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Métapo infos - Page 909

  • Mangeurs de viande...

    Les éditions Perrin viennent de publier dans leur collection Tempus un essai de Marylène Patou-Mathis intitulé Mangeurs de viande - De la préhistoire à nos jours. Préhistorienne, directrice de recherche au CNRS et rattachée au Muséum national d'histoire naturelle, Marylène Patou-Mathis est notamment l'auteur de Neanderthal. Une autre humanité (Perrin, 2008).

     

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    " L'histoire de la viande est aussi longue que celle de l'homme. A travers elle, c'est bien évidemment la question de la place des animaux dans nos sociétés dont il s'agit, des relations complexes qui se sont tissées au fil du temps entre eux et nous.
    Poursuivant ici son exploration des premières sociétés humaines, Marylène Patou-Mathis montre les effets engendrés par la consommation de viande, singulièrement l'apparition de la chasse avec ses conséquences socioculturelles. S'appuyant sur les dernières découvertes archéologiques ainsi qu'une large documentation ethnographique et historique, elle expose les grandes phases de l'évolution des comportements humains vis-à-vis des animaux. Aujourd'hui, comme hier, l'animal est indispensable à l'Homme : il tient une place centrale dans son imaginaire et lui tend un miroir... De quoi alimenter les débats actuels autour de sa consommation."

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  • Halte à la tyrannie des minorités !...

    Nous reproduisons ci-dessous un entretien avec la professeur de droit constitutionnel Anne-marie Le Pourhiet, cueilli sur Polémia et consacré à la tyrannie que font peser les minorités agressive sur la vie sociale et la liberté d'expression...

     

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    Anne-Marie Le Pourhiet : « Nous vivons dans une société bâillonnée où s’exerce la tyrannie des minorités »

    LE FIGARO. – L’une des mesures adoptées par les députés prévoit d’étendre le principe de l’inéligibilité aux personnes condamnées pour racisme, antisémitisme ou homophobie. Est-ce une bonne chose?


    Anne-Marie LE POURHIET. – Toute personne sceptique qui critique ou émet un jugement de valeur sur des mœurs, des comportements, des cultures ou des croyances est immédiatement considérée comme coupable du délit de « phobie ». Cet amendement n’est qu’une nouvelle étape dans la tyrannie des minorités.

    Non seulement nous vivons dans une société bâillonnée où l’on ne peut déjà plus critiquer un individu ni un groupe sans risquer de se faire traîner en correctionnelle par des associations de militants vindicatifs et sectaires, mais ceux-ci voudraient en outre que les personnes condamnées sur le fondement de lois scélérates extorquées à un législateur complaisant soient interdites d’exercer un mandat public.

    Dans l’intitulé de l’amendement, il est affirmé que ces délits « portent atteinte aux valeurs républicaines qu’un élu se doit de partager ». Ces « valeurs républicaines » ont-elles un contenu juridique ?

    Les « valeurs républicaines » sont aujourd’hui invoquées à tort et à travers pour justifier n’importe quoi. Avoir été condamné pour « propos sexistes » ou bien être hostile au mariage pour tous ou à l’ouverture des frontières sera bientôt considéré comme « antirépublicain » ! Il me semble que l’une des valeurs cardinales de la Révolution française est justement la liberté d’expression, qui ne consiste sûrement pas à formuler seulement des opinions bienveillantes !

    Les valeurs républicaines, historiquement, ce sont la laïcité, l’unité de la Nation et l’égalité des citoyens devant la loi. Le b.a.-ba de la Révolution française, c’est le refus des droits des groupes et des corporations au profit des droits de l’individu libre de toute appartenance. Le multiculturalisme normatif est directement contraire aux valeurs républicaines et le droit pénal prend le chemin inverse des principes républicains en sanctionnant systématiquement les offenses aux communautés. Cela a commencé en 1972 avec la loi Pleven très mal rédigée, puis le mouvement s’est accéléré à partir des années 1980 avec la multiplication des catégories protégées et surtout l’habilitation des associations militantes à se constituer partie civile pour les délits de presse. On a ainsi privatisé l’action publique et soumis les médias, les intellectuels et les citoyens à la menace permanente de censure et de procès pour délits d’opinion.

