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syrie - Page 7

  • Feu sur la désinformation... (100)

    Vous pouvez découvrir ci-dessous un nouveau numéro de l'émission I-Média sur TV libertés, consacrée au décryptage des médias et présentée cette semaine par Hervé.

    Au sommaire :

    • 1 : Omran une photo au service de la propagande de guerre
      Omran devenu le symbole de la guerre Syrie. Lors d’une frappe de la ville d’Alep, l’enfant est blessé. Le photographe et militant politique Mahmoud Rslan immortalise la scène. La photo sera diffusée dans l’ensemble des médias pour faire bouger les consciences et changer les politiques. I-Média réinforme.
    • 2 : Le zapping d’I-Média.

    • 3 : Nice, polémique autour d’un voile.
      Polémique autour d’un contrôle de police sur femme voilée sur une plage de Nice. La scène a été photographiés, les images tournent en boucle sur les réseaux sociaux et dans les médias. Julien Dray évoque une machination. Décryptage dans I-Média..
    • 4 : Tweets d’I-Média.
    • 5 : Omran et le petit Aylan  :2 photos une même manipulation. Retrouvez le décryptage d’I-média sur la photo d’un enfant mort sur une plage de Bodrum...

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  • Le visage d'Omrane...

    Nous reproduisons ci-dessous une chronique de Richard Millet, cueillie sur son site personnel, qui revient sur le battage médiatique provoqué par la diffusion d'une photo d'un enfant syrien de la ville d'Alep, victime d'un bombardement des forces aériennes russes ou gouvernementales.

    On notera, tout de même, que la photographie du jeune "Omrane", un peu trop parfaite pour être honnête, a suscité la curiosité de certains médias "grand public", qui n'ont pu que relever quelques faits particulièrement troublants se rapportant à la personnalité de son auteur...

     

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     Le visage d’Omrane

    « Le visage d’Omrane est capable d’arrêter le temps », lit-on dans Le Monde, qui ne recule pas devant l’enflure à propos de la banale photo d’un enfant aleppin couvert de poussière et de sang, et rescapé des « bombes » (anglicisme pour obus) larguées par le « régime » ou par des avions russes – les obus des « rebelles » n’atteignant jamais, on le sait, les enfants ni les femmes. Prenant la place du petit Aylan noyé sur une plage grecque, « Omrane » est donc (s’il existe réellement) le « vrai visage de la guerre » en Syrie, comme autrefois les mères en larmes des guerres du Liban, de Yougoslavie, du Kossovo et d’Algérie, d’Afghanistan…

                Rotation des images, rapide changement d'« icônes », comme dans l’économie publicitaire : « the show must go on », et Omrane est proposé au statut iconique dans une quête de symboles qui relève évidemment de la propagande et du voyeurisme, pendant naturel du narcissisme occidental. En réalité, Omrane est un « cliché », à tous les sens du mot, et il est donc obscène : pornographie de la presse stipendiée, qui choisit évidemment des enfants non chrétiens ; car la photographie est en vérité tout le contraire de l’icône, quoi qu’en disent le langage journalistique officiel et les « réseaux sociaux » : ce qui se joue, ici, c’est la vision païenne et marchande de l’image (un paganisme idéologique) contre la pureté de l’icône chrétienne. Nous n’avons pas besoin de ces images-là, nous autres chrétiens : nous savons ce qui meurt en chaque enfant, et l’amour de celui qui a pensé à nous avant que nous existions.

                Que les Américains s’en émeuvent, voilà bien le comble du cynisme, surtout quand on sait que le régime d’Obama ne combat pas réellement l’Etat islamique, qu’il ferme les yeux sur le nettoyage ethnique auquel se livrent parfois les Kurdes dans les zones qu’ils libèrent (selon une tradition inaugurée lors du génocide assyrien de 1915, parallèlement au génocide arménien), et qu’il surestime sciemment le nombre des victimes occasionnées par les frappes de la « coalition », laquelle ne sert qu’à faire oublier le crime politique que fut la guerre d’Irak. Peut-on d’ailleurs attendre autre chose d’un président à qui, à peine élu, on avait décerné le prix Nobel de la paix sur ses intentions et sur sa seule couleur de peau ? Quant aux manquements aux droits de l’homme à propos desquels l’organisation para-gouvernementale américaine Amnesty International rappelle que « des flots de sang » coulent des prisons du « régime » syrien, on nous permettra de rappeler la conduite des soldats yankees à Abou Ghraïb et à Guantanamo.

