Vous pouvez découvrir ci-dessous une chronique incisive d'Éric Zemmour sur RTL, datée du 13 décembre 2016 et consacrée au petit monde privilégié des partisans d'Emmanuel Macron...
En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.
Vous pouvez découvrir ci-dessous une chronique incisive d'Éric Zemmour sur RTL, datée du 13 décembre 2016 et consacrée au petit monde privilégié des partisans d'Emmanuel Macron...
Les éditions de L'Æncre viennent de publier un nouvel essai de Bernard Plouvier intitulé Le dérangement du monde. Médecin, Bernard Plouvier est notamment l'auteur de plusieurs études historiques décapantes, dont Faux et usage de faux en histoire (Dualpha, 2012), et d'une imposante Biographie médicale et politique d'Adolf Hitler (Dualpha, 2007).
" Le sens de l’honneur s’accommode mal des périodes de décadence, durant lesquelles il s’évanouit chez les médiocres qui, partout et toujours, forment la majorité des populations. Cet affaissement moral fait entrer la vie publique et privée en état de pourrissement. L’on perçoit alors les stigmates de décomposition sociale : encouragement au parasitisme social, prime électorale aux plats démagogues, impunité offerte aux criminels.
Un enrichissement progressif des travailleurs et une longue paix amollissent les populations. Une philosophie dominante optimiste, douce, généreuse et délicieusement hypocrite, c’est-à-dire une façon typiquement féminine d’envisager la vie sociale, ne peut – sous prétexte de diminuer la brutalité des mœurs – que déviriliser la société. Les bouleversements monstrueux de l’Occident planifiés par les nouveaux maîtres – chômage de masse de très longue durée, invasion musulmane conquérante, fanatique et obscurantiste -, et un rythme accéléré des innovations morales et techniques, favorisent les états dépressifs autant que l’expression de délires. L’innovation technique est facilement maîtrisable et domesticable, au prix d’un apprentissage plus ou moins long. Mais le désaveu officiel des valeurs fondamentales enseignées par des parents ou des éducateurs profondément respectés, la promotion d’autres valeurs, auparavant méprisées, créent une désorientation morale et une sensation de vide infiniment dangereuses.
À chaque épisode d’ébranlement moral majeur, l’on voit une partie de l’humanité plonger pour plusieurs décennies dans le chaos, par sentiment d’incapacité grandissante, d’inadaptation à un environnement trop instable. C’est en cela que réside le dérangement du monde actuel et l’on comprend que nombre de nos contemporains se détournent des trivialités quotidiennes pour se plonger dans la fiction ou dans la contemplation du (presque) immuable : la nature.
Une société devient décadente quand elle est tentée par le suicide collectif, soit l’abandon par mollesse et veulerie de ses propres valeurs. C’est faire preuve d’une lâcheté impardonnable que de laisser ses enfants exposés aux turpitudes et à la profonde amoralité de nouveaux maîtres et d’envahisseurs venus d’un autre monde conceptuel. L’histoire le démontre : à ces périodes molles et corrompues de décadence progressivement accélérée, succède un ébranlement majeur, révolution et guerre de libération. "
Nous reproduisons ci-dessous l'entretien donné par Caroline Galactéros au Figaro Vox à propos de la reprise de la ville d'Alep aux forces rebelles par l'armée syrienne et ses alliés...
Docteur en science politique et dirigeante d'une société de conseil, Caroline Galactéros est l'auteur de Manières du monde, manières de guerre (Nuvis, 2013) et publie régulièrement ses analyses sur on site Bouger les lignes.
Caroline Galactéros : la bataille d'Alep ou la déroute de la diplomatie occidentale en Syrie
FIGAROVOX. - L'Armée syrienne a repris le contrôle de la vieille ville d'Alep qui était aux mains des rebelles. Est-ce un tournant décisif pour la Guerre en Syrie?
