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islamisme - Page 16

  • Un pouvoir impuissant...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue François-Bernard Huyghe, cueilli sur son blog Huyghe.fr et consacré à l'impuissance politique dont fait preuve le pouvoir en place face au terrorisme islamiste. Spécialiste de la stratégie et de la guerre de l'information et directeur de recherches à l'IRIS, François Bernard Huyghe, auteur de nombreux livres, a récemment publié La désinformation - Les armes du faux (Armand Colin, 2015), Daech : l'arme de la communication dévoilée (VA Press, 2017) et Fake news - La grande peur (VA Press, 2018).

     

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    Le pouvoir impuissant ?
     
    Le crime de Trèbes vient d’offrir à l’opposition une occasion de s’opposer sur un thème sécuritaire porteur : le laxisme supposé du gouvernement, la faiblesse des mesures contre les fichés S. C’est de bonne guerre et l’accusation de « coupable naïveté » peut porter : l’opinion est exaspérée par l’attentat de trop (alors que l’on commençait à claironner la défaite totale de Daesh, écrasé en Syrie). Cette opinion est surtout choquée de constater que le renseignement et le repérage des radicalisés ne sert qu’à découvrir le lendemain matin ce que l’on aurait dû savoir la veille du crime. On peut donc être fiché, rééditer à peu près le crime de Coulibay (tirer sur des policiers, se faire tuer avec des otages dans un supermarché), avoir à peu près le même profil, et ce trois ans plus tard sans que rien n’ait changé. Autre signe de l’évolution de l’opinion : les foules ne songent plus guère pour le moment à défiler à la République pour refuser l’amalgame et dire « Nous sommes... » (nous sommes quoi, au fait ? On ne peut pas scander : « nous sommes Beltrame »). Ni les défilés, ni les chants, ni les démonstrations de fermeté d’âme d’une population (« même pas peur ») attachée au vivre ensemble n’empêchent de nouveaux djihadistes de vouloir nous « punir » pour les bombardements de Syrie et d’Irak. Fin des grandes communions dans les « valeurs ». Fin des solutions magiques.
     
    D’où une fracture, sensible dans tous les débats sur les plateaux de télévision (et qui ne correspond pas forcément à droite/gauche). D’un côté les partisans de l’État de droit intangible (dans notre système, on ne peut pas incarcérer un fiché S qui par définition n’est pas inculpé mais signalé, on ne peut pas les expulser, on ne peut pas interdire le salafisme, etc.) et de l’autre ceux qui proclament que nous sommes en guerre et que des mesures d’exception se justifient.
     
    Les premiers n’ont pas grand chose à proposer, quelques mois après la loi pérennisant l’état d’urgence et quelques semaines après le plan de déradicalisation d’Edouard Philippe. Les seconds ont beau jeu de réclamer des mesures qui ne seront jamais prises. Les premiers accusent les seconds de susciter des tensions entre communautés, les seconds accusent les premiers de mollesse. Rien de plus normal.
     
    Du reste, dans son discours à l’Assemblée nationale, le premier ministre, très solennel, a joué cette carte : impossible de prendre des mesures juridiquement inapplicables. Et inenvisageable d’interdire le salafisme, qui est une idée (soit dit en passant, il y a trois salafismes, quiétiste, politique et djihadiste). Edouard Philippe a joué le principe de réalité et promis des moyens (un corps de magistrats) : ce sera un long combat, nous renforcerons les moyens, ne nous divisions pas. Ce qui était rhétoriquement impeccable, mais ne résout rien. Une hypothèse à retenir est celle de la « routine terroriste » (comme celle qu’a connu la Russie entre 1867 et 1917) : des attentats se répétant sporadiquement et des groupes recrutant toujours des volontaires pour tuer et mourir. Sans le formuler aussi explicitement, le gouvernement n’a donc, dans un premier temps, d’autre choix que l’argument qu’il n’y a pas de solution miracle et que nous devons nous mobiliser durablement. Incontestable, mais derrière ce débat un peu convenu sur la répression et son degré de fermeté, les véritables enjeux sont plutôt à chercher dans les faiblesses du renseignement : l’incapacité de traiter trop de données, trop de fichés, en repérant les signaux de passage à l’acte. Ce qui est sans doute plus facile à constater qu’à corriger (nous n’avons pas manqué non plus de lois sur le renseignement).
     
