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Métapo infos - Page 229

  • Un parfum de fin de règne...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Michel Geoffroy, cueilli sur Polémia et consacré à la déliquescence du pouvoir macronien.

    Ancien haut-fonctionnaire, Michel Geoffroy a publié le Dictionnaire de Novlangue (Via Romana, 2015), en collaboration avec Jean-Yves Le Gallou, et deux essais, La Superclasse mondiale contre les Peuples (Via Romana, 2018), La nouvelle guerre des mondes (Via Romana, 2020), Immigration de masse - L'assimilation impossible (La Nouvelle Librairie, 2021) et dernièrement Le crépuscule des Lumières (Via Romana, 2021).

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    En France, un parfum de fin de règne

    Il flotte sur la France un parfum de fin de règne. Bien sûr, la « réforme des retraites » y est pour quelque chose : cette réforme, imposée de l’extérieur, mal pilotée, mal défendue et ressentie comme une injustice par le plus grand nombre, a réussi à dresser contre le gouvernement une majorité de Français et à ressouder le front syndical. Mais l’arbre de la « réforme des retraites » cache la forêt du grand déclassement français. Et de la révolte qui s’étend.

    La France lanterne rouge

    Car plus rien ne fonctionne correctement dans notre pays et toutes les « catégories socio-professionnelles » sont désormais en crise, en doute ou en révolte.

    À la crise de l’hôpital public, révélée par le Covid, s’ajoute désormais celle de toutes les professions médicales ainsi que les pénuries de médicaments. Les sanctions contre la Russie comme les folies du « marché européen de l’énergie » ont fait apparaître au grand jour le scandale de la destruction de la filière nucléaire française et de la déstabilisation d’EDF. Et la hausse des prix qui en résulte frappe toute la population, sauf bien sûr les oligarques. Les violences à l’école se multiplient, de même que les violences antichrétiennes. L’insécurité et la violence s’étendent.

    Dans presque tous les domaines, la France est désormais la lanterne rouge de l’Europe : numéro 1 pour le poids des impôts, numéro 1 pour l’insécurité et les homicides, numéro 1 pour le nombre de « réfugiés », numéro 1 pour la dette publique, avant-dernière place devant la Grèce pour la part de l’industrie dans le PIB.

    Le déficit du commerce extérieur, conséquence de la désindustrialisation, ne cesse d’augmenter, et la France, hier seconde puissance exportatrice mondiale, importe désormais une quantité croissante de produits agricoles, accentuant sa dépendance vis-à-vis de l’étranger. Pendant que la terre de France échappe de plus en plus aux agriculteurs, au profit des grands groupes ou de l’étranger.

    La catastrophe diplomatique

    Bien sûr, Emmanuel Macron et son gouvernement ne sont pas responsables de tout.

    Mais ils sont ceux par qui le scandale arrive, en quelque sorte. En outre, on ne peut pas dire que leur action ait contribué à inverser la spirale mortifère dans laquelle sombre notre pays, bien au contraire. En fait ils ont tout raté et n’ont rien réussi de ce qu’ils ont entrepris.

    Sur le plan international, qui est le « domaine réservé » du président de la République, la catastrophe est totale et, surtout, visible.

    Dans le conflit qui se déroule en Ukraine, Emmanuel Macron a réussi la performance de se décrédibiliser tant vis-à-vis de la Russie que de Kiev. La liste des pays avec lesquels il s’est brouillé, par ses bourdes ou ses initiatives intempestives, ne cesse d’ailleurs de s’allonger : Hongrie, Pologne, Italie, Espagne, Algérie, Maroc et un nombre croissant de pays africains francophones.

    Emmanuel Macron est en passe de réussir la performance de déconstruire la présence séculaire de la France en Afrique !

    La France vassale

    La guerre en Ukraine a aussi montré au plus grand nombre que la France avait perdu son statut de puissance d’équilibre, qu’elle avait acquis difficilement au début de la Cinquième République.

    Rallié à l’OTAN (merci, Sarkozy), soumis en tout à l’Union européenne et à l’Allemagne, en rajoutant constamment sur les directives de la Commission, notre pays est tout simplement en train de perdre son indépendance et son statut privilégié de membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, acquis par le sang français versé durant la Seconde Guerre mondiale.

    Et on aurait tort de penser que les Français, qui voyagent quand même à l’étranger, ne se rendent pas compte de la perte d’influence de leur pays et de sa vassalisation.