Caroline GALACTEROS. - Cette avancée des forces du régime est importante. Après la libération d'autres quartiers d'Alep-Est, avoir pu extirper les djihadistes de ce dédale de rues et de souterrains et les contraindre à se replier vers le sud-est de la ville témoigne d'une dynamique militaire positive en faveur de l'armée syrienne. Surtout, l'exfiltration réussie de plusieurs dizaines de milliers de civils vers l'ouest de la ville prive les djihadistes de leurs «boucliers humains» … et les adversaires occidentaux du régime d'un argument médiatique lourd contre l'implication militaire de Moscou à ses côtés…
La prise d'Alep, si elle devait se réaliser rapidement, constituerait un cap au plan des forces morales qui s'opposent dans cet interminable pugilat, mais surtout une victoire politique symbolique de prix qui conforterait un rapport de force de plus en plus favorable à la restauration de l'Etat syrien. Le recul des djihadistes à Alep n'est en effet que la manifestation d'une déroute militaire globale qui semble chaque jour plus inéluctable, et d'un rapport de forces russo-américain où Washington perd pied. Même John Kerry dans sa déclaration à Bruxelles du 6 décembre (lors de la réunion des ministres des Affaires étrangères de l'OTAN), semble jeter l'éponge, apparemment convaincu que la partie (i.e le renversement du régime syrien et l'éclatement du pays) est perdue, et cherche habilement à dédouaner l'Amérique d'un soutien aux mouvements rebelles radicaux devenu indéfendable et surtout sans issue. Sans issue… mais pas sans objet résiduel. La rivalité Washington-Moscou restera vive, au moins jusqu'à l'entrée en fonction de Donald Trump fin janvier prochain. De ce point de vue, la réduction de l'insurrection djihadiste à Alep n'est donc pas décisive, et l'administration Obama poursuivra sans doute son soutien au moins indirect aux groupes radicaux (notamment via la Turquie) pour pourrir au maximum le jeu russe et plus encore celui du nouveau Président, qui a déjà entrepris un dialogue avec Moscou pour sortir l'Amérique de ce bourbier. Peut-être un «deal» de type «blanc-seing à la Russie en Syrie contre mains libres à l'Amérique en Irak» pour redorer le blason US est-il en train de se nouer. La guerre ne va donc pas s'arrêter avec l'éventuelle reprise d'Alep. Elle cessera lorsque les puissances sunnites, les Etats-Unis mais aussi la France accepteront leur «échec» et chercheront sérieusement un compromis politique soutenable pour la Russie et l'Iran. Il faut pour cela que Ryad, Doha, Ankara, Londres et Washington admettent qu'il y a plus à gagner à négocier qu'à combattre, et sans doute aussi que Paris cesse de prendre des initiatives diplomatiques (du type de la conférence envisagée «des pays refusant la guerre totale»…) à contretemps et contre-emploi. Ces gesticulations dérisoires déconnectées de la marche réelle des évènements sont hautement contreproductives, même du seul point de vue égoïste de l'intérêt national. Nous ne reviendrons pas ainsi dans un jeu d'où nos maladresses et notre entêtement dogmatique nous ont exclus en nous déconsidérant.
Dans quelle mesure la prise d'Alep consacre le retour militaire et diplomatique des Russes dans les affaires internationales?
Ce retour de la Russie est à mon sens plus qu'une évidence. C'est une nécessité, n'en déplaise aux nombreux «experts» et commentateurs qui veulent contre toute évidence persister à voir le monde avec un regard de cyclope myope, de manière simpliste et manichéenne. Ils se trompent d'ennemi, par confort intellectuel et refus de se remettre en question. Leur responsabilité est en fait lourde dans la perpétuation du chaos et de la violence car en claironnant leur pensée indigente, ils sclérosent les lignes de fracture au lieu de contribuer à les dépasser. Il est pourtant urgentissime de reconnaître enfin que le modèle implicite des relations internationales qui a eu cours depuis 20 ans s'est définitivement fracassé contre ses propres excès. L'idéalisme moralisateur comme masque d'un interventionnisme rapace a fait des ravages qu'on ne peut plus ignorer. Chez les peuples victimes de notre empressement à les «libérer», mais aussi chez tous ceux que l'on croit ainsi convaincre de la prévalence du modèle occidental de développement politique, économique et social. Et l'effet boomerang de cette offensive qui ne dit pas son nom joue désormais à plein contre nous.
