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immigration - Page 33

  • Il était une fois la Suède...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Richard Dessens , cueilli sur EuroLibertés et consacré à la percée électorale du Parti démocrate suédois, opposé à l'immigration. Docteur en droit et professeur en classes préparatoires, Richard Dessens a notamment publié La démocratie travestie par les mots (L'Æncre, 2010), Henri Rochefort ou la véritable liberté de la presse (Dualpha, 2017) et La démocratie interdite (Dualpha, 2018).

     

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    Il était une fois la Suède

    Élections législatives en Suède dimanche 9 septembre. Depuis plusieurs jours la Grande Presse Officielle française et européenne fait régner un climat d’angoisse : le SD (Parti Démocrate suédois), « d’origine néo-nazi » (car cette fois-ci la grande presse démocratique se lâche sans complexe) peut devenir le premier parti de Suède avec 25 % des voix (ce qui lui ferait doubler ses voix. Du jamais vu !). Il faut bien créer du buzz ! Le « spectre de l’extrême droite » comme l’écrivent certains médias sans vergogne et en toute objectivité, agite les peurs.

    Encore une fois, mais la manœuvre médiatique est maintenant éculée. À chaque élection en Europe, les médias annoncent un « raz de marée populiste » (voire maintenant néo-nazi : on passe à la vitesse supérieure) en surestimant les intentions de votes dans le seul but de pousser un grand ouf de soulagement lorsque les résultats ne sont pas à la hauteur des attentes alarmistes des médias. Et de minimiser alors le score obtenu en se félicitant du « sursaut démocratique » et de la sagesse des peuples européens qui n’ont pas voté à 80 % pour les Populistes/néo-nazis !!!

    Encore une fois, après les angoisses alarmistes et l’agitation du chiffon rouge, ce sont maintenant les commentateurs et politologues toujours objectifs qui se succèdent pour « analyser » le vote suédois… avec la plus grande sidération. La Suède est le berceau de la social-démocratie, un exemple révéré en Europe, le chômage est au plus bas, la croissance à 3 %. Comment peut-on alors voter pour des populistes dans ces conditions, le vote populiste étant réservé aux malheureux semi-analphabètes, chômeurs, aigris et apeurés des pays à problèmes économiques et d’emploi. La réponse de la spécialiste du jour fuse alors : « C’est un vote irrationnel ». Irrationnel car quand on vit dans un pays qui va bien économiquement on ne vote pas pour des populistes ! Il faut être un grand spécialiste diplômé Bac + 8 pour faire de telles analyses. Les mêmes d’ailleurs à chaque élection avec la variante pour les pays en difficulté : « C’est normal de voter populiste quand on est pauvre et peu éduqué. »

    D’autant que pas plus en Suède que dans le reste de l’Europe, il n’existe des problèmes d’insécurité et d’immigration massive. C’est un fantasme dirait M. Macron (souvenons-nous du splendide « il n’y a pas de crise migratoire en Europe »). Alors on brandit les chiffres officiels de l’immigration… en baisse et d’ampleur minime, en laissant de côté les masses d’immigration sauvage qui déferlent à jet continu sur l’Europe. Mais que l’on tait même si les moyens de dénombrer ces migrants existent et sont connus. Alors les « envoyés spéciaux » ironisent à grand renfort d’images soigneusement sélectionnées sur la prétendue « insécurité » invoquée par le SD et expliquant que la délinquance est en baisse en Suède et que les migrants ne posent aucun problème (cf BFM TV). Voilà, le tour est joué et l’information, objective et non tendancieuse. Comme d’habitude.

    Ceci étant on pourrait « objectivement » saluer la performance du SD (Sverigedemokraterna dirigé par Jimmie Akesson) qui malgré la réprobation de l’Europe bien-pensante passe de 12,9 à 17,6 % c’est-à-dire la plus grande progression en Suède avec près de 5 % de voix gagnées en quatre ans et 62 députés au Parlement suédois. Le Parti social-démocrate au pouvoir réalise son score le plus bas depuis un siècle (28,4 %). La presse suédoise constate, atterrée, que : « Le fait est que la Suède compte désormais un parti qui a ses racines dans le nazisme […] Aujourd’hui, environ un cinquième de la population de l’un des pays les plus prospères du monde a choisi de voter pour ce parti. C’est aussi incompréhensible qu’indiscutable ». Le gouvernement a quinze jours pour se former dans des conditions plus incertaines qui pourraient laisser présager peut-être à terme une participation du SD.

