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élites - Page 3

  • Référendum sur l’immigration : la méfiance des élites envers la souveraineté populaire...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Michel Leblay cueilli sur Polémia et consacré au refus des consultations référendaires du peuple par les élites du système.

     

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    Référendum sur l’immigration : la méfiance des élites envers la souveraineté populaire

    Le site Télos a publié le 27 mai dernier un article de Messieurs Elie Cohen, Gérard Grunberg et Pasquale Pasquino intitulé Le choix inquiétant des Républicains. Il s’agit d’une critique de l’annonce dans Le journal du dimanche du 21 mai 2023 par Eric Ciotti, Olivier Marleix et Bruno Retailleau de deux propositions de loi sur l’immigration. La première proposition vise à permettre la tenue d’un référendum sur l’immigration et la seconde a pour objet l’adoption de mesures restrictives sur l’immigration. Face à ces deux propositions, les auteurs de l’article marquent leur opposition avec les intentions formulées par les trois élus Républicains qu’ils résument en trois mesures : une réforme constitutionnelle pour élargir l’objet du referendum à la politique de l’immigration ; une remise en cause de la primauté de la norme juridique européenne sur la norme nationale ; et une primauté de la décision politique sur son interprétation juridique.

    Une conception de la démocratie

    Ce qui retient d’abord l’attention c’est la conception avancée par les trois auteurs de ce que doit être une démocratie et leur considération pour la souveraineté populaire. C’est certainement à ce titre que l’article doit être relevé en premier lieu. Deux phrases extraites de celui-ci en traduit l’esprit : LR remet à l’honneur la pratique du référendum, partageant ainsi la tendance antiparlementaire de la droite et de la gauche radicales et rompant avec le ralliement des gaullistes au parlementarisme rationalisé opéré après le départ du général de Gaulle. Cette évolution est dangereuse. La présidence du Général De Gaulle et le recours par celui-ci au suffrage populaire pour les questions qu’il estimait essentielles pour le pays apparait de ce point de vue comme une regrettable parenthèse. En fait, ce qui est défini comme le parlementarisme rationalisé est à l’essence de la Ve République puisque la Constitution de celle-ci, approuvée par le suffrage universel le 28 septembre 1958, a bordé l’action du Parlement. D’une part, aux termes des articles 34 et 37 de la Constitution le domaine de la loi est strictement défini, les « matières autres » ayant un caractère réglementaire. D’autre part, cette Constitution offre au gouvernement des moyens constitutionnels, en premier lieu l’article 49.3, pour faire adopter des textes malgré l’absence de majorité pour les voter. En parallèle, le recours au référendum est explicitement prévu aux termes des articles 11 et 89 de la Constitution. Il est vrai que l’article 89 apporte une limite fondamentale puisque toute réforme de la Constitution proposée au référendum doit au préalable être approuvée dans les mêmes termes par les deux assemblées. Le Général De Gaulle dû regretter cette disposition puisqu’il l’enfreint lors de la réforme constitutionnelle de 1962. Il recourut à l’article 11 comme dans le cas de l’autre projet de réforme constitutionnelle de 1969. Dans ces deux circonstances, le fondateur de la Ve République paraissait opposer une légitimité populaire à une légitimité parlementaire. Pour autant, il n’y eut aucun caractère systématique dans cette opposition. Notamment, renonçant à son projet de référendum annoncé le 24 mai 1968, c’est bien par le recours à des élections législatives qu’il a résolu politiquement la crise née des évènements de mai-juin 1968.

    Sans que la proposition soit détaillée, la réforme constitutionnelle envisagée par les trois élus Républicains devrait toucher l’article 89, permettant au Président de la République de soumettre directement au référendum un projet qui comporterait une modification de dispositions constitutionnelles.

    Une telle option ne remet pas en cause le parlementarisme rationalisé. Elle vise sur des sujets considérés comme essentiels à recueillir l’approbation du suffrage universel. Toute autre serait l’introduction du « référendum d’initiative citoyenne ».

