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crise - Page 18

  • Une colère sourde...

    Nous reproduisons ci-dessous un article particulièrement éclairant, publié dans le quotidien le Monde daté du 7 décembre 2011 et consacré à la colère des classes moyennes qui sont frappées de plein fouet par la crise et l'insécurité...

     

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    La colère sourde des français "invisibles"

    Les politologues sont convaincus que la clé de l'élection de 2012 est détenue par une population rurale et périurbaine. Exposée à la mondialisation et abandonnée par la démocratie.
     
    La société française se fissure, une partie fait le constat d'un " abandon démocratique ".
    C'est la " France des invisibles ", la " France d'à côté ", celle qu'on n'entend pas, dont on ne relaie pas les colères et qui se sent de moins en moins représentée. Avec des outils d'analyse différents, des sociologues, des géographes, des politologues et des spécialistes de l'opinion travaillant pour des institutions différentes et parfois concurrentes arrivent au même diagnostic. A cinq mois de l'élection présidentielle, ils partagent la même conviction : la clé de l'élection se trouve dans la réponse que les candidats sauront apporter à cette partie de l'électorat, de plus en plus nombreuse, qui oscille entre colère sourde et résignation rageuse.
    " Une rupture d'ordre existentiel  s'est produite ", affirme le sociologue et sondeur François Miquet-Marty, qui vient de publier Les Oubliés de la démocratie (Michalon, 304 p.). Des franges de plus en plus larges de la population ont le sentiment que ce qu'elles vivent n'est relayé par personne. Alain Mergier fait le même constat. En 2006, cet ancien professeur de sémiologie avait publié, avec le sociologue Philippe Guibert, une enquête sur les milieux populaires dont le titre avait marqué les esprits : Le Descenseur social (Plon, Fondation Jean-Jaurès). Cinq ans plus tard, le regard qu'il porte sur la société française est beaucoup plus inquiétant. Plus que jamais, explique-t-il, s'est installée l'idée que " deux France suivent des chemins opposés ".
    L'image n'est plus, comme il y a encore quelques années, celle d'une " société à deux vitesses ", dont une partie profiterait plus que l'autre des fruits de la croissance. Désormais, " une partie de la société a le sentiment qu'elle fait marche arrière parce que l'autre fait marche avant ", explique M. Mergier. Comme si le bonheur des uns ne pouvait passer que par le malheur des autres.
    Ce sentiment de " faire marche arrière ", combien sont-ils au juste à le partager ? " Jusqu'au milieu des années 2000, on pouvait dire que c'était l'apanage des milieux populaires ", répond M. Mergier. Grosso modo la France du " non ", celle qui avait voté non aux référendums européens de 1992 et 2005, parce qu'elle se sentait perdante dans la mondialisation. " Aujourd'hui, une partie des classes moyennes est touchée ", ajoute-t-il, tout en convenant qu'une définition socio-économique est insuffisante.
    Plus encore que le niveau de revenu en tant que tel, c'est l'image que se font les individus de leur place dans la société qui importe. " La puissance des marchés a engendré un malaise existentiel et diffusMême certains cadres sont touchés : ils ont le sentiment de subir aujourd'hui une perte de leur valeur personnelle, car l'obligation de rentabilité à court terme remet en cause leur travail ", explique M. Mergier.
    Pour cerner les contours de cette société hantée par la perte d'identité et la crainte du déclassement, Christophe Guilluy dessine des cartes. Coauteur d'un Atlas des nouvelles fractures sociales (Autrement, 2004), ce géographe distingue deux France. La première est celle des " 25 grandes métropoles qui profitent de la dynamique de la mondialisation ". Elles vivent un double phénomène d'embourgeoisement et d'immigration. La seconde France inclut l'essentiel du monde rural et périurbain, mais aussi de très nombreuses villes moyennes, touchées par la désindustrialisation et les plans sociaux à répétition.
    Selon M. Guilly, cette " France périphérique ", caractérisée par " une part plus importante des ouvriers et des employés dans la population, un taux de chômage et d'emploi partiel supérieur à la moyenne nationale et un revenu moyen inférieur au revenu médian ", concentrerait environ 65 % de la population. Elle accueille des natifs, mais aussi des migrants qui n'ont pu trouver leur place dans les grandes métropoles.
