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Points de vue - Page 233

  • Le nouveau bipartisme...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Guillaume Faye, cueilli sur son site J'ai tout compris et consacré à la montée en puissance du Front national...

    Polémiste et essayiste, Guillaume Faye vient de publier Comprendre l'islam (Tatamis, 2015).

     

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    Le nouveau bipartisme : FN contre RPS

    Il était prévisible que le Front national n’emportât aucune présidence de région. Mais sa progression est considérable : plus de 6,8 millions de suffrages au soir du second tour. Seul contre tous, il s’est confirmé comme premier parti de France face aux deux coalitions objectivement alliées LR–Centristes et PS–extrême gauche. Le RPS. Ces élections régionales ont été en fait un référendum pour ou contre le FN. Son ascension vers le pouvoir a commencé mais elle sera incertaine, difficile et explosive.   

    Le plafond de verre existe toujours mais il monte…

    Au second tour des élections régionales, le 13 décembre, plus de 6,8 millions d’électeurs ont donc voté FN, un record historique. Il a dépassé les 6,4 millions de la présidentielle de 2012 alors que la participation était plus forte de vingt points cette année-là. Le FN est le seul parti capable de rassembler un tiers de l’électorat. La coalition droite–centristes a accumulé (avec l’apport artificiel de voix de gauche anti-FN dans trois régions) 41% des suffrages, la coalition de gauche 30% et le FN seul 29%.   

    Au plan national, comme le sanglier poursuivi par la meute, le FN seul affronte à droite LR, UDI, le Modem et à gauche PS, Radicaux de gauche, Front de gauche, EELV et PCF, soit huit formations politiques contre une. La grande ligue. 

    Obtenir près de 30% des suffrages exprimés, c’est à la fois énorme pour un parti considéré comme d’ ” extrême droite” (dans les années 80, quand le FN dépassait la barre des 10% ont parlait de séisme…) mais insuffisant : bien que premier parti de France, dans ce nouveau système tripartite (en apparence seulement), le Front national doit affronter deux coalitions plus ou moins alliées, celle de la droite et des centres et celle de la gauche et de l’extrême gauche. Il joue à un contre deux. 30% des électeurs sont pour lui mais 70% contre, ne l’oublions pas. Les jeux ne sont pas faits. Le plafond de verre est à 50% des suffrages exprimés. Le FN, isolé et sans alliances, en est encore loin. Mais il ne faut jurer de rien. C’est la marée qui monte, poussée par le vent des événements…

    Le vote FN a progressé de 7 point sous Sarkozy et de 10 sous Hollande. 57 % des Français estiment que le FN est un ”parti comme les autres”. Il y a dix ans, ils étaient à peine 10% à le penser. Cela dit le vote massif pro-FN, d’un point de vue sociologique, n’est pas ”politique”, au sens classique, mais plutôt symbolique. C’est une sorte d’appel au secours, dont la submersion migratoire est la première motivation. 

    La coalition anti –FN : les Nuls contre les Inconnus

    Nous ne sommes pas dans un nouveau système tripartite (droite, gauche, FN) mais dans un duel droite–gauche contre FN. Comme le reconnaît Guillaume Tabard (Le Figaro, 14/12/2015) : «  de Manuel Valls à Alain Juppé […] en passant par Bertrand et Estrosi, la tentation ou le désir d’un nouveau paysage bipolaire affleure, autour de la seule question du Front national ». Le bloc, l’agrégat bicéphale Républicains et alliés avec PS et alliés, qu’il faut nommer RPS, s’oppose donc au FN dans une nouvelle configuration bipartisane de fait. Pour l’opinion publique, ceux qui ont gouverné (RPS) s’opposent à ceux qui n’ont pas encore gouverné (FN). Les nuls contre les inconnus. 

    Christian Estrosi, symbole théâtral du politicien roué, félicité par Manuel Valls pour sa victoire, s’est posé en « résistant » face au FN (allusion ridicule et insultante à la vraie Résistance de 1940–1944) et a assuré qu’il créerait un « conseil territorial » pour gouverner la région PACA avec la gauche. Alain Juppé : «  merci à ceux qui ne partagent pas nos idées et qui se sont mobilisés pour éviter le scénario du pire. Cela nous oblige ». Sous entendu : on est tous d’accord, droite et gauche contre le FN.

    Non seulement la gauche s’est désistée en faveur de la droite et du centre dans les régions Nord et Sud-Est, ce qui prouve que l’animadversion anti FN est plus forte que le sacrifice de tous les élus régionaux, mais les gagnants, MM. Bertrand et Estrosi, ont promis qu’ils ”tiendraient compte” des voix de gauche qui les ont fait élire. Autrement dit, ils mèneront la même politique que la gauche, avec d’infimes nuances, comme cela se passe au niveau national. Le RPS est donc bien un fait politique et la divergence gauche–droite n’est pas programmatique ni idéologique mais politicienne.

    Elle peut être idéologique, mais en paroles seulement, pas en actes. Mme Pécresse, nouvelle présidente de l’Ile–de–France par exemple – j’en fait le pari– n’abolira pas la remise de 75% sur le prix des transports pour les immigrés clandestins., par ailleurs constitutionnellement illégale. M. Raffarin : « nous devons travailler avec le gouvernement car le FN est un adversaire commun ». NKM, Estrosi et Bertrand parlent de « rassemblement républicain » contre le FN. M. Sarkozy, lui, avec son ”ni ni” ne sait plus où il habite. Un projet stratégique de recomposition politique est en cours pour former un barrage–bloc gauche–droite contre le Front national. LR, ex UMP, est en panne de programme ; le carriérisme politicien est le seul horizon de ses dirigeants. L’alliance droite modérée–centre mou– gauche contre le FN est la coalition qui se dessine après ces élections.

    Alain Juppé a d’ailleurs déclaré le 11 décembre qu’aux prochaines législatives, il appellerait au retrait du candidat de droite arrivé troisième en cas de triangulaire ou à voter pour le PS en cas de duel. Ce qui prouve bien qu’une bonne partie des caciques de la coalition molle LR–Centre voit cette dernière comme alliée de la gauche contre le FN. Il y a, dans le raisonnement de la classe politique, l’idée d’un bloc moralement légitime gauche–droite majoritaire contre un FN moralement illégitime, minoritaire mais en dangereuse progression. Le problème est que le ”peuple électoral ” pense de moins en moins ainsi.   

