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guerre - Page 25

  • Le Capitán Alonso de Contreras...

    Les éditions Viviane Hamy viennent de rééditer les Mémoires du Capitán Alonso de Contreras, avec une préface d'Ernst Jünger. Alonso de Contreras (1582-1633) a mené la vie aventureuse et guerrière d'un capitaine de l'Ordre de Malte au début du XVIIe siècle.

     

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    " « Je naquis en la noble ville de Madrid le 6 janvier 1582. Je fus baptisé en la paroisse de San Miguel ; mes parrain et marraine furent Alonso de Roa et Maria de Roa, frère et soeur de ma mère. Mes parents se nommaient Gabriel Guillén et Juana de Roa et Contreras. Je voulus prendre le nom de ma mère lorsque j'allai servir le Roi, étant enfant, et quand je m'aperçus de l'erreur que j'avais commise, je ne la pus réparer parce que dans mes états de services il y avait "Contreras". J'ai vécu jusques aujourd'hui et suis connu sous ce nom, et nonobstant qu'au baptême on m'ait appelé Alonso de Guillén, moi, je m'appelle Alonso de Contreras. » Les Mémoires du capitan Alonso de Contreras, découverts à la fin du XIXe, sont un splendide et captivant récit d'aventures, vécues sur terre et sur mer par un capitaine de l'ordre de Malte au début du XVIIe siècle. Il nous raconte la guerre des galères en Méditerranée, les abordages entre les galions espagnols et les corsaires anglais, sans oublier les expéditions sous le soleil des côtes barbaresques. Alonso de Contreras a séduit, de son vivant, Lope de Vega qui lui dédia sa pièce Le Roi sans royaume.

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  • Erdogan n'est fort que parce que nous sommes faibles !...

    Nous reproduisons ci-dessous un entretien donné par Renaud Girard à Figaro Vox à propos de la crise provoquée par la Turquie et qui implique la Syrie, la Russie et maintenant l'Europe... Renaud Girard est correspondant de guerre et chroniqueur international du Figaro.

     

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    «Vague migratoire: le seul moyen de faire reculer Erdogan, c’est de lui tenir tête»

    FIGAROVOX.- Pouvez-nous nous expliquer la situation à Idlib et le lien avec la crise migratoire?

    Renaud GIRARD.- La Syrie est plongée dans une guerre civile qui, depuis 2012, oppose une rébellion majoritairement islamiste (soutenue, entre autres, par la Turquie) au gouvernement laïc baasiste de Bachar el-Assad (soutenu par la Russie et l’Iran). En septembre 2015, le Président Vladimir Poutine a décidé d’engager directement les forces russes aux côtés du gouvernement syrien. Cet appui a permis au camp loyaliste de gagner la guerre et de reconquérir l’essentiel du territoire syrien.

    Cependant, la ville d’Idlib, au nord-ouest du pays, près de la frontière turque, est encore aux mains des rebelles. Les Accords de Sotchi, conclus en septembre 2018 entre Russes et Turcs, faisaient de cette ville une «zone de désescalade», sécurisée par l’armée turque qui est censée y protéger les civils.

    Mais les Syriens et les Russes ont décidé de reprendre la ville, car ils considèrent que le Président Erdogan a trahi ses engagements. En effet, la zone devait uniquement servir à protéger les civils. Cependant, les Turcs y ont accueilli en masse des djihadistes, syriens et étrangers, qui fuyaient la reconquête des autres provinces syriennes par les forces gouvernementales.

    Or, Erdogan n’accepte pas cette reconquête et ses troupes se heurtent à l’armée syrienne. Par ailleurs, au lieu de s’en prendre frontalement à la Russie, qu’il sait forte, il menace l’Union européenne (UE), qu’il sait faible. Il encourage des centaines de milliers de migrants musulmans à se précipiter sur les frontières de l’Europe. Tout cela parce que 33 soldats turcs eurent trouvé la mort dans un bombardement effectué à Idlib (sur le sol syrien donc) par les forces de Bachar el-Assad. Erdogan a ainsi rompu unilatéralement l’engagement qu’il avait pris envers l’UE de garder en Turquie les migrants (Afghans, Syriens, Irakiens...) et de les empêcher de passer en Europe, engagement pour lequel les Européens l’ont généreusement payé. Erdogan punit les Européens, alors qu’ils n’y sont strictement pour rien dans le bombardement d’Idlib.

    Le Président turc sait que l’immigration est devenue le talon d’Achille des sociétés européennes et qu’elle risque de faire imploser l’Union européenne. Et ce d’autant plus que les sociétés européennes n’ont jamais été consultées démocratiquement sur la question migratoire alors qu’elles ont depuis longtemps constaté, chez elles, l’échec du multiculturalisme.