    En fait, les auteurs expriment la plus grande méfiance à l’encontre de la souveraineté populaire, expression de la souveraineté nationale. C’est l’idée même qu’un peuple puisse par son suffrage fixé son destin qui est en cause, la mythologie juridique de la souveraineté populaire, selon leur expression à propos du référendum. L’élément fondamental de leur raisonnement est la soumission de l’action politique au contrôle du juge : … cette source (les règles en termes d’immigration) réside dans un ordre juridique fondé sur des droits universels garantis par des conventions européennes et sur le pouvoir d’interprétation et de sanction du juge. Ils ajoutent, par rapport à ces propositions des élus Républicains, qu’il s’agit d’une remise en cause de la primauté de la norme juridique européenne sur la norme nationale ; et une primauté de la décision politique sur son interprétation juridique… En précisant que : La supériorité de la norme juridique européenne sur la norme nationale est constitutive du projet européen et ne saurait être écartée au nom d’intérêts dont la définition serait laissée à la discrétion de chaque nation.

    Or, s’il peut être admis que le juge censure le vote du législateur, à l’évidence, réprouver l’expression populaire manifesterait un déni de démocratie. La promotion des valeurs et, en premier lieu, la démocratie se trouverait fortement mise à mal.

    En la circonstance, le sujet de l’immigration tel qu’il se présente pose le problème du devenir de la Nation au regard de l’arrivée de populations, de plus en plus nombreuses avec le temps, venues d’autres aires de civilisation ; sans compter les questions immédiates liées à la sécurité quotidienne.

    Le rejet du référendum et de la souveraineté populaire

    Ainsi, il ressort du propos trois éléments : des droits universels garantis ; des nations enserrées dans des règles supranationales ; in fine, le pouvoir de décision revient au juge. Comme il est souligné, La France ne peut pas plus que l’Italie (pour la politique migratoire) s’opposer à l’Union européenne. Ce qu’il manque, assurément, partant de ces observations, c’est une définition de la démocratie et de la souveraineté d’un peuple. Néanmoins, il est possible de relever dans l’article quelques indices. Ainsi, s’agissant du référendum de 2005, ils (les électeurs) se décident plutôt en fonction de leur relation à l’acteur politique qui propose le référendum que sur le contenu de la proposition – comme on l’a bien vu dans le cas du référendum sur le traité constitutionnel de l’Union Européenne en 2005. Le gouvernement par référendum signerait en réalité la mort du régime représentatif rationalisé. Outre que les raisons invoquées pour lesquelles les électeurs se prononceraient relèvent d’une simple affirmation, non d’une démonstration, il apparait que par la référence au régime représentatif rationalisé détourne ce concept de son sens. Le régime représentatif rationalisé ne saurait exclure le recours au référendum sauf à considérer que le concept supposerait des choix politiques déterminés. Les élections, dans ces conditions, ne constitueraient alors qu’un simple habillage démocratique. En effet, les élus, au-delà du vote de leurs électeurs, seraient soumis à l’injonction d’une rationalité spécifique. Celle-ci serait comprise comme « une vérité » sur l’ordonnancement du monde ni contestable, ni négociable, ni amendable à laquelle n’accéderait qu’une « élite » dirigeante.

    La condamnation de l’assimilation

    Parmi les items de cette « vérité » figure l’immigration et la manière dont elle doit être conçue. A cet égard, le propos tenu sur l’assimilation est éloquent quant à l’idéologie qui sous-tend la vision exprimée par les trois auteurs : À cela s’ajoute la proposition réactionnaire et dangereuse de révision de la Constitution consistant à compléter son article 3 en proclamant que « nul ne peut devenir français s’il ne justifie de son assimilation à la communauté française ». Cette vieille notion, particulièrement floue, que l’on croyait abandonnée, peut être entendue de toutes les façons y compris les plus restrictives. Non seulement l’immigration est vue comme une obligation mais elle doit se concevoir dans le cadre d’une société multiculturelle, c’est-à-dire le rassemblement d’individus à un moment donné sur un territoire donné, la cohabitation par nature ne devant être qu’harmonieuse, chacun ayant pour seul devoir de respecter l’autre. Tout cela relève du mirage de la construction de l’homme nouveau dans la société nouvelle. Mais les faits sont là ; l’histoire nous l’enseigne au travers des siècles et des millénaires.

