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terrorisme - Page 14

  • De Nice à Berlin, scènes du terrorisme ordinaire...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Mathieu Bock-Côté, cueilli sur Figaro Vox dans lequel il dénonce l'irénisme multiculturel de nos sociétés qui les empêche de répondre efficacement à la menace du terrorisme islamique. Québécois, l'auteur est sociologue et chroniqueur à Radio-Canada et vient de publier en France Le multiculturalisme comme religion politique aux éditions du Cerf.

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    Mathieu Bock-Côté : de Nice à Berlin, scènes du terrorisme ordinaire

    La scène avait quelque chose d'atroce et, en même temps, de terriblement banale. À quelques jours du 25 décembre, un camion se lance sur un marché de Noël de Berlin, tue une douzaine de personnes et en blesse une cinquantaine. On croit revivre les événements de Nice quand Mohamed Lahouaiej Bouhlel avait frappé le soir du 14 juillet. Là aussi, il s'agissait de semer la terreur dans un moment de réjouissance et de traumatiser la population. On peut imaginer la suite médiatique: certains diront que l'événement demeure un incident isolé. On chantera en chœur «pas d'amalgame». D'autres se demanderont encore une fois si l'Occident ne l'a pas cherché, bien qu'on se demandera de quelle manière l'Allemagne a bien pu se rendre coupable d'une forme plus ou moins intransigeante de laïcité néocoloniale, pour emprunter le jargon à la mode. Le système médiatique, devant l'islamisme, cultive l'art du déni. Il déréalise les événements, les égrène en mille faits divers et empêche de nommer la guerre faite à l'Occident.

    Il faudra quand même réinscrire l'événement dans la séquence terroriste associée aux événements du Bataclan. Le terrorisme islamiste veut montrer qu'il peut frapper partout. Il ne vise plus seulement des «institutions», comme c'était le cas avec Charlie Hebdo, mais entend imposer sa loi n'importe où, en transformant un simple camion en bélier . N'importe qui peut être ciblé dans ces frappes aveugles. Dans la guerre totale menée contre la civilisation occidentale, il suffit d'appartenir à cette dernière pour être jugé coupable et condamné à mort. À Berlin, nous venons en fait d'assister à une scène de terrorisme ordinaire. Encore une fois, l'État islamique a revendiqué l'attentat. Qu'il ait été programmé de loin ou qu'il soit le fruit d'une initiative plus ou moins spontanée, on peut être certain d'une chose: la propagande islamiste hante la civilisation européenne et est capable d'exciter les passions mortifères des uns et des autres.

    Et pourtant, cette attaque n'est pas absolument aveugle. La frappe d'un marché de Noël ramène l'Europe à une part d'elle-même dont elle ne sait que faire: sa part chrétienne. C'est dans son identité la plus intime qu'on veut la frapper, ce sont ses racines les plus profondes qu'on veut toucher. Les symboles chrétiens sont de plus en plus souvent visés. On se rappellera que le communiqué de l'État islamique qui avait suivi les attentats du 13 novembre mentionnait que les Français étaient visés en tant que «croisés». De même, l'assassinat rituel du père Hamel, en juillet 2016, ne laissait pas d'ambiguïté sur sa signification. Pour reprendre une formule convenue, c'est moins pour ce qu'ils font que ce qu'ils sont que les Européens sont mitraillés, égorgés ou écrasés. Sauf qu'ils ne sont plus trop conscients de cette part d'eux-mêmes. Ou du moins, lorsqu'ils en sont conscients, on le leur reproche et on les accuse de s'enfermer dans une identité étriquée, inadaptée à la diversité. Nos élites médiatiques ne tolèrent le procès de l'islamisme qu'à condition de le mener en parallèle avec celui de l'islamophobie.