    Mais ce qui inquiète le plus notre grande presse officielle, c’est que la Suède, championne et exemple ressassé du bonheur social-démocrate – même si la Suède détient curieusement le record de suicides par habitant – est depuis un siècle une référence pour les démocraties européennes. Tant que les populistes triomphaient dans des pays de l’ex-Europe de l’Est (Pologne, Hongrie, République tchèque) on pouvait expliquer ce vote de détresse. Avec l’Italie, ce n’était plus la même chose et la surprise difficile à admettre. Mais l’Italie frivole et championne des combinaisons improbables s’est contentée de quelques remarques condescendantes.

    Avec la Suède on touche au cœur du réacteur et le risque de contagion à des pays « sérieux » devient de plus en plus vif. D’autant que les manifestations anti-immigration se multiplient en Allemagne même si les médias tentent de minimiser leur portée. L’AfD (populistes allemands) vient de remporter elle aussi un succès spectaculaire en Allemagne.

    Décidément, la France s’en tire bien grâce à Emmanuel Macron, dernier rempart de l’intelligence européenne capable de procéder à la destruction du Parti « populiste » français rien qu’en le mettant en faillite financière. C’est vrai que M. Macron s’y connaît en finance. Quel talent. Tant pis, ou tant mieux, pour les Français.

    Richard Dessens (EuroLibertés, 11 septembre 2018)

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  • Un bloc populaire face aux libéraux mondialistes ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Steve Ohana, cueilli sur le site du Figaro Vox et consacré à l'émergence d'un "bloc populaire", avec pour axe doctrinal "un souverainisme politique, migratoire, commercial, budgétaire et monétaire, transcendant le clivage droite-gauche". L'auteur est professeur de finance à l'ESCP.

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    Et si la gauche devenait audible en se remettant à parler d'immigration ?

    Il y a quelques semaines, Sahra Wagenknecht, la leader du parti de gauche allemand Die Linke, a annoncé le lancement de son mouvement «Aufstehen » («Se lever»). Ce mouvement, se voulant indépendant des partis, a choisi une orientation idéologique nouvelle, dirigée non seulement contre les réformes de flexibilisation du marché du travail, qui ont considérablement précarisé les travailleurs peu qualifiés en Allemagne, mais également contre l'ouverture des frontières migratoires. Il s'agit pour elle de quitter la posture de la «gauche moralisatrice», expliquant aux perdants de la mondialisation comment il convient de penser, pour adopter celle de la «gauche matérialiste», qui se pose comme leur porte-parole et défenseur. Car, comme le dit le dramaturge Bernd Stegemann, qui travaille avec Wagenknecht sur le programme du mouvement, «les personnes vivant dans des conditions précaires et atomisées réagissent nécessairement de façon moins généreuse et tolérante que les catégories aisées à l'égard des immigrés». «D'abord le Grub (la nourriture en langage argotique), ensuite l'éthique», résume Brecht.

    Cette orientation constitue une révolution copernicienne du point de vue de la gauche. En effet, depuis l'avènement du marché unique européen et de la mondialisation libérale dans les années 80, la gauche dite «de gouvernement» a déserté la question de la défense du travail contre le capital (qui rentrait en contradiction avec l'objectif de la «construction européenne» et de «l'insertion dans la globalisation») pour se recentrer sur les questions sociétales: promotion des droits des minorités ethniques et sexuelles, politiques d'accueil migratoire… Or, la mondialisation a creusé les inégalités de revenus et de richesses au sein des sociétés occidentales, en particulier dans les pays qui ont épousé le plus nettement les politiques de flexibilisation du marché du travail et de réduction de la fiscalité sur les hauts revenus (États-Unis, Royaume-Uni, et, au sein de l'Europe continentale, l'Allemagne). C'est donc ainsi que la social-démocratie a progressivement délaissé les classes populaires, au profit d'une élite urbaine attachée à la mondialisation et aux valeurs cosmopolites (élite urbaine constituant une des composantes de ce que Bruno Amable et Stefano Palombarini ont nommé le «bloc bourgeois», ce corps social représenté par les différents partis politiques «de gouvernement» depuis l'avènement de la seconde mondialisation).

    Certains courants de «gauche radicale», dans l'objectif de reconquérir le vote des classes populaires, ont adopté un agenda de modification radicale du statu quo de la mondialisation: fiscalité beaucoup plus progressive, au détriment du capital et des plus hauts revenus, réforme de la gouvernance de l'euro et du mode d'intervention des banques centrales au profit des plus démunis (monétisation de la dette, «Helicopter Money»), régulation du marché du travail (augmentation du salaire minimum, protection des travailleurs et des chômeurs), dirigisme de l'État dans l'économie (politiques sociales, renationalisations de secteurs privatisés, protection de l'emploi et des services publics, politiques ambitieuses d'investissements publics), régulation du commerce international (protection du secteur industriel, dénonciation des accords de libre-échange, barrières douanières à l'encontre des pays pratiquant le dumping fiscal, social ou environnemental).