                Pendant ce temps, la France, qui se décompose à vue d’œil, comme on le voit en Corse et ailleurs, lutte contre l’islamisme en tentant d’interdire le « burkini » sur les plages, suscitant un de ces « débats » qui entendent prouver la « vitalité » du jeu démocratique – suscitant également la désapprobation d’associations immigrationnistes qui vont contester en justice cette décision, la presse stipendiée tentant, de son côté, d’intimider l’opinion, en assurant que nous sommes à ce propos la risée de l’étranger – en réalité des Anglo-saxons, notamment des Anglais et de tous ceux qui se sont déjà convertis au multiculturalisme d’Etat et se vautrent devant le capitalisme islamique.

                La lutte contre la « radicalisation » (mot qui permet d’éviter celui d’islamisme) est également à l’œuvre à Calais, où une « initiative solidaire », composée de « cuisinières mais aussi de comédiennes et de communicantes passionnées de gastronomie », a affrété un « food truck » pour « nourrir, créer du lien et favoriser l’insertion des réfugiés à travers des repas et des ateliers de cuisine » propres à mélanger « les cultures et les origines », déclare la très boboïque initiatrice de ce projet, qui ajoute que « la cuisine est un vecteur de lien social fort, tourné vers la vie et la communauté. C’est aussi un moteur d’insertion puisque la restauration en France représente plus de 20.000 emplois, dont 34.000 restent à pourvoir en cuisine : autant de chances pour ces réfugiés de se constituer un avenir ici ». Etrange discours dans un pays qui compte des millions de chômeurs qui pour beaucoup préfèrent, il est vrai, vivre des ressources du non-travail… Quant aux repas servis, ils sont bien sûr nutritivement corrects, et proposent une « assiette gourmande, vivante, variée, végétarienne, parce que c’est plus consensuel mais aussi plus éthique, moins cher et plus facile à stocker ».

                Contre ce grotesque catéchisme, qui fera hurler de rire les réfugiés et leurs maîtres de l’Etat islamique, on peut aussi bien suggérer d’envoyer non plus un « food truck » mais un « book truck », chargé des moins pires romans de la « rentrée littéraire », s’il s’en trouve, leurs auteurs les accompagnant pour des ateliers de lecture et d’écriture avec des « migrants » devenus des « icônes » et Calais « the place to be » pour se rendre favorables les jurys littéraires de l’automne : nul doute que les migrants, en voyant arriver cette nef des fous, renonceront à passer en Angleterre et retourneront dans leur pays d’origine.

    Richard Millet (Site officiel de Richard Millet, 21 août 2016)

    PS

    Je voudrais profiter de cette chronique pour remercier tous ceux qui m’envoient des messages de soutien : écrire comme je le fais suppose, ils l’ont compris, une forme de solitude quelquefois difficile, mais qui ne me fera pas démordre de la ligne que je me suis fixée : lutter en témoignant contre la grande inversion contemporaine.

     

     

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  • Tour d'horizon... (108)

     

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     Au sommaire cette semaine :

    - dans la lettre Communication & Influence, Frédéric Pichon, historien arabisant, spécialiste du proche-orient, décrypte les opérations de désinformation et de manipulation qui ont été mises en œuvre contre l'Iran et la Syrie au cours des dernières années...

     

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    - sur Youtube, Romain Filstroff dit Linguisticae fait une présentation didactique et dynamique des langues indo-européennes et des différents proto-peuples indo-européens...

    Les langues indo-européennes

    D'où viennent les Indo-européens? - Les cultures archéologiques

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  • Alexandre Douguine et la place de la Russie dans le jeu géopolitique mondial...

    Au moment même où la Russie annonce le départ de ses troupes militaires de Syrie , le philosophe et écrivain Alexandre Douguine répond aux questions de TV Libertés. S’exprimant dans un Français remarquable, l’intellectuel polyglotte et particulièrement influent à Moscou évoque le rôle toujours plus central que joue la Russie de Vladimir Poutine dans le jeu géopolitique mondial.
    Dans cet entretien exclusif, il aborde trois questions d'importance : l'Ukraine, la Russie dans l'ordre international et enfin le multipolarisme comme nouvelle mission russe. Un document rare réalisé par Pierre-Antoine Plaquevent.

