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droite - Page 28

  • Alain de Benoist s'entretient avec David L'Epée (1/2)...

    De nationalité suisse, David L'Epée est un jeune journaliste d'idées indépendant.  Alain de Benoist répond à ses questions...

    Thèmes abordés :

    1 – Alain de Benoist : penseur de gauche ou de droite ?
    2 –  Qu’est-ce que la Nouvelle Droite ?
    3 –  Les médias et l’étiquette de droite
    4 –  Une évolution intellectuelle de la droite vers la gauche ?
    5 –  L’intellectuel engagé face au militant de parti
    6 –  Quête de vérité et recherche d’efficacité
    7 –  L’élite et le peuple
    8 –  Gramsci et la méthode du combat culturel
    9 –  Une droite allergique aux intellectuels
    10 –  L’Europe fédéraliste des peuples : contre l’Union européenne et contre les nationalismes
    11 –  Quelle alternative à la technocratie européiste ?
    12 –  Un exemple de résistance à l’européisme : la Suisse
    13 –  La géopolitique des blocs pour un monde multipolaire.


    Entretien avec Alain de Benoist 1/2 par davidlepee

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  • La droite et le libéralisme...

    Nous reproduisons ci-dessous un texte de Pierre Le Vigan, cueilli sur le site Europe Maxima et consacré  aux rapports entretenu par les droites, dans leur diversité, avec l'idéologie libérale.

     

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    La droite et le libéralisme

     

    Maurras rappelle une réticence classique des droites vis-à-vis du libéralisme quand il énonce : « la liberté de qui ? la liberté de quoi ? c’est la question qui est posée depuis cent cinquante ans au libéralisme. Il n’a jamais pu y répondre » (Maurras, Dictionnaire politique et critique, 1938). Pour comprendre cette réticence, il faut remonter aux origines de la droite.

    Août – septembre 1789 : à l’occasion du débat constitutionnel, les partisans du veto absolu (et non suspensif) du roi se situent à droite de l’assemblée. À gauche se placent les partisans d’un pouvoir royal faible. Dans le même temps, une partie des droites se prononce en faveur d’une constitution à l’anglaise fondée sur le bicaméralisme. De quoi s’agit-il ? Exactement de deux rapports très différents au libéralisme, et qui concernent dés l’origine les familles politiques qui se situent « à droite ». Être partisan d’un veto royal absolu signifie refuser l’autorité venue « d’en bas », c’est-à-dire du Parlement. C’est, d’emblée, défendre une conception transcendante du pouvoir, et considérer, avec Joseph de Maistre, qu’on ne peut « fonder l’État sur le décompte des volontés individuelles ». À l’inverse, être partisan du bicaméralisme signifie se méfier du peuple tout autant que du pouvoir. Tout en ayant comme point commun l’opposition à la toute-puissance de l’Assemblée constituante, ce sont là deux façons très différentes d’être « à droite ». Le paysage se complique plus encore en prenant en compte les arrière-pensées de chaque position.

    Si le bicaméralisme est l’expression constitutionnelle assez claire d’un souci d’alliance ou de compromis entre la bourgeoisie montante et l’aristocratie déclinante, par contre, la revendication d’un pouvoir royal fort peut – et c’est une constante de l’histoire des familles politiques de droite – se faire en fonction de préoccupations non seulement différentes mais contradictoires : s’agit-il de donner au roi les moyens de liquider au profit de la bourgeoisie les pouvoirs nobiliaires qui s’incarnaient dans les anciens parlements, ou au contraire s’agit-il de pousser le roi à s’arc-bouter sur la défense de ces privilèges nobiliaires, ou bien encore de nouer une nouvelle alliance entre roi et  peuple contre la montée de la bourgeoisie ? De même, le bicaméralisme a pour préoccupation d’affaiblir le camp des « patriotes » (c’est-à-dire de la gauche), et rencontre donc des soutiens « à droite ». Pour autant, est-il « de droite » dans la mesure où il relève d’une  méfiance devant tout principe d’autorité ? En tant que moyen d’empêcher la toute-puissance de l’Assemblée constituante, ne relève-t-il pas indiscutablement du libéralisme, c’est-à-dire d’une attitude moderne qu’exècrent une grande partie des droites ?

