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etats-unis - Page 33

  • Impuissance française ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'Hervé Juvin, cueilli sur son site personnel et consacré à l'impuissance politique dans laquelle notre pays s'enferme aussi bien sur les questions intérieures que sur le plan international. Économiste de formation, vice-président de Géopragma et député européen, Hervé Juvin est notamment l'auteur de deux essais essentiels, Le renversement du monde (Gallimard, 2010) et La grande séparation - Pour une écologie des civilisations (Gallimard, 2013). Candidat aux élections européennes sur la liste du Rassemblement national, il a publié récemment un manifeste intitulé France, le moment politique (Rocher, 2018).

     

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    Impuissance française ?

    Impuissance à l’intérieur

    Difficile de passer une semaine en France sans entendre parler des djihadistes, du voile islamique, et de l’attaque terroriste dans la Préfecture de police de Paris. Prétendre faire juger en Irak les combattants venus de France, s’il en reste, est une plaisanterie ; c’est en Syrie qu’ils doivent être jugés, puisqu’ils ont choisi de s’y engager. Ceux qui polémiquent sans fin sur leur sort (la grande masse des prisonniers sont des femmes et des enfants) devraient ouvrir les yeux. C’est en France que la pénétration des réseaux islamistes, des Frères musulmans et des imams salafistes se joue.

    Les signes sont là ; c’est dans l’armée, dans la police, dans les services de l’État, et aussi dans les secteurs stratégiques de la banque et de la finance, des industries de défense, des services de sécurité privée et de transport, qu’un aveuglement voulu a laissé s’implanter des réseaux dormants, a permis à des recrutements de s’opérer sur base confessionnelle, et toléré des mœurs qui n’ont pas leur place en France. Jusqu’à quand l’anti-racisme primaire servira-t-il de couverture à une infiltration qui touche le cœur de l’État ? Jusqu’à quand la Préfecture de Police de Paris sera-t-elle cet État dans l’État, qui par exemple refuse l’entrée de la DRSD ( Direction du renseignement et de la sécurité de la Défense ) chez elle ?

    Et face à la multiplication des incidents provoqués par des musulmans agressifs (je suis personnellement témoin de deux de ces incidents, dans la rue et dans un bus, à Paris et en trois jours), comment ne pas penser que la lâcheté et les demi-mesures provoqueront dans le temps bien plus de souffrances et de drames qu’une action résolue et ferme n’en susciterait aujourd’hui ? C’est tout de suite qu’il faut dire « non ». Face à l’islamisation d’une partie des territoires français, comme face à l’immigration de conquête, c’est la dureté qui sauve et la rigueur qui préserve, c’est la tolérance et le « refus de l’amalgame » qui condamnent et qui tuent.

    Impuissance à l’international

    Impossible enfin de ne pas être inquiet de l’affaiblissement de la France. C’est le tour exécrable des relations avec l’Allemagne, une Allemagne de plus en plus agressive dans sa volonté d’abaisser la France de la Défense, de l’arme nucléaire et du Conseil de Sécurité à son niveau — celui d’une Nation qui ne peut plus prétendre à la puissance des armes. C’est le grignotage de notre souveraineté par un OTAN qui, sous couvert de sécurité globale, entend soumettre le spatial comme le numérique français à l’ordre américain.

    C’est l’enlisement de l’opération Barkhane, qui ne fournit plus que des troupes encasernées, cible des bandes terroristes converties en bandits de grand chemin, qui fait la rente de l’Armée de Terre, mais qui est radicalement impuissante à lutter contre la montée des foyers islamistes, de l’Atlantique à la corne de l’Afrique, une lutte qui passe par du renseignement, des opérations spéciales et du soutien aux forces gouvernementales – trois membres des forces spéciales russes tués ce mois par la rébellion islamiste qui opère à la frontière du Mozambique et de la Tanzanie, qui comprend le message ?

    C’est la pantomime autour des « islamistes modérés » en Syrie, invention de la presse française, d’un Rojava qui n’a jamais existé nulle part, sinon dans l’imagination créatrice du Quai d’Orsay et les machinations allemandes, c’est le voile d’illusion qui entoure des Kurdes de l’YPG, génocidaires des Arméniens en leur temps, persécuteurs des villages chrétiens ou alaouites récemment, supplétifs des forces israéliennes à l’occasion, mais bien rarement humanistes avérés.

