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Points de vue - Page 267

  • Drame de « Charlie Hebdo » : vers un Patriot Act à la française ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Xavier Eman, cueilli sur son blog A moy que chault ! et consacré aux renforcements des mesures de surveillance et de restriction des libertés que le gouvernement est en train de mettre en place sous couvert de l'émotion suscitée par les attentats des 7,8 et 9 janvier...

     

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    Drame de « Charlie Hebdo » : vers un Patriot Act à la française ?

    Au delà de la tragédie humaine en tant que telle, l'attaque sanglante ayant visé le journal « Charlie Hebdo » et son traitement médiatique et institutionnel ont indiscutablement démontré l'effacement, pour ne pas sire la dissolution, du politique au profit de l'émotionnel pur, du sentimentalisme débridé et exacerbé.

    Durant une semaine, la réflexion, l'analyse, le recul et la mise en perspective ont totalement abandonné l'espace public au profit d'un cantilène hystérique psalmodié par un cœur de pleureuses débitant un discours aussi niais que larmoyant sur l'air de « pourquoi sont-ils aussi méchants ? » et de l'éternel « Plus jamais ça ! ». Le point d'orgue de ce grand gémissement plaintif a bien sûr été la grande « marche républicaine » où une marée de bisounours ont pu défiler en rangs serrés, chapeaux-crayons sur la tête et nez de clown au milieu du visage, derrière de grands démocrates et défenseurs des droits de l'homme tels que Benyamin Netanyahou, Avigdor Libermeran ou Abdhallah II de Jordanie... Une manifestations sensée représenter la fameuse « union nationale », dernière planche de salut d'un système à bout de souffle, mais dont on avait pris soin d'exclure le Front National, premier parti de France et seule mouvement politique à avoir inlassablement dénoncé les méfaits de l'immigration de masse, les inévitables drames qu'elle produit et la dangerosité de l'islamisme. A contrario, tous les chantres du « vivre ensemble » sans nuage ni écueil, du « multiculturalisme heureux », tous les tenants d'un monde sans frontières, tous les promoteurs de l'Islam « religion de paix et d'amour », tous les va-t-en guerre qui ont encouragé la mise à feu et à sang les derniers états laïcs du Maghreb et du Proche-orient étaient bien présents, au premier rang desquels l'ineffable Bernard-Henri Levy, vice-ministre des affaires étrangères, l'homme qui a appelé à armer les milices islamistes contre Mouammar Kadhafi et Bachar El-Assad. Tous les responsables de la situation actuelle, tous ceux qui ont contribué à bâtir la poudrière actuelle se pressaient donc dans la rue pour dénoncer les effets de leur politique aveugle et masochiste, pas un ne manquait à l'appel. Fort heureusement pour eux, l'indécence ne tue pas.

    Et maintenant ? Alors que la logique voudrait qu'un tel événement, révélant les fractures internes de la société française (de nombreux incidents, notamment dans les établissements scolaires des quartiers à fort peuplement extra-européen ont fait apparaître la solidarité d'une frange de la population avec les terroristes) entraîne une remise en cause drastique des politiques migratoires et pseudo-assimiliationnistes, une réflexion sur la protection et la défense des frontières ainsi qu'une interrogation sur la politique étrangère du pays, c'est bien évidemment un tout autre scénario qui se met en place. Au delà des discours, les seules actes concrets réalisés depuis lors ont été la mise en garde à vue de l'humoriste antisioniste Dieudonné et la mise en examen d'une cinquantaine de personnes pour « hagiographie du terrorisme » (via des propos ou des écrits sur internet). Curieuse réponse lorsque l'on prétend défendre la sacro-sainte « liberté d'expression » face à l'obscurantisme.