    La bonne vieille tactique du ”front antifasciste”

    La tactique du PS (M. Valls) –comme de François Hollande en prévision du second tour de la présidentielle de 2017– consiste à dire : ”la question n’est pas de voter pour nous et notre programme mais de voter contre ce FN d’extrême droite, pour faire barrage à l’horreur”. La logique de légitimation positive (”notre programme est le meilleur, votez pour nous”) cède la place à celle de la légitimation négative : ” notre bilan est mauvais, mais l’essentiel n’est pas là ; votez pour nous pour vous éviter le pire, le Front national ”.

    Face à la montée du Front national, on s’emploie donc à ressusciter la tactique communiste du Komintern inventée par les services soviétiques dans les années trente, le « front antifasciste ». Le « front républicain » n’est que la réplique essoufflée de ce dernier. Sauf que le FN est sans doute plus ”républicain” et démocrate que les sectes partisanes et oligarchiques qui usurpent ces termes. Quand on patauge dans l’échec complet et qu’on n’a rien à offrir, on utilise cette ressource, en ignorant que le FN n’a rigoureusement rien à voir avec les mouvements fascistes, comme l’a démontré le politologue et historien des idées politiques Pierre–André Taguieff.

    L’argument selon lequel le FN serait l’héritier de Vichy (qui était un régime de gauche, ne l’oublions pas, soumis à l’occupant national–socialiste, ne l’oublions pas non plus), rabâché par l’intellocratie, n’a aucune prise sur l’électorat, notamment des nouvelles générations.

    Un conseiller de l’Élysée, cité par Le Figaro (08/12/2015) déclare : « Hollande veut apparaître comme le candidat de la République et du rassemblement, contre le terrorisme et l’extrême droite […] Il fait le pari qu’il sera face à Marine Le Pen au second tour de la présidentielle de 2017 » Hallucinant mais vrai : le FN est mis sur le même curseur de dangerosité que le terrorisme islamique. Le FN est comparé à Dae’ch. Cette rhétorique est tellement dépourvue de bon sens qu’elle est évidemment contre productive.

    Le soir du premier tour des régionales, le 6 décembre, sur les plateaux télé, on a entendu des politiciens de gauche ou LR comparer le FN au « péril brun » (allusion à la ”peste brune” nazie) ou l’assimilant à un danger pour la ”république”, la démocratie, les libertés publiques. Au soir du second tour, on a rabâché sur les TV à la face des (rares) invités FN placides: ” vous n’êtes pas des républicains ni des démocrates ”. Sous entendu : vous êtes des nazis dissimulés.

    Et ces paroles ignobles provenaient de gens, associés électoralement au Parti communiste et aux trotskistes, abreuvés au lait d’un marxisme qui, comme l’islam(isme), a multiplié les crimes contre l’humanité. Inversion de la réalité, incongruité. Passons. 

    L’oligarchie ”démocratique” contre le populisme

    Diaboliser le FN, le présenter comme un danger majeur pour la démocratie, la République, les ”valeurs” (lesquelles ?), comme un risque de dictature, fonctionne parfaitement bien pour un certain nombre d’électeurs (droite ou gauche). La question est de savoir combien tombent dans ce piège : de moins en moins, d‘après les sondages, mais toujours suffisamment pour créer un ”plafond de verre”, qui monte, certes, mais qui se situe toujours en dessous du seuil fatidique de 50%.

    En effet, un certain pourcentage d’électeurs préfère voter pour la coalition droite–gauche que pour le FN, représenté comme un parti spécial et dangereux. Mais exclure idéologiquement le FN de l’arc politique légitime gauche–droite est une tactique à double tranchant : ce peut être pertinent dans l’effroi (positif) mais aussi susciter l’exaspération par la grosseur du mensonge (négatif). L’ennemi principal et objectif de l’oligarchie (qui se réclame évidemment de la ”démocratie”, comme le faisaient les soviétiques) c’est le ”populisme”, le peuple autochtone, dont la représentation symbolique (plus que politique) est le Front national.

    Pour les idéologues de gauche, inspirés par le trotskisme bourgeois du think tank Terra Nova, les ”classes dangereuses”, ce sont les masses des électeurs FN et de la ”Manif pour Tous” qui a marqué les esprits et fut sévèrement réprimée par la police. Ce ne sont pas les banlieues islamisées et violentes qui effraient mais ces petits Blancs de la France périphérique qui osent faire de la résistance par leur vote silencieux. Le peuple de souche des classes populaires est placé sous la surveillance attentive de l’oligarchie et de ses alliés objectifs. Vous devinez lesquels.   

    Un vote FN symbolique et insurrectionnel

    La carte des scores électoraux FN au premier tour des régionales regroupe à peu près exactement celle des zones à forte présence d’immigration afro-maghrébine et d’islamisation. Fait sociologique incontournable. La motivation du vote massif FN de la part de nouveaux électeurs n’est ni celle d’un vote protestataire ni celle d’un vote d’adhésion mais, entre les deux, celle d’un vote insurrectionnel.

    Le programme économique du FN que j’ai souvent critiqué (voir autres articles de ce blog) importe assez peu pour ses électeurs. Même ceux qui sont libéraux passent l’éponge et votent FN, un peu à l’aveugle, pour ”essayer autre chose”. Immigration et islamisation non maîtrisées, délinquance explosive, justice anti répressive, Éducation nationale déliquescente, sont les principales raisons du vote FN. La question de la résorption du chômage vient, contrairement aux discours des politologues télévisuels, en second lieu.

    Cela dit, la position brutale du FN pour l’abandon de l’Euro, très irréfléchie, lui a probablement fait perdre plusieurs points dans ses scores électoraux. La direction du FN a très médiocrement piloté son programme économique et social, ce qui lui a fait perdre – et empêché de capter – plus de voix qu’elle n’en a gagnées. C’est la faiblesse majeure du FN. Ses solutions en matière économique sont superficielles, amateuristes et déconnectées de la réalité. Elles constituent un verrou. Elles sont sans originalité, banalement alignées sur la politique pratiquée depuis des décennies par les gestionnaires d’un État Providence en faillite. Manque d’audace et de talent. Dommage : gros handicap pour le FN.

