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Métapo infos - Page 1418

  • Contre-Révolution ?...

    Les éditions du CNRS publient dans leur collection de poche Biblis un ouvrage collectif, sous la direction de Jean Tulard, intitulé La Contre-révolution - Origine, histoire, postérité. Spécialiste incontesté de l'époque napoléonienne, Jean Tulard est aussi un amateur passionné de cinéma et a dirigé la publication d'un monumental Guide des films chez Robert Laffont dans la collection Bouquins.

     

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    "On a beaucoup étudié la Révolution, moins la Contre- Révolution. Or la Révolution trouve en face d’elle des adversaires de plus en plus nombreux au fur et à mesure de sa radicalisation. Car la Contre-Révolution ne s’incarne pas que dans les Chouans. Diverse dans son inspiration, ses objectifs, ses assises sociales, sa presse, sa localisation géographique, ses réseaux, ses complots, ses combats, elle n’est pas facile à saisir dans toutes ses ramifications et dans sa durée.

    Jean Tulard a pourtant relevé le défi, aidé de spécialistes incontestés. Ainsi sont disséqués les origines, les composantes, les doctrines, les actes et la postérité de la nébuleuse contre-révolutionnaire."

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  • L'opération Serval ou l'échec de la dissuasion...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue du colonel Michel Goya, cueilli sur son blog La voie de l'épée, dans lequel il montre finement que ce sont les mauvais choix politiques faits hier qui contraignent aujourd'hui notre pays à intervenir directement.

    Auteur de plusieurs essais sur la guerre et la chose militaire comme Res militaris - De l'emploi des forces armées au XXIème siècle (Economica, 2010), Michel goya est aussi membre du comité de rédaction de l'excellent bimestriel Guerre & Histoire.

     

     