    Cette attitude moderne a ses racines, comme l’a bien vu Benjamin Constant, dans un sens différent de la liberté chez les Anciens et les Modernes. Le bonheur étant passé dans le domaine privé, et étant, sous cette forme, devenu « une idée neuve en Europe » (Saint-Just), la politique moderne consiste à ne pas tout attendre de l’action collective. La souveraineté doit ainsi être limitée, ce qui va plus loin que la simple séparation des pouvoirs. « Vous avez beau diviser les pouvoirs : si la somme totale du pouvoir est illimitée, les pouvoirs divisés n’ont qu’à former une coalition et le despotisme est sans remède » (Benjamin Constant). Tel est le principe de fond du libéralisme : la séparation tranchée des sphères privées et publiques. Conséquence : la crainte du pouvoir en soi. Car dans le même temps, la désacralisation du monde aboutit à ce que chacun estime – comme l’avait vu Tocqueville, avoir « un droit absolu sur lui-même », par déficit de sentiment de  participation à la totalité du monde. En sorte que la volonté souveraine ne peut sortir que de « l’union des volontés de tous ». La réunion des conditions d’une telle unanimité étant à l’évidence difficile, – ou dangereuse – le libéralisme y supplée en affirmant le caractère « naturel » – et par là indécidable – de toute une sphère de la vie sociale : la sphère économique, celle de la production et reproduction des conditions de la vie matérielle. Rien de moins.

    Un tel point de vue par rapport à l’économie et aux rapports de travail dans la société n’est caractéristique que de l’une des droites – une droite qui n’est pas « née » à droite mais qui a évolué vers le freinage d’un mouvement qu’elle avait elle-même contribué à engendrer. C’est en quelque sorte la droite selon le « droit du sol » contre la droite selon le « droit du sang ». Relève de la première l’homme politique et historien François Guizot, valorisant la marche vers le libéralisme avant 1789, mais cherchant à l’arrêter à cette date. C’est la droite orléaniste. Les autres droites, celles qui le sont par principe – et parce qu’elles croient aux principes  – prônent l’intervention dans le domaine économique et social. « Quant à l’économie, on ne saurait trop souligner combien le développement d’une pensée sociale en France doit à la droite, remarque François Ewald. […] Il ne faut pas oublier que les premiers critiques de l’économie bourgeoise et des méfaits du capitalisme ont été des figures de droite (Villeneuve de Barjemont, Sismonde de Sismondi) (1). »

    Cette critique des sociétés libérales par certaines droites n’est pas de circonstance. Elle s’effectue au nom d’une autre vision  de l’homme et de la société que celle des libéraux. « Il y a une sociologie de droite, précise encore François Ewald, peut-être occultée par la tradition durkheimienne, dont Frédéric Le Play est sans doute avec Gabriel de Tarde le représentant le plus intéressant ». La pensée anti-libérale de droite est, de fait, jalonnée par un certain nombre d’acteurs et de penseurs importants. Joseph de Maistre et Louis de Bonald voient dans l’irréligion, le libéralisme, la démocratie des produits de l’individualisme. Le catholique Bûchez (1796 – 1865), pour sa part,  défend les idées de l’association ouvrière par le biais du journal L’Atelier. Le Play, de son côté, critique « les faux dogmes de 1789 » : la perfection originelle de l’homme (qui devrait donc être restaurée), sa liberté systématique, l’aspiration à l’égalité comme droit perpétuel à la révolte. La Tour du Pin, disciple de Le Play, critique la séparation (le « partage ») du pouvoir, considérant que celui-ci doit s’incarner dans un prince, mais propose la limitation du pouvoir et la consultation de la société (civile) notamment par la représentation corporative : le refus du libéralisme n’équivaut pas à une adhésion automatique à l’autoritarisme.

    Par contre, le refus d’une société réduite à des atomes individuels est une constante de la pensée de droite, de l’école contre-révolutionnaire aux divers traditionalismes. Maurras a défendu l’idée, dans ses Réflexions sur la révolution de 1789, que la loi Le Chapelier interdisant l’organisation des travailleurs était un des actes les plus néfastes de la Révolution. Il établit un lien entre celle-ci et le libéralisme pour, tous les deux, les condamner. « L’histoire des travailleurs au XIXe siècle, écrit Maurras, se caractérise par une ardente réaction du travailleur en tant que personne à l’encontre de son isolement en tant qu’« individu », isolement imposé par la Révolution et maintenu par le libéralisme (2). » Thierry Maulnier résumait de son côté l’opinion d’une Jeune Droite composante essentielle des « non-conformistes de années Trente » en écrivant : « Il devait être réservé à la société de structure libérale d’imposer à une catégorie d’individus un mode de dépendance qui tendait, non à les attacher à la société, mais à les en exclure (3) ».

    L’Espagnol José Antonio Primo de Rivera formulait un point de vue largement répandu dans la droite française extra-parlementaire quand il évoquait, en 1933, la signification du libéralisme économique. « L’État libéral est venu nous offrir l’esclavage économique, en disant aux ouvriers : vous êtes libres de travailler; personne ne vous oblige à accepter telle ou telle condition. Puisque nous sommes les riches, nous vous offrons les conditions qui nous conviennent; en tant que citoyens libres, vous n’êtes pas obligés de les accepter; mais en tant que citoyens pauvres, si vous ne les acceptez pas, vous mourrez de faim, entourés, bien sûr, de la plus haute dignité libérale. »

    Les critiques à l’égard du libéralisme énoncées par une partie des droites sont parallèles à celles énoncées d’un point de vue catholique par Louis Veuillot, puis par René de La Tour du Pin et Albert de Mun, promoteurs des Cercles catholiques d’ouvriers, qui furent confortés par l’encyclique Rerum Novarum (1891), mais dont les positions annonçaient avec cinquante ans d’avance celles de Divini Redemptoris (1937). C’est à ce moment que se met en forme, à droite (avec Thierry Maulnier, Jean-Pierre Maxence, Robert Francis, etc.), une critique du productivisme complémentaire de la critique du libéralisme. La Jeune Droite rejoignait sur ce point la critique d’auteurs plus inclassables (Drieu La Rochelle, Robert Aron, Arnaud Dandieu, …).