    La représentation démocratique subordonnée au juge

    Ce parlementarisme rationalisé tel qu’il est invoqué dans le propos, placé sous le contrôle du juge national et international, dans le contexte de la pensée dominante présente, n’est donc pas un principe de gouvernement ouvert à tous les choix politiques, il est l’outil au service d’une idéologie et le seul moyen pour l’imposer. Les peuples d’Occident se montrant rétifs à un cosmopolitisme effaçant les cultures et les traditions propres à chacun, émiettant leurs sociétés, désagrégeant leurs économies par le jeu de concurrences insoutenables, octroyant des droits à tous d’où qu’ils viennent, la solution se trouve donc dans l’instauration de sociétés purement normatives au sein desquelles le juge devient le décideur suprême. Ce système voulu par une structure dirigeante, appuyée par une classe intellectuelle et médiatique rêvant de cet univers où l’individu évoluerait au gré de son désir est en marche. Pour autant, les résistances sont fortes, en témoigne là et ailleurs la voie des urnes. Il est encore loin de son accomplissement.

    L’exclusion de l’Union européenne, une menace illusoire

    Quant à la relation avec l’Union européenne, l’argument d’une exclusion de la France par celle-ci pour le non-respect des règles en matière d’immigration est vain. Sans la France, pays fondateur de la Communauté Économique Européenne, seconde puissance économique de l’Union, cette dernière perdrait son sens. Compte-tenu des intérêts économiques et monétaires en jeu, de la menace qui pèserait sur les budgets européens et, dans le domaine particulier de l’immigration, des préoccupations sinon des rejets exprimés par de plus en plus de peuples européens, assurément un accord serait trouvé.

    Michel Leblay (Polémia, 24 juillet 2023)

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  • Quand les "élites" européennes abandonnent leur pouvoir aux américains !...

    Vous pouvez découvrir ci-dessous un entretien donné par Emmanuel Todd à Élucid dans lequel il analyse le déclin de l'Europe, et plus exactement, l'abandon soudain et violent du pouvoir de la part des "élites" européennes, au profit d'une puissance extérieure, à savoir les États-Unis. Anthropologue, démographe et historien, Emmanuel Todd est l'auteur de nombreux essais.

     

                                              

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  • Faut-il dépasser le clivage mondialisme/populisme ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Peter Columns cueilli sur Rage (le "magazine prométhéen qui redonne l’amour de l’avenir et de la civilisation occidentale" !...) et consacré à la question du clivage populisme/mondialisme, question qui suscite en ce moment des débats assez vigoureux dans la mouvance identitaire, au sens large...

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    Faut-il dépasser le clivage mondialisme / populisme ?

    Lorsqu’on étudie la tendance générale de la politique occidentale de ces dix dernières années, un phénomène frappe. Celui-ci se caractérise par la montée en puissance d’un courant de pensée populiste, qui entend faire la synthèse entre un patriotisme de gauche et de droite, dirigé contre les élites et le mondialisme. Au bout de dix ans, il est temps de revenir sur les résultats obtenus, et d’étudier la question suivante : faut-il continuer avec le clivage mondialiste/populiste ou bien réhabiliter le clivage gauche/droite ? Je vais argumenter en quatre points pour tenter de défendre un abandon de ce clivage.

    Le clivage mondialisme / populisme nous éloigne des sujets qui comptent

    Tout d’abord, il est nécessaire d’établir un premier constat. Pour qu’une ligne soit digne d’intérêt, elle ne doit pas seulement nous garantir la victoire, mais aussi contenir les solutions capables de résoudre la situation dans laquelle nous nous trouvons. Une victoire construite sur une agrégation de mécontentements n’a pas de réelle valeur, et peut se révéler contre-productive. Or voilà le début des problèmes.

    Le clivage « mondialistes contre populistes » nous éloigne du vrai sujet, le remplacement et l’effacement du peuple, pour préférer des thèmes secondaires, plus hasardeux. La doctrine populiste consiste à vouloir lier tous les sujets contestataires ensemble, du plus légitime au plus absurde, pour opposer un bloc compact face aux “élites” qui dirigent les différents pays occidentaux.

