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Métapo infos - Page 1518

  • On peut endiguer la violence !...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Xavier Raufer, cueilli sur le site de Valeurs actuelles et consacré à la criminalité de rue et à la possibilité qui existe de la combattre efficacement sous réserve d'en prendre , et d'en assumer, la décision politique...

     

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    On peut endiguer la violence !

    Au foot, on appelle classico un match événement rituel, attendu, presque inévitable. Eh bien, voilà un classico de tout début de campagne électorale, version droite : l’oubli de la sécurité. Cela ne rate jamais : dès que s’amorce une campagne majeure, présidentielle ou législative, la droite parlementaire, qui pourtant ne devrait pas avoir à rougir de son action – surtout par rapport à la gauche –, occulte les pro­blèmes criminels.

    Prolixe sur tout le reste – chômage, pouvoir d’achat, certes importants, nul n’avancera le contraire –, elle ne pipe mot sur ce sujet stratégique.

    Tout aussi classiquement bien sûr, la réalité insupportable (mais « irrémédiable », ajoute le philosophe Clément Rosset) se rappelle vite et fort aux oublieux qui, en matière criminelle, bricolent alors dans la panique une stratégie de communication sur ce dossier pourtant incontournable. In­contournable car, dit l’Insee, 15 des 63 mil­lions de Français habitent les « espaces pé­riurbains », banlieues, quartiers et cités souvent marqués par le crime et les violences urbaines, ce qui fait, excusez du peu, 10 millions d’électeurs. Des territoires soit ravagés par le crime – Marseille et sa région, la Seine-Saint-Denis –, soit craignant de subir bientôt de telles violences : tout l’environnement urbain du millier de “quartiers sensibles” recensés en France.

    Rappelons qu’à Marseille la police a confisqué 72 fusils d’assaut Kalachnikov de janvier à novembre 2011, ce qui signifie clairement, au rythme où vont les saisies d’objets illicites, qu’il en circule des centaines d’autres, toujours aux mains des bandits. Sans oublier ce que, sur place, on appelle gentiment un “barbecue” : une tuerie entre gangsters qui voit un véhicule incendié avec son ou ses occupants. Or ces “barbecues” se font désormais non plus à l’unité mais en gros, par deux ou trois voyous assassinés, victimes d’une constante et féroce guerre des gangs.

    Mais il n’y a pas que les “barbecues”, ni que Marseille : la criminalité en col blanc sévit aussi. Là, fleurissent les escrocs financiers : les Madoff éclosent comme cham­pignons après la pluie, devenant une sorte de spécialité rurale, type crêpes ou fromages : après “le Madoff du Chinonais”, voici celui “du Boulonnais”, etc.

    Il y aurait donc à dire sur les diverses criminalités affectant la France – mais hélas, les ténors de la droite parlementaire se taisent ! Retroussons donc nos manches et rappelons ici quelques fondamentaux en matière de sécurité. En France, la “criminalité des rues” – braquages, agressions, violences, cambriolages, incendies volontaires, etc. – affecte surtout 26 départements métropolitains. Les “noyaux durs”, acteurs essentiels de cette criminalité, sont peu nombreux : de 3 000 à 4 000 individus pour toute la France. Si peu ? Oui, car la criminologie contemporaine a isolé et défini un type criminel original, le “prédateur violent”, qui, seul ou en groupe, commet une énorme masse d’infractions. On estime ainsi – ce que confirment des statistiques d’Île-de-France – que 5 % des malfaiteurs accomplissent la moitié des méfaits ; à 18 ans, ces hyperactifs du crime sont déjà connus pour 50, voire 100 infractions ! Cela, le réel criminel le confirme : voici trois ans, en grande banlieue parisienne, le décès (accidentel) de deux caïds a permis de voir la criminalité locale diminuer de moitié.

    Allons plus loin : ces quelques milliers de bandits sont-ils inconnus ? Vivent-ils dans la clandestinité ? Au contraire ! À domicile, ils sont célèbres, passant leur vie au commissariat (“Encore toi, Momo !”) ou chez le juge. À force de rédiger des procès-verbaux à leur propos, les brigades anticriminalité (Bac) de banlieue en savent localement la liste par cœur.

