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Métapo infos - Page 504

  • Le nouveau monde ou l'abêtissement politique...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Maxime Tandonnet, cueilli sur son blog personnel et consacré aux tristes caractéristiques du "nouveau monde" politique. Ancien haut-fonctionnaire, spécialiste des questions d'immigration, et désormais enseignant, Maxime Tandonnet a été conseiller à l'Elysée sous la présidence de Nicolas Sarkozy. Il a donné un témoignage lucide et éclairant de cette expérience dans Au cœur du volcan (Flammarion, 2014).

     

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    Le nouveau monde ou l'abêtissement politique

    « Nouveau monde » ou « monde d’après », il est utile de se pencher sur la réalité de la vie politique aujourd’hui en France. Elle est dominée par un abêtissement général, perceptible autour d’une dizaine de paramètres:

    • La fin de l’engagement  : les partis politiques supposés, selon la Constitution concourir « à l’exercice de la démocratie », sont en voie de disparition. La dernière enquête CEVIPOF d’avril 2020 sur l’état d’esprit des Français (vague 11bis), montre qu’ils sont devenus l’institution la plus impopulaire (11% de confiance). Les taux d’adhésion s’effondrent. Or, les partis politiques servaient classiquement à faire émerger les projets et à désigner les futurs responsables politiques. Par quoi ont-ils été remplacés?
    • La courtisanerie: elle se distingue de l’engagement par sa motivation: l’intérêt carriériste, la vanité ou simplement l’éblouissement puéril. Notre époque n’a rien à envier à celle de Saint-Simon. Courtisans et lèche-bottes prolifèrent autour du prince, obsédés, au mépris de toute dignité, par leur seule place au soleil.
    • L’incarnation : le sujet essentiel qui domine tout le reste est celui de l'incarnation. La formule est sur toutes les lèvres: « qui pour incarner? » La politique est avant tout affaire d’émotion et d’affect, se limitant au choix d’une idole, un gourou, une vedette médiatique dont la mission est « d’incarner ». Incarner quoi? La question ne se pose même pas, ou à peine. Le chef est une fin en soi, l’incarnation du rêve et de l’illusion à laquelle chaque citoyen est invité à se soumettre. Ce phénomène est le plus symptomatique du climat d’asservissement général.
    • Le grand spectacle: la vie politique a vocation à se muter en spectacle déconnecté de la réalité où s’ébattent des acteurs, des artistes de l’illusion. Faute d’agir sur le monde des réalités et de gouverner, ils se livrent à une surenchère d’annonces spectaculaires, de coups de communication, de slogans et de paroles creuses, de coups de menton, de provocations censées remplir le vide laissé par leur démission. Il n’est pas d’aveu plus évident de l’impuissance et du renoncement politique que les gesticulations d’un fanfaron.
    • La déconnexion: le triomphe du grand guignol  est le signe de l’affaiblissement des courroies de transmission entre le politique et la société. Sur la dette publique, l’évolution des prélèvements obligatoires, la désindustrialisation,  la maîtrise des frontières, la poussée de la violence et de la barbarie, l’effondrement scolaire, l’autorité publique a largement intériorisé le sentiment de l’impuissance publique et de la perte de ses leviers d’action.
    • La post démocratie: le qualificatif de démocratie appliqué à la nation moderne est au cœur de la duperie. Il est admis une fois pour toute que l’élection se résume à une sorte de fête des illusions. Ce que pense le peuple n’a pas la moindre esquisse d’importance. L’avenir se prépare sans lui et en dehors de lui. Il est conçu par des forces et des individus prétendument détenteurs de la vérité, sur l’ Europe, les frontières, la sécurité, la morale, les impôts et la dette publique, l’éducation nationale, c’est-à-dire les grands sujets de l’époque.
    • L’extrémisme ou démagogie:  le néant des idées et des projets n’est en rien synonyme de tolérance, de concorde et de sagesse. C’est le contraire qui se produit. La nature ayant horreur du vide, le nihilisme se traduit par une fuite en avant dans la radicalisation et le sectarisme. Dès lors que le réel n’a plus la moindre importance, la politique devient surenchère de promesses démagogiques nonobstant les conséquences (sortie du nucléaire, revenu universel) et d’affrontement hargneux et sectaires entre fauves hystériques.
    • Le triomphe de l’indifférence: ce grand cinéma ou numéro d’illusionnisme se déroule sur fond d’indifférence générale. L’abstentionnisme (54% aux dernières législatives) est un mouvement de fond qui ne cesse de s’amplifier. La métamorphose de la vie politique en grand spectacle nihiliste pourrait susciter l’indignation et la révolte. Or ce phénomène n’est que sporadique et marginal. Le sentiment dominant est au repli individuel. Le destin collectif s’efface au profit de la quête d’une survie et la chute vertigineuse de la France, comme un radeau en perdition que le torrent entraîne vers le précipice, n’est pas la préoccupation des Français dans leur majorité.
    • L’irresponsabilité: l’indifférence générale est la porte ouverte à toutes les dérives et tous les abus. Les dirigeants peuvent faire absolument n’importe quoi aujourd’hui –  clanisme, copinage, corruption avérée, mensonges, contradictions, fautes monstrueuses aux conséquences tragiques, insultes contre la nation, trahison – les mécanismes de mise en jeu de leur responsabilité (politique, judiciaires) et de sanction sont comme neutralisés. Tout est possible et rien ne semble devoir les arrêter.
    • La culture de médiocrité: dans ce monde nouveau disparaissent les références historiques et intellectuelles. Il en faudrait sans doute peu pour démontrer la vanité, l’absurdité et la dangerosité du grand cirque. Mais elles ont disparu. L’éclat de voix  d’un footballeur, d’un présentateur de télévision d’une actrice de cinéma ou de n’importe quel pitre n’ayant jamais lu un livre vaut plus que la parole d’un écrivain du XXe siècle et n’importe quel tweet méchant écrase d’un coup de talon la pensée de Péguy ou de  Bergson. Sur ce terreau de médiocrité s’enracine le nouveau monde décrit ci-dessus.

