Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Points de vue - Page 42

  • Soulèvements de la Terre, Civitas: dissolution, piège à cons...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Nicolas Lévine, cueilli sur le site de la revue Éléments et consacré à la question de la politisation de la justice notamment au travers des décisions de dissolution d'associations politiques...

     

    Dissolution.jpg

    Soulèvements de la Terre, Civitas: dissolution, piège à cons

    Il n’y a que les gens de gauche qui trouvent la France trop à droite. De même, il n’y a que les juristes de gauche qui pensent vraiment qu’on y juge « en droit ». Il est vrai que notre droit est de gauche – ou libéral, ou progressiste. La preuve par le Conseil d’État, lui qui doit statuer sur les demandes de dissolution du ministère de l’Intérieur, mais qui ne semble pas les traiter avec la même équité suivant qu’elles sont de gauche ou de droite. Ainsi les Soulèvements de la Terre seraient-ils indissolubles, alors que les soulèvements de la droite – hier Génération identitaire, demain Civitas ? – seraient quant à eux solubles. Selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements tout court vous rendront blanc ou noir.

    En France, on juge globalement « en droit », parce qu’on a quand même des codes, des articles, et que la Justice s’y réfère pour absoudre – j’emploie ce vocabulaire à dessein, car il y a quelque chose de messianique dans cette Justice humaniste, adepte de la dixième chance, enfin uniquement pour certains, avec son idéal de la réinsertion qui sonne comme une rédemption maçonne – ou condamner. Mais la loi est sujette à interprétation, et les juges français – à l’instar des européens – ne se privent pas pour interpréter dans un sens qui leur convient. Lorsque le rappeur noir – par ailleurs caché derrière un pseudonyme, ce qui a pu jouer, je le conçois – Nick Conrad chante : « Je rentre dans les crèches / Je tue des bébés blancs / Attrapez-les vite / Et pendez leurs parents », en fait un clip horrifique, le diffuse et l’assume parfaitement, la loi permet de l’envoyer au trou pour un an et de lui soutirer quarante-cinq mille euros. Ce qui n’a pas été le cas, comme on s’en doute.

    Ce n’est pas rien, de prôner l’assassinat de nourrissons, de leurs parents, et ce en vertu de la couleur de leur peau. En Occident, il n’est rien de plus grave, de pire crime-pensée que le racisme. Conrad aurait donc dû être sévèrement puni. Mais Conrad est Noir ; or, selon le progressisme, le racisme est un système de domination inventé par les Blancs pour dominer les autres races ; l’appel au meurtre lancé, sur une base raciale, par le rappeur-afro-militant ne peut donc pas être tout à fait raciste ; il relève fondamentalement d’un autre ordre : c’est un appel au secours, l’expression d’un juste désir de revanche, la « blanchité » soumise à un examen de conscience, une « métaphore »… C’est là ce que pensent la plupart des journalistes, des universitaires, des écrivains, des comédiennes, des juges, des politiques, des cadres de l’économie nouvelle, en somme les membres des élites, qui recrutent d’ailleurs dans le même milieu, qui pratiquent une endogamie stupéfiante et partagent le même fond culturel et idéologique – en clair, la bourgeoisie, ou plutôt les deux, la petite et la tout court.

    Selon que vous serez correct ou incorrect

    Pour « décrypter le monde », comme disent les journalistes – laissant donc accroire que le monde est « crypté », mais heureusement ils sont là pour le révéler aux simples mortels que nous sommes ! –, ils disposent d’une unique grille de lecture, difficile à nommer – marxisto-raciale ? libérale-diversitaire ? –, avec des « dominés » et des « dominants », des gentils colorés et des méchants blancs. C’est là le « logiciel » de la gauche, pour parler (encore) comme elle – un logiciel directement issu des Lumières, donc, mais revu par deux cinglés, Sartre et Foucault. Si Nick Conrad avait été Blanc et avait chanté « Je rentre dans les crèches / Je tue des bébés noirs / Attrapez-les vite / Et pendez leurs parents », il la prenait, son année en zonzon, et il n’aurait pas non plus échappé à l’amende de quarante-cinq mille euros.

    Pour un raciste de ce genre, on tordrait sans remords les qualifications pénales afin de le tuer socialement et économiquement. Mais en tant qu’homme noir, donc victime atavique, pluriséculaire, victime du fameux système de domination instauré par les Blancs, justement désireux de se libérer de l’esclavage mental, culturel, économique et social dans lequel il vit, Conrad a le droit d’appeler à massacrer des enfants blancs, leurs parents et le revendiquer devant un tribunal. Cela ne coûte en tout cas que six mois et cinq mille euros avec sursis (qui seront du reste annulés en appel). Il en va d’ailleurs des gauchistes comme des « dominés » de naissance : si Clément Méric avait tué Esteban Morillo et non l’inverse, il est certain que le verdict aurait été différent. (Un antifa qui tue un facho, ce n’est pas la même chose qu’un facho qui tue un antifa. Nier cela, ce serait comme comparer nazisme et communisme, alors qu’on sait très bien que le second génocidait pour le bien de l’humanité, ce qui change tout. Les dizaines de millions d’innocentes victimes du communisme étaient heureuses de mourir d’une balle dans la tête, sur un petit sentier de Pologne, de Bohême, du Vietnam, dans un goulag.) Sans doute que, outre une peine bien inférieure à celle reçue par Morillo, Méric aurait été remercié d’avoir, avec ses camarades petits-bourgeois, participé au nettoyage des rues de France, où les fachos font régner la terreur. Mais donc on juge « en droit » ?

    Le bon accueil des Soulèvements de la Terre au Conseil d’État

    L’avocat – l’un des avocats ? – des Soulèvements de la Terre n’a pas fait semblant, lui. Le 11 août sur BFM, le bonhomme, en direct en visio, est lancé par la speakerine. Que pense-t-il de la décision du Conseil d’État qui refuse la dissolution de l’association d’extrême gauche ? Normalement, il devrait dire ceci : « C’est une décision logique. Le juge administratif a, en responsabilité, estimé que les éléments du dossier ne justifiaient pas au final la dissolution de l’association. » Le droit, toujours le droit – et ce qu’il faut de novlangue, d’anglicismes et de scies. Il était tôt ; l’avocat n’était pas ivre, à priori ; et le reste de son intervention manifestait une adhésion totale à l’époque et ses codes. Alors pourquoi a-t-il répondu, le plus posément du monde, la chose suivante : « Le Conseil d’État a déjà puni plusieurs fois le gouvernement pour son inaction climatique. Logiquement, il ne pouvait donc pas dissoudre une association qui a pour but de sauver la planète. Le Conseil d’État a été cohérent. » Hein ? Cohérent en quoi ? Politiquement ? Il ne pouvait vouloir dire que cela. Oui, en effet, le Conseil d’État est, en l’espèce, cohérent politiquement. Mais de quel droit notre plus haute juridiction administrative fait-elle de la politique, ce qui n’est pas du tout sa vocation ? Elle en fait depuis longtemps, certes. C’est par exemple le Conseil d’État qui, via le célèbre arrêt GISTI de 1978, a consacré l’immigration de peuplement – ce sont donc des juges, des fonctionnaires non élus et irresponsables, qui ont réinitialisé le paradigme civilisationnel dans lequel la France se déployait depuis quinze siècles. Nous nous sommes habitués à une inflation jurisprudentielle, systématiquement orientée politiquement, du reste raccord, dans le cas de l’ordre judiciaire, avec le gauchisme et le socialisme hégémoniques à l’École nationale de la magistrature – pour s’en convaincre, en plus des débats et des peines, on peut s’amuser à lire les productions « scientifiques » des élèves de l’école, évidemment tous obsédés par le social, le sexisme, le genre, les violences-faites-aux-femmes, les discriminations, les-violences-policières. Les juridictions administratives ne sont pas en reste qui mettent juridiquement en œuvre, avec le même zèle, le programme progressiste.