    L'Ouest, par exemple, a connu récemment d'importants mouvements de population, mais " c'est une géographie qui va se figer, car les logiques foncières sont très fortes : une fois que vous avez quitté la ville, vous n'y revenez plus ", explique le géographe. C'est la raison pour laquelle il ne croit plus à la notion de classes moyennes. " On assiste à la réémergence des classes populaires, à qui on répète depuis vingt-cinq ans qu'elles vont profiter de la mondialisation et qui, en réalité, sont en situation de précarité sociale, éloignées des endroits importants et de l'offre scolaire la plus qualifiée. Si l'usine du coin ferme, elles dégringolent. La crise valide leur crainte de la mondialisation ", ajoute Christophe Guilly qui, comme Alain Mergier, fait partie des auteurs du récent Plaidoyer pour une gauche populaire (sous la direction de Laurent Baumel et François Kalfon, Le Bord de l'eau, 118 p.).
    Que fera, en 2012, cette " France qui se sent reléguée, à tous les sens du terme " ? Pour qui voteront ces quelque 40 % d'électeurs qui affirment aujourd'hui ne se reconnaître ni dans la gauche ni dans la droite ? Le vivier est stratégique : si elles ne sont pas reconquises, ces quelque 16 millions de voix peuvent se réfugier dans l'abstention ou le vote Front national. Anne Muxel, chercheuse au Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof), rappelle que les cinq dernières élections - législatives de 2007, municipales de 2008, européennes de 2009, régionales de 2010 et cantonales de 2011 - ont enregistré des records d'abstention. Bouder les urnes devient de plus en plus une façon de sanctionner l'offre politique.
    Cependant, depuis le choc du 21 avril 2002, plus personne ne sous-estime le pouvoir d'attraction du Front national dans l'électorat populaire. Son haut niveau aux cantonales de mars - y compris dans certains secteurs de cette France de l'Ouest où le FN était jusque-là inexistant - est souligné par tous les observateurs. " Politiquement, il s'est produit quelque chose dans cet électorat, un point de rupture ", soulignent Alain Mergier et Jérôme Fourquet qui, par des chemins différents, en sont arrivés à la même conclusion : pour une partie de l'électorat populaire, le vote FN n'est plus un vote de sanction ou d'avertissement mais un vote d'adhésion (Le Point de rupture, Fondation Jean-Jaurès, 86 p.)
    C'est que la crise de la dette a un effet ravageur : elle sape la légitimité des gouvernants qui semblent courir derrière les marchés. Elle n'est pas appréhendée par le biais des discours politiques mais à travers l'expérience personnelle du surendettement. " L'idée prévaut que c'est une dette pharaonique, qui ne peut trouver de solution dans le cadre économique actuel.  Pour rompre le noeud, il faut trancher. Pour beaucoup, cela passe par la sortie de l'euro ", observe M. Mergier. Chez les ouvriers et les employés, plus de la moitié des électeurs souhaite la disparition de la monnaie unique, alors que ce sentiment n'est partagé que par un tiers de l'ensemble de l'électorat.
    Des entretiens réalisés par Alain Mergier, mais aussi de la récente enquête publiée par François Miquet-Marty, un mot surnage : l'insécurité. Physique, économique, identitaire, liée au vécu et, tout aussi important, à la conviction qu'il s'est produit une rupture dans les règles du jeu. " Quand vous n'avez pas de réseaux, la notion de règle du jeu est vitale, explique M. Mergier. Elle renvoie à la question des habitudes qui, lorsqu'elles sont brisées, induisent la menace de l'imprévisible. "
    C'est parce qu'ils ont l'impression que les règles du jeu sont faussées que " les milieux populaires  détestent  les profiteurs du bas, ceux qui trichent avec les prestations sociales et qui travaillent au noir ", explique le chercheur. Et c'est parce qu'ils ont l'impression de subir un processus de destruction des règles de vie commune que " le terme le plus porteur dans leur discours est celui d'islamisation, qui renvoie à la peur d'une hégémonie ", assure M. Mergier. " Les milieux populaires sont ceux qui ont été les plus exposés à la mondialisation et au multiculturalisme. Or on ne les a pas armés pour ", confirme M. Guilluy.
    Pour les candidats qui veulent reconquérir l'électorat populaire, la conjugaison de la question identitaire et de la question sociale est redoutable, car celle qui fait le lien entre les deux problématiques est précisément Marine Le Pen. " Elle colle à la demande. Elle a calé son programme sur la nouvelle sociologie du FN. Elle est passée du libéralisme à l'étatisme ", constate M. Guilluy. Dans la revue Etudes, Dominique Reynié, directeur général de la Fondation pour l'innovation politique (proche de l'UMP) et auteur du livre Populismes, la pente fatale (Plon, 280 p.), qualifie le discours de la présidente du FN d'" ethno-socialiste ".
    " La question de l'extrême droite n'est pas seulement une question politique posée à la droite, c'est aussi une question sociale posée à la gauche ", confirme Pascal Perrineau, directeur du Cevipof, qui insiste sur le parallélisme avec l'évolution des extrêmes droites européennes. " Le protectionnisme culturel s'est prolongé d'un ralliement au protectionnisme économique et d'une remise en cause du credo néolibéral du début ", dit-il. Pour M. Miquet-Marty, " le grand danger de la période a un nom : le populisme ".