    Car le monde occidental veut croire qu'on l'attaque parce qu'il est démocratique, moderne et libéral. Il s'empêche de comprendre ainsi qu'il existe une telle chose qu'une tension entre les cultures, entre les civilisations et même entre les religions: elles ne sont pas toutes faites pour cohabiter dans une même communauté politique. Le rôle du politique, dans ce monde, n'est pas de verser dans un irénisme multiculturel où tous devraient se réconcilier sous le signe d'une diversité heureuse mais bien de bâtir, de conserver et de protéger les frontières protectrices permettant aux peuples de persévérer dans leur être historique sans pour autant s'empêcher de multiplier les interactions fécondes entre eux. Avec raison, on refusera de réduire les affrontements du monde actuel à un choc de civilisation. À tort, on refusera de voir qu'ils relèvent au moins partiellement de cette logique. Ceux qui cherchent à penser à nouveaux frais la pertinence des frontières ne sont pas des vautours ou des démagogues instrumentalisant le malheur des peuples pour les replier sur eux-mêmes.

    L'Allemagne voit se retourner contre elle-même les conséquences prévisibles d'un humanitarisme débridé. On s'est moqué, au moment de la crise des réfugiés, de ceux qui redoutaient que parmi les convois de malheureux, ne se glissent des djihadistes attendant ensuite le bon moment pour frapper. Ce moment est peut-être arrivé. Mais les dérives de la politique des portes ouvertes ne sauraient se laisser définir uniquement par le terrorisme islamiste. Il suffit de garder en mémoire les événements de Cologne, en début d'année, pour qu'on comprenne les nombreuses dimensions d'une crise qui n'est pas à la veille de se résorber. L'époque des grandes invasions militaires a beau être terminée, il n'en demeure pas moins que les islamistes sont habités par un sentiment de conquête et croient pouvoir miser sur l'immigration massive pour s'imposer en Europe. Comment la civilisation européenne peut-elle réagir à cette mutation imposée si elle en relativise la portée?

    Il ne sert à rien d'imaginer en un paragraphe ce que pourrait être une riposte à ce terrorisme ordinaire appelé à durer. Mais le monde occidental aurait tort de croire qu'il saura résister à sa dissolution culturelle ou politique en se contentant de répéter de manière rituelle ses prières pour chanter la gloire de la diversité. Manifestement, elle n'est pas qu'une richesse. Toutes les différences ne sont pas également appréciables. En fait, c'est peut-être en assumant ce qu'on pourrait appeler leur identité de civilisation que les nations européennes seront à même de trouver la force de mener cette guerre pendant les longues années qu'elle durera. Il n'est pas insensé de penser que c'est en se tournant justement vers la part d'elle-même qui est attaquée que la civilisation européenne trouvera peut-être la force de mener la bataille.

    Mathieu Bock-Côté (Figaro Vox, 21 décembre 2016)

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  • La guerre de l'information est déclarée !...

    Nous reproduisons ci-dessous un éditorial d'un récent numéro (n°12, 25 novembre 2016) de l'excellente lettre d'information hebdomadaire Centurie News, qui est consacré à la guerre de l'information qui sévit en Occident et qui voit progressivement les médias de masse contrôlés par l’élite occidentale perdre leur position dominante.

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    Infowar

    A la suite d’un communiqué de presse de la Commission des affaires étrangères du Parlement Européen du 10 octobre 2016, le Parlement réuni à Strasbourg ce 23 novembre, a voté (304 personnes pour, 179 contre et 208 abstentions) une résolution condamnant « la propagande hostile et la désinformation « qui oppresse l’UE » par « le Kremlin et des acteurs non étatiques tels que Daech, Al-Qaeda et d’autres groupes terroristes djihadistes violents». L’institution dénonce le fait que « le gouvernement russe emploie de manière agressive une large gamme d’outils et d’instruments, tels que des fondations spéciales  [...], des chaînes de télévision multilingues ». La résolution - qui demande à l'UE de répondre à la guerre de l’information en provenance de Russie - cite Russia Today, Sputnik, mais aussi le Fonds Russky Mir et Rossotrudnichestvo parmi les organisations impliquées. Durant le débat, le député espagnol Javier Couso Permuy (Gauche-Unie) a dénoncé ce rapport comme étant une « insulte à l'intelligence des Européens », ajoutant : « ce rapport est fou. Il propage l'hystérie antirusse et le néo-Maccarthysme en Europe ». Coté Russe, Vladimir Poutine a moqué une décision qui révèle « une dégradation politique de l'idée de démocratie » en Occident. Plus virulente, la porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères, Maria Zakharova, a déclaré que le détournement d’attention face aux véritables menaces terroristes et aux fondamentalisme était un « crime ».

