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Métapo infos - Page 189

  • Mer de Chine du Sud : le nouveau centre du monde ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de François Martin, cueilli sur le site du Nouveau Conservateur et consacré à la Mer de Chine comme nouveau centre des tensions entre les deux grandes puissances mondiales...

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    Le porte-avions chinois « Liaoning », entouré d’autres navires militaires, en mer de Chine

     

    Mer de Chine du Sud : le centre du monde

    Si demain un conflit ouvert se produit entre la Chine et les USA, il y a tout lieu de croire que ce sera dans la zone maritime qui sépare la Chine, le Vietnam, la Malaisie, les Philippines et Taïwan, la mer de Chine du Sud. Cette zone est en effet totalement stratégique pour la Chine comme pour les USA.

    C’est le politologue américain Graham T. Allison qui a inventé et popularisé le concept du «Piègede Thucydide» et qui a remis à l’honneur le célèbre historien grec de l’Antiquité.

    Il s’agit d’une «situation historique qui voit une puissance dominante entrer en guerre avec une puissance émergente poussée par la peur que suscite chez la première le surgissement de la seconde».

    Comment fonctionne le Piège de Thucydide ?

    On peut dire que cette constatation relève du bon sens, qu’elle a été extrêmement courante au cours de l’Histoire, et qu’elle caractérise parfaitement les relations actuelles entre les USA et la Chine. En soi, elle n’est donc pas très intéressante ni originale. Ce qui est plus utile à analyser, par contre, ce sont les péripéties possibles de l’évolution des belligérants à l’intérieur de ce piège, et les raisons qui pourraient conduire à ce qu’une «montée aux extrêmes» se produise, où, quand et pourquoi.

    Pour ce qui est de l’évolution des acteurs du conflit, tout comme aux premiers rounds d’un match de boxe, on constate qu’il existe souvent entre eux, à partir du moment où l’un comme l’autre se rend compte qu’un affrontement politique (mais pas nécessairement militaire) sera inévitable, une sorte de «période d’observation». Chacun tente d’abord de jauger l’autre, de l’amadouer ou au contraire (ou en même temps) de l’intimider, pour savoir comment il va réagir, s’il va finalement se soumettre ou si on va pouvoir le vaincre sans combattre. De même, on va tenter de se mesurer à lui sur des théâtres secondaires, où des «tests» – victoires ou défaites – seront possibles sans que les egos des protagonistes ne soient directement affectés.

    Ces périodes peuvent durer très longtemps. Elles peuvent se conclure soit par un partage du monde (USA/URSS dans un premier temps), soit par la soumission totale de l’un des deux (USA/Japon après la Deuxième Guerre mondiale), soit par la chute de l’un des deux sans affrontement direct (ainsi en fut-il tout au long de la guerre froide entre les USA et l’URSS, jusqu’à la victoire finale des USA, en 1991), soit par une victoire militaire (chute du nazisme en 1945).

    La «montée aux extrêmes» se produit souvent sans que les belligérants (s’ils préfèrent se jauger plutôt que se battre) ne l’aient expressément souhaité, mais de telle sorte qu’ils ne puissent l’éviter, soit parce que leur ego (et donc leur image) est directement touché, soit parce que la question est ultra-stratégique, soit parce que la friction, à cet endroit, est permanente. Lorsque toutes ces conditions sont réunies, tout laisse à penser, même si par ce fait même les belligérants vont y focaliser toute leur attention, que c’est là que l’explosion a le plus de chances de se produire.

    La tentative de coup de force de la Chine

    Par rapport à la Chine, après une longue période où les USA ont semblé ne pas se rendre compte du danger, c’est aujourd’hui dans la phase de jauge et d’intimidation, de déclarations fortes, voire belliqueuses 2, que la relation s’est installée, 3 on ne sait pas pour combien de temps. Mais, en même temps, les conditions d’une «montée aux extrêmes» existent déjà, et toutes les conditions décrites plus haut y sont présentes.

    Un article remarquable du Général Daniel Schaeffer, paru sur le site Asie21, nous donne, à ce titre, de précieuses indications. Il détaille la situation en mer de Chine du Sud, où la Chine tente aujourd’hui un coup de force, en se basant sur un tracé de partage des eaux datant de 1947 et défini unilatéralement (et juridiquement condamné), pour «privatiser» la quasi-totalité de cette mer, y compris les îles qui s’y trouvent 4 îles, pour certaines, déjà occupées et militarisées. Il y a évidemment, dans cette démarche, un fort intérêt de contrôle des routes maritimes et de sécurisation de ses exportations vers le détroit de Malacca et les marchés de l’Ouest. Il y a aussi la captation des ressources halieutiques et, bien sûr, celles des hydrocarbures qui s’y trouvent. Mais cela n’est que la surface des choses.