    Françoise Fressoz et Thomas Wieder ( Le Monde, 7 décembre 2011)
     
     
     
       
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  • Tour d'horizon... (19)

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    Au sommaire cette semaine :

    - sur Metamag, Jean Bonnevey pose une bonne question à propos des élections en Russie...

    Poutine a-t-il vraiment perdu les élections russes ?

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    - sur Investig'Action, Grégory Mauzé analyse le rôle de vecteur de la pensée unique joué par les médias depuis le début de la crise...

    Les médias et la crise de l'Euro : inépuisable pensée unique

    jean bonnevey,poutine,occident

     

     

     

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  • Il faut définanciariser l'économie !...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'André Orléan, cueilli dans le quotidien Le Monde consacré à la définanciarisation de l'économie comme remède à la crise actuelle. Economiste, André Orléan a publié De l'euphorie à la panique : penser la crise financière (Editions de la Rue d'Ulm, 2009).

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    Il faut définanciariser l'économie

    L'économie européenne connaît une crise d'une gravité extrême, sans précédent depuis la crise des années 1930. Elle touche simultanément la finance, la monnaie et l'emploi. Concevoir des réponses appropriées suppose qu'un juste diagnostic soit porté sur la nature des difficultés que nous traversons.

    Or le diagnostic lui-même ne fait pas l'unanimité. Si la responsabilité de la sphère financière est le plus souvent mise en avant, elle donne lieu à deux lectures contrastées. Une première interprétation, celle que défend le G20 depuis le sommet de Washington du 15 novembre 2008, met en cause spécifiquement les "dérives" du système financier. La liste des dysfonctionnements mis en avant est impressionnante : l'opacité des produits titrisés, les rémunérations excessives des traders, les paradis fiscaux, des normes comptables inappropriées, des régulateurs défaillants, des agences de notation sous influence, une politique monétaire laxiste, pour ne citer que les principaux.

    Cette première lecture propose autant de réformes qu'il y a de dysfonctionnements dans le but de débarrasser la sphère financière de ses excès. Autrement dit, la primauté accordée aux marchés financiers est conservée mais dans le cadre d'une concurrence purifiée de ses dérives. Le capitalisme financiarisé que nous connaissons depuis trente ans n'est pas remis en question. Il demeure aux yeux du G20 le cadre institutionnel adéquat. Il s'agit de le renforcer. La lecture de la crise que je propose est différente.

    Ce que je mets en doute, c'est l'idée selon laquelle des marchés financiers même transparents permettraient une allocation du capital satisfaisante. Il faut a contrario considérer que les prix financiers ne fournissent pas de bons signaux aux acteurs économiques. C'est cette inadéquation des prix financiers qui est à l'origine des déséquilibres que nous connaissons, y compris macroéconomiques. Si ce diagnostic est exact, alors le capitalisme financiarisé, qui a pour trait distinctif de faire jouer un rôle central aux prix financiers dans sa régulation, doit être abandonné.

    Pour comprendre ce point de vue, il faut garder à l'esprit que les prix sont le coeur de la régulation économique. C'est sur leur justesse que repose entièrement l'efficacité tant vantée des économies de marché. Dans un célèbre article de 1945, l'économiste Friedrich Hayek démontre avec brio que les acteurs économiques n'ont nullement besoin d'avoir une connaissance exhaustive de l'économie, parce que l'information décisive est contenue dans les prix.

    Chaque agent n'a qu'une connaissance locale, limitée à son environnement, et il revient aux prix d'agréger toutes ces informations locales pour produire une vision globale cohérente. Prenant l'exemple d'une matière première devenue plus rare, Friedrich Hayek montre que l'économie va s'adapter à ce choc sans que plus d'une poignée d'individus ne soient informés du choc initial. Il conclut : "L'aspect le plus significatif de ce système est l'économie de connaissance qu'il permet, ou, ce qui revient au même, le peu de connaissance dont les participants ont besoin pour pouvoir prendre la mesure qui s'impose." On ne saurait trop insister sur ce résultat. Le mécanisme des prix joue un rôle essentiel dans la coordination marchande. C'est là un des résultats essentiels de la théorie économique depuis Adam Smith.

    Notons cependant que cette analyse théorique s'est d'abord limitée aux seuls marchés de biens ordinaires. Ce n'est que très récemment qu'elle a été étendue aux marchés financiers. Cette extension, ce qu'on nomme la théorie de l'efficience financière, date seulement des années 1970. Elle a accompagné la dérégulation financière, qui y a puisé ses justifications les plus fortes. C'est au nom de l'aptitude supposée des marchés financiers à produire des prix justes que l'on a promu l'intense dérégulation financière qui est à l'origine du capitalisme financiarisé. Si on observe l'histoire longue du capitalisme, cette dérégulation est assurément exceptionnelle.