    Maman-Gaïa et Migrant-Rédempteur

    Selon ce dernier, il n’est rien de plus important que « l’urgence climatique ». Chaque jour, le JT le répète : « La jeunesse se mobilise pour la planète », « La crise écologique est l’affaire de tous », « Encore une preuve du dérèglement climatique ». Chaque jour un reportage nous montre les conséquences de la hausse du niveau des océans sur l’activité des pêcheurs de Zanzibar. Le climat, c’est limite, juste après l’indétrônable « pouvoir d’achat », qui est lui hors classement, la-première-préoccupation-des-Français. L’« enjeu de civilisation », et même l’enjeu tout court, c’est ça. Fondamentalement ésotérique, la gauche a trouvé dans l’écologie une nouvelle prophétie. Dans son culte dualiste, la protection de Maman-Gaïa va de pair avec celle du Migrant-Rédempteur : un jour, l’homme nouveau métis pourra gambader sur une Planète rendue à la Nature et libérée du Corrupteur-Blanc – cependant, il pourra toujours se rendre dans une clinique pour changer de sexe – pas plus que des autres la gauche n’a peur de cette insurmontable contradiction entre idéalisation puérile et mépris absolu de la nature, une nature bonne en soi, sauf quand elle concerne l’homme. Ce n’est pas « la » jeunesse, mais une certaine, la bourgeoise des métropoles d’Occident, qui manifeste « pour sauver la planète ». Peu importe : c’est la bourgeoisie qui décide du programme. Le climat est donc la grande et unique mission de notre génération et des générations à venir. Y’a-pas-débat. C’est là ce qui autorise l’avocat à avouer aussi benoîtement. En plus, sur BFM, on est entre nous, entre convaincus de l’« urgence climatique » ; on pense dans l’ordre des items proposés par les instituts de sondage ; on sait qu’on ne sera pas contredit sur le fond.

    Et d’ailleurs, la speakerine ne reprend pas l’avocat après sa saillie. La même speakerine, ou l’un de ses clones sévissant sur la pire chaîne de télé de France, qui dégaine sans relâche, quand la causalité y oblige mais que l’idéologie veut absolument le cacher, de chafouins « Vous faites de la politique ». Lola, les « attentats » : il ne faut pas « faire de la politique ». Les droits des minorités, la lutte pour le climat : là tout est politique, même si c’est un politique qui se confond entièrement avec la morale – la gauche est religieuse, disais-je. Il y a en somme, plus que jamais, plus qu’à n’importe quelle époque hormis peut-être les années 30 – et encore ! au moins les idéologies s’y affrontaient, en France le royalisme n’était pas tout à fait mort, c’était infiniment plus fun qu’aujourd’hui où le progressisme domine intégralement les élites, alors qu’elles étaient encore heureusement divisées durant l’entre-deux-guerres – le problème ce n’est pas les élites, il en faut, les nôtres firent d’immenses choses ; le problème c’est qu’elles soient désormais apatrides, que plus rien ne les lie à la France, qu’elles méprisent ses habitants autochtones plus sûrement que les aristocrates snobaient leurs gens en 1788 – il y a plus que jamais, disais-je, l’idéologie.

    Darmanin ou l’art de dissoudre des associations

    L’air satisfait des journalistes, sur BFM et ailleurs, en annonçant la décision du Conseil d’État trahissait le contentement de tout un système. Elle leur permettait en plus, au cœur de l’été, où ils n’ont habituellement que des incendies de forêt, le prix du steak frites en terrasse sur le bassin d’Arcachon et bien sûr les salvateurs conseils pour résister à la canicule – leur monde n’est qu’une suite de messages de prévention – à se mettre sous la dent, de titiller Gérald Darmanin, l’un des meilleurs « clients » de cette Macronie où les personnalités ne brillent guère. Dans l’imaginaire de la gauche – qui est d’abord un imaginaire –, Darmanin occupe la même place que Sarkozy autrefois. Dans sa lutte éternelle contre le nazisme, la gauche voit en lui un énième avatar de la Réaction, l’homme providentiel espéré par les cons qui n’ont rien compris à l’émancipation de l’individu dans un monde enfin débarrassé de ses frontières, évidemment artificielles, et qui empêchent les humains de vivre ensemble, heureux, en paix, ce à quoi ils aspirent évidemment. Darmanin, c’est le drapeau, l’ordre, l’autorité. Que sa dureté, comme celle de Sarkozy, ne soit que de mots, n’y change rien ; non seulement par hypocrisie, qui est chez elle une seconde nature, mais aussi parce que la gauche pense vraiment que « les mots tuent » ; pour elle, ils le font même plus sûrement que ce supposé « réel » qui plaît tant aux réacs et avec lequel la gauche est – même la marxiste, la « scientifique », parfaitement gnostique en vérité, en tout cas basée, comme le libéralisme dont elle procède, sur des postulats complétement faux sur la nature humaine – irrévocablement fâchée.

    Ministère de l’Intérieur au moment où la violence dite du quotidien explose, dix fois humilié dans le dossier des OQTF où les États des pays d’origine des clandestins l’ont baladé, confronté à une fronde systémique des policiers qui voient clair dans son jeu, il y a au moins une chose que Darmanin sait faire, en général : dissoudre des associations. Dans la frêle dynamique de l’oiseuse loi contre le séparatisme, il s’est enfin attaqué à des associations islamistes, parfois déguisées en ONG ; il s’en est pris à quelques figures de la mouvance, à l’instar bien sûr de l’imam Iquioussen – qui l’a bien eu, d’ailleurs, avec le soutien de la justice belge, de la couronne marocaine et, en partie, de notre justice administrative.

