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Points de vue - Page 79

  • Écologie politique ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'Hervé Juvin, cueilli sur son site personnel et consacré à la question de l'écologie politique...

    Économiste de formation et député européen, Hervé Juvin est notamment l'auteur de deux essais essentiels, Le renversement du monde (Gallimard, 2010) et La grande séparation - Pour une écologie des civilisations (Gallimard, 2013). Il a également publié un manifeste intitulé France, le moment politique (Rocher, 2018).

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    Écologie politique ?

    La science des systèmes vivants complexes est mobilisée pour garantir les conditions favorables à l’existence humaine sur terre. C’est tout le sens d’une écologie politique, écologie des ressources et de la vie. Mais aussi, écologie des pouvoirs et des intérêts. Des Nations et des civilisations. Trop longtemps, le discours de l’écologie politique a ignoré les questions géopolitiques. Il a ignoré la puissance, la Défense, et la sécurité. Alibi de la globalisation, il s’est abandonné aux platitudes de l’universalisme marchand et il leur a sacrifié la réalité des écosystèmes et des cultures qui leur sont liées, tous différents, tous enfants de la géographie et de l’histoire, à la fiction d’un monde humain uniformisé par la technique, d’un côté, de l’autre, à une sacralisation de la nature importée du mythe américain du « wilderness » — que le monde serait beau sans hommes !

    Une évidence

    L’urgence est d’accepter l’évidence ; parce qu’elle concerne l’eau et la terre, la diversité animale et végétale, la qualité de l’air et des aliments, parce qu’elle touche à la fertilité et à la fécondité animale, végétale et humaine, parce qu’elle entre en consonance avec les identités collectives, les traditions et les frontières, l’écologie est aussi un savoir de la sécurité, de la défense — et de la paix. Les circonstances dramatiques déclenchées par l’invasion russe de l’Ukraine appellent aussi une révision drastique des politiques dites « environnementales ». D’abord pour affirmer sans ambiguïté que l’écologie humaine est seule capable d’assurer dans la durée les ressources naturelles et les services écosystémiques nécessaires à la vie de nos concitoyens sur leur terre et dans leur Nation. Une terre épuisée par l’abus de traitements artificiels et des exigences de rendement excessives met en danger la sécurité alimentaire de la population qu’elle nourrit et la rend dépendante de l’extérieur. À long terme, la qualité environnementale qu’exprime notamment la biodiversité est un facteur décisif de cette sécurité qui commence par l’autonomie ; produire chez soi ce que l’on consomme, qui se nourrit de l’économie circulaire ; rien ne se perd, rien ne se jette, tout se récupère, se répare ou se transforme, et qui s’achève par la conscience du devoir de transmission familiale, locale et nationale ; transmettre aux siens un territoire plus beau, plus riche et plus vivant.L’écologie nous appelle à ménager la terre, à respecter les cycles de la vie, et à imposer des limites à la croissance des productions animales et végétales ; rien ne le dit mieux que ces terres mortes, parce que les insectes qui assurent la fécondation ont disparu, éliminés par les pesticides, comme les oiseaux qui tuent les ravageurs, et parce que la matière vivante du sol est épuisée, jusqu’à plusieurs dizaines de centimètres de profondeur, par l’abus des fongicides et autres chimies du sol — des terres qui ne produisent plus que gorgées d’engrais, des terres écrasées par des machines de plus en plus lourdes, travaillées par des agriculteurs devenus les faire valoir du machinisme, des semenciers et des chimistes allemands, au moment où les prix des engrais vont exploser ! Où sont la sécurité alimentaire, l’autonomie nationale et le devoir de transmettre ?

    Des singularités nationales

    Ensuite pour promouvoir le respect des singularités nationales, régionales et locales qui s’expriment dans les traditions, dans les modes de faire et de vivre, et qui traduisent la coconstruction millénaire des hommes par leur foyer territorial, et de leur foyer territorial par les hommes. Cette intimité est la première source de la richesse culturelle européenne. Elle est bafouée par des réglementations et des obligations intrusives qui alignent, uniformisent et nivellent au nom de la technique, pour le plus grand profit des multinationales, dans une logique de concentration délétère. L’Union des directives, des normes et de la conformité fait de l’Europe un non-lieu, archipel de bulles métropolitaines artificielles, séparées par des déserts à exploiter et à faire obéir.L’intérêt des multinationales est que tous les hommes construisent les mêmes maisons avec les mêmes matériaux standardisés, mangent les mêmes produits sans origine, sans saveur et sans goût, avalent les mêmes images et soient soumis aux mêmes informations — que tous les hommes deviennent les mêmes, ce qui impose l’artificialisation de leurs conditions de vie. Numérique, climatisation et individualisation vont de pair ; la sortie de la nature est le projet du capitalisme totalitaire. Face à son emprise, le localisme est la voie de la liberté, le choix politique d’une écologie humaine ; celle de l’alliance renouvelée entre l’homme et la vie.Encore, pour reconnaître que l’écologie est la science de bien vivre sur son territoire, parmi les siens, avec toutes les formes de la vie. Une écologie humaine est aussi une écologie des pouvoirs, de la puissance, de la sécurité et de la Défense. Une écologie des frontières, des États, et des marchés. Des rêves, et des désirs. L’écologie n’est pas une punition infligée à des populations qui auraient tort de vouloir défendre leurs libertés, conserver leur mode de vie, et demeurer ce qu’elles sont. Le naufrage de l’écologie politique ne s’explique pas sans le caractère anti-social, anti-national et punitif de dispositions contraires aux libertés individuelles comme aux choix de vie de nos concitoyens, des dispositions qui multiplient les exclusions, les inégalités et les discriminations, des dispositions concernant aussi bien le transport routier que les automobiles, le chauffage que l’alimentation, et qui ajoutent à la pauvreté la mauvaise conscience.
    Bouée de sauvetage du globalisme en perdition, le dérèglement climatique a été instrumentalisé pour accréditer l’idée fausse que les mêmes solutions vont résoudre un problème unique. Dans la réalité, il n’est pas deux écosystèmes touchés de la même manière par le dérèglement du climat, qui peut signifier ici refroidissement quand il entraîne ailleurs réchauffement, ma perte de biodiversité quand ici il va favoriser la fécondité du vivant ! Dans la réalité, les capacités d’adaptation humaines aux extrêmes climatiques se sont révélées extraordinaires ; et si le temps semble cette fois compté, l’urgence est tout aussi bien d’adapter et de s’adapter qu’elle est de lutter contre le changement du climat par des moyens autoritaires qui sont bien proches de devenir totalitaires.