    Si l’anti-productivisme, comme l’anti-économisme (celui par exemple de la « Nouvelle Droite » du dernier quart du XXe siècle) apparaissent par éclipse à droite, la condamnation du libéralisme est le noyau commun de la pensée de droite. Caractéristique dans sa banalité droitière même est le propos de Pierre Chateau-Jobert : « Le libéralisme, écrit-il, […] a pris la liberté pour seule règle. Mais pratiquement, c’est le plus fort, ou le moins scrupuleux, ou le plus riche, qui est le plus “ libre ”, puisqu’il a le plus de moyens (4) ». Droitiste d’une envergure plus considérable, Maurice Bardèche ira jusqu’à déclarer que, comme Jean-Paul Sartre, il « préfère la justice à la liberté ».

    Cette conception de la liberté comme toujours subordonnée à d’autres impératifs explique que la droite soit à l’origine de nombreuses propositions sociales. En 1882, Mgr Freppel demande la création de retraites ouvrières. En 1886, Albert de Mun propose la limitation de la journée de travail à dix heures et, en 1891, demande la limitation du travail des femmes et des enfants. En 1895, le même de Mun demande que soit reconnue aux syndicats la possibilité de posséder de biens à usage collectif. En 1913, Jean Lerolle réclame l’instauration d’un salaire minimum pour les ouvrières à domicile (5).

    Les projets de réorganisation des rapports sociaux de Vichy (la Charte du travail soutenue par nombre de syndicalistes) comportent  de même des aspects socialement protecteurs. Enfin, la difficulté de réaliser des transformations sociales qu’a montré l’expérience de gauche de 1981 à 1983 permet de réévaluer les projets de participation et de « troisième voie » du Général de Gaulle et de certains de ses soutiens venus de la droite radicale comme Jacques Debu-Bridel, d’ailleurs anciens du Faisceau de Georges Valois.

    La critique du libéralisme par la droite – hormis le courant orléaniste -, concerne tout autant l’économie que le politique. Le parlementarisme, expression concrète du libéralisme politique selon la droite est, jusqu’à l’avènement de la Ve République, accusé de fragmenter l’expression de la souveraineté nationale, et de la soumettre aux groupes de pression. Pour Barrès, « le parlementarisme aboutit en fait à la constitution d’une oligarchie élective qui confisque la souveraineté de la nation ». D’où sa préférence pour le plébiscite comme « idée centrale constitutive » : « le plébiscite reconstitue cette souveraineté parce qu’il lui donne un mode d’expression simple, le seul dont elle puisse s’accompagner ».

    De son côté, Déroulède précise : « Vouloir arracher la République au joug des parlementaires, ce n’est pas vouloir la renverser, c’est vouloir tout au contraire instaurer la démocratie véritable ». Péguy, pour sa part, dénonce en 1902 le parlementarisme comme une « maladie ». Trente années plus tard, André Tardieu (1876 – 1945), chef d’une droite modernisatrice de 1929 à 1936, créateur des assurances sociales, député de Belfort (ville se dotant souvent de députés originaux), auteur de La révolution à refaire voit dans le parlementarisme « l’ennemi de la France éternelle ». Dans un contexte singulièrement aggravé, et énonçant le point de vue de la « Révolution nationale », Charles-Emmanuel Dufourcq, dans Les redressements français (6) concentre aussi ses attaques contre le parlementarisme et l’autorité « venue d’en-bas » comme causes, tout au long de l’histoire de France, des affaiblissements dont le pays n’est sorti que par le recours à l’autorité indiscutée d’un roi, d’un Napoléon ou d’un Pétain. Il manifestait ainsi une remarquable continuité – ou une étonnante absence d’imagination selon le point de vue – avec les tendances théocratiques de la Contre-Révolution.

    En revanche, plus marginaux sont les secteurs de la droite qui se sont sentis concernés par la critique du parlementarisme effectuée par le juriste Carré de Malberg, qui inspirera René Capitant et les rédacteurs de la Constitution de 1958.  Dès le XIXe siècle, aussi bien la droite dans ses composantes non-orléanistes que la gauche des démocrates et des socialistes – de Ledru-Rollin à Proudhon – sont en porte à faux par rapports aux mythes fondateurs de la modernité française. « L’objectif de 1789 […] consiste, indique Pierre Rosanvallon, à démocratiser, “ politiquement ”, le système politique, qui est d’essence absolutiste, et à libéraliser, “ sociologiquement ”, la structure sociale, qui est d’essence féodale (7) ».