    Mais cette nouvelle offre politique antimondialisation portée par la gauche radicale s'est avérée jusqu'à présent insuffisante pour recueillir une large adhésion des classes populaires et renverser le statu quo de la mondialisation.

    Le changement de ligne opéré par Sahra Wagenknecht sur la question migratoire trouve son origine dans la crise des migrants de 2015, lors de laquelle la chancelière Angela Merkel a décidé unilatéralement de l'accueil d'un million de réfugiés du Moyen-Orient en Allemagne. Cette politique ne répondait pas qu'à une logique humanitaire, elle était également conforme aux intérêts du patronat allemand, inquiet que la pénurie de main-d'œuvre ne finisse par l'obliger à augmenter fortement les salaires (on estime que le pays a besoin d'un flux de 500 000 migrants par an jusqu'en 2050 pour contrer la baisse structurelle de sa main-d'œuvre). L'ensemble de la gauche allemande a d'abord adhéré, suivant sa ligne internationaliste habituelle, à cette politique d'accueil. Mais elle a alors vu son audience au sein des classes populaires s'affaisser au profit de l'AfD, le nouveau parti national populiste allemand, dont la ligne était clairement hostile à l'immigration.

    En reprenant le thème de la lutte contre l'immigration à son compte, la gauche renoue en réalité avec son positionnement historique quant au problème de la mobilité du travail. «Ce que nous ne voulons pas, disait Jaurès dès 1894, observant les effets de la première mondialisation, c'est que le capital international aille chercher la main-d'œuvre sur les marchés où elle est la plus avilie, humiliée, dépréciée, pour la jeter sans contrôle et sans réglementation sur le marché français, et pour amener partout dans le monde les salaires au niveau des pays où ils sont le plus bas. C'est en ce sens, et en ce sens seulement, que nous voulons protéger la main-d'œuvre française contre la main-d'œuvre étrangère, non pas je le répète, par un exclusivisme chauvin mais pour substituer l'internationale du bien-être à l'internationale de la misère». On observe d'ailleurs la contraposée de cette intuition de Jaurès au Royaume-Uni, où les salaires dans certains secteurs utilisant beaucoup de main-d'œuvre étrangère ont fortement augmenté suite aux reflux migratoires vers le continent induits par la perspective du Brexit.

    Dans cette controverse centrale de l'immigration, se mêlent donc la critique de l'idéologie cosmopolite (critique portée traditionnellement par la droite conservatrice) et celle des effets économiques délétères de la mondialisation. Deux thématiques qui rencontrent une forte résonance au sein des classes populaires.

    De leur côté, les mouvements nationaux populistes comme l'AfD s'engagent de plus en plus dans la défense des classes populaires contre les effets de la mondialisation. Ainsi, l'AfD, qui campait à l'origine sur une ligne économique ultralibérale, propose à présent de revaloriser les retraites et de revenir sur les réformes de flexibilisation du marché du travail (réformes Hartz IV en particulier) pour mieux épouser les attentes de son électorat cible. Le parti est même intervenu pour soutenir les ouvriers de Siemens contre le projet de fermeture d'une usine à Görlitz, près de la frontière polonaise. Ce positionnement fait écho à la ligne anti-euro et antimondialisation de la campagne présidentielle de Marine Le Pen en 2017. La Ligue italienne s'est également significativement «gauchisée» sur le plan économique et social, jusqu'à faire une alliance de gouvernement avec le Mouvement Cinq Étoiles en mai dernier, une situation politique inédite qui préfigure la constitution d'un «bloc populaire» potentiellement hégémonique face au «bloc bourgeois» représenté par les formations centristes traditionnelles.

    Cette tendance s'étend par contagion aux partis de gouvernement, qui jusqu'à présent se préoccupaient avant tout de représenter les gagnants de la mondialisation. Le Premier ministre britannique Theresa May, leader du parti conservateur Tory, a ainsi acté la rupture définitive avec le thatchérisme pour renouer avec la tradition «social conservatrice» du «Red Tory». Elle tente ainsi de mieux répondre au besoin de protection exprimé par les classes populaires qui ont majoritairement voté en faveur du «Leave». Face à elle, Jeremy Corbyn a rompu avec la doctrine libérale du «New Labour» de Tony Blair pour adopter une ligne économique beaucoup plus en phase avec les intérêts des classes populaires. Il a également incorporé dans son programme la régulation des flux migratoires, chère aux partisans du Brexit, dans le même esprit que Sahra Wagenknecht. La rhétorique anti-mondialisation et anti-immigration de Donald Trump, tout à fait inédite au sein du parti républicain, constitue également une sorte d'avatar de cette tendance, même si, sur le plan intérieur, le positionnement de Donald Trump (notamment en matière fiscale) est encore franchement défavorable aux classes populaires. Quant à Bernie Sanders, il ne proposait rien de moins qu'une «révolution politique» aux catégories populaires déclassées par la mondialisation lors des primaires du parti démocrate.

