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Points de vue - Page 115

  • Présidentielle américaine : un saut qualitatif dans la guerre médiatique...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Didier Beauregard, cueilli sur Polémia et consacré au coup de force du système médiatique dans l'élection présidentielle américaine.

     

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    Présidentielle américaine : un saut qualitatif dans la guerre médiatique

    Si le coup de force médiatico-judiciaire a réussi en 2016 en France à faire triompher la candidature d’Emmanuel Macron au détriment de François Fillon, il est clair, cependant, que la victoire électorale de Biden, même si elle est in fine entérinée par l’appareil judiciaire, a montré les limites du progressisme conquérant de par sa dépendance totale à l’outil médiatique. Celui-là depuis des années ne cesse de perdre sa puissance de conviction et, comme un triangle inversé, ne repose plus que sur sa pointe : celle forgée par des minorités activistes dont la force de frappe dépend du contrôle qu’elles exercent sur l’univers médiatique. Ce dernier, au fil des dernières décennies, s’est imposé comme le lieu quasi unique où le pouvoir, sous toutes ses formes, fonde sa légitimité et discrédite ce qui le conteste.

    Le réel et sa représentation

    Le jeu de la représentation politique via l’élection, qui porte le principe démocratique, a été subverti par la mise en scène des représentations médiatiques qui créent une surréalité plus puissante que la réalité elle-même par un processus de conditionnement mimétique des esprits. Cette tension entre la réalité et ses représentations est le fil conducteur du conflit idéologique moderne*. Cette confrontation incessante entre réalité et représentation est un espace instable où se joue un virulent travaille de retraitement du réel qui s’affirme comme le principal enjeu du pouvoir, c’est-à-dire de la domination des masses.

    L’actuelle séquence des élections américaines illustre au plus haut point cette réalité. Elle représente même un saut qualitatif décisif, où l’univers médiatique, massivement mobilisé, prend en charge l’élection d’un nouveau président, et le désigne comme vainqueur avant même la fin du cycle électoral. La réalité construite par les médias, celle d’un peuple en liesse qui se libère d’un bouffon tyrannique, doit s’imposer comme la réalité définitive, en dehors et au-delà du contexte réel de l’élection. Elle doit triompher comme une réalité qui ne peut plus être déconstruite une fois perçue comme un réel indestructible. Triomphe définitif de la représentation sur le réel qu’elle façonne, enfin, à son image et impose à la conscience collective.

    Et pourtant, à l’encontre du matraquage médiatique, Trump a montré une incroyable capacité de résistance. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : le président sortant, par rapport à 2016, gagne des points dans quasiment tous les segments de la société ; tout particulièrement auprès des hommes noirs (de 13 à 17%) et des hommes hispaniques qui lui donnent un très bon score de 35%, contre 32% en 2016. Chez les femmes noires qui représentent le segment le plus hostile à sa personne, sa performance, cantonnée à un très faible niveau, a tout de même doublé passant de 2 à 4%. Paradoxalement, la seule catégorie où son résultat a baissé est celle des hommes blancs, à 57% contre 62% en 2016, à comparer à une légère progression de 2 points à 54% pour les femmes blanches.

    Le parti pris médiatique, dans ce contexte de tension extrême, ne fait même plus vraiment l’effort de dissimuler ses engagements, tant l’hostilité au camp Trump est manifeste. Outre la litanie du vocabulaire dépréciatif pour décrire le candidat républicain, la mise en scène médiatique est systématiquement orientée. Le plus frappant, classiquement, est le déséquilibre au niveau des intervenants extérieurs ; quasi exclusivement anti-Trump. Le corps enseignant de Science Po est largement mobilisé à cet usage. Il doit bien pourtant exister, quelque part, quelques personnalités académiques favorables à l’actuel président. Mais pour le public français, le savoir et la raison sont forcément les ennemis du Trumpisme. Hasard ou nécessité, les représentants du parti républicain sur les plateaux télé s’expriment souvent dans un français très approximatif, quand les représentants démocrates maîtrisent parfaitement la langue de Molière !

    le langage corporel en dit tout aussi long, avec des sourires moqueurs et complices, ou des mines agacées, entre gens de bonne compagnie, quand on parle du rustre de la Maison Blanche, tandis que le ton devient grave et emphatique quand on évoque ses adversaires : « Sleepy Joe » devient un vieux sage poli par les ans et bonifié par les épreuves (il comprend si bien les gens qui souffrent, lui qui a tant souffert) et Kamala Harris, issue d’une lignée de grande bourgeoisie, devient une icône cool de la diversité bienheureuse, si proche des autres. Enfin, les commentaires des journalistes sont directement normatifs, ne prenant même plus la peine d’être formulés de manière interrogative : dès l’annonce des recours judiciaires contre les fraudes lancées par la Maison-Blanche, la question était tranchée ; le dossier est vide, Trump ne possède aucune preuve sérieuse. Comme si la constitution d’un dossier aussi complexe pouvait se construire en quelques heures ! Le commentaire, même absurde, est répété à l’infini et aucun propos contraire est sollicité.

    Réseaux sociaux vs médias mainstream : une guerre asymétrique

    Ce principe de non-contradiction est désormais la norme médiatique. On vient de le voir à l’œuvre avec la séquence du film hold-up sur la crise sanitaire. Face au succès foudroyant du documentaire, la machine médiatique s’est mise en branle avec une puissance de feu écrasante. Les commentateurs, sans exception, ont utilisé le vocabulaire codé de la doxa médiatique, sur le mode « fake news » et « complotisme ». Mais surtout, dans ce genre de procès d’exécration médiatique, la parole de l’accusé n’est jamais présentée au public*. On peut toujours rêver d’une confrontation en directe entre les auteurs du documentaire dénonciateur et ceux qui les accusent de mensonge et manipulation : face à face, arguments contre arguments, preuves contre preuves, c’est la seule méthode qui permet, sur la distance, d’évaluer la pertinence et l’honnêteté des thèses qui s’affrontent. Les principes de confrontation libre et contradictoire qui fonde le fonctionnement de la Justice, doivent également s’imposer dans l’espace médiatique qui pratique la chasse en meute, sans opposant.