    Parallèlement, le gouvernement annonce des « mesures exceptionnelles » en matière de renseignement, de surveillance et de contrôle d'internet. Bref de nouvelles restrictions des libertés publiques et une augmentation du flicage des moyens de communication et d'information alternatifs, dont on se doute bien qu'il ne se limitera pas à la « sphère islamiste ». Bref c'est une ébauche de « Patriot act » à la française qui est en train de se dessiner, sous les applaudissements de français prêts à sacrifier les dernières bribes de leur liberté pour acquérir une illusoire « sécurité », d'autant plus improbable que le pouvoir se borne une nouvelle fois (c'est son plus grand intérêt) à prétendre traiter les effets du mal sans s'attaquer à ses causes. Un « Patriot act » à la française que certains, comme l'ex-ministre UMP Valérie Pécresse, appellent ouvertement de leurs vœux et dont la perspective ne choque même plus ceux qui le dénonçait lors de sa mise en place outre-atlantique. Si la peur et l'émotion sont toujours mauvaises conseillères, elles règnent actuellement en maître à tous les niveaux en France. C'est peut-être d'ailleurs là la vraie victoire des assassins du 7 janvier.

    Xavier Eman (A moy que chault ! , 22 janvier 2015)

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  • Six thèses sur l’angélisme qui nous gouverne : être Charlie ne suffira pas...

    Nous reproduisons ci-dessous un excellent point de vue de Vincent Coussedière, publié sur Figaro Vox et signalé par Polémia. Dans ce texte, l'auteur d’Éloge du populisme (Elya, 2012),  revient sur les attentats des 7, 8 et 9 janvier et leurs suites politiques.

     

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    Six thèses sur l’angélisme qui nous gouverne : être Charlie ne suffira pas

    1) Etre fidèle à Charlie aujourd’hui, c’est rompre l’unanimité et la bien-pensance de façade, c’est rompre l’identification du «Je suis Charlie». Ce slogan est déficient dans chacun de ses termes. Il ne s’agit pas de dire «je» mais de dire «nous», pour marquer la différence entre une identification individuelle de «spectateur» et une réaction politique par définition collective. Il ne s’agit pas non plus d’«être», c’est-à-dire de se substituer à la victime par identification imaginaire. Il s’agit de «faire», c’est-à-dire d’agir contre ceux qui se déclarent nos ennemis. Enfin il ne s’agit pas seulement de Charlie, mais de policiers, de juifs, c’est-à-dire de personnes libres et reconnues comme telles en tant que citoyennes de l’Etat français. Ce sont les Français et la France qui sont attaqués. Et la réponse doit se faire à ce niveau. «Nous sommes français», et c’est parce que nous sommes français que nous défendons Charlie comme tous les autres qui ont été attaqués dans leur liberté de vivre en France.

    2) Nous sommes français et nous avons des ennemis qu’il faut nommer. Il ne s’agit pas de lutter contre le terrorisme qui est une abstraction qui permet de noyer le poisson. Le terrorisme est un moyen utilisé par notre ennemi. Il ne suffit pas encore à définir notre ennemi. Notre ennemi est l’islamisme et cela encore est trop général, car il y a concurrence et émulation entre différents groupes islamistes appuyés par différents Etats. Ces ennemis ne frappent pas aujourd’hui parce que jusqu’à présent ils auraient échoué, mais parce qu’ils l’ont décidé. Et il faut expliquer pourquoi ils l’ont décidé. Ils l’ont décidé parce que nous sommes aussi entrés en guerre contre eux, et il aurait fallu expliquer clairement aux Français le risque que nous prenions et pourquoi. Cela n’a pas été fait. Le terrorisme n’est pas un phénomène météorologique qu’on pourrait conjurer avec des alertes oranges. Il faut cesser de prendre les Français pour des imbéciles.

    3) Une fois nommé l’ennemi : l’islamisme, il ne suffira pas de combattre sa variante terroriste pour l’endiguer. Car le terrorisme n’est qu’un des moyens utilisés par l’islamisme pour mener à bien son projet, projet qu’il s’agit aussi d’identifier et qui est bien un projet d’islamisation de notre société. Il faudra cesser de taxer d’«islamophobe» (terme lancé sur le marché des «idées» par Khomeiny, pour interdire toute critique de l’islam et de l’islamisme, et repris aujourd’hui bêtement par la vulgate médiatico-politique) tous ceux qui agissent pour améliorer la connaissance et la dénonciation de ce projet de domination, car c’en est un. La terreur n’est que le versant complémentaire d’un projet d’islamisation «par le bas» qui instrumentalise l’échec de l’assimilation républicaine et se substitue à elle. Quelle crédit accorder désormais aux politiques qui prétendent combattre le terrorisme sans affronter le terreau de l’islamisation?