    Rappelons par exemple que, jusque dans les années 1970, la plupart des taux d'intérêt étaient des prix administrés par la puissance publique. Selon la théorie de l'efficience, de même que les prix des marchandises sont censés refléter leur rareté objective, les prix financiers sont supposés proposer une image juste du futur et de ses risques.

    Ainsi, les cours boursiers exprimeraient la profitabilité à venir des entreprises et les taux d'intérêt, la probabilité de défaut des emprunteurs. C'est cette analyse que je conteste : la concurrence financière ne fournit pas une juste valorisation des activités productives, que les marchés soient transparents ou opaques. Les taux d'intérêt sur les dettes publiques européennes nous en fournissent une illustration exemplaire.

    En l'espèce, on ne saurait faire valoir une quelconque opacité de ces titres qui sont parmi les plus transparents et les plus liquides. Pour autant, le bilan de ces marchés n'est guère glorieux. Ils n'ont cessé d'être dans l'erreur. Pour le passé, on peut l'affirmer sans ambiguïté.

    En effet, durant la période qui va de la formation de l'euro aux années 2007-2008, on constate que ces marchés ont totalement oublié le risque souverain : les taux d'intérêt de tous les pays de la zone euro ont convergé vers un même niveau, pour l'Allemagne comme pour la Grèce.

    A l'évidence, ces marchés ont montré une forte myopie. Cela n'a pas été sans conséquence. Une discrimination dans les taux aurait pu mettre en garde certaines économies contre les excès de l'endettement. Les marchés n'ont pas joué le rôle que la théorie de l'efficience leur attribue : celui d'un signal informant les acteurs. Aujourd'hui il en va de même. On assiste à une divergence profonde des taux entre les pays de la zone euro qui n'est pas justifiée non plus. Les niveaux atteints par les taux d'intérêt ne nous livrent en rien une juste évaluation du risque de défaut des pays considérés.

    Si on met de côté la Grèce, considérée comme insolvable par beaucoup, la majorité des économistes est d'accord pour considérer l'inadéquation de ces taux. Ils sont inappropriés pour au moins trois raisons : d'une part, ils impliquent une ponction sur la richesse sociale tout à fait démesurée ; d'autre part, ils incitent à des politiques de rigueur exagérées ; enfin, ils poussent des économies solvables à la faillite. C'est dire leur extrême dangerosité.

    Or, ce qui vient d'être dit des taux d'intérêt peut être aisément étendu à tous les prix financiers. Ils produisent périodiquement de mauvaises incitations, conduisant les économies à la dérive, comme on le voit aujourd'hui pour la dette publique. Ainsi, pour les actions, se souvient-on des valorisations démentes de la bulle Internet et de la crise qui s'en est suivie au début des années 2000.

    C'est là encore un exemple pour lequel l'excuse de l'opacité ne peut être retenue. Il en va de même pour les taux de change qui connaissent d'amples variations déconnectées des données objectives. Plus généralement, les marchés boursiers véhiculent, depuis une dizaine d'années, des exigences de rentabilité, le fameux ROE (return on equity), qui pèsent fortement sur l'investissement et la croissance. Il faut en conclure que les prix financiers ne sont pas de bons signaux. Aucune force de rappel ne vient en limiter les excès, à la différence de ce qui se passe sur les marchés de biens ordinaires.

    Les prix financiers peuvent monter très haut sans que la demande pour ces produits ne se tarisse, car les investisseurs peuvent continuer à anticiper une hausse des prix qui justifie de nouveaux achats. De même, les prix peuvent descendre très bas sans susciter une demande qui viendrait la freiner. C'est ce qu'a montré la crise en 2008, les prix des produits titrisés sont descendus à des niveaux bien plus bas que ce que pouvait justifier toute valorisation rationnelle, pourtant aucune demande ne s'est manifestée, parce que les investisseurs craignaient de nouvelles baisses. En conséquence, le système s'est trouvé au bord de la faillite générale.

    Si la chute des prix a été stoppée, ce n'est en rien par l'action des supposées propriétés autorégulatrices de la concurrence financière, c'est parce que les autorités publiques ont choisi d'acheter pour éviter une crise générale.

    Cette divergence quant au diagnostic sur la nature de la crise me conduit à proposer une tout autre politique que celle affichée par le G20, sans même parler ici de son extrême lenteur à la mettre en oeuvre. Nous nous sommes efforcés dans le cadre de cet article d'en cerner le principe directeur : parce que la finance produit des valorisations qui nous conduisent dans le mur, il importe d'en réduire drastiquement le rôle.

    La transparence financière ne résoudra pas nos problèmes. Il faut définanciariser nos économies. C'est là assurément un vaste chantier et une véritable révolution intellectuelle, tant nous avons été habitués au cours des vingt dernières années à nous en remettre aveuglément aux estimations des marchés. Cette emprise de la valeur financière doit être radicalement remise en cause.