    Il y a deux semaines, la Grande-Bretagne procédait à la fermeture des compte bancaires de Russia Today (et à la promulgation de « la loi de surveillance la plus extrême jamais passée dans un pays démocratique » selon l’Open Rights Group. Les pressions de l’Allemagne se multiplient pour la mise en place d’un dispositif visant à limiter la circulation de « sources douteuses » via les réseaux sociaux . Débat relancé par les mises en cause des médias de masse contre Facebook, accusé d’avoir contribué à la victoire de Donald Trump à la présidentielle américaine.

    La France n’échappe pas à la règle. Laurent Fabius, puis Benoît Hamon - pour ne citer qu’eux - ont également pointé la responsabilité de Facebook dans l’élection de Donald Trump. Les déclarations politiques se sont multipliées pour dénoncer le rôle joué par les réseaux sociaux et notamment Facebook dans l’apparition d’une « démago-politique ». Des déclarations qui font écho à celles de Barack Obama le 18 novembre dernier, dénonçant un système où « les faits et la vérité n’ont pas d’importance ». Nombreux sont les articles publiés par les médias de masse depuis l’élection de Donald Trump, interrogeant le rôle social de réseaux où les informations ne seraient pas vérifiées et toutes les opinions se valent. Le fondateur de Facebook, Mark Zuckerberg, avait répondu aux nombreuses attaques politiques et médiatiques en déclarant « personnellement, je pense que l’idée que de fausses informations sur Facebook, qui ne représentent qu’une toute petite partie des contenus, aient influencé la présidentielle est une idée assez dingue ».

    L’on pourrait être sensible aux tentatives d’introspection critique des médias, des politiques et même des institutions sur la qualité de l’information et le respect des règles de déontologie journalistique. Il pourrait être également utile de réfléchir au rôle joué par les réseaux sociaux dans la diffusion de rumeurs ainsi qu’à la nécessité de trouver une solution à la dégradation générale de la qualité des informations. Mais il s’agit là d’un tout autre phénomène.

    Les faits ont largement montré depuis des années, et plus particulièrement durant l’élection présidentielle américaine ou tout récemment durant la primaire de la droite et du centre, à quel point la production des médias centraux était faussée et orientée. Le discrédit des médias de masse atteint des sommets dans l’ensemble du monde occidental et un récent sondage de l’Institut Piew révélait récemment que moins de 34% des Américains faisaient confiance aux grands médias nationaux. Aude Ancelin, ancienne directrice de la rédaction de L’Obs, dans son livre Le monde Libre (Prix Renaudot), met, quant à elle, directement en cause la servitude médiatique vis à vis des puissances financières. Si le système médiatique occidental est critiqué depuis des années, c’est aujourd’hui sous la pression conjuguée des médias alternatifs, des réseaux sociaux, des médias étrangers (russes, chinois et autres) qu’explose le paysage de l’information. En témoigne le classement publié par Mediapart des sites politiques les plus visités en France et qui révélait que les trois sites politiques les plus fréquentés appartenaient tous à ce que les journalistes appelait la « réinfosphère » (Egalité et Réconciliation, Fdesouche et les Moutons enragés), des sites aux positions parfois diamétralement opposées . Aux Etats-Unis, Breitbart, Drudge Report et Info Wars sont eux aussi en tête des sites politiques le plus consultés. Il en va de même dans la plupart des pays européens. Si certains médias de masse réussissent à tirer leur épingle du jeu, ils se trouvent en permanence sous la pression critique des lecteurs et téléspectateurs. Lorsqu’ils concèdent de l’espace pour rendre compte des informations relativisées ou cachés par leur confrères, ils servent de sources de référence pour des sites de compilation de presse comme Fdesouche.com.