    La difficulté du processus tient dans sa simultanéité (et c’est la différence avec l’Angleterre). D’un côté, la gauche socialiste veut « républicaniser la propriété » (Jules Guesde), de l’autre, une certaine droite met en cause « les responsabilités des dynasties bourgeoises » (Emmanuel Beau de Loménie) et le libéralisme qui les a laissé prendre tant de place. Rien d’étonnant à ce que des convergences apparaissent parfois (le Cercle Proudhon avant 1914, les planistes et « non-conformistes des années Trente », le groupe Patrie et Progrès au début de la Ve République, …).

    En effet, pour toute la période qui va du milieu du XIXe siècle à nos jours, la distinction proposée par René Rémond en 1954 entre trois droites, légitimiste, orléaniste, bonapartiste, apparaît peu adaptée. D’une part, l’appartenance du bonapartisme à la droite est très problématique : c’est un centrisme césarien. D’autre part, l’orléanisme est écartelé dès son origine entre conservatisme et libéralisme : conservatisme dont François Guizot est une figure centrale, qualifiée par Francis-Paul Benoît de « conservateur immobile, donc non libéral (8) », le libéralisme étant représenté, plus que par les économistes « classiques », par les saint-simoniens modernistes ralliés à Napoléon III.

    À partir de 1870, le clivage qui s’établit, « à droite », oppose, plutôt que les trois droites de la typologie de René Rémond, une droite radicale (radicalement de droite, et non conjoncturellement radicalisée), voire une « droite révolutionnaire » (Zeev Sternhell) en gestation, et une droite libérale-conservatrice. L’organisation d’une « droite » libérale au plan économique, conservatrice au plan politique est en effet ce qui permet après le Second Empire le passage, sinon sans heurts, du moins sans révolutions de la France dans l’univers bourgeois et capitaliste. C’est à l’évidence à cette droite que pensait un jour François Mitterrand disant : « la droite n’a pas d’idées, elle n’a que des intérêts ». C’est la droite comme la désigne désormais le sens commun.

    Entre la droite révolutionnaire (forme extrême de la droite radicale) et la droite libérale (qui n’est conservatrice que dans la mesure où un certain conservatisme, notamment moral, est le moyen de faire accepter le libéralisme), la vision de la politique est toute différente. Du point de vue libéral, dans la mesure où la souveraineté ne peut venir que du consensus, le champ de la « naturalité » économique et sociale doit être étendu le plus possible. À la suite des penseurs libéraux français comme Bastiat, Hayek affirme que « le contrôle conscient n’est possible que dans les domaines où il est vraiment possible de se mettre d’accord » (ils ne sont évidemment pas très nombreux).

    Tout autre est l’attitude du radicalisme de droite (appelé souvent « extrême droite » avec de forts risques de contresens). Jean-François Sirinelli, coordinateur d’une Histoire des droites en France (9), remarque que « l’extrême droite aspire rien moins qu’à un état fusionnel de la politique ». Certes. En d’autres termes, elle aspire à retrouver – ou à inventer – un critère d’indiscutabilité du principe d’autorité, et du lien social lui-même. Conséquence : cette droite radicale tend à ne pas décliner son identité comme celle d’une droite, s’affirmant « ni de droite, ni de gauche » (Barrès, Valois, Bertrand de Jouvenel, Doriot, les hommes des Équipes d’Uriage, le Jean-Gilles Malliarakis des années 80, …), ou encore « simultanément de droite et de gauche » (la « Nouvelle Droite »).

    La difficulté de caractériser la droite par des idées à amener certains analystes comme Alain-Gérard Slama à essayer de la définir par un tempérament. Celui-ci consisterait, selon Slama, dans la recherche du compromis. Cette hypothèse ne fait que souligner l’existence de deux droites, une droite libérale, et la droite radicale, que presque tout oppose. Si la première recherche effectivement les accommodements, la droite radicale se caractérise plutôt par la recherche d’un dépassement synthétique des contradictions du monde moderne. À divers égards, sous des formes et à des niveaux très différents, c’est ce qui rassemble Le Play, Péguy, Bernanos, Drieu la Rochelle, Charles de Gaulle. Dépassement des contradictions de la modernité : vaste programme que ces hommes – pas toujours « à droite », mais sans doute « de droite » – n’ont jamais envisagé de mettre en œuvre par des moyens par principe libéraux.

     

    Pierre Le Vigan

     

    Notes

     

    1 : François Ewald, Le Magazine littéraire, « La droite. Idéologies et littérature », décembre 1992.

    2 : cité dans Thomas Molnar, La Contre-Révolution, La Table Ronde, 1981.