    Mais à chaque fois que Darmanin dissout une association islamiste, il se croit obligé de dissoudre également une association patriotique. Le nom de la loi annonçait la couleur, cela dit : outre qu’il vise à cacher le mot islam, le terme « séparatisme » traduit l’idée que nos élites se font des « radicalismes », qu’elles hiérarchisent ; et en vérité, pour un libéral et a fortiori un socialiste et un gauchiste, l’intégriste autochtone est plus dangereux que le salafiste exogène, le type qui veut juste prier en latin que celui qui prépare un massacre de masse, un fascisme imaginaire qu’un fascisme bien réel. Ainsi, Génération identitaire avait été dissoute en même temps que BarakaCity, dans une évidente logique de compensation. Car non seulement la Macronie doit satisfaire son aile gauche, mais elle est de gauche – il faut donc compenser sévère.

    Hyper-tolérance pour l’extrême gauche

    Ces dernières années, d’autres groupuscules identitaires, locaux, ont subi le même sort ; il est vrai que ce fut également le cas de quelques groupes antifas. On observera que le traitement médiatique diffère selon l’objet à dissoudre ; la dissolution d’une assos islamiste, même wahhabite assumée, provoquera une « polémique » ; il n’en ira pas de même de la dissolution d’un groupe de patriotes, dont la disparition sera seulement accompagnée, sur les plateaux, de formules définitives sur le péril fasciste distillées par des experts en extrême droite militant à l’extrême gauche – ce qui est un bon gage d’objectivité. Génération identitaire a été dissoute pour quelques feuilles jetées en l’air au siège marseillais de l’association d’ultragauche SOS Méditerranée, qui encourage des étrangers à violer les lois européennes et les viole elle-même, et des vidéos qui prouvaient que la frontière entre la France et l’Italie était une passoire. L’association refusait la violence. Son agit-prop était propre, et en plus très pro. Elle a été dissoute en cinq minutes. Il y a de cela quelques mois, des membres des Soulèvements de la Terre ont mené et même filmé l’attaque d’une usine de Lafarge, brûlant pour plus de quatre millions d’euros de matériel, affaire d’ailleurs traitée par les services antiterroristes – les journalistes semblent avoir omis ce fait, dont ils n’ont absolument pas parlé. L’association appelle à la violence, au moins contre les biens ; elle mène ou s’agrège à des manifestations interdites, comme celle de Sainte-Soline, où des dizaines de gendarmes ont été blessés ; son caractère séparatiste et même insurrectionnel ne fait aucun doute, tant ce qu’elle dit que ce qu’elle fait justifiait sa dissolution. Le Conseil d’État a en jugé autrement. Que le dossier présenté par le cabinet de Darmanin soit solide ou non, c’est d’abord au tamis idéologique qu’il est passé, et qu’il a logiquement perdu – comme perdent systématiquement toutes les maigres tentatives de durcir le droit des étrangers.

    Pas de civilité pour Civitas

    Compensation, toujours : tandis que le Conseil d’État examinait le dossier des Soulèvements de la Terre, Darmanin a annoncé, pour satisfaire une gauche évidemment indignée par la procédure engagée contre ces sympathiques amoureux de la planète, tous ces Jean-Eudes, Charlotte et Stan sortis d’un cauchemar de Papacito, la dissolution de Civitas. Association catholique, de droite dure, tendance tradi et donc éloignée d’une Église dominée par le gauchisme, Civitas s’est manifestée aux yeux du grand public – et des journalistes, qui ne s’intéressent à rien – lors du vote de l’Assemblée socialiste en faveur du mariage gay. Conséquente – contrairement à tant de catholiques dits de gauche, qui sont surtout de gauche –, l’association s’est opposée et continue de s’opposer farouchement à la PMA et à la GPA, et elle est clairement moins enthousiaste que l’antipape François vis-à-vis de l’immigration de masse extra-européenne. Civitas ne prône pas la violence, ne mène pas d’actions violentes.

    Récemment, lors de quelque colloque, Civitas a invité Pierre Hillard, géopolitologue promu par Égalité et Réconciliation. Durant son intervention – telle qu’elle a été rapportée par une presse évidemment hostile par principe –, Hillard a commenté la naturalisation des Juifs sous la Révolution, a dit voir en elle la matrice de l’immigrationnisme et s’est demandé s’il ne faudrait pas revenir sur ce principe. Niveau antisémitisme, on a fait cent fois pire. Comme tous les auteurs qui gravitent autour de Soral, Hillard a une fâcheuse tendance à analyser toute l’histoire avec le Talmud à la main. Comme le brillant Julien Rochedy l’avait expliqué à un autre essayiste soralien, Youssef Hindi, l’obsession soralienne pour les Juifs est d’abord et surtout bête ; prenant l’exemple de l’origine de la Révolution française, Rochedy opposait les tenants du complot maçonnique à Taine, en somme ceux qui croient en une cause unique et ceux qui savent que, bien sûr, il y a toujours plusieurs causes – et Taine le prouve génialement. Oui, les événements sont toujours multifactoriels ; et j’ajoute que rien, dans la vie des idées, n’arrive par hasard, spontanément, y compris le progressisme, qui correspond en premier lieu, comme l’a démontré Christopher Lasch, à une mutation de la bourgeoisie occidentale, sa sortie du corps social – comme l’aristocratie en était sortie au moment de la Révolution, ce qui l’explique en partie.

    Inviter Hillard est une drôle d’idée ; du reste, on ne voit pas ce qui, dans ses propos, choque tant – il n’a pas dit qu’il fallait déchoir les Juifs de leur nationalité française –, et puis les excès de la liberté sont toujours préférables à ceux de la censure. Aidé comme d’habitude par les mouchards LFI qui traquent sans relâche, avec l’enthousiasme de scouts commissaires politiques, les « dérapages » sur les réseaux sociaux, qui réclament sans cesse la dissolution de mouvements patriotiques quand ce n’est pas carrément celle du RN, Darmanin a immédiatement sauté sur l’affaire. Se débarrasser de l’une des principales associations authentiquement catholiques, d’un opposant constant aux délires transhumanistes et sociétaux : le Iago de Tourcoing ne pouvait laisser passer cette occasion. Sevrée de « polémiques » sur les tampons hygiéniques, les toilettes non-genrées et le changement de sexe à huit ans, la gauche accepte volontiers ce cadeau, qui l’autorise à faire des heures d’antenne et des pages et des pages sur l’intégrisme catholique, si présent, si oppressant, toujours capable de déclencher sur une nouvelle Saint-Barthélemy dans le Marais et à Sevran. Si le dossier contre Civitas est centré sur Hillard, il me semble bien léger ; et je ne vois pas ce qui, dans ses prises de position et actions passées, justifierait la dissolution de l’association ; mais on peut quand même parier que, pour elle, le Conseil d’État ne s’opposera pas.