    Pour réconcilier écologie et économie

    Inutile de rappeler les complexités à court terme. À long terme, relocalisation, réduction des intrants et des composants réalisent l’idéal de toujours des ingénieurs ; faire pareil avec moins, moins d’énergie, de matière ou d’argent. C’est la voie de l’écologie sociale, nationale et heureuse. À long terme, démocratie et écologie se rejoignent pour faire du nouveau combat pour l’autonomie humaine leur cause commune ; le grand enjeu politique du moment est de reprendre le contrôle sur la technique, de ne pas laisser les techniques, notamment numériques, disposer de nos vies et de la vie comme elles tentent de le faire à travers la sujétion inouïe des politiques aux maîtres des écrans et des algorithmes. Le nouveau combat pour l’autonomie est le combat contre l’obéissance numérique, contre la sidération numérique, contre la saisie de l’esprit par l’écran. Et l’écologie et la démocratie se rejoignent pour dénoncer la fuite en avant qui veut qu’aux imperfections des marchés, une seule solution existe ; plus de marché ! Le capitalisme devenu totalitaire à la faveur de systèmes comptables, juridiques et numériques invasifs entend que pas un grain de sable, un atome d’air, une goutte d’eau, un gène ou un être vivant, n’échappent à la loi du rendement maximal. Cette privatisation universelle est une privation généralisée. La protection abusive du capital se tourne contre la propriété, elle se tourne contre la liberté politique et la souveraineté des Nations, elle finit par ruiner la notion même de politique — la capacité des peuples de décider eux-mêmes de ce qui les concerne. Sur les limites des opérations économiques, sur les limites de l’entreprise privée, sur le contrôle des techniques et des marchés, l’écologie est la science qui peut réconcilier économie et démocratie, et tenir cette promesse fondatrice ; remettre l’économie au service de la bonne vie.

    Écologie des Nations et des civilisations

    Un écosystème qui se ferme à tout échange avec l’extérieur dépérit et meurt, un écosystème ouvert à tout ce qui lui vient de l’extérieur dépérit et meurt. Nous en sommes là. L’écologie nous enseigne qu’un certain degré de fermeture et de protection est une condition de la survie, parce que « c’est la condition de la stabilité du milieu intérieur » (Claude Bernard). Un certain degré de séparation entre sociétés humaines garantit leur liberté réciproque, leur capacité de se donner leurs lois et de suivre leur destin. Comment mieux dire qu’une globalisation qui signifie alignement et mise en conformité universelle appelle le conflit, la guerre, et la destruction ?   Nous y sommes. Il est vain de demander à l’écologie des réponses à l’urgence de la paix et de nouvelles relations internationales. Mais il n’est pas inutile de rappeler le doux savoir que la science de la vie doit infuser aux rapports internationaux comme aux relations humaines, un doux savoir des limites, de la mesure et de la modestie.
     
    Hervé Juvin (Site officiel d'Hervé Juvin, 15 avril 2022)
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  • Les lemmings votent Macron !...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Michel Geoffroy, cueilli sur Polémia et consacré au deuxième tour de l'élection présidentielle.

    Ancien haut-fonctionnaire, Michel Geoffroy a publié le Dictionnaire de Novlangue (Via Romana, 2015), en collaboration avec Jean-Yves Le Gallou, et deux essais, La Superclasse mondiale contre les Peuples (Via Romana, 2018), La nouvelle guerre des mondes (Via Romana, 2020), Immigration de masse - L'assimilation impossible (La Nouvelle Librairie, 2021) et dernièrement Le crépuscule des Lumières (Via Romana, 2021).

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    Les lemmings votent Macron !

    Les lemmings sont de petits rongeurs du nord de l’Europe, qui ont l’habitude de se déplacer en masse et parfois de tomber dans l’eau, tous ensemble, pour s’y noyer. Mais, depuis dimanche dernier, on sait qu’en France aussi il y a des lemmings… mais de la pire espèce : l’espèce électorale.

    Les lemmings abstentionnistes n’ont ni mains ni pattes

    Les abstentionnistes constituent le premier groupe de lemmings électoraux français.

    Depuis l’élection présidentielle de 2017, ils ont même proliféré en pourcentage du corps électoral : désormais ils représentent 25 % des électeurs inscrits pour le premier tour de l’élection, soit 12 824 149 lemmings exactement !

    Comme leurs petits congénères à quatre pattes, on ne sait pas bien ce qui motive leur comportement.

    Soit que le destin politique de la nation ne les concerne pas. Soit, que l’offre politique ne leur convienne pas ; mais comme il y avait déjà 12 candidats lors du premier tour de la présidentielle de 2022, on voit donc que ces lemmings ont l’odorat particulièrement délicat ! Soit qu’ils considèrent que les élections ne servent à rien.

    Mais, ce faisant, les lemmings abstentionnistes du premier tour adoptent le comportement stupide des pacifistes qui, en refusant de porter les armes, laissent le champ libre à ceux qui en ont. Les lemmings abstentionnistes ont les mains – les pattes – pures : mais parce qu’ils n’ont ni mains ni pattes.

    Les Grecs auraient méprisé ces prétendus citoyens qui refusent de s’engager et de se présenter au forum, et ils leur auraient retiré leur… citoyenneté !

    Les lemmings macronphiles n’ont pas de tête

    Viennent ensuite les lemmings qui ont voté pour Emmanuel Macron : 9 785 578 lemmings macronphiles exactement, soit 1 128 252 de plus qu’au premier tour de l’élection de 2017 ! Dans nos rues, on les reconnaît notamment au fait qu’ils continuent de porter un masque anti-covid ou qu’ils arborent les couleurs de l’Ukraine ou de la lutte contre le sida.

    Le comportement électoral de ces lemmings est étonnant. En 2017, ils pouvaient encore invoquer leur manque d’expérience ou le caractère novateur de la candidature du « gendre idéal ». Mais cinq ans après ?