    À moins, bien sûr, que nous soyons capables d’engager une lutte idéologique à long terme, au-delà de simple mesure de traitement psychologique ou social des « radicalisés », comme on traite les alcooliques ou les cas sociaux. Et il faudra mieux que les campagnes de communication et contre-discours que nous avons vues : confiées à quelques agences qui n’avaient visiblement rien compris au code mental des djihadistes.
     
    Que pourrait faire l’actuel pouvoir, une fois déplorés l’instrumentalisation et rappelée la fermeté républicaine ? Après tant de lois et de plans contre-terroristes depuis les années 90 ? On a dit qu’Emmanuel Macron avait une vision « sociologique » et non idéologique du terrorisme. On se souvient de ses déclarations sur la composante « psychiatrique » du terrorisme « endogène » (et certes les Merah, Coulibaly ou Lakdim ne viennent pas d’un autre continent). On se souvient aussi de ses analyses sur notre « part de responsabilité », sur le « terreau de la défiance » et le manque de mobilité sociale à la source de la radicalisation. Un discours, au fond, assez technocratique, en ce sens que derrière une guerre mortelle des valeurs et des croyances, il ne conçoit que des « problèmes » socio-économiques ou des rigidités de la société, toutes choses que doit guérir une gestion moderne et ouverte. L’actuel pouvoir est-il capable de saisir la dimension idéologique et historique de la haine djihadiste ? de renoncer à traiter une conviction comme une dysfonction ? Il va, dans tous les cas, lui falloir réviser son discours positif, pragmatique et consensuel.
     
    François-Bernard Huyghe (Huyghe.fr, 27 mars 2018)
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  • Feu sur la désinformation... (179)

    Vous pouvez découvrir ci-dessous un nouveau numéro de l'émission I-Média sur TV libertés, consacrée au décryptage des médias et dirigée par Jean-Yves Le Gallou, président de la fondation Polémia, avec le concours d'Hervé Grandchamp.

    Au sommaire :

    • 1 : Colonel Beltrame, tué par balles, poignardé ou égorgé ?
      Attaque terroriste à Trèbes dans l’Aude, une information a été masquée par le gouvernement et l’AFP : le colonel Beltrame a été égorgé. Retour sur les bobards et les erreurs des médias commises à autour de la couverture de l’attentat.
    • 2 : Le Zapping d’I-Média 
      Sur France Inter, la journaliste Caroline Becard dresse le portrait de la ministre de la santé Agnès Buzin. « Votre compétence, votre ténacité sont salués quasi unanimement […] vous êtes discrètes, droite, souriante, vous ne prenez la parole que si vous êtes poliment invitée ». Un cirage de pompe en bonne et due forme digne de la propagande de Corée du Nord.

    • 3 : Lakdim le terro, Beltrame le héros
      Après l’attentat c’est l’heure du portrait des protagonistes. Portrait de Radouane Lakdim « le petit délinquant devenu terroriste », portrait du colonel Beltrame le héros qui force l’admiration. 
    • 4 : Les tweets de la semaine
      Bobard par titrage dans le journal de référence Le Monde. Le 27 mars, le monde titrait : « Meurtre de Mireille Knoll : tous les partis, sauf le FN appellent à la marche blanche contre l’antisémitisme ». Dans le cœur de l’article, on peut apprendre que Marine Le Pen était considérée comme indésirable par le CRIF. 
    • 5 : L’armée, dernier refuge du diable
      Pour Libération, le JDD, et Médiapart, l’armée serait sexiste, trop blanche, trop catholique. C’est une véritable attaque menée contre les militaires.

     

                                   

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  • Un héritier des chevaliers...