    Une justice politique

    Chaque semaine, des associations islamistes accueillent – ou tentent d’accueillir – des prédicateurs imperméables aux « valeurs de la République ». Darmanin n’engage pas leur dissolution. Il laisse également tranquille, outre SOS Méditerranée qui accomplit un rôle de passeur, d’associé de trafiquants d’êtres humains, toutes les associations pro-clandestins qui – je le répète, car la chose semble ne choquer que moi – violent et appellent les clandestins à violer les lois et ce, en toute décontraction – imagine-t-on une association, subventionnée en grande partie par de l’argent public, appelant à ne pas payer les impôts ou promouvant la haine raciale ? Quid d’Utopia 56, qui a installé, sous des tentes, des clandestins sur les places de la République et du Palais-Royal, paye les procédures administratives des clandestins et, dans la lignée du GISTI toujours très actif, mène une guérilla juridique de chaque instant contre l’État ?

    Formidablement ambitieux, Darmanin se sert de la dissolution d’association pour nourrir sa com’. Donner aux boomers centristes l’impression de frapper les « radicalismes », ça doit rapporter. C’est son calcul pour 2027. Mais, entre les mains de cet énième Machiavel et sous la pression permanente de la gauche, cette procédure est aussi un outil au service d’une répression idéologique qui s’acharne encore plus durement sur ceux qui veulent sauver leur culture que sur ceux qui veulent la détruire. Et la Justice, sur la même ligne, vient consacrer ce titanesque renversement de civilisation auquel le droit a déjà collaboré de façon décisive. En somme, il s’agit d’une justice politique.

    Nicolas Lévine (Site de la revue Éléments, 21 août 2023)

     

    Lien permanent Catégories : Points de vue 0 commentaire Pin it!
  • Les différences de QI entre populations sont-elles génétiques ?...

    Vous pouvez découvrir ci-dessous une vidéo de Nicolas Faure consacrée aux différences de QI entre les populations. Animateur sur sa chaîne Youtube de l'émission Nouvelle vague, il est proche des positions d'une droite occidentaliste et prométhéenne qui s'exprime notamment sur le site Rage...

     

                                             

    Lien permanent Catégories : Multimédia, Points de vue 0 commentaire Pin it!
  • Les émeutes à la lumière de Nietzsche : le nihilisme des « hors-sol »...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Pierre Le Vigan consacré au nihilisme des émeutiers qui ont sévi dans notre pays au début du mois de juillet.

    Urbaniste, collaborateur des revues Eléments, Krisis et Perspectives libres, Pierre Le Vigan a notamment publié Inventaire de la modernité avant liquidation (Avatar, 2007), Le Front du Cachalot (Dualpha, 2009), La banlieue contre la ville (La Barque d'Or, 2011), Écrire contre la modernité (La Barque d'Or, 2012), Soudain la postmodernité (La Barque d'or, 2015), Achever le nihilisme (Sigest, 2019), Nietzsche et l'Europe (Perspectives libres, 2022) et La planète des philosophes (Dualpha, 2023).

    Emeutes_Nihilisme.jpg

    Les émeutes à la lumière de Nietzsche : le nihilisme des « hors-sol »

    D’une manière générale, la jeunesse veut la vie, c’est pourquoi elle peut aussi bien être héroïque que mettre son énergie au service de ce qu’il y a de plus médiocre. Dans notre époque, où l’horizon proposé n’est plus la grandeur d’un pays, ni les cimes du dépassement de soi, où les classes dirigeantes ne se cachent pas pour exprimer leur mépris du peuple, une certaine jeunesse se tourne vers le consumérisme et la médiocrité d’une société marchande sans culture. Les mariages dans certains milieux communautaires sont caractéristiques : locations de voitures de luxe, conduite sauvage, occupation physique et sonore du domaine public, drapeaux étrangers, mépris affiché pour les classes laborieuses, elles-mêmes pourtant en bonne partie immigrées. En un mot : appropriation du territoire et démonstration de force. Goût de la spectacularisation et consumérisme forcené. Le pire de l’Occident. Les pires des malchances pour la France.

    « Un nihiliste, disait Nietzsche, est un homme qui juge que le monde tel qu’il est ne devrait pas exister, et que le monde tel qu’il devrait être n’existe pas » (Fragments posthumes, 1887, IX, 60). Pour les émeutiers et casseurs, le monde tel qu’il est leur convient. La loi de la jungle est leur loi et leur convient. C’est aussi la loi de l’argent, par quoi ils sont jumeaux de l’oligarchie d’en haut, à laquelle mille liens les rattachent, dont la même vue du monde, une vue postnationale avec l’argent comme seul étalon de référence. Certains gagnent de l’argent avec de la drogue non autorisée, d’autres avec des spéculations financières autorisées ou de faux vaccins autorisés. La différence est de forme et de style. Mais ce que veulent détruire les casseurs nihilistes, c’est ce qui résiste encore à la marchandisation du monde. Ce sont les services publics. Ce sont les vestiges d’une France qui fut assimilatrice (mais quand les immigrés étaient dix fois moins nombreux et ne pouvaient venir sans travailler) et dont ils ne veulent plus.

    Le désert des émeutiers

    Une partie de cette jeunesse se caractérise par un mélange de sadisme, d’infantilisme et d’ivresse de toute-puissance. La volonté de puissance devient une volonté de détruire. « La vie est à mes yeux instinct de croissance, de durée, d’accumulation de forces, de puissance : là où la volonté de puissance fait défaut, il y a déclin », dit encore Nietzsche dans L’Antéchrist. Un instinct de croissance, mais de quoi ? Il s’agit pour les émeutiers de faire croître le désert. Le désert du rien, le désert de toutes les institutions, par destruction des écoles, des gymnases, des médiathèques. Le désert des bédouins. Seules les institutions communautaires en réchappent : les mosquées ne brûlent pas. Et si les émeutiers brûlent plus volontiers les écoles que les églises, c’est que, bien que fort peu cultivés, ils ont compris que l’État français laïque se contrefiche de la destruction des églises (voire s’en réjouit. Belle occasion de les transformer en musée, en office de tourisme, en lieu de création culturelle « inclusive » !), mais pas de celle des écoles.

    Qui bascule dans le nihilisme ? Une certaine jeunesse, en majorité issue de l’immigration, qui est surtout celle qui vient des pays les plus dépourvus de culture nationale (États artificiels issus de la colonisation plutôt qu’originaires de vieux pays comme l’Égypte, la Turquie, l’Inde, la Chine, etc.). Plus on est dans le doute sur son identité, plus on ressent la fragilité de celle-ci (fragile ne veut pourtant pas dire médiocre), plus on est dans le ressentiment, « le plus contagieux des sentiments » (François Bousquet). Plus on est, aussi, dans la destruction. Une certaine jeunesse ne se sent pas chez elle, ici, et elle hait le pays d’accueil qu’est la France, qui offre pourtant (trop) généreusement sa nationalité et de toute façon a effacé toutes les frontières entre citoyens et non citoyens. Mais la générosité par faiblesse ne vaut rien. Plus la conscience est fausse conscience, plus la haine est forte. Ceux qui ont tous fait pour venir en France alors qu’ils ont tout fait pour chasser les Français de chez eux sont ceux qui la haïssent le plus : sans cette haine, ils se rendraient compte qu’ils sont dans une position de schizophrènes, consistant à vouloir vivre absolument dans un pays qu’ils haïssent. Et consistant à se réclamer d’un pays qu’ils ont fui parce qu’il n’y avait pas d’avenir dans celui-ci. Le choix de ces gens dans une situation folle est simple : soit la haine de la France, soit la haine de soi.