    Des leçons à tirer

    De cet état de fait quelques leçons capitales peuvent être tirées qu’illustrent parfaitement l’exemple des élections américaines :

    Un basculement politique majeur s’avère quasi impossible dans la sphère occidentale tant que l’appareil médiatique dominant soutient inconditionnellement le système en place.

    La force grandissante des réseaux sociaux et de l’internet dans l’espace public ne permet pas, à ce stade, de contrecarrer la puissance d’influence des médias dominants. Deux raisons principales expliquent cette situation. Les médias alternatifs n’ont aucune cohérence idéologique et de reconnaissance qualitative qui les distinguent les uns des autres. Ils n’ont donc pas acquis de valeur légitimante auprès d’une large proportion du public, notamment les seniors qui n’ont pas nécessairement intégré la culture du net. Ils sont donc vulnérables face aux attaques déligimantes du système qui a su imposer l’accusation disqualifiante de complotisme dans les consciences collectives. Mais, surtout, l’information en ligne est consommée de façon éparpillée et individualiste, et ne provoque pas le même effet de masse que l’action concertée des médias mainstream, capable de toucher dans le même espace/ temps des foules considérables. On a pu voir les effets radicaux de cet affrontement asymétrique avec la contre-offensive massive lancée par le système médiatique contre le documentaire hold-up. La multiplication du même point de vue entre les différents médias produit un effet de sidération collectif qui annihile l’esprit critique. La puissance mimétique de l’unanimité devient irrésistible. Dans le jeu de la guerre médiatique, l’information dissidente sur internet joue un rôle similaire à celui de la guérilla dans les conflits armés. Elle inquiète et affaiblit l’ennemi, mais elle ne peut porter le coup décisif à l’adversaire.

    Fake news et occultation

    En conséquence, s’il est vain d’attendre un souci éthique de l’objectivité ou de la neutralité de l’univers médiatique institutionnel, ou une reconnaissance par le système de la valeur d’une info alternative sur le net, il ne faut cependant jamais renoncer à exercer une critique systémique sur l’espace médiatique dans le cadre exploitable du débat public. Toute occasion doit être saisie pour en souligner les partis pris et les méthodes de manipulation. La première d’entre elle, plus que la fausse information, la fameuse « fake news » disqualifiante, est la simple occultation de l’information qui dérange la vérité officielle. Comme le système a crée un délit de fake news, il faut aussi créer un délit d’occultation. Pour marketer ce nouveau concept par un anglicisme incontournable, on pourrait le qualifier de « fake reality ».

    Le système médiatique doit être mis sous la pression constante de courants d’opinion puissants qui prennent le public à témoin de ses dysfonctionnements. Tous les canaux d’expression possible doivent être utilisés à cette fin. Le combat pour une juste parité des points de vue dans le cadre des débats contradictoires doit s’imposer comme une exigence première. Il ne devrait plus être possible, pour exemple, d’assister à des débats sur les Etats-Unis ou la Russie, avec des participants qui expriment quais systématiquement des positions anti-Trump ou anti-Poutine.

    Dans l’affrontement idéologique contemporain le combat pour la légitimité médiatique est le plus décisif et donc le plus virulent. Trump est le premier dirigeant occidental a avoir assumé un conflit frontal avec l’univers médiatique. Cela lui a couté cher en termes d’image et peut lui valoir la perte de sa réélection ; ce qui n’est pas, en dépit de l’unanimisme des commentateurs, encore acté. Toutefois, sur la durée, les médias ne sortent pas indemnes de ce bras de fer. Leur image ne cesse de se dégrader aux yeux d’un public de plus en plus critique et ils sont poussés à radicaliser leurs engagements pour défendre leurs positions idéologiques. Cette dynamique les contraint à dévoiler leurs partis pris et les expose d’autant. Chacun a pu constater que la vague bleu annoncée était une illusion médiatique et que le dénigrement obsessionnel du personnage Trump, s’il avait radicalisé ses ennemis et probablement influencé les indécis, n’avait nullement entamé l’engagement de ses partisans. En conditionnant l’opinion mondiale à l’idée d’une défaite irréversible de Trump, les médias, alors que la bataille judiciaire n’était pas encore vraiment engagée, ont pris un risque majeur, qui entrainerait un effet dévastateur pour eux, si les tribunaux renversaient la sentence médiatique. L’apparente victoire des médias sur « l’ogre » de la Maison Blanche restera peut-être dans la mémoire collective comme un point de basculement dans l’histoire tumultueuse de la manipulation des foules.

    Didier Beauregard (Polémia, 20 novembre 2020)

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  • Terrorisme et immigration selon Le Monde : pas d’amalgame !...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de l'Observatoire du journalisme consacré à un article récent du quotidien Le Monde cherchant à minorer le lien entre terrorisme islamique et immigration...

     

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    Terrorisme et immigration selon Le Monde : pas d’huile sur le feu et pas d’amalgame

    Y a t-il un lien entre terrorisme et immigration ? Le quotidien Le Monde s’est posé cette grave question dans un article publié le 12 novembre 2020. En appelant à la rescousse plusieurs spécialistes patentés ou désignés d’office, le journal entend mettre ce lien « à l’épreuve des faits ». Ses arguments sont loin d’être convaincants.

    Tu parles d’où, camarade ?

    Dans les années 1960 et 1970, lorsqu’un intervenant prenait la parole dans une Assemblée Générale dans une salle de cours enfumée d’une université, il était très fréquent qu’on lui demande : « Tu parles d’où, camarade ? », afin de connaitre le courant idéologique qu’il représentait. À la même période, le quotidien Le Monde bénéficiait aux yeux de certains de la réputation de « quotidien de référence ». S’il s’agit d’une autre époque, bien lointaine, il est toujours utile de savoir dans quel courant de pensée s’inscrit un journaliste avant de lire son article.

    La journaliste Julia Pascual écrit de nombreux articles sur l’immigration dans le quotidien du soir. Leur point commun : présenter les migrants comme des victimes et les moyens considérables que déploie l’État français pour leur accueil comme insuffisants. C’est une opinion que l’on peut ne pas partager mais qui est respectable. Il est néanmoins utile de l’avoir à l’esprit lorsqu’on lit un article de la journaliste.

    Le lien entre terrorisme et immigration : un véritable tabou

    La journaliste donne comme exemples de ceux qui établissent un lien entre immigration et terrorisme des leaders de partis à la droite de l’échiquier politique et des populistes.