    Manifestement, si les lemmings abstentionnistes n’ont ni mains ni pattes, les macronphiles, eux, n’ont pas de tête ! Car ils ne voient rien, n’entendent rien et ne sentent rien.

    Ils n’ont rien vu du catastrophique quinquennat d’Emmanuel Macron. Ni l’explosion de l’insécurité, de l’immigration, des taxes, des prix, de la précarité, de la désindustrialisation. Ni le déclassement international de la France. Ni la répression des opposants. Ni les affaires.

    Rien ! Ils n’ont rien vu, ils n’ont rien compris, ou alors tout cela ne compte pas à leurs yeux.

    Tel le Zadig de Voltaire [1], les macronphiles trouvent en effet que tout va bien quand tout va mal.

    Les macronphiles réduisent la politique à l’art du selfie

    Un micro-trottoir réalisé par TV Libertés [2] le jour du seul meeting parisien d’Emmanuel Macron, d’avant le premier tour, laisse rêveur quant à ce qui motive les macronphiles : il est bon orateur, il représente bien la France, il est beau, il a bien géré la pandémie, etc.

    Les lemmings macronphiles réduisent la politique à l’art du selfie ! Car ils ont quand même voté pour un candidat qui n’a pas fait campagne et qui n’a pas jugé utile de présenter un programme.

    Bien sûr, il y a tous ceux qui ont bien compris qu’Emmanuel Macron était bon pour leurs affaires ou leur agenda comme ils disent. Mais ils ne sont pas 9,7 millions, loin de là !

    La majorité des lemmings macronphiles votent donc par habitude, par peur du changement, ou parce qu’ils croient à la propagande et aux sondages.

    Ils croient donc aussi à l’origine anthropique du changement climatique, aux vertus des vaccins de Pfizer, à la valeureuse démocratie ukrainienne, à l’immigration-chance-pour-la-France, bref à tout ce qui se dit sur BFM TV et dans la presse bien-pensante. Et bien sûr ils ont peur des extrêmes, comme on le leur inculque chaque jour, avec la haine de Poutine et la crainte de la Chine.

    Les lemmings sinistrogyres

    On n’oubliera pas dans cette triste énumération les lemmings de gauche, ou sinistrogyres, soit quand même 31,4 % des suffrages exprimés, mais répartis entre six candidats, donc la moitié des concurrents du premier tour !

    Pauvres lemmings qui ont tenté de faire croire qu’Emmanuel Macron n’était pas de gauche ou pas assez de gauche, alors qu’il incarne justement la nouvelle gauche libérale-libertaire qui a pris le pouvoir avec le capitalisme sans frontières. Et qui de toute façon, comme dame Pécresse – qui représente un autre groupe de lemmings en voie d’extinction [3] –, appelleront à voter pour lui afin de « faire barrage à l’extrême droite » au second tour. On comprend qu’ils aient eu du mal à convaincre les lemmings autochtones [4] de les suivre…

    D’autant que ces sinistrogyres font toujours mine de croire, trente ans après la chute de l’URSS, qu’il suffit de faire payer les riches – c’est-à-dire d’appauvrir encore plus la classe moyenne [5] donc eux-mêmes pour l’essentiel – ou de rouler à vélo pour trouver de l’argent ou de l’énergie magiques.

    Tous les lemmings derrière le joueur de flûte !

    Nous tous, écrit Emmanuel Macron sur ses affiches électorales.

    Il a bien raison d’avoir choisi ce slogan car tous ces lemmings politiques marchent avec entrain vers sa réélection, lui, le nouveau joueur de flûte de Hamelin [6]. Celui qui va conduire tout ce beau monde à la noyade, et nous avec, au son du « vivre ensemble » et de l’anti-fâââchisme.

    Pourtant, personne ne peut ignorer qu’un nouveau quinquennat serait encore plus désastreux que le précédent. Mais les lemmings politiques non seulement n’ont ni mains ni tête : ils sont aussi des ânes bâtés qui refusent de voir ce qu’ils voient.

    Il ne reste qu’une dizaine de jours pour les réveiller de leur stupide torpeur !

    Michel Geoffroy (Polémia, 13 avril 2022)

     

    Notes :

    [1] Le conte philosophique de Voltaire, pas la marque pour ados !
    [2] Journal du 4 avril 2022.
    [3] 4,78 % des suffrages exprimés le 10 avril 2022.
    [4] D’après les sondages, une forte proportion d’électeurs se déclarant de religion musulmane vote pour les candidats de gauche.
    [5] Parce que, à l’âge du marché mondial et des paradis fiscaux, il n’est plus possible de taxer réellement les plus riches.
    [6] Selon la légende revisitée par les frères Grimm.

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  • Vers un "front républicain" des traîtres et des cocus !...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Xavier Eman, cueilli sur son blog A moy que chault ! et consacré au retour du "front républicain" contre Marine Le Pen.

    Animateur du site Paris Vox, rédacteur en chef de la revue Livr'arbitres et collaborateur de la revue Éléments, Xavier Eman est l'auteur de deux recueils de chroniques intitulés Une fin du monde sans importance (Krisis, 2016 et la Nouvelle Librairie, 2019), d'un polar, Terminus pour le Hussard (Auda Isarn, 2019) et, dernièrement, d'Hécatombe - Pensées éparses pour un monde en miettes (La Nouvelle Librairie, 2021).

     

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    Vers un "front républicain" des traîtres et des cocus

    A peine les deux protagonistes du second tour connus, alors même que le dépouillement des votes n’était pas terminé, le premier réflexe de la quasi-totalité des candidats éliminés a été, dans un bel ensemble, d’appeler à « faire barrage à l’extrême droite » en votant pour Emmanuel Macron le 24 avril. S’il fallait encore une preuve de l’affolement apeuré qui s’empare du système des copains et des coquins à la perspective de l’élection d’un président patriote, celle-ci suffirait amplement.

    C’est le communiste Roussel qui s’est précipité le premier pour exhorter ses faibles troupes à voter pour l’homme de la retraite à 65 ans. Le reste de la « gauche » a ensuite défilé pour entonner le même refrain, le petit doigt sur la couture du pantalon, auxiliaires empressés de l’homme du capital. Jean-Luc Mélenchon, pour sa part, s’il n’a pas appelé directement à voter Macron, a invité ses partisans à « ne pas donner une seule voix à Mme Le Pen ». Seule Nathalie Arthaud, de Lutte ouvrière, n’a pas donné de consigne de vote, renvoyant dos à dos les deux candidats.