    On se souvient de la fameuse phrase de Warren Buffet: «Il y a bien une lutte des classes, mais c'est ma classe, celle des riches, qui la mène et elle est en train de la gagner». Or, les classes populaires, qui ont en effet été reléguées aux marges du système jusqu'à la crise de 2008, sont maintenant en train de se structurer en force d'opposition politique face au statu quo inégalitaire de la mondialisation.

    Les élites bénéficiaires de la mondialisation tentent aujourd'hui de défendre le statu quo en se présentant comme les ultimes défenseurs des valeurs «progressistes» et «libérales» face au retour des «populismes» ou des «nationalismes». Mais, derrière cette terminologie caricaturale, se lit en réalité la tentative désespérée du «bloc bourgeois» de maintenir son hégémonie sociale et culturelle face à la pression de plus en plus menaçante du «bloc populaire». Un souverainisme politique, migratoire, commercial, budgétaire et monétaire, transcendant le clivage droite-gauche, apparaît comme le nouvel axe doctrinal autour duquel les classes populaires sont en train de s'organiser en vue de la reconquête du pouvoir. Face à la puissance de ce discours souverainiste, qui entend restituer aux peuples une démocratie confisquée, les élites libérales vont devoir réviser en profondeur leur logiciel si elles ne veulent pas voir cette seconde mondialisation finir, comme la première, dans les poubelles de l'Histoire.

    Steve Ohana (Figaro Vox, 3 septembre 2018)

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  • Feu sur la désinformation... (199)

    Vous pouvez découvrir ci-dessous un nouveau numéro de l'émission I-Média sur TV libertés, consacrée au décryptage des médias et dirigée par Jean-Yves Le Gallou, président de la fondation Polémia, avec le concours d'Hervé Grandchamp.

    Au sommaire :

    • 1 : Manifestations à Chemnitz : les médias voient des nazis partout
      Chemnitz théâtre de manifestation de nazis ? Chemnitz théâtre de chasses aux immigrés ?. Les médias dénoncent la montée de la xénophobie en Allemagne. Ils bobardent pour cacher l’émotion de la Saxe suite aux meurtres d’allemands par des « migrants ».
    • 2 : Le Zapping d’I-Média 
      Affaire Clément Méric, 5 ans après. L’homicide de Clément Méric revient sur le devant de la scène médiatique avec le procès des accusés. Il est possible de dresser, d’ores et déjà, un constat : Le ton médiatique a changé. Le mot « assassiné » est beaucoup moins présent sous la plume des journalistes. Le terme désormais employé est plus nuancé « homicide involontaire ».
      Remaniement, le tour de manège du gouvernement
      Remaniement ministériel, qui prendra la place de Nicolas Hulot ? l’ancien député européen Cohn-Bendit a été approché par le gouvernement provoquant de très vives réactions sur les réseaux sociaux.

    • 3 : Les tweets de la semaine
      Drépanocytose : Fermeture de l’agence qui en publiait les statistiques. L’agence française pour le dépistage et la prévention des handicaps a fermé ses portes en juillet. L’agence dépistait notamment la drépanocytose, une maladie génétique qui ne concerne quasi exclusivement que les populations extra européennes. Agnès Buzin, ministre des solidarités et de la santé s’est prononcé en faveur d’une systématisation du dépistage.
    • 4 : Portrait Piquant de Christophe Barbier
      Nicolas Faure dresse le portrait piquant de Christophe Barbier, le pape des médias à l’écharpe rouge. Journaliste touche à tous… les médias il est passé par le Point, Europe 1, ou encore l’Express.

                                         

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  • Le Grand Déversement...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Jure Georges Vujic, cueilli sur Polémia et consacré à la question de la crise migratoire en Europe. Avocat franco-croate, directeur de l’Institut de géopolitique et de recherches stratégiques de Zagreb, Jure Georges Vujic est l'auteur de plusieurs essais, dont Un ailleurs européen (Avatar, 2011) et  Nous n'attendrons plus les barbares - Culture et résistance au XXIème siècle (Kontre Kulture, 2015).

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    Immigration. Le Grand Déversement, révélateur de la crise totale de l’Europe

    Le grand mérite de l’immigration massive à laquelle on assiste sur le continent européen est de remettre les pendules à l’heure et de poser les vraies questions dont les dimensions sont économiques, sociales, mais aussi culturelles et civilisationnelles. En effet, les implications de ce phénomène « total »  peuvent se mesurer sur l’ensemble des sphères culturelles, identitaires, économiques, sociales et démographiques des communautés nationales.