    Pour découvrir de façon plus approfondie les idées d'Alexandre Douguine, on pourra se reporter à L'appel de l'Eurasie (Avatar, 2013), le texte d'une longue conversation entre lui et Alain de benoist, mais également à deux de ses œuvres traduites en français, La Quatrième théorie politique (Ars Magna, 2012) et Pour une théorie du monde multipolaire (Ars Magna, 2013).

     

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  • La Russie se "retire" de Syrie ou l'art de mener la danse

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Caroline Galactéros, cueilli sur le site du Point et consacré à l'annonce surprise d'un retrait partiel des forces russes de Syrie. Docteur en science politique et dirigeante d'une société de conseil, Caroline Galactéros est l'auteur de  Manières du monde, manières de guerre (Nuvis, 2013).

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    La Russie se "retire" de Syrie ou l'art de mener la danse

    L'annonce par le président Poutine, le 14 mars, d'un désengagement partiel de ses forces déployées en Syrie a paru surprendre gouvernements et médias occidentaux. Dès le 2 octobre dernier pourtant, quelques jours seulement après le lancement de la campagne russe en Syrie, Alexeï Pouchkov, président de la commission des Affaires étrangères de la Douma, interrogé sur Europe 1, avait estimé que « les frappes russes en Syrie dev[r]aient durer trois ou quatre mois », et que c'était l'intensité de la campagne, non sa durée, qui ferait son succès, comme le démontrait d'ailleurs, par contraste, le peu d'efficacité des opérations occidentales prolongées... Si même le président Assad a été prévenu par Moscou, on peut gager que les autorités américaines ont été mises dans la confidence du mouvement tactique russe.

    Vladimir Poutine a justifié cette décision par le fait que « la tâche qui avait été demandée à notre ministère de la Défense et aux forces armées a été globalement accomplie ». Le mandat des forces russes engagées, sur requête officielle du gouvernement syrien, dans leur première opération militaire en dehors des frontières de l'ex-Union soviétique depuis la guerre d'Afghanistan (1979-1989), était en effet clair et limité : « stabiliser les autorités légitimes et créer les conditions pour la mise en œuvre d'un compromis politique ».

    Le risque d'une nouvelle provocation turque... ou saoudienne

    Il n'a jamais été question pour Moscou, sauf dans les cauchemars occidentaux nourris de l'anti-russisme primaire d'observateurs et de responsables qui crient au loup - rouge - (mais se trompent de prédateur), d'une présence militaire russe de long terme, d'un écrasement en solitaire (de facto impossible) de l'État islamique, ou du contrôle de l'ensemble du pays au profit du régime syrien. L'armée russe n'a jamais eu ni les moyens ni l'ambition d'une telle implication. Moscou ne peut défaire militairement l'État islamique ; les législatives russes de septembre approchent et le soutien populaire toujours massif au président - plus qu'à l'intervention en Syrie - ne doit pas être compromis par une quelconque contre-démonstration d'efficacité. L'enlisement a toujours été un spectre omniprésent, les limites logistiques et financières une réalité, et le risque d'une nouvelle provocation turque (un Mig 21 syrien a été récemment abattu… peut-être par un TOW) ou même saoudienne grandissant. L'Arabie saoudite vient en effet d'annoncer la livraison de missiles sol-air et antichars aux « rebelles ». Même si Washington interdit à Riyad de s'en servir, cette nouvelle a dû faire réfléchir Moscou qui envisageait d'acheminer des chars ultra-modernes sur le théâtre !