    « Ces propos suscitent un certain malaise, notamment au sein du secteur associatif ». En employant une telle formulation, Julia Pascual se focalise sur ceux qui rejettent ce lien réel ou supposé. Sont-ils nombreux ? Elle aurait pu également rappeler qu’un sondage de l’IFOP réalisé en 2018 fait ressortir qu’une majorité de Français estime que l’immigration « maximise le risque terroriste ».

    Un panel bien choisi

    Pour tenter de répondre à la question, la journaliste interroge un responsable d’une association aidant les migrants, un universitaire qui a tenté de cerner le profil des terroristes, un représentant du Centre d’analyse du terrorisme (CAT) et le directeur du Centre migrations et citoyennetés de l’Institut français des relations internationales.

    Leurs témoignages vont essentiellement dans le même sens : certains discours feraient un lien abusif entre les deux phénomènes.

    Julia Pascual rappelle les propos du ministre de l’intérieur : « Sur les 30 derniers terroristes confondus pour des actes commis sur notre sol, 22 étaient français, 8 seulement étrangers ».

    Le représentant du CAT estime que « nous sommes face à un terrorisme essentiellement endogène, conçu et exécuté dans le pays d’origine ».

    On monte d’un cran avec les propos du directeur du Centre migrations et citoyennetés de l’Institut français des relations internationales : « la problématique est davantage que la société française produit cette violence » (sic).

    Pour parachever le tout, la parole est donnée au directeur des études migratoires du think tank libertarien américain CATO qui estime que le terrorisme est un « phénomène rare » et qu’il n’y a pas d’« association significative entre la part des migrants dans un pays et une activité terroriste ». Il est utile de préciser que le think tank américain est un fervent défenseur de l’immigration, comme en témoignent les nombreux articles à ce sujet sur son site internet.

    Parmi les personnes interrogées sur le sujet, aucun n’établit donc de lien direct entre terrorisme et immigration. Par respect du pluralisme et du contradictoire, la journaliste aurait pu confronter ces positions à celles d’autres spécialistes de la question. Comme celle de Thibault de Montbrial par exemple. Le Président du Centre de réflexion sur la sécurité intérieure affirme dans un récent essai que « si l’islamisme découle de l’immigration, le terrorisme est le résultat de l’islamisme ». Mais poser le débat dans ces termes aurait peut-être fait vaciller des certitudes solidement pro-immigration…

    Les informations que vous ne trouverez pas dans l’article du Monde

    À ce stade, face à cette avalanche de chiffres, le lecteur du Monde ne peut que se rallier à la thèse selon laquelle, non, il ne peut pas être établi de lien entre terrorisme et immigration. Pourtant, d’autres informations toutes aussi « sérieuses » méritent d’être mentionnées :

    • Le think tank Fondapol a mis en avant dans un rapport publié en novembre 2019 que « La France a été le pays le plus touché de toute l’Union européenne, avec 71 attentats islamistes commis sur son sol entre 1979 et 2019. Ces attentats ont fait au moins 317 morts ». Le fait que la France ait la communauté musulmane la plus importante d’Europe n’est pas mentionné dans le rapport. Ce n’est d’ailleurs pas son propos. Parmi cette communauté, on peut trouver des islamistes à velléités terroristes. Chacun est libre d’établir les corrélations qu’il souhaite.

    • Le terrorisme ayant causé des morts dans notre pays dans les dernières années est exclusivement à motivation islamiste. Pour rappel, 263 Français ont péri en 5 ans pour ce motif. Le journal le Monde aurait été bien inspiré de rappeler que cette forme de terrorisme n’existait pas il y a quelques décennies. La multiplication des actes terroristes islamistes en France est étroitement liée à la propagation de l’islamisme, qui s’est lui-même développé avec l’immigration extra-européenne massive organisée et subie depuis les années 1960. Le terrorisme islamiste dit « endogène » concerne très majoritairement des jeunes d’origine immigrée de la deuxième génération.

    • Un internaute, Pont d’Arcole, a fait un minutieux recensement des islamistes ayant commis un attentat terroriste durant les cinq dernières années. Le résultat de son travail figure sur Twitter.
      On y constate que sur les 45 terroristes ayant organisé des attentats depuis 2015, seuls 5 sont des français convertis. Les autres sont soit des étrangers, soit, beaucoup plus rarement, des français d’origine étrangère (souvent maghrébine).

    • Un autre internaute Walker, a recensé « quelques déséquilibrés ayant tué en France ces 25 dernières années. Si vous trouvez leur point commun, merci de me le dire en commentaire », écrit-il, de façon espiègle…

    Déni du réel

    Le déni du réel n’est pas nouveau. En 2015, de nombreux médias dénonçaient déjà en bloc le « fantasme de l’infiltration terroriste », avant de rétropédaler laborieusement. Entre la généralisation hâtive et le déni, il y a un espace que n’a pas exploré le Monde. Désormais, c’est en niant le caractère exogène du terrorisme islamiste et son lien avec l’immigration que « pas d’huile sur le feu » et « pas d’amalgame » sont brandis à l’opinion publique. Il n’est pas sûr que même les lecteurs du Monde croient encore à ces sornettes.

    Observatoire du journalisme (OJIM, 18 novembre 2020)

     

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  • La force de vivre...

    Vous pouvez découvrir ci-dessous une intervention de Julien Rochedy qui évoque la force de vivre de Nietzsche, à travers son essai Le Gai Savoir. Publiciste et essayiste, Julien Rochedy est une figure montante de la mouvance conservatrice et identitaire. Il vient de publier un essai intitulé Nietzsche l'actuel.

     

                                             

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  • Quand islamisme et multiculturalisme condamnent les valeurs françaises...

    Nous reproduisosn ci-dessous un point de vue de François-Bernard Huyghe, cueilli sur la page des Médiologues, hébergée par Marianne, et consacré à la situation de la France de macron conspuée à la fois par le bloc islamiste et le bloc multiculturaliste...

     

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    Fini, la fausse compassion : quand islamisme et multiculturalisme condamnent les valeurs françaises

    Que nous étions vertueux, il y a cinq ans ! En janvier 2015 des millions de Français défilaient pour scander qu’ils étaient Charlie (voire policier, et juif), que le vivre-ensemble résisterait aux assauts du terrorisme (les termes "jihadisme" ou "islamisme" étant quasiment tabous) ; ni amalgame ni compromission. Le tout sanctionné par la présence émue de chefs d’État du monde entier, sous les caméras compatissantes du village planétaire.