    Une phénomène global

    Il y a plusieurs façon de déchiffrer et d’interpréter le phénomène migratoire, allant de l’eschatologie fantasmagorique en l’assimilant à un péril biblique, soit en le réduisant aux nombreuses grilles d’interprétations scientifiques réductrices de la sociologie, la démographie en passant par l’économie.
    Et pourtant, si l’on dépasse les seuls effets et conséquences visibles, exogènes, il convient de constater que ce grand mouvement migratoire qui est à l’œuvre actuellement en Europe est le résultat d’un long cycle endogène de déstructuration sociale, économique et démographique depuis la fin du XIXe siècle et que l’on peut, pour reprendre la thèses d’Alfred Sauvy, assimiler à un « grand déversement ». Le fameux « grand remplacement » n’étant que l’épiphénomène visible de ce même déversement au niveau global.

    En effet, selon cette théorie, il existe un transfert (ou déversement) de la population active du secteur primaire, l’agriculture, vers le secteur secondaire, l’industrie, puis vers le secteur tertiaire. Sous l’effet des gains de productivité dégagés par le progrès technique (par exemple, la mécanisation agricole ou la diffusion du fordisme dans l’industrie), les volumes produits augmentent, les prix baissent, la demande croît, ce qui permet de créer de nouveaux emplois. Dans les faits, ce mécanisme correspond bien à ce qu’a connu la France depuis le début de la révolution industrielle : la « fin des paysans », avec le départ des ouvriers agricoles vers l’industrie via un exode massif (50 % d’actifs dans l’agriculture en 1900, contre 3 % aujourd’hui), puis le déversement des emplois industriels vers les services à partir du milieu des années 1970, quand s’affirme la tertiarisation de l’économie. Ce mécanisme est à l’œuvre depuis le début de la Révolution industrielle.

    Transfert d’emplois et explosion démographique

    Sauvy montrait à raison que le progrès technique et l’automatisation croissante, par les gains de productivité qu’ils génèrent, entraînent un transfert des emplois de l’agricuture vers l’industrie, puis vers les services.
    A terme, la machine remplacerait l’homme, processus de robotisation-automatisation des emplois qui est à l’œuvre actuellement. Alors que cette phase de déversement de la population active restait jusque là dans les années 80 plus ou moins localisable et endogène, s’apparentant à une immigration socio-professionnelle interne, aujourd’hui avec la globalisation, la mobilité sociale, la dérégulation, et les délocalisations transnationales de l’économie, ce phénomène de déversement s’est lui aussi internationalisé et correspond très bien aujourd’hui au phénomène de disruption néolibérale et d’ubérisation de l’économie, qui pourrait très bien, à long terme, prendre les formes de la quaternisation de l’économie liée à l’externalisation de certains métiers – maintenance, paye, gestion du parc informatique… Le recours à l’immigration (parfois sous la forme  de main d’œuvre qualifiée mais le plus souvent sous la forme de main d’œuvre à bon marché) constituerait alors une des  armes géo-économiques redoutables de ce processus de déversement global.

    Une vague migratoire du tiers-monde vers le Nord

    En effet, ce cycle de déversement à l’heure de la globalisation néolibérale, reste inséparable comme le constate Sauvy, de l’explosion démographique dans les pays du Sud qui dans le sillon des décolonisations en Asie et en Afrique, et aujourd’hui avec la  destruction programmée manu militari de nombreux Etats du Moyen-Orient comme la Syrie, l’Irak, le La Libye etc., généreront la « prolifération des pauvres » du sud vers les pays plus riches et développés de l’hémisphère Nord, qui bien sûr en sont plus en mesure d’absorber de tels vagues migratoires massives.

    En effet, bien sûr la théorie du déversement énoncée par Sauvy applicable dans les pays développés à forte différenciation socio-profesionnelle, n’est pas transposable au tiers-monde où les grands contrastes et la stratification socio-économiques subsistent, mais pourtant les  stratégies géo-constructivistes néo-imperiales des Etats-Unis depuis 1990. avec l’application du « chaos constructif » au Moyen Orient ont favorisé les vagues d’immigration massive vers l’Ouest. Une immigration jeune extra-européenne qui devait compenser les « grands vides » du déversement socio-professionnel  et du vieillissement de population. A terme, cela équivaudrait avec les politiques suicidaires des élites mondialistes de transposer ce chaos constructif (que certains économistes rapprochent de la « déstruction créatrice » de Joseph Schumpeter) sur le continent européen en multipliant les fractures ethno-religieuses et une communautarisation accrue, l’immigration économique prenant la forme d’une immigration de peuplement étant alors au service de la dé-souverainisation nationale.