    En son principe, la définanciarisation repose sur la constitution de pouvoirs d'évaluation hors des marchés (entrepreneurs, syndicats, pouvoirs publics, associations), aptes à proposer des finalités conformes à l'intérêt collectif. Tel est l'enjeu des politiques monétaire, industrielle et écologique. Aujourd'hui racheter de la dette publique, c'est pour la banque centrale défendre une autre évaluation que celle des marchés. Il est clair que ces mutations ne pourront se développer que si, simultanément, les circuits du financement de l'économie se trouvent fortement réorganisés de façon à dégonfler puissamment la sphère financière.

    André Orléan (Le Monde, 5 décembre 2011)

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  • "Les classes moyennes en voie de prolétarisation..."

    Nous reproduisons ci-dessous un entretien avec Louis Chauvel, paru en octobre dans Marianne et consacré à la prolétarisation accélérée des classes moyennes. Sociologue, Louis Chauvel a publié en 2006, aux éditions du Seuil, un essai intitulé Les classes moyennes à la dérive. 

     

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    Marianne : Vous avez montré dans « Les classes moyennes à la dérive » la rupture générationnelle à l'œuvre dans la société française. 1983, 1995, 2005...quid de celle d'après.. Mais cette dynamique laisse t elle invariant le concept de classe moyenne? Ne voit on pas apparaitre à présent un nouveau modèle de société? Une nouvelle classe populaire? Une fragmentation définitive de cette ensemble déjà hétéroclite?

    Louis Chauvel : Du point de vue des classes moyennes, le mandat présidentiel qui s'achève a été catastrophique. Mais en réalité, le Président Sarkozy n'y est pas pour grand chose puisque, ici (aux Etats-Unis où je réside cette année), Monsieur Obama n'a pas su mieux faire. Nous sommes aujourd'hui dans une crise d'une profondeur que seuls les Cassandre avaient vu venir. Mais il est vrai que même les plus pessimistes sont en dessous des hypothèses de travail.

    Que se passe-t-il en réalité ?

    L'Europe continentale rencontre une nouvelle crise tous les dix ans en moyenne (1973, 1983, 1992, 2001, 2008, ...). En période de crise, face au ralentissement et au chômage, on ponctionne dans l'épargne ou on s'endette, et on reconstitue le matelas dans les périodes un peu meilleures. Le problème est que le rythme des crises cycliques s'accélère singulièrement, et que le matelas amortisseur n'a pas eu le temps de se remplir de nouveau. Pour les classes moyennes, c'est la confrontation à la théorie du sucre au fond d'une tasse de café : on croit que la délitescence est celle des niveaux inférieurs, mais c'est l'ensemble de l'édifice social qui sera touché. Les problèmes sociaux en 1975 étaient ceux du quart monde ; en 1981 des jeunes chômeurs ; en 1990 de la nouvelle pauvreté puis celle de la fracture définitive entre les classes populaires et les classes moyennes ; maintenant, c'est au tour des classes moyennes de considérer le précipice. Le secteur public conserve la sécurité de l'emploi, mais la pénurie de postes, l'accroissement des contrôles et des cadences, la dégradation générale des conditions de travail a profondément changé le rapport au métier.

    Dans le privé, la détérioration des perspectives de croissance du pouvoir d'achat et le risque accru de chômage sont des facteurs qui poussent beaucoup vers un de profond désengagement. Pourquoi se battre pour une entreprise qui fait semblant de vous payer et qui vous enverra par dessus bord au premier signe de tangage, quel qu'ait été votre engagement jusque là ? Surtout, pour une masse de salariés, même de bon niveau de vie, constater que les prix de l'immobilier dans le centre des grandes villes et à fortiori à Paris ne fléchit pas, bien au contraire, produit la preuve que ce n'est plus par le salaire que l'on peut vivre. Le risque est bien de voir apparaître une forme de prolétarisation d'une classe moyenne, une prolétarisation du point de vue du logement et des perspectives de vie. 

    La crise, la dette....et éventuellement le coût de la dépendance qui apparait avec l'allongement de la vie, ne sont elles pas en elles mêmes des promesses à d'avantage d'efforts pour les salariés, du smicard aux cadres aisés? 

