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Géopolitique - Page 57

  • "Une guerre civile, pas une insurrection générale contre un dictateur"...

    Nous avons cueilli sur l'excellent blog Secret défense, tenu par Jean-Dominique Merchet, journaliste à Marianne, cette analyse éclairante de Patrick Haimzadeh, auteur d'un essai récemment publié chez Jean-Claude Lattès et consacré à la Libye.

     

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    Patrick Haimzadeh est l'un des rares spécialistes français de la Libye, pays où il a été en poste, à l'ambassade de France de 2001 à 2004. Ancien lieutenant colonel de l'armée de l'air, arabisant, il a servi dans de nombreux pays arabes ainsi qu'aux Nations-Unies. Il vient de publier un livre, facile d'accès et bien documenté "Au coeur de la Libye de Kadhafi" (Editions Jean-Claude Lattès, 200 pages, 15 euros). Patrick Haimzadeh a bien voulu répondre à nos questions.

    Kadhafi ne tombe pas aussi vite que certains l'espéraient au début de l'intervention militaire. Cela vous surprend-il ?

    Kadhafi résiste en effet plus que certains voulaient bien le penser. J'ai toujours dit, et écrit, que Kadhafi avait les moyens de résister. Ceux qui pensaient le contraire n'avaient aucune connaissance du terrain  et se sont laissés intoxiquer par les propagandes du CNT, d'al-Jazira et de BHL, consensuellement relayées par les médias et les politiques français. A vouloir confondre nos désirs avec les réalités du terrain, nous en sommes arrivés à surestimer la capacité des insurgés à l'emporter militairement et à sous-estimer la capacité de résistance du clan Kadhafi.
     
    Kadhafi résiste non seulement parce qu'il disposait de gardes prétoriennes plutôt bien équipées et entraînées au regard des standards locaux mais parce qu'il disposait et dispose encore d'une base sociale non négligeable au sein de la population, en particulier les populations originaires du Fezzan (Sud) qui ne se sont jamais soulevées mais aussi de certaines populations de Tripolitaine (Ouest).

    Depuis 42 ans, Kadhafi a mis en place en effet  un système de compromission et de rétribution généralisé qui, bon an mal, s'est révélé d'une grande efficacité. Il dispose toujours d'immenses capacités de rétribution des fidèles. Sans rentrer dans le détail de la structure sociale libyenne et des tribus que je décris en détail dans mon ouvrage, je dirai qu'en Libye, le niveau local est à prendre en considération en premier lieu. Ainsi, il est illusoire de penser que les habitants de Cyrénaïque iront porter la guerre et "libérer" les populations de l'Ouest. D'une manière générale les insurgés seront extrêmement réticents à faire des incursions en armes sur des territoires qui ne sont pas les leurs, en particulier s'il s'agit de territoires fidèles ou favorables à Kadhafi.

    Comment qualifieriez vous cette guerre ?

    Depuis début mars, il s'agit d'une guerre civile et non d'une insurrection générale d'un peuple contre un dictateur.

    Quelle était selon vous la bonne stratégie à adopter ?

    L'entrée en guerre sans analyse préalable, ou plutôt sur la base d'analyses erronées, sans plan B, sans idée claire de l'effet final recherché - le but de guerre n'a jamais été clair : protection des populations ou chute du régime - sachant que ce deuxième but n'est pas inscrit dans la résolution 1973 -  et sur la base d'une manipulation, volontaire ou non, consistant à nous faire croire à l'imminence d'un bain de sang en Cyrénaïque, cette entrée en guerre portait dès le départ les germes des "déconvenues" à venir.

    La décision d'entrer en guerre est la décision la plus grave qui soit pour un Etat qui doit se poser la question si cette entrée en guerre est la solution la plus adaptée et conforme aux intérêts supérieurs de notre pays. Entre ne rien faire et bombarder existait toute une palette de moyens à commencer par l'engagement de négociations et l'exercice de pressions pour obtenir un cessez le feu et la préservation des acquis pour les zones déjà libérées, y compris en leur fournissant équipements et conseils ce qui a été fait par exemple avec succès à Misrata. Un certain nombre de Libyens des deux camps, y compris certains proches de Kadhafi,  étaient d'accord pour négocier. Entretenir le CNT dans la certitude qu'il pouvait l'emporter militairement grâce à des bombardements a conforté les plus extrémistes des insurgés dans leur refus de toute concession avant le départ de Kadhafi du pays. Condition irréaliste justement au regard de la psychologie et du passé du dictateur.