    La chute démographique, une crise en gestation

    Parallèlement à l’explosion démographique et la croissance de la population jeune du tiers monde, la population européenne de souche stagne et ne cesse de vieillir, de sorte que certains pays européens comme l’Allemagne font appel à l’immigration et à la main d’œuvre étrangère pour combler ce manque démographique.
    En effet, le taux de natalité de la population allemande a toujours été bas depuis les années 1970. Et, en 2015, le nombre de décès s’élevait à 187 625. La persistance de taux de natalité très bas, comme au cours des quatre dernières décennies, prédit de graves problèmes sociaux, économiques et géopolitiques pour l’Allemagne.
    On estime ainsi que d’ici à 2025, l’Allemagne aura besoin de 6 millions de travailleurs étrangers pour pouvoir payer les retraites des baby boomers qui partiront alors à la retraite. Le cas de figure Allemand est applicable aussi aux autres nombreux pays européens demandeurs et capteur et de main d’œuvre étrangère à bon marché, ces populations supplétives de remplacement le plus souvent extra-européennes  étant considérées comme des contingents palliatifs de compensation  face au phénomène de vieillissement de la population autochtone européenne.

    La boucle bouclée

    Ainsi, la boucle serait bouclée, après la déversement et la transfert du primaire (fin du monde paysan) et du secondaire (monde ouvrier-industrialisation) vers le tertiaire (services, précarisation et ubérisation), on assiste actuellement à un déversement démographique qui s’apparente à un transfert de population et de main d’œuvre jeunes du tiers monde vers les pays développés du Nord et de l’Ouest, qui devraient occuper les emplois dont les populations de souche ne veulent pas tout en remédiant au problème social et démographique du vieillissement de population.
    En effet, la plupart des pays européens se trouvent actuellement dans une situation de pénurie de main d’œuvre qualifiée et non qualifiée (bâtiment-construction, agriculture, ouvriers qualifiés, informatique, etc.) et en moyenne, 20 % des entreprises industrielles européennes estiment que leur production est limitée par les difficultés de recrutement de main d’œuvre.

    Le déclin démographique aggrave cette situation comme en Allemagne où le manque de  main d’œuvre généralisé s’aggravera jusqu’à “perdre” 6 millions de travailleurs d’ici 2030.
    L’Europe de l’Est sera également pénalisée par l’émigration d’une partie de ses travailleurs vers les pays de l’Ouest (Allemagne, Royaume-Uni).
    Il faut rappeler que l’ONU parle ouvertement de migrations de remplacement. C’est ainsi que la Division de la population du Département des affaires économiques et sociales a publié un rapport intitulé Migration de remplacement : est-ce une solution pour les populations en déclin et vieillissantes ? Le concept de migration de remplacement correspond à la migration internationale dont un pays aurait besoin pour éviter le déclin et le vieillissement de la population qui résultent des taux bas de fécondité et de mortalité. Dans chaque cas on considère différents scénarios pour la période 1995-2050, en mettant en relief l’impact que différents niveaux d’immigration auraient sur la taille et le vieillissement de la population.

    Le déversement idéologique et ontologique

    Bien sûr, cette phase de déversement déstructurante et l’appel à l’immigration économique massive depuis 1945 – comme le remarque Gérard Noiriel – n’a pu se faire sans un discours de légitimation le plus souvent sansfrontièriste et pro-migrationiste, lequel s’apparentait à un changement de paradigme au sens Khunien du terme (sur le plan économique, paradigmes de l’Etat providence, paradigme de la croissance sans limites, paradigme de la globalisation, paradigme du développement durable etc…), qui coïncidait au passage d’un modèle de société organique traditionnelle correspondant à l’Etat nation souverain au modèle anarchique et atomisée mécaniciste individualiste et multiculturelle de la société de consommation de la mondialisation néolibérale, la croissance sans fin et la toute–puissance du marché. Le déversement progressif et déstructurant de la société et de l’économie s’accompagnait d’un déversement idéologique voire ontologique qui correspondait à l’économicisation de tous les autres sphères de la vie publique et au triomphe de l’inversion des valeurs sociales et culturelles.

    L’immigration : un nouveau Pharmakon ?

    Ce vaste mouvement d’inversion correspondait à l’ascension des forces abstraites et marchandes du marché qui symbolise cet « arrière-monde » nietzschéen au mépris du réel (la terre, le corps, les phénomènes, la culture), l’inversion idéelle sous-entendant un principe de dé-liaison et de dé-réalisation.