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    L'opération Serval ou l'échec de la dissuasion
    Avant d’évoquer les perspectives de l’engagement militaire au Mali, il n’est pas inutile de revenir sur le passé récent et de mettre l’accent sur une évidence : si les djihadistes ont lancé une offensive vers le Sud du Mali, c’est qu’ils n’ont pas été dissuadés de le faire.
    La dissuasion repose sur toujours sur une capacité de destruction multipliée par une probabilité d’emploi. La capacité de frappe rapide de la France, à partir des bases au Tchad ou au Burkina Faso, voire même depuis la métropole, était évidemment connue de tous. Cette capacité n’était peut-être pas très importante en volume si on la compare aux campagnes aériennes menées par les Etats-Unis, avec ou sans l’OTAN, ou Israël depuis 1999 mais elle était suffisante pour faire face à la plupart des adversaires sur le sol africain, d’autant plus qu’elle combinait la puissance des avions avec la permanence et la souplesse des hélicoptères.
    La faiblesse se trouvait donc dans la probabilité d’emploi. Plusieurs éléments psychologiques et politiques peuvent l’expliquer. En premier lieu, la force de frappe (la projection de puissance en terme moderne) reste une menace virtuelle et lointaine. La perception de l’ennemi potentiel n’est pas la même lorsqu’il a en face de lui des soldats, incarnation de la volonté politique et de la prise de risques. C’est le même principe qui présidait à la présence d’un corps de bataille français en Allemagne dont l’action était le moyen d’éviter le choix entre la reddition et la montée immédiate aux extrêmes mais aussi la justification par le sacrifice de cette montée éventuelle. La prise de risques de quelques-uns contribuait ainsi à éviter la mort de tous. Concrètement, il est probable qu’à la manière de l’opération Manta au Tchad en 1983 ou de l’opération Noroit au Rwanda en 1990, la présence d’un groupement tactique dans le Mali vert aurait sans doute suffit à dissuader toute offensive sérieuse en attendant la lente montée en puissance de la MISMA*.
    Car, et c’est là un autre principe de la dissuasion, la mise en place d’un dispositif de forces qui risque de faire basculer les rapports de force est évidemment une source de tension et une incitation pour le futur perdant à agir avant l’achèvement du processus. Un principe stratégique élémentaire consiste donc à protéger le futur par des mesures de précaution immédiate. En France, la force dotée de missiles balistiques nucléaires, longue à mettre en place, a ainsi été couverte par la mise en place rapide des Mirage IV. Une offensive du Nord pour s’emparer de Bamako ou au moins d’y provoquer une déstabilisation politique avant la mise en place de la MISMA en septembre 2013 (soit, avec EUFOR Tchad, une des générations de forces les moins dynamiques de l’Histoire) était donc non seulement possible mais même hautement probable. Il était stratégiquement élémentaire de la couvrir et on revient encore à l’intérêt qu’il y aurait eu à déployer une force terrestre en bouclier. Or, cette hypothèse (pourtant préparée par nos états-majors) n’a jamais été évoquée.
    Cet oubli peut-être le résultat d’une sous-estimation de l’ennemi mais on peut y voir aussi le résultat contradictoire de la mise en œuvre du processus de création de la force africaine. En d’autres termes, la mise en place d’un bouclier français aurait peut-être eu comme effet de ralentir encore la réunion déjà difficile d’alliés africains et européens peu motivés, se reposant dès lors sur les Français pour remplir la mission. Entre le lâche (et silencieux) soulagement chez certains et l’accusation (ouverte) d’ingérence chez d’autres (ou parfois les mêmes), la position française, qui aurait été qualifiée d’enlisement au bout de quelques heures, n’aurait certes pas été facile. Au bilan, on a offert à Ansar dine et AQMI, non seulement une raison d’agir mais aussi l’opportunité de la faire pendant plusieurs mois.
    Il est vrai enfin que les déclarations du Président de la république, répétant qu’il n’y aurait ni troupes au sol françaises, ni frappes aériennes au Mali, ne pouvaient que conforter nos actuels adversaires dans leur volonté d’agir. Dans la Ve république, pour paraphraser François Mitterand, « la dissuasion, c’est le Président de la République ». Sa capacité discrétionnaire à employer la force armée en fait évidemment le paramètre premier de sa probabilité d’emploi. Il est donc observé et écouté par ceux qui pourraient subir la foudre française. A l’instar des Soviétiques et des Nord-Coréens méjugeant la personnalité du Président Harry Truman et déclenchant la guerre de Corée, les organisations rebelles au Mali ont sans doute sous-estimé la capacité de réaction (ou volatilité, c’est selon) de l’exécutif français et ils sont en train de le payer.
    En conclusion, cette offensive rebelle, sinon cette guerre de toute façon inévitable, aurait pu être évitée par l’organisation d’une dissuasion adaptée. Cela n’a pas été le cas mais c’est peut-être mieux ainsi. Ce raid de quelques dizaines de kilomètres d’une poignée d’hommes montés sur pick-up est, peut-être et il faut l’espérer, le point de bascule qui va permettre d’inverser la spirale d’inefficience dans laquelle nous étions engagés depuis vingt ans. 
    Michel Goya (La voie de l'épée, 19 janvier 2013)
    *Mission internationale de soutien au Mali
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  • La fabrique des malades...

    Nous vous signalons la parution aux éditions du Cherche-Midi d'un essai de Sauveur Boukris intitulé La fabrique des malades - Ces maladies qu'on nous invente. Médecin généraliste et enseignant à Paris VII, Sauveur Boukris est l'auteur de plusieurs essais consacrés aux questions médicales comme Santé, le grand bordel (Cherche-Midi, 2011).

     

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    « Tout bien portant est un malade qui s'ignore », disait le docteur Knock. Aujourd'hui, «tout bien portant est quelqu'un qui n'a pas eu de dépistage ». Des centaines de milliers de Français consultent à l'hôpital ou en cabinet pour pratiquer un bilan médical, radiologique ou biologique. Inquiets et prudents, ils pensent qu'il vaut mieux prévenir que guérir et comptent ainsi éviter une maladie silencieuse.

    Dans ce livre, le docteur Boukris évoque la « médecine marketing » et montre comment on manipule médecins et malades en jouant sur les peurs, comment on médicalise nos vies pour pratiquer davantage d'examens biologiques, de radiographies et faire consommer toujours plus de médicaments.