    À l’époque les discours proclamaient que rien ne nous diviserait (surtout pas la religion qui n’avait rien à voir, vraiment, dans cette affaire), que nous ne renoncerions en rien à nos principes républicains : c’étaient notre universalisme et nos valeurs que visaient les barbares. Ils allaient voir.

    Cinq ans plus tard

    Cinq ans et quelques centaines de morts du jihadisme plus tard, la patrie des droits de l’Homme n’attire plus la même compassion. Dans le monde musulman les déclarations contre le pays blasphémateur se multiplient. Emmanuel Macron est obligé d’aller sur Al-Jazeera assurer qu’il comprend la sensibilité des croyants, que ce n’est pas le gouvernement qui fait les caricatures, et, d’ailleurs, que l’on a déformé ses propos.

    Les anathèmes se multiplient, les uns appelant au « droit » des musulmans de tuer « des millions de Français » (un ancien ministre malaisien), ou nous menaçant de la bombe atomique pakistanaise, les modérés nous reprochant seulement de persécuter les croyants en offensant ce qu’ils ont de plus sacré. Tandis que la Turquie nous insulte sans complexe : vous réservez à vos musulmans le même sort qu’aux juifs pendant la guerre. Toute une littérature islamiste instruit le procès de la fille aînée de l’Église et patrie de Voltaire ou de Charlie, la puissance colonialiste et le pays qui sanctionne les offenses à la Shoah, mais pas au Prophète.

    Ouh, les vilains Français

    Quant à la solidarité occidentale… Justin Trudeau (comme quelques ecclésiastiques) rappelle que la liberté d’expression ne saurait être sans limites (dont la fameuse « sensibilité des minorités »). Un article de l’Associated press, assez représentatif, pointe les raisons de la colère : notre passé colonial « brutal », notre « sécularisme » (façon de dire laïcité) intégrationniste et qui ignore les couleurs ou les différences des minorités, notre présence militaire et le discours d’Emmanuel Macron aux Mureaux. Le simple emploi du terme « séparatisme » auquel le président semblait finalement préféré substituer « islamisme », paraissant déjà incroyablement discriminant à la presse anglo-saxonne. On frôle à leurs yeux le discours populiste.

    Trop Occidentaux pour les uns, pas assez pour les autres

    Pour les uns (les islamistes) nous sommes super-occidentaux : débauchés, vendus aux Juifs, mécréants animés par la haine du Prophète, islamophobes agressifs d’État, pays à la fois des catholiques, des jacobins ou des francs-maçons, voire adorateurs de Satan. La Nation qui n’interdit pas et tolère toutes les offenses est le pays de la haine.

    Pour les autres, nous ne sommes pas assez occidentaux, au contraire. Nous sommes le pays coincé qui interdit trop et encourage les discriminations. Nous plaidons pour cette ridicule laïcité dont personne ne comprend le sens au lieu de laisser s’épanouir des « communautés », leurs cultures et leurs règles. Pas assez ouverts et normalisés, pas assez multiculturels, réacs, pas politiquement corrects puisque Macron emploie des mots qui blessent, pas assez entrés en repentance, d’un athéisme quasi-stalinien. Black live matters, décolonialisme, racisme systémique, justice sociale… nous n’avons pas intégré l’auto-critique qui caractérise l’Occidental (même si, paradoxalement, elle trouve son origine dans la French Theory des Foucault et Derrida digérés par les campus américains). Nous sommes la nation trop souverainiste, trop gaulliste, trop fière, trop populiste, trop arrogante avec son discours « républicain ». Des quasi suprémacistes.

    Repoussoir pour les deux grandes mondialisations, l’Oumma de l’islam et la globalisation du libéralisme

    Bref, un incroyable hiatus culturel fait de notre pays le pire repoussoir pour les deux grandes mondialisations, l’Oumma de l’islam et la globalisation du libéralisme. Et cela précisément sous le président cool qui se voulait moderne, performant et progressiste ; il va devoir assumer cette image dure. Il n’a plus le choix ; tout recul au nom des sensibilités ou des culpabilités serait inutile pour apaiser nos adversaires et ne serait surtout plus accepté par l’opinion française qui découvre sa colère.

    François-Bernard Huyghe (Les médiologues, 2 novembre 2020)

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  • L'explosion qui vient...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Maxime Tandonnet, cueilli sur son blog personnel et consacré à la colère qui monte dans le pays profond face aux mesures ineptes prises par le régime macronien.

    Ancien haut-fonctionnaire, spécialiste des questions d'immigration, et désormais enseignant, Maxime Tandonnet a été conseiller à l’Élysée sous la présidence de Nicolas Sarkozy. Il a donné un témoignage lucide et éclairant de cette expérience dans Au cœur du volcan (Flammarion, 2014).

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    L’explosion qui approche

    Chacun sent bien que le deuxième confinement ne passe pas dans le pays. Les sondages globaux sont faussés par le climat de peur. Sous l’effet de la crainte de la mort, les sondés répondent qu’ils sont prêts à tout accepter pour sauver leur peau. Mais dans les profondeurs de la nation, les mesures autoritaristes et liberticides du pouvoir ne sont pas acceptées. Cette fois-ci, les Français vivent comme une humiliation collective les laisser-passer obligatoires pour sortir de chez soi. Ils ne supportent pas que le pouvoir leur impose, comme à des enfants immatures, sa vision des produits « essentiels » et non « essentiels ». Ils ne comprennent pas le choix arbitraire – et tellement emblématique – d’autoriser la vente de tabac mais de leur interdire d’acheter des livres en librairie. Ils n’acceptent pas le chantage permanent, puéril, du pouvoir sur « les fêtes de Noël et de fin d’année ». Ils jugent inadmissible les restrictions apportées à leur liberté de circulation et les interdictions de voir la famille. Ils ressentent comme inepte l’ordre moral imposé d’en haut par un pouvoir jupitérien et ses ingérences dans la vie privée voire intime, quant au nombre de personnes admises à table. Les contrôles et la répression envers les passants paisibles sont vécus comme abusifs et inacceptables alors que la violence se déchaîne dans l’impunité habituelle au cœur des zones de non droit. Les croyants sont indignés de l’interdiction de célébrer leur culte. Ces mesures ne passent absolument pas dans les profondeurs du pays: elles sont ressenties par la France comme inutiles, inefficaces et illégitimes. L’impression d’arrogance obtuse qui tombe de là-haut suscite un profond malaise tout comme la morgue de dirigeants incapables d’admettre leurs fautes et prompts à se défausser de leur responsabilité sur la population. La défiance touche à son paroxysme. Un grondement sourd remonte des entrailles du pays, ce grondement qu’un pouvoir déconnecté, aveuglé par des sondages mensongers, ne saurait entendre. Ne l’entendez-vous pas ce grondement? L’aveuglement, l’autoritarisme, un comportement obtus, sourd à tous les arguments de bon sens sont les signes d’un pouvoir faible, en perdition, déboussolé. La révolte commence à prendre le pas sur la peur: dans un contexte économique et social épouvantable, nous sommes à la veille ou l’avant-veille d’une violente explosion et d’une crise politique d’une exceptionnelle gravité.