    Enfin, on sait que ces criminels hyperactifs sont imperméables à tout travail social – ils récidivent d’usage, à peine sortis de réinsertion. En revanche, un renseignement criminel ciblé et précis les neutralise efficacement, dans le plus strict respect des lois en vigueur. Un précédent existe, parfaitement datable : celui de l’année 2000. Deux ans avant le passage à l’euro et ses multiples convois de billets de banque qui sillonnent le pays, la police cible précisément les gangs de braqueurs de fourgons ; elle anticipe leurs actions, les “marque à la culotte”. Résultat (sans nul travail social associé ni subventions généreuses, insistons bien) : un braquage de fourgon dans toute l’année, contre en moyenne… deux par mois.

    Mais alors, s’indigne le lecteur, qu’attend-on ? Si la police sait faire, si la cible est connue, si l’on peut vraiment réduire la “criminalité des rues”, que ne le fait-on ? C’est que, dans un État de droit, la police n’agit pas d’initiative. Elle obéit aux ordres de l’exécutif – et la décision de faire de ces prédateurs violents une priorité est éminemment politique – premier cours de Sciences Po, “Est souverain celui qui désigne l’ennemi”.

    La campagne présidentielle commence – là encore, rien de plus politique. Le candidat qui saura emprunter la voie réaliste, celui qui garantira à la France périurbaine le retour à la paix et au calme, fera un grand pas vers la victoire.

    Xavier Raufer (Valeurs actuelles, 12 janvier 2012)

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  • Inévitable protectionnisme ?...

    Les éditions Gallimard publient cette semaine, dans leur collection « Le débat », un essai de Franck Dedieu, Benjamin Masse-Stamberger et Adrien de Tricornot, intitulé Inévitable protectionnisme. Les trois auteurs ont la particularité d'être journalistes respectivement à L'Expansion, L'Express, et au Monde économie, trois journaux qui étaient jusqu'à présent des bastions de l'idéologie néo-libérale. Les temps changeraient-ils ?...

     

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    "Le protectionnisme est le dernier tabou des élites européennes. Malgré la violence de la crise, la suprématie du libre-échange demeure une croyance indiscutée. C’est cette interdiction de débattre que les auteurs, journalistes économiques de la nouvelle génération, ont voulu lever dans ce livre sans a priori idéologique. Le constat est cruel : l’idéologie libre-échangiste, devenue hégémonique à la fin du siècle dernier, est aujourd’hui battue en brèche par les faits. Dans les pays en développement, l’amélioration du niveau de vie, réelle dans certains cas, s’est avérée illusoire dans beaucoup d’autres. Dans les pays développés, la mondialisation a creusé des inégalités qui menacent de corroder le tissu social de nos sociétés. Le temps est donc venu pour l’Europe de définir un protectionnisme positif, européen, social et écologique, à l’opposé du nationalisme et du repli sur soi. C’est ce à quoi s’emploie cet ouvrage, qui étudie les conditions de la mise en oeuvre d’un tel dispositif et la manière dont il pourrait s’appliquer concrètement dans la vie des Européens."

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  • L'histoire serait-elle impartiale ?...

    Nous reproduisons ci-dessous l'éditorial de Dominique Venner publié dans le dernier numéro de la Nouvelle Revue d'Histoire (n°58, janvier - février 2012) au manichéisme qui sévit actuellement dans la lecture de l'histoire.

     

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    L'histoire serait-elle impartiale ?

    Pour tous ceux qui avaient des raisons de combattre la Collaboration, celle-ci fut détestable.  Et de fait, ses aspects haïssables n’ont pas manqué. Pourtant, du côté français, mais aussi du côté allemand, des hommes d’honneur et de foi se sont engagés dans cette voie qu’ils croyaient juste et que l’histoire a condamné. Le plus souvent, ils ont payé leurs illusions au prix fort. Non seulement ils y ont fréquemment perdu la vie, leur liberté et leur existence sociale, mais plus encore la possibilité de faire valoir leurs raisons. Morts ou survivants, il leur fallait endurer une réprobation générale à l’égard d’un engagement réputé ignoble et devenu incompréhensible, L’interprétation imposée par la victoire de leurs adversaires triomphants était à la fois totale et totalitaire (1). En d’autres termes, l’histoire écrite par les vainqueurs impose un manichéisme absolu entre eux-mêmes qui sont associés au Bien, et les vaincus, devenus incarnation du Mal à tout jamais.