    Par ailleurs, Erdogan cherche à négocier avec Poutine, qui est en position de force, mais sans perdre la face. La rencontre des deux dirigeants, le 5 mars à Moscou, vient de déboucher sur un cessez-le-feu provisoire, qui prévoit qu’Idlib ne sera pas réoccupée par les Syriens pour le moment mais que les organisations islamistes (soutenues par la Turquie) y seront démantelées.

    Quels sentiments vous inspire cette décision du Président Erdogan d’encourager des centaines de milliers de migrants à forcer les frontières de l’Union européenne?

    Premier point, il s’agit là d’une forme d’invasion. Les frontières de l’Europe sont attaquées. Ainsi, le 1er mars 2020, on a pu voir de solides jeunes barbus, criant «Allah Akbar!», portant un tronc d’arbre en guise de bélier et essayant de défoncer le portail d’un poste-frontière grec. Ces musulmans, résidant en Turquie mais natifs de différents pays du Moyen-Orient, avaient été gratuitement transportés en autobus par les autorités turques vers la frontière grecque.

    Deuxième point. Erdogan est en grande partie responsable du chaos qui règne en Syrie. Jusqu’en 2010, il avait choisi comme ligne de politique étrangère «zéro problème avec nos voisins», et maintenait d’excellentes relations avec tous les pays de son entourage géographique. Mais en 2011, éclatent les printemps arabes: Erdogan tente alors de les récupérer à son profit et rêve d’en prendre partout le leadership. Pour cela, il appuie les Frères Musulmans. Il intervient dans la guerre civile syrienne, contre le régime baasiste d’Assad, dont il avait été pourtant l’ami personnel. Son service secret, le MIT, accueille les djihadistes venus du monde entier et les fait passer en Syrie. Il les arme et les soigne, sur le territoire turc. Erdogan se sent alors pousser des ailes et fanfaronne, annonçant en 2012 que d’ici quelques semaines le régime de Bachar sera tombé et qu’il viendra lui-même prier à Damas à la grande mosquée des Omeyaddes. Mais les alliés islamistes arabes d’Erdogan ont perdu. Si le Président turc n’avait pas joué à l’apprenti sorcier, la guerre civile syrienne aurait été terminée plus tôt et aurait fait moins de victimes et de réfugiés. Pourquoi les Européens paieraient-ils le prix des graves imprudences d’Erdogan?

    Troisième point, lorsque l’on regarde le choix d’Erdogan de sanctionner l’UE, il y a là matière à être surpris deux fois. D’abord, les Turcs ne sont pas chez eux à Idlib. La Turquie n’est ni envahie ni attaquée. C’est elle qui, au contraire, occupe une portion du territoire syrien, territoire que le gouvernement de Damas cherche à reconquérir, ce qui est dans la nature d’un gouvernement, quel qu’il soit. Quand on envoie des soldats en expédition dans un autre pays que le sien, ne prend-on pas le risque qu’ils s’y fassent tuer? Ensuite, pourquoi punir les Européens, alors que ce ne sont pas eux - mais des avions syriens ou russes - qui ont tué ces malheureux soldats turcs?

    Mais alors pourquoi Erdogan s’en prend-il à l’UE? Et comment doivent répondre les Européens?

    La seule manière de comprendre le geste d’Erdogan est que ce Frère musulman a toujours, dans sa diplomatie extérieure comme dans sa politique intérieure, préféré s’en prendre à des faibles qu’à des forts. Erdogan n’a aucune difficulté à insulter Macron. Avant d’insulter Poutine ou Trump, il y réfléchira à deux fois. Erdogan vit de nos faiblesses et de nos renoncements. Il n’est fort que parce que nous sommes faibles. Et nous sommes faibles par notre propre faute.

    Erdogan ne comprend que la force. Trump l’a bien saisi, comme le montre l’attaque sur la livre turque en août 2018 pour faire libérer le pasteur américain Andrew Brunson, emprisonné en Turquie. Poutine aussi l’a compris. Ainsi Erdogan a dû se réconcilier avec lui en 2016 après les sanctions russes suite à la mort d’un pilote russe, dont l’avion avait été abattu par les Turcs.