    Maxime Tandonnet (Blog personnel de Maxime Tandonnet, 14 novembre 2020)

     

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  • Arrêter la mer avec ses bras...

    Nous reproduisons ci-dessous un entretien donné par Jean-Loup Bonnamy à Figaro Vox et consacré au confinement et à la lutte contre l'épidémie de coronavirus. Normalien, agrégé de philosophie, Jean-Loup Bonnamy est spécialiste de géopolitique et de philosophie politique. Il vient de publier, avec Renaud Girard, Quand la psychose fait dérailler le monde (Gallimard, 2020).

     

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    «Vouloir arrêter une épidémie avec le confinement, c’est comme vouloir arrêter la mer avec ses bras»

    FIGAROVOX. - Ce nouveau confinement permettra-t-il d’endiguer la seconde vague, alors que vous dénonciez l’archaïsme et l’inefficacité sanitaire du confinement du printemps dernier dans un court essai paru dans la collection «Tracts» de Gallimard?

    Jean-Loup BONNAMY. - Je ne le pense pas. Ma principale critique contre le confinement est d’ordre sanitaire: le confinement n’est pas très efficace pour sauver des vies et désengorger le hôpitaux.

    C’est un remède passéiste et archaïque, une sorte de ligne Maginot. Au début du 19ème siècle, le grand écrivain Pouchkine décrivait déjà le confinement imposé par les autorités russes pour lutter (sans succès) contre l’épidémie de choléra. Je suis assez surpris qu’en 2020, à l’époque d’Internet, dans un pays moderne qui se trouve être la sixième puissance mondiale, on utilise un remède qui fait davantage penser au début du 19ème siècle qu’à l’ère du big data. Je ne suis donc pas sûr que le confinement soit le meilleur choix sur le plan sanitaire. D’ailleurs aucune preuve scientifique de son efficacité n’existe. Même l’OMS (qui avait beaucoup appuyé le confinement au printemps) déconseille aujourd’hui le recours au confinement.

    Relisez aussi Le Hussard sur le toit de Giono, qui se déroule en Provence durant l’épidémie de choléra de 1832 et vous verrez que le confinement marche mal. En effet, le bon sens voudrait qu’on sépare les malades des non-malades afin d’éviter la contagion. C’est la base de la médecine moderne et du traitement des maladies infectieuses (diagnostiquer/isoler/soigner). Or, dans le confinement, cette logique de séparation et de mise à l’isolement n’est absolument pas respectée.

    Au contraire, on enferme ensemble des malades et des non-malades, facilitant parois ainsi la propagation du virus. C’est d’ailleurs ce qu’on a constaté dans les Ehpad: le confinement risque de diffuser la maladie chez les plus fragiles et d’aboutir à une hécatombe. Le précédent du bâteau de croisière japonais Diamond Princess (où plus de 712 personnes furent contaminées) devrait nous alerter sur le danger de confiner ensemble des malades et des non-malades.

    Fermer les petits commerces ou empêcher les gens de sortir dans la rue sans attestation est assez inutile puisque 80 % des contaminations ont lieu dans le cercle familial et que la contamination en extérieur, à l’air libre, est presque impossible.

    Cette faible efficacité sanitaire du confinement pour lutter contre le Covid-19 et sauver des vies est frappante lorsque l’on compare les pays. L’Argentine est confinée depuis le printemps et le nombre de morts du Covid y augmente encore. Au contraire, Taïwan (21 millions d’habitants) n’a pas confiné et n’a eu que sept morts! Les pays qui ont confiné longtemps au Printemps (Espagne, Italie, France, Belgique, Royaume-Uni…) affichent un nombre de morts très élevé. Au contraire, l’Allemagne, qui a fait le choix d’une autre stratégie avec un semi-confinement beaucoup plus souple, terminé plus tôt, mais un dépistage massif et une bonne qualité de soin, compte six fois moins de morts par habitants que la France. Les pays asiatiques qui font le choix du dépistage et de l’isolement des malades (7 décès à Taïwan, 400 en Corée, 107 à Hong-Kong…) comptent beaucoup moins de décès. Et ce sans même recourir au moindre confinement!

    Vouloir arrêter une épidémie avec le confinement, c’est comme vouloir arrêter la mer avec ses bras. Le virus est une création de la nature. Si l’épidémie s’est arrêtée partout en Europe en mai (y compris en Suède, pays qui n’a pas confiné), c’est en grande partie pour des raisons naturelles. Si elle reprend aujourd’hui, ce n’est pas à cause d’un «relâchement» des Français ni d’un déconfinement trop rapide ni d’une perte de contrôle, mais pour des raisons naturelles. On nous dit aujourd’hui que l’épidémie est devenue hors-de-contrôle: ce n’est pas exact.