    Ce que montre Daniel Schaeffer, c’est que se trouve, en plein dans cette mer, sur l’île de Hainan, la principale base militaire de sous-marins chinoise, dans le port de Sanya. Or les Chinois ont un problème de la plus haute importance : leurs missiles Julang-2, tirés depuis leurs sous-marins Jin, ne sont aujourd’hui pas suffisamment puissants pour frapper directement, en cas de riposte nucléaire, le territoire des USA. Ils auraient besoin pour cela de s’aventurer largemet dans le Pacifique, au moins jusqu’à Hawaï. Or la profondeur de la mer, en sortie de Sanya et jusqu’au détroit de Bashi, entre les Philippines et Taïwan, n’est pas suffisante pour que les sous-marins nucléaires lanceurs d’engins puissent s’y fondre immédiatement dans la mer profonde. Lorsqu’ils quittent leur base, ils sont immédiatement repérés par tous les autres, y compris par les navires US qui patrouillent dans la zone et, on peut le penser, suivis ensuite à la trace. Il est donc pour eux tout à fait essentiel de chasser toute présence étrangère de la zone, ou du moins de la contrôler entièrement, de façon à sécuriser la sortie de leurs sous-marins vers le Pacifique.

    Et le Général Schaeffer va même plus loin. En effet, le meilleur endroit, pour les Chinois, pour avoir accès directement aux grands fonds dès la sortie de leur base se situerait… sur la côte Est de Taïwan ! Là, en effet, ils pourraient disposer, à sept kilomètres des plages, de profondeurs de 1 300 m. Une configuration idéale pour menacer directement les USA. On comprend à quel point la conquête de la mer de Chine est pour eux essentielle, et celle de Taïwan bien plus encore.

    • 1 -Pour les Américains, la problématique est rigoureusement inverse. Tant que la menace des sous-marins chinois reste limitée à la mer de Chine du Sud, ils sont moins en danger.
    • 2 – Le Président chinois a demandé à plusieurs reprises à l’armée (en octobre 2018 et en octobre 2020, notamment) de se préparer à la guerre avec les USA.
    • 3 – De par l’accélération hégémonique chinoise conduite par Xi Jinping depuis 2013 et la réaction de Donald Trump pendant son mandat, de 2017 à 2021, une politique apparemment poursuivie par Joe Biden.
    • 4 – Du nord au sud : les Pratas, les Paracels, les Zhongsha Qundao, les Spratleys.
    • 5 – Et pour autant que les Chinois ne développent pas d’autres missiles plus puissants, ce qu’ils sont évidemment en train de faire avec les Julang
    • Deux géants politiques, dont l’un est hégémonique et l’autre ne pense qu’à lui ravir la place, s’affrontent dans une petite mer semi-fermée, où fourmillent une multitude de protagonistes, qui se côtoient avec des frictions permanentes, et où prédominent des intérêts stratégiques majeurs. Une «faille de San Andreas» politique, pourrait-on dire. La tension y augmentera, inévitablement, d’année en année. Si une éruption se produit un jour, il y a tout lieu de croire que ce sera là. La mer de Chine du Sud est, aujourd’hui et pour longtemps, le centre du monde.

    François Martin (Le nouveau Conservateur, 24 février 2023)

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  • Les Murmures du ciel ou quand revient Jeanne...

    Les éditions Héloïse d'Ormesson viennent de publier un nouveau roman d'Erik L'Homme intitulé Les Murmures du ciel ou quand revient Jeanne.

    Déjà connu comme l'auteur de plusieurs séries de qualité dans les collections de littérature de jeunesse, voyageur méditatif, grand marcheur et esprit libre, Erik L'Homme est déjà l'auteur de trois romans, Déchirer les ombres (Calmann-Lévy, 2018), Un peu de nuit en plein jour (Calmann-Lévy, 2019) et Cosaques blues (Calmann-Lévy, 2022).

     

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    " Voici l’histoire de Jeanne après sa mort.

    Le ciel gronde mais ne murmure plus à l’oreille de celle qui, finalement, ne brûla pas à Rouen. Sous la pluie, elle chevauche et s’en va rencontrer ceux qui l’ont cru perdue. Ses frères de lait, Pierre et Jean, puis les compagnons qui la suivirent autrefois. Une nouvelle mission l’anime et la guide : envers et contre tous, même le roi, elle libérera le duc d’Orléans des Anglais.

    Chapitre manquant de la vie de la Pucelle, ce roman s’infiltre dans chaque part d’ombre de la légende. À travers une prose épique, aux entournures médiévales, Erik L’Homme réussit le pari de réécrire Jeanne."

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  • Désindustrialisation et appauvrissement : l’illusion mortifère d’une France sans usines...

    Le 2 mars 2023, Nicolas Vidal recevait François Bousquet, rédacteur en chef d’Éléments, sur Putsch, pour évoquer avec lui l’effondrement industriel de la France et le déclassement du monde ouvrier, singulièrement du monde ouvrier blanc, parent pauvre des politiques de reconnaissance. Comment – et pourquoi – la part de l’industrie en France est passé de 24 % du PIB au début des années 1980 à 10 % ? Quel rôle nos élites ont-elles joué dans cette débâcle industrielle ?...