    La Russie et les États-Unis ne sont pas des pays que l’on fait chanter. L’Union européenne, c’est différent. Depuis la crise des migrants de 2015, les Turcs ont compris qu’ils pouvaient la faire chanter à leur guise: «Tu ne veux pas faire ce que je désire, tu ne veux pas me donner plus d’argent ou me soutenir dans ma politique? Alors, je vais t’envoyer quelques centaines de milliers de migrants musulmans supplémentaires.» C’est, en substance, le langage que tient tous les jours à l’égard de Bruxelles notre nouveau sultan néo-ottoman. Là, il vient de passer à la vitesse supérieure en révoquant unilatéralement des accords qu’il avait signés alors que l’UE lui a déjà versé plusieurs milliards d’euros pour empêcher l’arrivée de migrants. Et au moment même où Erdogan donne l’ordre à sa police de pousser les migrants vers la frontière grecque, la Commission européenne annonce qu’elle va lui verser 500 millions d’euros supplémentaires. C’est surréaliste.

    Plus nous serons faibles avec Erdogan, plus il sera méprisant et exigeant. C’est une grave erreur de croire qu’il sera bienveillant si nous nous montrons complaisants et cédons à ses menaces. Il en voudra alors toujours plus. Céder face à lui serait un nouveau Munich, comme lorsque nous avons cédé face à Hitler en pensant ainsi acheter la paix. Le seul moyen de faire reculer Erdogan est au contraire de lui tenir tête.

    Pourquoi la BCE ne spécule-t-elle pas contre la livre turque (comme le firent les USA avec succès pour libérer le pasteur Brunson)? Pourquoi ne surtaxons-nous pas les exportations turques (acier, aluminium, noisettes...)? Pourquoi ne prenons-nous pas des sanctions économiques - sur le commerce et le tourisme - contre la Turquie (comme le firent Trump et Poutine) afin qu’Erdogan cesse son chantage migratoire? La justice française vient de mettre en examen quatre personnes soupçonnées d’avoir collecté des fonds pour le PKK (organisation politico-militaire indépendantiste kurde, hostile à Erdogan). Pourtant les Kurdes nous ont rendu de grands services contre Daech. Erdogan ne fait pas la police pour nous (avec les migrants), pourquoi la ferions-nous pour lui, en arrêtant des Kurdes appartenant à un mouvement, le PKK, qu’il juge terroriste.?

    Surtout, il faut d’urgence aider financièrement et militairement la Grèce et la Bulgarie à défendre les frontières de l’Europe et arrêter cette immigration musulmane de masse, dangereuse pour la cohésion de l’UE. Nous devons mobiliser les armées et polices européennes pour bloquer le flux de migrants et neutraliser le chantage turc. Voilà qui permettrait de donner aux peuples européens une image positive et protectrice de l’UE.

    Le Président turc est-il plus faible qu’on ne le croit?

    Oui. Sa politique étrangère a été contre-productive. Nous sommes à l’opposé de la ligne «pas de problème avec les voisins» des années 2002-2010. Aujourd’hui, en plus de ne pas avoir pu renverser Bachar, Erdogan est isolé diplomatiquement. Il s’est fâché avec de nombreux pays musulmans moyen-orientaux (dont l’Égypte, l’Arabie Saoudite et les Émirats, qui - bien que sunnites comme la Turquie - considèrent les Frères Musulmans comme une organisation terroriste).

    À l’intérieur, le Président turc est aussi en position de faiblesse. Sa cote de popularité est en baisse. Son parti, l’AKP (islamo-conservateur), a perdu la ville d’Istanbul (principale ville et capitale économique du pays, dont Erdogan fut longtemps maire). Son économie connaît des difficultés. Sa population est excédée par la présence de millions de migrants arabes, africains et afghans.

    En se lançant dans une opération militaire pour stimuler le sentiment nationaliste et en tentant de se débarrasser des migrants, Erdogan espère relancer sa popularité auprès de son opinion publique. Mais si sa politique aboutissait à des sanctions économiques, son pari se retournerait contre lui.

    À Idlib, les civils sont pris entre les Turcs (et leurs alliés djihadistes) et les forces de Bachar el-Assad. Face à la guerre, au froid et à la famine, ils vivent une véritable crise humanitaire. Vous êtes l’auteur d’un livre intitulé Quelle diplomatie pour la France? (Le Cerf, 2017), ouvrage dans lequel vous critiquez la position de la présidence Hollande sur le dossier syrien. Pour vous, que doit faire la France pour Idlib?

    La France continue (depuis 2011!) de refuser tout dialogue avec Bachar el-Assad alors qu’il est désormais manifeste que cette ligne est tout à fait erronée.

    Car, qu’on le veuille ou non, Bachar el-Assad a aujourd’hui gagné la guerre et reconquis l’essentiel de son territoire. Même les Émirats Arabes Unis (puissance sunnite qui a longtemps soutenu et armé les rebelles) ont pris acte de la victoire de Bachar et rouvert leur ambassade à Damas! En agissant comme elle le fait, la France se prive de toute influence sur le règlement politico-humanitaire de la crise d’Idlib.

