Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

souveraineté - Page 21

  • Un marché des nationalités ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un texte important de Jacques Sapir, cueilli sur son carnet RussEurope et consacré à une réflexion sur les notions de nation, de souveraineté et de démocratie. Economiste hétérodoxe, Jacques Sapir est notamment l'auteur d'un essai intitulé La démondialisation (Seuil, 2011).

     

    Sapir.jpg


    Un marché des nationalités ou de quoi Arnault, Bardot et Depardieu sont-ils le nom


    Un commentaire sur une note de Michel Wieviorka

    Michel Wieviorka vient de publier sur son carnet une réaction aux cas Arnault, Depardieu et Bardot1 qui soulève des problèmes de fond. Avec ce texte, court mais dense, nous sommes à mille lieux des remarques et réactions journalistiques suscitées par l’« exil fiscal » des uns et des autres. Ce texte est important, et sans doute plus que ne le pense son auteur, car il touche à des problèmes qui sont réellement fondamentaux. C’est la raison pour laquelle il me semble nécessaire d’aller au fond de ce débat.

    Michel Wieviorka pointe, à très juste titre, que ces comportements remettent en cause l’idée même de Nation. Il dit, et je le cite :

    « La citoyenneté, l’identité nationale deviennent un attribut de la personne, qui peut dans cette perspective nouvelle juger bon de s’en dessaisir, de faire le choix d’une autre citoyenneté. »

    Comment ne pas constater que telle est bien la logique dans laquelle s’inscrivent, pour des raisons d’ailleurs différentes, tant Arnault que Depardieu ou Bardot. Cette citation cependant renvoie à une remarque antérieure sur le débat que Nicolas Sarkozy a voulu lancer sur l’identité nationale (et que Jean-François Copé à sa manière très instrumentale a repris). Michel Wieviorka remarque alors :

    « Il n’est pas ici question de droit du sang, puisque l’appartenance à une nation devient un choix personnel qui n’a rien à voir avec un quelconque déterminisme sanguin.

    Il ne s’agit pas pour autant de droit du sol, la question n’est pas de savoir où l’on vit en citoyen, physiquement, géographiquement, sur quel territoire, en solidarité avec la population et, comme dit Renan, avec une conscience morale partagée. Mais de soupeser et de comparer les législations fiscales pour opter pour celle qui apparaît la plus avantageuse, ou tout simplement de faire de son appartenance nationale un instrument de chantage (Bardot).

    Ainsi s’esquisse une mise en cause du cadre philosophique et politique à l’intérieur duquel s’est construit le grand débat sur l’identité nationale à partir de la fin du XVIIIème siècle. »

    En remarquant que ces comportements s’inscrivent dans ce qu’il appelle le « grand débat » sur l’identité nationale, Michel Wieviorka a certainement raison, mais sans doute pas pour les raisons qu’il croit ; de plus, il fait une erreur de perspective en opposant que ce soit Renan ou Fichte aux comportements de notre « sainte trinité » bien française. Les choses sont à la fois plus profondes et plus triviales. Il est par contre parfaitement à sa place quand, en sociologue, il pressent que ceci pourrait anticiper sur des fractures radicales dans nos sociétés. Pour tenter de démêler l’écheveau de cette affaire, entre représentations immédiates et problèmes réels, il faut commencer par revenir sur l’Histoire.

    La Nation, le noble et le bourgeois

    Rappelons, tout d’abord, qu’un tel comportement où l’on met les États, et leurs souverains, en concurrence, a été considéré comme « normal » dans la très haute noblesse d’ancien régime qui se considérait naturellement comme apatride. Pour cette haute noblesse, la notion de Patrie n’avait pas de sens. Seul comptait le lien de vassalité et les alliances familiales. Or, ces dernières étaient suffisamment entrelacées entre pays pour que tel ou tel puisse décider de servir un jour le Roi de France, le lendemain celui d’Espagne, ou le surlendemain le Prince d’Orange. Il suffit de rappeler quelles furent les carrières militaires du Grand Condé, de Turenne et de bien d’autres. Et, lorsque Condé négocie son ralliement à Louis XIV après l’échec de la Fronde et avoir offert ses services au Roi d’Espagne, il ne le fait point sur une base « nationale » mais sur une base dynastique. D’ailleurs Louis XIV lui-même est autant espagnol ou autrichien qu’il n’est français. Eugène Lavisse remarque dans son livre qu’il est autant un « infant » qu’un dauphin. Mazarin fut d’ailleurs le serviteur de plusieurs maîtres avant de se donner à la famille royale française. Est-ce donc à dire que le patriotisme n’existe pas à l’époque ?

    Le sentiment d’appartenance nationale apparaît en fait autour de deux événements clefs de l’Histoire de France. Le premier est bien connu, c’est l’épisode symbolisé par Jeanne d’Arc. Issue des frontières de l’Est, elle est particulièrement réceptive à l’idée de Nation qui s’oppose ici directement au principe dynastique. Dans cette guerre de 100 ans, qualifiée par un historien anglais de « problème d’héritage envenimé par des avocats ambitieux », se heurtent ces deux principes, celui de la logique dynastique et celui de la Nation. Jeanne d’Arc symbolise alors une forme de soulèvement populaire contre le premier et en faveur du second. Le second événement fondateur se situe à l’époque des guerres de religions. À un principe religieux transcendant les frontières s’oppose, porté tant par la bourgeoisie, la noblesse de robe et une partie de la noblesse d’épée, le principe de Nation. C’est lui qui motive le camp des Catholiques dits « politiques » qui finiront par s’allier aux Protestants conduits par Henri de Navarre pour chasser la Ligue et ses alliés espagnols du territoire français.  Et c’est aussi pourquoi Henry IV, même après son abjuration, reste le symbole d’une unité nationale dépassant les religions. Il forme d’ailleurs avec son double protestant, Sully, l’intéressante figure d’un Janus uni pour l’intérêt du Royaume.

    Dans ces deux cas, on constate que des principes que l’on pourrait qualifier, au prix d’un anachronisme, « d’internationalistes », comme le principe dynastique et le principe religieux, se sont heurtés à l’idée d’un enracinement du « vivre ensemble » sur un territoire donné. Dans le « Dialogue du Maheustre et du Manant », texte datant de la fin des guerres de religions, l’auteur met en scène l’opposition entre un principe fondamental, Dieu est Dieu et ne peut être que catholique, et ce principe du vivre ensemble qu’ouvre la cohabitation de deux religions via l’Edit de Nantes. Jean Bodin, l’un des pères de la pensée politique moderne en France au XVIème siècle en avait pris conscience. En contrepoint à son chef d’œuvre, Les Six livres de la République, il a produit un ouvrage bien moins connu mais non moins important, le “Colloque des Sept” ou Colloquium Heptaplomeres2. Organisant, sous la forme classique du “banquet” socratique, un dialogue entre sept personnages incarnant les diverses religions de son temps, Bodin montre la futilité des controverses théologiques. Dans le domaine de la croyance, on ne peut convaincre l’autre, seulement le convertir. Il prend alors le deuil de l’unité religieuse et en tire la seule conclusion possible. Pour vivre ensemble, ses sept personnages décident de ne plus jamais parler entre eux de religion, c’est-à-dire d’exclure le religieux de l’espace public et de le renvoyer à l’espace privé. Bodin fonde ainsi la notion moderne de laïcité.