    C'est en fait le moment quasi idéal pour le président russe, scénariste de haut vol de sa propre politique et qui pratique avec brio l'adage « faire de nécessité vertu », de quitter avec les honneurs une partie dont il a su rebattre toutes les cartes. Il a imprimé sa marque et son rythme. Si, militairement, au Moyen-Orient, son « empreinte demeure légère », elle est très profonde en termes politiques et symboliques. Or, la grande politique est faite d'intérêts prosaïques et de symboles… d'où l'art, précieux entre tous, de savoir jusqu'où ne pas aller trop loin. Débarquer spectaculairement donc, « faire le job » prévu, ni plus ni moins, savonner la planche des concurrents au passage, puis passer le flambeau avec magnanimité aux diplomates, tout en mettant la pression sur son allié syrien pour le rendre plus conciliant dans les négociations qui s'ouvrent, et aussi sur son partenaire iranien, soudainement bien seul au sol et avec lequel les contentieux se multiplient. Tout cela pour conforter ses chances d'un deal global avec Washington.

    Un jeu simultané sur plusieurs échiquiers

    Car le chef du Kremlin joue en simultané sur plusieurs échiquiers - géographiques et thématiques - une partie mondiale, dont l'enjeu ultime demeure la restauration et la consolidation du statut de la Russie comme puissance globale incontournable dans la redéfinition des rapports de force mondiaux en duopole… avec Washington. Bien avant Pékin. Et puis il y a l'Arabie saoudite, avec laquelle il faut malgré tout savoir garder contact et lien, car les intérêts de ces deux immenses producteurs d'hydrocarbures convergent aussi partiellement, a minima contre l'Iran, qui cherche à revenir dans le jeu pétrolier et semble au fond plus un adversaire qu'un allié de long terme pour Moscou dans la région.

    Washington aussi mène une lutte d'influence globale et tous azimuts avec Moscou. Une lutte d'essence stratégique. Mais l'Amérique reste ponctuellement en convergence tactique avec la Russie. Car elle ne peut risquer d'aller au choc militaire frontal et doit gérer ses alliés saoudien et surtout turc avec doigté et fermeté, pour gêner la Russie en Europe et sur son flanc ouest, sans se laisser entraîner, avec l'Otan (qui chaque jour remet un peu d'huile sur le feu), dans une confrontation gravissime. Dans ce couple pragmatique, chacun joue en conséquence alternativement de postures agressives et conciliantes, poursuivant ses intérêts tout en empêchant la dynamique propre du conflit et ses acteurs secondaires de le pousser à un duel où il devrait reculer en s'humiliant.

    Le bilan de 5 mois et demi d'opérations russes positif

    Le terme de « victoire » fera évidemment grincer bien des dents, mais on peut difficilement méconnaître les résultats obtenus par Moscou. Le « mission accomplished » russe semble plus fondé que celui de George W. Bush en 2003, après quelques semaines de campagne irakienne, qui signa le début d'un enlisement américain dangereux pour toute la région et le monde. Alors que fin septembre 2015, l'armée gouvernementale syrienne était en grande difficulté et que le territoire sous son contrôle fondait à toute vitesse, l'équilibre s'est inversé et l'initiative a changé de camp. Le bilan de 5 mois et demi d'opérations russes est sans équivoque : 9 000 vols, des tirs massifs jusqu'à 1 500 kilomètres de distance avec missiles air-sol et mer-sol, le ralentissement de l'approvisionnement des terroristes, la coupure des voies principales de transit des hydrocarbures vers la Turquie et des canaux essentiels d'approvisionnement en armes et munitions ; la libération de Lattaquié, la communication avec Alep rétablie, la libération en cours de Palmyre occupée, la remise en fonctionnement de gisements pétroliers et gaziers, la libération de la majeure partie des provinces de Hama et de Homs, la levée du blocus de la base aérienne de Kuweires - assiégée depuis trois ans –, l'élimination de plus de 2 000 djihadistes (y compris russes), et 17 chefs de guerre, la destruction de 200 sites d'extraction, de traitement et de transfert du pétrole, ainsi que celle de près de 3 000 moyens de transport des hydrocarbures et camions-citernes, la libération avec les forces syriennes de 400 villes et villages et de plus de 10 000 kilomètres carrés de territoire. Les armements, la logistique, l'agilité et l'inventivité opérationnelle de la manœuvre aérienne russe, avec notamment l'emploi d'une aviation tactique permettant l'attaque au sol à basse altitude (SU25) conjuguée aux avions de diverses générations et à capacités plus classiques ou très sophistiquées, ont spectaculairement prouvé leur efficacité, et les soldats leur courage.

