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Métapo infos

  • Rousseau contre le siècle des Lumières...

    Dans ce nouveau numéro de l'émission de TV Libertés, « Les idées à l’endroit », Rémi Soulié, pour évoquer la figure de Jean-Jacqus Rousseau, reçoit :

    - Alain de Benoist, philosophe et historien des idées, qui vient de publier Un autre Rousseau (Fayard, 2025)

    - Michel Maffesoli, professeur émérite à la Sorbonne et membre de l’Institut universitaire de France, qui vient de publier Apologie - Autobiographie intellectuelle (Cerf, 2025) ;

    - Pierre Le Vigan, urbaniste et philosophe, auteur de Comprendre les philosophes (Dualpha, 2021) et de La Planète des philosophes (Dualpha, 2023).

     

                                                 

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  • Drogues : la France submergée...

    Le nouveau numéro de la revue Conflits (n°58, juillet - août 2025), dirigée par Jean-Baptiste Noé, vient de sortir en kiosque. Le dossier central est consacré à l'explosion du trafic de drogues en France et à la montée en puissance du narco-banditisme...

     

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    Au sommaire de ce numéro :

    ÉDITORIAL

    Au miroir des drogues, par Jean-Baptiste Noé

    LE GRAND ENTRETIEN

    L'Argentine tente de revenir dans le jeu. Entretien avec Juan Gabriel Tokatlian

    IDÉES

    La romanité. Une certaine idée de l'histoire européenne

    ENJEUX

    Javier Milei : des succès indéniables, par Guilhem Lugagne-Delpon

    L'orthodoxie face aux fractures nationales. Entretiens avec Jean-Arnault Dérens

    PORTRAIT

    Léon XIV, un pape mondialisé, par Jean-Baptiste Noé

    GRANDE STRATÉGIE

    Les pays baltes entre les empires, par Olivier Kempf

    HISTOIRE BATAILLE

    La défaite des trois rois, par Pierre Royer

    DOSSIER
    Drogues, la France submergée
    « La France est submergée par les drogues ». Entretiens avec Michel Gandilhon
    Route des drogues au Sahel : du désenclavement à la dépendance, par Gildas Lemarchand
    Cocaïne : géographie de la poudre blanche, par Daniel Dory
    La Syrie et le captagon, par Frédéric Pichon
    Les ports belges face aux drogues, par Catherine Van Offelen
    La Marine française en lutte contre les passeurs de drogues, par Jean Hausermann
    Marseille, porte mondiale des drogues, par Ana Pouvreau
    La France submergée, par Jean-Baptiste Noé

    GÉOPOLITIQUE ET ENTREPRISE

    Nice, Cannes : attaques sur le réseau, par Daniel Dory

    Route 66 : carte d’une route mythique, par Hervé Théry

    « Le rap met la drogue en musique », par Guy-Alexandre Le Roux

     

     

     

     

     

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  • L’américanisation linguistique de l’Union européenne...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Yannick Sauveur cueilli sur le site d'Euro-Synergies et consacré à l'américanisation linguistique de l'Union européenne...

    Yannick Sauveur, docteur en sciences de l’information et de la communication, a été actif, dans les années soixante et soixante-dix au sein de la mouvance prônant l’unification européenne, inspirée par Jean Thiriart. Il vient de publier récemment L'américanisation de la société française.

     

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    L’américanisation linguistique de l’Union européenne