    Mais, si l’unicité de religion ne peut plus être un principe fondateur, alors il faut organiser autour de la « chose publique » les principes de la politique. Ce n’est pas un hasard si Jean Bodin écrit à ce moment même les Six livres de la République3. Car, ce que l’on oublie un peu vite, est que si l’on veut « dépasser » la Nation, il faut nécessairement trouver des principes légitimes alternatifs. Mais, pour l’instant, les seuls compétiteurs possibles restent le marché ou la religion, et l’on sait trop à quelles abominations ils conduisent.

    L’adhésion au principe national n’a jamais été totale. Le XVIIIème siècle témoigne justement de la coexistence d’une élite apatride et d’une majorité qui s’enracine dans le sentiment national. Pour Louis XVI, il était « normal » d’aller chercher de l’aide auprès d’autres souverains. Pour la bourgeoisie comme pour la paysannerie française, cela constituait une trahison qui délégitimait radicalement la dynastie. Et c’est là que nous butons sur le principe de souveraineté.

    Le principe de souveraineté

    À l’origine, nous trouvons l’articulation entre légitimité et légalité. La légitimité est fonctionnellement antérieure à la légalité en ceci que toute action légale peut être questionnée en justesse et non pas seulement en justice (la vérification technique de la légalité). Un monde qui confondrait justesse et justice serait une tyrannie en ceci qu’il supposerait que le législateur ne puisse se tromper. La souveraineté signifie donc l’identification de qui règle et organise les modalités de vérification de la légitimité, soit l’organisation d’une Constitution. Hors de ces modalités, la légitimité ne serait qu’un vain mot. La souveraineté signifie donc le pouvoir de décider et la capacité à déterminer des procédures de légitimation. Il reste que ces procédures ne peuvent se matérialiser que si l’on a précisé qui était soumis aux lois dont on vérifie la légitimité, qui pouvait être contrôlé par l’institution chargée de faire exécuter la loi. La légitimité n’a de sens que dans une communauté sociale et politique définie. Elle implique un principe d’inclusion (qui est citoyen) et un principe d’exclusion (qui ne l’est pas).

    Mais la souveraineté n’est pas seulement cela. Elle est la capacité à décider en ultime recours dans le cadre d’une communauté sociale et politique donnée. Cette capacité représente une extension ultime du principe précédent. La souveraineté signifie la capacité à définir quelle est l’idée de droit valable pour une communauté donnée. Ceci implique qu’il ne saurait y avoir de droit sans définition simultanée de la communauté souveraine. Si l’on admet l’idée qu’il n’est pas de droit qui ne pense la légitimité, alors il n’est pas de droit sans une définition préalable de l’espace de souveraineté et une identification du souverain.

    Comme une décision sans mise en œuvre n’est qu’un mot, la souveraineté implique que la communauté sociale et politique ait la possibilité de faire pleinement appliquer les principes du droit qu’elle a décidée. Une souveraineté qui ne pourrait dire qu’une partie du droit, ou qu’un droit ne s’appliquant que sur des segments de la communauté, est une contradiction dans les termes. Il faut donc que la possibilité de dire le droit soit pleine et entière ou que la communauté prenne conscience qu’elle a été privée de sa souveraineté.

    En ce sens, la souveraineté fait tout autant référence à un espace qu’à un mécanisme d’inclusion/exclusion, à un principe qu’à l’ensemble des domaines sur lesquels se manifestera la vérification de ce principe. Le Souverain est donc, par nature, au-dessus de tout statut constitutionnel puisqu’il le crée4. Mais il n’est pas au-dessus d’une communauté politique. C’est un point extrêmement important quand on veut penser la Nation comme communauté politique.

    Ce statut particulier ouvre la possibilité au Souverain en des temps exceptionnels d’user de méthodes exceptionnelles. Une action exceptionnelle qui n’aurait d’autres buts que de rétablir les conditions de fonctionnement de la légitimité et de ses principes fondateurs, palliant les effets d’une situation d’exception risquant de mettre à mal ces principes et d’empêcher leur application, ne saurait constituer une violence hors de toute règle. Elle peut s’affranchir pour un temps limité des règles communes pour rétablir le cadre d’application des principes fondamentaux. Elle n’en reste pas moins liée au cadre dont elle est issue. Et ce cadre au sein duquel elle peut s’exercer, c’est justement la Nation. Les formes et la taille de cette dernière peuvent varier. Une Nation peut se fondre dans une autre, mais sans souveraineté il ne peut y avoir de constitution.

    La souveraineté doit se penser avec le principe de légitimité. C’est cela qui permet de faire la distinction entre le Dictateur (forme de la démocratie) et le Tyran (qui est la négation de la démocratie). Ainsi, l’action d’un gouvernement qui, face à une crise économique et financière extrême, suspend les règles de circulation des capitaux, ou les règles comptables, afin d’empêcher un petit groupe d’agents d’imposer indûment leur volonté au plus grand nombre par l’agiotage et la spéculation, n’est pas un acte d’arbitraire, quand bien même seraient alors piétinées règles et lois nationales et internationales. Ce serait bien au contraire un acte plus fidèle à l’esprit des principes de la démocratie que l’application procédurière des lois et règlements qui, elle, serait alors un acte illégitime. Affirmer cela implique, bien entendu, que la responsabilité du gouvernant face aux gouvernés soit préservée. Ceci implique bien le maintien de la formule du Peuple Souverain comme seul fondement possible, hors les dérives théologiques, à la possibilité d’une action exceptionnelle.

    La critique de la souveraineté

    Le principe de souveraineté, tout comme celui de légitimité, ont fait l’objet de nombreuses critiques. Ainsi, la  critique de la souveraineté comme concept vide de sens ou dépassé est un point de passage obligé des argumentations qui prétendent « dépasser » le stade de la Nation. Traditionnellement, la critique porte alors sur les limitations « objectives » de l’État.

    Dans la mesure où ce dernier contrôlerait du moins les choses en raison des effets d’interdépendance avec d’autres acteurs étatiques, son importance et sa pertinence en diminueraient d’autant. La thèse de la « mondialisation » de l’économie sert ainsi à « démontrer » la réduction des pouvoirs de l’État et à justifier des abandons progressifs de souveraineté. Mais il y a là une série de confusions. Comme le montre Simone Goyard-Fabre, le fait que l’exercice de la souveraineté puisse être techniquement difficile, par exemple pour des raisons de complexité, n’affecte nullement la nature de la souveraineté.

    Que l’exercice de la souveraineté ne puisse se faire qu’au moyen d’organes différenciés, aux compétences spécifiques et travaillant indépendamment les uns des autres, n’implique rien quant à la nature de la puissance souveraine de l’État. Le pluralisme organique (…) ne divise pas l’essence ou la forme de l’État; la souveraineté est une et indivisible5.

    L’argument prétendant fonder sur la limitation pratique de la souveraineté une limitation du principe de celle-ci est, quant au fond, d’une grande faiblesse. Les États n’ont pas prétendu pouvoir tout contrôler matériellement, même et y compris sur le territoire qui est le leur. Le despote le plus puissant et le plus absolu était sans effet devant l’orage ou la sécheresse. Il ne faut pas confondre les limites liées au domaine de la nature et la question des limites de la compétence du Souverain.