    Maintenant que nous sommes en guerre, que doit-on et que peut-on faire ?

    Comme nous avons choisi d'exclure dès le départ tout recours à une intervention terrestre et qu'il n'existe pas dans l'histoire de l'arme aérienne de précédent de la chute d'un régime uniquement obtenue par des bombardements, la situation actuelle était largement prévisible dès le départ. Il faut bien comprendre qu'il n'y aura pas de solution militaire à cette guerre civile car une guerre civile est toujours une tragédie qui laissera des traces sur la société libyenne. La solution passera par un accord entre Libyens pour poser les bases de la reconstruction d'un futur "vivre ensemble" libyen. En tuant ses proches et des membres de sa famille nous avons conforté Kadhafi dans sa volonté de se battre. Les bombardements de ses résidences et de celles de ses proches étaient des erreurs stratégiques qui se sont révélées contreproductives.Tuer des enfants innocents au prétexte de protection des populations civiles constitue en outre une violation de la résolution 1973 et une faute morale.
     
    Une solution pourrait consister à faire pression sur les deux parties pour obtenir un cessez le feu et déclarer que l'objectif de "protection des populations civiles" stipulé par la résolution 1973 est atteint. Les zones libérées conserveraient leur autonomie sous protection internationale, comme cela a été le cas pour les Kurdes d'Irak entre 1991 et 2003, et un processus de transition politique serait mis en place dans les zones sous contrôle de Kadhafi avec garantie que l'unité du pays ne soit pas remise en question. L'idée d'une Libye fédérale ou confédérale devra faire son chemin car elle est la plus conforme à l'histoire, à la culture et aux aspirations des Libyens.

    Que représente les insurgés ?  

    Les insurgés représentent un peu plus d'un tiers de la population libyenne : la Cyrénaïque, la ville de Misrata et une grande partie du Djébel Néfoussa qui comprend des tribus berbères et quelques tribus arabes.  Dans le reste de la Tripolitaine et dans le Fezzan (grand sud) environ 75% de la population est attentiste et le reste soutient plus ou moins activement le régime.

    Peut-on imaginer ce que sera une Libye après Kadhafi ?

    Parler de la Libye post-Kadhafi alors que l'on ne connait pas encore les conditions de sortie de guerre est prématuré. Ce qui est sûr c'est que tout sera à reconstruire dans ce pays où Kadhafi a empêché l'émergence de toute vie ou structure politique et étatique depuis plus de 42 ans. Le pays dispose d'énormes atouts que sont ses ressources pétrolières et quelques technocrates relativement bien formés. Les difficultés seront néanmoins énormes du fait des disparités et des particularismes régionaux et locaux qui seront difficilement compatibles avec l'établissement d'un pouvoir central fort. Une solution fédérale, voire confédérale avec des dévolutions de pouvoirs forts au niveau local est la mieux à même de satisfaire les aspirations du peuple libyen. Les Libyens sont en outre très fiers de leur indépendance et verront d'un mauvais œil toute ingérence étrangère dans leurs affaires intérieures.

     
    Enfin, les séquelles de la guerre civile seront là pour longtemps. Quand j'étais en Libye, les gens se renvoyaient encore parfois de vieilles accusations d'actes de "collaboration" auxquels leurs grands ou arrières grands-parents se seraient livrés avec l'occupant italien dans les années 20...

    Patrick Haimzadeh (Propos recueillis par Jean-Dominique Merchet pour Secret défense, 7 juillet 2011)

     

     

     

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  • La démondialisation, un concept réactionnaire ?...

    "La démondialisation est un concept réactionnaire" déclare Pascal Lamy, directeur de l'Organisation mondiale du commerce dans le Monde daté du 1er juillet 2011. Le petit soldat du mondialisme prendrait-il peur ? Pourtant, comme l'explique avec brio Hervé Juvin, nous ne couperons pas à un débat sérieux sur le protectionnisme...