    Vous pouvez découvrir ci-dessous une chronique d'Éric Zemmour sur RTL, datée du 27 mars 2018 et consacrée à la mort du lieutenant-colonel Arnaud Beltrame au cours de l'opération contre le terroriste islamiste du supermarché de Trèbes...

     

                                          

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  • Arnaud Beltrame et Redouane Lakmid : la France et l’anti-France...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Gabriel Robin, cueilli sur le site de la revue L'Incorrect et consacré à l'attaque terroriste qui s'est déroulée le vendredi 23 mars 2018 Trèbes, dans l'Aude.

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    Arnaud Beltrame et Redouane Lakmid : la France et l’anti-France

    Khaled Kelkal. Mohamed Merah. Salah Abdeslam. Chérif et Saïd Kouachi. Sid Ahmed Ghlam. Abdelhamid Abaaoud. Samy Amimour. Amedy Coulibaly. Ismaël Omar MostefaÏ. Mehdi Nemmouche. Ahmed Hanachi. Une liste non exhaustive de terroristes islamistes qui ont frappé sur le sol français. Vendredi 23 mars, le binational franco-marocain Redouane Lakdim s’est ajouté à la cohorte des zombies d’Allah voulant « venger la Syrie », faisant des blessés graves et quatre morts, dont l’héroïque lieutenant-colonel de gendarmerie Arnaud Beltrame, qui a fait le choix de prendre la place des otages retenus dans le supermarché attaqué. Nul besoin de s’appeler Sherlock Holmes pour comprendre ce qui réunit ces terroristes islamistes qu’on dit « Français », car ce qui les rassemble est qu’ils se ressemblent.

    Pourtant, Gérard Collomb se montrait surpris à l’heure de commenter l’ignoble série de meurtres de Carcassonne et Trèbes dans l’Aude :« Nous l’avons suivi et nous pensions qu’il n’y avait pas de radicalisation, mais il est passé à l’acte brusquement. Il était connu pour possession et deal de stupéfiants. On ne pouvait pas dire qu’il allait être un radical passant à l’acte dans les temps qui venaient ». François Molins, procureur de la République de Paris, lui a d’ailleurs emboité le pas, estimant lui aussi que « rien ne pouvait laisser présager un passage à l’acte ». Un salafiste d’origine marocaine défavorablement connu des services de renseignement, et même fiché S depuis 2014, voyou multirécidiviste condamné pour outrage à agent, violences et détention d’armes, ayant cherché à plusieurs reprises à se rendre en Syrie n’a vraiment pas la gueule de l’emploi. Non ? 

    Depuis septembre 2017, mois où ont été tuées deux jeunes femmes en gare de Marseille par un islamiste clandestin relâché peu de temps auparavant, la France a connu une relative accalmie sur le front terroriste. Rien ou si peu à signaler. Mais l’ennemi est ici, sur le sol français. Comme Emmanuel Macron l’a rappelé lors de sa conférence de presse, la menace est « endogène ». Malheureusement, il a oublié de préciser que ses racines étaient exogènes, les terroristes islamistes n’étant que les fruits pourris de l’immigration de masse proprement insupportable qui s’abat sur la France depuis des décennies, sans que personne ne semble pouvoir en enrayer la marche.

    « On ne pouvait pas savoir, les profils sont trop différents », nous dit-on après chaque attentat. Parce qu’on ne veut pas nous avouer la cruelle vérité, celle qui saute aux yeux de tous les Français normalement constitués. On sait très bien qui est potentiellement dangereux, mais les profils correspondants sont beaucoup trop nombreux pour que l’on puisse tous les tenir à l’œil, encore moins les mettre hors d’état de nuire. Les voyous islamisés biberonnés à l’infra-culture télévisuelle et à une lecture littérale du Coran, agrémentée de superstitions maghrébines, se comptent par dizaines, sinon par centaines de milliers dans l’hexagone.