    Or, cet arrangement ne se fait jamais au bénéfice des thèmes identitaires, bien au contraire. Les thèmes identitaires sont utilisés pour nourrir une sphère de contestation qui n’a aucun autre objectif que de se justifier elle-même. Le changement de peuple en Occident, phénomène majeur de l’Histoire de l’humanité, ne devient plus à travers la ligne populiste qu’un sujet de contestation parmi les autres. Et pas forcément le meilleur lorsque seule la contestation compte, et que les influenceurs populistes peuvent aisément se nourrir des effectifs de la gauche et de l’immigration du tiers-monde, très versées dans les thèses complotistes et délirantes.

    Que pèse le fait de sauver les peuples européens lorsque l’anti-racisme règne en maître parmi les consommateurs de contenu complotiste? Pas grand chose. Une fois la crédibilité de la lutte contre l’immigration et les effectifs identitaires consommés, ce combat est tout simplement oublié.

    Ce qui nous amène au second point : en choisissant ce clivage, nous sommes sommés d’accepter un certain nombre de positions mortifères de la gauche. Des positions qui ne peuvent déboucher sur aucune solution capable de soigner le pays et de lui redonner un statut. Si à la fois le centre et la droite courtisent la gauche, l’utilisant comme un outil pour se dominer l’un et l’autre, alors il ne faut pas s’étonner que l’argumentaire de la gauche dévaste complètement nos sociétés.

    Tout l’intérêt du combat identitaire est de mettre la démographie au cœur du débat public. On peut donc se demander : si la victoire demande de sacrifier cet enjeu, en vaut-elle la peine ? Je crois sincèrement que non. 

    Pouvons-nous dire que le clivage mondialiste/populiste, qui laisse de côté l’enjeu démographique, nous fait épouser des enjeux plus consensuels et susceptibles de nous faire gagner par ailleurs ? Je ne le crois pas. Au contraire, on se rend compte que l’opinion publique se range très majoritairement du côté du pouvoir en place sur tous les sujets qui ne concernent pas l’immigration.

    Lutter contre les élites n’est pas un projet en soi et ne porte aucune vision. C’est un mouvement politique sans doctrine, sans épine dorsale, qui ne travaille l’opinion publique qu’en surface. C’est en réfléchissant à un projet politique, au fait qu’il tienne debout et qu’il soit crédible, que l’on réactive de fait le clivage gauche/droite. Que désirons-nous pour la France ? Défaire l’égalitarisme qui détruit tout dans tous les domaines. Cette lutte contre l’égalitarisme se décline sur le plan identitaire, considérant que c’est par volonté de rendre tous les peuples égaux que l’immigrationnisme détruit la société. C’est aussi par égalitarisme que l’on interdit aux Européens d’exprimer toute la richesse de leur identité.

    La vision portée par l’identitarisme est de redonner au meilleur, l’identité européenne, la chance de s’exprimer. Il s’agit donc davantage d’un clivage égalitarisme/élitisme. C’est la recherche d’une excellence perdue qui nous préoccupe. Épouser le logiciel de gauche dans l’espoir de créer un front anti-mondialiste nous éloigne de la possibilité de rendre aux Européens les clés de la réussite.

    Rien ni personne ne peut contrôler le populisme, ni même prédire ce qu’il nous fera défendre demain. C’est une créature née sur les réseaux sociaux, qui nourrit des influenceurs qui papillonnent d’une cause politique à l’autre sans discontinuer ni jamais rendre de compte. Aussitôt une cause décrédibilisée, ils s’envolent vers une autre. Comme si de rien n’était.

    Mais nous, nous n’avons qu’une seule cause. Préserver l’intégrité du peuple français, et des peuples européens en général. Garantir le substrat de la civilisation. Et nous ne pouvons pas nous permettre de la décrédibiliser. Plutôt que de verser dans l’approche populiste qui tend à faire exploser la radicalité sur des sujets qui ne sont pas réellement importants, nous devrions nous concentrer sur le fait de proposer des solutions rationnelles à des problèmes graves.