    La haine de la France

    Une certaine jeunesse n’est pas la majorité de la jeunesse de banlieue, ni de la jeunesse immigrée, majorité qui travaille ou étudie et est rendue invisible par les casseurs et agresseurs de gens paisibles, comme le rappelle Christophe Guilluy dans un entretien à Marianne (6 juillet 2023). Mais il y a une fraction de la jeunesse qui déteste la France, et y est encouragée par les rappeurs et autres « artistes » financés et promus par l’oligarchie. Cette fraction de jeunesse est une minorité, mais pas une infime minorité. Restera-t-elle une minorité, ou deviendra-t-elle majoritaire, l’impunité des jeunes mineurs, notamment, faisant basculer la majorité de la jeunesse issue de l’immigration vers la délinquance et le saccage ? C’est l’un des aspects de la question. C’est pourtant de la population immigrée que viennent les condamnations les plus nettes de cette violence, dont elle est la première victime, car ce ne sont pas les quartiers de Neuilly-Auteuil-Passy qui sont dévastés (encore qu’ils soient parfois marginalement touchés). Un paradoxe que cette condamnation des émeutes non par les bobos parisiens, ancrés dans la « culture de l’excuse », mais par les immigrés d’un certain âge ? Non, c’est une contradiction culturelle. Les gens issus d’une culture traditionnelle sont les plus offusqués par des émeutes et destructions gratuites. Les jeunes sans culture représentent une génération perdue, sans autre valeur que l’argent, et l’argent facile, celui de la drogue. Qu’il amène une partie de leur famille à jouir de cet argent facile, cela ne fait pas de doute, et c’est pourquoi, comme le dit justement Gabrielle Cluzel, les parents devraient être tenus responsables sur leurs deniers des dégradations faites par leurs enfants mineurs. Encore faudrait-il au moins qu’il n’y ait pas la possibilité d’une grève des greffiers à un moment aussi crucial que celui que nous vivons !

    Haine de la France : c’est bien de cela qu’il s’agit. Un banlieusard, 40 ans, origine maghrébine, dit à son voisin dans un autobus : « Ce n’est pas le Coran qui est en question, c’est la haine de la France. » Bien vu. Ces jeunes n’ont pas lu le Coran. Ils ne connaissent rien non plus à la France. Rien non plus de leur pays d’origine, sauf, parfois, la propagande débile de leur gouvernement, se défaussant de sa corruption et de son incapacité sur un soi-disant « héritage colonial », plus de soixante ans plus tard ! À cette jeunesse, on ne dit rien de fort. On lui parle de la « république », sans même préciser la République française.

    Ce que cette jeunesse déteste, c’est la France et tout ce qui la représente, les mairies, les commissariats, les pompiers, y compris les équipements construits pour eux, les centres sociaux, les équipements sportifs, etc. S’il y a une France qu’une certaine jeunesse trouve méprisable,  c’est bien celle qui ne s’affirme pas comme France, mais comme « pays des droits de l’homme » et « pays de la laïcité ». La négation officielle de la violence comme fait anthropologique inévitable à canaliser mais non à supprimer, le fait que plus d’émeutes se traduisent toujours par plus de subventions et de déclarations d’amour à ces « jeunes en souffrance » (sic) et autres « petits anges »  fait que la violence devient hystérique. On parlera à juste titre, avec Léon Bloy, de « mendiants ingrats ». Faut-il s’en étonner ? Le misérabilisme n’entraîne que le mépris. « C’est la société, notre société policée, médiocre, castrée, qui, fatalement, fait dégénérer en criminel un homme proche de la nature, venu des montagnes, ou des aventures en mer. Ou plutôt, presque fatalement : car il est des cas où un tel homme se révèle plus fort que la société », disait Nietzsche (Crépuscule des idoles, « Divagation d’un inactuel », 45). Et de fait, ces jeunes, qui ne viennent plus des montagnes mais des zones de trafic de drogues, imposent leur loi à la société. Car s’il y a nihilisme destructeur, il y a aussi l’expression d’un rapport de force, et quand l’affaire prend des proportions excessives, l’ordre est ramené dans les quartiers par les caïds (ceux qui détiennent les armes, les moyens pour acheter les mortiers d’artifice, etc.), de façon à ce que le trafic reprenne « normalement », si on peut dire. Le caïdat n’a pas d’intérêt à chercher l’affrontement avec un pouvoir qui tolère parfaitement le trafic. Celui-ci permet de payer les loyers, et il empêche tout mouvement social face au chômage de masse et aux emplois précaires, chômage qui serait accru si un certain nombre de gens ne vivaient pas du trafic de drogue. Cet anesthésiant social et psychologique fait très bien les affaires de l’oligarchie qui, pour partie, est en outre dans sa bonne clientèle.

    Les nomades qui mettent en coupe réglée les sédentaires

    Reste qu’il y a des émeutes malgré cet anesthésiant. Pourquoi ? Parce qu’une société médiocre ne fait plus peur. Elle devient l’enjeu d’un défi qui lui est lancé par cette jeunesse. Parce qu’il est régulièrement nécessaire aux bandes de rappeler que ce sont elles, et non l’État, qui fait la loi en banlieue, les émeutes sont ainsi l’expression d’un rapport de force que l’on veut imposer, et non une révolte sincère devant un décès dramatique. Car la mort ne révolte pas les jeunes : s’il y a des victimes de bavures policières – et assurément, l’enquête devrait être menée par une autorité totalement indépendante –, il y a beaucoup plus de victimes de la violence des bandes de jeunes parmi d’innocents voisins : passants écrasés en traversant la rue par un conducteur sans permis ou fuyant les forces de l’ordre,  victimes de fusillade ayant eu le seul tort d’être présent au mauvais endroit et au mauvais moment, etc. Plus encore, les affrontements entre « jeunes » (et moins jeunes) à propos de dettes de trafic ou de conflits de territoire font beaucoup plus de morts que les fameuses bavures policières. Il n’y a de pire conflit de territoires qu’entre les hors sol. Chassez la nature, elle revient au galop ! L’homme a un instinct territorial. Et quand on ne connaît pas grand-chose à l’histoire, il ne reste que les bagarres au couteau entre bandes de Maisons-Alfort contre celle d’Alfortville. Un conflit de civilisation, cela ? Pourquoi pas une querelle théologique tant que vous y êtes ! Laissez-moi rire.  