    Que faire, donc, pour limiter la casse ? Le premier volet est technique. Une tâche que remplit correctement l’Etat qui a modernisé ses outils de renseignement, formé ses effectifs d’enquêteurs et ses brigades d’intervention. Emmanuel Macron montre d’ailleurs la volonté sincère de travailler ces sujets. Du reste, François Hollande essayait aussi. Il serait faux d’imaginer que nos dirigeants se moquent de la situation. Au contraire, ils la prennent au sérieux et la déplorent. Toutefois, leurs actions sont entravées par divers facteurs, parmi lesquels l’inaptitude à prendre au sérieux la question migratoire. C’est peut-être même le point le plus important. Sans immigration, pas d’islamisation de la France. Sans islamisation, nous ne serions pas victimes d’une telle folie terroriste. Est-ce si difficile à comprendre ?

    Puisque certains islamistes ne possèdent que la nationalité française, la lutte contre l’immigration ne suffira pas. Qui pourrait cependant contredire que l’inversion des flux migratoires ne serait pas une bonne mesure à adopter en urgence ? Ce n’est pas si compliqué à mettre en place avec un peu de bonne volonté politique. Il faudrait, en toute simplicité, se doter des moyens légaux et logistiques nécessaires pour expulser tous les étrangers coupables de délits et de crimes au terme de leur peine de prison, en réinstaurant la double peine, sans oublier les étrangers en situation irrégulière qui s’échappent dans la nature. Et pourquoi s’arrêter en si bon chemin ? Ajoutons à ce lot les étrangers connus pour leurs sympathies islamistes. Expulsons-les tous : une bonne base de travail.

    Bien sûr, dans un même ordre d’idées, éviter de donner la nationalité française à des voyous qui haïssent la France ne serait pas du luxe. Nous avions enquêté sur les pratiques de la préfecture de la Seine-Saint-Denis, où les candidats à la naturalisation se présentent parfois en complet salafiste. Des faits choquants qui ne nous avaient pas laissés insensibles. Mais le cas de Redouane Lakdim semble beaucoup plus édifiant. Redouane Ladkim aurait été naturalisé en 2004 à l’âge de douze ans, du fait de ses cinq ans de résidence sur le territoire national, juste après son père devenu lui aussi Français peu de temps auparavant. Trèbes est donc aussi le procès de l’immigration. La France est trop généreuse, adoptant des milliers de « français de papier » tous les ans. Parmi ces néo Français, censés l’être autant que vous et moi, supposément les héritiers de Jeanne d’Arc et Charlemagne, une forte proportion de naturalisés qui haïssent la France ou la nient.

    Natacha Polony a évoqué l’urgence du « combat idéologique », lequel se doublerait d’un « réarmement moral du pays ». Soit, mais soyons clairs, il est strictement impossible d’amener ou de ramener ces milliers d’individus vers la France ou vers la République. Dans l’immédiat, l’essentiel est donc de les chasser, de les emprisonner et de les éliminer. Les candidats potentiels seront peut-être découragés. Dans L’Art de la Guerre, Sun Tzu dit que « Lorsqu’un chat se tient à l’entrée du trou du rat, dix mille rats ne se hasardent pas à en sortir ; lorsqu’un tigre garde le gué, dix mille cerfs ne peuvent le traverser ». La peur doit changer de camp. Or, les anti-Français ne craignent pas plus la France, que les Français ou leur Etat. Ils les savent faibles. Aussi ne ploient-ils pas le genou, comme l’auront encore illustré les insultes lancées aux fonctionnaires de police venus visiter le domicile de Redouane Lakdim. La séparation est un phénomène naturel. Le développement séparé un fait que quelques exceptions heureuses ne démentent pas. Nous ne pouvons rien exiger d’autre d’une communauté que le respect des lois.