    Maxime Tandonnet (Blog personnel de Maxime Tandonnet, 26 août 2020)

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  • Itinéraire d'un malentendu...

    Les éditions Les Indes savantes viennent de publier une étude historique de Jean-Baptiste Bruneau intitulée Paul Chack - Itinéraire d'un malentendu. Jean-Baptiste Bruneau est maître de conférences (HDR) en histoire contemporaine à l'Université Bretagne-Sud.

    On rappellera qu'une présentation par Francis Bergeron de l’œuvre de Paul Chack figure dans l'ouvrage Les Maudits (La Nouvelle Librairie, 2019), publié sous la direction de Pierre Saint-Servan.

     

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    " La condamnation et l'exécution de Paul Chack en janvier 1945 pour faits de collaboration en font un des symboles les plus célèbres de l'engagement idéologique des écrivains. Chroniqueur attitré du journal Aujourd'hui de Georges Suarez, président du Comité d'action antibolchevique et du Cercle aryen, organisateur de l'exposition internationale "Le bolchevisme contre l'Europe", il paye au prix fort sa dérive partisane, commencée au milieu des années 1930.
    Sa fin tragique a éclipsé le parcours de l'écrivain illustre dont l'oeuvre, qui célèbre la grandeur de la Marine française et son action au cours du premier conflit mondial, a enchanté toute une génération et suscité de nombreuses vocations maritimes. Personnalité incontournable de la République des Lettres de la seconde moitié des années 1920, il connaît une ascension fulgurante sur le devant de la scène littéraire avec On se bat sur mer, qui lui assure une légitimité d'historien maritime que vient renforcer son statut d'officier, commandant du Service historique de la Marine et membre de l'Académie de Marine. "

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  • Feu sur la désinformation... (294)

    Vous pouvez découvrir ci-dessous un nouveau numéro de l'émission I-Média sur TV libertés, consacrée au décryptage des médias, présentée cette semaine par Michel Geoffroy et Nicolas Faure.

    Au sommaire :

    • 1 : L’image de la semaine : : le courage d'Augustin, les mensonges des médias

    • 2 : Ensauvagement général : l'occultation médiatique ?

    • 3 : Revue de presse

    • 4 : Clap de fin pour France Ô

     

                                         

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  • L’enfer est pavé de bonnes intentions hygiénistes...

    Nous reproduisons ci-dessous un entretien donné par François Bousquet à Causeur à l'occasion de la sortie de son essai polémique Biopolitique du coronavirus (La Nouvelle Librairie, 2020). Journaliste, rédacteur en chef de la revue Éléments, François Bousquet a notamment publié Putain de saint Foucauld - Archéologie d'un fétiche (Pierre-Guillaume de Roux, 2015), La droite buissonnière (Rocher, 2017) et Courage ! - Manuel de guérilla culturelle (La Nouvelle Librairie, 2020).