     

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    Du contrôle des échanges au choix du consommateur

    La France est-elle encore une entité stratégique ? L’Union européenne a-t-elle quelques chances d’en constituer une ? Au moment où la multiplication de ses engagements militaires hors frontières pose question à la France, au moment où la perspective de consolidation politique de l’Union européenne semble incertaine, sinon condamnée, la question ne peut plus être évitée. La présentation, jeudi matin 16 juin, à la Maison de l’Amérique latine, d’un sondage réalisé par l’IFOP à l’initiative de Philippe Murer (1), avec notamment Emmanuel Todd, Jacques Sapir et Jean-Luc Gréau, a donné un tour économique et politique précis à la question ; la France, ou l’Europe, sont-elles encore en état de décider de leurs échanges avec l’extérieur ? Si le propre de tout système vivant est bien de gérer ses échanges, c’est-à-dire de prendre de l’extérieur ce qui le nourrit, l’enrichit et le conforte dans son être, de rejeter à l’extérieur ce qui le menace, l’appauvrit ou le contamine, le constat est sévère ; l’Union européenne n’a pas été le moyen pour les peuples européens de s’approprier leur destin, elle a été le moyen de les déposséder, et d’abord en substituant les comités et les experts au débat public et à la volonté collective exprimée par le principe majoritaire. L’histoire du principe de la préférence communautaire, d’abord favorable aux échanges entre pays et régions d’Europe, progressivement vidé de tout sens par la multiplication des accords assurant à des pays extérieurs des conditions  analogues d’accès au marché européen, est significative. L’histoire de l’ouverture aux mouvements de capitaux étrangers est tout aussi significative, le sommet étant atteint par la politique de placement des titres de l’Etat français par l’Agence France-Trésor auprès des investisseurs étrangers, aujourd’hui détenteurs de plus de 70 % de la dette publique, ce qui rend la France plus dépendante que toute autre du bon vouloir des agences de notation. L’histoire des abandons successifs qui ont permis d’ouvrir à tout vent l’espace Schengen, les renoncements progressifs au contrôle et à la gestion des populations résidant à l’intérieur de l’Union européenne, écrivent un autre chapitre de la haine des peuples par ceux qui assoient leur pouvoir sur une dissolution des Nations qui rétablit l’esclavage, qui autorise le trafic des êtres humains comme celui des terres ou de la vie, et qui les mettra à l’abri de la justice, de la colère, ou de la vengeance.

    Le sondage IFOP publié ce jeudi 16 juin marque un moment majeur de la conscience française ; sera-t-il manqué comme tant d’autres l’ont été ? Successivement, la campagne et le débat sur le  traité de Maastricht, le débat et le refus de la Constitution européenne, donnaient au gouvernement de la France la légitimité d’un ressaisissement, et à l’Union européenne, la chance d’un questionnement. La crise des dettes souveraines, dont on ne dira jamais assez combien elle est une opportunité stratégique essentielle pour ceux qui ne veulent pas d’une Europe forte, pour ceux qui veulent laisser l’Europe dans la situation coloniale qui est la sienne depuis 1945, pour ceux qui veulent affermer l’Europe à leurs intérêts et à leurs manœuvres, est une occasion analogue. Si le propre de l’humanité est bien de se constituer en sociétés politiques, singulières, autonomes, diverses, les moyens de cette singularité, de cette autonomie et de cette diversité résident d’abord dans les frontières, matérielles ou morales, qu’elles savent établir et gérer pour s’affirmer dans leur être. Les illusions de la dissolution des entités nationales dans le grand tout mondialisé, et du local dans le marché global, se dissipent à mesure que le spectre de la misère et celui du manque reviennent nous hanter. Et les Français, à plus de 70 %, tous partis et tendances politiques confondus, veulent que s’ouvre le débat sur le protectionnisme. Leur message est clair, il interpelle tous les partis. Pourront-ils s’y dérober, et d’abord ceux qui sont prompts à donner des leçons de démocratie aux autres ? La question à laquelle ils doivent répondre n’est pas celle de la politique idéale des échanges et du commerce extérieur ; la question des Français est celle du moment. Faut-il, alors que tous les pays développés se dirigent vers la croissance zéro, alors que des populations entières vont vivre des baisses de pouvoir d’achat de 10, de 20 ou de 30 % dans les prochaines années, notamment par suppression de services publics qui constituent une part importante du capital collectif européen, alors que les suppressions d’activités industrielles correspondent de plus en plus souvent à la disparition totale du pouvoir faire et du savoir faire, faut-il vraiment aller plus loin dans l’ouverture, dans le désarmement commercial et financier, dans le refus de définir nos intérêts stratégiques et de leur donner la priorité sur tout le reste ? Plus loin dans les mensonges de la concurrence et dans les illusions du sans-frontiérisme ? Plus loin dans la naïveté devant une Chine qui contrôle 75 % de son économie par l’Etat, instrument du parti, devant des Etats-Unis qui n’ont jamais transigé dès que leur intérêt national est en jeu ?