    On avance souvent l’hypothèse que les traités internationaux limitent la souveraineté des États. Les traités sont en effet perçus comme des obligations absolues au nom du principe Pacta sunt servanda 6. Mais, ce principe peut donner lieu à deux interprétations. On peut considérer qu’il n’est rien d’autre qu’une mise en œuvre d’un autre principe, celui de la rationalité instrumentale. Il implique donc de supposer une Raison Immanente et une complétude des contrats que sont les traités, deux hypothèses dont il est facile de montrer la fausseté. Nul traité n’est rédigé pour durer jusqu’à la fin des temps. On peut aussi considérer qu’il signifie que la capacité des gouvernements à prendre des décisions suppose que toutes les décisions antérieures ne soient pas tout le temps et en même temps remises en cause. Dans ce cas, l’argument fait appel à une vision réaliste des capacités cognitives des agents. Un traité qui serait immédiatement rediscuté, l’encre de la signature à peine sèche, impliquerait un monde d’une confusion et d’une incertitude dommageables pour tous. Si tel était le cas mieux vaudrait n’en pas signer. Mais dire qu’il est souhaitable qu’un traité ne soit pas immédiatement contesté n’implique pas qu’il ne puisse jamais l’être. Il est opportun de pouvoir compter, à certaines périodes, sur la stabilité des cadres qu’organisent des traités, mais ceci ne fonde nullement leur supériorité sur le pouvoir décisionnel des parties signataires.

    C’est pourquoi d’ailleurs le droit international est nécessairement un droit de coordination et non un droit de subordination7. L’unanimité y est la règle et non la majorité. Cela veut dire que la communauté politique est celle des États participants, et non la somme indifférenciée des populations de ces États. Un traité n’est contraignant que pour ses signataires, et chaque signataire y jouit d’un droit égal quand il s’engage par signature, quelle que soit sa taille, sa richesse, ou le nombre de ses habitants. Il ne peut y avoir de droit de subordination que si les États signataires se fondent en une seule et même communauté sociale et politique. C’est le cas de la fédération. Dès lors, un souverain unique se substitue à tous les autres. Quand l’État indépendant du Texas décida librement au début du XIXème siècle de rejoindre les États-Unis, il abandonna sa souveraineté pour rejoindre tous les autres composants de cette fédération.

    Fors ce processus, vouloir substituer le droit de subordination au droit de coordination n’a qu’une seule signification : la création d’un droit qui serait séparé du principe de souveraineté et n’aurait d’autre fondement à son existence que lui-même. Un tel droit, s’il se rattache ou prétend se rattacher à un principe démocratique, nie le principe de légitimité.

    De l'origine de la souveraineté

    Cela conduit à revenir sur l’origine des deux origines du principe de souveraineté de l’État et donc de la Nation. La première, telle qu’elle se manifeste en France au XIVème siècle, vise à dégager un espace d’action sur un territoire donné et d’une puissance qui se veut non territorialisée, celle du pape, et d’une puissance qui au contraire se fonde sur un micro-territoire, la seigneurie8. La seconde, telle qu’elle s’exprime deux siècles plus tard dans l’œuvre de Jean Bodin, réside dans la prise en compte d’intérêts collectifs, se matérialisant dans la chose publique. Le principe de souveraineté se fonde alors sur ce qui est commun dans une collectivité, et non plus sur celui qui exerce cette souveraineté9. La souveraineté correspond ainsi à la prise de conscience des effets d’interdépendance et des conséquences de ce que l’on a appelé le principe de densité. Elle traduit la nécessité de fonder une légitimation de la constitution d’un espace de méta-cohérence, conçu comme le cadre d’articulation de cohérences locales et sectorielles. Cette nécessité n’existe que comme prise en compte subjective d’intérêts communs articulés à des conflits. Que des éléments objectifs puissent intervenir ici est évident ; néanmoins la collectivité politique ne naît pas d’une réalité « objective » mais d’une volonté affirmée de vivre ensemble.

    La question de la souveraineté ne dépend donc pas seulement de qui prend les décisions, autrement dit de savoir si le processus est interne ou externe à la communauté politique concernée. La souveraineté dépend aussi de la pertinence des décisions qui peuvent être prises sur la situation de cette communauté et de ses membres. Une communauté qui ne pourrait prendre que des décisions sans importance sur la vie de ses membres ne serait pas moins asservie que celle sous la botte d’une puissance étrangère. Ceci rejoint alors la conception de la démocratie développée par Adam Przeworski. Pour cet auteur, dans un article où il s’interroge justement sur les transitions à la démocratie en Europe de l’Est et en Amérique du Sud, la démocratie ne peut résulter d’un compromis sur un résultat. Toute tentative pour pré-déterminer le résultat du jeu politique, que ce soit dans le domaine du politique, de l’économique ou du social, ne peut que vicier la démocratie. Le compromis ne peut porter que sur les procédures organisant ce jeu politique10.

    Cela implique de déterminer ce qu’est l’ordre démocratique, qui s’oppose tant à l’ordre d’ancien régime qu’à l’ordre marchand que nous voyons en action sous nos yeux.

    L'ordre démocratique et Jurgen Habermas

    L’ordre démocratique a, alors, deux fondements. Il est d’abord une chaîne logique qui découle de la notion de souveraineté du peuple et des contraintes qui en découlent quant aux possibilités de dévolution. La souveraineté du peuple est première, à travers, d’une part le couple contrôle/responsabilité fondateur de la liberté comme on l’a montré plus haut. Elle fonde la légitimité du cadre politique qui est alors organisé par des lois, et soumis au principe de légalité. D’autre part, si l’on prend le parti de considérer les principes fonctionnels de la décision de manière réaliste11, l’ordre démocratique est une réponse au fait que la coordination de décisions décentralisées, dans une société répondant au principe d’hétérogénéité, implique que des agents ayant des positions inégales se voient mis dans une position formelle d’égalité. Le couple contrôle/responsabilité résulte ainsi du principe de densité sociale ; il en est une manifestation.Il implique alors que le peuple soit identifié à travers la détermination d’un espace de souveraineté. C’est pourquoi l’ordre démocratique implique des frontières (qui est responsable de quoi), mais aussi une conception de l’appartenance qui soit territoriale (le droit du sol). On le voit, ici resurgit un débat que l’on croyait pouvoir dépasser. Le droit du sol est une des conditions d’existence du couple contrôle/responsabilité qui, dans une société hétérogène est nécessaire à l’existence d’un ordre démocratique. De ce point de vue, l’absence de frontières, l’indétermination de la communauté de référence, conduit au découplage du contrôle et de la responsabilité.