    Les journalistes sont alors largement discrédités, les journaux ne survivent pour une bonne part que grâce aux subventions publiques votées par les politiques, et nous le constatons tous, n’ont que de moins en moins prise sur les choix politiques mais aussi sociétaux et idéologiques de la population. Et cette perte d’influence des médias de masse contrôlés par l’élite occidentale semble irrémédiable. Elle annonce un basculement de pouvoir majeur dans l’ensemble du monde occidental et le début de la grande guerre de l’information, qui ne finira pas avec l’effondrement de la média-démocratie. L’Union Européenne et les élites politiques nationales, qui doivent leur influence, leur carrière et leur position sociale à ce complexe de pouvoirs, d’argent et d’informations l’ont compris. Ils paniquent, se raidissent, mais sauf à transformer l’Europe en blockhaus, ils ne peuvent plus que compter les jours avant la tempête.

    Centurie News (n°12, 25 novembre 2016)

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  • Terrorismes : histoire et actualité...

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    Le treizième numéro hors-série de La Nouvelle Revue d'Histoire est en kiosque. Il est consacré à l'histoire à l'actualité des terrorismes

    Au sommaire de ce numéro :

    Comprendre le terrorisme et relever le défi par Philippe Conrad

    Les "Assassins", le modèle originel du terrorisme par Philippe Conrad

    1605. La conspiration des poudres par Evelyne Navarre

    Le chariot piégé de la rue Saint-Nicaise par Martin Benoist

    La "machine infernale" de Fieschi par Philippe Parroy

    1858. Orsoni entend venger l'Italie vaincue par Christian Lépagnot

    Le nihilisme russe ou la "table rase" par Philippe Parroy

    Ravachol, les anarchistes et la république par Philippe Fraimbois

    L'Oustacha croate de 1929 à 1945 par Philippe Conrad

    Les pionniers du sionisme recourent à la terreur par Philippe Parroy

    Le terrorisme, l'arme du FLN par Roger Vétillard

    La nouvelle guerre de l'IRA par Evelyne Navarre

    La Fraction Armée Rouge face à la République fédérale allemande par Martin benoist

    L'Italie des "années de plomb" par Gabriele Adinolfi

    L'ETA : du nationalisme au marxisme par Arnaud Imatz

    Le terrorisme est-il consubstantiel à l'Islam par René Marchand

    Le double financement du terrorisme islamiste par Jean-Paul Gourévitch

    Le terrorisme islamiste en France. Histoire et perspectives par Yvan Blot

     

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  • Terrorisme : la face cachée de la mondialisation ?...

    Les éditions Pierre-Guillaume de Roux viennent de publier un essai de Richard Labévière intitulé Terrorisme, face cachée de la mondialisation, préfacé par Alain Chouet, ancien cadre de la DGSE. Journaliste, ancien rédacteur en chef à Radio France internationale et responsable jusqu'en 2011 de la revue de l'Institut des Hautes Études de Défense Nationale, Richard Labévière est l'auteur de plusieurs ouvrages consacrés au Proche-Orient et au terrorisme.