    L’antiracisme militant établit un continuum entre violence verbale et symbolique et passage à l’acte. N’est-ce pas problématique d’un point de vue juridique ?

    C’est insensé. Ce n’est pas parce que je trouve gênante la mendicité de certains Roms sur les trottoirs que je vais me mettre à les agresser. Le Christ peut sans doute dire à ses ouailles « Aimez-vous les uns les autres », mais un législateur républicain et libéral ne peut pas interdire aux citoyens de ne « pas aimer » tel individu, tel groupe, telle religion, tel comportement ou telle culture. On ne peut pas interdire aux gens de porter un jugement de valeur sur les mœurs d’autrui, ni de hiérarchiser les comportements. Chacun a le droit de penser ce qu’il veut et de dire ce qu’il pense. Le problème est que les « groupes d’oppression » (selon l’expression de Philippe Muray) ont obtenu la multiplication de lois pénales tendant à réprimer ce qu’ils appellent des « phobies ». On veut nous forcer à apprécier le foulard islamique et le burkini, nous obliger à approuver le mariage gay, nous contraindre à accueillir avec le sourire des milliers de migrants, nous imposer de regarder les Jeux paralympiques et d’admirer le football féminin. Nous sommes sommés de considérer que tout est équivalent (au sens étymologique d’égale valeur) au nom de la « non-discrimination ». Et pour être bien sûr que nos assemblées politiques ne comporteront que des moutons dociles bêlant dans le sens du « progrès », on va rendre inéligibles tous les condamnés pour cause de « mal-pensance ».

    Assiste-t-on à un retour du « politiquement correct » ?

    Un « retour » ? Cela fait près de trente ans que nous nous enfonçons dans la dictature politiquement correcte. L’arsenal répressif ne cesse de s’alourdir, sans compter la multiplication des officines parallèles chargées de nous mettre au pas (CSA, Défenseur des droits, Commission consultative des droits de l’homme, Haute Autorité de ci, Observatoire de ça…) et les insupportables instances prêchi-prêcha du Conseil de l’Europe. Nous croulons sous les normes de contrôle social et les institutions de censure. Et nous avons même le droit à des pétitions sur les réseaux sociaux tendant, par exemple, à faire retirer l’attribution d’un prix à un auteur au motif qu’il serait contre le mariage gay et donc « homophobe » ou à faire sanctionner une chaîne de télévision pour avoir laissé passer dans un jeu une séquence « stigmatisante pour les malades mentaux » ! Le premier réflexe face aux imperfections de la société est l’interdiction. Désormais tout conflit, tout désaccord doit se terminer au tribunal. Au lieu de laisser s’exprimer le pluralisme et la contradiction particulièrement chère aux juristes (audi alteram partem = écoute l’autre partie), l’on ne songe qu’à faire taire la dissidence.

    La France devient-elle l’une des démocraties les plus répressives en matière de liberté d’expression ?

    Si les Etats-Unis ont été précurseurs en matière de « politiquement correct », le Premier Amendement à la Constitution de Philadelphie et la jurisprudence pointilleuse de la Cour suprême protègent efficacement les citoyens américains contre toute répression pénale de la liberté d’opinion. Chez nous, même le Conseil constitutionnel a renoncé à protéger la liberté d’expression. Hormis le délit de négation des « génocides reconnus par la loi », il a laissé passer toutes les lois liberticides. La liberté et le pluralisme sont en train de disparaître du pays de Voltaire. C’est irrespirable.

    Anne-Marie Le Pourhiet (Polémia, 28 août 2017)

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  • Méditation sur la technique...

    Les éditions Allia viennent de publier un recueil de textes de José Ortega y Gasset intitulé Méditation sur la technique. Penseur espagnol de la première moitié du XXe siècle, José Ortega y Gasset est notamment l'auteur de La révolte des masses (1929).