    Si mon essai sur l’américanisation de la société française [1] traite du cas français, il est évident, hélas, que les constats que je fais s’appliquent très largement à l’Europe dans son ensemble, voire à ce qu’on appelle improprement l’Occident. J’ai écrit un long chapitre relatif à l’acculturation linguistique. Même si l’américanisation recouvre tous les aspects de la vie courante : arts, musique, vêtement, restauration, tourisme, il en est un qui me paraît essentiel, être le problème numéro 1, c’est celui de la langue nationale qui est en voie de disparition. En disant nationale, j’entends le français en France (ou Wallonie, ou Québec ou Suisse romande), l’allemand en Allemagne, l’italien en Italie, le castillan en Espagne, etc. Les ravages de la domination culturelle américaine sont, faut-il le déplorer, identiques dans tous les pays se soumettant avec une facilité déconcertante à la colonisation américaine. Le linguiste italien Antonio Zoppetti rappelle le propos de Churchill selon qui « Le pouvoir de dominer la langue d’un peuple offre des gains bien supérieurs à ceux de lui enlever des provinces et des territoires ou de l’écraser en l’exploitant. Les empires du futur sont ceux de l’esprit. »[2]

    L’américanisation n’est pas récente. Le déferlement culturel U.S., déjà présent dans la première moitié du 20ème siècle, prend son envol avec la fin de la 2ème Guerre mondiale : chewing-gum, bas Nylon, cigarettes blondes, coca-cola envahissent les territoires libérés. Ces nouveaux produits de consommation sont associés à un message subliminal, celui de liberté et c’est ainsi que la majorité des peuples vont entendre cette nouvelle occupation que certains nommeront plus tard une colonisation douce. Les Accords Blum-Byrnes et le Plan Marshall signés respectivement en 1946 et 1947 vont accélérer la domination politico-économico-culturelle tant il est vrai que tout est lié et qu’une domination qui ne serait que militaire n’aurait pas de sens, ce qu’a bien compris le politiste et ancien conseiller de Jimmy Carter, Zbigniew Brzezinski, pour qui « La domination culturelle des États-Unis a jusqu’à présent été un aspect sous-estimé de sa puissance globale. »

    Voilà pour le contexte historique. En ces années 40 et 50, les langues nationales sont encore épargnées. Au début des années 60, un auteur français, Etiemble, écrit un pamphlet, Parlez-vous franglais ?[3]. À la même époque des auteurs italien ou allemand auraient pu, tout aussi bien, écrire Parlez-vous italianglese ? ou Parlez-vous germanglais ? Etiemble fustige (déjà !) le sabir atlantique (« une langue au niveau le plus bas ») et l’invasion de l’anglais. Succès éditorial remarquable mais fiasco du point de vue de son influence. La lecture du livre d’Etiemble, à 60 ans de distance, prête à sourire tant il est vrai que les parking, dancing, building, pressing, lunch, business, fair-play, teenagers paraissent bien ordinaires à nos oreilles des années 2020. Pour s’en convaincre, il n’est pas inutile de citer quelques-uns des mots et expressions couramment utilisés dans les médias grand public : les masters, les think tanks, les followers, les like, les posts, les happy hours, le management, les managers, le turn-over, le feedback, le merchandising, l’inévitable black friday, le coach et le coaching avec ses variantes, equicoach et equicoaching, le coworking, le leadership, les leaders, les show room, les fast food, le drive et les drive in, les hamburger, check in et check out, les looser, les spots diffusés en prime time, les podcasts et les émissions en replay, les talk show, un full time job, les news qui se déclinent en news magazines, en newsletter, le body language, les start-up, faire son coming out (très en vogue dans la classe élitaire de la politique et/ou du spectacle), les check up, les crowfunding (financement participatif), le coliving et autre storytelling. En lisant la presse, je découvre que ThereSheGoes est une application pour aider les femmes à entreprendre ou encore qu’un escape game permet de sensibiliser sur les handicaps invisibles. Quant à la team mise à toutes les sauces, elle fait presque partie du langage courant et dans son sillage, la dream team. J’ai vu récemment un panneau intitulé « Espace Street Workout » qui invite à respecter la charte éthique de la Fédération Mondiale de Street Workout[4] et de Calisthénics. J’arrête là cet exercice épuisant qui n’est pas une spécificité française. En Italie comme en France dans les aéroports ou dans les gares, les portes d’embarquement sont des gates !  