    4) Il ne suffira pas de brandir le tabou de l’«amalgame» pour désamorcer le risque bien réel et en partie déjà effectif de guerre civile dans notre pays. La première chose qu’auraient dû faire nos élites politiques, au contraire de ce qu’elles ont toutes cru nécessaire de faire, ce n’était pas de brandir le risque de l’«amalgame», mais c’était de féliciter le peuple français de sa patience et de sa générosité, de n’avoir justement, jusqu’à présent, jamais cédé à l’amalgame. Car l’amalgame entre islam et islamisme, c’est d’abord aux musulmans français qu’il s’agit de faire la preuve qu’il n’est pas pertinent. Demander aux Français non musulmans de ne pas faire d’«amalgame», dès la première réaction aux événements, comme l’ont fait aussi bien F. Hollande que N. Sarkozy et M. Le Pen, c’était renverser la responsabilité et la charge de la preuve. Pourquoi les Français devraient-ils être savants en matière d’islam et être rendus responsables de la difficile articulation entre islam et islamisme? C’est aux musulmans, par définition «savants» en islam, qu’il appartient de ne pas s’amalgamer à l’islamisme et de montrer à leurs concitoyens, par leurs paroles et par leurs actes, qu’il n’y a pas lieu d’avoir peur et que cet amalgame est effectivement infondé. Ce discours empressé et unanime à dénoncer le risque d’amalgame pose deux problèmes : il est le symptôme d’une forme de lâcheté à l’égard des musulmans français, qu’on ne met pas au pied du mur en les forçant à affronter le lien problématique entre islam et islamisme, comme si, en décrétant d’emblée qu’il n’y avait aucun rapport, on voulait leur éviter le travail de la réforme ; il est le symptôme d’un mépris du peuple français, dont on méconnaît l’intelligence et qu’on soupçonne par avance de faire cet amalgame avant qu’il ait eu lieu.

    5) Charlie est peut-être devenu le symbole de la liberté française. Pour ma part je ne suis pas sûr qu’il ait toujours été le parangon de cette liberté. La liberté n’est pas la licence et l’irresponsabilité à l’abri d’un Etat maternel et protecteur, fût-il gaullien. Il y a quelque chose de tragique et d’hégélien dans cette histoire. Si Charlie est devenu le symbole d’une liberté véritable et admirable, s’il est devenu admiré et a gagné de nouveaux lecteurs, c’est depuis cette affaire des caricatures de 2006. C’est parce qu’il a rencontré le maître islamiste et qu’il a relevé le défi que Charlie est devenu libre. Ici, l’ironie de l’Histoire est tragique, car Charlie, pour continuer à être lui-même, a dû renouer avec des valeurs bien éloignées de son anarchisme soixante-huitard. Il a dû prouver sa liberté devant le risque de mort, et reconnaître la liberté de ceux qui l’ont longtemps protégé, pas assez longtemps malheureusement: les policiers. Ceux qu’on brocardait autrefois dans la stupidité du slogan CRS-SS… Aujourd’hui, tous ceux qui croient qu’«être Charlie» peut s’afficher comme un slogan publicitaire du type «Touche pas à mon pote» ou «Agriculture biologiquement certifiée» restent incapables de mesurer ce changement dans les conditions de l’exercice de la liberté. Ils n’ont pas compris la leçon qu’il faut tirer de cet événement tragique qui clôt une page de notre histoire, la page de l’irresponsabilité gauchiste.