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    Covid-19 : « L’enfer est pavé de bonnes intentions hygiénistes »

    DAOUD BOUGHEZALA. Vous consacrez le premier chapitre de votre essai Biopolitique du coronavirus. Télétravail, famille, patrie, aux théories complotistes qui font actuellement florès. A l’ère de la scolarité obligatoire, de l’accès gratuit au savoir et à l’information, comment expliquez-vous leur essor ? Vit-on une crise de l’esprit scientifique et rationnel moderne ?

    FRANÇOIS BOUSQUET : Avons-nous jamais été des agents rationnels, des animaux pourvus seulement d’une froide raison calculante ? On peut en douter. Notre imagination a toujours été très active. Le complotisme le prouve à sa manière. C’est d’abord un imaginaire folklorique, souvent sympathique, mais accolé à une sorte de délire interprétatif. Cet imaginaire a brutalement resurgi après le 11 Septembre 2001 et la seconde guerre d’Irak. Peut-être sa longue hibernation n’était-elle qu’un effet d’optique que l’avènement du Web a brisée. Internet n’a d’ailleurs pas réinventé le complot, il l’a seulement sorti de ses niches antimaçonniques, rosicruciennes, soucoupistes. Viral, le complot est devenu mondial, en haut débit et libre accès. C’est la nouveauté. Pour le reste, le complotisme répond à un besoin fondamental de l’âme humaine : l’intentionnalité. Les créationnistes parleraient de dessein intelligent, mais le dessein ici est indifféremment intelligent ou malveillant. C’est ce que Léon Poliakov a appelé d’une formule saisissante la « causalité diabolique ». À elle seule, elle illustre la permanence du miraculeux, de la pensée magique, de l’acteur tout-puissant qui met un visage sur des processus qui sans cela resteraient impersonnels. Comment détester la logique abstraite du capital ou de la mondialisation ? En lui donnant les traits de Bill Gates !

    Disant cela, on en viendrait presque à épouser la ligne de défense des médias centraux contre le complotisme. Mieux vaut au contraire faire l’hypothèse que le complotisme n’est que l’image renversée desdits médias. Les journalistes mainstream voudraient nous convaincre de ce que nous sommes entrés dans l’ère de la « post-vérité ». On ne demanderait qu’à les croire s’ils ne s’illustraient pas du matin au soir dans l’exploitation sans vergogne des faits alternatifs. C’est le faux sans réplique décrit par Guy Debord. Or, ce faux a trouvé une réplique dans le contre-journalisme sauvage et la littérature conspirationniste qui fleurissent sur Internet. L’univers complotiste a toujours fonctionné dans une troublante relation de symétrie avec les médias « légitimes ».

    Sans sombrer dans le complotisme, vous semblez parfois céder à la pensée magique. Ainsi, à l’instar de nombreux écologistes, vous estimez que la nature s’est vengée de nos excès, le Covid-19 étant la nemesis qu’appelait notre hubris. Plutôt qu’une conséquence de la mondialisation et de la surexploitation de la planète, ce virus n’est-il pas un des  fléaux qui jalonnent inévitablement l’histoire humaine ? 

    Rassurez-vous, je ne suis pas Greta Thunberg, le Petit Chaperon suédois qui fait descendre dans la rue les 16-18 ans et les fait pérorer à la tribune de l’ONU. De ce point de vue, le coronavirus a été une bénédiction. Il nous a débarrassé de l’icône suédoise et de ses nattes pendantes qui étaient jusqu’à lui placardées partout, comme une affiche de propagande nord-coréenne. Cela étant dit, la cucuterie écolo-citoyenne est une cible facile. Qu’elle ne serve pas de prétexte pour jeter le bébé avec l’eau du bain, et les enjeux écologiques réels avec les limites de leur traduction médiatique ou partisane.

    Nous entrons dans un monde sans perspectives, dans tous les sens du mot : à la fois sans avenir, sans recul et sans champ de profondeur, comme des prisonniers se heurtant aux murs trop étroits de leur cellule. On nous rétorquera que la Terre n’est pas une prison. Certes. Mais elle a ceci de commun avec les prisons qu’il ne nous est pas donné de pouvoir en sortir. La colonisation, puis l’exploitation des terres émergées et des océans auraient dû nous faire prendre conscience des limites mêmes du globe. Il n’en a rien été. À planète finie et ressources comptées, le capitalisme mondialisé n’a opposé que son dogme de la croissance infinie. La crise actuelle part de là. C’est d’abord une crise de la mondialisation des échanges, des hommes et des virus.