    Les « damnés de la terre » vont donc apporter massivement leurs scrutins à l’enfant de Rothschild et de McKinsey, au grand casseur social, à l’éborgneur de Gilets jaunes, au démolisseur des services publics… Si la situation de notre pays n’était pas si tragique, on en rirait volontiers.

    Alors que nous commémorons le fameux « 21 avril 2002 » (fameux à plus d’un titre), c’est donc reparti pour un tour, la momie « front républicain » est sortie de son tombeau et on s’apprête à agiter de nouveau les bannières mitées de « l’antifascisme de salon ». « No pasarán ! », va-t-on hurler dans les rues, comme les grands ancêtres en 1936 à Barcelone, et, espérons-le, avec la même efficacité. Rien ne semble avoir changé, tout est prêt pour deux semaines de propagande intensive à base de « valeurs républicaines », d’« heures les plus sombres » et de « dangers de l’extrémisme ». Les Français sont-ils toujours dupes ? On peut, hélas ! le craindre, tant le battage médiatique est imposant et permanent, mais on peut aussi espérer que la dégradation de leurs conditions de vie et le progressif effacement de la France à laquelle ils restent attachés leur fassent enfin choisir une véritable alternative. Nous le saurons dans deux semaines cruciales pour l’avenir du pays.

    Quoi qu’il en soit, une fois encore, face aux périls qui menacent la France et les travailleurs français, la gauche dite « radicale » s’est déshonorée et a démontré qu’elle n’est qu’une désolante supercherie qui a définitivement abandonné le combat social au profit de ses lubies sociétales et de ses passions xénophiles et immigrationnistes. Quant à la droite « libérale » – en tout cas aux débris qui en restent –, elle a été égale à elle-même : ridicule et lâche. 

    Xavier Eman (A moy que chault !, 12 avril 2022)

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  • «Prétendre que l'invasion de l'Ukraine accélère la construction européenne est un contresens»...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Guillaume Bigot, cueilli sur le Figaro Vox et consacré au prétendu réveil stratégique de l'Union européenne provoqué par la guerre en Ukraine. Politologue et essayiste, Guillaume Bigot est l'auteur de La Populophobie - Le gouvernement de l’élite, par l’élite et pour l’élite (Plon, 2020).

     

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    Guillaume Bigot: «Prétendre que l'invasion de l'Ukraine accélère la construction européenne est un contresens»

    «Nous sommes pareils à des voyageurs de wagons-lits qui ne se réveilleront qu'au moment de la collision» écrivait Robert Musil à propos de la première guerre mondiale dans L'Europe désemparée.

    Plus d'un siècle plus tard, les Européens ne sont pas moins surpris par le retour de la guerre de haute intensité comme disent les spécialistes. En réaction à l'invasion de l'Ukraine, l'Union européenne (UE) serait en train de sortir de sa torpeur stratégique. On assisterait à l'émergence d'une authentique volonté d'autonomie stratégique continentale. Et ceci pour trois raisons brandies par les partisans de la construction européenne : une raison sentimentale, une raison énergétique et une raison militaire dont chacune mérite d'être examinée.

    La raison sentimentale a été formulée par Ursula von der Leyen: « Les Ukrainiens font partie de nous. Ils sont des nôtres et nous souhaitons qu'ils nous rejoignent. » Nous sommes tous ukrainiens répète-t-on à Bruxelles et cette communauté de destin a été renforcée par la demande d'adhésion de l'Ukraine à l'Union européenne. La découverte de charniers laissés par les soudards impitoyables de l'armée russe dans la banlieue de Kiev ne peut que renforcer la sympathie naturelle des Européens pour les Ukrainiens.
    La cruauté de l'agression russe serait ressentie comme celle de tous les Européens, une sorte d'affectio societatis continental sera en train d'émerger.

    Or, dans l'histoire, on ne se pose qu'on s'opposant. La France n'est devenue elle-même qu'en combattant les Anglais pendant la guerre de Cent ans. Plus décisif encore, un sentiment d'insécurité collective continentale aurait fait naître la résolution des Européens de se défendre contre la Russie poutinienne, ennemi commun de l'UE et de ses valeurs.

    En examinant cet argument sentimental, on est cependant frappé par sa fragilité. D'abord, la guerre russo-ukrainienne est intra-européenne. Les Ukrainiens sont européens mais les Russes ne le sont pas moins. Les Grecs attaqués à Chypre par des Turcs non européens et membres de l'Otan, étaient aussi européens. Les
    Serbes bombardés par l'Otan étaient également européens. Si l'UE se sent aujourd'hui ukrainienne alors qu'elle ne s'est jamais sentie serbe ou grecque, c'est que l'Ukraine est une nation européenne pro-Otan attaquée par un autre pays européen anti-Otan.

    C'est d'ailleurs ce que Madame von der Leyen confirme en expliquant qu'en Ukraine : "c'est la démocratie qui se dresse contre l'autocratie et dans ce combat-là, nous sommes unis avec nos amis canadiens et américains. »

    Passons au deuxième argument de ceux qui affirment que l'UE aurait pris en main ses intérêts stratégiques à l'occasion de la guerre en Ukraine, c'est l'argument énergétique. Tous les Européens seraient réunis, nous dit-on, par la recherche d'une résilience énergétique. « La guerre d'agression russe en Ukraine nous montre de manière dramatique à quel point la sécurité et l'approvisionnement énergétique sont étroitement liés. Nous ne pouvons-nous permettre d'ignorer cela », reconnaît Patrick Graïchen, le secrétaire d'État allemand au climat. La présidente von der Leyen abonde dans le même sens : « Les 27 sont bien trop dépendants aux énergies fossiles russes, et il faut nous débarrasser de cette dépendance. »

    Constats difficilement contestables mais incitent-ils les Européens à développer une vision commune de leur indépendance énergétique ? Le diagnostic est partagé, les remèdes le sont moins.