    Les fondements du débat sont limpides. Le pouvoir de l’Union européenne est d’abord celui du premier marché du monde ; l’Union sait le faire valoir, par ses normes et ses règles ; le consommateur informé de la provenance des biens et services qu’il achète saura faire valoir sa préférence pour les entreprises qui respectent l’intérêt collectif, européen ou national. Chacun sait, ou devrait savoir, que les modalités du contrôle des échanges de biens, de services et de capitaux sont complexes. Chacun sait que la hausse des tarifs douaniers remettrait en cause la doxa établie, les ayatollahs de l’OMC et leurs complices de la Commission européenne elle-même, sans parler de leurs maîtres de Washington, mais aussi le pouvoir d’achat des Européens. Chacun a bien compris que les maîtres des marchés sauront employer tous les détours de la calomnie, de l’amalgame et de la falsification pour tenter de disqualifier la volonté populaire. Car celle-ci est explicite, et massive, certes pas sur les modalités du contrôle des échanges, certes pas sur son extension et son niveau, mais sur l’urgence du débat à ce sujet. Et ceux qui n’ont à opposer à l’opinion que les dogmes de leurs intérêts doivent y réfléchir ; refuser le débat, c’est le contraindre à se dérouler ailleurs, autrement, et par d’autres moyens. L’extrémisme des libre-échangistes qui font un dogme d’une pratique économique parmi d’autres, est la vraie menace que dénoncent les Français. Souhaitons-leur de pouvoir s’informer, pour comprendre, et pour choisir. Le temps du débat est venu. Honnête, ouvert et libre, il prévient celui de la colère.

    Hervé Juvin (Regards sur le renversement du monde, 16 juin 2011)

    1 – Le sondage est consultable sur le site de l’IFOP, ou sur www.protectionnisme.eu

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  • Vers un retour du protectionnisme ?...

    Dans une intervention en date du 20 juin 2011, enregistrée par Realpolitik.tv, Hervé Juvin, l'auteur de l'essai fondamental intitulé Le renversement du monde (Gallimard, 2010), revient sur la question du protectionnisme et sur son nécessaire retour dans le débat politique...


    Hervé Juvin : l'heure est-elle au retour du... par realpolitiktv

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  • Guerre d'Irak : le sang du pétrole !...

    Nous reproduisons ci-dessous un article cueilli sur Oil Man - Chronique du début de la fin du pétrole, un excellent blog du journaliste indépendant Matthieu Auzanneau, que nous vous invitons à consulter régulièrement.

     

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    La guerre d’Irak était BIEN une guerre du pétrole (cette fois, c’est prouvé !)

    On s'en doutait, quelques-uns l'avaient affirmé, mais on n'avait pas vu encore la fumée sortie du canon. C'est désormais chose faite, grâce au militant britannique Greg Muttitt et à son livre d'enquête Fuel on The Fire, publié en avril.

     

    L'accès au brut irakien était bel et bien au coeur de la décision britannique de s'engager aux côtés des Etats-Unis lors de l'invasion de l'Irak en 2003. C'est ce que prouvent des documents confidentiels obtenus par M. Muttitt grâce à la loi britannique sur la liberté d'information, et dont le quotidien The Independent s'est fait l'écho. [Je gardais sous le coude cette info, en attendant de voir si elle allait faire scandale en Grande-Bretagne : loupé, à ma maigre surprise.]