    Le soutien se poursuit à certaines opérations en cours, comme la reprise de Palmyre, et les bases de Tartous et de Khmeimim conserveront leur régime actuel de fonctionnement et de protection. Elles incarnent la permanence de l'intérêt de Moscou sur la région et son implication dans le respect du cessez-le-feu. Last but not least, pour faire pâlir d'envie les états-majors occidentaux, le président russe vient d'annoncer un coût total de l'opération… d'environ 420 millions d'euros déjà budgétés par le ministère de la Défense pour les exercices militaires et l'entraînement des troupes en 2015 !

    Embryon de gouvernement de transition

    Diplomatiquement, ne nous en déplaise, le cessez-le-feu proclamé par les présidents Poutine et Obama n'a été rendu possible que par le revirement dans les combats induit par l'intervention russe. La Russie dirige désormais en duo avec Washington, et en surplomb par rapport aux autres acteurs, le processus de négociations à travers le Groupe international de soutien pour la Syrie. Moscou a surtout influé sensiblement sur la composition de « l'opposition », mettant en avant des interlocuteurs adoubés autour des Kurdes syriens (jusque-là évincés diplomatiquement sur pression d'Ankara), et d'autres « opposants » jugés respectables, formant avec eux le « Groupe de Khmeimim », embryon possible d'un gouvernement de transition pouvant négocier avec les représentants du régime, puisque ses membres n'ont pas pris part à la lutte armée contre le régime d'Assad. Il semble aussi probable qu'un accord avec Washington ait été obtenu permettant à Bachar el-Assad de ne pas être livré à la sauvagerie de ses adversaires comme en son temps l'Afghan Najibullah. La réputation de Moscou et celle de son président en interne et dans le monde dépendent aussi de ce point-clé.

    Mais le plus remarquable reste le bilan stratégique. Mettant fin à une série d'humiliations et de provocations européennes et américaines en Europe, mais aussi au Moyen-Orient, depuis 15 ans, Moscou a :

    - réaffirmé son statut d'acteur politique et militaire global ;

    - bousculé le jeu occidental au Moyen-Orient et enrayé le projet américain soutenu par Riyad, Doha et Ankara de renversement du régime syrien pour s'emparer de ce verrou énergétique stratégique pour l'alimentation de l'Europe en pétrole et gaz eurasiatique et moyen-oriental ;

    - démontré que c'étaient les États-Unis et leurs alliés qui ne voulaient pas d'une coalition antiterroriste globale et révélé les doubles jeux et les atermoiements dans la lutte contre l'islamisme salafiste ;

    - équilibré auprès de Damas l'influence de son partenaire/concurrent iranien ;

    - sécurisé sa base de Tartous, établi celle de Lattaquié et 2 bases aériennes ;

    - pris des positions commerciales avantageuses sur l'exploration des gisements off shore syriens en Méditerranée orientale ;

    - remis la Turquie à sa place en faisant ravaler au président Erdogan sa morgue et ses ambitions néo-ottomanes... sans se laisser entraîner dans une « montée aux extrêmes » dangereuse avec Ankara ;

    - repris langue avec Israël et l'Égypte ;

    - « retourné » habilement les Kurdes syriens (Moscou livre même désormais quelques armes à ceux d'Irak pourtant très étroitement liés à Washington) en les utilisant dans la lutte anti-« tous terroristes » et en les imposant comme interlocuteurs cardinaux dans les négociations. Les Kurdes syriens s'enracinent dans le nord de la Syrie, formant désormais (presque) un mur à la frontière avec la Turquie. Ils viennent d'annoncer l'établissement d'une entité « fédérale démocratique » dans les trois zones autonomes du nord de la Syrie sous leur contrôle, malgré les mises en garde de Damas et d'Ankara. Dans ces conditions, la Russie est plus que jamais en position de force pour les négociations avec les États-Unis et les puissances sunnites afin de pouvoir garantir ses objectifs stratégiques (enjeux pétroliers et gaziers, bases militaires, contrepoids à l'influence iranienne - Téhéran reste à moyen terme un concurrent énergétique de premier plan) ;