    Pour ce qui est des perspectives d'avenir, il est certain qu'au versant « dépenses » les besoins exploseront. La machine économique fonctionne (de plus en plus mal) avec de moins en moins de personnel (dans les pays anciennement développés), d'où la nécessité de subventionner un loisir de plus en plus long : préretraite, retraites, dépendance, etc. sans compter les longues périodes de chômage à l'entrée dans la vie, qui ne sont pas sans coût, comme le savent bien les parents concernés.
    Dans un pays où le socialisme s'est construit depuis quarante ans dans son éloignement vis-à-vis du travail, la population en emploi continuera de connaître l'écart béant entre le coût du travail (le coût tout inclus, avant charges, celui que regarde l'employeur) et le niveau de vie (après charge, ce que le banquier regarde avant de consentir un prêt).
    En même temps, même si aujourd'hui encore, un certain nombre de services ne coûtent en apparence rien (école, santé, etc.), l'exemple américain que j'étudie de près actuellement montre bien les marges de progression des coûts des mutuelles et de bien d'autres postes qui pourraient bien nous attendre. La santé aujourd'hui ne coûte rien car le généraliste accepte encore les 20 minutes à 23 euros. Ce sont des humanistes, car dans mon quartier à New York, on atteint plutôt les 300 dollars, et dans les autres aussi. Même chose pour les écoles : la dégradation du secteur public porte en germe une dérive dont je vois bien ici ce qu'elle porte à l'horizon de moins de 20 ans : il faut payer entre 20 et 30.000 dollars par an pour donner un avenir à ses enfants. Ainsi, les classes moyennes salariées pourraient bien connaître un sort assez intéressant : (mal) payées comme en France et devant faire face aux mêmes structures de coût qu'aux Etats-Unis.

     


     

    Vers une nouvelle classe populaire?
    Vers une nouvelle classe populaire?
     

    Quels sont les enjeux en terme de detention d'actifs, tant matériels que culturels? 
     

    L. C. : Nous n'avons pas vu la fin de l'histoire. Les créanciers sont rarement remboursés, sinon en monnaie de singe : que l'inflation passe ou que l'euro casse, il n'est pas nécessaire d'avoir une boule de cristal pour imaginer le devenir des emprunts russes de la génération présente. Pour ce qui est des assignats universitaires diffusés par la massification, nous savons aussi ce qu'ils deviennent, en Italie, en France, et même maintenant aux Etats-Unis et en Chine.

    Aux Etats-Unis, on détecte maintenant l'émergence d'une « Generation Limbo » (qui se prononce comme « bimbo »), une « génération des limbes », des « graduates », de « colleges », même de la « Ivy league » qui ne trouvent pas d'autres « jobs » que ceux de « bar managers » ou de « MacDo specialists »... Les vieux pays occidentaux connaissent bien ce phénomène, mais on le retrouve également au Japon avec les « Parasaito Shinguru » (célibataires parasites vivant au crochet des parents), voire en Chine avec les « ant tribes », la « tribu des fourmis », en stages à répétition pour des niveaux de revenus ne permettant pas de vivre dans la Chine urbaine d'aujourd'hui. Les mieux protégés parmi les titulaires de titres de propriété ou de titres scolaires les plus prisés font face aujourd'hui à des soucis qu'ils ne connaissaient pas voilà encore quatre ans. 
     

    Vous avez longuement évoqué la question du prix des actifs, et notamment celui des logements. Selon vos calculs, sur les 20 dernières années le pouvoir d'achat des salariés a été amputé de 15% si l'on tient compte de la dérive du prix de la pierre....
     

    Par rapport au renchérissement de l'immobilier, les moins de quarante ans ont perdu près de 25% de leur pouvoir d'achat: en 1981, on se logeait mieux en ne consacrant que 15% de son budget annuel qu'aujourd'hui en y laissant 30%. Depuis 2008, les prix de l'immobilier ont continué à grimper à Paris et au centre des grandes villes de région. Cela s'inversera tôt ou tard, comme le mouvement est déjà très largement amorcé en Espagne. Mais les jeunes Espagnols en ont-ils bénéficié ? Non, car la situation de l'emploi s'est dégradée plus encore. Le pire est réservé à ceux qui ont emprunté dans le haut de la bulle spéculative et doivent rembourser des années un bien qui peut avoir perdu près de la moitié de sa valeur. 
     

    Comment les partis, les syndicats, dont la pyramide des âges de leurs adhérents, donc un biais prenant plus largement en compte les intérêts des classes d'âges proches de la retraite, peuvent-ils trouver des solutions équilibrées?
     

    La masse des élites politiques et syndicales en France est en bout de course générationnelle. Comparée à l'assemblée danoise nouvellement élue, la France fait figure de pays d'un autre monde. L'essentiel du personnel politique français avait 20 ans en 1968 et est resté jeune toute sa vie. Beaucoup de députés, jeunes sexagénaires, pourront se présenter de nouveau en 2012, notamment parce qu'il n'existe pas de relève et que c'est un métier dur mais stimulant qui offre quelques compensations. En réalité, le renouvellement est certain et fracassant à l'horizon de 2017, mais il est totalement douteux dans la perspective de 2012. En attendant, les enjeux d'aujourd'hui continueront d'être toisés à l'aune de ce qui était bien ou mal dans les AG de 1968. 
     

    Idéalisée comme socle de la démocratie, la classe moyenne doit elle être reconstruite? Est ce un objectif politique nécessaire?
     