    Ce qu’on ne veut pas voir, c’est que la nature peut aisément fonctionner sans l’homme (elle l’a fait durant des milliards d’années), mais l’inverse n’est pas vrai. C’est pourtant sur cette croyance qu’est fondé le régime économique actuel. Si l’on devait comparer la collision de l’humanité avec les limites de la Terre à un véhicule lancé à toute vitesse sur un obstacle, il faudrait bien comprendre une chose : l’obstacle survivra sans peine au choc, mais pas le véhicule, encore moins son occupant. Dans cette affaire, le phénomène de la vie n’est pas menacé. Sa capacité de résilience est sans limites. Des millions d’espèces nous ont précédés sans laisser d’autres traces que des fossiles dérisoires…

    Examinons la gestion de la crise. A quelques exceptions près (Allemagne, Corée du Sud, Nouvelle-Zélande…), les gouvernements ont paru improviser au fil de l’eau.  Soumis à un pouvoir scientifique divisé et désemparé, notre appareil d’Etat a brillé par son impréparation. Si on les compare à leurs cousines occidentales, les élites politiques et administratives françaises se distinguent-elles vraiment par leur niveau d’incompétence ?

    Ajoutez-y la Chine, quand bien même elle en a été le foyer infectieux. Les bons élèves ont toujours été peu nombreux. Cela fait longtemps que la France n’en fait plus partie. Nulle sur toute la ligne ! Le constat est accablant. De la détection du risque à sa gestion, le gouvernement a accumulé les erreurs et les retards. À ce stade, ce n’est plus seulement d’immunodéficience des élites dont il faut parler, mais d’immunodéfaillance du Système. À Sciences Po, à l’ENA, on ne fabrique plus des serviteurs de l’État, mais des serviteurs de la dette, des contrôleurs de gestion. Ces écoles sont des moules. Comment en sortirait-il autre chose que des séries ? Calibrées comme des produits industriels, programmées comme des logiciels – et c’est d’ailleurs ce qu’ils sont très exactement : ils sont là pour accomplir des programmes. On fabrique des pilotes automatiques, à peine des technocrates, tout au plus des techniciens, si médiocres qu’ils nous feraient regretter le temps des ingénieurs qui pilotaient eux du moins des programmes industriels.

    Comme l’avait analysé Michel Foucault, le pouvoir politique moderne entend préserver la vie (et la santé) des citoyens alors les monarques traditionnels préparaient le salut de leurs sujets. Alors qu’une majorité de français apeurés par la pandémie a approuvé le confinement, le pouvoir macroniste a-t-il trouvé dans cette crise l’assise populaire qui lui manquait ? 

    L’assise populaire, certainement pas. Mais de fait les crises confortent les pouvoirs établis. Pandémie aidant, Emmanuel Caméléon – qui a une surprenante capacité à se réinventer – s’est débarrassé d’Édouard Philippe et des Gilets jaunes. Le confinement a joué pour lui. Ce fut un huis clos entre le Président et les Français, les seconds rôles étant dévolus à ses ministres. Tout aura été fait pour que 2022 soit le match retour de 2017. Ce à quoi Macron s’emploie. Continuer de scinder en deux les LR, pour annexer le centre et les juppéistes ; et renvoyer le solde à la bordure du FN. Après avoir annihilé sa gauche, Macron a ainsi piégé sa droite en l’asséchant. Mais il ne l’a piégée que pour mieux la ressusciter en un parti central unique. L’UMPS n’est plus une figure de style, c’est une réalité politique : le macronisme. Ce que les élites post-nationales cherchaient à accomplir depuis Giscard : accoucher d’une grande coalition, sur le modèle des coalitions à l’allemande, dont Macron incarnerait la version hexagonale. Le rêve giscardien de deux Français sur trois, sauf que c’est désormais un rêve à l’envers. La « coalition » macronienne ne réunissant qu’un tiers des voix, les deux tiers restants s’abstenant ou votant populistes, sans espérance de pouvoir, faute d’alliances. Ce qui fonde tous les espoirs de Macron pour 2020. Jusqu’à preuve du contraire, c’est lui qui a la main. On est obligé d’attendre qu’il la perde. Les vents contraires qui ne manqueront pas de se lever à la rentrée devraient ramener « Jupitérion » sur terre.