    Il en est toujours ainsi après une guerre de religions. Et la Seconde Guerre mondiale fut une guerre de religions. Les vaincus perdirent d’un seul coup la possibilité d’être compris. Ce qui les avait justifiés quand ils portaient encore les armes, soudain s’est évanoui, remplacé par le verdict sans appel d’un procès jugé d’avance, où les inquisiteurs triomphants jouissaient du pouvoir de les transformer en d’indicibles criminels pour l’éternité ou presque. Oui, je dis bien l’éternité !

    L’empereur Julien, qui pourtant ne fit jamais couler le sang pour la cause qu’il croyait juste, se voit aujourd’hui encore qualifié d’Apostat par la mémoire collective imposée par ses adversaires victorieux. Rien ne sert d’expliquer que cet attribut est aussi calomnieux que scandaleux. Calomnieux, puisque jamais Julien n’adopta la nouvelle religion étrangère contre laquelle il éleva la protestation de sa fidélité. Il ne fut donc pas « apostat », mais fidèle. Si l’on réfléchit un instant, l’attribut dont on continue de l’affubler est également scandaleux. Dans notre monde européen, libre en principe de tout interdit religieux, l’apostasie est en effet une sentence criminelle d’un autre âge, impliquant une condamnation pour l’éternité. En dépit du temps écoulé et des travaux de réhabilitation des historiens, elle a cependant persisté (2).

    Par ce détour, je ne me suis pas éloigné de ma réflexion initiale. L’exemple de l’opprobre attachée au nom de l’empereur Julien, disparu depuis plus de quinze siècles, attire l’attention sur l’écriture de l’histoire après un conflit ayant mobilisé les passions à l’extrême et dont les vainqueurs ont l’exclusivité de la parole publique. Ce que j’ai dit de l’empereur Julien pourrait l’être aussi, bien que de façon plus limitée, pour le grand personnage que fut le Connétable de Bourbon, à tout jamais qualifié de « traître » par une mémoire française qui se confond avec celle de l’État. En son temps, la révolte du Connétable contre François Ier et sa mère qui l’avaient grugé, fut comprise par les contemporains. Le droit féodal et le principe de l’engagement réciproque la justifiaient. Rien de cela ne fut plus admis quand s’imposa plus tard l’idée nouvelle de la nation et de la « trahison » postérieure à 1792 ou 1870.

    Nous voici revenus au jugement manichéen que l’histoire inflige aux acteurs des années de l’Occupation. Par deux autres exemples, j’ai montré ce qu’il y a d’incertain dans le jugement historique. Autrement dit, quand un vaincu, devant les fusils qui vont le tuer, s’écrie : « L’Histoire jugera ! », il se remonte le moral au prix d’une chimère. L’histoire n’est jamais un tribunal impartial. Elle est toujours écrite par les vainqueurs. Il arrive cependant qu’une défaite ultérieure des anciens vainqueurs, une défaite « historique », c’est-à-dire sans appel, accorde une revanche inattendue aux vaincus. Il en a été ainsi en Russie pour les Blancs, réhabilité par l’effondrement absolu du système qu’avaient édifié les Rouges après 1917.

     Dominique Venner (La Nouvelle Revue d'Histoire n°, janvier-février 2012)


    Notes

    1. Totalitaire : qui s’impose à tous et en toute chose, pénétrant la vie privée au même titre que le vie publique.

    2. Grand historien récemment disparu, Lucien Jerphagnon, chrétien lui-même, s’indignait de l’éternisation de la condamnation posthume portée contre le jeune empereur auquel il consacra une captivante et riche biographie, Julien, dit l’Apostat (Tallandier, 2008).

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  • Contre la pensée unique !...

    Les éditions Odile Jacob viennent de publier Contre la pensée unique, un essai du linguiste Claude Hagège, dans lequel ce dernier s'en prend vigoureusement à l'hégémonie de la langue anglaise, qui est aussi le meilleur vecteur du néo-libéralisme. Le célèbre auteur de L'homme de paroles a récemment publié un Dictionnaire amoureux des langues (Plon, 2009).