    À cela ajoutons la transformation de nos villes, tant les périphéries avec les mêmes enseignes, les mêmes publicités, les centres-villes dont les vitrines se parent de slogans ou accroches anglo-saxonisées (Haircuts and Shaves BARBER SHOP Professionnal Service, L’Ideal Coffee - Working Café – Salad Bar – Petite restauration). On reste confondus devant pareille bêtise qui, hélas, se répand à toute vitesse.

    Ce langage, le franglais (Etiemble), le gallo-ricain pour Henri Gobard, le globish[5], langage réduit à 1.500 mots, syntaxe et grammaire simplifiées, voire la très expressive okeïsation, n’est qu’un des aspects de l’américanisation du langage. J’ai indiqué ailleurs[6] qu’il y avait deux types d’américanisation : Américanisation du riche, américanisation du pauvre (insidieuse), américanisation voulue (recherchée) ou subie, le résultat est le même. Et les deux publics peuvent se rejoindre et se retrouver dans un McDo. Cette américanisation subliminale de nos cerveaux (François Asselineau) n’est que la résultante d’un travail de sape en amont opéré depuis des décennies par des gouvernants serviles, des journalistes aux ordres, et plus généralement les élites complices de cette dégradation sans oublier une certaine bourgeoisie qui, par mimétisme, par snobisme envoie ses rejetons aux States (une année pour passer le bac américain, ou études supérieures complètes). Pour ceux-là, l’anglo-américain est une première langue à égalité avec la langue maternelle : les curriculums vitae sont rédigés exclusivement en anglais, même pas en bilingue langue maternelle/anglais ! Toutes les productions scientifiques sont majoritairement en anglais. C’est une erreur de croire que la richesse scientifique doive s’exprimer en anglais pour être reconnue. Le mathématicien Laurent Lafforgue (médaille Fields 2002) considère que, contrairement à l’opinion commune, ce n’est pas grâce à la vigueur et à la qualité de l’école française de mathématiques que les mathématiques françaises continuent à être publiées en français, mais, tout à l’inverse, parce que cette école continue à publier en français qu’elle conserve son originalité et sa force.[7]

    Les conférenciers s’expriment en anglais même s’il y a la traduction simultanée. Comment s’en étonner lorsque le Président de la République, Emmanuel Macron, s’obstine, contre tout bon sens, à ne pas utiliser la langue qui fut celle de la diplomatie pendant des siècles. Loin d’être un cas isolé, d’autres dirigeants, ainsi Mario Draghi, ancien Président du Conseil, ancien Président de la B.C.E., fait ses discours en anglais depuis des années.  La francophonie, elle-même, est en berne mais comment ne le serait-elle pas avec une secrétaire générale de l’OIF (Organisation internationale de la francophonie), Louise Mushikiwabo (photo), élue en 2018 et réélue en 2022, dont la candidature a été présentée en anglais par le président du Rwanda, Paul Kagame. Il est vrai que le Rwanda a remplacé en 2008 le français par l’anglais en tant que langue obligatoire à l’école !

    Comment imaginer qu’Emmanuel Macron, Friedrich Merz, Keir Starmer, Donald Tusk, quand ils se réunissent parlent dans une autre langue que l’anglo-américain ?

    Les young leaders ne sont plus une spécificité franco-américaine. On les retrouve en Italie, en Allemagne, et même… en Afrique (Promotion 2023 de la French-African Foundation sous le haut patronage du Président Emmanuel Macron et du Président Paul Kagame). Les élites atlantistes sont associées aux cercles et organisations mondialistes : Fondation Rockefeller, Fondation Ford, Bilderberg Group, Aspen Institute. L’anglo-américain est tout naturellement la langue de communication pour ces participants du Bilderberg Group (réunion 2023) : Edouard Philippe, ancien Premier ministre français, Albert Bourla, Président de Pfizer, Paolo Gentiloni, Commissaire européen aux Affaires économiques et financières, à la fiscalité et à l’Union douanière, à la Commission européenne, Roberta Metsola, présidente du Parlement européen, etc. La présidente du Conseil italien et proche de Trump, Giorgia Meloni, fait partie de Aspen Italia.