    3 : Thierry Maulnier, Au-delà du nationalisme, Gallimard, 1938, p. 153.

    4 : Pierre Chateau-Jobert, Manifeste politique et social, Diffusion de la pensée française, 1973.

    5 : Cf. Charles Berrias et Michel Toda, Enquête sur l’histoire, n° 6, 1992, p. 13.

    6 : Charles-Emmanuel Dufourcq, Les redressements français, Lardanchet, 1943.

    7 : François Furet, Jacques Julliard, Pierre Rosanvallon, La République du centre. La fin de l’exception française, Calmann-Lévy, 1988.

    8 : Francis-Paul Benoît, Les idéologies politiques modernes. Le temps de Hegel, P.U.F., 1980, p. 314.

    9 : cf. Histoire des droites en France, Gallimard, trois volumes, 1992.

    [Le présent article, remanié pour Europe Maxima, est paru dans Arnaud Guyot-Jeannin (sous la direction de), Aux sources de la droite, L’Âge d’Homme, 2000.]

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  • Les idées à l'endroit !...

    Avec Les idées à l'endroit, l'essai d'Alain de Benoist, les éditions Avatar rééditent un grand classique de la pensée non-conformiste. L'ouvrage, publié initialement en 1979, a été augmentée d'un avant-propos inédit. On pourra y retrouver des textes importants comme "Fondements nominalistes d'une attitude devant la vie", "Vingt-cinq principes de morale", "Une nouvelle anthropologie", "L'élite ?" ou "Contre le racisme", qui constituent des jalons dans l'évolution intellectuelle de leur auteur.

     

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    Pour une ligne de conduite décisive face à la modernité.

    Les idées à l’endroit sont parues aux éditions Libres Hallier en 1979. C’était peu de temps après la grande campagne de presse sur la Nouvelle Droite (ND) de l’été. L’auteur, Alain de Benoist, s’était trouvé au cœur de cette campagne. Il avait souhaité y répondre en essayant de dissiper bien des malentendus. Les idées à l’endroit sont pourtant beaucoup mieux qu’un livre de circonstance. Si l’auteur, dans une longue préface ici reproduite, rappelait le contexte des débats d’idées des années 1970 et le rôle que lui-même et ses amis y

    ont tenu au travers de livres, de rééditions de classiques de la pensée politique et — déjà — de la revue Eléments, le livre ouvrait des perspectives qui gardent toute leur pertinence. Trente ans après la première édition, bien entendu épuisée, il est temps de redécouvrir cet ouvrage de fond.

    Non que l’auteur n’ait évolué. Au contraire, dans sa préface de 2010, Alain de Benoist rappelle brièvement (car il l’a fait plus complètement ailleurs, notamment dans Au temps des « idéologies à la mode », dans la réédition de Vu de droite en 2001, et dans Cartouches) le chemin parcouru et les pistes abandonnées, et le pourquoi des nouvelles explorations.

    Les textes des Idées à l’endroit sont bien autre chose que des textes datés. Ils définissent des orientations, et plus encore une attitude. Que celle-ci relève ou nom du qualificatif de « nominaliste » est accessoire. C’est l’attitude même qui compte, comme le montre le texte intitulé « 25 principes de “morale’’ ». La meilleure preuve en est que c’est précisément l’attitude, ou encore la méthode, qu’Alain de Benoist définit dans ce livre qui a permis à sa pensée de poursuivre son itinéraire, de se dégager de quelques simplismes, et plus encore de sortir des ambiguïtés de la critique de l’égalitarisme pour mettre l’accent sur la dénonciation de l’« idéologie du Même ». C’est en ce sens un livre capital.

    Paru pour la première fois en 1979, Les idées à l’endroit voulaient répondre à une demande créée par l’événement, en l’occurrence la grande campagne de presse autour de la « Nouvelle Droite » qui s’est déroulée durant l’été 1979. Ce texte, qui reste de première actualité, était épuisé depuis de nombreuses années. Cette réédition, très attendue, est augmentée d’un nouvel avant-propos de l’auteur.

    Nouvelle édition augmentée d’un avant-propos inédit

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  • Par delà droite et gauche...

    « Si un jour l’imagination politique, l’exigence et la volonté politiques ont une chance de rebondir, ce ne peut-être que sur la base de l’abolition radicale de cette distinction fossile qui s’est annulée et désavouée elle-même au fil des décennies, et qui ne tient plus que par la complicité dans la corruption »

    Jean Baudrillard, De l ’exorcisme en politique ou la conjuration des imbéciles, Sens et Tonka, 1998

     

    Nous reproduisons ci-dessous un texte intéressant cueilli sur le blog de Maxime Tandonnet. Il livre une vision du clivage droite/gauche plus machiavélienne qu'idéologique.  Maxime Tandonnet est un haut-fonctionnaire, spécialiste des questions d'immigration, conseiller à l'Elysée et auteur de plusieurs essais, notamment : Le Grand bazar ou l'Europe face à l'immigration (L'Harmattan, 2001) ; Migrations, la nouvelle vague (L'Harmattan, 2003) ; Le défi de l'immigration : la vérité, les solutions (François-Xavier de Guibert, 2004) ; Migration : sortir du chaos (Flammarion, 2006) ; et Géopolitique des migrations : la crise des frontières (Ellipses, 2007).