    Transformer des sujets bien portants en malades potentiels, tel est l'objectif de certains secteurs médicaux, privés ou publics, qui transmettent un message trompeur, lequel engendre de l'anxiété et génère un gâchis financier.

    Surmédicalisation, sur-diagnostic, sur-traitement, ce document nous ouvre les yeux sur des pratiques du monde médico-industriel qui peuvent être nuisibles pour la santé et bouleverse de nombreuses idées reçues.

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  • La criminalité, une conséquence de la pauvreté ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un texte de Laurent Obertone, cueilli sur Atlantico et consacré à l'absence de lien automatique entre criminalité et pauvreté. Laurent Obertone vient de publier La France orange mécanique, aux éditions Ring, une description hallucinante de l'insécurité et de la violence qui règne dans notre pays...

     

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    Non, la criminalité n'est pas forcément liée à la pauvreté

    La criminalité est-elle liée à la pauvreté, à l’environnement ou au chômage ? La Creuse (96e), le Cantal (89e), et le Lot (71e), présentent les PIB les plus bas de France. Ce sont aussi les trois départements les moins criminels et délinquants. On peut les comparer avec trois départements parmi les plus criminels et délinquants, c’est à dire la Seine-Saint-Denis (15e), les Bouches-du-Rhône (11e) et le Rhône (3e).