    Nier les frontières et les Nations est une démarche tentante. Telle est la base de la pensée politique de Jurgen Habermas qui propose un « dépassement » de l’opposition entre la conception dite « française » de la Nation (le droit du sol) et la conception dite « allemande » (le droit du sang) dans une Constitution européenne et dans un « patriotisme de la Constitution ». Le problème est de savoir ce qui rattacherait cette Constitution tant à la légitimité qu’à la souveraineté. La démocratie, soit l’existence d’un espace politique où l’on puisse vérifier et le contrôle et la responsabilité, implique l’une et l’autre. Cette dernière, en effet, ne peut se contenter, comme chez Jurgen Habermas d’être simplement délibérative12, ce qui reviendrait à concevoir le principe de légalité comme incluant la légitimité. Il y a certainement de nombreux points positifs dans la conception délibérative de la démocratie. Néanmoins, elle contient des dimensions idéalistes et irréalistes qui la rendent très vulnérable à la critique. Rappelons que la délibération doit être gouvernée par des normes d’égalité et de symétrie, que chacun a le droit de mettre en cause l’ordre du jour, et qu’il n’y a pas de règles limitant l’ordre du jour ou l’identité des participants aussi longtemps que chaque personne exclue peut de manière justifiée montrer qu’elle est affectée par les normes en discussion. De plus, si nous incluons la légitimité dans la légalité, cela revient à dire que tout ce qui a été décidé dans les règles démocratiques est par essence juste. On ne peut plus distinguer la justesse de la justice. Le législateur se constitue alors en Tyran.

    On peut aller plus loin dans le questionnement de cette démocratie délibérative. Pour qu’une délibération ait un sens, il faut nécessairement qu’elle ait un enjeu. Il faut qu’elle porte sur un objet par rapport auquel existent des moyens d’action. Discuter d’une chose sur laquelle nous ne pouvons agir n’a pas de sens d’un point de vue démocratique. Une délibération n’a de sens que si elle se conclut sur une décision se traduisant par une action. Seulement, si l’action existe, la responsabilité des conséquences de cette action existe aussi par définition. L’identité des participants à la délibération doit donc être clairement déterminée pour savoir qui est responsable de quoi. On ne peut laisser dans l’indétermination le corps politique. Une constitution européenne est en théorie possible, mais à la condition que l’existence d’un peuple européen ait été au préalable constatée. Or, il faut ici rappeler l’arrêt de la cour constitutionnelle de Karlsruhe qui constate que la démocratie n’existe QUE dans le cadre des nations européennes13. De ce point de vue, la position d’Habermas revient à supposer qu’une Raison s’imposera sur toutes les autres, alors que l’on sait qu’il existe des modèles multiples de rationalité, et que les choix des individus sont changeants tout comme le sont leurs préférences individuelles14. En fait, sur ce point, Habermas ne fait que reprendre les hypothèses les plus discutables de l’économie orthodoxe15.

    Ensuite, s’il est juste de mettre en garde contre des limitations des ordres du jour16, il est aussi clair que les ordres du jour doivent être organisés. Une discussion où tout pourrait être simultanément débattu ne serait plus une délibération. Il est légitime, compte tenu des limites cognitives des individus, de penser des ordres de priorité. Ces derniers peuvent être l’objet de discussions. Ils sont néanmoins contraignants et impliquent l’existence de procédures d’autorité et de vérification. Il n’est pas possible, sauf à accepter que la délibération soit vidée de son sens, de prétendre que ces ordres de priorité peuvent être en permanence contestés par n’importe qui. Il y a là une grande faiblesse dans la conception pure de la démocratie délibérative.

    Supposer que la délibération puisse se faire dans un cadre entièrement homogène, ignorant la présence de routines et de délégations de pouvoir, témoigne d’hypothèses implicites quant aux capacités cognitives des individus qui ne sont pas recevables. En ce sens la position d’Habermas n’est pas compatible avec l’approche réaliste que l’on défend que ce soit dans ce texte ou dans d’autres qui sont antérieures17. Seulement, si on admet la présence des routines et des délégations de pouvoir, la composition des participants au débat doit être relativement stable au moins pour les périodes marquées par ces routines et délégations. De plus, il faut que les effets des routines et délégations que l’on doit mettre en œuvre s’appliquent bien sur ceux qui les ont décidées. La démocratie délibérative proposée par Habermas, et qui fonde son projet de Constitution Européenne, porte en elle un risque de dissolution à l’infini du constituant du pouvoir, et donc le risque de l’irresponsabilité généralisée. Il en est ainsi en raison des limites cognitives des individus et de ce qui en découle, le principe de densité et celui de la contrainte temporelle. On ne peut considérer les effets d’une délibération en niant la densité ou en considérant, ce qui revient au même, que le degré de densité est uniforme au niveau mondial.

    Nous sommes donc bien obligés de constater la justesse et la force de l’arrêt du 30 juin 2009 de la Cour Constitutionnelle de Karlsruhe. La démocratie est toujours enracinée dans un cadre national, non par tradition (encore que le rôle de cette dernière ne soit pas négligeable) mais pour des raisons fonctionnelles et de principe. Toute tentative pour dépasser la Nation ne fait qu’ouvrir la voie soit à une régression de type technocratique ou à une régression de type religieux.

    De quoi Arnault, Depardieu et Bardot sont-ils le nom ?

    Nous voici loin de la France de cette fin d’année 2012, des aventures de Bernard Arnault, de Gérard Depardieu ou de Brigitte Bardot semble-t-il. En fait, bien au contraire.

    Ce que montrent ces comportements, ce n’est pas une crise de l’idée de Nation, ni une remise en cause des différents modèles de définition de la nationalité. C’est au contraire le retour à une situation de l’Ancien Régime à la fin du XVIIIème siècle. Nous avons aujourd’hui une petite élite de « super-riches » qui s’est internationalisée au point de devenir apatride. Cette élite attire idéologiquement à elle de 5% à 8% de la population, soit la proportion des Français qui voyagent régulièrement à l’étranger. Cette élite rejette les entraves d’un pouvoir national, et en particulier son droit de lever l’impôt, tout comme elle a rejeté l’idée d’une monnaie nationale. Son mode de vie est cohérent avec ses intérêts et ses comportements. Mais, face à elle, nous avons l’immense majorité de la population, celle qui affirme à 62% son attachement à cette monnaie nationale (et 66% des moins de 35 ans)18. Les comportements des Arnault, Depardieu et Bardot indique que la confrontation entre cette petite minorité et cette immense majorité est devenue inévitable, et qu’elle sera probablement violente.

    À cet égard l’article de Michel Wieviorka est le bienvenu. Il attire notre attention sur un problème majeur de notre société, sur un clivage qui va s’approfondissant ; telle est la tache du sociologue.