    Le réalisme seul nous permettra d’avoir un impact politique et humanitaire positif là où notre moralisme nous condamne à l’impuissance. Pour pasticher la formule de Charles Péguy sur la morale de Kant, nous pouvons dire que: «la diplomatie française a les mains propres parce qu’elle n’a pas de mains». Notre position n’est d’aucun secours aux civils d’Idlib là où une posture réaliste de rapprochement avec Bachar el-Assad nous permettrait au contraire de peser sur lui. Pour pacifier la Bosnie et mettre fin aux massacres grâce aux accords de Dayton, il a bien fallu parler à Milosevic.

    Depuis le début de l’année 2012, les gouvernements occidentaux ont cessé de parler au régime Assad, estimant que sa chute n’était plus qu’une question de semaines. Ils se sont trompés. Il est temps de prendre les réalités telles qu’elles sont et de comprendre qu’Assad est -qu’on le veuille ou non- un acteur incontournable, qui jouit du soutien d’une partie non négligeable de la population syrienne. Ça ne nous plaît peut-être pas mais ce sont les faits. On ne fera donc pas taire les armes à Idlib sans lui parler. Notre diplomatie moralisatrice et droit-de-l’hommiste n’a servi à rien et n’a pas fait avancer d’un pouce les Droits de l’Homme ou la démocratie. Elle a au contraire abouti à des résultats immoraux, à savoir des souffrances horribles pour les populations. On refuse de se compromettre en parlant à Bachar, mais ce sont les civils syriens qui endurent les conséquences terribles de notre position. «La vraie morale se moque de la morale», disait Pascal.

    Nous avons commis deux grandes erreurs au Moyen-Orient. La première a été de rompre avec Bachar el-Assad et de prendre les rebelles syriens pour des «démocrates» alors que la majorité d’entre eux étaient islamistes. La seconde a été d’abandonner nos amis: les Chrétiens d’Orient et les Kurdes. Or, dans cette région du monde, les gens - y compris vos ennemis - ne vous respectent que si vous n’abandonnez pas vos amis. Ainsi Poutine est respecté par tous les peuples orientaux, y compris par les Turcs et les Saoudiens, parce qu’il n’a pas abandonné son ami Bachar. À cause de ces deux erreurs, la voix de la France ne compte aujourd’hui pour rien en Syrie, alors que nous en sommes pourtant l’ancienne puissance mandataire: dans les négociations du 5 mars, Poutine a décliné la demande d’Erdogan de convier également Emmanuel Macron à une rencontre sur la Syrie. Nous payons là neuf années d’erreur et d’aveuglement.

    Faut-il condamner les frappes russes sur Idlib?

    Pour répondre, regardons les chiffres. La guerre en Syrie a fait 73 000 morts en 2013 et 75 00 en 2014, mais 20 000 en 2018 et 11 000 en 2019 (c’est-à-dire un chiffre divisé par 7 par rapport à 2014). Donc l’intervention russe (qui remonte 2015) et les succès russo-syriens sont synonymes d’une baisse du nombre de morts sur le terrain.

    Surtout, les frappes russes visent des djihadistes, c’est-à-dire notre ennemi principal, le même qui massacre les Chrétiens d’Orient, tue nos enfants dans nos rues et que nous combattons en France et au Mali. D’ailleurs, la chaîne France 24 a publié des images dans lesquelles des djihadistes français se filment fièrement à Idlib parmi les rebelles. Notre attitude est donc incohérente: en France ou au Sahel, nous combattons ces gens. Mais en Syrie, nous déplorons que Poutine les bombarde.

    Les rebelles d’Idlib, protégés par la Turquie, appartiennent à Hayat Tahrir al-Cham, conglomérat djihadiste dont la principale branche est Fatah al-Cham, nouveau nom du Front Al-Nosra, c’est-à-dire de la branche syrienne d’Al Qaeda. N’oublions pas qu’Al Qaeda est à l’origine des attentats du 11 septembre de 2001 (les plus meurtriers de l’histoire du terrorisme). C’est elle que nous affrontons dans le Sahel (sous le nom d’Aqmi). Depuis 20 ans, cette nébuleuse a aussi tué des milliers de civils dans le monde arabe.

    Pendant toute la guerre syrienne, la filiale Al-Nosra est restée fidèle à la réputation de sauvagerie de sa maison-mère Al-Qaeda. Elle s’est tristement illustrée, entre autres exactions, par des massacres de druzes, de chrétiens et d’alaouites, mais aussi de sunnites. Par exemple, le 11 décembre 2013, Al-Nosra a infiltré la ville d’Adra: au moins 32 civils ont été massacrés, certains décapités. La victoire d’Al Nosra en Syrie, empêchée par les Russes, aurait signifié l’extermination de toutes les minorités religieuses, l’instauration de la charia et la constitution d’un État islamiste et terroriste au coeur du Moyen-Orient et de la Méditerranée. Si les bombardements sur Idlib tuent hélas aussi des civils, c’est parce que les djihadistes prennent la population en otage et se mêlent à elle.