    Les propos racistes anti Blancs (et ethnomasochistes) de M. Claude Bartolone à l’encontre de Valérie Pécresse, accusée d’être la candidate de la « race blanche », ont probablement abouti non pas à faire voter pour lui des abstentionnistes ”Beurs–Blacks” du 93 comme il l’espérait, mais à accentuer un report de voix FN (vote utile) vers son adversaire féminine LR., et à le faire battre. M. Bartolone n’est pas réputé, même au PS, pour être un génie…

    La dynamique sociologique du FN

    Mais ce nouveau bipartisme est une autoroute pour le Front national. Il apparaît comme la seule force d’alternance à une classe politique droite/gauche qui a échoué dans tous les domaines, dont le bavardage idéologique fut inversement proportionnel aux actes, aux résultats. Il est probable que le FN va continuer de bénéficier de fuites d’eau d’électeurs(–trices), d’élu(e)s et de diverses forces (y compris LR et gauche) qui vont rejoindre ses rangs. Pour des raisons à la fois idéologiques et d’intérêt, sincères et insincères. C’est la nature humaine.

    Dans ce contexte, les petits partis souverainistes ou identitaires en orbite autour du FN, qu’ils s’y opposent ou lui fassent du genou, vont très probablement se vider de leur encadrement et le rejoindre.

    Malek Boutih, député PS de l’Essonne, probablement le plus lucide des élus de gauche sur la situation du pays, auteur d’un rapport percutant sur les banlieues défrancisées et islamisées qui va dans le sens des analyses politiquement incorrectes de l’historien Georges Bensoussan, disait récemment que contre la progression du FN, il fallait en finir avec les incantations sur les ”valeurs” et « passer aux actes ». Passer des mots à l’action. Il a raison. Mais son propos est ambigu. Passer aux actes pour faire régresser le chômage et la paupérisation ? Il faudrait des recettes libérales, à la manière suisse ou anglaise. Impensable pour le logiciel socialiste. Passer aux actes pour limiter l’immigration, la criminalité, l’islamisation, racines du vote FN ? Là, il faudrait se tourner vers une solution à la japonaise. Impensable pour le logiciel socialiste. Ou bien passer aux actes pour promouvoir une ”identité heureuse” à la Juppé, un ”vivre ensemble” des intellos germanopratins, un ”islam des Lumières” ? On nage dans le rêve et c’est l’impasse.

    Le premier parti de France ne dirige aucune région ou département, peu de communes et se trouve quasi absent de l’Assemblée et du Sénat. Néanmoins il a obtenu 358 conseillers régionaux. Cette frustration des électeurs FN et des abstentionnistes favorables au FN va probablement renforcer à l’avenir son implantation. Surtout si – ce qui est prévisible – de nouveaux attentats islamiques ont lieu, si les problèmes divers liés à l’immigration incontrôlée et à la criminalité s’accentuent, ce qui est inévitable.

    Le spectre de la guerre civile

    Valls, dans son syndrome colérique permanent, a déclaré que le FN était « raciste et antisémite ». Antisémite ? Qui est antisémite en France, qui menace et qui tue les Juifs ? Le FN ? Les cathos de la Manif pour Tous ? Non. Des gens issus de cette immigration musulmane que chérit le pouvoir socialiste et ses alliés trotskistes ”antisionistes” –concept euphémique. La pensée de gauche est à la fois obsolète et perverse.

    Manuel Valls, Premier ministre irresponsable qui aime à rabâcher en boucle qu’il ”prend ses responsabilités”, a affirmé aussi que  le Front national portait en lui « les germes de la guerre civile ». Les massacres du 13 novembre ont-ils été commis par des adhérents du FN ? Guillaume Tabard écrit à ce propos : « parler de ”guerre civile” recèle un autre danger. Celui de ce qu’on appelle la prophétie autoréalisatrice. À savoir, provoquer dans les faits ce qu’on annonce dans les mots. […] Prédire la ”guerre civile” n’est-ce pas en partie la susciter ? » (Le Figaro, 12–13/12/ 2015). La guerre civile en France et en Europe aura lieu. D’ailleurs, elle a déjà commencé, en basse intensité, puisque l’ ”état d’urgence ” est décrété. Son spectre hante les discours. La responsabilité d’une éventuelle guerre civile revient entièrement aux gouvernants qui depuis les années 70 ont ouvert les frontières à une immigration massive inassimilable d’origine majoritairement musulmane. 

    Les attentats de janvier et de novembre 2015 ont eu un effet de radicalisation et de mimétisme auprès des musulmans de France, essentiellement les jeunes et les mineurs. On note un accroissement majeur des apologies du terrorisme, des agressions physiques anti françaises, des dégradations de lieux de cultes chrétiens et juifs. Les origines des auteurs sont parfaitement connues et pudiquement tues. « Les attentats de janvier et novembre ont déclenché une vague de délinquance qui révèle les fractures de la société française », titrait Le Figaro (16/12/2015). Il s’agit plus que de ”fractures”, selon le jargon politico journalistique, mais d’une faille tellurique majeure entre deux ”nations” au sein même de la France.   

    Une surenchère terroriste islamique est à prévoir sur le territoire français – comme en Belgique – mélangée à des émeutes ethniques bien plus graves que celles de 2005. Pour la première fois, comme je l’avais prévu, un parti ethnique musulman est apparu. L’Union des démocrates musulmans (UDM) en Seine–Saint–Denis et dans les Yvelines a constitué sa liste et a obtenu 5,90% des voix à Mantes–la–Jolie, en sachant que les immigrés boudent massivement les urnes. Pour combien de temps ? Il va y avoir du sport et le FN sera en première ligne. En sera–t–il capable ? Sinon d’autres solutions devront être froidement envisagées qui ne seront pas des plaisanteries.