    Des masques au gel hydro-alcoolique, l’hygiénisme  ne s’est jamais aussi bien porté. Depuis le début du confinement, nos gouvernants réprouvent tout contact physique extraconjugal au nom du risque viral.  L’obsession prophylactique a-t-il transformé nos dirigeants libéraux-libertaires en néo-inquisiteurs ? 

    Les « enragés » de 68 auraient-ils peur de la rage, qui s’appelle aujourd’hui Covid-19 ? Qui les eût imaginés dans la peau du docteur Knock et de Savonarole ? L’alliance de la bactérie et de la mortification, redoutable attelage qui nous vaut cette avalanche de recommandations médicales et d’interdictions sanitaires. Mais les « boomers » n’ont jamais été à une contradiction près. Ils n’ont que le « vivant » à la bouche, alors qu’ils s’acharnent à le mettre sous cloche. Vivre in vivo tue. Idéalement, il faudrait pouvoir « vivre » in vitro, sinon même in utero, à l’abri de la violence du monde, derrière son masque, confiné à vie. Disant cela, il ne s’agit pas de faire l’éloge du cancer du poumon ou des maladies cardio-vasculaires, ni de nier que le coronavirus ou le tabagisme ne sont pas des problèmes de santé publique, ni de se livrer à une apologie des comportements à risques, mais de ne pas dissocier la prise de risques du risque de vivre. Ici comme ailleurs, le mieux est l’ennemi du bien et l’enfer est pavé de bonnes intentions hygiénistes.

    Vous rejoignez les analyses d’Olivier Rey sur la sacralisation de la vie et son corollaire, le refus contemporain de la mort.  Notre époque érige en effet la survie en valeur suprême, renonçant tant au culte païen du héros qu’à la conception chrétienne de la sainteté. Seuls les djihadistes semblent aujourd’hui chercher leur salut dans l’au-delà. Tout compte fait, la sainte frousse de la mort qu’a notre société laïque adoucit-elle  les moeurs ?

    On a conféré à la vie humaine une valeur que jusque-là elle n’avait jamais eue. C’est ce que Michel Foucault a appelé la « biopolitique ». La biopolitique, c’est la prise en considération de la valeur de la vie humaine – ici et maintenant, tout de suite. Cela, c’est le propre de la modernité, c’est l’acte de naissance de l’individu. Dans les âges antérieurs dominés par la religion, ce qui importait, c’était de se donner les moyens de gagner le paradis chrétien. Avec la modernité, renversement de perspective : la cité terrestre va l’emporter sur la cité céleste. C’est dans ce contexte qu’est née la biopolitique. Peu à peu, les individus ont aspiré à conserver ce qu’il y a de plus précieux pour eux : leur vie. Voilà pourquoi on en a fait trop avec le Covid. Parce que nous modernes avons développé une phobie du danger, une intolérance au risque, un déni de la mort. Tout notre arsenal juridique et réglementaire envahissant est très largement conditionné par cette hantise du risque. Zéro mort, zéro défaut, zéro panne, nouvel impératif catégorique. Ce qu’on cherche à conjurer à travers cela, ce n’est pas seulement la visibilité de la mort, c’est sa possibilité. Dans un monde ludique, plus de place pour le tragique. L’hygiénique peut alors triompher.

    Comme l’a écrit Jean Delumeau, tout épisode de terreur se conclut par la recherche de coupables. C’est aussi l’un des ressorts du populisme, dont vous vous revendiquez. Scrutant le paysage politique, vous écorchez Marine Le Pen, vantez les mérites de Michel Onfray et soulignez les limites d’un tribun pétomane à la Jean-Marie Bigard. En tant qu’homme de droite, que vous inspire l’actuel rejet du concept même d’élite jusque dans les rangs conservateurs ? Donnez-vous raison à Lénine soutenant jadis que « chaque cuisinière doit apprendre à gouverner » ?