    En septembre 2015, j’écrivais «il faut aider les Russes en Syrie». Si nous l’avions fait, nous pourrions jouer un rôle dans la crise syrienne au lieu d’être ravalés au rang de spectateurs passifs.

    Renaud Girard (Figaro Vox, 6 mars 2020)

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  • A propos des armes hypersoniques...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'Alexis Feertchak, cueilli sur Geopragma et consacré aux armes hypersoniques développées par les grandes puissances. Alexis Feertchak est journaliste au Figaro et membre fondateur de Geopragma.

     

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    « Hypersonique », le dernier mot à la mode pour se faire peur

    Pour peser dans un dîner de chefs d’Etat, il est de bon ton de pouvoir dire que l’on possède des armes hypersoniques. Il y a deux ou trois ans, la mode était plutôt de mettre en avant son impénétrable bulle de protection A2/AD ( Anti Access Area Denial ). Mais, dans une dialectique bien connue des historiens militaires, c’est désormais l’épée qui a repris l’ascendant sur le bouclier. Avec son vocabulaire enfantin un peu simplet, Donald Trump a ainsi annoncé le développement de missiles hypersoniques « gros, puissants, mortels et rapides », histoire de pouvoir répondre virilement aux récents progrès des Russes et des Chinois en la matière.

    L’hypersonique, pourtant, n’est pas une nouveauté en soi. On assiste plutôt à la création d’un mot-valise qui, par son côté spectaculaire, répond aux impératifs politiques du moment dans un contexte de retour de la rivalité stratégique. Si une vitesse « supersonique » correspond à un phénomène bien réel, celui du franchissement de la vitesse du son (Mach 1 ou 1 235 km/h), rien de tel pour une vitesse « hypersonique ». Celle-ci fait partie du champ « supersonique » et, à l’intérieur de celui-ci, ne correspond à aucun phénomène physique particulier, même si les conditions de vol sont de plus en plus difficiles au fur et à mesure que la vitesse s’accroît. L’hypersonique correspond en réalité à une convention fixée à cinq fois la vitesse du son (Mach 5 ou 6 174 km/h). Cette frontière, aussi impressionnante qu’elle puisse paraître, n’a rien d’infranchissable, et ce depuis longtemps.

    Un missile balistique atteint durant sa course une vitesse maximale souvent très au-delà de la limite de l’hypersonique. C’est en particulier le cas des missiles balistiques intercontinentaux (ICBM en anglais). Mis en œuvre depuis 1985, disposant d’une portée de 11 000 km, un Topol russe (SS-25 en langage OTAN) atteint une vitesse de Mach 21, soit plus de 25 000 km/h, ou 7 km par… seconde, lors de sa phase terminale. Le Minuteman américain, dont les premières versions remontent à 1962, atteint même les Mach 23. En soi, l’hypersonique n’impressionne donc personne depuis longtemps… Mais il faut voir de quoi il est question. Ces deux exemples appartiennent à la catégorie des missiles dits « balistiques » car ils dessinent une trajectoire balistique, ayant peu ou prou une forme de courbe en cloche : la phase ascendante est assurée par un propulseur de type « fusée » tandis que la phase descendante est assurée par la seule force de la gravitation (néanmoins, au moment de la rentrée dans l’atmosphère, des moteurs peuvent entrer en action pour améliorer la visée ou pour décrire des trajectoires complexes, afin d’éviter des défenses Anti-Balistic-Missile – ABM). La vitesse maximale atteinte en descente est d’autant plus forte que le missile sera monté haut en altitude (avec néanmoins un maximum au-delà duquel le missile serait « satellisé »). Un missile balistique de courte portée comme le Scud, qui atteint une altitude beaucoup plus faible et frappe moins loin (quelques centaines de kilomètres selon les versions) ira beaucoup moins vite qu’un ICBM, mais en franchissant environ 2 km/second, il atteint néanmoins déjà les Mach 5. 