    Journaliste et polémiste, François Bousquet a notamment publié Putain de saint Foucauld - Archéologie d'un fétiche (Pierre-Guillaume de Roux, 2015), La droite buissonnière (Rocher, 2017), Courage ! - Manuel de guérilla culturelle (La Nouvelle Librairie, 2020) et Biopolitique du coronavirus (La Nouvelle Librairie, 2020).

                                              

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  • La différence des sexes existe !...

    Les éditions Gallimard viennent de publier dans leur collection Tracts un court essai d'Eugénie Bastié intitulé Sauver la différence des sexes.

    Journaliste aux pages Débats et opinion du Figaro, Eugénie Bastié est l'auteur de plusieurs essais dont Adieu mademoiselle (Cerf, 2016) et La guerre des idées (Robert Laffont, 2021).

     

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    " « La différence des sexes existe. On peut la nier, elle ressurgira, sous une forme brutale, abâtardie, caricaturale. »

    Eugénie Bastié

    La différence biologique des sexes est une donnée irréfutable de l'expérience humaine. Elle est pourtant aujourd'hui au coeur d'un vif débat. Pour certains en effet, prioritairement à toutes les distinctions physiologiques et à ce qu'elles engagent au plan des pratiques et des sensibilités, il y a la norme subie, la construction sociale et politique d'une identité. Et, de la même façon que nous aurions été faits femmes et hommes sous contrainte, il serait aujourd'hui loisible à chacun de se défaire de cette assignation par le seul levier de la volonté. Le corps deviendrait dès lors l'horizon d'un projet personnel, rabattant le réel biologique au rang des biens accessoires, sans incidence existentielle sur l'identité de l'individu et le devenir de la communauté humaine. Cette arrogante illusion des temps présents, qui porte le nom de déconstruction, est une menace dont il faut se prémunir. Vecteur de mal-être et de désunion, elle est un poison lent qui mine les relations entre les hommes et les femmes, en ignorant tout autant les leçons subtiles de la tradition que les acquis de la révolution des mœurs en Occident. "

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  • 2023 : Les illusions perdues ou le miroir brisé de Narcisse...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Caroline Galactéros, donné au site Le Dialogue et cueilli sur Geopragma, dans lequel elle en appelle à un retour au pragmatisme pour sortir de la dangereuse impasse dans laquelle la France et l'Europe se sont enfermées depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine.

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    2023 : Les illusions perdues ou le miroir brisé de Narcisse

    Le monde va mal. En ce début 2023, le paysage international apparait à la fois plus polarisé et plus fragmenté que jamais. La régionalisation du monde, sa multipolarisation de fait ne sont plus contestables. Pourtant, l’ancien hégémon le nie et veut forcer l’allégeance renouvelée à ses couleurs en berne. Qu’on se le dise : le « monde libre », exclusif socle des « valeurs » modernes, est toujours Le Graal ! L’Otan est en grande forme et l’Europe n’a jamais été aussi unie contre la barbarie russe ! C’est beau comme l’Antique…mais c’est faux. C’est du stuc, du trompe l’œil, un décor de théâtre. L’Otan, qui aboie chaque jour des oukases martiaux, s’adresse en fait à ses membres, dont tous ne sont pas également désireux d’affronter une puissance russe désormais restructurée en mode guerre. Quant à l’Alliance atlantique, elle serait bien en peine de mener une guerre directe victorieuse contre la Russie. « Même pas peur ! » persifle cette dernière. L’Europe enfin, est un panier de petits crabes sans pinces, vindicatifs et impuissants, qui sont parvenus à un tel degré de servilité que pas un n’a protesté, ne serait-ce que verbalement, lorsqu’ « On » leur a coupé le gaz au sens propre pour hâter leur mise sous tutelle énergétique, leur passer l’envie de rester liés à Moscou et, last but not least, mettre l’Allemagne au pas en la privant de son moteur de croissance principal et promouvoir le nouvel allié de revers européen : la Pologne ! Le vieux cauchemar géopolitique de l’Amérique – l’union des ressources naturelles et démographiques russes et de la puissance industrielle allemande qui leur permettrait de dominer l’Eurasie- parait enfin conjuré… 

    De ce point de vue, le conflit en Ukraine, cruellement prolongé par une surenchère occidentale sans perspective de renversement du rapport de force en faveur de Kiev, est un pan de la vaste manœuvre américaine pour empêcher cette multipolarité du monde de s’affirmer et enfoncer un coin définitif entre l’UE et la puissance eurasiatique cardinale qu’est la Russie. « La Russie, c’est fini ! » Voilà une aberration stratégique et un camouflet culturel et politique permanent qu’il faut abattre une fois pour toutes. Le corridor stratégique Pays baltes-Pologne- Roumanie- Bulgarie- (qui comme par hasard coupe le tracé des gazoducs Nord Stream) doit y pourvoir. 