    Et pour commencer, les sanctions européennes contournent les banques impliquées dans les transactions avec Gazprom. Le gaz et le pétrole russes continuent d'arriver en Europe. Face à l'ignominie des crimes commis par les soudards russes, l'UE vient de renoncer au charbon russe. C'est un dérisoire volontarisme de sauts de puces. L'indépendance énergétique demeure ainsi une velléité.
    La filière nucléaire française offre une solution, peut-être pas immédiate mais au moins compatible avec un objectif d'autonomie énergétique européenne. Pourtant, le plan de relance européen exclut le nucléaire.

    En revanche, la présidente de la Commission a déclaré que nous devons nous tourner vers "nos amis américains pour voir s'il n'est pas possible de disposer de davantage de gaz naturel liquéfié".
    L'intérêt des 27 étaient-ils de se passer de Nord Stream II pour se jeter dans les bras du Qatar ou du Texas afin de se fournir en énergie ? Joseph Biden a répondu à cette question lors de sa conférence de presse avec le chancelier allemand, le 7 février dernier, en déclarant : « si la Russie envahit l'Ukraine, Nord Stream II ne se fera pas. »

    Enfin, le troisième argument de ceux qui voient dans la crise ukrainienne l'acte de naissance d'une Europe puissance, c'est que la question militaire intéresserait enfin Bruxelles.

    « La guerre a enfin contribué à créer le consensus autour de la défense européenne » analyse Nathalie Loiseau, eurodéputé et présidente de la sous-commission défense au Parlement européen. « Pour la première fois de notre histoire, nous finançons l'achat et la livraison d'armes à un pays attaqué avec des fonds européens » explique Ursula von der Leyen. Pour le Haut représentant Josep Borrell, l'adoption par le Conseil européen d'un
    texte de doctrine défensive intitulé « boussole stratégique » exprimerait un « changement tectonique. »

    Autre signe que les Européens auraient renoncé à leur naïveté : l'Allemagne a décidé de consacrer 100 milliards d'euros à sa défense. Pourtant, ici encore, on est loin de tenir les preuves d'une authentique volonté d'autonomie stratégique européenne. Effectivement, l'UE va fournir une aide militaire mais ce sont les États membres qui l'ont décidé et ce sont les Etats membres qui livreront, le tout avec la bénédiction et sous la supervision de l'Otan.

    Quant au réarmement de l'Allemagne, il n'exprime aucune solidarité européenne. Berlin a commencé à s'équiper en achetant des F35 américains, compatibles avec les standards Otan et habilités à porter des charges nucléaires américaines… Pour l'autonomie stratégique continentale, on repassera.

    Dans l'affaire Aukus, Allemands et Suédois ont réalisé un intense lobbying intensif pour que Canberra n'achète pas de sous-marins français. En matière spatiale, les sociétés allemandes préfèrent Space X à Ariane 6. La maxime gaullienne se vérifie ad nauseam : les États n'ont pas d'amis… Même les États membres n'ont que des intérêts.

    D'ailleurs, la « boussole stratégique » appelle à une « coopération plus étroite et mutuellement bénéfique avec les États-Unis. » Nathalie Loiseau confirme que cette fameuse boussole européenne ne change pas de cap : « Il faut arrêter de penser qu'autonomie stratégique et lien transatlantique sont contradictoires. » Au-delà de confirmer la prophétie gaulliste d'une Union européenne qui ne
    pourrait se réaliser qu'au profit d'une tierce puissance, deux évidences devraient nous sauter aux yeux.

    La première évidence, c'est que la crise ukrainienne signe le retour de la guerre. Or, le plus authentique cri de guerre des Européens, c'est Aristide Briand qui l'a poussé en 1926: « Arrière les fusils, les mitrailleuses, les canons ! Place à la conciliation, à l'arbitrage, à la paix! » Le projet européen est tout entier fondé sur l'espoir de neutraliser la guerre par l'économie. Pourtant, l'UE commerce davantage avec la Russie qu'avec l'Ukraine.

    C'est parce qu'elles ne veulent plus se défendre elles-mêmes que les nations se sont abandonnées au projet européen. C'est aussi pour cette raison que l'UE est consubstantiellement liée à l'Otan. Les Européens n'ont plus ni la capacité, ni la volonté de se défendre eux-mêmes alors comment les 27 trouveraient-ils le ressort de défendre une entité commune ? Les volontés se multiplient, les renoncements s'annulent. La crise ukrainienne, c'est aussi le retour des nations.

    Il y a un peuple allemand et un peuple français. Il y a un peuple ukrainien et un peuple russe et sans doute les Ukrainiens sont-ils plus proches des Russes que nous ne le sommes des Allemands.
    Les Ukrainiens se battent pour leur terre, pour défendre leurs frontières et pour leur drapeau. Les Ukrainiens sont un peuple mais les Européens ne le sont pas. D'ailleurs, qui irait mourir pour le drapeau européen ?

    On voit plus de drapeaux ukrainiens dans les beaux quartiers parisiens aux fenêtres que de tricolores au lendemain de Charlie, comme si les bobos français avaient besoin d'un patriotisme de substitution. Le bleu et le jaune du drapeau ukrainien ne sont pas les couleurs d'un patriotisme post-national qui aurait moralement réarmé ceux qui posaient des bougies après le Bataclan en bêlant : vous n'aurez pas ma haine !

    La résistance héroïque des Ukrainiens montre par ailleurs que ce n'est pas la taille d'un pays mais la détermination de son peuple à le défendre qui fonde son indépendance. La Suisse est petite mais personne n'ira l'envahir car le patriotisme helvète est ombrageux et armé !

    Platon savait déjà que ce ne sont pas les murs qui font les cités mais le courage des hommes qui les défendent. Prétendre que l'invasion de l'Ukraine accélérerait la construction européenne revient ainsi à tomber dans un grave contresens.

    Guillaume Bigot (Figaro Vox, 8 avril 2022)

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  • Pour que rien ne change au sein de l’UE...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'Hervé Juvin, cueilli sur son site personnel et consacré au cap politique choisi par l'Union européenne...

    Économiste de formation et député européen, Hervé Juvin est notamment l'auteur de deux essais essentiels, Le renversement du monde (Gallimard, 2010) et La grande séparation - Pour une écologie des civilisations (Gallimard, 2013). Il a également publié un manifeste intitulé France, le moment politique (Rocher, 2018).