    Guillaume Faye (J'ai tout compris, 17 décembre 2015)

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  • Le FN, René Girard et la théorie du bouc émissaire...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Vincent Coussedière, cueilli sur Figaro Vox et consacré à l'explosion programmée du système... Agrégé de philosophie, Vincent Coussedière a publié Éloge du populisme ( Elya, 2012).

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    Le FN, René Girard et la théorie du bouc émissaire

    Les «élites» françaises, sous l'inspiration et la domination intellectuelle de François Mitterrand, on voulu faire jouer au Front National depuis 30 ans, le rôle, non simplement du diable en politique, mais de l'Apocalypse. Le Front National représentait l'imminence et le danger de la fin des Temps. L'épée de Damoclès que se devait de neutraliser toute politique «républicaine».

    Cet imaginaire de la fin, incarné dans l'anti-frontisme, arrive lui-même à sa fin. Pourquoi? Parce qu'il est devenu impossible de masquer aux français que la fin est désormais derrière nous. La fin est consommée, la France en pleine décomposition, et la république agonisante, d'avoir voulu devenir trop bonne fille de l'Empire multiculturel européen. Or tout le monde comprend bien qu'il n'a nullement été besoin du Front national pour cela. Plus rien ou presque n'est à sauver, et c'est pourquoi le Front national fait de moins en moins peur, même si, pour cette fois encore, la manœuvre du «front républicain», orchestrée par Manuel Valls, a été efficace sur les électeurs socialistes. Les Français ont compris que la fin qu'on faisait incarner au Front national ayant déjà eu lieu, il avait joué, comme rôle dans le dispositif du mensonge généralisé, celui du bouc émissaire, vers lequel on détourne la violence sociale, afin qu'elle ne détruise pas tout sur son passage. Remarquons que le Front national s'était volontiers prêté à ce dispositif aussi longtemps que cela lui profitait, c'est-à-dire jusqu'à aujourd'hui. Le parti anti-système a besoin du système dans un premier temps pour se légitimer.

    Nous approchons du point où la fonction de bouc émissaire, théorisée par René Girard (1) va être entièrement dévoilée et où la violence ne pourra plus se déchaîner vers une victime extérieure. Il faut bien mesurer le danger social d'une telle situation, et la haute probabilité de renversement qu'elle secrète: le moment approche pour ceux qui ont désigné la victime émissaire à la vindicte du peuple, de voir refluer sur eux, avec la vitesse et la violence d'un tsunami politique, la frustration sociale qu'ils avaient cherché à détourner.

    Les élections régionales sont sans doute un des derniers avertissements en ce sens.

    Y-a-t-il une solution pour échapper à une telle issue? Avouons que cette responsabilité est celle des élites en place, ayant entonné depuis 30 ans le même refrain. A supposer cependant que nous voulions les sauver, nous pourrions leur donner le conseil suivant: leur seule possibilité de survivre serait d'anticiper la violence refluant sur elles en faisant le sacrifice de leur innocence. Elles devraient anticiper la colère d'un peuple qui se découvre de plus en plus floué, et admettre qu'elles ont produit le système de la victime émissaire, afin de détourner la violence et la critique à l'égard de leur propre action. Pour cela, elles devraient cesser d'ostraciser le Front national, et accepter pleinement le débat avec lui, en le réintégrant sans réserve dans la vie politique républicaine française. Pour cela, elles devraient admettre de déconstruire la gigantesque hallucination collective produite autour du Front national, hallucination revenant aujourd'hui sous la forme inversée du Sauveur. Ce faisant, elles auraient tort de se priver au passage de souligner la participation du Front national au dispositif, ce dernier s'étant prêté de bonne grâce, sous la houlette du Père, à l'incarnation de la victime émissaire.

    Il faut bien avouer que nos élites du PS comme de Les Républicains ne prennent pas ce chemin, démontrant soit qu'elles n'ont strictement rien compris à ce qui se passe dans ce pays depuis 30 ans, soit qu'elles l'ont au contraire trop bien compris, et ne peuvent plus en assumer le dévoilement, soit qu'elles espèrent encore prospérer ainsi. Il n'est pas sûr non plus que le Front national soit prêt à reconnaître sa participation au dispositif. Il y aurait intérêt pourtant pour pouvoir accéder un jour à la magistrature suprême. Car si un tel aveu pourrait lui faire perdre d'un côté son «aura» anti-système, elle pourrait lui permettre de l'autre, une alliance indispensable pour dépasser au deuxième tour des présidentielles le fameux «plafond de verre». Il semble au contraire après ces régionales que tout changera pour que rien ne change. Deux solutions qui ne modifient en rien le dispositif mais le durcissent au contraire se réaffirment.

    La première solution, empruntée par le PS et désirée par une partie des Républicains, consiste à maintenir coûte que coûte le discours du front républicain en recherchant un dépassement du clivage gauche/droite. Une telle solution consiste à aller plus loin encore dans la désignation de la victime émissaire, et à s'exposer à un retournement encore plus dévastateur. Car le Front national aura un boulevard pour dévoiler qu'il a été la victime émissaire d'une situation catastrophique dont tout montre de manière de plus en plus éclatante qu'il n'y est strictement pour rien. En ce sens, si à court terme, la déclaration de Valls sur le Front national, fauteur de guerre civile, a semblé efficace, elle s'avérera sans doute à plus ou moins long terme, comme le stade ultime de l'utilisation du dispositif de la victime émissaire, avant que celui-ci ne s'écroule sur ses promoteurs mêmes. Car sans même parler des effets dévastateurs que pourrait avoir, a posteriori, un nouvel attentat, sur une telle déclaration, comment ne pas remarquer que les dernières décisions du gouvernement sur la lutte anti-terroriste ont donné rétrospectivement raison à certaines propositions du Front national? On voit mal alors comment on pourrait désormais lui faire porter le chapeau de ce dont il n'est pas responsable, tout en lui ôtant le mérite des solutions qu'il avait proposées, et qu'on n'a pas hésité à lui emprunter!