    Jacques Sapir (RussEurope, 10 janvier 2013)


    Notes :

    1. Michel Wieviorka, “Arnault, Bardot et Depardieu : qu’est ce qu’une nation ?”, billet publié sur le carnet de Michel Wieviorka sur hypotheses.org le 07/01/2013, URL: http://wieviorka.hypotheses.org/109 []
    2. Cet ouvrage, publié bien après la mort de Jean Bodin, peut être téléchargé sur le site de la Bibliothèque Nationale (manuscrit). On trouvera un commentaire éclairant de sa contribution aux idées de tolérance et de laicité dans: J. Lecler, Histoire de la Tolérance au siècle de la réforme, Aubier Montaigne, Paris, 1955, 2 vol; vol. 2; pp. 153-159. Voir aussi, Marion L. Kuntz, “Bodin’s Demons” in New York Review of Books, vol. 24, n°3/1977, mars. []
    3. J. Bodin, Les six livres de la République, Réimpression, Scientia Aulem, Amsterdam, 1961. []
    4. G. Burdeau, Droit Constitutionnel et Institutions Politiques, Librairie Générale de Droit et de Jurisprudence, Paris, 1972, 15ème édition, pp. 28-29. []
    5. S. Goyard-Fabre, “Y-a-t-il une crise de la souveraineté?”, in Revue Internationale de Philosophie, Vol. 45, n°4/1991, pp. 459-498, p. 480-1. []
    6. Idem, p. 485. []
    7. R. J. Dupuy, Le Droit International, PUF, Paris, 1963. []
    8. Voir R. Carré de Malberg, Contribution à la Théorie Générale de l’État, Éditions du CNRS, Paris, 1962 (première édition, Paris, 1920-1922), 2 volumes. T. 1, pp. 75-76. []
    9. J. Bodin, Les Six Livres de la République, Réimpression, Scientia Aulem, Amsterdam, 1961. []
    10. A. Przeworski, “Democracy as a contingent outcome of conflicts”, in J. Elster & R. Slagstad, (eds.), Constitutionalism and Democracy, Cambridge University Press, Cambridge, 1993, pp. 59-80. []
    11. J’ai expliqué ce qu’il fallait entendre par « réalisme » dans deux ouvrages ; J. Sapir, Les Économistes contre la démocratie, Albin Michel, Paris, 2002 et J. Sapir, Quelle Économie pour le XXIe Siècle ?, Odile Jacob, Paris, 2005. []
    12. Pour un exposé précis des conceptions d’Habermas, S. Benhabib, “Deliberative Rationality and Models of Democratic Legitimacy”, in Constellations, vol.I, n°1/avril 1994. []
    13. Arrêt du 30 juin 2009, affirmant la suprématie du Parlement allemand sur les institutions européennes. Marie-François Bechtel, Fondation ResPublica, URL : http://www.fondation-res-publica.org/L-arret-du-30-juin-2009-de-la-cour-constitutionnelle-et-l-Europe-une-revolution-juridique_a431.html []
    14. J. Sapir, Quelle Économie pour le XXIe siècle, Odile Jacob, Paris, 2005, chap 1. []
    15. J. Sapir, Les Trous noirs de la science économique, Albin Michel, Paris, 2000. []
    16. S. Holmes, “Gag rules or the politics of omission”, in J. Elster & R. Slagstad, (eds.), Constitutionalism and Democracy, pp. 19-58. []
    17. J. Sapir, Les Économistes contre la démocratie – Les économistes et la politique économique entre pouvoir, mondialisation et démocratie, Albin Michel, Paris, 2002. Idem, Quelle Économie pour le XXIe siècle ?, op.cit. []
    18. « Onze ans après la mise en place de l’euro, 62% des Français regrettent le Franc », Atlantico-IFOP, Atlantico, URL : http://www.atlantico.fr/decryptage/onze-ans-apres-mise-en-place-euro-62-francais-regrettent-franc-jerome-fourquet-590903.html []

    Lien permanent Catégories : Textes 1 commentaire Pin it!
  • La libre circulation, également pour les criminels ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'Uli Windisch, responsable du site Les Observateurs, qui aborde la question de la souveraineté nationale face aux normes internationales qui viennent l'entraver. Si le texte commente l'actualité suisse, sur le fond il s'applique parfaitement à la réalité française...

     

    Pour_plus_de_sécurité.jpg

    La libre circulation, également pour les criminels ?

    Il est criminel de se dire impuissant face à la barbarie, réelle et massive, au nom du fait que telle ou telle norme internationale nous empêcherait une action ferme, déterminée et expéditive

    La Suisses est à la fois forte et fragile.

    Forte, à condition que les fondements de notre système politique soient respectés, défendus et  mis en pratique .

    Faible, si ces fondements ne sont plus ni respectés ni appliqués.

    Où allons-nous si même les autorités n’appliquent plus les mesures exigées par les résultats d’une initiative populaire acceptée par le peuple ? Pire, lorsque des initiants doivent déposer une deuxième initiative afin d’exiger que les mesures de la première initiative, pourtant acceptée, soit appliquées ? Cas d’école purement théorique ? Pas du tout. C’est ce qui vient d’arriver avec l’initiative de l’UDC sur l’expulsion des criminels étrangers acceptée en novembre 2010 par 53% des votants. Les autorités traînant les pieds pour l’appliquer, l’UDC a déposé, en cette fin d’année 2012, soit deux ans plus tard,  une deuxième initiative  « pour le renvoi effectif des étrangers criminels » (définie comme initiative de mise en œuvre !). Et avec quel succès : en 5 mois  ce parti politique national a récolté 155.000 signatures.

    On croit rêver. Il importe peu ici que ce soit l’UDC qui procède ainsi. C’est le fait lui-même qui est totalement inacceptable et révélateur à plus d’un titre.

    Une telle pratique constitue d’abord un vrai dévoiement de notre démocratie.

    Passons sur le fait du coût et de l’investissement en temps très considérables et nécessaires à la récolte des 100 000 signatures qu’exige une initiative populaire.

    Une telle situation, qui n’a pas l’air de révolter grand monde (parce qu’elle est le fait de l’UDC ?), est pourtant totalement inacceptable.

    Deux ans pendant lesquels la criminalité n’a cessé d’augmenter et de rendre la vie quotidienne de plus en plus insupportable. Cela ne devrait-il pas soulever un vaste mouvement de protestation dans tout le pays ? Ou, autre possibilité,  les électeurs attendent-ils  les prochaines élections pour en tirer certaines conclusions et réagir ? Autre possibilité encore : peu de monde se rend compte de la gravité de la situation.

    Arriverons-nous au même stade que certains pays voisins qui, ayant fini par concéder  exceptionnellement un référendum, n’en tiennent finalement pas compte, quand le résultat est contraire à l’attente du gouvernement ?

     

    Autre question.Que devient la souveraineté nationale face à certaines « incompatibilités» avec les normes du droit international?

    Cette question revient de plus en plus fréquemment et les autorités avancent comme allant de soi, l’argument de cette incompatibilité pour ne pas appliquer des mesures pourtant décidées par le peuple au moyen d’initiatives parfaitement légales et prévues par notre ordre constitutionnel.

    Personne ne croit en la possibilité d’une autonomie ou souveraineté nationale complète et totale, mais de là à s’incliner ou carrément à s’applaventrir devant n’importe quelle norme supranationale, impérative ou non, il y a un pas à ne plus franchir malgré les « craintes » et les injonctions de juristes effarouchés. Nous ne voulons pas de la judiciarisation systématique des problèmes sociaux et politiques.

    Ce n’est pas au niveau juridique que doit nécessairement et toujours revenir le dernier mot mais bien au politique et à la défense obstinée des intérêts vitaux et propres à chaque pays.

    Allons-nous par exemple continuer à nous laisser envahir par des hordes de barbares et de criminels étrangers de toutes sortes, sachant qu’ils ne peuvent être expulsés, à cause de telle ou telle règle ou norme internationale prescrivant « la libre circulation des personnes » ou les « droits de l’homme »? Cela d’autant plus lorsque d’autres organismes ou normes, censés remédier aux lacunes des premiers, n’y parviennent que très symboliquement ? Est-il admissible que des criminels clairement mal intentionnés, et se jouant de ces normes, en profitent de la même manière que les migrants respecteux des normes du pays qui peut offrir une possibilité de travail à un certain nombre d’entre eux ?