    C’est surtout l’absence de la France de la reconstruction de la Syrie, qu’ont déjà engagée la Chine, l’Inde, la Russie, sans compter quelques pays européens discrets, mais présents. Qu’attend la France pour reconnaître que Bachar el Assad a refait l’unité du pays, pour rouvrir un bureau diplomatique et un lycée français ardemment demandés ? Bachar el Assad a survécu à des Présidents français qui l’annonçaient hors-jeu dans le mois. Il est surtout le témoin de la déconfiture de ces « néo-cons » qui ont fait tant de mal à la France comme aux États-Unis et à d’autres.

    La première décision d’un Président soucieux de refaire la France serait de procéder à l’épuration des services du Quai d’Orsay, de Balard et de l’Élysée où sévissent encore trop de ceux qui furent surnommés « la secte » et qui, de Washington à Moscou ou Pékin, ont compromis pour longtemps l’autorité et la crédibilité de la France au profit de puissances étrangères.

    Sa seconde décision devrait être d’apprécier à sa mesure la nouveauté du rapport de force régional, et de proposer l’aide de la France à la Russie, à la Turquie et à l’Iran, comme à la Syrie, au Liban, à Israël et aux Émirats, pour initier un renouveau des relations avec l’Europe, et rétablir sur le principe de non-ingérence les conditions du progrès et de la paix que les interventions américaines ont gravement compromises. Mme Mogherini n’a-t-elle pas ouvert en ce sens une porte que la France devrait franchir la première ?

    Quant à la troisième décision, faut-il rêver, elle serait d’affirmer la grande ambition de la France pour une Europe libre, c’est-à-dire d’initiative française en matière de Défense, de systèmes de paiement et de droit commercial autonomes. La France seule, la plus grande France, présente sur toutes les mers et sur tous les continents, désormais unique en Europe à cet égard, peut engager une telle initiative et entraîner avec elle. C’est un projet pour que le siècle qui vient en Europe soit un siècle français. Il l’a été. Il peut le redevenir. Qui en rêve, qui le conduira ?

    Hervé Juvin (Site officiel d'Hervé Juvin, 21 octobre 2019)

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  • Désastre pour l’Europe, le rapprochement militaire entre Moscou et Pékin s’accélère...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'Alexis Feertchak cueilli sur Geopragma et consacré au rapprochement de la Russie avec la Chine au détriment de l'Europe. Membre de Geopragma, Alexis Feertchak est journaliste au Figaro.

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    Désastre pour l’Europe, le rapprochement militaire entre Moscou et Pékin s’accélère

    Le président Emmanuel Macron a indéniablement raison de marteler la nécessité d’un dialogue ambitieux avec la Russie. Pour l’heure, il ne s’agit cependant que de mots et d’images fortes, qui ont certes le mérite d’énerver les « néoconservateurs » de « l’Etat profond » – pour reprendre une formule désormais présidentielle – mais qui n’apportent pas le moindre début de commencement de réponse concrète à la question naguère lancée par Mitterrand et Gorbatchev : comment construire une « maison commune » européenne qui contienne Moscou ? Autrement dit, comment faire rentrer politiquement la Russie en Europe alors même que l’Europe demeure dans un état de soumission envers les Etats-Unis qui, eux, continuent follement de définir la Russie comme leur ennemi éternel ? Peut-on imaginer voir cohabiter, sous le toit d’une même maison, deux adversaires aussi résolus ? Certes, on peut attendre de ce rapprochement une avancée sur le dossier ukrainien, mais celle-ci serait plus conjoncturelle que structurelle. Le format Normandie pourrait bien aboutir à une percée diplomatique (tous les acteurs y ont aujourd’hui intérêt), mais les raisons anciennes et profondes de la défiance qui ont conduit à la crise ukrainienne demeureraient intactes.