     

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    Par delà droite et gauche

    Il n’existe pas me semble-t-il, d’idée ou de valeur, de gauche ou de droite en soi . Tout dépend des époques et des stratégies de pouvoir.

    Quelques exemples :

    -La Nation, la souveraineté nationale : aujourd’hui plutôt considérées comme des valeurs de droite, elles étaient jadis les marques distinctives des gauches européennes, contre les monarchies et les empires. La Révolution française et les révolutions européennes du XIXème siècle se sont faites au nom des Nations et ce sont les hommes de 1789 qui inscrivent la souveraineté nationale dans la Déclaration des Droits de l’homme et du citoyen.

    -La justice sociale n’était pas spécifiquement une valeur de gauche jusqu’au XXème siècle. En France, sous la Troisième République, les radicaux qui incarnent la gauche ne s’y intéressent pas, leur préoccupation essentielle étant la lutte contre le cléricalisme. Un homme comme Alexandre Millerand, marqué à gauche jusqu’au années 1910, bascule à droite en partie parce qu’il trouve la gauche trop timorée notamment sur les retraites ouvrières.

    -La colonisation a été impulsée sous la Troisième république par le centre gauche – Thiers, Jules Ferry, Freycinet, Méline – au nom de la « mission civilisatrice de la France (sic) », alors que la droite de l’époque, les monarchistes, sont dans l’ensemble défavorables à cette politique.

    -L’égalité hommes-femmes ? La gauche radicale s’est opposée tout au long de la Troisième République au vote des femmes, suspectées d’être sous l’influence des « curés ». C’est le général de Gaulle, chef du gouvernement provisoire de la République française qui l’a enfin imposé en 1944.

    -L’immigration : on a du mal à le croire mais la gauche française a longtemps été fort réservée sur le sujet, contre le patronat favorable à l’accueil d’une main d’œuvre bon marché. Dans la première moitié du XXème siècle, ce sont le Cartel des gauches dirigé par Edouard Herriot (1924) puis les gouvernements issus du Front populaire (1936-1938) qui prennent les mesures de rigueur en matière d’immigration : voir mon billet sur l’histoire de la déchéance de nationalité. Le 6 janvier 1981, l’Humanité publie une lettre de George Marchais selon laquelle : « la poursuite de l’immigration pose aujourd’hui de graves problèmes. Il faut les regarder en face et prendre rapidement les mesures indispensables. C’est pourquoi nous disons : il faut arrêter l’immigration, sous peine de jeter de nouveaux travailleurs au chômage ». Le 10 décembre 1989, le Président Mitterrand déclare: « En matière d’immigration, le seuil de tolérance a été atteint ».

    Les idéologies relèvent en grande partie des circonstances, des calculs, des intérêts de pouvoir, des postures. L’essentiel, en politique, c’est-à-dire l’organisation et la conduite de la cité, au sens noble du terme, tient à la personnalité des dirigeants plus qu’à leurs idéologies qui sont la façade, l’habillage des choses. Les paramètres qui font un homme d’Etat ne varient guère, eux, en fonction des époques. Ils restent de tout temps à peu près les mêmes : lucidité; courage; sens du bien commun; dynamisme; volontarisme; créativité; capacité de dialogue et d’écoute.

    Je devine que nombre de mes lecteurs ne partageront pas cette vision, ou alors avec des nuances, mais en tout cas la discussion est ouverte si le sujet intéresse certains d’entre eux.

    Maxime TANDONNET (Le blog de Maxime Tandonnet, 1er juin 2011)

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  • Le retour des classes populaires ?...

    Le quotidien Le Monde a publié cette semaine un point de vue du sociologue Christophe Guilluy, qui a récemment publié un essai intitulé Fractures françaises (Bourin, 2010), consacré au retour dans le paysage français des classes populaires.

     

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    Les classes populaires sont de retour en France

    En quelques décennies le Front national est devenu le porte-voix d'une part croissante des catégories populaires. Cette évolution n'est pas la résurgence d'un populisme ancien ou la conséquence d'une droitisation de l'opinion, mais il s'agit d'un processus contemporain lié à une recomposition sociologique et politique sans précédent. Le retour des classes populaires est ainsi corrélé à l'implosion de la classe moyenne tandis que la dynamique frontiste est d'abord le fruit de la fin de la bipolarisation.

    L'éclatement de la classe moyenne a libéré un nouveau "champ sociologique" qui rend de nouveau visibles les catégories populaires. Le surgissement dans le débat public de catégories, hier oubliées au profit des classes moyennes, est un indicateur essentiel de la nouvelle donne sociale.