    La deuxième solution, défendue par une partie de Les Républicains suivant en cela Nicolas Sarkozy, consiste à assumer des préoccupations communes avec le Front national, tout en cherchant à se démarquer un peu par les solutions proposées. Mais comment faire comprendre aux électeurs un tel changement de cap et éviter que ceux-ci ne préfèrent l'original à la copie? Comment les électeurs ne remarqueraient-ils pas que le Front national, lui, n'a pas changé de discours, et surtout, qu'il a précédé tout le monde, et a eu le mérite d'avoir raison avant les autres, puisque ceux-ci viennent maintenant sur son propre terrain? Comment d'autre part concilier une telle proximité avec un discours diabolisant le Front national et cherchant l'alliance au centre?

    Curieuses élites, qui ne comprennent pas que la posture «républicaine», initiée par Mitterrand, menace désormais de revenir comme un boomerang les détruire. Christopher Lasch avait écrit La révolte des élites, pour pointer leur sécession d'avec le peuple, c'est aujourd'hui le suicide de celles-ci qu'il faudrait expliquer, dernière conséquence peut-être de cette sécession.

    Vincent Coussedière (Figaro Vox, 18 décembre 2015)

     

    Note :

    (1) René Girard: La violence et le sacré

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  • Big Data is watching you !...

    Nous reproduisons ci-dessous un article de René Lebras, cueilli sur Idiocratie et consacré à la numérisation envahissante du monde qui nous entoure et de nos vies, qui a été initialement publié dans la revue Éléments.

     

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    Big Data is watching you !

    « Datafication », « algorithme », « indexation », « protocole », « computation », « interopérabilité », « dispositif », etc. le champ lexical de la raison numérique dessine à lui seul les motifs du monde à venir : désespérément plat, entièrement régulé et profondément inhumain. Les professionnels de l’économie se sont déjà rués sur ce phénomène pour vanter à qui mieux mieux les bienfaits de la numérisation intégrale. Précisément, cette révolution technologique majeure dont on peine encore à prendre la mesure se traduit par un flux continu de données (bigdata) récoltées et analysées par des instances de tous ordres en fonction de dispositifs et de protocoles convergents. Elle contribue à instaurer « un rapport au réel placé sous le sceau de la puissance objectivante et non ambiguë des mathématiques et des nombres [1] ».

    La promesse du numérique consiste donc à enfermer toutes les strates de l’existence dans des codes binaires (algorithmes) gérés par des machines surpuissantes, seules à mêmes d’assurer le bonheur compartimenté et sécurisé dont semble rêver le nouvel homme connecté. Concrètement, le processus est déjà bien amorcé avec la constitution de gigantesques banques de données (datacenter), l’incorporation massive de capteurs au sein de surfaces toujours plus étendues du réel et la dissémination de puces dans une multitude de produits quotidiens (robots, emballages, médicaments, etc.). Demain, les nanocapteurs pourront recouvrir quasiment toutes les surfaces sous forme de peintures ou de pellicules apposées sur des machines, des automobiles, des immeubles, des ponts, etc. A cela s’ajouteront les micropuces, dont sont déjà pourvus les animaux de batteries industrielles, qui s’incrusteront dans nos prothèses, nos organes et nos cerveaux. Cette « technicisation achevée de la nature » n’est pas un scénario de science-fiction, mais bien le programme établi par l’évolution « naturelle » des technologies numériques.

    Cette évolution commence d’ailleurs à produire ses effets sur des segments entiers des activités humaines. Ainsi, les usines globales multi-localisées (connected factory) soumettent leurs personnels et leurs machines à des équations algorithmiques qui visent à la plus haute optimisation et à la plus grande flexibilité du travail. À chaque fois, il s’agit de traiter une myriade de sources informationnelles (flux, stocks, horaires, commandes, etc.) le plus rapidement possible et de façon synchronisée grâce à des techniques computationnelles très élaborées (supercalculateurs). Le processus a également fortement impacté le monde de la médecine avec la mise en place d’un véritable « biohygiénisme algorithmique ». Eric Sadin nous apprend, par exemple, que le logiciel HealthMap (analyse des données en provenance de l’OMS) a permis de détecter une épidémie de choléra en Haïti avec près de deux semaines d’avance sur les observations menées par les autorités qualifiées sur place. On l’aura compris, cette nouvelle médecine se fonde sur une évaluation continuelle des données dans le but d’aboutir à des traitements prédictifs individualisés en lien, notamment, avec le développement de la génétique. On sait que l’actrice Angelina Jolie a subi une double mastectomie (ablation des deux seins) puis s’est fait retirer les ovaires et les trompes de Fallope au seul titre de la prévention. Suite à des tests génétiques, les médecins avaient effectivement diagnostiqué un risque de cancer au vu de ses antécédents familiaux.

    Les dispositifs numériques envahissent également de nombreux autres espaces de la vie quotidienne : qui n’a pas vu, en se promenant sur les grandes artères des centres urbains, une multitude de boîtiers, d’antennes, de caméras ? L’avenir est au smart cities, ces villes intelligentes qui capturent vos traits, identifient vos trajets et mesure la qualité de l’air afin de sécuriser l’environnement et de fluidifier le trafic. La même intrusion est encore davantage à l’œuvre pour tout ce qui concerne la navigation sur la toile internet. Partout, l’utilisateur laisse des traces numériques qui, traitées par des algorithmes, sont redirigées vers des entreprises privées quand elles ne sont pas enregistrées dans des régimes de surveillance généralisée. Là encore, il ne s’agit pas de science fiction : Edward Snowden est actuellement « exilé » en Russie pour avoir dénoncer plusieurs programmes gouvernementaux de surveillance qui travaillaient en bonne entente avec les grands opérateurs privés d’internet ! Ce fichage quantitatif et intégral de la réalité (les choses, les espaces, les hommes) produit évidemment des conséquences sur les représentations du monde.
    Au plan épistémologique, le processus de numérisation débouche sur un nouveau mode de connaissance, le « savoir corrélatif computationnel », qui remet en cause tous les principes de la science occidentale telle qu’ils ont été posés par Aristote. Davantage encore, c’est tout simplement l’homme qui est expulsé d’un processus de connaissance (dévoilement du réel) dont il est pourtant l’origine et la fin. Ainsi, l’observation des faits s’efface devant la masse des données comme la validation par l’expérience laisse la place à un « régime d’interopérabilité universel », autrement dit à la mise en relation quasiment inépuisable d’une infinité de sources. Il importe moins, au final, de découvrir les lois générales des phénomènes que d’établir des liaisons entre des variables sans explication causale. D’où une virtualisation complète du réel qui s’efface au profit d’une mise en boucle des flux de réalité ; ces mêmes flux faisant l’objet d’une codification intégrale à partir de calculs sériés (statistiques). La principale conséquence reste cependant l’obstruction de toute ligne de fuite dans le réel, ce que l’on pourrait interpréter comme la disparition de la variable proprement humaine, imprévisible, intempestive, anarchique, dans l’appareillage systémique du monde. Il n’existe donc plus de jeu (ou encore de vide) dans la toile de l’existence, ce qui constituait auparavant l’écart nécessaire au libre déploiement de la liberté.