    Un Français aura sauvé l’honneur ce triste jour. En se sacrifiant pour ses compatriotes, Arnaud Beltrame a montré que l’esprit de résistance, celui des grognards de l’Empereur ou des Poilus de Verdun, était toujours bien vivant. Ironie de l’histoire, le lieutenant colonel Beltrame a été formé à l’école de préparation militaire de Saint-Cyr, fondée par Napoléon Bonaparte, dont le fonctionnement du lycée préparant son concours d’entrée a été violemment critiqué au matin de l’assaut islamiste par le journal Libération… Il a succombé à ses blessures dans la nuit, tel un héros des chansons de geste de naguère. La France ne l’oubliera jamais, ainsi que toutes les victimes françaises innocentes des meurtriers de l’islam de combat. Puisse aussi son sacrifice réveiller les consciences assoupies. S’il est évident que de nouvelles attaques se produiront durant les prochaines années, nous ne devrons jamais nous y résoudre.

    Gabriel Robin (L'Incorrect, 24 mars 2018)

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  • Vers la partition ?...

    Le 2 janvier 2018, Martial Bild recevait, sur TV libertés, Alexandre Mendel, à l'occasion de la sortie de son livre Partition (Toucan, 2017), pour évoquer ces territoires perdus de la République qui sont devenus des territoires abandonnés à l’islamisme. Journaliste d'investigation, Alexandre Mendel a déjà publié La France djihadiste (Ring, 2016).

     

                                         

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  • La nouvelle guerre civile...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'Eric Werner, cueilli dans le n°106 d'Antipresse, lettre d'information de Slobodan Despot, dont la nouvelle formule sera disponible en début d'année 2018. L'auteur évoque une Europe en passe de devenir une terre de confrontation entre deux idéologies totalitaires, l'islamisme et le féminisme...

    Auteur d'un essai essentiel, L'avant-guerre civile (L'Age d'Homme, 1998 puis Xénia, 2015), Eric Werner vient de publier dernièrement Un air de guerre (Xénia, 2017).

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    La nouvelle guerre civile

    On assiste à l’heure actuelle au déferlement d’une marée féministe, mais en face il y a la marée islamiste. D’une certaine manière, le féminisme et l’islamisme sont les deux grandes idéologies de notre temps. Il en existe d’autres, assurément, mais leur importance est comparativement moindre.

    Il y a une trentaine d’années, l’historien allemand Ernst Nolte avait écrit un ouvrage intitulé: La guerre civile européenne, 1917–1945: national-socialisme et bolchevisme[1]. On serait tenté aujourd’hui d’écrire: islamisme et féminisme, la nouvelle guerre civile européenne.

    Islamistes et féministes mènent parfois des combats communs. L’ennemi de mon ennemi est mon ami. Voyez ainsi l’attitude de certaines féministes sur la question du voile intégral. La haine de l’ancien monde l’emporte ici sur certaines peurs: peurs, objectivement parlant, pourtant, bien fondées (il est permis au moins de le penser). La dénonciation du sexisme par les féministes est à géométrie variable. On l’a bien vu encore lors des émeutes sexuelles de Cologne en 2015.

    Pour autant, ces deux idéologies n’en sont pas moins fondamentalement antagonistes.

    Il n’est pas inutile à cet égard de revenir sur l’affaire Ramadan. Cette affaire est emblématique à plus d’un titre. Elle montre, en particulier, quelque chose d’important, à savoir que la seule force aujourd’hui capable d’équilibrer l’islamisme en Europe occidentale, autrement dit de le tenir en échec, est le féminisme. Ailleurs (en Russie, en Inde, au Moyen-Orient même, etc.), il en va peut-être autrement. Mais on ne parle pas de ce qui se passe ailleurs. On parle de ce qui se passe en Europe occidentale. S’il n’y avait pas aujourd’hui le féminisme, si le féminisme n’existait pas, l’islamisme, à coup sûr, aurait probablement aujourd’hui partie gagnée dans nos pays. Il y régnerait d’ores et déjà en maître. Car, à part le féminisme, qu’est-ce qui lui fait encore obstacle: les anciennes Églises chrétiennes désormais converties à l’islamophilie? Il est assez manifeste que non. L’État laïc et républicain? Le dernier roman de Houellebecq, Soumission, décrit bien la mécanique inexorable d’assujettissement progressif dudit État à l’islamisme. Mais il y a le féminisme.