    Léopold Sédar Senghor (photo), prévoyait que le français pourrait être à la fois la langue de l’unité européenne, la langue véhiculaire du bassin méditerranéen et celle de l’unité de l’Afrique ! Hélas ! Celui qui a tant œuvré pour la francophonie serait bien amer de constater que l’anglais règne en maître dans toute l’Union européenne alors que l’anglais n’est langue officielle d’aucun pays de l’U.E*. À l’appui de l’anglais comme langue de l’U.E., les partisans invoquent le coût des traductions alors que la richesse induite par la diversité des langues est de loin supérieure au coût, en réalité négligeable.[8]

    Dans une Europe débarrassée de la domination anglo-américaine, une authentique politique d’Éducation nationale devrait avoir pour mission l’apprentissage, dès l’entrée dans l’enseignement secondaire, de trois langues (en plus de la langue maternelle) et se poursuivre dans l’enseignement supérieur avec l’approfondissement d’une langue autre que l’anglais. Encore faudrait-il que dès le plus jeune âge, tant dans les familles que dans l’enseignement primaire, le civisme fût la règle : respect de sa langue maternelle (ou d’adoption pour les immigrés) et apprentissage rigoureux de celle-ci. Les patrimoines linguistiques nationaux doivent être protégés. Il est inutile d’empiler des lois alors qu’il suffit d’appliquer strictement les lois existantes (loi Toubon en France), ce qui suppose que les publicitaires, et autres communicants, révisent prestement leur vocabulaire.

    Les partenariats et financements des organismes promouvant les langues nationales doivent être développés : Alliance Française, Goethe Institut, Institut Cervantes, etc. Le multilinguisme des élites doit être promu avec la connaissance minimale de l’allemand, de l’espagnol et du français. Est-ce utopique ? Oui, assurément dans le cadre actuel de l’U.E. mais certainement pas dans le cadre d’une Europe qui veut recouvrer les moyens de sa puissance, et la défense et la restauration des langues nationales en font partie. Avant toute chose, tout complexe d’infériorité doit être banni. La domination culturelle (et donc linguistique) anglo-saxonne n’est pas synonyme d’une quelconque supériorité mais renvoie à notre soumission voulue, acceptée.

    Yannick Sauveur (Euro-Synergies, 27 juin 2025)

    * Note Métapo infos : La langue anglaise reste la deuxième langue officielle de deux pays de l'UE : l'Éire et Malte...

     

    Notes:

    [1] Yannick Sauveur, L’américanisation de la société française, Éditions Aencre, 2024.

    [2] Winston Churchill, Discours aux étudiants de Harvard, 6 septembre 1943.

    [3] Etiemble, Parlez-vous franglais ? Gallimard, 1964.

    [4] Le code éthique du Street Workout correspond, peu ou prou, à ce qu’on entendait par esprit sportif au temps de Pierre de Coubertin. Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?!

    [5] Contraction de Global et English, Jean-Paul Nerrière, ancien vice-président d’IBM USA serait à l’origine du globish.

    [6] Cf. Questions-réponses, site Eurasia.

    [7] Cité in Claude Hagège, Contre la pensée unique, Odile Jacob, 2012.

    [8] Cf. Claude Hagège, Contre la pensée unique, Op.cit.

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  • Son Amérique à lui...

    Les éditions Via Romana viennent de publier un recueil de textes de Pierre-Antoine Cousteau sous le titre de Mon Amérique à moi - De la prohibition à l'après-guerre.

    Pilier de l'hebdomadaire Je suis partout, Pierre-Antoine Cousteau (1906-1958), journaliste, écrivain et polémiste, est le coauteur de Dialogue de vaincus (Berg international, 1999) avec Lucien Rebatet, et l’auteur de Intra Muros (Via Romana, 2017), son journal de prison.