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    " « L'homme, qu’il le veuille ou non, doit se faire lui-même, s’auto-fabriquer. Cette dernière expression n’est pas tout à fait inopportune. Elle met en exergue que l’homme, à la racine même de son essence, joue avant tout le rôle de technicien. Pour lui, vivre revient d’abord à s’efforcer à rendre présent ce qui ne l’est pas encore ; à savoir, lui, lui-même, profitant pour cela de ce qu’il y a ; en somme, il est production.»
    Qu’est-ce que la technique ? Pour répondre à cette question, Ortega Y Gasset revient à ce qui, fondamentalement, s’impose à tout homme : la nécessité de vivre. Plus que de survivre, le but de l'homme est le bien-être et c'est pour l'atteindre qu'il développe un répertoire de techniques (le feu, l'agriculture, la chasse). Au contraire de l'animal, il parvient à produire ce qui n'existe pas dans la nature. C'est ainsi qu'il se démarque de l'état naturel et démontre sa capacité à se détacher des stricts besoins vitaux.
    Là réside aussi la particularité de l’homme, qui pourvoit à son bien-être tout en créant ses besoins. Ce à quoi répond la technique.
    Par une succession de raisonnements limpides et de points de vue originaux, le philosophe madrilène, admiré de Mario Vargas Llosa, en vient à évoquer une "crise des désirs" engendrée par la technique et la soif de bien-être.
    Plus de doute, l’homme est un animal pour lequel seul le superflu est nécessaire. Superflu offert par la technique – on ne saurait être plus actuel. "
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  • La communion dans la communication...

    Vous pouvez découvrir ci-dessous une chronique d'Edouard Chanot sur Radio Sputnik, datée du 29 août 2017 et consacrée à la nomination du "journaliste" Bruno Roger-Petit comme porte-parole du président de la République...

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  • Islamisme : 60 ans de lutte antiterroriste...

    Les éditions Tallandier viennent de publier une enquête de Frédéric Charpier intitulée Islamisme - 60 ans de lutte antiterroriste. Journaliste d'investigation, Frédéric Charpier est l'auteur de plusieurs enquêtes intéressantes, comme, notamment Histoire de l'extrême gauche trotskiste (Editions 1, 2002), La CIA en France : 60 ans d'ingérence dans les affaires françaises (Seuil, 2008), L'économie, c'est la guerre ! (Seuil, 2012) ou L'agent Jacques Duclos (Seuil, 2015).

     

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    " En 2015, les Français subissent avec stupeur les vagues d’attentats perpétrés au coeur de Paris par les soldats du Califat et découvrent la réalité du terrorisme islamiste. Un phénomène récent ? Au contraire, comme le prouve cette enquête inédite.
    Des premières heures de la décolonisation dans les années 1950, de l’émergence de la mouvance islamiste des années 1970, notamment iranienne, en passant par la génération GIA des années 1990 dont les protagonistes préconisent déjà la restauration d’un Califat salafiste, sa radicalisation en France avec Khaled Kelkal et ses émules, jusqu’aux attentats-suicides des djihadistes de l’ère Daech, Frédéric Charpier dresse le portrait des groupes activistes et décrit leurs liens avec le grand banditisme.
    Il démontre comment les attentats d’origine islamiste sévissent sur notre territoire avec des fondements idéologiques et des modes opératoires différents selon les époques. Les renseignements français, depuis les années 1960, se sont illustrés dans cette lutte complexe par leur compétence et leurs techniques d’investigation toujours à la pointe. Pourtant de lourdes défaillances ont émergé ces dernières années. Aurait-on oublié une partie du savoir-faire ?
    Dans cette enquête passionnante et très documentée, le journaliste reconstitue plus de 60 ans de lutte antiterroriste et dresse un tableau sans concessions de cette guerre de l’ombre pour mieux montrer combien l’Histoire éclaire la dure actualité. "

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  • Qui arrêtera les grands épurateurs de l'Histoire ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Bérénice Levet, cueilli sur Figaro Vox et consacré à l'entreprise d'épuration de l'histoire menée par le milices du politiquement correct. Docteur en philosophie, Bérénice Levet a publié La théorie du genre ou La vie rêvée des anges (Grasset, 2014) et Le crépuscule des idoles progressistes (Stock, 2017).

     

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    Bérénice Levet :«Qui arrêtera les grands épurateurs de l'Histoire ?»