    Le temps presse pourtant car, entre Moscou et Pékin, les signes d’une relation de plus en plus rapprochée se font sentir. Il ne s’agit certes pas encore d’une alliance, mais, dans un contexte d’antagonisme croissant entre la Chine et les Etats-Unis, plus ce partenariat sino-russe sera solide, moins Moscou disposera de latitude pour faire, le jour venu, un pas vers l’Europe, quand bien même celle-ci le souhaiterait. Autrement dit, si une rebipolarisation du monde (quoiqu’incomplète) se dessine dans les prochaines années et que la Russie s’ancre dans le bloc mené par Pékin, le mur de l’Est, dont la logique aurait voulu qu’il tombât réellement en 1991 pour raccrocher la Russie au continent européen, se reformera pour de bon. Ironie de l’histoire : les Etats-Unis, à force de considérer à tort que le mur n’était pas réellement tombé, pourraient finir par avoir raison. C’est le propre des prophéties de malheur auto-réalisatrices, dont les Etats-Unis se sont fait une spécialité. Comme l’avait prédit John Keenan, pourtant père du concept de containment, l’avancée de l’OTAN dans les années 1990 allait nécessairement pousser les Russes à réagir… L’histoire ukrainienne a montré la justesse de ce raisonnement décrit dès 1998 dans Foreign Policy.   

    Si demain, le mur de l’Est était réellement reconstitué, son tracé serait peu ou prou le même que pendant la Guerre froide, mais le bloc qu’il délimiterait serait différent, puisque son centre ne serait plus à Moscou, mais à Pékin. Raison pour laquelle, à moyen terme, la Russie n’a aucun intérêt à voir se reconstituer de tels blocs. Les Européens sauront-ils le voir ? Mais, même s’ils le voient, sauront-ils quoi faire ?

    Le dernier signal faible de ce rapprochement sino-russe touche – et c’est l’une des premières fois – à un domaine par nature stratégique puisqu’il a trait, indirectement, à la dissuasion nucléaire. La Russie a en effet annoncé cette semaine qu’elle va aider la Chine à développer un « système d’alerte avancée », technologie dont seuls Washington et Moscou disposent depuis les années 1970 et qui permet de détecter et de suivre le tir d’un missile balistique (notamment intercontinental) afin d’avoir le plus de temps possible pour l’intercepter. En pratique, ce système repose à la fois sur des radars particulièrement puissants et sur des satellites d’alerte qui, au moyen de détecteurs infrarouges, peuvent détecter la chaleur dégagée par un missile lors de sa phase propulsée.

    « Nous sommes en train d’aider nos collègues chinois à créer un système d’alerte d’attaque par missile. C’est quelque chose de très sérieux, ce qui va fondamentalement, drastiquement muscler la défense de la République populaire. Parce qu’aujourd’hui, il n’y a que les États-Unis et la Russie qui disposent de ce type de système », a déclaré Vladimir Poutine. S’exprimant lors de la seizième édition du Club Valdaï, à Sochi, le président de la Fédération de Russie n’a pas donné davantage de précisions techniques sur l’objet de cette collaboration.

    En 1972, l’URSS avait signé avec les Etats-Unis un traité bilatéral encadrant très fortement le développement de systèmes d’interception d’engins balistiques. Poussée trop loin, la création d’un bouclier antimissiles peut en effet affaiblir la dissuasion nucléaire si la « destruction mutuelle assurée » n’est plus garantie ou seulement plus ressentie par tous les acteurs. Le Traité ABM offrait le choix aux deux signataires entre deux protections possibles : la protection d’un site de lancement de missiles (solution choisie par les Américains) ; la protection de leur capitale (solution choisie par Moscou).

    En pratique, le Système d’alerte d’attaque de missile (SPRN) russe se compose de radars d’alerte précoce de nouvelle génération dite «Voronezh» (actuellement installés sur huit sites) qui sont en train de remplacer les radars plus anciens «Dnper» (toujours en service) et «Daryal» (retirés du service en 2011). En matière de satellite d’alerte précoce, la Russie disposerait d’au moins deux « Toundras » lancés en 2015 et 2017, nouvelle génération de satellites de cette catégorie chargés de remplacer les anciens «Oko», dont le dernier exemplaire lancé est hors service depuis 2014. 