    Mais, alors, pourquoi parle-t-on tant d’armes hypersoniques aujourd’hui ? C’est que les armes hypersoniques mises en avant par Moscou, Pékin ou Washington ne sont pas, sauf exceptions, de traditionnels missiles balistiques. Ce type d’arme a en effet un grand défaut : sa trajectoire balistique (d’où le nom du missile) est prévisible et peut donc être interceptée (dans la mesure du raisonnable néanmoins : un ICBM atteignant les Mach 20 ne l’est pas en l’état des technologies défensives actuelles, surtout avec le procédé du « mirvage », qui fait qu’un missile peut emporter plusieurs têtes nucléaires, qui se dispersent lors de la rentrée dans l’atmosphère). A côté des missiles balistiques proches d’une fusée dans leur conception, une autre grande catégorie de missiles est le missile de croisière, plus proche d’un avion. Volant à basse altitude (quelques dizaines à quelques centaines de mètres, à comparer avec les 800 km de l’atmosphère), il est en permanence propulsé par son moteur. La version la plus classique est le missile destiné à des frappes terrestres à longue portée comme le Tomahawk américain ou le Kalibr russe (de 1 000 à 2 500 km selon les versions). En volant à très basse altitude, le missile est difficilement détectable car il peut facilement passer sous la couverture des radars. Par ailleurs, sa signature radar est plus faible que celle d’un avion car il est de plus petite taille (1 200 kg pour un Tomahawk au lancement).

    Pour résumer, les missiles balistiques, notamment la sous-catégorie des ICBM (à partir de 5 500 km et souvent plus de 10 0000) à tête nucléaire, sont privilégiés pour acquérir des capacités de frappes stratégiques, essentielles dans le cadre de la dissuasion nucléaire. En parallèle, le missile balistique est aussi une technologie relativement « simple » et peu onéreuse, permettant à des pays disposant de peu de moyens d’acquérir une capacité de frappes régionale de plusieurs centaines de kilomètres de profondeur (les fameux Scud, appréciés pour cela par de nombreux pays, comme l’Irak dans les années 1990). A l’inverse, le missile de croisière est une arme coûteuse et complexe, idéale pour des frappes discrètes et précises. C’est aussi pour cela que l’attaque contre des installations pétrolières en Arabie Saoudite, attribuée par Washington à Téhéran, a représenté un choc au Moyen-Orient. Rares sont les pays, en dehors des traditionnelles grandes puissances, à disposer d’une telle capacité.

    Les missiles de croisière atteignent en revanche rarement des vitesses comparables à celles des missiles balistiques. La plupart du temps, ils sont subsoniques. C’est le cas du Tomahawk américain (900 km/h) ou des missiles anti-navires rasants comme l’Exocet français (quelques mètres au-dessus de la mer, 1 100 km/h) ou son équivalent américain (Harpoon) ou russe (Uran, parfois surnommé Harpoonsky).

    Que se passe-t-il alors pour que les grandes puissances soient ainsi en émoi ?

    Premier phénomène : les missiles de croisière, notamment leurs versions anti-navires, atteignent aujourd’hui des vitesses de plus en plus grandes. Depuis la Guerre froide, les Russes se sont par exemple fait une spécialité de tels missiles atteignant des vitesses supersoniques, et qui servaient de « carrier killers » (tueurs de porte-avions). Particulièrement imposants, les croiseurs soviétiques Slava et Kirov ou certains sous-marins à propulsion nucléaire comme les Oscar-II emportaient des P-500 Bazalt ou des P-700 Granit capables de voler jusqu’à Mach 2,5 sur plus de 500 km. Pour atteindre de telles performances, ces missiles prennent un peu d’altitude avant de fondre sur leur cible (leur altitude est variable, selon le résultat recherché). Des versions plus modernes de ces missiles existent aujourd’hui en Russie (l’Onyx ou la version supersonique et anti-navires du Kalibr, qui ont la particularité de pouvoir être tirés depuis des navires de très faible tonnage), mais aussi en Inde avec le projet russo-indien BrahMos. Les Chinois mettent également en œuvre des missiles similaires (YJ-18). Mais la course ne s’arrête pas là : les Russes travaillent sur des missiles de croisière qui atteignent des vitesses hypersoniques (entre Mach 5 et 8). On trouve en particulier le Zirkon tiré depuis des navires ou des sous-marins : il devrait entrer en service au milieu des années 2020, après un premier essai depuis un bâtiment de surface cette année. Les Russes ont par ailleurs d’ores-et-déjà mis en service le Kinzhal, tiré depuis des avions (des intercepteurs MiG-31, des bombardiers tactiques Tu-22M3, prochainement des bombardiers stratégiques Tu-160M voire de simple chasseurs multirôles Soukhoï). La vitesse (jusqu’à Mach 3 pour un MiG-31…) et l’altitude des lanceurs permettent au missile Kinzhal d’obtenir par entraînement une vitesse et une portée supérieures à celles d’un Tsirkon tiré depuis un navire. Les puissances occidentales, elles, n’ont pas, pour l’instant, investi ce secteur des missiles de croisière supersoniques voire hypersoniques.