    Et voici qu’on lance à grands coups de trompette une opération Orion destinée à prouver que notre armée, exsangue, serait capable de mener un « conflit à haute intensité ». Ce qui ne peut signifier qu’une chose : la fin de notre dissuasion nucléaire autonome qui visait justement à nous éviter d’avoir à conduire ce genre de conflit… Le président russe ne s’y trompe d’ailleurs pas, qui, dans son allocution du 21 février dernier, a réclamé l’inclusion de la dissuasion nucléaire française (et anglaise) dans les accords Start passés avec les États-Unis, puisque notre pays n’est manifestement plus une puissance non alignée.

    Bravo, Jupiter !

    Macroner ne suffit plus

    Dans ce climat de plus en plus pesant, les vieilles recettes du pouvoir fonctionnent de moins en moins.

    Bien sûr, la propagande marche à plein, mais son efficacité semble moins grande qu’avant, ne serait-ce que parce que l’audience des médias mainstream diminue constamment, comme leur crédibilité. « Bloquer le pays » ne fait plus peur qu’à la Macronie !

    Le discours présidentiel, cette insupportable logorrhée qu’on nous impose depuis 2017, ne passe plus. Macroner, comme disent les médias ukrainiens – c’est-à-dire parler pour ne rien dire et surtout ne rien faire – ne suffit plus. Les sondages, comme les indicateurs, sont tous à la baisse.

    En 2023, le « gendre idéal » a pris un gros coup de vieux, comme on le voit bien sur les photos officielles.

    Sans majorité absolue à l’Assemblée nationale, Emmanuel Macron paraît désormais aux yeux de tous comme un président en sursis, face à un pays en révolte larvée et à un monde qu’il ne comprend pas.

    On attend le dénouement de cette triste farce.

    Michel Geoffroy (Polémia, 9 mars 2023)

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  • La main cachée...

    Les éditions Perrin viennent de publier une étude historique d'Edmond Dziembowski intitulée La main cachée. Professeur d'histoire moderne à l'université de Franche-Comté, spécialiste de l'histoire politique et culturelle de la France et de la Grande-Bretagne au XVIIIe siècle, Edmond Dziembowski est notamment l'auteur de La guerre de sept ans (Perrin, 2015). 

     

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    " À la faveur de la démultiplication prodigieuse de l'information, le monde connaît aujourd'hui une obsession conspirationniste d'une ampleur inédite. Cette propension à interpréter les faits à l'aide d'une grille de lecture faisant fi de la réalité n'a cependant pas attendu notre temps pour prendre forme. Les grands traits du complotisme contemporain prennent en réalité naissance pendant la Révolution française, époque d'une richesse remarquable en matière d'intrigues avérées mais aussi, et surtout, imaginaires. Dès les premiers mois de 1789, ont surgi plusieurs explications alternatives des événements. Pour certains témoins, qu'ils soient favorables ou non à la Révolution, les faits observables à l'œil nu sont un leurre. Les vraies causes du grand bouleversement politique sont à trouver ailleurs. Sur le banc des accusés figurent les philosophes, les protestants, les francs-maçons, les illuminés de Bavière ou encore l'Angleterre.
    La première partie du livre est consacrée aux multiples facettes de cette fièvre complotiste, dont l'incarnation littéraire prend la forme fascinante d'un roman d'aventures ayant pour principaux héros le duc d'Orléans, Jacques Necker, Adam Weishaupt, Voltaire et William Pitt. Dans la seconde partie, l'auteur propose un éclairage particulièrement brillant de cette obsession de la main cachée. Pour ce faire, il nous entraîne dans les tréfonds de l'imaginaire politique de l'Ancien Régime et des années révolutionnaires jusqu'à son inquiétant avatar du XXIe siècle. Un sujet plus actuel que jamais traité par un de nos meilleurs historiens actuels. "

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  • Pourquoi l’identité est aujourd’hui partout ?...

    Le 10 mars 2023, Clémence Houdiakova recevait Alain de Benoist dans Ligne droite, la matinale de Radio Courtoisie, à l’occasion de la sortie de son essai intitulé Nous et les autres (Rocher, 2023).