    Certes, elle est hors de contrôle aujourd’hui, mais en réalité, elle l’a toujours été. On ne sait pas contrôler la propagation d’un virus respiratoire. Si elle s’est mise en sommeil à l’été, c’est pour des raisons indépendantes de notre action. C’est un fait bien connu que dans les régions tempérées comme l’Europe (ce n’est pas le cas dans les autres types de climats), les virus respiratoires sont plus contagieux et plus violents à la saison hivernale. C’est d’ailleurs cette saisonnalité des virus respiratoires qui nous a permis d’annoncer dans notre livre (avec raison, hélas) la survenue d’une deuxième vague et la saturation pour l’automne de notre système hospitalier. Et c’est pour cette même raison que je ne crois pas au confinement, car à ma connaissance il n’a pas la capacité d’agir sur le taux d’humidité ou le cycle des saisons.

    Surtout, quand même bien le confinement marcherait, les contagions reprendraient très vite dès le début du déconfinement tant que l’hiver ne sera pas passé. Il faudrait donc reconfiner et ainsi de suite. Combien de confinements allons-nous vivre?

    D’autres solutions seraient possibles, sans que le nombre de décès n’explose?

    Oui. Je doute de l’efficacité des mesures générales. Prenons un exemple: les accidents de la route tuent un million de personnes par an, avec une moyenne d’âge bien plus basse que celle du Covid. Pourtant, on n’interdit pas la voiture pour autant. Mais on prend des mesures ciblées: réfection des routes, lutte contre l’alcoolémie, voitures plus solides et avec des airbags...Entre tout fermer et ne rien faire, il existe un juste milieu, qui est la seule attitude efficace: les mesures ciblées.

    Autre exemple: au Japon, il existe un phénomène naturel très grave: les séismes. Les Japonais ont-il eu l’idée bizarre d’empêcher les séismes? Bien sûr que non! Cela veut-il dire qu’on ne peut rien faire contre les séismes? Certainement pas! D’une part, les Japonais cherchent à détecter le mieux possible les tremblements de terre afin d’évacuer la population au plus vite, d’autre part, ils font des constructions anti-sismiques très robustes. Pour le virus, c’est la même chose.

    Il est illusoire et irréaliste de penser qu’on va contrôler la circulation d’un virus respiratoire émergent dans un pays de 67 millions d’habitants. Ce serait comme vouloir empêcher les séismes. Mais cela ne signifie pas qu’on ne peut rien faire contre le virus. Bien au contraire. L’objet principal de mon essai est de dessiner une stratégie sanitaire alternative, sérieuse et crédible, inspirée de ce qui réussit à l’étranger et du retour d’expérience des soignants sur le terrain, une stratégie plus efficace que le confinement pour sauver des vies. Comme je l’ai dit, le danger du virus n’est pas sa (faible) mortalité, mais sa capacité à saturer les hôpitaux. Or, le confinement ne réglera pas ce grave problème de saturation hospitalière. Pour le régler, il n’y a que deux choses à faire.

    D’une part, augmenter en urgence les capacités hospitalières. Il faut mobiliser l’armée (comme l’ont fait les Suédois), les cliniques privées, les médecins et infirmiers libéraux, les médecins et infirmiers récemment retraités, recruter des femmes de ménage (pour décharger les soignants de toutes les tâches non-médicales, comme par exemple refaire les lits). Comme le propose le Docteur Kierzek, on pourrait aussi organiser les services différemment: plutôt que de mettre dans une même équipe cinq médecins-réanimateurs, éclatons le service en séparant les spécialistes et en plaçant autour d’eux des internes ou des infirmiers non-spécialisés, mais coachés par le réanimateur. On multiplierait ainsi d’autant le nombre d’équipes de réanimation. Il nous faut plus de lits de réanimation (environ 20 000 au total) et aussi plus de lits conventionnels en soins intensifs.

    D’autre part, il faut appliquer le tryptique tester - isoler - traiter. Il faut un dépistage de masse dans la société française: sur le lieu de travail, dans les Ehpad, dans les pharmacies...Les personnes à risque - que l’on peut identifier grâce au big data de l’assurance-maladie - doivent être dépistées deux fois par semaine, avec des tests antigéniques (plus rapides et moins chers que les PCR). Ainsi les Slovaques viennent de tester 75 % de leur population en un week-end! Si on est malade, il faut être isolé dans un hôtel (comme le fait la Corée et comme le préconise l’Académie de médecine).

    Surtout, il faut prendre en charge les malades le plus tôt possible, en leur donnant de l’oxygène, et si besoin des corticoïdes et des anticoagulants. Cela permet de faire s’effondrer le taux de décès et de passage en réanimation. Et ça peut se faire à domicile ou à l’hôpital, avec un personnel qui n’a pas besoin d’être très formé. Avec une telle méthode, on éviterait le confinement, on sauverait l’économie et surtout on aurait bien moins de morts du Covid!

    La peur est mauvaise conseillère: le confinement est un remède pire que le mal?

    Ma critique du confinement est bien sûr aussi économique et sociale. Le remède (le confinement) risque d’être bien pire que le mal (le Covid). Le bilan coûts-avantages du confinement (que tout Gouvernement devrait faire avant de se décider) est largement défavorable au confinement. Durant le premier confinement, les violences conjugales ont augmenté de 40 %. La période a aussi été très dure pour les personnes atteintes de troubles psychiques et a multiplié les addictions et les dépressions.

    Et la crise économique, ce sont des choses très concrètes: la récession, le chômage, l’appauvrissement généralisé, les faillites, les suicides, un pays exsangue...Le premier confinement a déjà jeté un million de Français en plus dans la pauvreté. Les bénéficiaires de l’aide alimentaire ont augmenté de 30 %. Le Secours populaire a vu exploser le nombre de demandes de repas et 45 % des gens qui sont venus étaient jusque là inconnus de l’association.

    Si le confinement était un essai médicamenteux, on l’arrêterait tout de suite à cause des effets secondaires terribles! Il ne s’agit pas d’opposer économie et santé, car les crises économiques dégradent notre santé et tuent aussi. 1929 l’a prouvé.

    Surtout, le confinement et ses effets économiques menacent notre système hospitalier. En effet, c’est l’activité économique qui, grâce à des impôts et à des charges, finance notre système hospitalier. Si on contracte l’activité, il y aura moins de rentrées fiscales et donc moins d’hôpitaux, moins de lits, moins de respirateurs avec des soignants moins nombreux et moins bien payés! Pour sauver notre système hospitalier, il faut déconfiner au plus vite!

    Vous décrivez aussi la «psychose» qui s’est emparée du monde depuis le début de l’épidémie: en fait-on trop avec ce virus?