    Il y a tout de même un léger problème : c’est que – tout le monde le sait à Washington du moins – l’Ukraine a perdu la guerre et la poursuite de l’actuel poker menteur pourrait coûter cher à l’Amérique dans le reste du monde. En effet, le sur-investissement militaire et financier prolongé sur l’Ukraine sans victoire militaire a minima « présentable », se fait au détriment d’autres théâtres plus impérieux pour la puissance américaine, où son influence, pour perdurer, doit s’appuyer sur des moyens militaires et une attention soutenus. Je pense à l’Indopacifique et à la Chine naturellement, mais aussi au Moyen-Orient, où les positions américaines se sont nettement détériorées. Sans parler de l’Europe, économiquement sacrifiée sans vergogne à la « cible » russe. Sans vergogne, mais pour l’heure sans succès. Les sanctions innombrables sont un échec patent et les ¾ de la planète, quand ils ne le soutiennent pas, observent avec gourmandise le « niet » opposé par Moscou à l’insatiable impérialisme américain. Jusqu’à quand les Européens vont-ils admettre de payer et d’obéir au sein de l’Alliance pour l’obsession américaine d’une Russie à genoux, fantasme chaque jour plus proche de l’utopie et du whishful thinking? Il ne faudrait pas se tromper trop longtemps de priorité. Quelques courageux responsables militaires comme le Chef d’état-major américain Mark Milley le disent depuis déjà des mois ; la Rand Corporation, Think Tank historique et influent du Pentagone mais aussi voix et poids du Complexe militaro-Industriel et du grand business américains, vient de produire une « étude » qui enjoint aux Etats-Unis de sortir au plus tôt de ce guêpier sous peine de tomber dans un engrenage à la vietnamienne. Selon ces analystes, il faut se recentrer sur l’essentiel (la Chine), trouver les termes d’un accord viable avec Moscou et admettre que l’Ukraine ne doit pas rejoindre l’OTAN. Malheureusement, les faucons néoconservateurs autour de A. Blinken, J. Sullivan ou V. Nulland n’ont cure d’un tel avertissement et poursuivent leur folle escalade. Ils cherchent à faire oublier l’étude de la Rand en faisant subitement à Moscou « des propositions qu’on ne peut refuser » (propositions évidemment inacceptables au moment où l’armée russe avance et l’emporte sur le terrain). Quoi qu’il en soit, il est intéressant que s’entende enfin un autre son de cloche au sein des élites américaines de plus en plus inquiètes pour l’économie nationale, la position chaque jour plus menacée du dollar, et leurs investissements en Ukraine, si jamais le pays devait finir par se trouver coupé de la mer….

    Car les faits et les chiffres sont là. La propagande la plus outrancière, celle que l’on endure notamment en France depuis bientôt un an, les images et les informations soigneusement triées, ne suffisent pas. La guerre, ce sont des maths. Et L’Ukraine a la mauvaise équation. Elle est sous perfusion militaire et financière occidentale. Si celle-ci cesse, elle s’effondre. Elle est clairement distancée en matière d’artillerie comme de ressources humaines, réduite à enrôler de force de malheureux jeunes et vieux subcarpathiques pour servir de chair à canon à des offensives en pure perte (telle celle de Bakhmut) tant l’évidence de la déroute a laminé la volonté de se battre des jeunes Ukrainiens. Et ce ne sont pas  3 brigades (20 000 hommes), une centaine de chars (à supposer qu’elle arrive et avec tous les problèmes de maintenance associés), 150 véhicules de combats blindés et même quelques F16 qui vont changer la donne face à un demi-million de soldats russes déterminés à combattre et dument armés et soutenus. 

    Le conflit en Ukraine est donc une guerre par proxy…dont le proxy est épuisé face à l’évidence de la supériorité militaire russe. La Russie peut tenir, longtemps, très longtemps, le rythme d’une guerre d’attrition patiente mais implacable. Moscou entend  épuiser la capacité de l’armée ukrainienne à tenir dans la durée. Son usage massif d’une artillerie apparemment inépuisable lui permet de préserver ses troupes régulières, insuffisantes lors de la phase initiale de l’Opération militaire spéciale » mais désormais reconstituées en nombre. L’héroïsme des soldats ukrainiens est incontestable, mais la « masse » – en hommes comme en équipements – n’y est pas. Les pertes (morts et blessés) sont colossales (dans un rapport de 1 à 7-8 avec la Russie) et le déversement des armes occidentales ne peut permettre d’espérer un renversement du rapport de force. Sauf à lancer sur le sol ukrainien des dizaines voire des centaines de milliers de troupes polonaises (la mobilisation d’au moins 200 000 hommes a été annoncée par Varsovie) mais aussi américaines, et à lancer depuis l’ouest du pays une offensive visant à sécuriser la zone au profit de Varsovie dont les prétentions historiques sont bien vivantes et les ambitions de domination européenne contre Berlin grandissantes. On peut même craindre, dans ce scénario fou, que l’armée polono-ukrainienne avec des Américains sous uniforme ukrainien servant leurs chars ou batteries Patriot ne tentent une reprise de la Crimée… Alors, ce sera la fin. Mais pas forcément celle de la Russie… A Berlin, on semble clairvoyant et on s’oppose publiquement à une guerre ouverte de l’Otan contre la Russie. Le Chancelier Scholtz est furieux d’avoir été joué par Washington dans l’affaire des chars (poussé à fournir des Léopards alors que l’on ne verra pas d’Abrahams américains sur le théâtre avant très longtemps voire jamais). Les Allemands reprendront ainsi plus facilement langue avec Moscou que les Français qui poussent à la roue. 