Profitant de cet échec patent, la Russie propose - à l'occasion du conflit syrien -, de rééquilibrer le jeu international, d'admettre sa multipolarité de fait et de se rapprocher de l'Occident dont elle s'estime encore pleinement partie. Surtout, elle offre un modèle alternatif de référence et surtout de protection plutôt convaincant: fiable, cohérent, pragmatique, résilient. Ne pas «lâcher Assad» en dépit de la curée internationale contre lui, et surtout protéger l'Etat syrien du démembrement a un impact non seulement à Damas et Téhéran, mais aussi au Caire, à Alger, à Dehli, en Afrique, aux EAU, à Ankara et même d'une certaine façon, à Ryad… La diplomatie du dialogue ouvert et sans exclusive (officiel ou discret) de Moscou avec tous les acteurs directs et indirects du conflit syrien va bien au-delà de la gestion optimale de ce seul drame. L'entreprise de séduction «à la russe» tous azimuts se poursuit. Les émissaires de Moscou, directs ou indirects (palestinien…), nouent des contacts, proposent des partenariats divers, des contreparties attractives à un appui aux positions russes sur ce que doit être la transition politique syrienne. Bref, les lignes bougent et, au lieu de les franchir, là encore, en France ou ailleurs, on oppose artificiellement la logique militaire à la diplomatique, comme si elles n'étaient pas étroitement liées. Comme si on pouvait décider de faire la guerre ou de négocier! Ça ne marche pas comme ça. Ce n'est pas la guerre comme seul mode d'action …ou la diplomatie hors sol dans le silence des armes. Seule la prise d'ascendant militaire sur le terrain et un rapport de force qui ne peut plus évoluer qu'à la marge permettent à un moment donné aux belligérants contraints et forcés, et à leurs parrains divers de s'assoir à la table de négociation de manière productive.
Pour l'heure, les Russes ont marginalisé les Américains - qui ont déjà fort à faire pour «soutenir sans soutenir» les djihadistes et essayer de maitriser leur allié turc indocile. Ils dominent le front diplomatique et cherchent à réunir autour de leurs auspices exclusifs un panel crédible et représentatif de la diversité syrienne pour un processus politique qui débouchera sur des élections et surtout sur le maintien de l'unité syrienne même dans l'hypothèse d'une structure étatique fédérale. Mais à Paris, au lieu de s'insérer dans cette approche pragmatique, on persiste à criminaliser Vladimir Poutine, à parler d'Assad comme du bourreau unique de son peuple, à minorer le soutien populaire au régime de Damas pour accréditer l'idée qu'on pourrait, de l'extérieur, imposer un casting représentatif… qui pourtant a sombré sans équivoque dans le discrédit et en est lui-même réduit à proposer «de parler avec la Russie» pour ne pas quitter tout à fait la scène. Et la guerre continue.
Quelles suites peut-on imaginer pour le régime de Bachar al-Assad?
Assad n'est ni le (seul) problème, ni la solution. Cette polarisation sémantique elle aussi est hautement contreproductive. C'est un atout dans une négociation globale que chaque puissance intervenante essaie de valoriser au mieux. Si la reconquête militaire se poursuit à son avantage, il pourra sans doute négocier des conditions de sortie honorables pour lui et ses proches au terme d'un processus politique institutionnel et électoral auquel lui - ou d'autres de ses proches, membres éminents du régime - devront d'une façon ou d'une autre participer.
Quel est le jeu de la Turquie alors que le pays poursuit au Nord de la Syrie son opération «Bouclier de l'Euphrate»?