    Pour l’interception, la Russie possède aujourd’hui un système anti-balistique A-135 qui remplace depuis 1995 l’A-35 mis en service en 1971. Ce système relativement récent, qui fonctionne en tandem avec le système d’alerte avancée, repose sur un radar de gestion de combat « Don-2N » et sur deux types de missiles. Le premier, le 53T6 (ou Gazelle), est un missile à courte portée (80 km) chargé d’intercepter des missiles balistiques une fois que ceux-ci sont rentrés dans l’atmosphère (autrement dit dans la dernière phase de vol). Le second, le 51T6 (ou Gorgon), est un missile à plus longue portée (350 km) capable d’intercepter des missiles balistiques en dehors de l’atmosphère. Particularité : ces deux types de missiles disposent tous les deux de têtes nucléaires… En matière d’ABM russe, le nucléaire arrête en quelque sorte le nucléaire ou, comme il est écrit dans la Bible, « Satan expulse Satan ». Il y a actuellement cinq sites mettant en œuvre un total de 68 53T6 qui assurent la protection de Moscou. Le 51T6, lui, a été retiré du service, mais les Russes travaillent sur un nouveau système, l’A-235 (ou «Samolet-M»).

    Pour les Russes, le maintien de leur capacité de détection avancée et d’interception est une nécessité stratégique alors que les Etats-Unis se sont retirés du traité ABM (désormais caduque) en 2003, qu’ils déploient progressivement leur propre bouclier anti-missiles aussi bien en Europe de l’Est qu’en Asie et que leurs capacités de frappes stratégiques s’améliorent (systèmes de plus en plus sophistiqués de mirvage des missiles intercontinentaux à têtes nucléaires) et se diversifient avec le développement d’une dissuasion également conventionnelle (planeurs hypersoniques et autres engins à très haute vélocité). Les Chinois eux-mêmes sont en pointe en la matière, comme l’a montré le défilé militaire de la semaine dernière pour l’anniversaire des 70 ans de la République populaire de Chine, avec la mise en avant de missiles balistiques à portée intermédiaire (y compris anti-navires, ce qui représente une menace mortelle pour les porte-avions américains) et le dévoilement d’un planeur hypersonique, le DF-17. Il faut maintenant aux Chinois exceller aussi en matière de détection avancée, ce qu’une coopération avec les Russes leur permettra de faire plus rapidement. Déjà, contrairement aux années 1990, en matière d’exportations, Moscou n’hésite plus à livrer en premier à Pékin ses armements les plus sophistiqués : chasseurs Su-35 et systèmes anti-aériens S-400. Jeté dans les bras des Chinois par Washington, Vladimir Poutine pousse désormais son amitié avec Xi Jinping sur des terrains qui ont trait indirectement à la dissuasion nucléaire. La maison commune européenne, qui aurait pu être construite dans les années 1990, a fait long feu. En la matière, aucun système de détection avancée ne permet d’observer de mise à feu sérieuse, sinon le filet de mots prononcés par le président Macron, qui ne permettent pas, à eux seuls, de calculer une trajectoire réellement ambitieuse.

    Alexis Feertchak

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  • Crise avec les États-Unis : l’Iran « ne se laissera pas faire »...

    Vous pouvez découvrir ci-dessous un entretien avec Pierre Conesa à propos des relations irano-américaines à la suite de l’attaque récente d’Abqaiq en Arabie saoudite, diffusé le 27 septembre par Sputnik. Agrégé d'histoire et énarque, Pierre Conesa a fait partie dans les années 90 de la Délégation aux affaires stratégiques du Ministère de la défense. Désormais consultant, il est l'auteur de plusieurs essais, dont, notamment, Dr. Saoud et Mr. Djihad - La diplomatie religieuse de l'Arabie saoudite (Robert Laffont, 2016) et Hollywar - Hollywood, arme de propagande massive (Robert Laffont, 2018).

     

                                        

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  • Tour d'horizon... (171)

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    Au sommaire :

    - sur la Lettre de Comes Communication, Bruno Racouchot interroge Frédéric Pierucci sur l'affaire Alstom et l'extraordinaire complexité des jeux d'influence mis en œuvre par les autorités américaines s'approprier cette entreprise...

    Alstom, ou l'influence entre violence physique et prédation financière

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    - Cinéphiles, présenté par Olivier François, nous propose un entretien sur le cinéma avec le chanteur et compositeur Bertrand Burgalat...

    Cinéphiles #07 : Bertrand Burgalat

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  • Les dirigeants européens sont-ils atteints du syndrome de Stockholm ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue du journaliste irlandais Finian Cunningham, cueilli sur Europe solidaire et consacré aux relations des dirigeants européens avec leur "maître" amaéricain...