    Le dernier problème lié à la dérive populiste est la culture de la colère. Une colère fanatique et stérile. La colère est toujours à double tranchant. Il est très aisé de se faire contrôler par ceux qui contrôlent notre colère. Et c’est exactement ce qu’ont su faire la gauche et le centre : imposer l’agenda politique, contrôler la colère de la droite et la pousser constamment à être dans une posture de réaction, et donc de faiblesse. Désormais, des pans entiers des réseaux militants qui furent jadis “patriotes” sont désormais utilisés pour promouvoir les combats les plus absurdes. Des dizaines de milliers de militants qui auraient pu être efficaces dans une lutte rationnelle pour l’identité ont été fanatisés sur des sujets marginaux.

    Le discours populiste nous empêche de rallier à notre cause une partie des élites et de la société civile

    Il s’agit donc de faire reposer le pouvoir acquis sur une victoire idéologique. Mais pis encore, il ne faut pas simplement gagner, mais durer au pouvoir, et garantir une assise suffisante dans la société pour exercer ce pouvoir correctement. Une victoire éphémère, un coup d’éclat d’un jour, qui redonnerait juste après le pouvoir aux remplacistes pour les décennies à venir ne présenterait pas le moindre intérêt.

    L’expérience Trump nous a appris une chose : il n’est pas possible de diriger convenablement un pays contre les élites et la société civile. Un courant politique qui déciderait de diaboliser les élites, et les classes aisées en général, se retrouvera démuni, piégé dans une tour d’ivoire dont il ne pourra pas sortir, avant d’en être éjecté lors des prochaines élections.

    Qu’on le veuille ou non, les mondialistes dirigent, et doivent faire face à des problèmes concrets. Et pour convaincre sur la durée, on se doit d’essayer de comprendre avec quels paramètres ils jouent, comprendre leurs préoccupations, et montrer que nous serions capables nous-mêmes de gérer « la Machine ». Nous devons retourner une partie de l’élite en notre faveur, afin de pouvoir gouverner avec une partie de la société civile de notre côté. 

    Redresser la situation va être long. Il n’y aura pas de baguette magique une fois aux commandes. Ce sera dur. Très dur. Une vraie victoire qui reposerait sur un malentendu pour nous planter ensuite ne servirait à rien. Nous pouvons citer l’exemple de l’alliance Lega/M5S qui a volé rapidement en éclats en Italie, pour laisser place à une alliance de centre-droit sous l’égide de Georgia Meloni, qui semble tenir bon. Nous pouvons citer également l’exemple du Danemark, où l’extrême-droite s’est montrée plus conciliante et prompte à des alliances avec le centre, au point d’influencer considérablement tout le spectre politique.

    La phase finale de la dédiabolisation

    Regardons attentivement ce qui s’est produit pendant ces dix dernières années. La conséquence première de dix ans de populisme a été de consolider un bloc que l’on pourrait appeler d’extrême-centre, pratiquement indéboulonnable, muni de tous les pouvoirs dans la société, avec une adhésion totale de toutes les strates influentes qui la compose.

    La réaction du centrisme au front populiste fut extrêmement efficace. Le centrisme a su contrôler rapidement le narratif pour le décrédibiliser. C’est ainsi que naquit un extrême-centre muni de pratiquement tous les pouvoirs dans la société, reposant sur une base électorale convaincue de maintenir le pays à flot envers et contre tous, se sentant assiégée de toute part, détentrice de la vérité et du fact-checking. L’attention totale du centre est désormais concentrée sur le fait de savoir si l’extrême-droite, par exemple, va s’associer aux manifestations de l’extrême-gauche sur la réforme des retraites. Mais dans cette évolution, une chose fondamentale s’est produite : la cible du centrisme n’a plus été l’extrême-droite, mais le populisme.

    Que ce fût calculé ou non, la décennie populiste a été particulièrement dévastatrice pour la gauche. Dans un premier temps, l’extrême droite a abandonné ses thèmes pour reprendre le discours de la gauche en cherchant à poser le clivage mondialisme/populiste. Ce faisant, subrepticement, la diabolisation est passée à gauche. Aujourd’hui, il est devenu plus grave d’être populiste qu’identitaire.