    Si la faiblesse de l’État, et celle de la justice, appelle au rapport de forces contre l’État, rien ne serait possible sans un climat, sans un état d’esprit métapolitique, qui est le nôtre. C’est l’ethno-masochisme qui nous gouverne. C’est la haine de soi sous la forme de la haine de notre nation qui est devenue la doctrine officielle de la post-gauche wokiste (la « droite » des Pécresse et autre Copé ou Darmanin n’étant qu’une gauche un peu en retard). Cette idéologie est la suite logique de l’égalitarisme. Car ce dernier n’est pas seulement l’égalité des chances. Il est l’égalité de nature de tous les hommes. Il est l’identité de nature. Pour être sûr qu’il y a égalité, le plus simple n’est-il pas qu’il y ait identité ? Voulons-nous vraiment l’égalité entre hommes et femmes ? Affirmons, pour être certain de l’atteindre, que les hommes et les femmes, c’est la même chose !

    « La doctrine de l’égalité ! Mais c’est qu’il n’y a pas de poison plus toxique : car elle semble prêchée par la justice même, alors qu’elle est la fin de toute justice… Aux égaux, traitement égal, aux inégaux, traitement inégal : telle serait la vraie devise de la justice. Et ce qui en découle : ‘’Ne jamais égaliser ce qui est inégal’’ », écrit Nietzsche (Crépuscule des idoles, 48). Mais qui peut croire que les émeutiers casseurs veulent vraiment l’égalité. Ils ne rêvent que de domination. « Niquer la France » : c’est un mot d’ordre de prédateur et de violeur.  Ils veulent dominer. Ils veulent être les nouveaux caïds. Ils sont les nomades qui mettent en coupe réglée les sédentaires. Les Anywheres contre les Somewheres (David Goodhart). Les casseurs qui ne veulent comme socle social qu’une connexion internet contre les gens de quelque part qui veulent la sécurité culturelle et deviennent populistes contre des élites qui les privent de celle-ci.

    Une guerre contre la civilisation

    Les « hors la loi » (HLL) sont ceux qui rançonnent ceux qui travaillent légalement (et qui peuvent, bien entendu, avoir, ou pas, les mêmes origines ethniques). Et comme les sédentaires et les travailleurs sont des hommes de la transmission, y compris celle des savoir-faire professionnels, les nouveaux barbares veulent la fin de toutes les transmissions.  Moins qu’une guerre de civilisation, c’est une guerre contre la civilisation qui est la leur. Et qui est donc la nôtre puisqu’ils ont désigné la France comme ennemi. Refusant l’histoire, le passé, ne lisant pas (sauf les notices des explosifs), ces jeunes vivent dans ce que Karl Heinz Bohrer appelait « un présent absolu ».  C’est un présent qui n’actualise ni le passé ni le futur – le contraire du présent chez Giorgio Locchi. Pour faire sortir cette jeunesse de ce « présent absolu », il faudrait que la France redevienne une terre et un peuple, et remette au premier plan le récit d’une transmission. Bernanos écrit à propos d’une époque qui annonçait les désastres moraux de la nôtre : « Non seulement ce malheureux pays n’avait plus de substance grise, mais la tumeur s’était si parfaitement substituée à l’organe qu’elle avait détruit, que la France ne semblait pas s’apercevoir du changement, et pensait avec son cancer ! » (La grande peur des bien-pensants).

    Pour renouer avec un récit français, il faudrait pour cela sortir d’une définition universaliste de la France. Chaque territoire est une voie d’accès à l’universel, mais précisément, il faut en passer par un territoire et une culture singulière. Comme le note Alain de Benoist, « il n’y a pas d’accès à l’universel sans médiation ». Nous ne sommes pas loin de l’idée que développait Hegel, comme quoi le concret est toujours supérieur à l’abstrait. Or, le concret, c’est notamment le charnel, le matériel au sens de ce qui a uns substance physique, ce qui se touche, et non pas l’abstraction de mots d’ordre comme « pays des droits de l’homme », « progrès », « vocation universelle de la France », qui est la version moderne de la « fille aînée de l’Église », et autres calembredaines, etc. Aimer une terre, c’est être capable de trouver, à partir d’elle, un horizon, être capable de définir un but à sa vie, de tracer un sillon, et de s’y tenir. La vita activa dont parle Hannah Arendt, c’est ce rapport à la terre, qui inclut à la fois le travail, l’œuvre, l’action. À la fois la peine des hommes, le dur labeur, et la création (l’œuvre), et la participation à la vie publique, communale d’abord, locale, nationale ensuite. Cette vie active nécessite de se reconnaitre dans plusieurs cercles d’appartenance. Elle nécessite la territorialisation de nos vies. Mais une certaine jeunesse peut-elle aimer la terre de France ? Sa place est là où est son cœur. Et si le cœur de cette jeunesse n’est pas en France, nous n’y pouvons rien.  Si ce n’est en tirer des conclusions. Par exemple en termes de déchéance de nationalité pour ceux, nombreux, qui sont Français par les papiers et ne se sentent visiblement pas Français.

    Pierre Le Vigan (Site de la revue Éléments, 18 juillet 2023)

    Lien permanent Catégories : Points de vue 0 commentaire Pin it!
  • Le risque du despotisme démocratique...

    Vous pouvez découvrir ci-dessous une nouvelle vidéo d'Ego Non dans laquelle il évoque la menace du despotisme démocratique au travers de l’œuvre d'Alexis de Tocqueville, De la démocratie en Amérique.

     

                               

     

    Lien permanent Catégories : Multimédia, Points de vue 0 commentaire Pin it!
  • Néo-vacanciers : de si gentils robots...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de David Cesena cueilli sur le site de la revue Éléments et consacré aux néo-vacanciers de la société liquide...

     

    Vacanciers.jpg

     

    Néo-vacanciers : de si gentils robots

    Ils sourient hagards. C’est l’été. Les voilà prêts à quitter La Défense pour s’égailler à Ibiza, Los Angeles ou Bodrum. Peu importe la destination, pourvu qu’ils aient l’ivresse du voyage. Oh, rien de très dépaysant, ils comptent bien retrouver les mêmes chaînes de magasins, les mêmes cocktails et les mêmes séries dans ce qui leur tient lieu d’imagination. 

    Ont-ils déjà posé les pieds dans nos ghettos ethniques ? De toute manière, Kevin et Mateo épousent le sabir d’Ahmed. Leur lingua franca a écrabouillé tous les adverbes pour en recracher un gloubi-boulga réduit à sa plus simple expression. Faut-il en rire ou en pleurer, à l’heure où la queer theory triomphe, ils n’ont plus que le mot genre à la bouche. « Genre, tu vois genre, j’ai trop kiffé genre ». Une syntaxe schtroumpfement riche ! L’adjectif stylé se greffe sur le beau, le bien et le juste. « Trop stylé, genre ! ». 

    Dès L’abîme se repeuple (1997), Jaime Semprun dénonçait la déréliction du langage propre aux sociétés industrielles avancées. Nous n’en sommes plus là. Car de langage, il n’y a plus. Les mots, ou leurs substituts, sortent comme des sabres des gueules de ces fakirs involontaires. Des sentiments ou des pensées abstraites les font paniquer. Ils n’ont plus les mots, les choses, ni les esprits pour les concevoir. Un bégaiement trahit parfois leur désarroi… de courte durée. Heureusement, leur conscience s’est endormie avec leur âme.