     

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    " Ces textes consacrés à l’Amérique couvrent la période 1930-1958, du début dans le grand journalisme de Pierre-Antoine Cousteau (1906-1958), à celle de sa mort. Ils représentent cinq périodes de sa découverte de l'Amérique – mais aussi des turbulences du nouveau maître du monde.
       Les premiers sont des reportages. PAC ayant vécu, à 14-15 ans, une année de scolarité à New York, une deuxième année à 23 ans, en 1928-29, parlait non pas l’anglais mais l’américain, accent et argot inclus. C’est donc lui, bien que non encore grand reporter et encore moins rédacteur en chef, qui fut chargé, notamment par Je suis partout mais pas seulement (Candide, L’Homme…) de reportages made in USA. C’est la première partie de ce livre : lynchage des Noirs de Scottboro, Ku Klux Klan, la prohibition, la police, Al Capone, Dillinger…
       Les deuxièmes restent des reportages mais prennent une tournure plus personnelle ; on le sent libre d’écrire ce qu’il pense avec son cœur : Roosevelt, Ford, la presse de Hearst, la guerre de Sécession…
       Les troisièmes, années 1940, sont devenus politiques. Il se passe des choses en France, en Allemagne, dans le monde. Finis les reportages, c’est le rédac-chef, le polémiste qui parle.
       Les quatrièmes, écrits à Clairvaux, n’ont été publiés que dans son Journal de prison, Intra Muros.
       Les cinquièmes sont ceux d’après sa libération, 1954-1958. Articles polémiques hebdomadaires, ainsi que quelques « interviews bidon » signées Alcide Jolivet.
       Un quart de siècle d’Amérique vu par un grand esprit français à la plume caustique et incisive. "

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  • Alain de Benoist : « Rousseau s’oppose à angle droit aux thèses des Lumières »...

    Nous reproduisons ci-dessous un entretien donné par Alain de Benoist au Journal du Dimanche pour évoquer son dernier essai intitulé Un autre Rousseau - Lumières et contre-Lumières (Fayard, 2025).

    Philosophe et essayiste, directeur des revues Nouvelle École et Krisis, Alain de Benoist a récemment publié Le moment populiste (Pierre-Guillaume de Roux, 2017), Contre le libéralisme (Rocher, 2019),  La chape de plomb (La Nouvelle Librairie, 2020),  La place de l'homme dans la nature (La Nouvelle Librairie, 2020), La puissance et la foi - Essais de théologie politique (La Nouvelle Librairie, 2021), L'homme qui n'avait pas de père - Le dossier Jésus (Krisis, 2021), L'exil intérieur (La Nouvelle Librairie, 2022), Nous et les autres - L'identité sans fantasme (Rocher, 2023) et, dernièrement, Martin Buber, théoricien de la réciprocité (Via Romana, 2023).

     

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    « Rousseau s’oppose à angle droit aux thèses des Lumières, il ne croit pas au progrès et est même hanté par la décadence »

    JDD. La publication de votre nouveau livre chez Fayard relance les controverses autour de votre œuvre. Estimez-vous avoir été victime d’une forme de censure ?

    ALAIN DE BENOIST : Il n’y a jamais eu de « controverses », mais plutôt tentative d’ostracisme et de marginalisation. Dans le monde actuel, il suffit de couper l’accès aux micros et aux haut-parleurs pour condamner à la mort sociale. Comme je suis un adversaire de l’idéologie dominante, je ne m’en afflige pas outre-mesure : après tout, c’est le prix de la liberté. Mais il est vrai que j’ai parfois la nostalgie des règles de l’ancienne disputatio, où l’on commençait par exposer honnêtement les idées de ses adversaires avant de tenter de les réfuter. J’ai publié une centaine de livres et des milliers d’articles dans le domaine de la philosophie politique et de l’histoire des idées, je n’ai pas souvenir de la moindre tentative de réfutation. Dans un climat de soupçon général, entretenu par l’extrémisation et l’hystérisation des rapports sociaux, le « débat » ne porte plus sur ce que l’on dit, mais sur ce que l’on voudrait vous faire dire – et que l’on ne dit pas !