    L’armée ukrainienne est donc exsangue, ses options tactiques et opératives perdantes face au rouleau compresseur russe et le temps joue contre elle. La guerre pourrait être pliée à l’automne et il faudra bien alors négocier avec Moscou sur la base de la réalité sur le terrain…Le Pentagone sait tout cela. Le Département d’Etat et le Conseil de Sécurité national ou même la CIA aussi. Mais l’acceptent-ils ?  C’est moins sûr. La « leçon » donnée par Moscou à l’Empire en déroute est trop humiliante, et le soutien d’une très large partie du monde à ce camouflet est insupportable pour « la nation indispensable ». Car, qu’on le veuille ou non, V. Poutine a réussi quelque chose de très important, bien au-delà de l’Ukraine : il a montré grandeur nature que la révolte était possible, que l’on pouvait protéger des frontières, la sécurité d’une nation, une culture, une histoire, une singularité civilisationnelle, une économie, que le rouleau compresseur Woke n’était pas non plus une fatalité, que les nations en somme n’étaient pas promises à la dissolution si elles refusaient de se soumettre à un ordre obsolète et osaient en prendre les moyens. Nul doute que cette démonstration a mis du baume au cœur à bien des chefs d’Etat qui ne sont pas tous des dictateurs. Je ne fais nullement ici l’apologie d’un autocrate. J’observe ; car si l’on n’observe pas, si l’on ne se met jamais à la place de l’autre et que l’on ne fait que juger et condamner, alors on ne comprend rien. Et on subit. Tant que nous n’aurons pas compris cela, nous subirons la force de la révolte russe et de ses émules innombrables.

    Malheureusement, on est très loin, dans les cercles du pouvoir à Washington ou Paris, de cette neutralité analytique, de cette capacité à l’inversion du regard, basique dans le milieu du renseignement. D’ailleurs, tous les experts européens ou anglosaxons qui ont une vision large de ce conflit viennent du monde des services spéciaux et sont structurellement dépourvus d’œillères idéologiques. Mais on ne les écoute pas, on les accuse de complotisme et de pro russisme … « L’Occident collectif  se rassure », préfère la fuite en avant dans la surenchère, fait la sourde oreille aux avertissements de Pékin qui condamne désormais haut et fort les USA pour avoir cherché l’affrontement, et appelle à l’arrêt immédiat des livraisons d’armes à Kiev. On veut croire que, comme Pékin, Moscou bluffe, que V. Poutine est pusillanime, contesté, affaibli (même mourant !) et que l’on peut continuer le harcèlement sans danger. Dangereux calcul. Comment va-t-on masquer l’énormité de notre mensonge  sur la « victoire de l’Ukraine » le jour où il va sur le terrain militaire s’imposer ? 

    L’ahurissante propagande servie depuis un an bientôt par des médias mainstream inconscients et dévoyés aux peuples européens pour leur faire admettre le prix de la soumission énergétique et stratégique définitive à Washington pourrait faire politiquement très mal, et favoriser l’éclatement du branlant édifice européen. Et la montée d’un populisme dangereux. C’est le problème quand on ment et que l’on est découvert. On ne vous croit plus.

    Pour l’instant, on s’enfonce dans le déni, on prolonge le massacre des forces ukrainiennes et la destruction du pays. Au nom de la sauvegarde du peuple ukrainien évidemment ! Washington noie l’Ukraine sous les dollars et la possède, au sens propre comme figuré. Il lui faut juste doser le jusqu’au boutisme fébrile et les récriminations permanentes du président Zelenski pour pouvoir faire durer son supplice et espérer ainsi, dans le temps long, user la Russie et provoquer la fin du monstre Poutine, Babayaga moderne assoiffée du sang ukrainien et européen. La récente et vaste « purge », en pleine guerre, de l’appareil d’Etat ukrainien et des proches du président, sous couvert de subite lutte contre la corruption (sic !) pourrait bien en fait avoir été orchestrée de plus loin, pour l’isoler et préfigurer sa marginalisation voire son « remplacement » par une figure plus encline à négocier le moment venu la partition de l’Ukraine dans un probable scénario à la coréenne. Car il le faudra bien, d’ici quelques mois sans doute. Plus on attend plus elle sera douloureuse. Les remplaçants putatifs ne manquent pas, prêts à se montrer plus dociles envers Washington. 