     

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    Les dirigeants européens sont atteints du syndrome de Stockholm

    La situation psychologique connue sous le nom de syndrome de Stockholm, dans laquelle les otages sympathisent de manière irrationnelle avec leurs ravisseurs, pourrait très bien s'appliquer aux dirigeants européens face aux intimidations états-uniennes. Les États-Unis ont toujours été le parti dominant - et dominateur - de la relation transatlantique. Mais les administrations précédentes, à Washington, avaient pris soin de présenter les États européens comme des «partenaires» dans une alliance «apparemment» mutuelle.

    Sous le président Donald Trump, les pressions et les harcèlements dont sont l'objet les Européens mettent en lumière leur véritable statut de simples vassaux de Washington. Prenez le projet Nord Stream 2. Le gazoduc sous-marin d'une longueur de 1 220 km, qui augmentera considérablement la capacité de livraison de gaz en Europe, devrait être achevé d'ici la fin de l'année. Cette nouvelle offre profitera à l'économie de l'Union européenne, en particulier à celle de l'Allemagne, en fournissant du gaz moins cher pour les entreprises et pour le chauffage des logements.

    Eh bien, la semaine dernière, le sénateur américain Ted Cruz a déclaré que son pays avait le pouvoir d'arrêter l'achèvement du projet . Cruz fait partie de la commission des affaires étrangères du Sénat US qui a adopté en juillet dernier un projet de loi imposant des sanctions aux entreprises impliquées dans la construction du pipeline. L'Allemagne, l'Autriche, la France et la Grande Bretagne font partie du consortium de construction, aux côtés de la société russe Gazprom.

    Ironiquement, le projet de loi du Sénat US s'appelle «Protéger la sécurité énergétique de l'Europe». C'est une bien curieuse forme de «protection» lorsque les sanctions appliquées par les USA pourraient priver les entreprises européennes et les consommateurs de gaz à un prix abordable. Cruz, comme le président Trump, a accusé la Russie d'essayer de resserrer son emprise économique sur l'Europe. Plus proche de la vérité et plus cynique, Washington souhaite que l'Europe achète son gaz naturel liquéfié, plus coûteux. Le Texas, la plus grande source de gaz américain, est l'état d'origine de Cruz. Son projet de loi devrait peut-être être renommé «Protection des exportations américaines d'énergie».

    À cela s'ajoute l'imposition plus large, par Washington et l'Europe, de sanctions à l'encontre de la Russie depuis 2014. Plusieurs raisons ont été invoquées pour justifier les mesures punitives prises contre Moscou, notamment une prétendue déstabilisation de l'Ukraine et une «annexion» de la Crimée, une ingérence présumée dans les élections et l'affaire Skripal. Cette politique de sanctions a été largement initiée et promue par Washington, suivie servilement par l'Europe.

    La semaine dernière, les représentants de l'UE ont voté en faveur d'une prolongation des sanctions de six mois, alors qu'elles sont beaucoup plus dommageables pour l'économie européenne que pour celles des États-Unis et que les entreprises allemandes, en particulier, s'opposent à l' hostilité économique contre-productive à l'égard de Moscou. L'absence de toute opposition européenne à une ingérence aussi flagrante de la part des États-Unis dans leur prétendue souveraineté et leur indépendance sur des questions d'intérêt vital est tout simplement stupéfiante.

    Un autre exemple frappant est la façon dont l'administration Trump insiste pour que les États européens abandonnent d'importants projets d'investissement avec la société de télécommunication chinoise Huawei pour moderniser les infrastructures de téléphonie mobile et d'Internet. Washington a menacé de sanctions de représailles si l'Europe s'associait à Huawei.

    Les États-Unis ont également averti qu'ils pourraient empêcher le "partage de renseignements" des "alliés" européens sur les risques liés à la sécurité et au terrorisme. Fait-on cela à un "ami" ? Là encore, les dirigeants européens font preuve de la même velléité d'acquiescement, au lieu de s'opposer aux États-Unis pour qu'ils s'occupent de leurs propres affaires.