    JDD. Regrettez-vous de ne pas avoir eu plus d’influence sur le jeu politique ?

    ALAIN DE BENOIST : Certains m’ont crédité de « stratégies » compliquées, ce que je trouve un peu risible. Pour un intellectuel, la meilleure stratégie est de n’en avoir aucune, c’est-à-dire de dire ce qu’il pense. Ce sont les hommes politiques qui ont des stratégies. Or, je n’ai jamais été un acteur de la vie politique, seulement un observateur. De façon plus générale, je crois que les partis politiques sont très peu réceptifs aux idées, non seulement parce qu’un grand nombre d’hommes politiques sont incultes en matière idéologique, philosophique ou théorique, mais parce que seules les intéressent les idées qu’ils peuvent instrumentaliser. Les politiques veulent rassembler, les idées divisent.

    JDD. Pourquoi avoir voulu, dans ce nouveau livre, réhabiliter Rousseau ?

    ALAIN DE BENOIST : Je n’ai pas tant cherché à le réhabiliter qu’à en proposer une nouvelle lecture. Comme bien d’autres auteurs, Jean-Jacques Rousseau est surtout lu aujourd’hui d’une manière anachronique, sans restituer sa pensée dans le contexte de son temps. L’anti-rousseauisme se résume trop souvent à des critiques ad hominem, assorties de formules toutes faites qu’on répète comme des mantras : « l’homme naturellement bon », « le bon sauvage », etc. Quand on va y voir plus près, on s’aperçoit que Rousseau a dit tout autre chose que ce que l’on dit de lui.

    JDD. Le principal reproche fait à Rousseau est d’être l’inspirateur de la Révolution française. Vous vous élevez contre cette idée.

    ALAIN DE BENOIST : La Révolution française n’a pas été un « bloc ». Ses grands inspirateurs ont été les philosophes des Lumières, Rousseau n’arrive que bien après. Or, Rousseau s’oppose à angle droit aux thèses des Lumières. D’abord, il ne croit pas au progrès. Il est même hanté par la décadence. Il pense que l’homme n’a cessé de se dénaturer depuis l’Antiquité, qu’il admire profondément. « Les anciens politiques, écrit-il, parlaient sans cesse de mœurs et de. Vertu ; les nôtres de parlent que de commerce et d’argent ». Que s’est-il passé ? Telle est la question à laquelle il entend répondre. D’autre part, il n’aime pas les échanges commerciaux, ni l’économie. Alors que les Lumières pensent que l’économie est par définition le lieu de la liberté et que la nature même de l’homme le porte vers les transactions et les échanges qui lui permettent de satisfaire son meilleur intérêt, Rousseau défend au contraire le primat du politique. Réagissant contre l’universalisme d’un Condorcet, il soutient que les institutions doivent être adaptées au caractère spécifique des nations et des peuples, comme en témoignent ses projets de Constitution pour la Pologne et pour la Corse. Dans le même esprit, il oppose le peuple des campagnes aux grandes villes où ne règne que le désir de paraître et l’amour-propre, dont il fait le contraire de l’amour de soi : « Le meilleur mobile d’un gouvernement est l’amour de la patrie, et cet amour se cultive dans les champs ». Considérant la « société générale du genre humain » comme une illusion, il met aussi en garde contre « ces prétendus Cosmopolites, qui se vantent d’aimer tout le monde pour avoir le droit de n’aimer personne ». L’homme en soi, l’homme abstrait, n’existe pas à ses yeux : « Il faut opter entre faire un homme ou un citoyen, car on ne peut faire à la fois l’un et l’autre ».  C’est cet autre Rousseau que j’ai voulu faire apparaître.

