous partageant, pour l'essentiel, la même vision du monde. Qu'il s'agisse de mythes, de religions ou de toute autre conception globale de l'existence, il y a unité de tradition. N'en déplaise aux défenseurs d'un lien social magique, prétendument libre de toute détermination, la solidarité du cadre de perception est une condition de la solidarité de destin.
    Dans un modèle de ce type, le souci de stabilité qui anime les meilleurs reflète ainsi largement les préoccupations de la population. D'où la volonté aristocratique traditionnelle, attestée dans la Rome antique et dans l'ancienne Europe, d'assurer la protection des mœurs et des coutumes. A rebours de la chimère des avant-gardes éclairées, les meilleurs n'incarnent, à ce titre, que la composante la plus dynamique de la sagesse commune. Aussi n'est-il pas absurde de dire que l'aristocratie bien comprise, loin de tout esprit de caste, n'est que la fine fleur du peuple. Du moins tant qu'elle n'emprunte pas la voie d'un contrôle et d'une transformation de ces mœurs et règles communes et ne se transforme alors elle-même, de facto, en oligarchie, avec son esprit de rupture, sa vulgarité et ses rêves de yachts.
     
    Différenciation et liberté commune
     
    On ne doit pas cesser de le dire, la communauté politique, aujourd’hui comme hier, recèle des élites naturelles, lesquelles ne s'adonnent généralement pas à la vaine quête du pouvoir. De toute évidence, le rejet des élites que manifeste le populisme ne relève donc nullement d'une quelconque opposition à la compétence, à l'efficacité, au principe de l'élite en soi. C'est au contraire en vertu de ce principe qu'est contestée la nomenklatura, souvent douée pour l'incurie.
     
    Il n’en faut pas moins tenir compte de l’entropie actuelle. Celle-ci peut être enrayée cependant. De fait, en misant davantage sur les ressources de l'excellence, en donnant la priorité à ses élites naturelles, toujours renaissantes, sur les technocraties prédatrices et niveleuses, la communauté peut et doit retrouver toute la vitalité de ses différenciations organiques. Rien n'est pire en effet qu'un peuple réduit à l'état de foule sentimentale et versatile, tantôt saisie d'une saine réactivité, tantôt séduite par les illusionnistes au pouvoir et inclinant à la servitude volontaire. Qui dit foule dit aliénation et, partant, impuissance à défendre la liberté commune : question vitale au cœur de l'enjeu populiste. A cet égard, notons-le, il est bien établi qu'une longue tradition aristocratique, avec son art de la bonne distance, sa lucidité au long cours et sa culture de l'exemple, a beaucoup fait, dans l’histoire européenne, pour la liberté concrète du peuple. C'est précisément à ce rôle salutaire joué par les meilleurs que faisait allusion Ernst Jünger quand il parlait, dans « Le Noeud gordien », de « la liberté élémentaire, c'est-à-dire la liberté des patres*, dont dispose un peuple ». En définitive, serait-il hasardeux de penser qu'un populisme conséquent ne saurait qu'être, au sens indiqué du terme, aristocratique ?
    Des idiots (Idiocratie, 13 mai 2017)

    *patres : la noblesse romaine, dans la rhétorique latine classique. Sens symbolique, ici.

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