    Les départements à forte criminalité que sont le Rhône, l’Essonne, le Val-de-Marne, la Seine-et-Marne, ont des taux de chômage beaucoup plus bas que la Creuse, le Cantal, ou le Lot. Selon l’Apce, 8 000 entreprises se créent par an dans le « 9-3 », qui dispose de pôles économiques gigantesques, et où les investissements de rénovation urbaine sont fréquents et sans équivalent (Anru). Le revenu moyen des ménages y est de 2 186 euros par mois, légèrement supérieur à la moyenne nationale. Saisissante est la comparaison avec la Creuse (1 777 euros par mois). Quant aux bénéficiaires du RSA, ils représentent la même proportion en Seine-Saint-Denis que dans l’Aude, les Ardennes ou encore les Pyrénées-Orientales (Insee, 2010). Au niveau régional, l’Île-de-France, région la plus touchée par la criminalité, présente le troisième taux de chômage le plus bas de France.
    « L’exclusion », ce fut d’abord celle des habitants historiques des grands ensembles. Immigrés portugais, polonais, italiens ou manœuvres français, ce sont eux qui ont fui massivement le nouveau communautarisme qui s’installait dans les banlieues dès les années 60. Contrairement à ce qu’affirment certains sociologues, « l’exclusion » est endogame. Tous les plans de mixité sociale, de logements sociaux, de rénovation urbaine et d’aménagement de la ville n’empêcheront jamais les communautés de se regrouper. C’est humain, et on observe ces phénomènes dans tous les pays du monde, quelles que soient les communautés. L’individu n’existe pas sans son groupe. Il ne s’en éloignera que par la contrainte. Les gens ne sont pas figés ou « parqués » dans un environnement soi-disant responsable de leurs déprédations. Un observateur attentif remarquera qu’autour des banlieues il n’y a pas de miradors et de factionnaires prêts à tirer dans le dos des fuyards.
    Qu’est-ce qui empêche ces habitants de partir, comme l’ont fait des milliers de Français, d’Italiens ou de Portugais tout aussi modestes ? Des barrages de police ? Le coût de l’immobilier ? À Bobigny, le mètre carré est à 3 200 euros. Il est en moyenne de 6 000 euros à Paris, mais à 1 700 euros à Brest, ou encore à 2 300 euros dans une ville dynamique comme Dijon. Un studio en Seine-Saint-Denis est beaucoup plus cher qu’en province. Les aides sociales permettent largement de s’y établir, d’autant que les logements sociaux provinciaux et ruraux sont plus accessibles. L’Insee, dans son enquête nationale logement 2006, nous apprend qu’après Paris, « c’est en Seine-Saint-Denis que les ménages consacrent la part la plus importante de leur revenu (13 %) à se loger », y compris en secteur HLM (12 %). Des chiffres comparables à ceux de la France métropolitaine pour la location classique et pour les hlm (12,8 % dans les deux cas). On ne peutdonc pas dire qu’un loyer excessivement avantageux les retientdans le « 9-3 ». Comment nos sociologues expliquent-ils que les parfois très modestes gens du voyage se déplacent et se sédentarisent où bon leur semble ?
    Peut-être n’est-il pas question pour les communautés concernées de se disperser sur le territoire. Peut-être ne veulent-elles pas partir. La Cour des comptes a montré en 2012 que la fameuse mixité sociale n’existait pas, malgré dix années de dispositifs censés la favoriser. « Il ne suffit pas de modifier le visage des quartiers pour modifier les visages des quartiers, qui restent colorés », expliquait le sociologue Renaud Epstein (Le Point, 18/07/12). L’homme n’est pas mû seulement par l’argent ou l’amour de l’Autre. L’attachement de certaines communautés aux grands ensembles est réel. Les barres d’immeuble sont parfois considérées comme un territoire, le substitut d’une identité perdue, qui n’a jamais su se reconstruire.
    Mais le discours médiatique ne veut pas de cette réalité. Lui n’évoque que l’exclusion pour expliquer, justifier, exorciser le communautarisme, et à travers lui les cahots d’une société devenue hétérogène. Comme les problèmes demeurent, s’aggravent, alors que les discours et les analyses restent les mêmes, les gens commencent à se poser des questions. Et si les experts se trompaient ? Et s’ils avaient renoncé à la vérité ? Et s’ils incitaient tout le monde à y renoncer, sous peine de poursuites ? Pourquoi le feraient-ils ? Peut-être bien pour l’égalité républicaine, « âme de la France » selon François Hollande. Tout le monde est égal. Entendez, tout être humain a les mêmes capacités physiques et intellectuelles, tout un chacun peut s’adapter à tout environnement, devenir champion d’échecs, éboueur ou haltérophile, faire la même chose que n’importe qui, ressembler à n’importe quoi, donc se constituer le même patrimoine, éprouver les mêmes satisfactions, vivre les mêmes aventures que celui que l’on choisira de jalouser. 
    Comme de tels décrets ont la fâcheuse tendance à ne pas se réaliser, les égalitaristes ont décidé de favoriser ceux qui n’y arrivaient pas, par l’éducation, l’accès à la culture, les aides sociales, l’invention de droits spécifiques. Et comme ça ne fonctionnait toujours pas, ils ont eu la brillante idée d’accuser ceux pour qui ça fonctionnait d’être de vils spoliateurs. Bien entendu, toute ressemblance avec des situations ayant existé est purement fortuite. 
    De favoriser les faibles on en vient tout naturellement à pénaliser les forts. Lorsque l’on prétend lutter « contre les inégalités », on lutte contre la réussite, c’est-à-dire contre la propriété, le pouvoir, le possédant, le méritant, le riche, l’héritier. Celui qui n’a pas été exclu ou volé, celui qui a été favorisé par sa roublardise, son état-civil, et sûrement ses atteintes aux droits de l’Homme. En clair, le Français qui rapporte de l’argent à la société, qui peut se targuer de sa réussite, de son patrimoine, de son histoire, de sa civilisation occidentale. Pour rééquilibrer les choses, on a décidé de le grever d’un lourd handicap. On a fait en sorte qu’il devienne, par la magie des médias, un salaud de colonialiste, esclavagiste, un pillard trop riche, trop beauf, trop raciste, machiste, homophobe, exploiteur, stigmatisant, même pas de gauche, voilà la conséquence première de la logique de fraternité appliquée au droit. Ces dernières années, l’égalitarisme, un véritable culte de l’envie, a inondé tous les compartiments de la société. Jamais autant de Français ne se sont haïs eux-mêmes. Jamais autant d’esprits a priori normalement constitués ne se sont persuadés que « tout le monde était bon » à part eux, que c’était incroyable qu’il y ait « encore des guerres et des pauvres au xxie siècle », qu’il était urgent de « faire payer les riches », que la criminalité c’est « l’exclusion parce que l’immigration est une chance pour la France”.
    Laurent Obertone (Atlantico, 20 janvier 2013)



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  • Henrick... de Pikkendorff !