    Philosophe et essayiste, directeur des revues Nouvelle École et Krisis, Alain de Benoist a récemment publié Le moment populiste (Pierre-Guillaume de Roux, 2017), Contre le libéralisme (Rocher, 2019),  La chape de plomb (La Nouvelle Librairie, 2020),  La place de l'homme dans la nature (La Nouvelle Librairie, 2020), La puissance et la foi - Essais de théologie politique (La Nouvelle Librairie, 2021), L'homme qui n'avait pas de père - Le dossier Jésus (Krisis, 2021) et, dernièrement, L'exil intérieur (La Nouvelle Librairie, 2022).

     

                                               

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  • Paneurope et fascisme...

    Les éditions Ars Magna viennent de publier Paneurope et fascisme, un recueil de textes de Julius Evola consacré à Richard Coudenhove-Kalergi , publiciste conservateur révolutionnaire  tschécoslovaque d'origine japono-austro-hongroise, et à son projet de Paneurope.

     

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    " Pour son plus grand malheur, l’œuvre de Richard Nikolaus von Coudenhove-Kalergi est tombée un jour entre les mains d’un front bas conspirationniste.
    Celui-ci ne l’a naturellement pas comprise et, de là, est né le mythe du «Plan Kalergi» qu’une ribambelle d’imbéciles nous rabâchent ad nauseam en le liant parfois à d’autres complots tout aussi stupides mettant en cause les gnostiques, les juifs, les francs-maçons, etc.
    Or, il n’existe pas de « Plan Kalergi » et le comte von Coudenhove-Kalergi ne fut qu’un révolutionnaire conservateur mineur.
    Ce dossier, constitué autour de deux contributions de Julius Evola remettra les pendules à l’heure et rendra son honneur à un homme à la pensée aussi profondément aristocratique que méconnue. "

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  • Quand la fluidité du numérique est la porte ouverte à l'idéologie "woke"...

    Vous pouvez découvrir ci-dessous un point de vue de François Valentin cueilli sur Figaro Vox et consacré à l'étroite relation entre le numérique et le wokisme. Pierre Valentin est l'auteur d'une note intitulée «L'idéologie woke» pour la Fondapol.

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    «La fluidité du numérique est la porte ouverte à l'idéologie "woke"»

    Le Daily Telegraph nous apprenait le 17 février dernier que des centaines de changements ont été apportées aux textes originaux de Roald Dahl par l'éditeur anglais Puffin, afin de les rendre plus «inclusifs». Les Oompa Loompas, ouvriers dans l'usine de chocolat de Charlie et la chocolaterie, ne sont plus des «petites personnes» mais bien des «petits hommes». Dans le même ouvrage, la phrase «comme toutes les personnes âgées, elle est faible» a été troquée pour «comme la plupart des personnes âgées, elle est faible». Les références aux couleurs de peau ont été supprimées. Certains mots censurés (comme «gros» ou «laid») sont d'une banalité confondante, et leur censure signale une aseptisation profonde de la littérature à venir.

    Face aux critiques, Gallimard a annoncé que les versions françaises ne seraient pas modifiées, tandis que Puffin et sa société mère Penguin Random House U.K. ont annoncé qu'ils publieraient, en même temps que les versions modifiées, «The Roald Dahl Classic Collection», qui comportera 17 histoires avec le texte original de Dahl. Cependant, outre le fond idéologique des modifications, c'est la discrète modification numérique des textes qui pose question. Il est fort probable que nombre d'utilisateurs de Kindle, ou autre liseuses électroniques, n'aient même pas remarqué les évolutions. Une simple «mise à jour», bien souvent automatique sur nos appareils, aura permis de mutiler l'œuvre de l'écrivain. La numérisation du monde ouvre la possibilité de modifier les ouvrages sans que l'on s'en aperçoive.

    De la même façon, la domination du «streaming» retire les droits de propriété d'une œuvre au client pour les transférer à la plateforme. Contrairement à l'achat par DVD, vous ne possédez plus l'histoire de Bambi ou Dumbo, c'est Disney+, et ils ne manquent désormais pas l'occasion d'ajouter numériquement la mention suivante en amont de leurs propres classiques : «Ce programme comprend des représentations négatives et/ou des mauvais traitements de personnes ou de cultures. Ces stéréotypes étaient condamnables à l'époque et le sont encore aujourd'hui». Demain, les plateformes pourraient peut-être altérer le contenu idéologique de leurs œuvres, sans nécessairement l'admettre publiquement.