    Ce virus nous pose un énorme problème de santé publique, qui vient du caractère potentiellement suffocatoire de la maladie chez les patients à risque. Nos services de réanimation risquent d’être submergés. Mais en ce qui concerne la dangerosité du virus, elle reste faible. L’épidémie de Covid-19 est une épidémie banale, d’ampleur moyenne, comme l’humanité en a déjà connu des centaines. Chaque année, 60 millions de personnes meurent dans le monde (dont 600 000 en France). En 2020, le Covid-19 à lui seul ne fera pas bouger le chiffre de la mortalité mondiale.

    La mortalité du Covid-19 est bien inférieure à 0,5 %. Sur les 1046 marins infectés du porte-avions Charles de Gaulle, aucun n’est mort. La mortalité de son cousin le SRAS, qui toucha l’Asie en 2003, était comprise entre 10 et 20 %. Celle de son autre cousin, le Mers saoudien est de 40 %. Celle d’Ebola oscille entre 60 et 90 %. Comme dans l’écrasante majorité des infections respiratoires classiques et contrairement à la Grippe espagnole de 1918 qui frappait principalement des jeunes, le virus tue surtout des personnes âgées. Que ferons nous le jour où nous serons confrontés à un virus aussi contagieux mais bien plus létal que le Covid-19?

    Bien sûr, nous pourrions parler des grandes épidémies du passé, bien plus mortelles que l’épidémie actuelle, avec la Peste noire au 14ème siècle (40 % de la population européenne tuée!) ou la Grippe espagnole de 1918-1919 (50 millions de morts), mais rappelons juste qu’en 1969, alors que nous étions déjà un pays moderne, la grippe de Hong-Kong a fait un million de morts dans le monde, dont 35 000 en France. Pourtant, aucune mesure particulière n’avait été prise et la société n’en a gardé aucun traumatisme.

    Selon l’OMS, en 2016, les broncho-pneumopathies obstructives ont fait plus de deux millions de victimes. Cette année-là, on n’a pas arrêté l’économie de la planète pour autant.

    En Chine, la pollution deux millions de personnes par an. Cela veut dire que le nombre de morts causé par la pollution en Chine sera plus important que le nombre de victimes dues au Covid-19 non seulement en Chine, mais même dans le monde entier. Même chiffre en Inde. Si nous regardons les épidémies actuelles, nous voyons que deux millions de gens sont rongés vivants et mutilés par la lèpre (avec 200 000 nouvelles contaminations par an). 200 millions de gens souffrent du paludisme, maladie qui tue 500 000 victimes par an. Pourtant, ces pathologies bien plus dangereuses ne mettent pas le monde à l’arrêt, car comme elles sont connues de longue date, elles ne provoquent plus aucune hystérie. C’est la nouveauté du virus qui nous terrorise.

    En 2020, les causes principales de la mortalité vont rester les mêmes que les années précédentes: cancers (neuf millions de morts par an), faim (9 millions de morts par an, il suffit donc de 40 jours à la faim pour tuer autant que le Covid depuis son apparition), pollution, broncho-pneumopathies (3,5 millions), infections respiratoires hors-Covid (2,5 millions, dont 600 000 pour la grippe), tuberculose (un million), paludisme, SIDA, hépatites, accidents de la route, guerres...Les vrais tueurs de masse du 21ème siècle en Occident ne sont pas le Covid-19. Ils ont pour nom: drogues, acides gras saturés, sel, sucre, surconsommation de médicaments, tabac (qui fait 75 000 morts en France chaque année)...Ce sont eux qui tuent le plus. C’est sur eux que nous devrons faire porter sur la durée nos politiques de santé publique.

    Comme le Covid tue surtout des personnes avec une espérance de vie déjà basse, il n’a pas pour l’instant provoqué de surmortalité. Dans notre livre, je cite l’exemple d’un médecin qui a intubé un homme atteint d’un cancer en phase terminale et qui ne pesait plus que 37kg...mais comme ce malheureux patient était aussi positif au Covid, il a été compté comme mort du Covid. En France, malgré la première vague et un pic de mortalité en avril, il n’est finalement pas mort plus de gens du 1er janvier au 30 septembre 2020 qu’en 2019 sur la même période. La Suisse a même connu en 2020 moins de décès au premier semestre 2020 qu’en 2019. Nous sommes donc en pleine surréaction contre-productive.

    Cette surréaction confine même parfois au délire. En Inde, des agressions contre le personnel soignant (suspecté d’être contaminé) ont eu lieu. Des infirmiers et des médecins ont été attaqués dans la rue ou expulsés de chez eux par leurs propriétaires ou leurs voisins. Le problème est tel que le Premier ministre, Narendra Modi, a condamné ces actes publiquement et menacé leurs auteurs de poursuites judiciaires. En Italie, une jeune femme médecin a été tuée par son compagnon, qui l’accusait (à tort) de lui avoir transmis le virus. Au Canada, pays où la police peut débarquer chez vous pour vérifier que vous ne recevez pas des amis, Theresa Tam, responsable de la santé publique, a préconisé de porter le masque durant les rapports sexuels.

    Ne prenons pas ces manifestations à la légère: la psychose tue. Souvenons-nous de ces drames courants qui surviennent régulièrement dans certains stades ou boîtes de nuit: un incendie se déclare, les gens fuient dans la panique, l’incendie ne tue personne mais la bousculade due à la panique, elle, fait plusieurs morts. Si tout le monde était sorti dans le calme, tout se serait bien passé. Souvenons-nous aussi de la défaite de 1940 et de l’Exode. Nous n’avions perdu que 2 % de nos soldats. Nos pertes n’étaient pas plus élevées que celles des Allemands et nous pouvions poursuivre la lutte.

    Pourtant, nous avons été saisis par la «froide déesse» de la peur, pour reprendre l’expression de Joseph de Maistre. Totalement désorganisés, nous avons abandonné le combat et la population s’est enfuie sur les routes dans une pagaille généralisée qui a causé la mort de 100 000 civils! Au contraire, à Dunkerque, l’évacuation miraculeuse des troupes britanniques et françaises, au milieu des bombes allemandes, n’a été possible que parce que les hommes se sont montrés disciplinés et n’ont pas cédé à la panique. Étant aujourd’hui dans une situation infiniment moins grave que la leur, nous devrions, nous aussi, pouvoir garder notre calme.