    Mais le centre lui-même est plein de contradictions. Et la source de son pouvoir vient en vérité d’une alliance tacite avec la gauche. Une alliance qui devient maintenant bien plus complexe. En basculant dans une approche antipopuliste, le centre s’est mis en danger. On le voit sur des thèmes comme le nucléaire, où la démagogie est de moins en moins tolérée. Son alliance tacite avec l’extrême-gauche devient chaque jour un peu plus impossible, et les fronts républicains se retournent, comme nous avons pu le voir aux dernières législatives.

    Il n’est donc pas surprenant que dans un second temps, inconsciemment, l’extrême droite se détourne du populisme, se normalise, reprenne ses anciennes revendications, tant en s’assurant que la diabolisation reste attachée au populisme. La dernière phase de la dédiabolisation est donc de reprendre le clivage gauche/droite.

    L’erreur maintenant serait de ne pas changer de partition, et de ne pas retourner le populisme contre le centre. Elle consiste donc à dire au centre : vous voulez lutter contre le populisme ? Très bien, mais dans ce cas allez au bout, et revenez sur votre démagogie également sur le sujet de l’immigration. Regardez vous maintenant dans le miroir. Vous êtes totalement corrompus par la gauche.

    Revisiter la question du patriotisme pour se prémunir contre le populisme

    Comment nous prémunir des dangers du populisme, et combler les trous idéologiques qu’il pourrait laisser si nous décidions de nous en séparer? Souvent la droite se fait happer par le populisme avec l’angle du patriotisme. Le populisme arrive à nous faire miroiter un monde imaginaire où gens de gauche et de droite pourraient se réunir autour de la patrie. Revoir notre conception du spectre politique occidental implique de reconsidérer certains points de vue. Le dernier élément est que le mondialisme n’est pas forcément une mauvaise chose, et que le patriotisme n’est pas forcément une bonne chose.

    Par exemple, faut-il vraiment être contre des échanges culturels et économiques fructueux entre les nations ? Ne sommes-nous pas heureux de bénéficier des productions américaines et japonaises, et ne voudrions nous-mêmes pas que la France exporte et rayonne davantage ? Sur le plan économique, le protectionnisme qui découle du patriotisme nous empêche d’aller au fond du problème : pourquoi la France n’est plus compétitive, pourquoi subit-elle une telle émigration de ses talents, pourquoi le coût du travail devient mirobolant alors même qu’il devient de plus en plus difficile de vivre avec le salaire net, pourquoi les actionnaires français se désengagent. Fermer les frontières ne résoudra jamais les problèmes économiques qui se trouvent à l’intérieur de notre territoire.

    De la même façon, faut-il être contre les apports culturels étrangers ? Tous les apports culturels se valent-ils? C’est une chose d’accepter quelques influences de puissances économiques qui rencontrent le succès, C’en est une autre que la tiers-mondisation, l’imposition de cultures étrangères complètement dysfonctionnelles sur notre sol. Tous les échanges culturels ne se valent pas. Il n’y a aucune honte à se saisir d’éléments d’une culture qui rencontre le succès. Il n’y a aucune honte à rejeter les éléments d’une culture qui rencontre l’échec. Il est totalement sain d’être ouvert aux échanges culturels intéressants, tout en défendant férocement son existence sur le plan démographique.

    Faut-il être contre l’immigration de travail et la circulation libre des personnes, si elles respectent la loi, et repartent lorsque leur visa de travail expire ? Quelle place pour le rôle des importations et des exportations lorsque notre pays devient vieillissant et que le coût de production explose de ce fait ? Faut-il donc lutter contre la mondialisation, ou bien tout ce qui rend l’activité économique insoutenable sur le sol français ?

    Il en va de même pour la remise en question du patriotisme. Avec le temps, ce dernier est devenu quelque chose de vide de sens, qui oublie le peuple, pour lui préférer des symboles abstraits. En voulant élargir la question du patriotisme au point d’englober le populisme à la fois de gauche et droite, la patrie à défendre s’est retrouvée vidée de toute substance. De cette façon, le patriotisme (ou bien le nationalisme) a doucement dérivé vers ce qui a fini par s’appeler le souverainisme, compatible avec le populisme.