    Le dessinateur Jacques Terpant vient de publier aux éditions Delcourt Henrick, le deuxième tome de sa série de bande-dessinée Le Royaume de Borée, inspirée du roman de Jean Raspail, Les royaumes de Borée (Albin Michel, 2003).

     

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    "Hanté par la Borée,le grand-duc August IV de Valduzia lance une grande campagne sur ces terres inconnues, sans résultat. Lors du compte rendu de ce fiasco,son attention se porte sur un homme : le capitaine Henrick de Pikkendorff.
    Le javelot primitif que ce dernier a rapporté de la frontière lui redonne espoir.Une nouvelle expédition est organisée Henrick de Pikkendorff, accompagné d'une douzaine d'hommes, s'enfonce dans la Borée."

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  • Communication de guerre sur le Mali...

    Nous reproduisons ci-dessous une excellente analyse de François-Bernard Huyghe, cueilli sur son site Huyghe.fr et consacré à la communication du chef de l'état et du gouvernement français à propos de la guerre au Mali...

     

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    Communication de guerre sur le Mali

    Dans toute communication de guerre, les constantes tiennent à la nature même d'un conflit où il faut parler de l'ennemi et de la mort.
    De l'ennemi parce que les idées d'État et de souveraineté présupposent la distinction entre l'ennemi contre lequel il faut mobiliser la violence suprême et le rival contre qui on ne recourt pas aux armes ou  le criminel (acteur "privé" soumis à une répression légitime et limitée par la loi interne).
    De la mort, parce que, même si certains ont développé des fantasmes sur des guerres "zéro mort", une guerre qui ne se traduirait pas par des pertes de vies humaines, resterait une manœuvre militaire, une gesticulation ou une menace.

    Il faut donc dire qui l'on affronte, au nom de quoi, quelles sont les pertes et pour quel résultat. Ne serait-ce que pour faire comprendre à sa population les raisons qu'ont ses soldats de tuer ou de mourir en son nom.
    De ce point de vue, la guerre du Mali a encouragé un discours dont les mâles accents font contraste avec la communication antérieure du gouvernement Ayrault (mais beaucoup moins avec les discours tenus par des gouvernements socialistes au moment du conflit du Kosovo ou de l'intervention française en Afghanistan, pour ceux qui ont un peu de mémoire).

    D'abord qui combattons nous ? D'un ministre à l'autre, les "éléments de langage" ont peu varié.
    Pour Jean-Yves Le Drian "Il faut éradiquer le terrorisme où qu'il se trouve" et c'est "contre le terrorisme" que la France est en guerre. Des mauvais esprit ont fait remarquer que cette formule de "guerre au terrorisme" était celle que l'on avait reprochée à G.W. Bush (qui pensait aussi qu'il fallait l'éradiquer partout dans le monde et qu'en le faisant les États-Unis poursuivaient un but universel et non des intérêts particuliers). Depuis, le vocabulaire a un peu évolué. Il n'est plus question que de combattre des "terroristes", des groupes terroristes", des "éléments terroristes" (F. Hollande), des "criminels et terroristes" (L. Fabius). Donc des gens caractérisés par une idéologie et des objectifs politiques et non une méthode de lutte (selon une phrase célèbre : on fait pas plus la guerre au terrorisme qu'on ne la faisait à la BlitzKrieg au début de la seconde guerre mondiale).

    L'emploi du mot "terroristes" a deux avantages :

    - Il désigne des adversaires par la nature odieuse et criminelle de leur activité (ennemis du genre humain), plutôt que par leur stratégie politique (cela souléverait quelques questions délicates comme leurs liens avec des indépendantistes touaregs ou la nature légale et démocratiques des autorités de Bamalo). Qui ne serait d'accord pour combattre des terroristes L'argument qu'il pourraient créer un État terroriste et déstabiliser le monde entier s'ils s'emparaient de tout le pays a été évoqué en des termes rappelant la justification de l'intervention contre l'Afghanistan en octobre 2001. De fait, personne n'a envie de voir des coupeurs de mains s'installer à Bamako, mais à partir du moment où vous descendez conquérir un pays avec des colonnes lourdement armées, où vous entrez dans des villes pour y imposer votre loi et votre autorité, etc, vous vous conduisez comme une rébellion, une armée de guerre civile ou de guérilla, et plus comme des terroristes qui lancent des bombes et es communiqués avant de se cacher.