    Au plan historique, le numérique s’inscrit naturellement dans le processus de rationalisation observé par Weber à cette disposition près qu’il en accélère encore le mouvement. Ce n’est plus la raison instrumentale qui maîtrise la nature mais les machines calculantes qui découpent le réel en codes binaires, et ce, afin de satisfaire l’autre dynamique essentielle à la modernité : l’individualisation. Aussi étonnant que cela puisse paraître, l’expression de soi se manifeste désormais « à l’intérieur d’un cadre majoritaire qui la codifie, l’excite et l’oriente de façon imperceptible ou non immédiatement consciente [2] ». Cette personnalisation de masse est à mettre en rapport avec l’essor d’un capitalisme cognitif qui dispose aujourd’hui des moyens de faire du « sur-mesure algorithmique ». Ainsi, les principaux acteurs du champ numérique (dominé par Google) ont établi de gigantesques banques de données que se sont partagées les firmes multinationales avant de mettre elles-mêmes en place leurs propres procédures de ciblage et de profilage de la clientèle. Dans ce contexte, la consommation devient un mode de vie à part entière puisqu’elle constitue l’une des principales formes de l’expression de soi – quand bien même elle n’est que le reflet du vide existentiel d’une société atomisée.

    Au plan politique, la numérisation se traduit d’ailleurs par un data-panoptisme entretenu et exploité par les citoyens eux-mêmes. L’aménagement de sphères privées, qui étaient conçue comme la contrepartie nécessaire à la socialité chez les Grecs, tend à se dissoudre dans la mise en scène de toutes les existences particulières – Facebook étant le symptôme de cette maladie égotique. Plus largement, l’action publique répond à de strictes logiques utilitaristes, une nouvelle fois dépendantes des régulations algorithmiques, que la forme démocratique tend à recouvrir d’un voile de légitimité. En vérité, le domaine de la loi, là où s’exprime normalement la souveraineté populaire, tend à se restreindre au profit de la norme et des dispositifs qui la mettent en œuvre. Il s’agit moins de choisir et de sanctionner que d’encadrer et d’inciter les comportements dits « citoyens ». Le choix démocratique s’efface devant l’ingénierie sociale comme l’élu politique s’en remet aux impératifs technocratiques. La question des « migrants » ne doit par exemple pas faire l’objet d’un débat public, suivi d’une décision politique, mais d’un traitement purement technique avec la mise en place de protocoles d’identification, de ventilation et d’intégration des populations « migrantes ». Le règlement de la dette grecque poursuit le même mode opératoire : la troïka (en lien avec le FMI) définit les clauses nécessaires à l’obtention de prêts tandis que le gouvernement grec se charge de les traduire sous forme de programmes chiffrés, évalués et sans cesse renouvelés (sous conditions).

    En définitive, la prégnance et l’emprise des techniques numériques marquent en profondeur toutes les strates de la vie sociale. C’est sans doute la dimension la plus fondamentale d’une révolution qui ne dit pas son nom. Elle finit par enfermer chaque individu dans une cage de verre à travers laquelle les reflets de la multitude lui interdisent de se penser comme à la fois une entité unique et un être collectif. « D’où a-t-il tant d’yeux qui vous épient, si ce n’est de vous ? » remarquait La Boétie [3]. On en revient à la part de jeu, et à la nécessité du secret, qui doivent s’intercaler dans toutes les relations sociales sous peine d’accoucher d’un système sans aspérités, uniforme et totalisant. « Car nous n’avons pas ici affaire, prévient Eric Sadin, à un totalitarisme, entendu comme un mode autoritaire et coercitif de l’exercice du pouvoir, mais à une sorte de pacte tacite ou explicite qui lie, à priori librement, les individus à des myriades d’entités chargées de les assister, suivant une continuité temporelle et une puissance d’infléchissement qui prend une forme toujours plus totalisante » [4]. Ainsi, chacun en vivant pour soi-même et par soi-même finit-il par abandonner le monde commun qui imprimait justement à l’être cette étrangeté première, originelle, sans laquelle il ne peut y avoir d’altérité.

    Face à ce constat particulièrement sombre, l’auteur dessine les contours d’une politique et d’une éthique de la raison numérique qui nous semble quelque peu naïve par rapport aux problématiques soulevées. Dans une rhétorique proche de la gauche critique, ce plan consiste à redonner le pouvoir aux citoyens à travers la création d’institutions réellement démocratiques : un Parlement mondial des données (comme Bruno Latour a pu parler d’un Parlement des choses [5]), une gouvernance de l’Internet, une éducation au numérique, etc. Ces mesures s’inscriraient dans une éthique élargie dont les contours paraissent également bien générales : défense de la liberté, sauvegarde de la vie privée, préservation du commun, etc. A vrai dire, Eric Sadin nous semble plus convaincant lorsqu’il envisage la création de « politiques de nous-mêmes » (Foucault) avec la production d’un contre-imaginaire, le développement de temporalités divergentes et l’utilisation alternative du numérique. Sans ce type de politiques, dont il convient de souligner la part utopique, l’homme se laissera aller à l’un de ses instincts les plus profonds, et les plus dangereux : celui de vouloir optimiser la vie pour en faire une donnée extérieure à lui-même. Avec l’aide des algorithmes, il semble bien que ce « miracle » soit désormais à sa portée : résoudre l’équation humaine et en finir avec la vie – telle que nous la connaissons aujourd’hui, dans notre espèce. 