La Turquie est revenue depuis juillet dernier pleinement dans le jeu politico-militaire régional. Al-Bab, qu'elle essaie d'encercler avec l'aide de ses rebelles affiliés de l'Armée syrienne libre (ASL), est un point stratégique entre Alep et la ville de Manbij qui est elle, tenue par les Kurdes, ennemi principal du pouvoir d'Ankara et de son point de vue bien supérieur en nocivité à Daech qu'elle a longtemps soutenu. Son idée de manœuvre - qui inquiète d'ailleurs fortement Damas - pourrait être de déloger Daech d'Al-Bab pour y prendre sa place, empêchant ainsi la réunification des zones kurdes tout en continuant à nourrir la lutte des islamistes radicaux contre le régime syrien via son «proxy» ASL notamment. D'une manière générale, on peut dire qu'Ankara mène très habilement sa partie, ne renonce à aucune de ses ambitions régionales à la fois en Irak et en Syrie, jouant tout à la fois de son appartenance à l'OTAN - qui sert les Américains dans leur jeu contre la Russie et les rend conciliants -, et de sa «réconciliation» avec Moscou qu'elle monnaie contre une tolérance russe à ses avancées militaires en Syrie.
La réalité du conflit syrien donne-t-elle ainsi raison aux positions diplomatiques de Donald Trump et François Fillon?
Pour moi, notre monde a un très urgent besoin de réalisme politique et stratégique. Il faut ouvrir, au nom même de l'apaisement de sa violence structurelle, une ère de coopération hyperpragmatique et à visée éthique (ce n'est pas contradictoire!) en abandonnant les utopies mortifères de l'idéalisme moralisateur qui ont pavé le monde de cadavres civils sacrifiés sur l'autel de notre ubris. Il faut revivifier les Nations Unies et revenir au respect de leur Charte fondatrice. La stabilité de l'ordre international dépend du respect de la souveraineté des Etats, de la non-ingérence dans leurs affaires intérieures et de l'exemplarité politique propre des démocraties occidentales, non de leur interventionnisme cynique sous des prétextes qui depuis longtemps ne convainquent plus que de grandes âmes au bellicisme refoulé qui depuis leur confortable cocon, décident de la vie ou de la mort de peuples entiers. Donald Trump est en train de s'entourer d'une équipe en matière internationale et de défense que je trouve de très bon niveau. Ses émissaires sont déjà à l'œuvre pour nouer des liens précieux. Nous aurons bientôt sans doute de bonnes surprises … et plus que nos yeux pour pleurer et faire oublier l'indigence de notre compréhension des enjeux diplomatiques et stratégiques liés à son arrivée au pouvoir. Notre docilité diplomatique envers l'Administration sortante, pourtant si mal récompensée, nous a empêchés d'accueillir l'alternance américaine comme un Etat du rang de la France aurait dû évidemment le faire: avec un respect du vote démocratique et un accueil ouvert au dialogue avec le nouveau pouvoir de Washington. Encore une fois, nous donnons des leçons, refusons la réalité d'un nouveau président qui nous déplait car il voit le monde sans lunettes roses et noires. Et nous nous enfonçons un peu plus dans la relégation diplomatique et stratégique. Sauf à mettre en œuvre très vite une complète refondation de notre politique étrangère sur une base souveraine, indépendante, réaliste, audacieuse et généreuse. Ce n'est pas un choix. C'est impératif. Il semble que le vainqueur de la primaire de la Droite et du centre en a une claire conscience. Il faut souhaiter ardemment qu'il trouve en Donald Trump tout autant qu'en Vladimir Poutine des interlocuteurs désireux de promouvoir un triple «reset» (des relations américano russe, franco-américaine et franco-russe) et de faire renaître un pôle occidental élargi, influent et attractif. Nous avons tout à y gagner.
Caroline Galactéros, propos recueillis par Alexis Feertchak (Figaro Vox, 8 décembre 2016)
Les éditions French pulp viennent de rééditer un récit biographique marquant d'Henry Sergg intitulé Joinovici - L'empire souterrain du chiffonnier milliardaire. Ancien officier, Henry Sergg, de son vrai nom Serge Jacquemard, a été un auteur prolifique de polars, publiés pour l'essentiel aux éditions Fleuve noir.