    En août 2019, le New York Times lançait le «1619 Project», une initiative qui visait explicitement à instaurer l'idée selon laquelle la véritable date de naissance des États-Unis remonterait en réalité à 1619, date de la première arrivée d'esclaves sur le continent. Dans leur désir de marquer leur nation du sceau du péché originel, les journalistes à l'origine du projet avaient manifestement sous-estimé l'ampleur que prendraient les critiques. Plutôt que d'assumer leur prise de position face à leurs détracteurs, ils ont procédé à une nouvelle réécriture de l'histoire, mais cette fois-ci celle du déroulement de la polémique elle-même. Ainsi, comme le souligne le journaliste britannique Douglas Murray dans son ouvrage The War on the West, les hérauts du 1619 Project ont modifié en catimini leurs anciens articles afin de retirer les passages où ils avaient explicitement écrit que l'histoire des Etats-Unis commençait en 1619, ce qui leur a permis par la suite d'expliquer qu'ils n'avaient jamais tenu cette position. Le numérique permet de maquiller les revirements les plus lâches ; de donner au reniement un air de cohérence.

    Si George Orwell est mort près de quatre décennies avant l'invention d'internet, son œuvre n'est que plus actuelle depuis que nous basculons vers le tout numérique. On a tendance à se tourner pour analyser ce type de situation, non sans raison, vers le roman dystopique 1984. À chaque permutation des alliances géopolitiques, le Parti proclame qu'il a toujours été en guerre contre tel continent et allié avec tel autre, et ce malgré les changements. Là aussi, la contradiction peut se déguiser en cohérence avec l'aide, déjà, de la radio et de la télévision qui diffusent la nouvelle ligne à suivre tout en faisant disparaître à jamais l'ancienne. Cependant, il se pourrait que son roman La Ferme de Animaux soit à sa façon un guide encore plus éclairant pour notre époque. Dans cet ouvrage, des animaux, guidés par une avant-garde composée de plusieurs cochons, renversent un ordre tyrannique incarné par le vieux fermier Jones. Cette révolution se fait au nom de l'abolition de l'Homme. De fil en aiguille, la nouvelle élite éclairée finit pourtant par reproduire les comportements humains qu'elle dénonçait, sans pour autant que les autres animaux, manipulés, parviennent à percevoir ce renversement spectaculaire.

    Quel type de peuple faut-il pour qu'une telle «révolution» au sens propre du terme – un tour complet sur soi-même, un retour au point de départ – puisse avoir lieu ? Quels critères sont requis afin que le changement puisse se faire au nom de la continuité, que la contradiction se mette en place au nom de la cohérence ? Pour formuler la question autrement : à quel point ressemblons-nous aux animaux de cette ferme ? Un critère central qui se dégage de l'ouvrage semble être la malléabilité du peuple. Sept commandements sont inscrits sur une planche en bois au centre de leur lieu de vie. Ces commandements ne sont pas (dans tous les sens du terme), gravés dans le marbre. Au fur et à mesure du roman, ils vont discrètement évoluer. Comment est-ce que les animaux réagissent à ces modifications, qui sont toutes des trahisons des commandements initiaux ? En un mot : peu. Leurs réactions sont timorées et confuses, malgré la répétition de ce sentiment de doute. Face à un énième changement, Orwell nous dit qu'«une fois encore les animaux éprouvèrent une vague inquiétude». Du fait de l'absence de preuves, leur doute face à un revirement apparent du pouvoir en place se mue progressivement en doute vis-à-vis d'eux-mêmes. Auraient-ils tout imaginé ? Brille-Babil, jeune cochon et excellent orateur, se charge parfois de faire le service après-vente des discours du chef Napoléon : « "Êtes-vous tout à fait sûrs, camarades, que vous n'avez pas rêvé ? Pouvez-vous faire état d'un document, d'un texte consigné sur un registre ou l'autre ?" Et comme assurément n'existait aucun écrit consigné, les animaux furent convaincus de leur erreur.»

    C'est justement parce qu'il n'y a plus de traces du passé que le présent peut être à ce point malléable (thème également exploré dans 1984), et que le doute peut être retourné contre ceux qui l'exprimaient. Le scepticisme, initialement dirigé vers la falsification et la trahison opérée par les cochons, se reporte sur le reste des animaux. Concernant les premiers commandements, Orwell rappelle que «tous les animaux se rappelaient les avoir adoptées – ou du moins ils croyaient en avoir gardé le souvenir» ; la deuxième moitié de cette phrase symbolisant ce retournement du doute sur soi-même.