    Bien sur, l’idéologie mondialiste pro-migrationniste fondée sur la promotion de la culpabilisation colonial victimaire et le principe de repentance permettra de mieux faire avaler la pilule immigrationniste aux peuples, se dédoublant d’une vision économiciste des populations, les peuples étant interchangeables et réduits à leur seule dimension quantitative.

    Pourtant, nul ne sait si ce processus d’inversion sociétal et de déversement est irrémédiable et irréversible, en témoignent les résistances de l’opinion publique face à l’immigration massive, à l’Est comme à l’Ouest et le refus les pays du groupe de Visegrád de participer à la politique des quotas de l’UE.
    Tout poison étant en même temps un remède, l’immigration massive pourrait à terme jouer le rôle d’un pharmakon, puissant levier de conscientisation et de résistance qui préfigurerait alors l’aube d’un nouveau renversement, d’une réévaluation fondamentale des valeurs, d’une restauration d’un savoir-vivre en commun.

    Toutefois, il faut garder à l’esprit que toute possibilité de rémission, de renaissance, ne peut se fonder sur la seule stigmatisation de boucs émissaires et des seuls symptômes d’une maladie sociale, mais devra s’attaquer aux causes profondes de cette maladie que certains appellent  la « mondialisation heureuse  », qui – tout comme le déclare Bernard Stiegler sous sa forme ultra-libérale et marchande – aura fini par planétariser l’immonde…..

    Jure Georges Vujic (Polémia, 31 août 2018)

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  • " Du point de vue de l’idéologie dominante, l’immigration n’est pas un problème... "

    Nous reproduisons ci-dessous entretien avec Alain de Benoist, cueilli sur Boulevard Voltaire, dans lequel il évoque la position des Européens face à l'immigration massive... Philosophe et essayiste, Alain de Benoist a récemment publié Le moment populiste (Pierre-Guillaume de Roux, 2017), Ce que penser veut dire (Rocher, 2017) et L'écriture runique et les origines de l'écriture (Yoran, 2017).

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    Alain de Benoist : « L’Union européenne est en train de se casser sur la question des migrants »

    En s’amplifiant, la crise des migrants semble en train d’aboutir à une crise institutionnelle en Europe. Quand la fronde anti-migratoire ne concernait que des pays « mineurs » et « lointains » (Pologne ou Hongrie), la Commission européenne pouvait encore traiter cette affaire par le mépris. Mais quand c’est l’Italie, pays fondateur de l’Europe, qui tape du poing sur la table, l’affaire ne prendrait-elle pas une autre tournure ?

    Les historiens de l’avenir retiendront que l’Union européenne, qui avait survécu tant bien que mal à un élargissement hâtif, à un déficit de démocratie permanent et à la crise de l’euro, est aujourd’hui en train de se casser sur la question des migrants. C’est un tournant effectivement historique, mais peut-on s’en étonner ? Au fil des années, les pathologies sociales liées à l’immigration ont fini par occuper la première place dans les préoccupations des Européens. Les gens ne supportent tout simplement plus ce qu’ils perçoivent comme une « invasion » ou une « submersion », et ils le supportent d’autant plus mal qu’ils ont l’impression que les flux ne sont pas près de se ralentir. Plus important encore, ils ne croient plus ceux qui, depuis des années, leur expliquent doctement que l’immigration est une « chance » économique et démographique, et qu’il faut avoir le cœur singulièrement sec pour ne pas y voir aussi une « obligation morale ». Les Français sont volontiers xénophobes, mais absolument pas racistes (les Allemands, c’est le contraire). Ils savent bien que ce ne sont pas les « préjugés » qui leur gâchent la vie. Bref, ils voient ce qu’ils voient, et ils savent qu’ils le voient.

    L’Europe se disloque, mais aussi se recompose. Les pays d’Europe centrale, qui ne veulent pas se transformer à leur tour en caravansérails, se retirent du jeu. On dit qu’ils se replient sur eux-mêmes, mais ils s’associent entre eux. Non seulement les pays du groupe de Visegrád (Hongrie, Pologne, République tchèque et Slovaquie) s’opposent frontalement aux consignes immigrationnistes de la Commission de Bruxelles, mais ils ont aussi rallié l’Initiative des trois mers, lancée il y a trois ans par le président polonais Andrzej Duda et la présidente croate Kolinda Grabar-Kitarović, qui comprend également les trois pays baltes, l’Autriche, la Slovénie, la Croatie, la Roumanie et la Bulgarie. Ce bloc de douze pays et de 120 millions d’habitants, s’étendant de la Baltique à l’Adriatique et à la mer Noire, pourrait bien constituer l’embryon d’une autre Europe.