" Comment faire fortune quand on ne sait ni lire ni écrire ? Facile : il suffit de s'appeler Joseph Joinovici et de n'avoir aucun scrupule. Chiffonnier puis ferrailleur dans la France des années 30, cet orphelin illettré va connaître une ascension fulgurante : collabo, juif décoré Aryen d'honneur, il accumulera une fortune colossale en dénonçant des centaines de malheureux pour revendre leurs biens... avant de se faire bombarder Grand Résistant en août 1944 ! Véritable araignée, il aurait pu prospérer longtemps, et pourtant il va chuter, victime de la vengeance de ceux que l'on n'attendait pas..."
Nous reproduisons ci-dessous un bel article de Ludovic Maubreuil, consacré à la réalisatrice Cheyenne-Marie Carron, mis en ligne sur son blog Cinématique, après avoir été publié initialement dans la revue Eléments (n°162, septembre - octobre 2016).
Vous pouvez également découvrir la bande-annonce de son prochain film, La Morsure des Dieux.
Les films de Cheyenne-Marie Carron sont disponibles en DVD sur son site officiel.
Le cinéma de Cheyenne-Marie Carron
C’est l’histoire d’une jeune fille de la Drôme qui monte à Paris à sa majorité, CAP de secrétariat en poche, avec la ferme intention de devenir réalisatrice. Née à Valence de parents kabyles, placée à trois mois en famille d’accueil, déclarée Pupille de L’Etat des années plus tard, elle est officiellement adoptée à l’âge de 20 ans par les Carron et décide alors de changer de prénom. Par fidélité à son petit frère d'origine indienne mais également en hommage à l’un des derniers films de John Ford, Les Cheyennes (1964). En 2014, elle le compose avec Marie, suite à son baptême catholique. C’est l’histoire de Cheyenne-Marie Carron, qui a réalisé à ce jour deux courts-métrages (dont le premier à 25 ans) et six longs, deux autres étant en préparation.
Viennent dans l’ordre, Ecorchés (2005), huis-clos étouffant sur un couple reclus volontaire dans une vaste maison, peu à peu anéanti par son propre nihilisme ; Extase (2010), somptueuse méditation sur l'enfantement et la mort, la foi et le doute, l'art et le sexe ; Ne nous soumets pas à la tentation (2011), drame à tiroirs et à révélations, raconté successivement par ses trois protagonistes ; La Fille Publique (2012), superbe portrait de son adolescence, retraçant avec une franchise exemplaire, cette période délicate ; L'Apôtre (2014), itinéraire douloureux d'un musulman finissant par devenir chrétien, dont la sortie fut plusieurs fois repoussé en raison des attentats en France ; Patries (2015), intense film sur la banlieue, croisant les destinées de Sébastien, en butte au racisme anti-blancs, et de Pierre, Africain en France depuis l'âge de cinq ans.
Que ce soit en raison de la hardiesse de ses sujets ou du fait qu'elle ne fasse pas partie du sérail, Cheyenne-Marie Carron bâtit son œuvre en dehors du système. Elle écrit, réalise et produit elle-même ses films, les tourne avec peu de moyens, pour quelques dizaines de milliers d'euros, avec bien souvent des acteurs et des techniciens en participation, c'est à dire rétribués en fonction des recettes. La dernière ligne du générique de fin de Ne nous soumets pas à la tentation est un extrait du Manuel de survie de Werner Herzog, décapante charge contre l'industrie cinématographique : « Tu ne dois jamais dépendre de quiconque. Deviens ton propre producteur. L'argent suivra… »
Une main glisse le long d’une façade d’immeuble, d’une grille de jardin, d’une cloison d’appartement. Elle en effleure les arêtes de métal, la douceur un peu rêche du papier-peint, les aspérités du crépi. La caméra suit celle ou celui qui marche ainsi d’un pas décidé, tout en se focalisant sur cette main qui malgré la hâte, l’inquiétude ou la détermination, s’attarde encore un peu, profite de ces sensations bientôt évanouies, puisqu’il faudra bien finir par quitter cet immeuble, ce jardin, cet appartement. Ce plan récurrent dans le cinéma de Cheyenne-Marie Carron donne assez bien la mesure du caractère fordien de ses personnages, lesquels ne vont jamais de l’avant sans garder chevillée au corps, la mémoire de ce qui les a fondés, comme un peu de terre natale au fond de la poche. Chez Ford en effet, le héros n’envisage l’autre, ne part à sa découverte ou à son affrontement, qu’en fonction de ce qu’il sait de lui-même et de sa communauté. C’est même parce qu’il a besoin de la compléter, de l’affermir ou d’enfin l’accepter, qu’il se confronte à d’autres identités que la sienne, comme le capitaine Thomas Archer face aux indiens de Cheyennes.