    Mardi dernier, le 28, se saisissant de la condamnation unanime par les médias français des événements de Charlottesville déclenchés par la décision de la municipalité de destituer la statue du ségrégationniste Général Lee, et la dénonciation non moins unanime du racisme persistant des Américains, de l'attitude des «suprémacistes blancs», le très prévisible président du Conseil Représentation des Associations noires de France (Cran), Louis-Georges Tin, publiait dans Libération une tribune intitulée «Vos héros sont parfois nos bourreaux» - précisons que la nuance n'est pas de Tin lui-même ; pour lui, il n'y a pas de «parfois»: «Vos héros sont nos bourreaux», écrit-il.

    Dans cette tribune, il somme le peuple français de procéder à son examen de conscience, de prendre acte de sa propre complaisance envers «les négriers», et réclame des édiles une vaste politique d'épuration urbaine: débaptiser les noms de rues, déboulonner les statues et, parmi les cibles visées par le militant, un nom se détache, nullement choisi au hasard tant la charge symbolique est forte, celui d'une des grandes figures de l'histoire de France: le nom de Colbert. «Lequel des deux pays est le plus problématique, feint de s'interroger Tin, celui où il y a un conflit autour de la statue d'un général esclavagiste, ou celui où il y a l'Assemblée nationale une statue de Colbert, une salle Colbert, une aile Colbert au ministère de l'Économie, des lycées Colbert, des dizaines de rues ou d'avenue Colbert sans qu'il y ait le moindre conflit, la moindre gêne, le moindre embarras?»

    S'attaquer aux statues est un geste hautement significatif. Souvenons-nous de l'Abbé Grégoire et de sa grande croisade contre le vandalisme (mot qu'il forgea) révolutionnaire, qu'il interprétait comme une volonté de «ramener le peuple à l'ignorance en détruisant les monuments des arts». Une ville est sédimentée historiquement et les statues sont les incarnations de ces couches successives qui la composent. Une ville se raconte au travers de ses statues. Celles-ci sont riches d'une double épaisseur temporelle: elles renvoient au siècle de la personne statufiée - témoins d'un temps passé, elles sont les marqueurs de la continuité historique d'une nation - mais aussi à l'époque où elles ont été érigées. (Je renvoie sur cette question aux précieux travaux de Maurice Agulhon).

    Ces grands démolisseurs ignorent les racines affectives de ces monuments. «Ces mois derniers, racontait le philosophe Ortega y Gasset dans sa préface à la Révolte des masses destinée aux lecteurs français, tout en traînant ma solitude par les rues de Paris, je découvrais qu'en vérité je ne connaissais personne dans la grande ville, personne sauf les statues (…) N'ayant personne à qui parler, c'est avec elles que je m'entretins». Et chacun de nous fait au moins l'expérience de ces itinéraires urbains jalonnés par la présence de ces grands hommes, écrivains, monarques, révolutionnaires, qui ont fait la France.

    Ces exigences de réécriture de l'histoire se sont multipliées au cours de ces dernières années. En décembre 2015, le Rijksmuseum d'Amsterdam s'engageait dans une vaste opération intitulée «Ajustements au sujet des terminologies colonialistes». Vingt-trois termes figurant sur les cartels des œuvres accrochées aux cimaises du musée, pouvant être jugés «offensants» par les visiteurs, avaient été retenus afin de leur trouver des substituts politiquement corrects: Maure, nègre , esclave, sauvage, hottentot, nain, mahométan. La même année, un Américain de trente-trois attaquait le Metropolitan Museum of Art de New York en justice pour racisme. Il accusait l'institution muséale de n'exposer que des œuvres figurant des Christs de type «arien», des Christs à la peau claire et aux cheveux blonds, provoquant du même coup, chez lui «un sentiment de rejet». Quatre toiles l'offensaient particulièrement, dont une du Tintoret et une autre du Pérugin. Il en exigeait impérieusement le décrochage.