    Dans un monde idéal, oui. Mais le vœu d’autonomie, celui du peuple auto-institué, se heurte au principe de réalité, singulièrement dans les pays latins, singulièrement dans les pays anciennement catholiques, singulièrement en France, où la puissance publique a tout vampirisé. Je ne sais plus qui a dit de la France que c’est la seule monarchie d’Europe. Pas plus que les autres, elle ne saurait se passer d’élites. Tout le problème est qu’elles sont de plus en plus médiocres, conformistes et déliées de leurs engagements vis-à-vis des peuples. Raison pour laquelle les populistes croient pouvoir en faire l’économie. Mais la vérité, c’est que le peuple en soi, sans élite ni avant-garde, au sens marxiste du mot, est voué à l’impuissance. C’est ce que donne à voir la longue histoire des révoltes populaires, jusqu’à la crise des Gilets jaunes. Il faut se garder des tentations utopiques qui ont peu à peu submergé ce mouvement une fois que les Gilets jaunes historiques ont déserté les ronds-points. Le RIC ne résoudra pas tous les problèmes, pas plus que le « Web e la Piazza », le Web et la place publique, pour parler comme le Mouvement 5 étoiles. On ne fait pas de la politique à partir de rêveries autonomes, autogestionnaires, conseillistes, archéo-anarchistes. Les sociétés auto-organisées (les sociétés sans État chères à l’anthropologue et ethnologue Pierre Clastres) ne font pas société. Ce qui apparaît au contraire dans les enquêtes d’opinion, c’est que les peuples abandonnés plébiscitent les figures de l’autorité. Dans les sociétés ouvertes, un des deux besoins fondamentaux de l’âme humaine n’est plus assurée : la sécurité. L’âme humaine s’épanouit pleinement dans la liberté pour peu que l’homme est la garantie d’être protégé. Liberté et sécurité. Les deux entrent systématiquement en tension, l’un menaçant d’abolir l’autre. Ainsi de la liberté, grand idéal de la modernité. C’est dans ce sens-là qu’il faut interpréter la demande populiste et l’émergence des sociétés illibérales. On définit communément le populisme comme un appel au peuple, mais il est bien plus un appel au secours des peuples, protestation angoissée qui n’est pas entendue et renvoie aux élites l’image de leur suffisance et de leur insuffisance. L’homme populiste cherche le bon gouvernement, le bon pasteur. Il veut choisir son chef, mais il veut un chef.

    François Bousquet, propos recueillis par Daoud Boughezala (Causeur, 18 août 2020)

     

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  • De la soumission à l'annéantissement...

    Les éditions du Rocher viennent de rééditer au format poche une étude historique de Rafael Sánchez Saus intitulée Les Chrétiens dans al-Andalus - De la soumission à l'anéantissement, et préfacée par Arnaud Imatz. Membre de l'Académie royale hispano-américaine des sciences, des arts et des lettres, dont il a été le directeur, Rafael Sánchez Saus est professeur d'histoire médiévale à l'université de Cadiz.

     

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    " L'invasion arabo-musulmane de l'Espagne wisigothique, initiée en 711 pour culminer en 719 avec la conquête de la Gaule narbonnaise, a été l'événement aux conséquences les plus considérables de l'histoire d'Espagne.
    On oublie souvent que, pendant des siècles, la majeure partie de la population fidèle à la religion chrétienne et la minorité juive ont été soumises à un régime de très forte discrimination. Celui-ci reposait sur la ségrégation sociale, l'absence de liberté religieuse, l'exploitation économique et fiscale, l'immersion culturelle et, en cas de protestation ou de révolte, sur la plus sévère répression. La dureté de ce régime s'est accentuée au fil du temps et a fini par provoquer, dès le XIIe siècle, la complète disparition des communautés chrétiennes et juives d'al-Andalus.
    Ce livre offre une vision complète de la situation de ces chrétiens espagnols, appelés mozarabes, unique peuple européen médiéval à avoir vécu pendant tant de générations sous la rigueur de la dhimma. Attachés au mythe des Trois Cultures, de nombreux auteurs ont préféré jusqu'ici ne retenir que les aspects prétendument aimables de cette situation, comme la liberté de culte limitée et la relative autonomie interne des communautés chrétiennes, afin de tenter de délégitimer le processus de Reconquête, véritable matrice de la nation espagnole. Il permet, à l'inverse, de mieux faire connaître la réalité de la vie des chrétiens d'al-Andalus, loin des rêves et falsifications intéressées qui alimentent le mythe de la convivialité pacifique entre cultures et religions construit en marge de la vérité de l'histoire. "
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  • La quatrième guerre mondiale est commencée...

    Vous pouvez ci-dessous découvrir un entretien avec Michel Geoffroy, à l'occasion de la publication de son essai La nouvelle guerre des mondes (Via Romana, 2020), réalisé par Jean-Baptiste Mendes pour Sputnik et diffusé le 19 août 2020. Ancien haut-fonctionnaire, Michel Geoffroy a publié le Dictionnaire de Novlangue (Via Romana, 2015), en collaboration avec Jean Yves Le Gallou, et un essai, La Superclasse mondiale contre les Peuples (Via Romana, 2018).

     

                                         

     
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