    Deuxième phénomène : les Chinois ont quant à eux massivement investi le champ des missiles balistiques, délaissés par Washington et Moscou en raison du traité INF qui avait permis de mettre fin, en 1987, à la crise des « euromissiles ». Depuis cette date, tous les missiles terrestres d’une portée de 500 à 5 500 km étaient interdits pour les deux géants de la Guerre froide. Ils ont donc privilégié les missiles navals (non concernés par INF), qui sont (presque) toujours des missiles de croisière, laissant aux missiles balistiques de plus de 5 500 km (ICBM en version terrestre, SLBM en version sous-marine) le soin d’assurer la dissuasion nucléaire. Les Russes ont aussi gardé des missiles balistiques de courte portée (officiellement moins de 500 km) comme les Iskander (la subtilité étant que ce système peut tirer à la fois des missiles balistiques et des missiles de croisière), dont la version modernisée “M” est accusée par Washington d’avoir une portée supérieure à cette limite fixée par le traité INF, ce qui a justifié en 2018 la sortie unilatérale des Etats-Unis de ce texte, aujourd’hui caduque. Mais la principale raison était tout autre : les Américains ne veulent plus avoir les mains liées alors que les Chinois, non partie au traité, ont massivement investi le champ des missiles balistiques de portée intermédiaire, qu’ils soient destinés à des frappes terrestres ou à des frappes anti-navires, une spécificité pour l’instant chinoise. Pékin dispose ainsi théoriquement de la possibilité de frapper des porte-avions américains à 4 000 km de distance grâce à leurs DF-26, ce qui n’est pas loin d’être un cauchemar pour Washington.   

    Troisième phénomène : Américains, Russes, Chinois, mais aussi Britanniques et Français investissent le champ des « planeurs » hypersoniques et hypermanœuvrants (Hypersonic Boost-Glide Vehicule en anglais). Ces engins, très spécifiques dans leur principe, sont d’abord propulsés par un traditionnel missile balistique (ou par une fusée), puis sont capables de planer, grâce à un principe de portance, sur les couches hautes de l’atmosphère, pouvant ainsi dessiner des trajectoires beaucoup plus complexes qu’un missile balistique traditionnel. L’intuition du planeur hypersonique remonte à la Seconde Guerre mondiale lorsque Eugen Sänger et Irene Sänger-Bredt conçoivent le projet allemand de Silbervogel (oiseau d’argent), qui devait permettre d’atteindre l’Amérique en faisant des sortes de « bonds » sur la stratosphère. Lors de leur grande parade pour le 70e anniversaire de la République populaire, les Chinois ont révélé leur planeur hypersonique, le DF-ZF, dédié à des frappes conventionnelles de portée intermédiaire (entre 500 et 5 500 km) et qui devrait être (voire a déjà été) mis en service cette année sous le nom DF-17. Les Russes ont quant à eux mis en service en décembre leur planeur hypersonique Avangard tiré depuis un ICBM, et décrit par Vladimir Poutine comme une « arme absolue », qui frappe « comme une météorite, une boule de feu ». Les Etats-Unis avaient lancé au début des années 2000 leur vaste projet de Prompt Global Strike (avec l’objectif de pouvoir frapper conventionnellement n’importe quel point de la planète en une heure) et expérimentent depuis plusieurs années des planeurs hypersoniques, avec par exemple le X-51 ou le HTV-2 (premiers vols en 2010). Ils semblent néanmoins avoir perdu aujourd’hui l’avance qu’ils possédaient, même si le Pentagone a récemment lancé des projets tous azimuts. Le site internet de Lookheed Martin présente ainsi plusieurs « planeurs » pour l’armée de l’air (ARRW pour Air-Launched Rapid Response Weapon) ou l’armée de terre (de portée intermédiaire avec l’IRCPS pour Intermediate Range Conventional Prompt Strike et de longue portée avec le LRHW pour Long-Range Hypersonic Weapon). Le Royaume-Uni et la France ont aussi lancé leur projet de « planeur hypersonique », Paris souhaitant faire voler un premier démonstrateur de son V-MAX en 2021, pour une mise en service vers 2025. Cette nouvelle catégorie d’armements, qui devrait faire partie des arsenaux d’une poignée de pays d’ici 2030, représente une sorte de garantie pour quiconque voudrait franchir n’importe quelle défense ennemie, ceci étant vrai autant pour des frappes conventionnelles que nucléaires.  