    JDD. Néanmoins, contre Hobbes, Rousseau considère que c’est non pas à l’état de nature, mais dans la société de son temps que chacun est l’ennemi de ses semblables, expliquez-vous. Est-ce à dire qu’il suffirait d’éradiquer la société pour susciter une humanité régénérée et une société parfaite ?

    ALAIN DE BENOIST : L’« état de nature » dont parle Rousseau n’est à ses yeux qu’une hypothèse utile à sa démonstration : il va jusqu’à dire qu’il est fort possible qu’il n’ait « point existé ». Son contrat social, qui vise à concilier la liberté et l’obligation sociale, diffère totalement du contrat social de Locke, fondé sur l’intérêt, ou du contrat social de Hobbes, qui n’est qu’un moyen d’échapper à une « guerre de tous contre tous » qui, en réalité, s’est généralisée dans les sociétés modernes. Quant à l’idée d’un « homme nouveau », elle n’est pas nouvelle. On la trouve déjà chez saint Paul ! Ce qui compte pour Rousseau, c’est de faire primer le bien commun sur les intérêts particuliers, idée qui contredit également tout ce que pensent les Lumières, pour lesquelles les nations et les peuples ne sont que des agrégats hasardeux d’individus.

    JDD. Plus encore qu’une critique antilibérale, ce livre n’est-il pas une critique de la droite réactionnaire et conservatrice ?

    ALAIN DE BENOIST : La droite contre-révolutionnaire ne peut pas adhérer à Rousseau, parce qu’elle s’oppose à la modernité au nom d’un passé qu’elle espère ressusciter. C’était notamment la position de Joseph de Maistre. Rousseau, lui, est un moderne qui critique la modernité de l’intérieur. Il défend avec force le principe de la souveraineté populaire, que rejettent évidemment les contre-révolutionnaires. Mais sa défense du peuple, dont il dit, comme Carl Schmitt, qu’il doit être politiquement présent à lui-même, le met aussi en porte à faux avec les partis de la gauche actuelle, qui ont abandonné le social pour le sociétal et ont depuis longtemps accepté les principes de la société de marché, ce qui les a amenés à trahir les intérêts des travailleurs. L’œuvre de Rousseau condamne par avance cette gauche qui se moque de la patrie et milite pour la suppression des frontières : « Défiez-vous de ces cosmopolites qui vont chercher loin dans leurs livres des devoirs qu’ils dédaignent de remplir autour d’eux » ! Jean-Claude Michéa dit à peu près la même chose aujourd’hui. On peut aussi penser aux « socialistes patriotes » qu’aimait à évoquer Bernanos.

    JDD. Vous dressez le portrait d’un penseur inclassable, vous voyez-vous en lui ?

    ALAIN DE BENOIST : Ceux qui me trouvent inclassable raisonnent en fonction des étiquettes. Ils vivent dans un monde en noir et blanc qui ignore les couleurs. Tout leur paraît « confus » quand on brouille leurs repères. Autrefois, beaucoup d’homme de droite avaient aussi une culture de gauche, et beaucoup d’hommes de gauche avaient aussi une culture de droite. Je trouve dommage que ce ne soit plus le cas. Personnellement, j’aime les démarches transversales. Au fond, seuls les inclassables sont intéressants. Les autres ne sont que des disques rayés !

    Alain de Benoist, propos recueillis par Aziliz Le Corre (Journal du dimanche, 17 mai 2025)

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  • Les snipers de la semaine... (297)

    julien dir, république, droite

     

    Au sommaire cette semaine :

    - sur Breizh-Info, Julien Dir dézingue la cinquième République, dévoyée et à bout de souffle...

    Conseil constitutionnel et tyrannie des « sages » : il est temps de dissoudre la Cinquième République et de tout reconstruire

    Coup de balai.jpg

    - sur le site de L'Incorrect, Arthur de Watrigant allume lui aussi le régime et la fausse droite hypocrite...

    La France mérite une bonne droite

    Boxe_Droite.jpg

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