    Si les classes moyennes avaient accompagné hier la "moyennisation" de la société française pendant la période des "trente glorieuses", plusieurs décennies de précarisation et de déclassement social favorisent aujourd'hui l'émergence de nouvelles catégories populaires. C'est dans ce contexte qu'il faut analyser la résurgence politique et culturelle des milieux populaires. Désormais, ce sont ces catégories qui reflètent avec le plus d'acuité la réalité sociale du pays. Majoritaires dans la population active, les catégories ouvriers-employés représentent aussi une majorité des retraités. Elles recouvrent ainsi un très large spectre de la sociologie française.

    Si ces nouvelles catégories populaires ne se pensent pas comme une nouvelle "classe sociale", elles subissent néanmoins les effets négatifs de la mondialisation. Ainsi, l'essentiel des chômeurs, travailleurs pauvres et/ou à temps partiel sont issus de ces milieux. Cette insécurité sociale se double d'une nouvelle insécurité culturelle liée à l'émergence d'une société multiculturelle.

    Cette double insécurité explique que des catégories populaires très diverses, et hier parfois opposées, se retrouvent dans une même perception de la réalité sociale. L'employé du lotissement pavillonnaire, l'ouvrier rural, le chômeur du bassin minier ou le petit paysan peuvent ainsi partager une même critique des choix économiques et politiques des classes dirigeantes depuis vingt ans. Tous subissent aussi les mêmes logiques foncières et l'éloignement des marchés de l'emploi les plus actifs, ceux des métropoles.

    Ces nouvelles classes populaires sont-elles de droite ? Après la disparition du "peuple de gauche" au XXe siècle, assiste-t-on à l'émergence d'un nouveau "peuple de droite" ? Rien n'est moins sûr. L'analyse par la "droitisation" occulte une donnée essentielle : la fin de la bipolarisation.

    Désormais persuadée de la vacuité du débat droite-gauche, une majorité de Français ne font plus confiance aux grands partis. En 2010, un sondage Sofres/Cevipof estimait à 67 % le nombre de français qui ne faisaient plus confiance ni à la gauche ni à la droite ; une minorité d'entre eux arrivait encore à se situer sur l'échelle gauche-droite. Ce "ni gauche ni droite", particulièrement fort en milieu populaire, n'exprime pas une vague "protestation" ni la résurgence d'un populisme ancien mais résulte d'une réalité sociale et culturelle pour partie occultée par les grands partis.

    Pire, les responsables politiques continuent à vanter les mérites d'une mondialisation heureuse, alors même que les catégories populaires subissent une précarisation objective de leurs conditions de vie. C'est dans ce contexte que l'inanité de la bipolarisation ouvre un nouveau "champ politique" au FN.

    Mais ce n'est peut-être pas le plus important. Si le FN bénéficie de la fin de la bipolarisation et de la résurgence des catégories populaires, il ne capte qu'une part minoritaire de cette majorité de Français qui ne se reconnaît plus ni à gauche ni à droite. Il existe aujourd'hui un espace considérable pour qui souhaiterait répondre à la demande de protection des classes populaires.

    Dès lors, plutôt que de se faire peur avec la montée du "populisme" ou la droitisation des opinions, il convient de prendre acte d'une bonne nouvelle, celle du retour des classes populaires dans le champ politique. Un retour qui impliquera mécaniquement une recomposition politique qu'une majorité de Français attend.

    Christophe Guilluy (Le Monde, 25 mai 2011)

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  • Un risible procès...

    "Le Front national situé très haut dans les sondages, des chroniqueurs de radio ou de télévision qui se lâchent sans tabou sur l'immigration, l'islam ou la peine de mort... La société française est-elle devenue réactionnaire ?".

    Telle est la grave question que s'est posé Le Monde dans son numéro du 30 avril 2011 en ouverture de ses deux pages de débats. Au coeur de la cible, les trois agitateurs néo-réactionnaires : Eric Zemmour, Robert Ménard et Elisabeth Lévy... Nous reproduisons ci-dessous la réponse qu'Elisabeth Lévy, auteur de l'excellent Les maîtres censeurs (Livre de poche, 2002), a pu publier dans le "grand quotidien de référence"...

     

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    Risible procès des "néo-réactionnaires" - Le peuple n'a pas toujours tort d'avoir peur

    Etonnant. Une semaine après la parution d'un sondage sacrant le Front national "premier parti ouvrier de France", personne n'a encore songé à faire porter cette casquette-là à la "bande des cinq" désignée par l'appellation "nouveaux réacs". Je parle de "bande des cinq" pour être aimable puisque c'est le chiffre que retient Le Monde au terme de son article serré sur ce passionnant phénomène ("Profession réactionnaire", Le Monde du 5 avril). Mais ni l'effectif de ce club ni l'identité de ses membres ne font consensus. En compilant les diverses listes de suspects, on parvient à une dizaine de noms (dont le mien).