    Que faire ? disait Lénine. Si l'on souhaite vraiment éviter les remèdes de cheval néo-libéral dont le FMI a déjà fait l'expérimentation dans de nombreux pays avant le nôtre (mais en même temps on fait tout pour s'y précipiter au plus vite), il faut réinvestir dans l'avenir, dans la science, le travail, les industries que nous pourrons vraiment maîtriser dans 30 ans. Nous vivons encore aujourd'hui sur les rentes du TGV, du téléphone, de l'aérospatiale, des investissements réalisés à la fin des Trente glorieuses. Sans ce retour à la centralité du travail qualifié dans la construction de l'avenir et du progrès, nous laisseront à d'autre le soin d'inventer le 21e siècle.

    Louis Chauvel, propos recueillis par Emmanuel Lévy (Marianne, 15 octobre 2011) 

     
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  • La stratégie Sarko-masochiste...

    Nous reproduisons ci-dessous un articlede J.H. d'Avirac, cueilli sur Polémia, qui nous livre une analyse brillante de la stratégie mise en place par Sarkoozy pour sidérer les Français et assurer sa ré-élection.

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    Austérité et marketing politique : la stratégie Sarko-masochiste

    Pour façonner cette stratégie et cette posture inédite – pour ne pas dire à l’opposé de tout ce que nous avons connu jusqu’alors – toutes les conditions sont finalement réunies :

    • - une gauche bisounours façon Flanby, « caviar-Sofitel » ou « rouge et de Lille », toujours prompte à vouloir « réenchanter » les Français ;
    • - une conjoncture mondiale pesante, alarmiste et ultramédiatisée ;
    • - un citoyen plus amnésique et consodépendant qu’il ne l’a jamais été ;
    • - une armée d’oiseaux de mauvais augure qui, de droite à gauche, économistes ou politiciens, n’en finissent pas de nourrir le pessimisme ambiant avec une réelle clairvoyance se mettant paradoxalement et involontairement au service du dessein sarkoziste.

    Avoir l’audace de « faire mal » dans ce contexte apocalyptique pourrait contribuer à reconstruire la figure héroïque du Radeau de la Méduse !… Médusés, nous pouvons l’être, en effet !… Ainsi, nous serions tous dans la même galère, rameurs fouettés jusqu’au sang et sommés de ne pas nous tromper de capitaine ou de figure de proue, au risque d’éventrer dans la tempête la coque du navire sur les redoutables récifs Standard & Poor, Fitch ou Moodys…

    Les pyromanes devenus pompiers

    Tout ceci tiendrait à peu près la route à un détail près : les donneurs de leçon d’aujourd’hui ont mis, il n’y a pas si longtemps, la main dans le pot de confiture et même le bras tout entier. Ils ont largement contribué à créer la situation dans laquelle nous sommes englués et ne devraient pas avoir une once de crédibilité dans le combat auquel ils nous convient. Mais là encore tout est prévu : un doigt de mea culpa, deux doigts de plan Orsec (l’austérité devenant la promesse attendue) et cela hors de toute logique partisane. Gageons qu’il y aura en effet dans cette campagne une volonté sarkozienne de mélanger les genres entre le combat électoral et l’impérieuse nécessité de rester à bord jusqu’au bout pour sauver la France, l’Europe, voire le monde !… Loin donc de l’UMP, bien au-dessus des partis, au-delà des visions du monde vécues comme trop abstraites lorsque la maison brûle. C’est bien casqué jusqu’aux dents et dans son rôle de « Playmobil Soldat du Feu » que le petit Nicolas donnera le meilleur de son jeu d’acteur.

    Tragédie, émotion, grand frisson

    Ainsi se met en place peu à peu le grand théâtre de la « Sarkologie » pour reprendre le terme de Michel Maffesoli. Notons que ce dernier mise dans son ouvrage éponyme sur une réélection présentée comme l’aboutissement d’une dramaturgie où le registre émotionnel sera la clé oscillant sans cesse entre hostilité et fascination.

    Sous couvert de pragmatisme, voici donc venir l’ultime imposture : créer la tension nécessaire au ralliement. Et le comédien a plusieurs cordes à son arc. A coup sûr, nous le verrons fondre sous les risettes de la petite Giulia, verser une larme sur le sort d’un jeune travailleur français de souche et SDF, vibrer intérieurement sous le drapeau. Moins de Rolex et de délires américains, plus de France éternelle et, par-dessus tout, savamment distillé, l’homme derrière le combattant débarrassé de cette indécence bling-bling désormais bien identifiée et circonscrite par les conseillers en communication.

    Face à l’héroïque président sortant : un candidat favori des sondages de cette fin d’année – une situation qui est par expérience d’une extrême précarité – et une candidate luttant pour la respectabilité dans un royaume soumis au politiquement correct.