    - offert une vitrine incomparable à ses armements et à ses capacités logistiques et de projection, en déployant à bas coût un groupe militaire réduit très efficace, alliant des forces et des équipements diversifiés (renseignement spatial, drones, aviation de chasse et d'assaut, forces de la marine qui ont utilisé des armes très modernes lancées par des navires de surface et des sous-marins depuis la Méditerranée et la mer Caspienne, système antiaérien puissant basé sur les systèmes de missiles sophistiqués S-400, etc.) ;

    - réaffirmé l'autorité de l'État syrien sur une grande partie de son territoire, donc l'importance du respect de la légalité internationale contre les tentations occidentales de redessiner les frontières et de changer les gouvernements en place au gré de leurs intérêts ;

    - commencé à retourner l'arme de l'élargissement européen (fortement encouragé par Washington) à ses ex-satellites à son profit à l'occasion de la crise migratoire. Désormais, Bulgares, Tchèques, Hongrois, Slovaques et autres pays balkaniques candidats à l'entrée dans l'UE, qui se sentent menacés par les utopies solidaires des technocrates européens, et le renoncement aux nations que sous-tend l'approche bruxelloise et surtout allemande de la gestion des flux de réfugiés, considèrent le voisinage russe comme une protection culturelle et civilisationnelle non dénuée d'intérêt… La crise ukrainienne est toujours vive par ailleurs, et face à un gouvernement de Kiev incapable de réformes, ultra-corrompu, et à un pays en faillite, ce cadeau empoisonné de l'Amérique à l'Europe pourrait finir par lasser cette dernière et redorer le blason de la tutelle russe sur Kiev.

    Un retrait partiel à tout moment réversible

    La guerre est loin d'être finie. La ligne de front restera mouvante, l'État islamique n'est pas en déroute mais en phase de repli et de redéploiement, notamment vers la Libye. Moscou cherche d'ailleurs à consolider son influence auprès du Caire, qui pourrait être à la manœuvre au sol en cas d'opération de la Coalition. Le président russe Poutine a beaucoup à gagner à cette nouvelle phase en coopération avec les Égyptiens, qui ne peuvent intervenir tout à la fois à l'ouest et dans le Sinaï.Que vont faire les adversaires d'Assad en Syrie et à l'étranger après le retrait du gros des troupes aériennes russes ? Le processus de négociations sera long, peut s'interrompre à tout moment, et les combats vont se poursuivre. En cas de reprise généralisée de la guerre, et sans un soutien massif russe, l'armée syrienne pourrait recommencer à perdre la guerre.

    Vladimir Poutine vient de rappeler, à toutes fins utiles, que son retrait partiel est à tout moment réversible et que ses forces peuvent se redéployer si nécessaire « en quelques heures » ! À bon entendeur, salut ! La Russie ne quitte pas la Syrie. Elle consolide son influence et réarticule les formes de son empreinte locale, régionale et globale.

    Quant à la France, il est trop douloureux d'en parler. Nous ne sommes pas dans ce nouveau « grand jeu ». Nous sommes hors-jeu. Durablement. Alors pourtant que nos armées valeureuses et nos forces de sécurité ne déméritent nullement sur le terrain ni sur le territoire national. Alors que notre nation, « travaillée » en toute impunité par un communautarisme militant, est une cible de choix pour le djihadisme mondial et que nos concitoyens sont les spectateurs menacés et impuissants d'un renoncement identitaire incompréhensible. Impardonnable.

    Caroline Galactéros (Le Point, 18 mars 2016)

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  • Tour d'horizon... (105)

    Fallschirmjäger_in_einer_Stellung.jpg

    Au sommaire cette semaine :

    - sur Theatrum Belli, Caroline Galactéros, spécialiste des questions de stratégie et de géopolitique, nous livre un panorama de la rébellion syrienne, sur laquelle la diplomatie française fonde tant d'espoirs...

    Camaïeu de vert… foncé : l’instructif panorama des “rebelles” syriens

    Rebelles syriens.jpg

    - sur le blog de Monde & vie, Bruno Larebière, ancien rédacteur en chef du Choc du Mois et de Minute, livre son analyse de la situation à droite...

    La réclamation lancinante des Français ne trouve aucun représentant crédible

    Larebière.jpg

    - sur Contrepoints, Thierry Berthier évoque l'avance qu'est en train d'acquérir Google dans le domaine stratégique de la robotique...

    Google, grand gagnant du monde des robots ?

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