    Cinq mois avant le début de l'invasion lancée en mars 2003, la ministre du commerce britannique, la baronne Elisabeth Symons, déclarait aux représentants des majors britanniques qu'elle ferait en sorte que ces dernières aient accès aux réserves d'hydrocarbures dans l'Irak d'après Saddam Hussein.

    Le compte-rendu d'une réunion avec BP, Shell et BG (British Gas) datée du 31 octobre 2002 indique : « La baronne Symons a reconnu qu'il serait difficile de justifier que les compagnies britanniques puissent sortir perdantes en Irak (...) si la Grande-Bretagne devait être un allié proéminent du gouvernement américain durant la crise. » La ministre a alors promis « de rendre compte aux compagnies avant Noël » du résultat de ses tractations auprès de l'administration Bush à Washington.

    Le ministère des affaires étrangères britannique invitait BP le 6 novembre 2002 à parler des opportunités en Irak « après le changement de régime ». Dans le compte-rendu de la réunion, on peut lire : « L'Irak est la grande opportunité du pétrole. BP est prêt à tout pour y aller, et s'inquiète que des accords politiques ne la privent de cette opportunité. »

    Après une autre réunion, en octobre 2002, le directeur du Moyen Orient au Foreign Office notait : « Shell et BP ne pourraient pas se permettre de ne pas avoir leur part en [Irak], pour le bien de leurs futurs à long terme. (...) Nous sommes déterminés à obtenir pour les compagnies britanniques une part honnête de l'action dans l'Irak post-Saddam. »

    Un mois avant l'invasion de l'Irak, en février 2003, l'ex-premier ministre Tony Blair qualifiait d' « absolument absurde » l'idée que cette invasion puisse être motivée par le pétrole. Le 12 mars 2003, le patron de BP de l'époque, Lord Browne, déclarait : « De mon point de vue, et du point de vue de BP, ce n'est pas une guerre du pétrole. »

    Aux Etats-Unis, l'administration Bush n'a, bien entendu, jamais reconnu le rôle joué par le pétrole. Les mobiles, c'était les armes de destructions massives (inexistantes) de Saddam Hussein et les liens (fictifs) de ce dernier avec l'organisation terroriste Al-Qaida.

    Quelques personnalités liées à l'administration Bush ont pourtant pu révéler le secret de Polichinelle, notamment Paul Wolfowitz (« La plus grosse différence entre la Corée du Nord et l’Irak (...) : l’Irak nage dans une mer de pétrole ! ») et Alan Greenspan (« Je suis attristé qu'il soit politiquement inconvenant de reconnaître ce que tout le monde sait : la guerre d'Irak est largement une histoire de pétrole »).

    Lors des réunions de l'Energy Task Force assemblée par le vice-président Dick Cheney en 2001, dans les premières semaines de l'administration Bush, une carte fut produite, faisant état d'un découpage possible de futures concessions pétrolières en Irak. L'existence de cette carte fut révélée en 2002 par décision de la justice américaine.

    Après avoir quitté le gouvernement, Lady Symons, aujourd'hui âgée de 59 ans, est devenue conseillère de la banque d'affaires MerchantBridge, qui a réalisé d'importants profits dans des contrats de reconstruction dans l'Irak d'après-guerre, précise The Independent. En mars, Elisabeth Symons a rompu les contacts qu'elle entretenait avec le Conseil de développement économique national libyen, auprès duquel elle intervenait en tant que conseillère bénévole.

    L'Irak détient 8,3 % des réserves mondiales de pétrole. C'est aujourd'hui le seul producteur majeur dont les capacités de production semblent pouvoir être accrues de façon substantielle, face à la perspective d'un déclin des extractions de nombreux autres grands producteurs (voir aussi [oil man] 'Peak Oil' : LE DOSSIER).