    6) Comment peut-on prendre au sérieux l’appel à l’unité nationale de la part de ceux qui, à droite comme à gauche, n’ont cessé de la détricoter depuis 40 ans? L’unité nationale ne sera pas le produit de l’indignation morale et des masses rassemblées pour l’exprimer. Le peuple n’est ni la foule ni la masse, mais une certaine forme de sociabilité en laquelle on «communie» chaque jour dans les paroles et les gestes banals de la vie quotidienne, une «décence commune», comme dirait Michéa reprenant Orwell, que se sont acharnées à détruire nos élites par l’étau de l’immigration incontrôlée et de l’individualisme consommateur déchaîné. Le peuple n’est ni la foule ni la masse, mais l’exercice d’une souveraineté collective à travers un Etat digne de ce nom, c’est-à-dire capable de maintenir son indépendance, dont les ressorts ont également été détruits par les européistes béats qui découvrent tout aussi béatement aujourd’hui qu’ils «sont Charlie» alors qu’ils n’ont rien fait depuis si longtemps pour le prouver en étant tout simplement des défenseurs de la liberté française qui inclut la liberté pour Charlie d’être Charlie.

    Vincent Coussedière (Figaro Vox, 15 janvier 2015)

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  • A chacun son sacré !...

    Vous pouvez découvrir ci-dessous une chronique courageuse et lucide d'Éric Zemmour sur RTL, datée du 20 janvier 2015 et consacrée à la liberté d'expression et aux tabous propres à chaque civilisation...

     


    Éric Zemmour : "À chacun son sacré" par rtl-fr

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  • L'Afrique n'est pas Charlie...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Bernard Lugan, africaniste et historien, cueilli sur son blog et consacré aux violentes réactions suscitées en Afrique par les suites de l'attentat contre Charlie Hebdo...

     

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    L'Afrique n'est pas "Charlie"

     
    Vu d'Afrique, l' "affaire  Charlie hebdo" illustre les limites de l'universalisme européo-centré. Vendredi 16 janvier, alors que les sociétés de l'hémisphère nord communiaient dans le culte de la liberté d'expression, une partie de l'Afrique s' insurgeait contre la France des "Charlie". Du Sénégal à la Mauritanie, du Mali au Niger, de l'Algérie à la Tunisie et au Soudan, le drapeau français a été brûlé, des bâtiments français incendiés et en "prime", des églises détruites. Quant aux imprudents chefs d'Etat africains qui participèrent à la marche des "Charlie", dont Ibrahim Boubacar Keita du Mali, les voilà désormais désignés ennemis de l'islam.
     
    Aveuglés par la légitime émotion et noyés sous l'immédiateté, nos responsables politiques n'ont pas songé à se demander comment l'Afrique percevait les événements. Or, alors que pour nous, il s'agit d'un ignoble attentat contre la liberté d'expression commis contre des journalistes, personnes sacrées dans nos sociétés de la communication, pour une grande partie de l'Afrique, il s'agit tout au contraire de la "juste punition de blasphémateurs".  Qui plus est ces derniers n'en étaient pas à leur coup d'essai et ils avaient même été solennellement mis en garde. Voilà pourquoi leurs assassins sont considérés comme des "héros". Quant aux foules de "Charlie", elles sont vues comme complices des insultes faites au Prophète. De plus, comme le président de la République a marché à leur tête, cela signifie que la France et les Français sont coupables.
     
    Les conséquences géopolitiques qui vont découler de cette situation ne peuvent encore être mesurées, notamment dans les pays du Sahel en raison du jihadisme récurrent contre lequel nos troupes sont engagées. Le plus grave est ce qui s'est passé au Niger où Boko Haram qui, jusqu'à présent ne s'était pas manifesté, a pris le prétexte de la nouvelle livraison de Charlie Hebdo pour lancer les foules contre le centre culturel français de Zinder; au même moment, nos postes militaires avancés veillent aux frontières du pays...
     
    Personne n'a dit ou vu que l' "affaire Charlie Hebdo" n'est que la goutte d'eau qui a fait déborder le vase des impératifs politiques et moraux que nous imposons à l'Afrique: démocratie, droits de l'homme, avortement, mariage homosexuel, anthropomorphisme etc. Tous y sont considérés avec dédain ou même comme de "diaboliques déviances".
     