    Ces troubles de la mémoire sont largement exacerbés dans le roman par le fait que les commandements ne sont jamais inscrits dans la pierre. C'est d'ailleurs parfois ce qu'une lecture d'Orwell chez certains à gauche est susceptible de rater : certes, les commandements sont absolus et le pouvoir autoritaire, mais les injonctions changent en permanence et impliquent un peuple élastique, flexible. La perception contemporaine des mouvements totalitaires obscurcit d'ailleurs cette réalité indiscutable, les réduisant souvent au culte d'un monde «fermé», «rigide». En réalité, comme le rappelle Victor Klemperer dans ses analyses du langage du nazisme, «le mouvement est à ce point l'essence du nazisme que celui-ci se désigne lui-même comme «le Mouvement» et sa ville natale, Munich, comme «la capitale du Mouvement», et, alors qu'il cherche toujours pour ce qui lui semble important des mots ronflants et excessifs, il conserve le mot «mouvement» dans toute sa simplicité». L'idéal de la «fluidité» et du flux sert de fait les intérêts les plus totalitaires.

    De ce point de vue, comment ne pas voir dans la numérisation du monde un potentiel totalitaire proprement terrifiant, où tout ce qui apparaît sur un écran est par définition éphémère ? C'est précisément parce que les commandements de la ferme sont peints sur une planche en bois qu'ils peuvent changer insidieusement en permanence. La numérisation du monde porte un coup fatal à plusieurs idées : la fiabilité de ses cinq sens, la permanence et la réalité intrinsèque du monde, et le fait qu'on ne saura jamais totalement maîtriser ce dernier. Un monde numérique, fait de réalité «augmentée», c'est un monde où chacun peut se prendre pour le personnage maléfique de Thanos dans les derniers films «Avengers» qui proclame que «la réalité peut-être tout ce que je veux». L'omniprésence d'internet dans la vie sociale sape les anticorps au totalitarisme, car il affaiblit l'empirisme tout en renforçant d'un même geste la tentation constructiviste.

    Ce n'est pas un hasard si la première génération intégralement numérique est aussi celle qui souhaite en masse se «customiser», comme un vulgaire personnage de jeu vidéo, en changeant de «genre» comme on change de couleur de cheveux. Ils veulent être une âme libérée d'un corps qui aurait l'inconvénient de s'imposer à nous, une idée délivrée des pesanteurs de la matière. Cette même génération qui se veut auto-engendrée appelle par ailleurs régulièrement à la censure et à la rééducation des éléments «problématiques» de la société. Désirs de remodelage intégral de soi et de la société vont de pair.

    Néanmoins, cette volonté de toute-puissance de l'individu créateur se couple avec une impuissance et un certain fatalisme technologique. On accepte que la numérisation soit un processus inéluctable (ce qui risque de la rendre inéluctable) et que les algorithmes domineront toujours plus nos vies. Les notions de «sens de l'histoire» et de «progrès» tournent à plein régime pour naturaliser l'avènement à la fois du wokisme et des nouvelles technologies. Beaucoup de nos logiciels ne nous demandent même plus la permission pour se mettre à jour eux-mêmes, pour muter, et nous acceptons passivement de les suivre là où ils voudront nous emmener, aussi bien technologiquement qu'idéologiquement. Quand l'absence d'un sentiment de discontinuité historique rencontre la puissance constructiviste sans précédent qu'est le numérique, les possibilités de contrôle et de manipulation ouvrent un champ des possibles particulièrement inquiétant. Une chose paraît certaine ; si cette dystopie devait un jour advenir, son premier message commencerait de la façon suivante : «Mise à jour 8. 4. 6…»

    Pierre Valentin (Figaro Vox, 7 mars 2023)

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  • Les snipers de la semaine... (251)

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    Au sommaire cette semaine :

    - sur le site de Causeur, Jean-Paul Brighelli rafale les censeurs qui veulent réécrire les œuvres des auteurs disparus...

    James Bond sous les ciseaux des censeurs

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    - sur la chaîne Youtube de Ligne droite, François Bousquet dézingue ces nouvelles influenceuses, ex-starlettes de la télé-réalité converties à l’islam, qui cumulent des millions d’abonnés, ainsi que la jeunesse zombifiée qui les suit.

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