    Les intérêts britanniques dans le pétrole irakien remontent à la veille de la première guerre mondiale, à l'époque de la Turkish Petroleum Company. Ceux des compagnies américaines remontent à la création de l'Iraq Petroleum Company, en 1929.

    Matthieu Auzanneau (Oil Man, 14 juin 2011)

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  • Intervention en Libye : un cruel révélateur...

    Nous reproduisons ci-dessous un éditorial du quotidien Le Monde (dimanche 12 - lundi 13 juin 2011) qui pose quelques bonnes questions sur la défense française et européenne... De renoncements en renoncements, diposerons-nous encore dans quelques années des instruments nécessaires à la souveraineté ?...

     

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    Le cruel révélateur de l'intervention en Libye

    Il ne faudrait pas que l'affaire libyenne dure encore plusieurs mois. Pour le peuple libyen martyrisé par son dictateur, bien sûr. Mais pas seulement. Les lendemains risquent d'être douloureux pour les armées européennes qui participent à cette intervention.

    Trois nations en donnent le tempo : les Etats-Unis, acteur hors catégorie par sa puissance, la France et le Royaume-Uni. Seize autres pays jouent les seconds rôles, pour ne pas dire les figurants.

    Il ne faut pas leur en vouloir, a tenu à dire le secrétaire américain à la défense, Bob Gates, le 9 juin, qui, pour la énième fois, appelait les Européens à "partager le fardeau" de la sécurité mondiale : "Franchement, bon nombre de ces alliés restent à l'écart, non parce qu'ils ne veulent pas participer, mais simplement parce qu'ils ne peuvent pas. Les moyens militaires ne sont tout simplement pas là."

    La France s'est vantée d'avoir été la première à frapper, le 19 mars. Elle fait remarquer à ses alliés plus frileux qu'elle assume ses responsabilités de membre permanent du Conseil de sécurité de l'ONU. Nos avions et nos bateaux sont partis à l'heure, avec des hommes prêts à servir, disent les chefs militaires. Mais demain, préviennent-ils, ce sera une autre affaire. Ainsi, comme l'admettent sans fard les responsables de la marine nationale, si le porte-avions Charles-de-Gaulle est engagé en Libye jusqu'à la fin de 2011, il devra s'arrêter totalement en 2012.

    Car les armées européennes, pourtant ultramodernes et ultra-coûteuses, ne savent plus durer. Les Rafale français dépendent des ravitailleurs américains. Les F16 danois n'ont plus de munitions après deux mois de frappes. Les Typhoon britanniques n'ont pas assez de pilotes qualifiés. Plus traumatisant pour cette grande puissance maritime, une bonne part de ses navires actuellement au combat dans le monde sont voués à la casse dans le cadre de la réforme budgétaire en cours.

    L'Irak (pour le Royaume-Uni), l'Afghanistan, le Liban, les conflits africains, ont placé aux limites de leurs capacités de déploiement des appareils militaires soumis aux sévères cures d'amaigrissement de l'après-guerre froide.

    Derrière, les entrepôts sont vides. L'effort du moment, très important, entame la préparation de l'avenir, comme le coureur finit par consommer sa masse musculaire. Le hiatus entre les ambitions affichées et les moyens de les réaliser est donc cruellement mis à nu.

    A l'aube de la campagne présidentielle, les responsables militaires ne se privent donc pas d'interpeller la nation. C'est, si l'on ose dire, de bonne guerre pour tenter d'obtenir des moyens d'action plus consistants et convaincants.

    Mais, au-delà de ce classique plaidoyer pro domo, des questions cruciales sont posées : la France veut-elle conserver un modèle d'armée cohérent et complet ? Est-elle prête à en payer le prix ? Quelle indépendance stratégique entend-elle défendre ? Faute de réponses sérieuses, les ambitions affichées sur la scène mondiale ne feront pas longtemps illusion.

    Le Monde (12-13 juin 2011)

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  • Quand les chinois construisent l'Europe...

     Vous pouvez visionner ci-dessous sur Realpolitik.tv un entretien avec Hervé Juvin sur la menace que les entreprises chinoises font peser sur l'Europe et son modèle social à construire. Clair et percutant ! 

     


    Hervé Juvin : quand les Chinois construisent... par realpolitiktv

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