    René Lebras (Idiocratie, 30 octobre 2015)
     

    Notes :

    1] Eric Sadin, La vie algorithmique. Critique de la raison numérique, Paris, Editions L’Echappée, 2015, p. 34. L’ensemble de l’article se fonde sur cet excellent ouvrage, particulièrement instructif et suffisamment abordable pour que tout le monde puisse s’interroger sur cette révolution silencieuse, déjà largement amorcée.
    [2] Op. cit., p. 135.
    [3] Opportunément cité par Eric Sadin. 
    [4] Op. cit., p. 173
    [5] Notons que cette idée se situe dans le droit fil de la logique technophile et consiste à rabaisser l’homme au niveau des instruments qu’il utilise et dont il devient en quelque sorte le simple prolongement humain. On peut imaginer, dans le même sens, qu’un Parlement des données numériques finirait par effacer la nature humaine au profit des algorithmes qui la définissent. 
     
     
     

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  • D’un côté les élites, de l’autre le peuple...

    Nous reproduisons ci-dessous entretien avec Alain de Benoist, cueilli sur Boulevard Voltaire et consacré à la forte poussée du Front national aux élections régionales ainsi qu'à la réaction de défense du système...

     

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    « Manuel Valls s’est transformé en sergent recruteur de Christian Estrosi ! »

    « Front national, un perdant qui pèse lourd », titre Le Parisien, tandis que le député FN Gilbert Collard se félicite d’une « défaite victorieuse ». Votre avis ?

    Le Front national n’a certes emporté aucune région, mais l’important n’est pas là. L’important est qu’il continue à progresser à chaque élection. Les régionales n’ont pas fait exception. La barre des 40 % a été enfoncée dans plusieurs régions, et le mouvement de Marine Le Pen est désormais assuré d’avoir plus de 350 conseillers régionaux (ce qui résout au passage le problème des parrainages pour la présidentielle). Le fait essentiel est qu’un parti qui a contre lui la gauche et la droite, tous les grands partis de gouvernement, tous les grands journaux, toutes les stations de radio et de télévision, sans oublier les ligues de vertu, le show business, le CRIF, le MEDEF et le Grand-Orient, Pierre Gattaz, BHL et Dany Boon, n’en est pas moins en passe de réunir les votes de près d’un Français sur deux. Bref, plus on met en garde les Français contre le FN, et plus ils votent pour lui, ce qui montre à qu’ils ne croient plus rien de ce qu’on leur dit, et à quel point leur colère et leur dégoût sont immenses.

    Le FN répond à une formidable demande d’identité collective, de souveraineté politique et de sécurité en matière sociale. Ses deux points d’appui sont, d’une part la jeunesse, de l’autre les classes populaires, associées à des classes moyennes menacées de déclassement ou confrontées à une stagnation croissante des positions sociales intergénérationnelles. Les deux ressorts du vote FN sont le chômage et les problèmes liés à l’immigration, qui frappent en priorité les mêmes milieux de la France périphérique, en particulier à l’est de la ligne Le Havre-Marseille. On a d’un côté ceux qui profitent de la mondialisation, de l’autre ceux qui en sont les victimes. D’un côté la France protégée de la bourgeoisie mondialisée et de la petite bourgeoisie qui en est tributaire, de l’autre la France fragile, précarisée et humiliée, en état d’insécurité et de paupérisation relative. D’un côté les élites, de l’autre le peuple.

    C’est ce qu’a bien vu Jacques Julliard, qui écrit : « Le vote du Front national représente l’idéal rêvé de la sociologie bipolaire du marxisme : l’alliance du prolétariat et des classes moyennes contre les classes dirigeantes. À l’inverse, la “résistance républicaine”, comme dirait Jean-Christophe Cambadélis, est constituée par les cadres moyens et supérieurs, les patrons, les bobos, les intellectuels à haut revenu […] Le vote FN est pour partie croissante une réponse au mépris dans lequel les élites tiennent aujourd’hui le peuple, et ce clivage est un clivage de classe. »

    Ce qui est nouveau, c’est que la gauche n’hésite plus à se faire harakiri, en appelant à voter pour un parti qu’elle accusait il y a encore quelques semaines de vouloir doubler le FN sur sa « droite » ! Cela en dit long sur son désarroi, et cela montre aussi que les moulins à prières sont devenues impuissants pour « faire barrage » au flot qui monte. Les tenants de l’antifascisme de confort et de posture (Robert Redeker), pour qui l’ennemi intérieur, c’est désormais le petit peuple, sont tétanisés parce qu’ils constatent que toutes les stratégies anti-FN utilisées jusqu’ici (diabolisation, banalisation, récupération) ont été des échecs, et que les excommunications ânonnées par les dévots de l’Éternel Retour des années 1930 ont depuis longtemps cessé d’être audibles, lorsqu’elles ne font pas tout simplement éclater de rire.

    Il a donc fallu passer à la vitesse supérieure. D’où ce spectacle surréaliste, où l’on a vu Manuel Valls sortir de son rôle de Premier ministre pour se transformer en sergent recruteur de Christian Estrosi (que Cambadélis dénonçait deux semaines plus tôt comme « bien pire que Marion »), des militants d’EELV distribuer des tracts en faveur de Xavier Bertrand, conviant ainsi les victimes de l’austérité à voter pour ceux qui la mettent en œuvre, et les dirigeants du P« S » demander à leurs adhérents de se suicider collectivement en choisissant de déserter pour six ans les conseils régionaux des anciens fiefs de Pierre Mauroy et de Gaston Defferre. Le FN y verra bien sûr la preuve éclatante que la droite et la gauche de gouvernement ne sont en définitive que deux tendances concurrentes d’un même parti. Le vent du boulet n’est pas passé loin. Mais c’est tout le système qui se trouve remis en question.

    À propos de ces élections, les médias évoquent un « tripartisme », tandis que Marine Le Pen parle d’un nouveau « bipartisme », FN patriote contre UMPS mondialiste. Qui est dans le vrai ?