    C’est donc la course contre la montre. Kiev implore chaque jour de nouvelles livraisons massives d’armements qui n’arriveront de toute façon pas assez vite ni en assez grande quantité pour changer la donne. Moscou accélère pour lancer une offensive d’envergure avant que l’Ukraine ne soit renforcée, même insuffisamment, par les réserves polonaises en cours de mobilisation et que n’arrivent les chars promis et autres missiles de longue portée… Sinon, c’est reparti pour des mois voire des années… L’Europe ne s’en relèvera pas. Mais 100 chars ou même 300 ne feront pas la différence face aux milliers de l’armée russe et à des effectifs recomplétés et étendus, sans parler des munitions et armements qui semblent inépuisables d’une économie de guerre qui tourne à plein régime. Depuis le début, Moscou ne veut pas frapper les populations civiles ukrainiennes ; sinon l’Ukraine ressemblerait depuis 6 mois déjà à la Tchétchénie et on n’en parlerait plus. Mais cette retenue voulue par le président russe pour des raisons politiques évidentes et que nous n’admettrons jamais, couplée à la surenchère du soutien occidental au régime de Kiev fait durer le supplice et surtout donne du temps à Washington pour que les fous de guerre qui entourent le malheureux président Biden poussent à la roue. Le secrétaire d’Etat Blinken ne sait pas ce qu’est la guerre. Il ne l’a jamais faite, et ça se voit. Sa fureur antirusse, ses déboires diplomatiques à l’étranger face à une Russie qui poursuit sa diplomatie tous azimuts et à une Chine indifférente à son hostilité, l’enferment dans un dogmatisme enragé dont le peuple ukrainien, bien plus que le russe, fait et fera les frais. 

    Comment peut-on arriver à un tel niveau d’orgueil et d’aveuglement ? Et surtout pourquoi ? Mystère et boule de gomme ! Ne voit-on pas le danger d’un dérapage incontrôlé de part ou d’autre ? Que veut l’Amérique en Ukraine ? Certainement pas la sauver, moins encore préserver ce qui reste de la nation et du peuple ukrainiens lancés à corps perdu dans un affrontement inégal et sans issue autre que l’effondrement. Il  veut juste l’aider à poursuivre cette boucherie, sacrifice nécessaire croit-on encore à Washington, pour affaiblir au maximum et durablement la Russie, finir par déstabiliser le pouvoir actuel et remplacer l’ombrageux Poutine par un nouvel Eltsine complaisant qui permettra de reprendre le pillage des ressources de ce richissime et immense pays interrompu à la fin des années 90.  Mais il n’y aura pas de nouvel Eltsine ! La décennie 90 a été pour les Occidentaux une aubaine  leur permettant de se jeter sur la dépouille encore chaude de l’URSS… et pour les Russes un cauchemar. Ils ne se laisseront plus jamais berner.

    Nul ne semble donc prendre la mesure du danger d’un enfermement dans une guerre longue en Europe. Un danger sécuritaire et physique naturellement, mais aussi social et économique dont nous sommes à la fois l’arme par destination, la cible et la victime toute désignée et déjà blessée si l’on considère le délitement de nos économies. 

    Nous sommes tous entrés dans un vaste marché de dupes. Le pouvoir de Kiev à pieds joints, qui fut poussé à l’affrontement contre Moscou et se rend compte qu’il n’en a tout simplement pas les moyens ; l’Europe les bras ouverts, sans comprendre qu’elle doit reprendre la main ou disparaitre à jamais dans l’insignifiance stratégique. Ce ne sont pas les annonces budgétaires des uns et des autres en matière militaire qui nous feront prendre au sérieux à Pékin, Moscou, Téhéran, le Caire ou Ankara. Et je ne parle pas des autres…

    Pourtant, tandis que monte la menace d’un affrontement titanesque entre cet « empire » d’Occident placé face aux limites de sa puissance collective, et un « contre monde » qui coagule jour après jour plus étroitement des puissances globales et régionales majeures et consolide une alternative économique, financière et politique viable à l’ordre américain, nous mettons la tête dans le sable. Nous ne voulons pas voir l’éléphant dans la pièce. Ce déni entêté du réel ne nous suffit pas. Furieux, envieux, humiliés, nous jetons des braises permanentes sur un feu qui ne couve plus mais menace bel et bien d’embraser l’Europe dans la guerre avant de l’ensevelir à jamais dans un rôle d’appendice impécunieux d’une Amérique en plein spasme de déliquescence impériale.  Car la bascule du monde a déjà eu lieu. La dédollarisation de l’économie mondiale est en cours, comme l’a notamment montré le pivot saoudien, mais aussi celui d’une partie grandissante de l’Afrique. Le conflit ukrainien n’a fait que l’accélérer en une sorte de boomerang stratégique à conflagration perlée. Et, contrairement à ce que l’on veut à toute force nous faire croire, ce n’est pas l’ours russe qui est blessé, mais bien l’aigle américain.

    L’affrontement est global. Il se joue en Europe mais aussi en Afrique, en Asie, en Asie centrale aussi, qui sera certainement une zone de déstabilisation future, dans le Caucase et naturellement au Moyen-Orient. Là encore, ce n’est ni l’Amérique ni ses vassaux européens qui ont la main. La dédollarisation de l’économie mondiale est en route, une monnaie des BRICS (la R5) est en train de naitre, le non-alignement est redevenu très « tendance ». Seule notre Europe reste dans l’allégeance béate à un empire en pleine déréliction intérieure comme extérieure, dont les forces armées elles-mêmes – en dépit du gigantisme budgétaire-, sont de moins en moins capables technologiquement voire quantitativement dans certains domaines, d’affronter leurs rivaux géopolitiques chinois ou russe. 