    Cette année, en Martinique, à l'occasion du 23 août, décrété par l'Unesco journée international de la mémoire de l'esclavage et de son abolition, une manifestation à l'initiative du MIR (Mouvement International pour les Réparations) a été organisée afin d'obtenir la destitution de la statue de Joséphine de Beauharnais, sur la place de la Savane. Les militants ont brûlé sur la statue le drapeau aux serpents, emblème très controversé de la Martinique puisque ce pavillon figurait à l'époque sur les navires négriers. D'autres manifestations et revendications de cet ordre ont été récemment rappelées par Mathieu Bock-Côté (Le Figaro, 30 août 2017). Il faudrait également regarder du côté des féministes non moins résolues à reconfigurer l'espace public.

    Politique de reconnaissance importée

    Comment en sommes-nous arrivés là? Plusieurs facteurs y ont contribué et se conjuguent.

    Nous sommes la proie d'une hydre à plusieurs têtes. Effets délétères partout dans le monde, mais plus encore en France tant cet esprit est contraire à notre histoire. L'avènement d'une mémoire pénitentielle et l'importation d'une idéologie et d'une politique de reconnaissance des identités venue des pays anglo-saxons, l'exaltation du droit à la différence avec la création de SOS Racisme par la gauche mitterrandienne en 1984 ont eu raison de la conception française de la République et de sa passion du monde commun.

    Le retrait de la nation, de l'histoire nationale comme principe d'identification a laissé le champ libre à l'affirmation identitaire, aux revendications de chacune des communautés et à l'émiettement du corps national. Un individu ne se satisfait pas longtemps de demeurer sans identité, il se tourne alors vers les plus avenants, les seuls offrants. Une identité de victime, autorisant la haine de la France et de l'Occident, semble un joyeux écrin.

    Ces phénomènes témoignent du rapport extrêmement épineux que nous entretenons avec le passé. Nous ne savons plus comment l'appréhender. Le passé appelle des héritiers, car il aspire à être continué, maintenu vivant et enrichi, or, il semble bien qu'il doive se contenter de touristes ou de juges, qui sont souvent les mêmes. L'hubris, la démesure d'un présent qui se voudrait entièrement fondateur, nous domine. L'homme ne veut plus se concevoir comme un héritier, avec ce que cela engage de responsabilité. L'histoire singulière dans laquelle nous entrons nous est confiée et il nous appartient d'en répondre. «Naître, disait Marcel Hénaff, c'est être en dette».

    La passion judiciaire nous habite et le passé ne nous apparaît plus que comme coupable de part en part et indigne d'être continué. Nous sommes devenus inaccessibles à la grandeur du passé, à sa noblesse, à sa puissance d'inspiration, à ses trésors. Dans la novlangue des années 1960-1970, fabriquer des héritiers signifie ipso facto se rendre coupable de collaboration en permettant à une civilisation de se prolonger. La passion de la repentance, l'ivresse pénitentielle, sur lesquelles tout a été écrit, nous habitent.

    Incarcérés dans la prison du présent

    Un point me semble devoir cependant être ajouté, plus rarement souligné. Incarcérés dans la prison du présent, nous sommes devenus incapables de nous extraire de nos catégories de pensée et de jugement - sexisme, racisme, colonialisme, machisme, dominants/dominés et nous revisiterons l'histoire avec pour seule pierre de touche cette indigente grille de lecture. L'inconnu est ramené au connu, l'étrangeté qui marque de son sceau des modalités de pensée et de vie venues d'autres rives temporelles, reconduites à du familier.

    Un mal redoutable nous affecte: nous sommes devenus incapables de suspendre nos évidences, de mettre entre parenthèses nos préjugés d'hommes démocratiques, égalitaristes. Incapables, autrement dit, de «nous dépayser dans un sens autre» (Paul Ricoeur) et d'atteindre à la complexité de réalités essentiellement distinctes des nôtres - et le plus grave est que l'école elle-même ne se fait plus le lieu de l'apprentissage de cette faculté, de cet art. Les programmes d'histoire et de littérature sont infestés par l'idéologie contemporaine et l'élève appréhende le passé avec les lunettes du présent, encouragé à distribuer les bons et mauvais points.