    Quand on signe des traités internationaux on peut, on doit, le faire avec des réserves, si nécessaire. Ou, plus clairement, si des normes internationales créent des situations totalement inacceptables, jusqu’à favoriser une criminalité massive dans certains cas, il est du devoir des responsables politiques d’adapter ou de changer ces « droits abstraits pour tous ». Le droit n’est-il pas « évolutif » ?

    On remarque par ailleurs que certains pays, confiants en eux-mêmes savent défendre leurs intérêts nationaux comme personne (l’Angleterre n’est pas la seule à le faire, par  exemple face l’UE), malgré les hauts cris d’autres pays.

    Même si la Suisse est petite, ce n’est pas une raison pour ne pas défendre nos intérêts ou notre situation si elle est ou devient particulière sur certains points. Il est criminel de se dire impuissant face à la barbarie, réelle et massive, au nom du fait que telle ou telle norme internationale nous empêcherait une action ferme, déterminée et expéditive.

    L’irresponsabilité est bien sûr aussi du côté de ces fonctionnaires supranationaux qui pensent que les normes, par eux décidées, doivent s’appliquer quels que soient les difficultés ou les effets pervers créés par ces règles édictées du haut d’un pouvoir confisqué et élu par personne. Lorsque cet autisme irresponsable produit des mouvements populaires réactifs de grande ampleur, ces derniers sont alors simplement qualifiés de populistes ou de fascistes. Et ce pouvoir, ne trouve alors rien de mieux à faire que d’ériger des « cordons sanitaires » censés stopper ces réactions massives, réactions engendrées par un pouvoir lui non-démocratique, coupé qu’il est, en plus, des réalités sociales et politiques concrètes propres à chaque pays. L’Autriche (depuis l’année 2000) en sait quelque chose ; son exemple aurait dû suffir à montrer l’inefficacité et les effets contre-productifs  d’une politique qui, tel Méphistophélès, en voulant le Bien conduit tout droit au Mal, en l’occurrence dans un Enfer où nous devrions assister à une criminalité galopante sans avoir le droit de réagir.

    Uli Windisch (Les Observateurs, 30 décembre 2012)

    Lien permanent Catégories : Points de vue 0 commentaire Pin it!
  • La souveraineté marchandisée ?...

    Les éditions Armand Colin ont récemment publié un essai de Coralie Raffenne consacré à la question des paradis fiscaux et intitulé La souveraineté marchandisée. L'auteur est maître de conférence en droit.

    Souveraineté marchandisée.jpg

    "La crise financière de 2008 a souligné le rôle central des paradis fiscaux. Aujourd’hui, passés les effets d’annonce et la condamnation par la plupart des dirigeants du G 20, leur impact sur la crise de la dette souveraine reste réel – un constat relayé par la société civile, les experts ou la classe politique. Loin de constituer un phénomène anecdotique, l’évasion fiscale représenterait entre 17 000 et 25 000 milliards d’euros. Elle donne à l’économie offshore un poids comparable à celui des États-Unis. 
    Le présent ouvrage se penche sur la question de la place des paradis fiscaux dans les crises de demain, générées par le pillage environnemental. Certes les paradis fiscaux ne sont pas la cause de tous les maux de nos démocraties. Mais ils constituent un symptôme de la crise du politique qui affecte la souveraineté étatique, ainsi que les notions fondamentales de sphère publique et de bien commun, et qui se révèle au travers des crises économiques ou environnementales."

    Lien permanent Catégories : Livres 0 commentaire Pin it!
  • Une grande catastrophe...

    Nous reproduisons un point de vue éclairant de la fondation Polémia, cueilli sur son site et consacré aux conséquences de l'immigration de masse que la France subit depuis plus de 40 ans...

     

     

    immigration.jpeg

     

    Immigration de masse : la grande catastrophe


    L’immigration de masse n’est pas une chance pour la France. C’est une catastrophe. Une grande catastrophe : identitaire, sécuritaire, scolaire, administrative, sanitaire, économique, sociale, budgétaire, environnementale, politique, diplomatique, démographique ; c’est aussi une catastrophe pour les libertés. Il est temps de rappeler les faits, dans toute leur réalité, c’est-à-dire dans toute leur brutalité. Sans haine, bien sûr, mais aussi sans faux semblants, ni tartufferies, ni concessions aux convenances de la bien-pensance.

    – Catastrophe identitaire. Beaucoup de Français de souche européenne se sentent devenir étrangers dans leur propre pays. Dans certains quartiers, ils deviennent une minorité opprimée. Des coutumes étrangères – voile islamique, boubous, djellabas – leur sont imposées dans l’espace public. Des règles alimentaires musulmanes s’implantent dans leurs abattoirs et s’imposent dans leurs assiettes. Les paysages urbains sont transformés par l’édification de mosquées monumentales, expression d’une prise de contrôle symbolique du territoire français. Les programmes scolaires et leurs mises en œuvre sont « adaptés » aux exigences de minorités venues d’ailleurs. Les principes républicains (laïcité, mérite, égalité de droit) sont bafoués. La France devient multiculturelle et donc multiconflictuelle.

    – Catastrophe sécuritaire. Du strict point de vue des faits, il est incontestable que la très grande majorité des trafiquants de drogue sont noirs ou arabes. Les violences faites aux femmes, les agressions dans les écoles, les rencontres sportives entre amateurs qui tournent mal, sont concentrées dans les quartiers de l’immigration et les périphéries qu’ils impactent. Plus généralement, l’explosion de la délinquance, depuis les années 1970, est en relation directe avec la progression de l’immigration. Dans les prisons, de l’ordre des deux tiers des personnes incarcérées ne sont pas des Français de souche. Plus de la moitié des détenus sont musulmans. Près de 800 quartiers sont devenus des zones de non-droit où les pompiers et les SAMU s’exposent à être caillassés et où les médecins hésitent à s’aventurer.

    – Catastrophe pour les libertés. La montée de l’insécurité liée à l’immigration limite dans les faits la liberté d’aller et venir (dans certains quartiers ou moyens de transport) des honnêtes citoyens. La lutte contre l’insécurité n’a pas porté sur ses vraies causes mais a provoqué une multiplication des lois sécuritaires potentiellement dangereuses pour les libertés : inflation du nombre des incriminations pénales, extension des délais de garde à vue, essor de la vidéo-surveillance, développement de la sécurité privée. Pour imposer, sans débat et sans consultation des Français, une politique migratoire insensée les gouvernements successifs ont fait voter des lois liberticides : lois Pleven (1972), Gayssot (1990), Toubon (1994), Taubira (2002) qui sont des atteintes successives à la liberté d’expression, en même temps qu’une véritable régression civilisationnelle.