    Le retour à la raison est donc urgentissime. En est-on capables ? Je n’en suis pas certaine. La vanité domine le cœur des hommes. Plus personne ne s’intéresse aux conditions d’un dialogue minimal, à l’apaisement des tensions, moins encore à la paix, notion plus utopique que jamais. La défiance est à son comble. La haine et le mensonge dominent face à « l’ennemi systémique russe » qui s’est finalement résolu à l’affrontement pour briser son encerclement de fait et est, démonisé, défiguré par des amalgames honteux. Pourtant, penser à la paix et en préparer les contours sur une base réaliste n’a jamais été aussi impératif. Il faut une initiative de paix proposée par ceux qui ont gardé quelque lucidité et l’ouverture de pourparlers entre militaires russes et ukrainiens sans préconditions. Vite. 

    La Russie est notre voisine, à jamais, et n’est pas une ennemie. Elle a lancé son « Opération Militaire Spéciale » en sachant qu’elle tombait dans un tragique piège. Avait-elle le choix ? Son invasion du territoire souverain de l’Ukraine est illégale, mais cette évidence ne clôt pas le débat, le vrai : celui de la sécurité en Europe qui est en lambeaux. L’Europe a tout perdu dans ce traquenard. Elle ne comprend pas qu’elle doit et peut encore trouver sa place dans le nouveau monde, fruit de cette bascule gigantesque amorcée depuis 20 ans déjà. Quant à la France, elle ne comprend décidément plus rien à la marche du monde et précipite délibérément sa puissance et son influence résiduelles dans un magma européiste qui ne compte plus stratégiquement, s’il a jamais compté. Ses grands voisins allemand, italien, espagnol jouent leur partition nationale sans se soucier le moins du monde d’une solidarité avec Paris. Nous sommes arrivés au point où il n’est plus possible de se satisfaire d’utopies, moins encore de discours. Il faut tout reprendre, en Afrique, en Asie, en Europe aussi, vis à vis des États-Unis, de la Russie comme de la Chine. Il faut refonder notre politique étrangère sur des bases pragmatiques correspondant à nos intérêts. « Sans argent, l’honneur n’est qu’une maladie » faisait dire Racine à ses Plaideurs. Le discours sur la défense des « valeurs » sans défense de nos intérêts propres est sans écho et nous ridiculise. La France doit s’impliquer dans le soutien à des Etats pivots pour la stabilité régionale et qui luttent comme elle contre les ferments de dissolution nationale et l’extrémisme islamique. Je pense à l’Egypte, mais aussi à l’Algérie. L’histoire du monde n’est pas l’histoire de « Oui Oui au Pays des rêves bleus ». Elle est faite de conquête, de sang, d’apports culturels mais aussi de prédations, de cynisme, de mensonges. C’est ainsi. Il n’y aura de coexistence pacifique qu’au prix de la reconnaissance de la souveraineté des Etats et de l’arrêt de l’impérialisme culturel européen et américain. Ce discours ne passe plus la rampe. L’universalisme est le moteur d’une domination. C’est une évidence. Cela a eu lieu. Pour autant, il faut cesser pour de bon de battre notre coulpe et de permettre à autres de jouer sur notre culpabilité. C’est ridicule et c’est suicidaire. L’histoire est ainsi faite. L’anachronisme ne rapporte rien en diplomatie. Il faut ne pas rater le présent ni le futur au lieu de se défausser sans arrêt sur les erreurs et insuffisances du passé.

    La paix n’est pas le silence, l’asservissement ou la domination définitive. La paix est un équilibre nécessairement imparfait mais supportable. Dans le cas présent, c’est la reconnaissance que nous sommes allés, les uns comme les autres, beaucoup trop loin. L’Ukraine ne peut appartenir à l’OTAN pour d’évidentes raisons, qui vont très au-delà de son sort propre pour toucher la sécurité de l’ensemble du continent européen. Il va falloir reconstruire ce pays en lambeaux. Le gouvernement de Kiev et ses supports suprémacistes blancs et antis-slaves doivent être définitivement éloignés du pouvoir. Il faut négocier au plus tôt entre gens raisonnables ayant les yeux en face des trous. Plus on attend, plus cette négociation sera une reddition aux conditions russes. Si l’entrée de la Russie en Ukraine est illégale, il est hypocrite de faire comme si on ne l’avait pas souhaitée ardemment et préparée depuis au moins 2014. Même Angela Merkel, même Oleksiy Arestovytch, conseiller spécial du président Zelenski aujourd’hui « débarqué » l’ont avoué publiquement. Toute cette mascarade se fait aux dépens d’un peuple sacrifié comme le furent les peuples irakien, syrien ou libyen au nom du Regime change et de la supériorité du modèle démocratique et libéral occidental, et pour masquer une volonté de puissance et de contrôle et de prédation sur les richesses hier irakiennes, libyennes, et syriennes, aujourd’hui russes. 