    Ainsi de Colbert, cette immense figure de l'histoire de France, qui a permis à notre pays d'accéder à une grandeur jusqu'alors inégalée, Louis-Georges Tin ne sait et ne veut savoir qu'une chose: qu'il fut l' «auteur du code noir» - formule approximative car si Colbert fut à l'initiative du code noir, il n'en fut pas le rédacteur, mais ne demanderons pas à Tin de s'embarrasser de ce qui n'est assurément à ses yeux qu'un détail - et le fondateur de la Compagnie des Indes Occidentales.

    Qu'on ne nous accuse pas de nier la réalité de l'esclavage et la rigueur de cette juridiction. Nous n'ignorons nullement que le Code noir «en vigueur jusqu'en 1848, fut l'un des outils de l'inhumanité du système esclavagiste. Il en demeure l'un des symboles» (Olivier Grenouilleau) mais l'histoire de la France ne s'y réduit pas. Ce que s'obstinent à nier les Tin et consorts pour qui la colonisation est l'essence même de la France. Et dans cette intrigue des plus rudimentaires, les rôles sont aisés à distribuer: nous sommes les bourreaux et eux, les victimes.

    Il est évident que l'établissement des faits, la connaissance historique n'intéressent pas ces militants. L'objectif de ces carabiniers n'est pas le savoir, l'instruction, mais la comparution: ils veulent une France à terre, une France qui batte sa coulpe. La haine, le ressentiment - passion vile des hommes démocratiques, disait Nietzsche - les dévorent.

    Lecture infantilisante de l'histoire

    Cette lecture en blanc et en noir de l'histoire pourrait être dénoncée comme de l'infantilisme, ce qu'elle est assurément - l'adulte, l'homme qui a accédé à l'âge de la majorité, l'homme éclairé est censé savoir que l'histoire est un tissu de complexités - mais ce serait insuffisant car elle est d'une redoutable efficacité, elle séduit et est diffusée, relayée par des esprits qui ont largement dépassé l'âge infantile.

    Nos élites intellectuelles, culturelles, politiques en sont les grandes instigatrices. Ainsi, mardi 28, dès 7h30, avant même de s'être rendu à son kiosque à journaux, l'auditeur de la Matinale de France-inter savait, grâce à son animateur Nicolas Demorand (éditorial accessible en ligne sur le site de la radio), qu'il était ce jour-là un sermon à ne pas manquer et à gravement médité, publié dans le quotidien Libération, la tribune de Louis-Georges Tin. «Examen de conscience nécessaire, donc, de ce côté de l'Atlantique», concluait le journaliste sur un ton solennel mais non moins enjoué, le ton de celui qui se sait appartenir au camp du bien.

    C'est la raison pour laquelle on aurait tort de traiter par le mépris, avec un haussement d'épaules et un sourire au coin des lèvres, ces manifestations et revendications. Comment ces grands épurateurs de notre histoire, de notre passé, ne trouveraient-ils pas audience auprès de nos politiques hantés par l'idée d'être suspects de complicité avec les «péchés», quand ce ne sont pas les «crimes», de la France (colonialisme, sexisme etc.)? Imaginons un instant, Anne Hidalgo, lisant la tribune de Tin: Comment l'exhortation à traquer la moindre trace des «négriers» dont la ville perpétuerait le souvenir, et en conséquence, à débaptiser les rues, les établissements scolaires, déboulonner les statues pécheresses, ne trouverait-elle une oreille des plus bienveillantes auprès de la maire de Paris engagée dans cette vaste opération d'ingénierie urbaine et sociétale, éloquemment intitulée «Réinventer Paris» (entendre régénérer le peuple parisien)? Une ville nettoyée de ces vieilleries au nom de la lutte contre le racisme et l'esclavagisme…Que rêver de mieux!

    Il nous faut être extrêmement vigilants, car les revendications communautaristes sont un tonneau des Danaïdes et nos élites font montrer d'une véritable soumission.

    Cette focalisation sur le passé offre l'avantage de se détourner de l'urgence du présent, de se dispenser de juger ici et maintenant. Ainsi la France mérite-t-elle toute leur haine, quand les terroristes islamistes à l'inverse, serinent-ils après chaque nouvel attentat, ne l'auront pas.

    Bérénice Levet (Figaro Vox, 4 septembre 2017)

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