    Les sondages montrent que la question migratoire arrive depuis longtemps en tête des préoccupations des Français et des Européens, et que l’hostilité à l’immigration ne fait que croître. Pourquoi les gouvernements n’en tiennent-ils pas compte, alors que cela risque de leur coûter politiquement très cher ?

    D’abord parce qu’ils sont tétanisés par les lobbies associatifs et médiatiques, qui répètent soir et matin les mantras du politiquement correct. Ils ne veulent les affronter à aucun prix. Mais la raison la plus profonde est qu’ils sont eux-mêmes acquis à l’idéologie dominante. Or, du point de vue de l’idéologie dominante, l’immigration n’est pas un problème et ne peut pas en être un, puisque les cultures et les peuples comptent pratiquement pour rien. Seuls comptent les individus. Toute réglementation de l’immigration revient à violer le principe libéral selon lequel on ne peut accepter l’utilisation des aspects contingents de l’identité des individus, à commencer par leur origine ou leur appartenance socioculturelle, pour légitimer des « inégalités de traitement ».

    Le libéralisme aborde la question dans une optique purement économique : l’immigration se résume à une augmentation du volume de la main-d’œuvre et de la masse potentielle des consommateurs. Elle se justifie, en outre, par l’impératif de libre circulation des hommes, des capitaux et des marchandises. Un million d’extra-Européens venant s’installer en Europe, c’est donc seulement un million d’individus qui viennent s’ajouter à d’autres millions d’individus. Le problème, c’est que les habitants du pays d’accueil, eux, ne voient pas arriver des « individus » mais des contingents de Maliens, de Sénégalais, de Maghrébins, de Pakistanais, etc., dont ils constatent qu’ils sont porteurs de mœurs difficilement conciliables avec les leurs. C’est ce qui fait toute la différence.

    En Italie, l’union des populistes de gauche (M5S) et de droite (la Ligue) est une nouveauté par rapport à l’Autriche, par exemple, avec sa coalition droite-extrême droite. Ce phénomène est-il spécifiquement italien ou peut-il survenir dans d’autres pays, dont la France, toujours à la recherche de son éternelle « union des droites » ?

    Les phénomènes politiques de grande ampleur s’exportent rarement à l’identique d’un pays à l’autre, mais y prennent plutôt des formes différentes. Il en va ainsi des mouvements populistes, qui ne cessent aujourd’hui de monter dans toute l’Europe, mais qui s’y configurent de manière variable. Ils ont, cependant, un trait essentiel en commun. C’est que le sentiment d’insécurité culturelle suscité par la vague migratoire ne suffit pas à expliquer le populisme. Il ne commence à y avoir de populisme que là où l’insécurité économique et sociale s’ajoute à l’insécurité culturelle, essentiellement dans les couches populaires et dans une partie (grandissante) des classes moyennes. C’est pour cela que le clivage « exclus d’en bas contre nantis d’en haut » se substitue de plus en plus au clivage gauche-droite. Et c’est exactement ce qui se s’est passé en Italie, pays en première ligne face aux flux migratoires, mais qui a aussi été très gravement touché par la crise financière de 2008. N’en doutons pas, c’est ce qui va se produire de plus en plus ailleurs.

    Alain de Benoist, propos recueillis par Nicolas Gauthier (Boulevard Voltaire, 16 août 2018)

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  • L'ère des suspects...

    Les éditions Grasset viennent de publier un roman de Gilles Martin-Chauffier intitulé L'ère des suspects. Breton, journaliste et rédacteur en chef de Paris-Match, Gilles Martin-Chauffier a publié de nombreux romans dont l'intrigue se déroule dans les milieux de pouvoir de la société contemporaine...

     

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    " Dans la «  Cité noire  » de Versières, territoire oublié par la République, un adolescent d’origine maghrébine est retrouvé mort en bordure d’une voie de RER. La veille, il avait été poursuivi par un jeune gardien de la paix. Tout semble indiquer que ce dernier n’y est pour rien, mais qu’importe  : les jeux sont faits. La police, la famille, les grands frères, la mairie, les avocats, la presse, les «  consciences  » – tous s’en mêlent, chacun y cherche son compte mais personne ne semble se préoccuper de l’essentiel  : qui est le véritable coupable  ?
    De l’Élysée au ministère de l’Intérieur, d’un commissariat à une piscine de luxe en passant par la rédaction d’un magazine d’information, L’Ère des suspects nous conduit au cœur d’une société du mensonge et du faux-semblant où les «  victimes  » servent de dépouilles médiatiques aux tartuffes qui nous gouvernent.
    Entre thriller politique et comédie du pouvoir, Gilles Martin-Chauffier signe ici son Bûcher des vanités à la française  : un roman ambitieux sur les impostures de notre temps. "

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