    Oublier la face noire du quinquennat

    Manipulé et légumisé jusqu’à la moelle, l’électeur devrait pouvoir ainsi, au fil du temps, en oublier la face noire et chiffrée de ce désastreux quinquennat : les 500 milliards de dette (sur les 1700) d’origine garantie Sarkozy ; nos 12 millions d’immigrés ou « fils de » (200.000 de plus chaque année) tantôt présentés au gré des circonstances comme un problème ou « une chance pour la France » ; la face cachée des « pères la vertu » budgétaire : 600 millions de dépenses en sondages et communication des ministères entre 2006 et 2010, les 140% d’augmentation du salaire présidentiel décidé au lendemain de l’élection mais fort heureusement désormais « gelé », les nuits de Sarko ou Rama Yade au G20 ou à la Coupe du monde à plus de 30.000 € la suite, des voyages en avion présidentiel (ULM sommairement aménagé à 185 millions d’euros) au coût horaire de 20.000 €, la garden-party de l’Elysée à 700.000 €, les campagnes de pub du gouvernement à 100 millions d’euros par an, les 800 millions d’euros dilapidés contre la grippe A (A comme Apocalypse Bachelot), les visites présidentielles d’usines ou d’hôpitaux à 200.000 € la journée (salaire de 8 infirmières pendant 1 an), les congrès du président devant les parlementaires à 600.000 € (5000 € la minute).

    Sans parler, évidemment, des 120.000 emplois industriels massacrés chaque année et du doublement du déficit de notre commerce extérieur depuis 2007, des chiffres dramatiques de l’insécurité, des perfusions de milliards destinés aux banques avec les contreparties demandées les plus laxistes d’Europe et de ces fort coûteuses guerres estampillées « BHL, le seigneur des guerres justes » pour rétablir charia et polygamie en Afrique du Nord…

    Alliés serviles ou pourfendeurs de la dictature financière

    Nous le voyons venir, dans ce contexte la seule chose qui soit véritablement de « rigueur » pour l’UMP et son champion, c’est bien la mise en scène pour sauver les meubles. Ce bataillon ne sera d’ailleurs pas économe de volte-face, tour à tour alliés serviles ou pourfendeurs de cette dictature financière qui s’abat bien réellement sur le monde. Scénographie, préparation de l’opinion, complicités médiatiques… tout l’arsenal est prêt pour faire du vibrionnant roi de la scène, sanglé de clous et de cuir, un père fouettard plus vénéré que le père Noël, un défenseur de l’identité presque plus convaincant que le Front, un humaniste plus sensible que les sociolandes, un gestionnaire plus crédible et rigoureux que le Finanzminister d’Angela. Quant au spectateur, tétanisé, il s’enfoncera une fois de plus au plus profond de son fauteuil dans les ténèbres de la salle, victime consentante d’un numéro de cirque tout simplement au sommet de l’obscénité et du mensonge, dont les protagonistes miment la comédie de ce Pouvoir qui ne leur appartient plus.

    J.H. D'Avirac (Polémia, 14 novembre 2011) 

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  • L'hyperclasse mondiale à l'assaut de la démocratie ?...

    Les éditions de Paris viennent de publier 2013 : l'apocalypse économique - L'hyperclasse mondiale à l'assaut de l'économie et de la démocratie, un essai de Jean-Michel Groven préfacé par l'économiste "dissident" Jean-luc Gréau. Diplômé de Sciences-po Paris, Jean-Michel Groven est attaché parlementaire.

     

    Apocalypse économique.jpg

    "Croissance économique au plus bas, crise financière sans précédent: deux grands symptômes des dysfonctionnements qui marquent notre siècle. Mais quelles personnes se cachent derrière ces bouleversements économiques et sociaux ? Et si cela s'aggravait demain, quelles en seraient les conséquences ? Une hyperclasse mondiale est arrivée à pleine maturité. Parfaitement intégrée au système de la mondialisation qu'elle a conçue, elle profite de l'ouverture des échanges pour s'enrichir tout en étant protégée dans sa tour d'ivoire. L'avènement de cette nouvelle classe mondiale est le fruit d'un long processus qui prend racine dans les années suivant les manifestations de mai 1968. Tout en s'érigeant en juge-arbitre face aux problèmes gangrenant nos sociétés (inégalités, insécurité), elle n'est, en réalité, guidée que par l'individualisme. Créer des conflits au sein de la société devient sa spécialité et lui apparaît comme un moyen de s'auto-légitimer et de diffuser une nouvelle mentalité bien-pensante et politiquement correcte accroissant le repli sur soi et les réactions communautaristes. Ce phénomène provoque un désenchantement pour la démocratie qui subsiste seulement comme apparence, et il constitue surtout un prétexte au renforcement des élites de la nouvelle classe sociale plus que jamais attachée à défendre ses intérêts. Les jours de la démocratie sont-ils comptés ? Et le système économique mondial en sortira-t-il indemne ? Telles sont les interrogations qui se posent au sujet de l'émergence d'une post-démocratie."

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