    Les médias ont eu, selon vous, une large responsabilité dans cette psychose...

    L’Histoire est riche en psychoses collectives, mais c’est la première fois - à cause d’Internet et des médias - qu’une psychose gagne le monde entier ou presque. Pour expliquer cette psychose ambiante, nous avons développé un modèle explicatif: le triptyque médiatisation - émotion -mimétisme.

    Les médias renforcent la psychose ambiante. Ils ont repris sans précaution les modélisations statistiques apocalyptiques de l’Imperial college de Londres, qui prédisaient 500 000 morts à la France si elle ne confinait pas. Or, les mêmes statistiques annonçaient 70 000 morts à la Suède sans confinement. La Suède n’a pas confiné. Bilan? 5 997 morts. 11 fois moins qu’annoncé. En termes de nombre de morts par habitant, c’est à peine plus que la France. Et c’est beaucoup moins que des pays qui ont pourtant lourdement confiné comme la Belgique, l’Espagne, l’Italie ou le Royaume-Uni.

    De même, les médias alimentent la psychose en nous donnant chaque jour le nombre de morts du Covid (même à l’été quand ce chiffre était fort bas). Pourquoi ne le font-ils pas aussi pour la grippe (entre 5 000 et 15 000 morts par an en France, avec un pic à 21 000 en 2017), les cancers, les accidents de la route ou les suicides? Ils nourrissent aussi la psychose en parlant sans cesse de quelques rares jeunes qui sont morts du covid-19. Mais les cas sont extrêmement rares et, quoique tragiques, restent insignifiants sur le plan statistique. D’ailleurs, chaque année, en France, quelques enfants et adolescents meurent de la rougeole, de la varicelle ou de la grippe (dont un nourrisson en janvier 2020 à Pontarlier).

    Comme disait Lénine, «les faits sont têtus». La moyenne d’âge des patients décédés avec le Covid-19 est de 81 ans en France. Cette moyenne d’âge correspond à celle de l’espérance de vie! Dans le cas du Luxembourg, elle est même supérieure de 4 ans à celle de l’espérance de vie (86 ans de moyenne d’âge pour les victimes du Covid alors que l’espérance de vie luxembourgeoise est de 82 ans). En France, un tiers des décès a eu lieu dans les Ehpad, 80 % des victimes avaient plus de 75 ans, 93 % plus de 65 ans. Les deux tiers souffraient d’une comorbidité.

    Seuls 2 % des patients décédés étaient âgés de moins de 60 ans et sans comorbidité connue (mais peut-être certains avaient-ils des comorbidités cachées). Même chez les personnes âgées, les taux de survie restent bons. Chez les plus de 90 ans, c’est-à-dire chez les plus vulnérables, la mortalité du virus est de 20 %. Ce qui signifie qu’un nonagénaire infecté a tout de même 80 % de chances de survie. A cela, il faut ajouter le critère du surpoids: 83 % des patients Covid en réanimation sont en surpoids.

    Beaucoup de ces jeunes victimes du Covid-19 souffraient d’autres pathologies. On a par exemple beaucoup parlé de la mort d’un adolescent portugais. Mais après examen, on a découvert que, même s’il avait bien été atteint par le Covid, il souffrait d’un psoriasis qui avait affaibli son système immunitaire et que surtout il avait aussi une méningite, maladie qui soit fut la vraie cause de sa mort soit qui amplifia considérablement les effets du Covid. On nous a aussi parlé de la mort d’un adolescent guyanais de 14 ans. Certes, le pauvre jeune homme était positif au Covid, mais il était surtout atteint de la fièvre jaune, une maladie tropicale très grave, qui a une mortalité de plus de 30 % et qui fut la vraie raison de sa mort.

    De même, sur son site, la BBC a consacré un article entier à la mort d’une petite fille de 5 ans. Au détour de l’article et sans insister sur cette information pourtant capitale, le média de référence britannique nous dit allusivement que la petite fille souffrait d’une autre pathologie, sans préciser laquelle. La mort d’un enfant est toujours un scandale. C’est injuste et horrible. Tout doit être fait pour empêcher que cela ne se produise. Mais ce sont des choses qui arrivent. Six millions d’enfants de moins de 15 ans meurent chaque année dans le monde. Un enfant meurt toutes les deux minutes du paludisme, soit 260 000 par an.

    Tout en étant factuel, l’article de la BBC alimente la psychose collective en faisant passer un message subliminal: les enfants meurent aussi du Covid-19! Or la réalité statistique est tout le contraire: le virus est quasiment inoffensif pour les enfants et les adolescents. 0,4 % des victimes ont moins de 45 ans. Sur 39 000 morts en France, 28 ont moins de 30 ans. Et les rares fois où il tue des enfants, ceux-ci sont très souvent atteints par ailleurs d’une pathologie lourde. Plus tard, il faudra que les sociologues analysent soigneusement le rôle qu’ont joué les médias dans l’émergence d’une psychose mondiale face à une maladie peu létale.

    La vie humaine a une valeur inestimable. Quel que soit son âge, toute personne doit être soignée et sauvée si cela est possible. Il est hors de question de laisser qui que ce soit mourir d’asphyxie alors que nous serions en mesure de l’empêcher. Mais mettre davantage en avant ces statistiques aurait trois avantages: réduire la psychose, mieux protéger les personnes à risque, laissez vaquer à leurs occupations habituelles tous ceux qui ne risquent rien.

    Nous ne pouvons pas mettre tout un pays à l’arrêt et détruire notre économie pour un virus à la létalité aussi faible et qui tue un public aussi âgé et aussi ciblé. Nous devons maintenant utiliser d’autres méthodes pour protéger les personnes à risque.

    Êtes-vous surpris par le consentement de la population française à ces mesures? Où sont passés les Gaulois réfractaires?

    La population fait preuve d’un admirable civisme, même si ce second confinement est déjà beaucoup moins bien accepté que le premier. Mais le Gaulois réfractaire est une bombe à retardement.

    Plus le confinement sera long, plus le risque de troubles sociaux violents est important. Déconfinons de toute urgence!

    Jean-Loup Bonnamy (Figaro Vox, 6 novembre 2020)

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