    Je ne voudrais pas être discourtoise mais cette affaire de "nouveaux réacs" commence à sentir le poisson. Daniel Lindenberg avait déjà levé ce lièvre en 2002, dans un petit livre judicieusement intitulé Le Rappel à l'ordre (Seuil). Dix ans plus tard, de nouveaux "nouveaux réacs" sont donc appelés à comparaître devant le tribunal médiatique. Qu'on se rassure, personne n'exige - en tout cas ouvertement - que l'on fasse taire "cette demi-douzaine de polémistes" qui, selon Le Monde, "cumulent chacun deux, trois, quatre collaborations rémunérées dans les médias les plus importants et une multitude d'invitations gracieuses dans les talk-shows", pendant que leurs valeureux adversaires résistent bénévolement dans des caves.

    Il est vrai que ces esprits chagrins ne songent qu'à entretenir leur fonds de commerce. C'est ainsi, le bon journaliste a une pensée, le "nouveau réac" une posture. En tout cas, entre régimes amaigrissants et pouvoir des francs-macs, leur puissance médiatique est devenue un "marronnier" de saison.

    Cette querelle picrocholine révèle une curieuse conception du pluralisme. D'éminents journalistes semblent découvrir avec stupéfaction et/ou indignation que quelques trublions qui ont le front de ne pas penser comme eux ont le droit de s'exprimer. Au temps de parole, "l'omniprésence" de ces mauvais coucheurs est très relative et plutôt instable, la plupart connaissant la précarité ordinaire des soutiers de l'audiovisuel. Surtout, personne ne songerait à se plaindre que l'on entende Jean-Michel Aphatie chaque matin sur RTL et qu'on le voie chaque soir sur Canal+. Après tout, on a bien le droit de préférer le débat entre gens du même avis. Il est cependant paradoxal de célébrer la diversité en toute chose sauf dans le domaine des idées.

    L'épouvantail "néo-réac" ressort des tiroirs au moment où ceux qui savent ce qui est bon pour le peuple réalisent, paniqués, que, malgré vingt ans de prêchi-prêcha, ce peuple ingrat, notamment sa composante la plus populaire, s'obstine à voter pour un parti désigné comme antirépublicain - mais accepté, on se demande pourquoi, dans le jeu républicain. L'ennui, c'est que le peuple est bon, d'où la nécessité de s'en prendre aux mauvais génies qui, en flattant ses plus bas instincts, l'ont encouragé sur cette pente déplorable.

    Au-delà du vote FN, la "droitisation" de la société française inquiète nos grandes consciences, comme s'il était par nature bien d'être de gauche et mal d'être de droite. C'est précisément cette transformation inconsciente d'opinions, légitimes du reste, en dogmes incontestables, qui interdit toute discussion sur des sujets méritant mieux que des condamnations sommaires. Seulement, il est plus gratifiant d'ironiser sur les peurs des petits Blancs frileux que de se demander s'ils n'ont pas quelques raisons d'avoir peur. Sophia Aram, qui a trouvé spirituel de traiter les électeurs frontistes de "gros cons", n'avait pas compris "que la ligne de démarcation séparant les bonnes et les mauvaises manières d'aborder le FN avait bougé". Des bonnes et des mauvaises manières, quel formidable aveu !

    Notre société qui adore "la transgression" passe son temps à traquer les "dérapages", terme indiquant clairement que certains points de vue sont autorisés et d'autre pas. Ainsi, l'immigration est nécessairement une bénédiction. De même, tout être sain doit s'enthousiasmer pour le grand métissage planétaire que l'on nous promet comme avenir. Je crois, pour ma part, que l'afflux massif et rapide d'immigrés a eu des effets déstabilisateurs pour la société - tout en freinant l'intégration de ceux qui sont là. Et si je reste convaincue que tout individu peut devenir un "bon Français", je ne vois pas pourquoi la France devrait accepter n'importe quelle pratique, fût-elle religieuse ou culturelle.

    Le Monde en conclut que je tiens un "discours franchement anti-immigré". La différence entre la critique de certaines pratiques, l'inquiétude face aux flux migratoires et le rejet des individus serait-elle trop subtile ? La délicate question de l'islam et de son acculturation en France relève de la même jurisprudence. Avancer l'hypothèse qu'un certain islam puisse poser certains problèmes, c'est évidemment proclamer sa haine des musulmans.

    Le pire est que mes accusateurs ne sont même pas de mauvaise foi : ils entendent ce qu'ils attendent. Alors, je l'avoue, je suis parfois tentée, chers confrères, de vous laisser débattre entre vous. Mais ne rêvez pas, ça ne dure jamais très longtemps.

     

    Elisabeth Lévy, journaliste, rédactrice en chef du site et du magazine "Causeur" (Le Monde, 30 avril 2011)

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