    - Le mot terroriste évite d'employer "islamiste" et de prêter le flanc à l'accusation d'islamophobie, ou d'amalgame entre l'islam et ceux qui tuent en son nom. Les rares occurrences des expressions "groupes islamistes et criminels" ou "jihadistes" ont fait place dans le discours officiel au mantra : nous repoussons le péril terroriste.

    - Cela va de pair avec la volonté ostensible de rappeler que nous ne sommes pas seuls, que nous sommes tout au plus l'avant-garde ou les plus réactifs d'un mouvement international. On redit que l'on verra de plus en plus intervenir l'armée malienne (que nous ne faisons que seconder), des troupes africaines de la Misma et si possible d'autres nations tout aussi soucieuses que nous de l'application de la résolution de l'Onu. Elles ne vont pas manquer de nous aider, même si elles n'envoient pas forcément de troupes combattantes. Ce discours à la fois modeste et légaliste transparaît dans le moindre communiqué de l'état-major qui ne cesse de reprendre ces éléments (nous agissons en appui, en coopération, dans le cadre..). Surtout, la communication est très largement remontée au ministère et à l'Élysée - l'état-major étant préposé au factuel minimal - et les politiques répètent sans se lasser ces éléments propres à renforcer l'unanimité des partis et à repousser le moindre soupçon de retour à la FranceAfrique honnie. Au risque que cette communication minimale sur les engagements ouvre le champ à d'autres sources d'information et à des légendes comme celle de nos troupes "combattant au corps à corps" les terribles terroristes (pourquoi pas les chargeant à la baïonnette ?).

    Autre élément de la communication officielle : le ton ferme voire martial interdit de faire l'impasse sur les pertes de cette guerre. Des gens vont mourir, on assume. Contrairement à la stratégie de relative discrétion sur nos soldats tombés en Afghanistan, l'enterrement du lieutenant Damien Boiteux, notre premier mort au Mali tombé le 11 janvier, a donné lieu à une importante cérémonie. C'est très heureux pour le proches du lieutenant, qui est effectivement mort pour son pays et mérite énormément de respect, mais c'est aussi un signal politique. Au moment où François Hollande tente de faire passer une image de décision et d'autorité, il n'est plus question que le président normal devenu chef de guerre refuse d'assumer la dimension tragique du rôle. Plus questions d'euphémismes et de délicatesses, plus de mines pincées. Ce changement de tonalité (F. Hollande parlant de "détruire les terroristes" lors de sa visite aux Émirats Unis) appelle des termes que l'on croyait plus réservés à G.W. Bush ou à Poutine qu'à des socialistes. Cet effet de contraste ou de contradiction est un prix modeste à payer si l'affaire ne dure pas trop longtemps et si elle confirme l'idée de cette mue présidentielle. Ce sont deux points que nous pourrons bientôt vérifier.

     En attendant, cette rhétorique martiale contraste avec une certaine modestie dans la façon officielle  de parler des événements de Somalie ou d'Algérie
     Entre une opération militaire qui a échoué et une prise d'otages qui a tout pour inquiéter l'opinion, il y a moins matière pour une mise en majesté du chef de l'État ou pour l'autosatisfaction. L'Etat algérien a choisi la démonstration de force sans phrases, afin de décourager ceux qui auraient le moindre espoir de le faire céder, et sans souci des réactions des capitales étrangères. Du coup Paris, tenu pour quantité négligeable n'ose pas protester aussi fermement que le Japon quelques semaines après le voyage du chef de l'État sur place, sensé avoir réconciliés les eux rivés de la Méditerranée.
    Le discours du chef de guerre est un exercice difficile dont on mesurera le vrai résultat dans quelques semaines.

    François-Bernard Huyghe (Huyghe.fr, 19 janvier 2013)

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