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    Pour que rien ne change au sein de l’UE

    Les eaux calmes et les saisons tranquilles sont propices au « en même temps ». Tout se concilie, tout s’arrange, tout s’accorde, et qu’importe si le bateau se déroute, il arrivera à bon port ! Tout se complique si le vent forcit et la mer se creuse. Le luxe du « en même temps » n’est plus permis, les choix s’imposent, avec les renoncements qu’ils appellent et la dureté qui tranche.

    L’Union européenne mesure-t-elle la dureté des temps qui s’annoncent ? Quelles que soient la poursuite et l’issue du conflit en Ukraine, et même si les efforts pour arriver à un cessez-le-feu, puis à un accord de paix devaient déboucher rapidement, le confort du « en même temps » ne lui est plus permis. Sur quatre points au moins, l’Union doit sortir rapidement de l’ambiguïté, corriger le cap et se remettre en ordre de marche.

    Le financement de la défense

    Le projet de mise sous contrôle de toutes les activités économiques, connu sous le nom de « taxonomie », subordonne les capacités d’accès au marché des capitaux et de la dette, comme à l’assurance, des entreprises selon leur activité. Il était entendu que les industries d’armement seraient exclues de la liste des entreprises « vertes » — de celle que l’investisseur finance avec bonne conscience. Mais voilà que l’invasion russe change tout.

    L’Union envoie des armes défensives et létales par centaines de millions d’euros à l’Ukraine, l’Union veut investir dans sa Défense, l’Union se convertit à l’urgence de réarmer. À l’évidence, la taxonomie ne doit pas et ne peut pas paralyser l’effort de défense de l’Union. Même la coalition au pouvoir en Allemagne en convient. La parade qui consiste à corriger temporairement, ou à exclure de la taxonomie, le secteur de l’armement n’est pas satisfaisant. C’est tout le dispositif qui doit être revu, cette taxonomie qui favorise les grands groupes au détriment des PME, cette taxonomie qui sera un enfer administratif, cette taxonomie qui heurte directement la liberté d’investir, et demain peut devenir un carcan sur les libertés individuelles. Car quid d’activités industrielles non directement liées à l’armement, mais qui conditionnent la Défense, comme l’énergie ?

    C’est toute la logique de la taxonomie qui est à revoir. Et il y a urgence. Les financements de marché en fonds propres comme en crédit bancaire doivent permettre le développement de l’autonomie européenne de Défense dans les pays qui ont conservé tout ou partie de leur industrie d’armement. Ceux qui investissent dans l’industrie de Défense de leur Nation doivent non seulement ne pas être pénalisés, mais durablement incités à allouer leurs capitaux à la sécurité collective, aussi bien qu’à la production d’énergie et à l’autonomie alimentaire.

    La fourniture d’énergie abondante et sûre.

    Le projet dit : « Fit for 55 » est basé sur un lien erroné entre la consommation totale d’énergie et le dégagement de GES. C’est faux. Accroître la production d’énergie nucléaire, par exemple, ne signifie pas augmentation du dégagement de GES. C’est surtout malthusien ; limiter la fourniture d’énergie, c’est limiter la réindustrialisation de l’Europe, au moment même où il n’est plus besoin de démontrer combien notre sécurité dépend du raccourcissement des chaînes d’approvisionnement et de la relocalisation massive d’activités sur le territoire européen.

    Les stratèges chinois l’ont dit ; « un pays qui n’a pas d’industrie ne gagne pas les guerres ». J’ajouterais ; un pays qui ne met pas à disposition une énergie abondante, constante et bon marché n’a pas d’industrie. La sortie allemande du nucléaire n’est pas seulement une erreur, c’est une faute contre la sécurité des Nations européennes dont l’Allemagne doit payer le prix. Et voilà pourquoi la révision du projet « Fit for 55 » est urgente. Ici encore, il s’agit de la sécurité des Nations européennes, et de leur capacité à reconstruire les moyens de leur autonomie industrielle.

    La maîtrise des chaînes logistiques et des ressources vitales.

    Au moment même où le petit nombre de pays soumis aux États-Unis annonçait des sanctions « comme nous n’en avons jamais vu » à l’encontre de la Russie et de la Biélorussie, la commission du commerce international au Parlement européen (INTA) continuait comme si de rien n’était à vanter les mérites du libre-échange et à se vouer à la globalisation. Qui peut échapper à la violence de la contradiction ? L’aveuglement géopolitique est éclatant ; qui ne voit que la logique des sanctions est la plus opposée qui soit au libre-échange, et que l’Union européenne sacrifie le mode de vie des Européens et le pouvoir d’achat à l’urgence politique qui lui est dictée ?

    Qui peut échapper au constat désolant que rend éclatant la séparation du monde qui se déroule sous nos yeux ; parce qu’il appelle l’uniformisation des règles, des lois et des mœurs, parce qu’il signifie en finir avec la liberté des peuples de se donner leurs lois et leurs règnes, et in fine parce qu’il sacrifie la liberté politique à de supposés avantages économiques dont la majorité ne verra rien, ou subira les dommages, le libre-échange, avec son corollaire qu’est la liberté de mouvement des capitaux, appelle la guerre, entraîne la guerre, commande la guerre — et, de fait, provoque la guerre planétaire dont l’Ukraine est le trompe l’œil.

    Les représentants d’une Union européenne qui n’a à la bouche que les mots de paix, de démocratie et de liberté semblent ne pas se rendre compte des paradoxes et des contradictions dans lesquels ils se prélassent, sans voir que le confort des mots se paie — et commence déjà à se payer.

    Qui mesure à quel point le projet d’une taxe carbone aux frontières est une provocation à l’égard d’un monde en développement dont le moins disant environnemental est l’un des avantages compétitifs majeurs, et qui comprend combien les dispositions qui affaiblissent les Nations européennes, pénalisent les productions industrielles et protègent les rentes, contribuent à un désarmement qui est à la fois militaire, national et environnemental ?

    Green Deal

    Le Green Deal est l’enfant condamné de la fin de l’histoire, de la chute d’un Occident étendu au monde, et de la globalisation comme utopie du capitalisme totalitaire. La question n’est pas que la guerre prend le pas sur l’environnement, le climat et la santé humaine. La question est que les priorités de défense, de milieu de vie et de libertés de choix s’accordent pour appeler une révision drastique du Green Deal et des orientations imposées, faut-il le rappeler, sans consultations des électeurs et sans réel débat démocratique dans les Nations concernées.