    Le néant consumériste

    Si le monde entier est devenu un aéroport, comme Michel Houellebecq le prophétisait dans Plateforme, ils en sont les voyageurs sans bagage. Salariés du tertiaire, ils jouissent d’un pouvoir d’achat à réinjecter dans l’industrie des loisirs. Aussi longtemps que l’Intelligence artificielle ne les aura pas remplacés. En attendant cette apocalypse programmée, ils tuent le temps sur les réseaux sociaux, suivent des influenceuses, se photographient devant des spritz et gomment leurs défauts grâce aux filtres magiques de la Toile.

    Leurs parents ne leur ont rien légué ou si peu. Quelques souvenirs. Du numéraire. Tout autant que les classiques, la littérature et le cinéma populaire français leur sont étrangers. Molière, Fernand Raynaud ou Le Splendid, connais pas. Renoir père ou fils, même combat perdu d’avance. Y a-t-il eu seulement une vie avant Facebook ?

    Qui sont ces enfants de personne, suivant l’expression qu’avait trouvée Jacques de Guillebon du temps de sa jeunesse perdue ? Des cadres inférieurs, supérieurs ou moyens, suivant leur ancienneté et leur degré de progression dans l’organisation. Ils ont entre 25 et 45 ans. Netflix supplée à leur imagination. Uber Eats à leur alimentation. Amazon Prime à leur divertissement. 

    Du monde, ils n’ont connu qu’un Occident cramoisi par la paix perpétuelle. Les attentats islamistes n’auront eu raison de leur pacifisme. Ces robots faits hommes sont si ingénus qu’ils croient leurs congénères solubles dans le consumérisme pacificateur. Par principe, ils se disent écologistes, antiracistes et bienveillants.

    De Mickey à Barbie

    Ne vous risquez pas au second degré avec ces internautes-nés. Ils n’entendent rien aux vannes acides de Pierre Desproges sur le cancer ou le racisme. Ils croiraient raciste le sketch de Guy Bedos et Sophie Daumier sur les vacances au Maroc. Vous qui entrez ici avez aboli toute ironie…

    Toute négativité a quitté leur univers. S’y insinuent bien quelques maladies, des crises, voire la mort avec sa grande faux qu’il convient d’expulser en Ehpad. En transhumanistes à petit pied, ils se croient immortels. Rien ne les angoisse comme la mort, dont ils taisent jusqu’au nom. Un mauvais esprit se demanderait pourquoi ils tiennent tant à survivre. L’immortalité, pour quoi faire ? Ils sont ce qu’ils possèdent, c’est-à-dire un compte en banque convertible en marchandises. Nous vivons au milieu des holothuries, ces gentils concombres de mer qui se contentent d’une bouche et d’un anus pour ingérer puis déféquer.

    Il faudra vous y faire : nos congénères sont innocents, comme le mur contre lequel on fusille les communards, ironisait Bertrand Delcour dans Pourquoi nous sommes morts. La nouvelle bourgeoisie inculte – au sens quasi littéral du mot – a trouvé son président. À force de « cranter un truc » (sic), Macron représente le parfait compromis entre cette Civilisation des prénoms chère à Renaud Camus et la masse des retraités accrochés à leur épargne. Le Petit Remplacement qu’ils incarnent ne console pas du grand. Il nous y enfonce la tête la première.   À son maquilleur qui s’étonnait de l’assassinat de Kennedy, De Gaulle aurait répondu : « Qu’attendez-vous d’un peuple d’adultes qui lit Mickey ? » Maintenant que la lecture, fût-ce la plus débilitante, a laissé place aux images, qu’escomptez-vous d’un troupeau d’adultes qui regarde Barbie ?

    David Cesena (Site de la revue Éléments, 8 août 2023)

    Lien permanent Catégories : Points de vue 0 commentaire Pin it!
  • Référendum sur l’immigration : la méfiance des élites envers la souveraineté populaire...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Michel Leblay cueilli sur Polémia et consacré au refus des consultations référendaires du peuple par les élites du système.

     

    Référendum_Immigration.png

     

    Référendum sur l’immigration : la méfiance des élites envers la souveraineté populaire

    Le site Télos a publié le 27 mai dernier un article de Messieurs Elie Cohen, Gérard Grunberg et Pasquale Pasquino intitulé Le choix inquiétant des Républicains. Il s’agit d’une critique de l’annonce dans Le journal du dimanche du 21 mai 2023 par Eric Ciotti, Olivier Marleix et Bruno Retailleau de deux propositions de loi sur l’immigration. La première proposition vise à permettre la tenue d’un référendum sur l’immigration et la seconde a pour objet l’adoption de mesures restrictives sur l’immigration. Face à ces deux propositions, les auteurs de l’article marquent leur opposition avec les intentions formulées par les trois élus Républicains qu’ils résument en trois mesures : une réforme constitutionnelle pour élargir l’objet du referendum à la politique de l’immigration ; une remise en cause de la primauté de la norme juridique européenne sur la norme nationale ; et une primauté de la décision politique sur son interprétation juridique.

    Une conception de la démocratie

    Ce qui retient d’abord l’attention c’est la conception avancée par les trois auteurs de ce que doit être une démocratie et leur considération pour la souveraineté populaire. C’est certainement à ce titre que l’article doit être relevé en premier lieu. Deux phrases extraites de celui-ci en traduit l’esprit : LR remet à l’honneur la pratique du référendum, partageant ainsi la tendance antiparlementaire de la droite et de la gauche radicales et rompant avec le ralliement des gaullistes au parlementarisme rationalisé opéré après le départ du général de Gaulle. Cette évolution est dangereuse. La présidence du Général De Gaulle et le recours par celui-ci au suffrage populaire pour les questions qu’il estimait essentielles pour le pays apparait de ce point de vue comme une regrettable parenthèse. En fait, ce qui est défini comme le parlementarisme rationalisé est à l’essence de la Ve République puisque la Constitution de celle-ci, approuvée par le suffrage universel le 28 septembre 1958, a bordé l’action du Parlement. D’une part, aux termes des articles 34 et 37 de la Constitution le domaine de la loi est strictement défini, les « matières autres » ayant un caractère réglementaire. D’autre part, cette Constitution offre au gouvernement des moyens constitutionnels, en premier lieu l’article 49.3, pour faire adopter des textes malgré l’absence de majorité pour les voter. En parallèle, le recours au référendum est explicitement prévu aux termes des articles 11 et 89 de la Constitution. Il est vrai que l’article 89 apporte une limite fondamentale puisque toute réforme de la Constitution proposée au référendum doit au préalable être approuvée dans les mêmes termes par les deux assemblées. Le Général De Gaulle dû regretter cette disposition puisqu’il l’enfreint lors de la réforme constitutionnelle de 1962. Il recourut à l’article 11 comme dans le cas de l’autre projet de réforme constitutionnelle de 1969. Dans ces deux circonstances, le fondateur de la Ve République paraissait opposer une légitimité populaire à une légitimité parlementaire. Pour autant, il n’y eut aucun caractère systématique dans cette opposition. Notamment, renonçant à son projet de référendum annoncé le 24 mai 1968, c’est bien par le recours à des élections législatives qu’il a résolu politiquement la crise née des évènements de mai-juin 1968.