La rencontre avec l’autre, chez Ford comme chez Cheyenne-Marie Carron, n’est jamais anodine, mais au contraire décisive. Elle permet de départager ce qui n'a jamais été que postures machinales et ce qui demeure essentiel, ce qui résulte de racines profondes et ce qui ne relève que de du cosmétique, ce qui s’impose et ce que l’on prétend. La relation violente à l’autre, après les mensonges et les simagrées de la ressemblance, permet de déployer son identité sans pour autant en renier l'origine. C’est ainsi que Pierre, Camerounais élevé en France, cheminera tout au long de Patries, notamment grâce à son amitié manquée avec Sébastien, jusqu’à désirer rejoindre la terre de ses ancêtres ; mais c’est aussi de la sorte qu’Akim, dans L’Apôtre, de confession musulmane mais se heurtant aux principes rigoristes de son frère, deviendra chrétien. Dans les deux cas, chacun des personnages s’est pleinement réalisé, après avoir quitté ce qu’il pensait être et devenu ce que profondément il était. Deux leitmotivs de son cinéma peuvent alors être rapprochés : la rixe brutale, qui voit l’un contre l’autre, frères, sœurs ou camarades se combattre, et puis le plan intimiste, avec une porte entrouverte en amorce, dévoilant un personnage qui dans le secret d’une chambre, entonne un chant ou récite une prière. D’un côté, la violence sans fard, filmée au plus près par une caméra incisive, et de l’autre, la lente maturation dans le retrait de l’arrière-plan. Le combat-chrysalide, qui permet de se nourrir et se démarquer de cet autre au reflet inversé, et puis la métamorphose, qui n’est finalement qu’une réappropriation définitive de soi.
La richesse des films de Cheyenne -Marie Carron tient à cette dialectique fordienne, à cette quête acharnée de ce qui fonde puis forge une identité. Elle procède également d’un style audacieux, tentant de lier la rigueur de l'enchaînement classique aux bouleversements du cinéma-vérité. Cette démarche esthétique, que l’on peut cette fois rapprocher du cinéma de Pialat, apparaît d’autant plus anachronique que la mode, tout juste à l'opposé, est aux dérèglements formels les plus hauts en couleurs, combinés au chiqué relationnel, aux témoignages parodiques, aux faux-semblants de la sincérité … On observe en effet dans cette œuvre d’une grande cohérence, une oscillation permanente entre l’implacable progression dramatique et le maelstrom d'émotions qui figent les personnages. Il en va de même entre le sens précis d'une séquence et la kyrielle de sensations qui viennent s'y inviter, entre la vérité d'un acteur et la logique de son rôle. Ces trois registres d'opposition montent ainsi chaque film jusqu’à son point de rupture, exerçant une tension bouleversante entre le documentaire et l’allégorie. A ce titre, on peut remarquer qu’à de nombreuses reprises, la caméra vient capter la position des mains des acteurs. Qu’ils les saisissent dans la justesse d'une attitude, le savoir-faire d’un travail, qu’ils les montrent ouvertes pour la gifle ou le pardon, qu’ils les préfèrent caressantes ou crispées sur un refus, ces plans magnifient autant le caractère immuable d’un langage que la beauté évidente de l’instant.