    Elles s’accordent pour faire de la relocalisation massive des activités industrielles sur le sol des Nations européennes une priorité absolue — ce qui signifie, entre autres, une énergie abondante et produite en Europe. Elles s’accordent pour exiger que l’Europe retrouve son autonomie alimentaire, retrouvent la maîtrise du vivant, végétal et animal, en même temps qu’elle retrouve la biodiversité qui a si longtemps constitué l’une de ses richesses et de ses assurances. L’Europe doit produire à la fois plus et mieux, elle doit permettre au plus grand nombre d’exprimer sa préférence pour les produits locaux, artisanaux et aussi recréer les conditions de l’autoproduction familiale.

    Elles s’accordent pour faire de l’économie circulaire un facteur clé de notre autonomie, imposant la réparabilité des biens d’équipement, pénalisant l’obsolescence programmée, établissant les circuits de production à partir des déchets et rebuts — de la production d’énergie à la récupération des composants — et le système de collecte des objets en seconde ou troisième vie. et elles s’accordent à faire de la sécurité des modes de vie de nos concitoyens la priorité, opposée aussi bien à une écologie punitive devenue folle, qu’aux aberrations des chaînes logistiques étendues à la planète en raison d’un coût du transport artificiellement négligeable.

    De la folie des renouvelables à l’impasse du véhicule électrique, l’Union doit tout reprendre, tout repenser, tout refaire. Les facilités du « en même temps » ne nous sont plus permises. Baisse du pouvoir d’achat, remise en cause de nos modes de vie, ruptures d’abondance pour plusieurs ressources vitales ; si l’Union européenne a quelque chance de retrouver une légitimité compromise, c’est bien en acceptant ses erreurs, en corrigeant les faiblesses et par-dessus tout, en reconnaissant les limites d’arbitrages et de choix qui échappent au suffrage des citoyens des Nations européennes, mais pas aux intérêts de ceux qui les prennent pour cibles. Une seule certitude doit nous guider ; rien de durable ne se fera contre la volonté des Nations, les identités nationales, et le désir des citoyens de bien vivre.

    Hervé Juvin (Site officiel d'Hervé Juvin, 5 avril 2022)

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  • L’affaire McKinsey, un scandale si prévisible...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Rodolph Cart, cueilli sur le site de la revue Éléments dans lequel il évoque, au travers du scandale de l'emprise de la société de conseil McKinsey sur l'état macronien, le remplacement de la démocratie par une ploutocratie...

     

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    L’affaire McKinsey, un scandale si prévisible

    Alors que certains commencent à parler de « scandale d’État » ou d’une « affaire McKinsey », l’omniprésence des cabinets de conseil, dans la gouvernance macroniste, soulève des questions légitimes. Par un système d’optimisation fiscale, le Sénat relève, après commission d’enquête, que McKinsey n’aurait payé aucun impôt en France depuis une dizaine d’années. Plus grave, le rapport du Sénat révèle, sous le quinquennat Macron, un doublement des dépenses pour les cabinets de conseil. Présents partout dans nos politiques publiques dont les plus sensibles (défense, santé, éducation), à telle enseigne que le gouvernement semble avoir instauré une véritable « consultocratie ». Or, cette collusion du public-privé ne repose-t-elle pas la question de notre système politique ? Cette croyance absolue dans le privé n’est-elle pas la marque d’une idéologie plus profonde ?

    Un premier constat nous vient dans cette affaire : l’État pourrait assumer ces missions. Tout l’enjeu de ce scandale repose dans l’affrontement – à bas bruit – entre les fonctionnaires et les cabinets de conseil. La chose est d’autant plus alarmante que le gouvernement semble, après de nombreux exemples, consentir à favoriser l’avis du privé contre le public. Le credo « Ce sera toujours mieux dans le privé » semble s’être installé aux plus hautes sphères du pouvoir. Mais cela doit-il nous surprendre ? Pas si sûr.

    L’absence d’un véritable État

    La pensée de l’État fut pendant longtemps, des Grecs jusqu’à Hobbes et Bodin, au centre de l’esprit politique européen. Après son apparition à la Renaissance et son absolutisation au XVIIe siècle, l’influence du libéralisme semble l’avoir fait entrer dans une instance de neutralisation. Sa transformation actuelle tendrait vers l’« État total » selon Carl Schmitt, le grand théoricien du politique. Total dans le sens d’un hyperétatisme qui le porterait à intervenir dans toutes les domaines de notre vie sociale. L’identification entre État et société n’est pas loin ; et cela constituerait, de manière paradoxale, son affaiblissement et son incapacité à demeurer une institution purement politique.

    Toute une partie critique de l’État se trompe quand elle voit dans les penseurs étatistes des apologistes béats de l’État. Ces penseurs étatistes, au contraire, sont des adversaires de la pensée du « toujours plus d’État », et seraient plutôt les défenseurs d’un « État politiquement fort » qui ne « disperserait pas son crédit dans les activités non politiques », selon Julien Freund, disciple de Carl Schmitt. Sa fusion-confusion avec la société l’empêcherait de jouer pleinement son rôle, et le réduirait à utiliser ses compétences dans des domaines qu’il ne peut assumer. Freund ajoute que cela participerait d’une volonté de « saper l’autorité étatique par en dessous, bien qu’elle apparaisse en surface omnipotente ».

    Walther Rathenau, ministre sous la République de Weimar, disait que notre destin n’est plus dans la politique mais dans l’économie. Il n’était ni le premier ni le dernier à dire cela. De fait, la doctrine libérale de l’État a renforcé ce postulat en faisant prédominer les déterminants économiques pour résoudre les questions politiques. C’est justement cet argument qu’avancent les cabinets de conseil. Se présentant comme « neutres », proposant des réponses dénuées d’idéologies, ils préconisent une dépolitisation des sujets politiques et glorifient l’imposture de la neutralité axiologique des réponses économiques.

    Les cabinets de conseil contre le peuple

    Depuis les guerres de religions du XVIe siècle, la triade du peuple-État-espace ne supporte la moindre interférence. Le pouvoir est direct entre le peuple et l’État bien qu’ils restent distincts. Mais le libéralisme, en fondant État et société, brisa cette séparation et fit apparaître de nouveau la doctrine de la potestas indirecta, le pouvoir indirect, en l’occurrence le respect du droit, remettant en cause cette unité. N’agissant pas directement par la voie du commandement, l’influence de cette doctrine sur le politique a fait de ses thuriféraires les vrais « maîtres », peu importe qu’ils ne soient pas élus.