     

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    " Le terrorisme tue. Il produit émotions, compassions, malentendus et contresens. Il s'est installé au cœur même de nos sociétés comme une fatalité. De la petite délinquance à la grande criminalité, il est devenu le stade suprême de la mondialisation. À l'appui d informations inédites et exclusives, Richard Labévière remonte aux causes du phénomène. Il décrit les impasses de la « guerre contre la terreur », le cynisme mercantile des pays occidentaux envers les pétromonarchies, la désinformation de médias voyeurs qui basculent dans la propagande et les fadaises d improbables experts.
    Aujourd'hui, l'Arabie saoudite demeure l'un des principaux financiers de l'Islam radical, qui tue non seulement dans les pays occidentaux, mais aussi et surtout dans le monde arabo-musulman. Ce scandale perdure en toute impunité depuis plus de trente ans, parce qu'il engraisse marchands de canons et autres prédateurs. Le terrorisme profite aussi d'une révolution numérique dont personne ne maîtrise les effets et qui échappe au contrôle des États. Il s'agit ici de comprendre de quoi est faite la matrice qui engendre la terreur, de transformer
    l'irrationalité de l'émotion en entendement, de se donner les moyens de savoir. Après plus de vingt ans de reportages de terrain, d'enquêtes et d'analyses, Richard Labévière démonte les rouages du terrorisme moderne et avance plusieurs propositions pour en combattre la fatalité. "

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  • “Radicalisation”: la guerre des mots...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Mathieu Bock-Côté, cueilli sur Causeur et consacré à la "radicalisation", terme dont l'utilisation par le système politico-médiatique est loin d'être innocente... Québécois, l'auteur est sociologue et chroniqueur à Radio-Canada et vient de publier en France Le multiculturalisme comme religion politique aux éditions du Cerf.

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    “Radicalisation”: la guerre des mots

    Ce qu’occulte ce terme pudique

    La question de la radicalisation est à l’ordre du jour. On en parle beaucoup et on en parlera encore longtemps. Et on peut être à peu près certain qu’on en parlera assez mal. Parce que cette question est très mal posée. D’abord parce que le thème de la radicalisation lui-même est piégé: il est là pour détourner notre attention et masquer la question spécifique de l’islam radical, qu’on veut occulter, parce qu’on craint qu’elle ne contribue à la stigmatisation des musulmans. Ensuite, parce que lorsqu’on abordera néanmoins la question de l’islam radical, on risque d’assister à la victimisation de ceux qui s’y engagent. C’est la discrimination dont ils seraient victimes qui pousserait les jeunes musulmans vers l’islamisme, à la manière d’un réflexe de défense malheureux mais inévitable. En gros, on nous dira que l’islam radical n’est pas vraiment un problème, et lorsqu’il devient un problème, c’est à cause de nous. Lorsque l’islam radical frappe, nous en sommes d’une certaine manière coupable.

    Tous radicalisés ?

    Reprenons ces deux questions distinctement. Le phénomène de la radicalisation ne veut à peu près rien dire en soi. Comme j’aime le dire, quand un péquiste [NDLR : membre du Parti québécois, favorable à l'indépendance de la Belle province.] se radicalise, il veut tenir un référendum coûte que coûte dans un premier mandat, lorsqu’un conservateur fédéral se radicalise, il veut privatiser Radio-Canada, quand un social-démocrate se radicalise, il rêve d’une augmentation généralisée des impôts, quand un catholique se radicalise, il rêve de lois morales plus coercitives, mais quand un islamiste se radicalise, il peut verser dans le terrorisme et le djihadisme. En d’autres mots, c’est l’islam radical qui pose un problème de sécurité majeur aujourd’hui. Il ne représente pas une variante parmi d’autres du problème du radicalisme : il représente un problème à part entière, qu’on ne peut sérieusement dissoudre dans un problème plus vaste.

    Mais on ne veut pas l’avouer. Alors on jette un voile sur le phénomène et on parle de radicalisme en général. On dira s’inquiéter de tous les radicalismes, histoire de diluer la responsabilité de l’islamisme dans un phénomène plus global de radicalisation. Au nom de la lutte contre l’islamophobie, on pratique le déni de réalité et on va même jusqu’à dire que toutes les religions et les doctrines menacent également, par la tentation radicale qui leur serait consubstantielle, la paix civile et la sécurité dans nos pays. Un exemple parmi d’autres : après l’attentat d’Orlando, par Omar Mateen, n’a-t-on pas assisté au procès des grandes religions monothéistes, comme si le christianisme et le judaïsme étaient coupables par association des crimes commis au nom de l’islam radical?