Il est bien d’autres raisons pour lesquelles ces films se révèlent précieux. Le cinéma français contemporain, par exemple, paraît ne rien penser des paysages dont il agrémente ses récits. Il les oublie dans le flou des arrière-fonds ou bien les maquillent de grandiloquence publicitaire. Réduites à un décor, les expressions de la nature ne sont plus là qu’en supplément, profondément désaffiliées. A l'inverse, les héroïnes et les héros de Cheyenne-Marie Carron font corps avec la nature, leurs sentiments les plus contrastés en épousent les formes, un lien organique s'établit entre la mer, le vent, la forêt et leur psyché. Il peut s’agir d’exaltation comme d’apaisement, de rencontre tragique comme de recours inespéré. L'escalade meurtrière des amants d'Ecorchés se nourrit des bourrasques qui frappent à leur porte et dévastent les alentours ; les souvenirs et les craintes d'Extase s’accompagnent en fond sonore d’eau qui s’écoule lentement, de vagues violentes, de pluie régulières ; Yasmeen (La Fille publique) croise souvent des arbres à ses moments de grand désarroi, y grimpe même pour s’y réfugier. Akim (L’Apôtre), en plein conflit spirituel, trouve le réconfort en enserrant de ses mains le tronc d'un arbre, tandis que le groupe d'anciens musulmans convertis au christianisme se réunit en secret dans une clairière ; Pierre (Patries) retrouve entre les arbres d'un parc, la musique traditionnelle de son pays. Tout comme la sensualité mystique qui émane de la plupart des films de Cheyenne-Marie Carron, cette union vivifiante entre l'homme et la nature, ce rapport charnel à la terre, transcende ces récits de vengeance et de conquête, d'accomplissement et de renoncement, de foi et de doute. La rencontre enthousiaste avec la spiritualité païenne, dont la cinéaste nous parle dans l'entretien qui suit, semble ainsi un aboutissement logique, tant la matière de son cinéma en était déjà, depuis l’origine, profondément imprégnée.
Catholique fervente néanmoins sensible à l'effusion païenne, cinéaste autodidacte affinant des mises en scène toujours plus exigeantes, auteur exclue du système continuant de ne faire aucune concession à l’air du temps, Cheyenne-Marie Carron n'a sans doute pas fini de remuer le monde désenchanté, désengagé et désespérant du cinéma français. Comme Dumont, Brisseau, Viel et quelques autres, elle en sauve même l'honneur.
Ludovic Maubreuil (Cinématique, 5 décembre 2016)
Les éditions Les Bouquins de Synthèse nationale viennent de rééditer en deux volumes, dans une version intégrale, le livre de David Irving intitulé Insurrection - Budapest 1956, le cauchemar d'une nation. David Irving est un historien anglais spécialiste de la deuxième guerre mondiale, dont plusieurs ouvrages ont été traduits en français chez de grands éditeurs comme La destruction de Dresde (Robert Laffont, 1964) ou une biographie de Göring (Albin Michel, 1991).
" Il y a 60 ans, à Budapest, le peuple se soulevait contre l'oppression communiste. C'était la première fissure du Système qui s'était instauré à Yalta et qui devait durer pour l'éternité. 45 ans plus tard ce Système s'écroulera, emportant avec lui l'Union soviétique et le Pacte de Varsovie. Il s'imposera alors un "Nouvel Ordre mondial" dominé par la haute-finance apatride, qui, à son tour, commence aujourd'hui à avoir du plomb dans l'aile.
David Irving relate dans ce livre cette insurrection spontanée de Budapest en octobre 1956. La recherche de documents et de témoins le mena un peu partout en Europe et ailleurs entre 1975 et 1981, alors que la Hongrie se trouvait toujours sous la botte communiste. L'étude en résultant est celle de l'autopsie d'une révolution avortée, vue tant du côté des combattants de rue que de celui des salles de réunion feutrées des puissants. C'est un drame prenant avec prés de dix millions de figurants.
Pour ne pas s'être plié au "prêt à penser" dans les années 90, David Irving fut mis à l'index par les nouveaux maîtres du monde. Il fut écarté des média, calomnié et condamné. Son œuvre, non conformiste, devait tomber dans l'oubli. Mais Synthèse nationale, en accord avec lui, a décidé de la rééditer pour contribuer à la victoire de la Vérité... "