    L'accord nucléaire conclu entre JCPOA et l'Iran est une autre preuve éclatante de la relation fondamentalement abusive que Washington entretient avec l'Europe. Cette semaine, l'administration Trump a rejeté la proposition française d'étendre une ligne de crédit de 15 milliards de dollars à Téhéran. La proposition française visait à atténuer la pression économique sur l'Iran et à le maintenir dans l'accord nucléaire défaillant. Washington a simplement déclaré qu '"il sanctionnera quiconque achètera du pétrole brut iranien". Il n'y aura pas de dérogations ni d'exceptions aux sanctions américaines. Cela impose à peu près à l'Union européenne d'oublier ses efforts hésitants pour sauver l'accord nucléaire avec l'Iran, dont elle est signataire, aux côtés de la Russie et de la Chine.

    Donc, comme Trump s'est écarté de l'accord, cela signifie, dans sa vision dominatrice, que les Européens doivent également le faire,. De toute évidence, l'UE n'a pas la liberté d'agir indépendamment du diktat américain. Détruire les relations entre l'Europe et l'Iran mettra en péril les intérêts économiques et les préoccupations de sécurité liées aux conflits et à la non-prolifération des armes dans la région. Les préoccupations européennes sont-elles si peu pertinentes pour Washington ?

    Maintenant, accrochez-vous à la formidable double pensée suivante. Le secrétaire américain à la Défense, Mark Esper, a incité la semaine dernière ses «amis» européens à faire preuve de plus de vigilance pour lutter contre les supposées malignités russes et chinoises. Tenu devant le groupe de réflexion du Royal United Services Institute à Londres, ce discours a été présenté comme le premier discours majeur d'Esper depuis qu'il est devenu chef du Pentagone en juillet. "Il est de plus en plus clair que la Russie et la Chine veulent perturber l'ordre international en obtenant un droit de veto sur les décisions économiques, diplomatiques et de sécurité d'autres nations", a-t-il déclaré. «En termes simples, la politique étrangère de la Russie continue de faire fi des normes internationales», a ajouté, sans aucune honte, l'ancien lobbyiste de Raytheon et d'autres fabricants d'armes américains.

    Quelle a été la réponse de l'Europe? Les dirigeants européens et les médias ont-ils éclaté de rire devant une telle absurdité, hypocrisie et inversion accusatoire? Existe-t-il des déclarations officielles ou des éditoriaux sévères invitant le représentant américain du complexe militaro industriel à ne pas insulter la simple intelligence ? La tolérance de l'Europe aux comportements abusifs de son «partenaire» américain est bien un problème de syndrome de Stockholm.

    Bien sûr, parfois les dirigeants européens tels que Merkel ou Macron s'interrogent sur la nécessité de renforcer leur indépendance par rapport à Washington, mais quand les cartes sont minces, ils témoignent tous d'une allégeance méprisable pour la politique américaine, même si cela nuit réellement à leurs intérêts nationaux. Lorsque Trump a recommandé que la Russie soit admise au récent sommet du G7 en France, le mois dernier, le reste du groupe a réagi avec horreur en demandant le maintien de l'exclusion de Moscou. Comment expliquer cette attitude ?

    Des chefs européens pathétiques veulent rester dans un club avec leur plus grand bourreau - Washington - tout en excluant un pays voisin et un partenaire stratégique potentiellement important. Comment peut-on faire plus irrationnel? Les psychologues expliquent le syndrome de Stockholm en tant que «mécanisme d'adaptation» pour traiter les traumatismes. Il est observé parmi les otages, les prisonniers de guerre, les survivants des camps de concentration, les esclaves et les prostituées. La sympathie irrationnelle envers un parti qui inflige des difficultés et des blessures est un moyen de minimiser les traumatismes en semblant adopter les mêmes valeurs. Apparemment, le syndrome peut être traité et guéri. Les victimes doivent être progressivement familiarisées avec la vérité objective de leur situation. L'Europe doit se réveiller de ses illusions sur son «allié américain».

    Finian Cunningham (Europe solidaire, 10 septembre 2019)

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  • Arabie Saoudite, un pays protégé ?...

    Vous pouvez découvrir ci-dessous un entretien donné par Pierre Conesa à Thinkerview, consacré à l'étrange pays "allié" de la France qu'est l'Arabie saoudite. Agrégé d'histoire et énarque, Pierre Conesa a fait partie dans les années 90 de la Délégation aux affaires stratégiques du Ministère de la défense. Désormais consultant, il est l'auteur de plusieurs essais, dont, notamment, Dr. Saoud et Mr. Djihad - La diplomatie religieuse de l'Arabie saoudite (Robert Laffont, 2016).

     

                                         

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