    C'est donc dans les larmes et dans le sang que les bonnes âmes et les idéologues vont devoir constater que le "village Terre" n'existait que dans leurs fantasmes universalistes. Ce qui est bon ou juste aux yeux de leur branchitude est en effet une abomination pour une grande partie de l'Afrique et même de la planète.
    En plus de cela, pour nombre d'Africains, l'Europe est devenue une terre à prendre : ses habitants ne croient plus en Dieu, ses femmes à la vertu volage ne font plus d'enfants, les homosexuels s'y marient et la féminisation y a dévirilisé ses mâles. Paradoxe cruel, ceux qui, depuis des décennies, ont permis cette révolution en tournant systématiquement en dérision les valeurs fondatrices et le socle social (famille, travail, discipline, ordre, effort, armée, police etc.) ont été odieusement assassinés par les enfants de ceux auxquels ils ont si largement ouvert les portes...
     
    Nous voilà donc au terme du processus. Désormais, la contradiction est telle que seul un "saut qualitatif brusque", comme le disaient les marxistes, permettrait de la surmonter. L'obsolète méthode "soustellienne" de l'intégration ou celle du "radeau de la Méduse" de la laïcité n'y suffiront sans doute pas...

    Bernard Lugan (Blog de Bernard Lugan, 17 janvier 2015)
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  • La France redécouvre la violence politique...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Valentin Moret, cueilli sur le site de Philitt et consacré au retour de la violence politique en France.

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    Charlie Hebdo : quand la France redécouvre la violence politique

    L’histoire de France est violente. Assassinats, émeutes et coups d’État la jalonnent. Depuis les attentats anarchistes de 1910 jusqu’aux mouvements skinheads des années 1980 et 1990 en passant pas la mort de Jean Jaurès, la crise du 6 février 1934, les agissements du FLN et de l’OAS, la France s’est faite dans le sang. Aujourd’hui, beaucoup s’obstinent à expliquer l’attentat de Charlie Hebdo par la folie. Cet acte relève pourtant de la stricte violence politique.    

    Nul besoin d’avoir lu Hobbes pour enfoncer cette porte ouverte : « L’homme est un loup pour l’homme ». La violence est inscrite au patrimoine de l’humanité depuis le péché originel. Mais le Vieux Continent, plus encore que le reste du monde occidental, a voulu bannir toute violence de son territoire, en la rangeant systématiquement du côté du mal. Une mentalité qui marque jusqu’à notre façon d’être et de faire la guerre : peu de morts, peu de dommages collatéraux. Aujourd’hui, une bonne guerre est une guerre où tous nos soldats rentrent vivants. Nous sommes loin de 1914 et de la valorisation du combattant tombé sous le feu ennemi. La modernité se veut pacifiste et pacifiée, elle méconnaît le phénomène de la violence comme instance de régulation des conflits. Pour l’anecdote, le dernier duel en France s’est déroulé en 1967.

    La réalité est pourtant toute autre : la violence n’a pas disparu du territoire. L’analyse du sociologue de la guerre Gaston Bouthoul permet de dresser le portrait des deux France qui s’expriment à travers les évènements récents. Du fait d’un grand écart démographique et culturel, le pays est clivé : d’un côté, une France des quartiers où la forte natalité et la figure patriarcale rendent la mise en péril de la vie acceptable – c’est le mythe d’Abraham – et, de l’autre, une France bourgeoise où la faible natalité aboutit à la domination des valeurs féminines et hédonistes qui, selon Bouthoul, sont plus enclines à la préservation de la vie. Une fracture qui trace la frontière entre ceux qui comprennent et usent de la violence et ceux qui en rejettent l’idée même. C’est parce qu’une grande partie de la population ignore la violence qu’elle n’admet pas qu’elle puisse être politique.

    Violence et politique

    « Il faut être intellectuel et violent », disait Charles Maurras. Aujourd’hui l’un exclut l’autre de facto, comme si la violence appartenait nécessairement au domaine de la passion, de la réaction. Comme si la novlangue s’était emparée des concepts de violence et d’intelligence pour les rendre incompatibles. On ne conçoit pas qu’on puisse être intellectuellement violent sans être un « idéologue dangereux », un « manipulateur », un « agitateur de la haine ». On ne conçoit pas non plus qu’on puisse être violent dans ses actes en les ayant pensés, réfléchis, prémédités et menés en conscience. C’est pourtant ce qui arrive.