    Mais la patrie est elle une simple opposition à une classe dirigeante? Est-elle un sol magique qui naturalise ceux qui s’y trouvent ? Est-elle un drapeau ? Est-elle une équipe de football ? Ou bien un Etat ? Que devient la patrie lorsqu’on l’a dépossédée du peuple? Un rien. Une course vers plus d’étatisme, comme si l’Etat pouvait décréter l’identité pourvu qu’il y ait une discipline de fer, ou bien une distribution générale d’aides sociales.

    Ainsi, au patriotisme, il faudrait préférer prendre le peuple pour socle, et avoir confiance dans le génie qu’il a maintes fois prouvé dans son histoire. Le souverainisme a tenté de proposer un nationalisme sans le peuple. Les identitaires devraient peut-être maintenant songer à une doctrine centrée sur le peuple avec un nationalisme atténué.

    Il ne s’agirait donc pas d’échanger le patriotisme contre le mondialisme, au moment même d’ailleurs où le monde sort petit à petit de la mondialisation, et voit éclore un peu partout des guerres réelles ou commerciales. Nous vivons une période de transition importante. Il s’agirait plutôt de chercher un juste milieu, et de résoudre les contradictions entre ces deux courants opposés. Et ce juste milieu, je crois, peut se défendre au sein de ce qui s’appellerait la droite civilisationnelle. C’est à dire une droite qui ferait la part des choses, en circonscrivant l’élan universaliste et en lui posant comme frontières celles du monde occidental/européen.

    L’époque de la mondialisation qui a commencé dans les années 80 est en train de se refermer. Cela, les “élites” le comprennent de plus en plus. Les cartes en sont rebattues. Nous devons nous aussi en prendre conscience et capitaliser sur cette nouvelle ère qui s’ouvre.

    Peter Columns (Rage, 20 mars 2023)

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  • Pourquoi l’identité est aujourd’hui partout ?...

    Le 10 mars 2023, Clémence Houdiakova recevait Alain de Benoist dans Ligne droite, la matinale de Radio Courtoisie, à l’occasion de la sortie de son essai intitulé Nous et les autres (Rocher, 2023).

    Philosophe et essayiste, directeur des revues Nouvelle École et Krisis, Alain de Benoist a récemment publié Le moment populiste (Pierre-Guillaume de Roux, 2017), Contre le libéralisme (Rocher, 2019),  La chape de plomb (La Nouvelle Librairie, 2020),  La place de l'homme dans la nature (La Nouvelle Librairie, 2020), La puissance et la foi - Essais de théologie politique (La Nouvelle Librairie, 2021), L'homme qui n'avait pas de père - Le dossier Jésus (Krisis, 2021) et, dernièrement, L'exil intérieur (La Nouvelle Librairie, 2022).

     

                                               

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  • Désindustrialisation et appauvrissement : l’illusion mortifère d’une France sans usines...

    Le 2 mars 2023, Nicolas Vidal recevait François Bousquet, rédacteur en chef d’Éléments, sur Putsch, pour évoquer avec lui l’effondrement industriel de la France et le déclassement du monde ouvrier, singulièrement du monde ouvrier blanc, parent pauvre des politiques de reconnaissance. Comment – et pourquoi – la part de l’industrie en France est passé de 24 % du PIB au début des années 1980 à 10 % ? Quel rôle nos élites ont-elles joué dans cette débâcle industrielle ?...

    Journaliste et polémiste, François Bousquet a notamment publié Putain de saint Foucauld - Archéologie d'un fétiche (Pierre-Guillaume de Roux, 2015), La droite buissonnière (Rocher, 2017), Courage ! - Manuel de guérilla culturelle (La Nouvelle Librairie, 2020) et Biopolitique du coronavirus (La Nouvelle Librairie, 2020).

                                              

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  • 36 nuances de populisme...

    Pour cette nouvelle édition de Cette année-là, Patrick Lusinchi, avec François Bousquet, rédacteur en chef d’Éléments, Olivier François, Christophe A. Maxime et Rodolphe Cart, évoque l'année 2019, avec le numéro que la revue avait consacré aux 36 familles du populisme. Au menu du jour, de quel populisme parle-t-on, une fois qu’on a dégagé le dénominateur commun des populismes : le peuple contre les élites ?...

     

                                            

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