    – Catastrophe scolaire. Les réformes pédagogiques et le collège unique ont débouché sur une dégradation de l’acquisition des connaissances par les élèves. Ce phénomène est grandement amplifié par l’hétérogénéité croissante des classes en raison d’une immigration qui accentue les différences entre élèves, s’agissant des capacités cognitives, de la maîtrise de la langue française et de l’acceptation du contenu des programmes (histoire, littérature, biologie). L’affectation des enseignants débutants dans les banlieues de l’immigration rend leur recrutement de plus en plus difficile et conduit souvent au découragement de ceux qui ont choisi le métier de professeur. Cet ensemble de faits explique qu’aux tests internationaux PISA, les performances des élèves scolarisés en France déclinent davantage que dans les pays voisins. A contrario, c’est la Finlande, pays européen le plus homogène ethniquement, qui obtient les meilleurs résultats internationaux.

    – Catastrophe administrative. Certains immigrés sont amenés à importer des pratiques frauduleuses souvent jugées normales dans leur pays d’origine : fausses déclarations, corruption active de fonctionnaire ou menaces. Les fonctionnaires de police, des préfectures, des services du permis de conduire, les agents des services sociaux mais aussi les enseignants sont exposés à ces comportements.

    – Catastrophe pour la santé publique. Compte tenu des contraintes budgétaires qui l’encadrent et de l’allongement de la vie, le système sanitaire français est au bord de la rupture financière. L’immigration apporte des déséquilibres supplémentaires : un nombre croissant de bénéficiaires non cotisants (CMU, CMU complémentaire, Aide médicale d’Etat), du tourisme médical offrant l’accès à des lits d’hôpitaux parfois en nombre insuffisant, l’essor de maladies rares en France (tuberculose, SIDA) mais fréquentes dans les départements à forte immigration africaine (93, 95 notamment). L’organisation même des services d’urgence est perturbée par des comportements compulsifs, voire agressifs, de personnes ne suivant pas le parcours de soins habituel. Or cette augmentation de la demande médicale n’ayant été ni anticipée ni financée, les hôpitaux sont conduits à recruter des médecins étrangers sous-payés et parfois sous-qualifiés.

    – Catastrophe pour l’emploi. Le chômage dépasse le seuil de 10% de la population active, 15% en prenant en compte le chômage partiel. C’est une cause majeure de malaise social et de déficit budgétaire. L’immigration n’est pas seule en cause mais amplifie le phénomène. Le taux de chômage des étrangers africains ou maghrébins est le double du taux français, selon l’INSEE. Le taux de chômage des jeunes issus de l’immigration maghrébine ou africaine est aussi le double de celui des jeunes Français d’origine européenne (1). On connaît l’antienne cent fois répétée : « Les étrangers font le travail que les Français ne veulent plus faire ». Pour être plus exact, il faudrait dire : « …ou plutôt que les étrangers déjà installés et les immigrés de la seconde génération ne veulent plus faire non plus ». Les immigrés qui entrent aujourd’hui en France maintiennent au chômage des étrangers déjà présents ; et ce sont les parents des chômeurs de demain.

    – Catastrophe pour les salaires. Sous l’effet de la poursuite inconsidérée de l’immigration, les salaires baissent dans de nombreux secteurs et métiers : ouvriers du bâtiment et travaux publics, employés de la restauration ou des services d’aide à la personne, artisans mais aussi techniciens et ingénieurs, notamment dans l’informatique, sont concernés. Ce sont les jeunes actifs entrant sur le marché du travail qui sont les premières victimes de ce phénomène. L’ouverture des frontières offre un immense réservoir de main-d’œuvre aux sociétés industrielles capitalistes tandis que l’Etat-providence assure à tous un revenu minimal : d’où le développement simultané du chômage, de la baisse des salaires et de la montée des déficits. Difficile de faire pire !

    – Catastrophe budgétaire. Dans un pays en sous-emploi, l’immigration est un boulet économique : toute entrée de personnes supplémentaires sur le territoire accroît les charges sociales et les frais généraux de la nation, sans recettes correspondantes. En appliquant les modes de calcul du prix Nobel Maurice Allais on peut estimer à 18 milliards d’euros, chaque année, les coûts d’investissement (logements, hôpitaux, écoles, transports, prisons) et les charges de fonctionnement (écoles, aides et prestations sociales) liés à l’entrée de plus de 200.000 étrangers supplémentaires. Ceux qui prétendent, contre tout bon sens, que l’immigration améliore les comptes français oublient deux choses : que la France est en sous-emploi et qu’il est inexact de comparer une population immigrée jeune à une population française âgée puisque celle-ci compte… de vieux immigrés naturalisés. Enfin, une partie des salaires et des aides sociales perçues repart, à hauteur de plusieurs milliards d’euros, vers les pays d’origine, ce qui creuse le déficit de la balance des paiements française.

    – Catastrophe environnementale et pour l’aménagement du territoire. L’immigration de masse aboutit à déstructurer les espaces urbains ; elle provoque le white flight (2) et amplifie la crise du logement et la rurbanisation du territoire ; résultat : l’artificialisation des sols s’accélère ; tous les dix ans l’équivalent de la surface d’un département est artificialisé, ce qui détruit des paysages, fruits d’un équilibre millénaire. La gestion des déchets dans les quartiers de l’immigration et dans de nombreux campements Roms pose des problèmes environnementaux graves.

    – Catastrophe dans les transports. En trente ans, la situation dans les transports publics des grandes métropoles s’est profondément dégradée : d’abord, parce que les réseaux de transport doivent déplacer davantage d’usagers sans disposer pour cela de recettes supplémentaires correspondantes ; ensuite, parce que les comportements irresponsables (blocage des fermetures de portes des trains, descente sur les voies de chemin de fer), les actes de vandalisme et les agressions, particulièrement fréquents sur les lignes desservant les banlieues de l’immigration, se répercutent sur l’ensemble des réseaux, générant des retards à répétition. Les vols de métaux, commis par des mafias souvent venues d’ailleurs, sont une cause additionnelle de perturbations.

    – Catastrophe politique. Selon la Constitution, « la souveraineté appartient au peuple », et « la loi est l’expression de la volonté générale » ; or, pour qu’un groupe humain fasse peuple, il faut qu’il partage des valeurs, des coutumes et des comportements communs. Cela suppose l’assimilation. La communautarisation ethnique et religieuse s’y oppose. Les minorités monnaient leurs voix. Ce qui conduit les maires à « courtiser l’islamisme » (3) et le parti socialiste à fonder sa stratégie électorale sur le remplacement des classes populaires françaises par les minorités étrangères.

    – Catastrophe pour la souveraineté française. A terme, nos options de politique étrangère risquent d’être prises au regard des réactions éventuelles de minorités arabophones ou islamisées présentes sur notre sol ; d’ores et déjà, celles-ci sont la cible de spectaculaires opérations d’influence de la part des Etats-Unis et du Qatar, sans compter le financement de mosquées par l’Arabie Saoudite, le Maroc, l’Algérie ou la Turquie.