    Sans que la proposition soit détaillée, la réforme constitutionnelle envisagée par les trois élus Républicains devrait toucher l’article 89, permettant au Président de la République de soumettre directement au référendum un projet qui comporterait une modification de dispositions constitutionnelles.

    Une telle option ne remet pas en cause le parlementarisme rationalisé. Elle vise sur des sujets considérés comme essentiels à recueillir l’approbation du suffrage universel. Toute autre serait l’introduction du « référendum d’initiative citoyenne ».

    En fait, les auteurs expriment la plus grande méfiance à l’encontre de la souveraineté populaire, expression de la souveraineté nationale. C’est l’idée même qu’un peuple puisse par son suffrage fixé son destin qui est en cause, la mythologie juridique de la souveraineté populaire, selon leur expression à propos du référendum. L’élément fondamental de leur raisonnement est la soumission de l’action politique au contrôle du juge : … cette source (les règles en termes d’immigration) réside dans un ordre juridique fondé sur des droits universels garantis par des conventions européennes et sur le pouvoir d’interprétation et de sanction du juge. Ils ajoutent, par rapport à ces propositions des élus Républicains, qu’il s’agit d’une remise en cause de la primauté de la norme juridique européenne sur la norme nationale ; et une primauté de la décision politique sur son interprétation juridique… En précisant que : La supériorité de la norme juridique européenne sur la norme nationale est constitutive du projet européen et ne saurait être écartée au nom d’intérêts dont la définition serait laissée à la discrétion de chaque nation.

    Or, s’il peut être admis que le juge censure le vote du législateur, à l’évidence, réprouver l’expression populaire manifesterait un déni de démocratie. La promotion des valeurs et, en premier lieu, la démocratie se trouverait fortement mise à mal.

    En la circonstance, le sujet de l’immigration tel qu’il se présente pose le problème du devenir de la Nation au regard de l’arrivée de populations, de plus en plus nombreuses avec le temps, venues d’autres aires de civilisation ; sans compter les questions immédiates liées à la sécurité quotidienne.

    Le rejet du référendum et de la souveraineté populaire

    Ainsi, il ressort du propos trois éléments : des droits universels garantis ; des nations enserrées dans des règles supranationales ; in fine, le pouvoir de décision revient au juge. Comme il est souligné, La France ne peut pas plus que l’Italie (pour la politique migratoire) s’opposer à l’Union européenne. Ce qu’il manque, assurément, partant de ces observations, c’est une définition de la démocratie et de la souveraineté d’un peuple. Néanmoins, il est possible de relever dans l’article quelques indices. Ainsi, s’agissant du référendum de 2005, ils (les électeurs) se décident plutôt en fonction de leur relation à l’acteur politique qui propose le référendum que sur le contenu de la proposition – comme on l’a bien vu dans le cas du référendum sur le traité constitutionnel de l’Union Européenne en 2005. Le gouvernement par référendum signerait en réalité la mort du régime représentatif rationalisé. Outre que les raisons invoquées pour lesquelles les électeurs se prononceraient relèvent d’une simple affirmation, non d’une démonstration, il apparait que par la référence au régime représentatif rationalisé détourne ce concept de son sens. Le régime représentatif rationalisé ne saurait exclure le recours au référendum sauf à considérer que le concept supposerait des choix politiques déterminés. Les élections, dans ces conditions, ne constitueraient alors qu’un simple habillage démocratique. En effet, les élus, au-delà du vote de leurs électeurs, seraient soumis à l’injonction d’une rationalité spécifique. Celle-ci serait comprise comme « une vérité » sur l’ordonnancement du monde ni contestable, ni négociable, ni amendable à laquelle n’accéderait qu’une « élite » dirigeante.

    La condamnation de l’assimilation

    Parmi les items de cette « vérité » figure l’immigration et la manière dont elle doit être conçue. A cet égard, le propos tenu sur l’assimilation est éloquent quant à l’idéologie qui sous-tend la vision exprimée par les trois auteurs : À cela s’ajoute la proposition réactionnaire et dangereuse de révision de la Constitution consistant à compléter son article 3 en proclamant que « nul ne peut devenir français s’il ne justifie de son assimilation à la communauté française ». Cette vieille notion, particulièrement floue, que l’on croyait abandonnée, peut être entendue de toutes les façons y compris les plus restrictives. Non seulement l’immigration est vue comme une obligation mais elle doit se concevoir dans le cadre d’une société multiculturelle, c’est-à-dire le rassemblement d’individus à un moment donné sur un territoire donné, la cohabitation par nature ne devant être qu’harmonieuse, chacun ayant pour seul devoir de respecter l’autre. Tout cela relève du mirage de la construction de l’homme nouveau dans la société nouvelle. Mais les faits sont là ; l’histoire nous l’enseigne au travers des siècles et des millénaires.

    La représentation démocratique subordonnée au juge

    Ce parlementarisme rationalisé tel qu’il est invoqué dans le propos, placé sous le contrôle du juge national et international, dans le contexte de la pensée dominante présente, n’est donc pas un principe de gouvernement ouvert à tous les choix politiques, il est l’outil au service d’une idéologie et le seul moyen pour l’imposer. Les peuples d’Occident se montrant rétifs à un cosmopolitisme effaçant les cultures et les traditions propres à chacun, émiettant leurs sociétés, désagrégeant leurs économies par le jeu de concurrences insoutenables, octroyant des droits à tous d’où qu’ils viennent, la solution se trouve donc dans l’instauration de sociétés purement normatives au sein desquelles le juge devient le décideur suprême. Ce système voulu par une structure dirigeante, appuyée par une classe intellectuelle et médiatique rêvant de cet univers où l’individu évoluerait au gré de son désir est en marche. Pour autant, les résistances sont fortes, en témoigne là et ailleurs la voie des urnes. Il est encore loin de son accomplissement.

    L’exclusion de l’Union européenne, une menace illusoire

    Quant à la relation avec l’Union européenne, l’argument d’une exclusion de la France par celle-ci pour le non-respect des règles en matière d’immigration est vain. Sans la France, pays fondateur de la Communauté Économique Européenne, seconde puissance économique de l’Union, cette dernière perdrait son sens. Compte-tenu des intérêts économiques et monétaires en jeu, de la menace qui pèserait sur les budgets européens et, dans le domaine particulier de l’immigration, des préoccupations sinon des rejets exprimés par de plus en plus de peuples européens, assurément un accord serait trouvé.

    Michel Leblay (Polémia, 24 juillet 2023)

    Lien permanent Catégories : Points de vue 0 commentaire Pin it!