    À déplorer la violence comme on déplore la folie, on tombe dans la petite réaction émue, hystérique et inutile. Aveu d’impuissance : l’émotivité comme seule façon de penser et d’agir est la méthode des professionnels de l’indignation qui s’insurgent contre les idées violentes. Pleurer ne sauve pas. Un paradoxe que le criminologue Xavier Raufer appelle « aveuglement ». Aveuglement face à des menaces omniprésentes sur les réseaux sociaux et jusque dans les gestes réalisés par certains devant les caméras de télévision. L’aveuglement empêche de déceler le moment du passage à l’acte. Car on ne peut prévoir le passage à l’acte d’un fou. Celui d’un idéologue, si.

    « La guerre est la poursuite de la politique par d’autres moyens. » Carl von Clausewitz

    Tout le monde s’accorde sur le terme de terrorisme pour décrire l’attentat de Charlie Hebdo. Et pourtant, beaucoup veulent réduire cet acte à un délire. C’est méconnaître la définition même du terrorisme : une violence politique en temps de paix, sporadique et isolée, certes, mais néanmoins politique.

    Au vu des revendications des auteurs, nous aurions tort de ne pas accepter cette conception clausewitzienne, politique, de la violence. L’un des deux terroristes a fait, à plusieurs reprises, entendre ses revendications : « On a vengé le prophète ». Le discours est clair, et calmement déroulé. L’auteur défend sa cause en affirmant qu’il n’a pas été « assoiffé de sang » durant les deux jours de traque qui ont suivi l’attentat. Il avait un objectif, il l’a rempli, et n’avait alors plus qu’à mourir en martyr. Cet objectif est éminemment politique : contraindre au silence les auteurs, les dessinateurs et les journalistes qui s’attaquent à l’Islam. Le discours était celui d’un « extrémiste », pas d’un fou.

    Pourtant,  la France ne découvre pas la violence politique en 2015. Et nul n’avait pensé qualifier de fous les terroristes du GIA, du FLN ou d’Action directe. Les réactions d’aujourd’hui sont le signe de cette fracture entre deux France qui ne se connaissent et ne se comprennent plus. La rencontre d’un pays sécularisé en guerre permanente contre le Moyen-Orient et d’une violence politique exercée au nom de l’Islam.

    L’insoumission appelle une réponse politique

    Le fait qu’il n’y ait plus d’équilibre, plus d’autre réponse que l’instantanée réaction émue, est problématique. Dans d’autres circonstances, dans une France moins vieillissante, nous aurions probablement vu se multiplier des réactions concrètes et rationnelles. Le surplus d’émotion télévisée semble faire l’effet d’une catharsis collective qui vient inhiber le réflexe sensé qu’a été celui du résistant sous l’Occupation. L’immense majorité des réactions, qu’elles viennent des médias ou de la population sont silencieuses, à l’image des « marches républicaines » affectées.

    Le gouvernement convainc peu également. Lorsqu’il parle d’une « guerre contre le terrorisme » sur notre territoire, il formule une ineptie juridique puisque la guerre appelle l’usage d’une violence proactive alors que l’État a seulement fait usage d’une violence réactive dans le cadre d’opérations de police. La violence, qu’elle soit politique ou non, terrorise. La France en a pourtant vu d’autres tout au long de son histoire et ne devrait pas jouer la vierge effarouchée qu’elle n’est pas.

    Valentin Moret (Philitt, 13 janvier 2015)

     

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  • Pas d'amalgame, pas d'amalgame !...

    Vous pouvez découvrir ci-dessous une chronique d'Éric Zemmour sur RTL, datée du 13 janvier 2015 et consacrée à la marche parisienne en l'honneur des victimes des attentats islamistes des 7, 8 et 9 janvier, qui a rassemblé plus d'un million de personnes...

     


    Marche républicaine : "Dimanche, l'écran de... par rtl-fr

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