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    "Ce livre est un plaidoyer contre la pensée unique. Ce livre est un appel à la résistance. Quand l'essentiel n'est plus distingué de l'accessoire, quand les projets intellectuels de haute volée se heurtent à la puissante inertie de la médiocrité ambiante et des petits desseins, quand l'uniformisation s'installe dans les goûts, les idées, dans la vie quotidienne, dans la conception même de l'existence, alors la pensée unique domine. La langue anglaise domine le monde et sert aujourd'hui de support à cette pensée unique. Mais le français est bien vivant. Et nombreux sont ceux, de par le monde, qui en mesurent l'apport au combat de l'homme pour la liberté de l'esprit. C'est l'objet de ce livre que de proposer de nouvelles pistes pour déployer encore plus largement de nouvelles formes d'inventivité et de créativité."

     

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  • Le peuple !...

    Le nouveau numéro d'Eléments est en kiosque. il est aussi disponible sur le site de la revue.  Vous pouvez lire ci-dessous l'éditorial de Robert de Herte, alias Alain de Benoist, consacré au peuple.

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    Le peuple
     
    Le mot « peuple » peut avoir deux sens différents, selon qu’on l’envisage comme un tout (un territoire et l’ensemble des habitants qui l’occupent, l’ensemble des membres du corps civique) ou comme une partie de ce tout (les « classes populaires »). Dans la langue française, le « peuple » a d’abord désigné un ensemble de personnes liées par une communauté d’origine, d’habitat, de coutumes et d’institutions. C’est le sens que le terme revêt lorsqu’il apparaît au IXe siècle, notamment dans les Serments de Strasbourg (842). Mais la seconde acception s’est répandue très vite: le peuple « populaire », par opposition aux élites dominantes, ce sont les « petites gens », les « gens de peu », ce « menu peuple », comme on disait au XVIIIe siècle, dont la définition ne se réduit nullement à une simple dimension économique (contrairement aux « déshérités » ou aux « plus démunis »).

    Cette ambivalence est extrêmement ancienne. Elle remonte à la Grèce archaïque, le mot dèmos étant lui-même déjà attesté dans le syllabaire mycénien (da-mo). A l’origine, le dèmos représente une façon de penser la communauté en rapport étroit au territoire qui est le sien et sur lequel s’exerce l’autorité de ses dirigeants (d’où le « dème », circonscription territoriale et administrative). Cette dimension territoriale du dèmos est directement liée à sa dimension politique. Déjà dans les textes homériques, le dèmos ne se confond nullement avec l’ethnos. Il se distingue aussi du laos, qui se rapporte plutôt à un groupe d’hommes placés sous l’autorité d’un chef. A Sparte, c’est à travers la notion de dèmos que se met en place l’idéal du citoyen-soldat. A Athènes, le dèmos se rapporte à l’ensemble des citoyens, c’est-à-dire à la communauté politique formant l’élément humain de la polis. En tant que sujet de l’action collective, c’est lui qui crée l’espace commun à partir duquel peut se développer une existence sociale proprement politique.

    A partir du Ve siècle av. notre ère, le terme dèmos désigne aussi la démocratie, prenant du même coup une résonance péjorative chez ceux qui stigmatisent l’exercice du kratos par le dèmos. Mais il désigne aussi un « parti populaire », équivalent de la plebs romaine, dont on trouve déjà trace dans les textes de Solon.

    Le principe de la démocratie n’est pas celui de l’égalité naturelle des hommes entre eux, mais celui de l’égalité politique de tous les citoyens. La « compétence » à participer à la vie publique n’a pas d’autre source que le fait d’être citoyen. « Nous ne naissons pas égaux, écrit Hannah Arendt, nous devenons égaux en tant que membres d’un groupe, en vertu de notre décision de nous garantir mutuellement des droits égaux ». Le peuple, en démocratie, n’exprime pas par son vote des propositions qui seraient plus « vraies » que d’autres. Il fait savoir où vont ses préférences et s’il soutient ou désavoue ses dirigeants. Comme l’écrit très justement Antoine Chollet, « dans une démocratie, le peuple n’a ni tort ni raison, mais il décide ». C’est le fondement même de la légitimité démocratique. C’est bien pourquoi la question de savoir qui est citoyen – et qui ne l’est pas – est la question fondatrice de toute pratique démocratique. Pareillement, la définition démocratique de la liberté n’est pas l’absence de contrainte, comme dans la doctrine libérale ou chez Hobbes (« the absence of externall impediment », lit-on dans le Leviathan, 14), mais s’identifie à la possibilité pour chacun de participer à la définition collective des contraintes sociales. Les libertés, toujours concrètes, s’appliquent à des domaines spécifiques et des situations particulières.