    Balayer le réel sous le tapis

    Mais il arrive qu’on doive quand même poser la question de l’islamisme. On a beau balayer le réel sous le tapis, il en reste toujours des traces. Que faire d’elles? En général, on victimisera ceux qui sont tentés par l’islamisme. C’est la société d’accueil qui, en les rejetant, les pousserait vers l’islam radical. En un mot, l’islamophobie serait à l’origine de l’islamisme. C’est très fort. En gros, le monde occidental serait coupable du fait qu’on le rejette et qu’on veuille entrer en guerre avec lui. L’Occident serait structuré autour d’un système discriminatoire poussant à la persécution des minoritaires, et plus particulièrement, des musulmans, et parmi ces derniers, certains trouveraient refuge dans une idéologie radicale qui répondrait aussi au besoin d’absolu des plus jeunes.

    On ne luttera convenablement contre la tentation islamiste qu’en luttant contre ces discriminations supposées et en se convertissant plus ou moins officiellement au multiculturalisme, une doctrine favorisant l’ouverture à l’autre et le respect des différences. C’est en déconstruisant la nation qu’on pourrait créer une société véritablement inclusive qui ne pousserait plus les jeunes désemparés dans les bras des islamistes. Dans cette perspective, on condamnera toutes les politiques visant à restaurer une culture de convergence et c’est ainsi qu’on fera le procès notamment de ceux qui souhaitent mettre de l’avant une vraie laïcité nationale. On relativise au même moment l’influence du discours islamiste et la haine de l’Occident qu’il propage dans nos pays en cherchant à instrumentaliser les contradictions qui traversent nos sociétés pour imposer sa loi ou verser dans la violence meurtrière. Nous peinons à comprendre que le monde occidental trouve dans l’islamisme un ennemi qui veut sa perte.

    En d’autres termes, nous sommes en ce moment devant une offense rhétorique et sémantique pour imposer un vocabulaire culpabilisateur. Devant les discours et les études qui prétendent nous éclairer sur ce phénomène, il n’est pas interdit de faire preuve de scepticisme. Dans les circonstances, c’est l’autre nom de la vigilance démocratique.

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  • Bienvenue dans les guerres de l'ombre... (2)

    Les éditions Gallimard viennent de publier, dans leur collection Série noire, le second tome de Pukhtu, le polar géopolitique signé par DOA. Auteur puissant, DOA décrit en virtuose ce monde de l'ombre où se croisent espions, terroristes, mercenaires et mafieux. On lui doit déjà Citoyens clandestins (Gallimard, 2007) et Le serpent aux mille coupures (Gallimard, 2009) où figurent déjà certains des personnages de Pukhtu.

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    " Le terme pukhtu renvoie aux valeurs fondamentales du peuple pachtoune, l'honneur personnel – ghairat – et celui des siens, de sa tribu – izzat. Dire d'un homme qu'il n'a pas de pukhtu est une injure mortelle. Pukhtu est l'histoire d'un père qui, comme tous les pères, craint de se voir privé de ses enfants par la folie de son époque. Non, plutôt celle d'une jeune femme que le remords et la culpabilité abîment. Ou peut-être celle d'un fils, éloigné de sa famille par la force du destin. À moins qu'il ne s'agisse de celle d'un homme cherchant à redonner un sens à sa vie. Elle se passe en Asie centrale, en Afrique, en Amérique du Nord, en Europe, et raconte des guerres ouvertes et sanglantes, des conflits plus secrets, contre la terreur, le trafic de drogue, et des combats intimes, avec soi-même, pour rester debout et survivre. C'est une histoire de maintenant, à l'ombre du monde et pourtant terriblernent dans le monde. Elle met en scène des citoyens clandestins."

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