    L’actuelle tripolarité (terme préférable à celui de tripartisme) ne peut être que provisoire. Mais l’important, on vient de le voir, c’est le report des voix. La droite ne l’a emporté dans le Nord et la région PACA que parce qu’elle a obtenu les voix de la gauche, et que Marine Le Pen n’a pas su empêcher ce report. Toute la question est donc de savoir si le FN est capable d’enrayer ce réflexe, en montrant à un nombre substantiel d’électeurs de gauche qu’un vote en faveur du FN répond mieux à leurs intérêts qu’un vote en faveur de la droite.

    La force du FN tient au fait qu’il ne se situe pas par rapport au clivage droite-gauche – un clivage dont la stratégie suicidaire de Manuel Valls vient encore de montrer qu’il ne tient plus que par la peinture. Si elle accède au second tour de la présidentielle, comme c’est possible (mais nullement certain), Marine Le Pen aura face à elle, soit un adversaire de gauche, soit un adversaire de droite. Dans le premier cas, il lui faudra rallier des électeurs de droite ; dans le second, des électeurs de gauche. Cela implique des discours différents. En tout état de cause, contrairement à ce qui s’était passé en 2002, ce sera le début d’une transformation radicale de la vie politique. Une victoire finale de Marine Le Pen n’étant guère envisageable, si la gauche l’emporte, on assistera à la dislocation de la droite ; si la droite l’emporte, à la décomposition de la gauche. Ce sera alors l’ouverture d’un nouveau cycle politique.

    Alain de Benoist, propos recueillis par Nicolas Gauthier (Boulevard Voltaire, 15 décembre 2015)

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  • Face à l'UMPS, un rassemblement pour le peuple français ?...

    Vous pouvez découvrir ci-dessous une chronique d'Éric Zemmour sur RTL, datée du 15 décembre 2015 et consacrée aux résultats des élections régionales qui ont vu le FN échouer face à l'alliance objective des Républicains et de la gauche...

     


    "Marine Le Pen avait raison. L'UMPS existe... par rtl-fr

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  • Sept leçons du deuxième tour des régionales...

    Nous reproduisons ci-dessous l'analyse des résultats des élections régionales par Jean-Yves Le Gallou, cueillie sur le site de la Fondation Polémia.

     

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    Sept Leçons du deuxième tour des régionales

    1-En nombre de voix le FN bat son score historique

    Le FN a réuni 6 millions de voix au premier tour des élections régionales. Il a progressé partout entre les deux tours (sauf en Ile-de-France) et a réuni 6,8 millions d’électeurs le 13 décembre : un record absolu supérieur de 400.000 voix au précédent record de 6,4 millions de voix de la présidentielles de 2012 alors même qu’il y a dix millions et demi de votants en moins. Comme le note la politologue Nona Meyer : « La notion de plafond de verre est très relative en politique. Le FN progresse lentement, mais sûrement. »

    2- La capacité de barrage des médias de propagande reste déterminante

    Pour Gilbert Collard : le FN était « seul » face à une « coalition de propagande époustouflante ». Pour Robert Ménard : « Une semaine de matraquage nord-coréen a permis, provisoirement, de repousser le FN ». Alors que l’enjeu des élections régionales est faible aux yeux des électeurs, le nombre des votants a progressé de 17% d’un tour à l’autre. Et les électeurs de gauche du premier tour se sont mobilisés pour assurer la défaite du FN en Provence comme dans le Grand Nord et le Grand Est. Le discours de peur de Manuel Valls sur « la guerre civile » a porté ses fruits.

    3- Au FN, les discours les plus identitaires sont les plus efficaces

    Seule Marion Maréchal Le Pen dépasse 45% des voix. Et c’est dans sa région que le FN dépasse 50% des voix dans un département : le Vaucluse. Or c’est elle qui a tenu les discours les plus convaincus (et donc convaincants) en termes d’identité et de valeurs. Son discours transgressif lui a permis de siphonner une partie de l’électorat de l’ex-UMP alors même que la Provence est démographiquement la région la plus âgée de France, ce qui est un vrai handicap pour le FN. A contrario, Wallerand de Saint-Just, qui a défendu une ligne mollassonne et tenté de séduire l’électorat des banlieues de l’immigration, réalise une grosse contreperformance au premier comme au second tour : c’est le seul candidat FN qui perd des voix en nombre absolu d’un tour à l’autre, alors que partout ailleurs, même dans des triangulaires serrées, le FN gagne des voix en nombre absolu. Même en Corse dans le cadre d’une quadrangulaire.

    4- Chez les Républicains, la balance penche aussi vers les candidats les plus droitiers

    A l’exception de Morin (UDI) tous les vainqueurs face au PS – Retailleau, Pécresse, Wauquiez – se sont affichés avec la Manif pour Tous (LMPT). C’est le candidat le plus « marqué », Wauquiez, qui est élu avec l’avance la plus forte. La candidate au serre-tête, Pécresse, a, quant à elle, bénéficié, d’un côté, des faiblesses de Wallerand de Saint-Just et, de l’autre, des déclarations de Bartolone sur la « race blanche ». A contrario les candidats centristes sont battus en Bourgogne/ Franche-Comté et Centre/Val-de-Loire.

    5- Les Corses réussissent un vote transgressif

    Les vieux partis mordent la poussière en Corse et les autonomistes, alliés aux indépendantistes, l’emportent, avec seulement 35% des voix, mais en l’absence de tout front républicain et sans que les médias ne viennent perturber le jeu !

    6- Les séquences électorales se rassemblent

    Depuis 30 ans le même schéma se reproduit quasi à l’identique : séisme FN au premier tour, mobilisation « républicaine » et médiatique entre les deux tours, absence ou échec du FN au deuxième tour. Et soirée électorale où UMP et PS font mine de s’affronter et promettent de nouveaux projets. Lassant…

    7- Pour le moment le MIM survit

    Au final le MIM –le mondialisme immigrationnisme marchand – sauve les meubles. La superclasse mondiale garde le contrôle de la situation grâce à la puissance de l’appareil d’ahurissement médiatique. Jusqu’à quand ?

    Jean-Yves Le Gallou (Polémia,14 décembre 2015)

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