    Un peuple a beau être composé d’une multitude de singularités, il n’en forme pas moins un tout, et ce tout a des qualités spécifiques indépendantes de celles que l’on retrouve chez les individus qui le composent. C’est parce que le peuple forme un tout que le bien commun ne s’identifie pas à un « intérêt général » qui ne serait qu’une simple somme d’intérêts individuels. Le bien commun est irréductible à tout partage. Il n’est pas redevable d’une définition morale, mais d’une définition politique.

    Il y a dans tout gouvernement représentatif une évidente inflexion antidémocratique, ce qu’avait bien vu Rousseau (« A l’instant qu’un peuple se donne des représentants, il n’est plus libre; il n’est plus », Contrat social, III,15). La participation politique y est en effet limitée aux seules consultations électorales, ce qui signifie que le démos ne regroupe plus des acteurs, mais seulement des électeurs. On y affirme implicitement que le peuple ne peut pas prendre lui-même la parole, qu’il ne doit pas donner directement son avis sur les problèmes de l’heure ou sur des décisions qui engagent son avenir, qu’il y a même des sujets qui doivent être soustraits à son appréciation, les décisions et les choix devant être exercés par les seuls représentants qu’il désigne, c’est-à-dire par des élites qui n’ont cessé de trahir ceux dont elles tenaient le pouvoir, au premier rang desquelles se tiennent les experts, qui confondent régulièrement les moyens et les fins.

    C’est à partir du XVIIIe siècle, au moment où l’on invente la « société », que la perception sociale du peuple se transforme. D’un côté, on théorise l’« âme du peuple » (Volksseele), de l’autre on voit dans le peuple – les classes populaires – un nouvel acteur social capable de remettre en cause les anciennes hiérarchies. Au XIXe siècle, la droite conservatrice défend avant tout le peuple comme totalité – avec un net glissement du dèmos à l’ethnos –, en même temps qu’elle développe une mystique de l’unité nationale allant jusqu’à l’« union sacrée », tandis que les socialistes défendent les classes populaires. Dissociation profondément artificielle, puisque les « gens du peuple » ont toujours formé la vaste majorité du « peuple ». Le peuple doit en fait être défendu dans toutes ses dimensions.

    L’exemple de la Commune de Paris est à cet égard remarquable, puisque ce mouvement a cristallisé à la fois une réaction patriotique (la peur d’assister à l’entrée des troupes prussiennes dans Paris) et une réaction prolétarienne (la crainte d’une réaction monarchique contre le résultat des élections de février 1871).

    Au cours de ces journées, qui s’achèveront dans le sang, le peuple parisien insurgé prend le pouvoir. En quelques semaines, il parvient à prolonger les mots d’ordre par des programmes, à esquisser au-delà des mesures d’urgence une forme institutionnelle inédite. En matière de représentation, la Commune élit elle-même ses délégués et proclame la révocabilité des mandats. Sur le plan social, elle supprime les amendes sur les salaires, prévoit la gratuité de la justice et l’élection des magistrats. Elle décide aussi la séparation de l’Église et de l’État, arrête le principe de l’enseignement gratuit et obligatoire, se prononce même pour le « gouvernement du monde des arts par les artistes ». L’inspiration générale est celle du fédéralisme proudhonien. L’association des travailleurs est posée comme le principe de base de l’organisation de la production. Les Versaillais empêcheront ce programme de se réaliser. « Le cadavre est à terre, mais l’idée est debout », dira Victor Hugo.

    Robert de Herte (Eléments n°142, janvier - mars 2012)

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  • Tour d'horizon... (21)

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    Au sommaire cette semaine :

    - sur le site de l'hebdomadaire le Point, Claude Imbert prend position contre la loi sur le génocide arménien...

    Contre l'État historien

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    - sur son blog, Bernard Lugan revient sur les pseudo-révélations concernant l'attentat contre le président du Rwanda en 1994, qui "blanchissent" opportunément les Tutsis de Paul Kagamé...

    L’assassinat du président Habyarimana : entre certitudes, interrogations et « enfumage »

    claude imbert, lois mémorielles, génocide, intérête national, histoire, mémoire, bernard lugan, rwandan,kagamé, habyarimana, désinformation, enfumage

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