    C’est sous ces trois angles que l’« hypersonique » est à la mode. Cette course aux armements (plus qualitative que quantitative) participe à affaiblir fortement le contrôle des armements, les grandes catégories conceptuelles qui structurent les traités étant fortement fragilisées. Où, en effet, situer ces planeurs hypersoniques dans les arsenaux stratégiques réglementés par le traité russo-américain New Start qui arrive à expiration en 2021, et que Donald Trump souhaite visiblement ne pas renouveler ? Comment, désormais, pour un pays attaqué savoir distinguer avec suffisamment de clarté une frappe nucléaire stratégique d’une frappe conventionnelle à longue portée ? Comment tenir compte du nouvel intérêt des acteurs militaires pour les portées intermédiaires, qui permettent à certains Etats (comme la Chine) d’augmenter leurs capacités de déni d’accès ? L’instabilité augmentait déjà structurellement du fait que le jeu qui se jouait auparavant à deux (Washington et Moscou) se joue désormais à trois (avec Pékin en plus), alors que les traités de la Guerre froide ne prévoient pas cette extension. Mais on voit émerger ici une cause supplémentaire d’instabilité, que les politiques résument en cette notion d’« hypersonique », non sans quelque confusion sur l’étendue exacte du terme, mais avec l’intuition générale que cette accélération des armes et de leurs vecteurs va bousculer l’équilibre précaire né de la fin de la Guerre froide.

    Alexis Feertchak (Geopragma, 17 février 2020)

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  • Au nom du Japon !...

    Les éditions de La Manufacture des Livres viennent de publier le récit de Hiro Onada intitulé Au nom du Japon. Officier de l'armée japonaise, Hiro Onada a poursuivi le combat jusqu'en 1974 sur l'île de Lubang dans l'archipel des Philippines.

     

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    " 1945. La guerre est terminée, l'armistice est signé. Mais à ce moment précis, le jeune lieutenant Hiro Onoda, formé aux techniques de guérilla, est au coeur de la jungle, sur l'île de Lubang, dans les Philippines. Avec trois autres hommes, il s'est retrouvé isolé des troupes à l'issue des combats. Toute communication avec le reste du monde est coupée, les quatre Japonais sont cachés, prêts à se battre sans savoir que la paix est signée. Au fil des années, les compagnons d'Hiro Onoda disparaîtront et il demeurera, seul, guérillero isolé en territoire philippin, incapable d'accepter l'idée inconcevable que les Japonais se soient rendus. Pendant 29 ans, il survit dans la jungle. Pendant 29 ans, il attend les ordres et il garde sa position. Pendant 29 ans, il mène sa guerre, au nom du Japon. "

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  • Tour d'horizon... (181)

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    Au sommaire cette semaine :

    - sur Thinkerview, le journaliste Marc Endeweld revient sur son enquête sur les réseaux qui ont amené Emmanuel Macron au pouvoir...

    Macron : les réseaux secrets ?

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    - sur Philitt,  l'écrivain russe Zakhar Prilepine donne un entretien autour de son dernier livre traduit en français, Officiers et poètes russes (Syrtes, 2019)

     « L’important n’est pas de faire la guerre, mais d’avoir une perception religieuse et mystique de la vie »

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  • La rumeur des batailles...

    Les éditions Economica viennent de publier un Dictionnaire encyclopédique des batailles - De l'antiquité à l'an 2000 signé par Henri Pigaillem. Ecrivain, Henri Pigaillem est notamment l'auteur de plusieurs ouvrages historiques, dont l'un consacré à la bataille de Lépante chez le même éditeur.

     

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    " Ce dictionnaire n'a naturellement pas la prétention de mentionner toutes les batailles disputées depuis la nuit des temps. Il présente toutefois l'avantage d'en décrire plus de 3000, soigneusement sélectionnées par son auteur parmi les plus célèbres mais aussi parmi les méconnues, les oubliées ou celles qui restent encore inconnues. Henri Pigaillem revisite jusqu'à 5 000 ans d'histoire des batailles terrestres, navales, aéronavales, des sièges, raids, combats, bombardements et autres opérations militaires touchant toutes les nations, toutes les civilisations, tous les lieux, toutes les mers, toutes les époques. Le lecteur y trouvera l'évocation de très nombreux conflits et événements militaires : les guerres de l'Égypte pharaonique, les guerres grecques, perses, macédoniennes, romaines, zouloues, apaches, napoléoniennes, la conquête des empires inca et aztèque, les invasions barbares, les luttes entre clans de samouraïs, la colonisation de l'Afrique ou des Antilles, la « boucherie » de Verdun, le désastre atomique d'Hiroshima, le débarquement de Normandie, la guerre du Golfe. Les principaux acteurs de ces épisodes sont tous présents : Gengis Khan, Alexandre le Grand, Guillaume le Conquérant, Soliman le Magnifique, Jules César, ou encore Philippe de Macédoine, Geronimo, Napoléon, Ulysses Grant, Joffre, Joukov, Patton, MacArthur, Bernard Montgomery. "

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