    Qu’est-ce ici le libéralisme ? C’est la prolifération de ces pouvoirs indirects qui faussent l’image du politique et détruisent son image d’autorité. Ces pouvoirs indirects plongent un peuple dans l’inexistence politique. Ils sont le signe qu’un peuple n’a plus « la force ou la volonté de se maintenir dans la sphère du politique », selon l’expression de Schmitt. S’il agit au nom de la légalité – et non plus de la souveraineté –, l’État perd sa légitimité et son droit de demander un devoir d’obéissance envers le peuple.

    Concept-clé de l’État moderne, la souveraineté est indissociable de la pensée de l’État. « Est souverain, dit Schmitt, celui qui décide lors d’une situation exceptionnelle ». Le fait que le gouvernement ait délégué, dans des situations de crises, son pouvoir de décision à des pouvoirs indirects ne témoigne que du refus par l’État de remplir ces charges politiques. Hostile à la notion de souveraineté, de nation et de non-ingérence dans les affaires de l’État, la doctrine libérale promeut cet impérialisme du droit (Kelsen) et de l’économie par des organisations privées.

    Raison pour laquelle les démocraties libérales sont incapables de répondre à des situations exceptionnelles ; or, l’exception qui ne devait être qu’une perturbation devient dans ces conditions un état de fait. Ainsi, ce n’est plus l’État qui est souverain, mais bien l’entité (juridique, économique, etc.) qui lui dicte sa décision. Tant que l’État refusera de prendre une décision par lui-même, il acceptera que d’autres forces le fassent à sa place et le soumettent à leurs normes.

    Le résultat d’une privatisation sans limite

    Le fait marquant de la société moderne fut donc la différenciation entre les prérogatives publiques et les initiatives privées. Cette séparation fut si constitutive de la modernité que les juristes ont pu parler de summa divisio. Guillaume Travers l’appelle une déchirure, et rappelle que cette séparation – typiquement moderne, on le redit – tourne résolument le dos à l’ancien ordre du monde qui était un ordre communautaire orienté par la recherche du bien commun. Non seulement cette déchirure (public-privé) se désintéresse du bien commun, mais en outre elle aboutit à l’appropriation de la chose publique par une poignée de personnes n’agissant que par intérêts privés.

    Le propre des sociétés liquides dans lesquelles nous vivons est néanmoins de brouiller de plus en plus la distinction public-privé s’atténuant. Voilà le prix d’une économie ouverte et mondialisée où le « devenir privé » du monde suit une pente dangereuse pour les peuples. Dans ce contexte, ces cabinets incarnent l’avant-garde d’une sorte de gouvernement mondial n’appliquant qu’une seule et même idéologie qu’est l’économisme. Fondés sur l’abstraction généralisée et l’indifférenciation pour leurs clients, ces cabinets, à la clientèle mondiale, distillent les mêmes conseils et cela qu’importe l’État auquel ils s’adressent.

    Les infrastructures, le droit, les forces de l’ordre et le gouvernement restent en place, mais seulement pour garantir la circulation des flux, des échanges, des contrats et de la sécurité du commerce. Des structures privées se chargent alors de la prise en main du politique, mais aussi des domaines que l’État continue de « contrôler » – théorie de l’État total – tout en déléguant ces missions de service public à des entreprises. Ce bouleversement par le haut (décision politique) et par le bas (services réalisés par le privé) fait dire à Guillaume Travers que nous sommes en face d’un authentique « gouvernement des intermédiaires ».

    La logique de la gouvernance

    Une gestion public-privé des affaires politiques semble donc incarner la gouvernance Macron. Pour bien cerner le macronisme, il faut comprendre ce qu’est la gouvernance. Elle est un mode de gestion des affaires complexes dans lequel les acteurs principaux (publics comme privés) se déploient sur le même plan – à l’horizontale, sinon à égalité. Aussi, elle implique que les affaires publiques nécessitent un traitement semblable aux affaires privées.

    Abolissant la distinction public-privé, l’État ne doit plus être qu’un agent régulateur. Cela est justifié par la croyance libérale en un phénomène de mécanisme d’auto-ajustement apparenté à celui du marché. Rappelons aussi que les acteurs des dispositifs de gouvernance se recrutent principalement par cooptation et par proximité idéologique. Quand on constate le pantouflage des fonctionnaires et des proches de LREM avec les cabinets, la chose nous paraît encore une fois vérifiée.

    Chose importante : le processus de décision de la gouvernance est toujours révocable et provisoire. Les décisions ne sont plus le produit d’un débat ou d’une délibération, mais bien de négociation entre « égaux » – ce que sont le client et le prestataire de services. La gouvernance se rapproche de la tradition jurisprudentielle illustrée par la Common Law. Cette dernière délaisse les lois votées au profit des normes négociées. Damant le pion à la démocratie populaire, cette « démocratie sectorielle » promeut une logique de cooptation qui s’adapte parfaitement à une « découpe » du bien commun en secteurs, en clientèles, en marchés, chacun régi par ses propres intérêts.

    Produits du néo-institutionnalisme, les relations sociales et politiques entre l’État et les citoyens doivent s’interpréter selon des termes strictement économiques. La privatisation des services publics doit déboucher sur une libéralisation complète des activités de production et d’échange afin d’installer l’économie de marché. Les cabinets, en appliquant cette doctrine de consultation et de décision concertée post-régalienne, ne sont que les agents privés de cette gouvernance économique mondiale. Quand les grandes institutions (FMI, Banque mondiale, OMC) se chargent d’édifier les normes négociées à l’échelle planétaire.

    La primauté de la norme négociée sur la loi démocratiquement votée entérine la supériorité du pouvoir des juges (qui se substituent au pouvoir du législateur). Ce repositionnement à l’horizontale, la prédominance de l’économie et la concertation entre des acteurs publics et privés témoignent du danger que représente la gouvernance macroniste pour la France. Car ce à quoi on assiste, c’est au remplacement de la démocratie par une ploutocratie. À nous de réagir au plus vite.

    Rodolph Cart (Site de la revue Éléments, 1er avril 2022)

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