    Jusqu’ici, Ramadan volait de succès en succès. Toutes les portes lui étaient ouvertes (médias, universités, etc.). Il pouvait tout dire, tout se permettre. Ce grand islamologue, disait-on. Sauf que, pour une fois, il s’est cassé les dents. A force de fréquenter l’ancien monde, il s’était mis en tête que les choses iraient désormais très vite. L’ancien monde? Une pomme pourrie. Mais il avait oublié le féminisme. Là, pour une fois, Ramadan a trouvé à qui parler. Un adversaire à sa mesure, en quelque sorte.

    On ne se fait pas trop de souci pour Ramadan lui-même. Tôt ou tard il rebondira. Il n’est même pas sûr qu’il passe par la case prison. Salafisée (ou qatarisée) comme elle l’est aujourd’hui, jamais la France officielle n’osera l’envoyer derrière les barreaux. Ou ce serait très surprenant. Mais ce qui vient de se passer n’en laissera pas moins des traces. Ce n’est pas impunément qu’on se heurte aujourd’hui au féminisme. C’est une idéologie puissante. L’islamisme aussi, bien sûr. Mais justement l’islamisme trouve ici sa limite.

    En théorie, le féminisme se bat pour l’égalité entre les sexes. Il est bien connu depuis Tocqueville (De la Démocratie en Amérique) que lorsque des groupes, quels qu’ils soient, en viennent à se mobiliser pour l’égalité (sociale, raciale, etc.), l’égalité est d’ores et déjà une réalité. Les groupes en question sont toujours en retard en ce domaine: en retard sur l’évolution objective. Il subsiste, certes, aujourd’hui encore, certaines inégalités entre les sexes. Mais souvent au détriment des hommes. En Suisse, par exemple, les hommes sont astreints au service militaire, et non les femmes. C’est un lourd handicap pour les jeunes hommes, en particulier ceux poursuivant des études universitaires. En Suisse toujours, l’âge de la retraite est plus bas pour les femmes qu’il ne l’est pour les hommes, alors même que l’espérance de vie des premières est plus élevée que celle des seconds. En contre-partie, il est vrai, les salaires des femmes sont souvent moins élevés que ceux des hommes. Le principe, à travail égal salaire égal, n’est pas toujours respecté. Etc.

    Laissons cela. Le véritable objet du combat féministe n’est pas l’égalité entre les sexes (même s’il en est souvent question). Il est, ce qui est différent, de changer la nature humaine. On veut créer un homme nouveau (au féminin comme au masculin). C’est ce que résume l’idéologie du genre. En ce sens, le féminisme rejoint le marxisme-léninisme. Car changer la nature humaine, c’est aussi ce que voulaient Marx, Lénine, Staline. Le genre s’enseigne aujourd’hui dans les écoles et les universités d’Europe occidentale comme, autrefois, le diamat [2] dans les universités de Russie et d’Europe orientale. C’est notre petit diamat à nous.

    Le féminisme est aujourd’hui ce qui fait barrage à l’islamisme. On lui en saurait évidemment gré s’il n’était lui-même, comme on le constate de plus en plus, porteur de risques graves en termes d’atteintes à l’État de droit et aux libertés personnelles. L’hystérie qui caractérise les campagnes actuelles contre le «harcèlement», les surenchères qui l’accompagnent (pogroms à répétition, lois «attrape-tout», etc.), en témoignent assez. La charia d’un côté, l’idéologie du genre de l’autre. Se résignera-t-on indéfiniment à ne pouvoir combattre une espèce donnée de totalitarisme que par une autre ?

    Eric Werner (Antipresse n°106, 10 décembre 2017)

     NOTES

    1. Trad. fr. Éditions des Syrtes, 2000 (rééd. Librairie Académique Perrin, 2011.)
    2. Diamat = matérialisme dialectique. Le mot désignait le corpus idéologique stalinien.
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