    Ce long focus sur l’Ukraine vise à montrer le tragique d’une situation difficilement rattrapable pour l’Occident qui est en morceaux mais qui l’a cherché, porté par une ubris déconnectée de la réalité. Il meurt de son complexe de supériorité qui est désormais une antiquité risible pour le reste du monde. Son étoile a pâli avant tout car le gouffre entre discours moralisateur et cynisme des agissements est apparu au grand jour et a nourri ce discrédit. 

    Pour dialoguer, il faut éprouver du respect pour l’autre et être capable de lui accorder un minimum de confiance et d’attention à ses préoccupations fondamentales. Or la Russie a fini de faire confiance et même de respecter les Européens et les Américains (ne parlons pas des Britanniques). Quant à nous, Occidentaux, nous nous sommes volontairement claquemurés dans une haine inexpiable et pensons que le respect ou le dialogue pour et avec Moscou sont sans objet, confortés dans notre autisme stratégique par le mensonge d’une victoire ukrainienne sur le terrain. Que faire dans ce contexte ? Appeler malgré tout à l’arrêt immédiat des combats et à la négociation sans condition sur la base du statu quo territorial actuel ; soutenir la « neutralisation » stratégique de l’Ukraine et l’impossibilité pour elle d’entrer jamais dans l’OTAN, un système de garanties croisées étant sa meilleure protection ; reconstruire le maillage d’accords sur la sécurité en Europe détruit essentiellement par les Etats-Unis ; en finir avec les sanctions qui mettent l’Europe à genoux. 

    La France peut et doit être à l’initiative de cette révolution pragmatique. Il faut un grand courage mais c’est faisable. Je l’appelle de mes vœux depuis des années déjà. Si « la morale » n’a aucun cours dans les relations internationales, l’éthique, elle, y a toute sa place. Le retour aux principes initiaux de la Charte des Nations Unies parait le seul socle possible d’une coexistence supportable. Elle sanctifie le respect de l’intégrité territoriale des Etats mais aussi le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Le débat fait rage. Le problème est que la pratique occidentale post Guerre froide nous a totalement disqualifiés pour donner des leçons (Kossovo, Irak, Libye, Syrie, silence sur la guerre du Donbass, …). Il faut sortir de la haine et se souvenir de ce qui fait l’humanité : sa diversité. L’année 2023 sera celle des illusions perdues de l’Occident : celles qu’il avait sur les autres mais aussi celles qu’il croyait pouvoir conserver sur lui-même. 

    Je souhaite ardemment que le Dialogue, ce nouveau média dans lequel je m’exprime aujourd’hui, soit  le lieu où il sera enfin possible et utile de discuter librement et sans anathèmes de tout ce qui fait la chair du monde, de sa violence mais aussi de la nécessité pour tous les peuples et les nations qui le composent de mieux se comprendre et se tolérer. Ce n’est pas de l’altruisme ni de l’angélisme, encore moins du relativisme. C’est le refus du cynisme et des postures moralisatrices. Tant de morts innocents sont là pour témoigner qu’il est plus que temps de changer drastiquement d’attitude.

    Caroline Galactéros (Geopragma, 2 mars 2023)

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  • Faut-il brûler Tintin ?...

    Les éditions Sépia viennent de publier dans leur collection Mille Sabords un essai de Renaud Nattiez intitulé Faut-il brûler Tintin ? . Ancien élève de l'ENA, ex-diplomate, Renaud Nattiez est administrateur de l'association «Les Amis de Hergé» et est l'auteur de plusieurs essais consacrés à Tintin et à Brassens, et d'un roman policier situé dans l'univers de la bande-dessinée.

     

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    " Peut-on encore, en toute bonne conscience, inciter ses enfants à lire Les Aventures de Tintin, ou faut-il (doit-on) « brûler Tintin » ?
    Depuis sa naissance en 1929, Tintin est loin de faire l'unanimité.
    Qualifiée de réactionnaire, raciste, colonialiste, antisémite, misogyne, la plus célèbre bande-dessinée francophone continue aujourd'hui de susciter la controverse. Les critiques à l'égard d'Hergé n'épargnent pas le héros principal, souvent mis à l'index pour son anticommunisme primaire, son indifférence à l'égard de l'environnement, son profil de boy-scout asexué et son esprit de sérieux. Bref, les tintinophobes ne cessent de questionner la pertinence de porter aux nues en cette première moitié du XXIe siècle une œuvre jugée surfaite qu'ils considèrent au mieux comme politiquement incorrecte, au pire comme désuète et ennuyeuse.
    De 5 à 105 ans, lecteurs enfants, jeunes lecteurs, lecteurs adultes peuvent-ils se laisser aller à vénérer sans retenue le reporter à la houppette ? Y a-t-il des raisons avouables de passer outre les faiblesses ou les insuffisances invoquées, souvent avec raison, par les tintinosceptiques ?
    Et si une bonne part de l'intérêt – voire de l'attachement – porté à l'un des plus grands mythes du 9e art provenait justement de son caractère non consensuel ? "

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