    – Catastrophe démographique. A moyen et long terme, c’est à une substitution de population que nous assistons. C’est déjà le cas en Seine-Saint-Denis où plus de la moitié de la population est noire ou maghrébine. C’est aussi le cas dans la grande majorité des 800 quartiers « sensibles ». Ce pourrait être, à terme, le cas de l’ensemble de la France menacée de « grand remplacement », selon la juste expression de l’écrivain Renaud Camus. Ce génocide lent a deux causes : l’arrivée de populations étrangères fécondes, en raison notamment de l’immigration nuptiale (entrée en France de jeunes femmes avec un taux de fécondité élevée) ; mais aussi le découragement de bien des familles de souche européenne qui se heurtent à des difficultés croissantes pour se loger, pour se déplacer et pour trouver des écoles adaptées à leurs enfants. La surnatalité ou la seule irruption étrangère est aussi une cause de la dénatalité française. Ce phénomène a été observé par le passé dans l’effondrement de nombreuses civilisations, notamment méso-américaines. La catastrophe démographique est évidemment de loin la plus grave car elle est potentiellement irréversible.

    Faire face à la crise existentielle du peuple français

    Certes, l’ensemble des difficultés françaises ne saurait être réduit à l’immigration. La crise existentielle du peuple français est la cause majeure de l’abaissement français. Mais il serait vain d’envisager – par aveuglement, paresse intellectuelle, lâcheté morale, opportunisme médiatique ou cynisme politique – un quelconque relèvement français (ou européen) sans que soit posée la question de l’immigration. Pour une raison simple : oser s’attaquer au problème de l’immigration, c’est la première étape du redressement, car c’est le tabou le plus fort qu’il faut briser : celui de la mauvaise conscience et de la repentance.

    Polémia (30 novembre 2012)

    Notes

    (1) Sources INSEE : Nombre de chômeurs et taux de chômage selon la nationalité, le sexe et l'âge en 2009 : http://www.insee.fr/fr/themes/tableau.asp?reg_id=0&ref_id=NATnon03323 et ministère de l’Intérieur, Infos migrations, mai 2011.
    (2) « White flight désigne la migration des personnes de race europoïde de zones urbaines qui ont vu un taux d'immigration de populations allogènes augmenter significativement. » « L’expression, née aux Etats-Unis, est utilisée pour l’exode des populations blanches des centres-villes américains après la fin de la ségrégation raciale. » (Sources : Wikipedia et Wiktionnaire.)
    (3) Selon le titre d’un livre de Joachim Veliocas, de l’Observatoire de l’islamisation.

    Lien permanent Catégories : Points de vue 0 commentaire Pin it!
  • Défense nationale, le prix de la liberté ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue Charles Saint-Prot, cueilli sur l'excellent site Theatrum Belli et consacré au sacrifice de la politique de défense par le gouvernement socialiste. Spécialiste du monde arabe et de l'Islam, Charles Saint-Prot a récemment publié Mohammed V ou la monarchie populaire (Editions du Rocher, 2012), ouvrage consacré au grand-père de l'actuel souverain du Maroc. 

     

    rafale-marine.jpg

    Défense nationale, le prix de la liberté

    Des griots de l'idéologie ultralibérale vantaient naguère les bienfaits d'une "mondialisation heureuse" qui devait apporter la paix, la prospérité et, même, le bonheur à l'humanité. 

    Aujourd'hui, nous voyons bien que la globalisation des marchés et des technologies de l'information et de la communication n'a pas conduit à ce village planétaire où tout le monde devait être bon et gentil. Assurément, le monde n'est pas plus serein que jadis. Rien n'a changé, la politique internationale reste ce qu'elle a toujours été : un rapport de force entre des puissances. Ce qui change c'est simplement les acteurs principaux, certains sont menacés d'effacement, d'autres montent en puissance. Voici donc les pays dits émergents qui revendiquent leur place à la table des grands. À cet égard, la lutte pour le contrôle des matières premières, en particuliers les réserves énergétiques, est très significative. La Chine, l'Inde, d'autres, sont prêts à tout pour nourrir leur développement tandis que les anciennes puissances – États-Unis en tête – tentent de préserver les positions acquises. Entre les deux, la Russie résiste contre les manœuvres états-uniennes visant à son endiguement, notamment au Caucase où l'enjeu pétrolier et gazier est considérable. Depuis Poutine, Moscou rend coup pour coup, nous en avons un exemple avec le soutien apporté aux régimes syrien et iranien. 

    Le tableau est d'autant plus sombre que des menaces nouvelles se précisent avec l'instrumentalisation de bandes terroristes et de maffias diverses et puissantes. On ne dira jamais assez combien les terroristes et les trafiquants de toute sorte ont été les principaux bénéficiaires de la mondialisation. L'idéologie du laisser-faire, laisser-passer aurait mérité d'être conçue par l'un des leurs ! 

    Dans ce contexte, on comprend que les puissances actives, les anciennes (États-Unis, Russie) et les nouvelles (Chine, Inde), redoublent d'effort pour renforcer leurs outils de défense. Durant les dix dernières années de la prétendue "mondialisation heureuse", les dépenses militaires mondiales ont augmenté de plus de 50%, dont 200% pour la Chine et plus de 80% pour les États-Unis. Les pays émergents ont un budget de la défense qui augmente à la même vitesse que leur PIB, soit de 5% à 10% par an. Il n'y a guère que les pays membre de la fantomatique union européenne pour continuer à penser que la mondialisation c'est la paix. En proie à une crise économique et sociale systémique, ces pays réduisent d'autant plus leurs budgets militaires ; la dernière priorité de certains États étant d'alimenter les caisses sans fond de prélèvements sociaux excessifs destinés à acheter une fragile paix sociale. 

    Pour ce qui concerne la France où la défense ne représente plus que 1,9% du PIB – avec, de surcroît une réduction de plus de 7.000 postes et une saignée de 6 milliards d'euros sur les crédits d'équipement en 2012, la question devient préoccupante quand bien même l'admirable compétence et l'efficacité reconnue des personnels militaires permettent de maintenir une certaine crédibilité. Lors de son discours à la conférence des ambassadeurs, le 27 août, le Président de la République déclarait que la France "est une puissance mondiale, nous sommes un des rares pays qui dispose encore d'un très large éventail d'actions, doté d'une capacité nucléaire, un pays constamment impliqué dans la vie internationale par sa responsabilité de membre permanent du Conseil de sécurité". Encore faut-il se donner les moyens d'assurer ce rang. La réduction des moyens matériels et des effectifs, les lacunes dans plusieurs secteurs (transport aérien, drones, cyberguerre, etc.) conduisent à une dégradation de l'effort de défense d'autant plus inquiétant que les menaces se précisent au sud de la Méditerranée, notamment au Sahel. Par ailleurs, si l'on veut bien considérer que face à une Allemagne qui manifeste de nouveau sa volonté de puissance grâce à son dynamisme économique, la France ne peut maintenir le nécessaire équilibre européen qu'au prix d'une diplomatie internationale active et du maintien de son rang dans les principales puissances militaires du monde, l'une n'allant pas sans l'autre. Ce n'est pas l'illusion d'une incertaine "défense européenne" qui constitue une solution, car cette idée n'est que le pendant de l'affreuse illusion que tout peut être obtenu sans effort national, défendu sans sacrifice et qu'on peut s'en remettre aux autres pour préserver sa survie. À cet égard, le projet de fusionner EADS et BAE SYSTEMS est particulièrement regrettable dans la mesure où ce projet renforcera la mainmise de la finance anglo-saxonne sur une industrie vitale et réduira la part de la France, qui a considérablement développé l'aéronautique sur le continent, mais a déjà cédé la plus grande partie de son industrie dans le consortium EADS. 

    Le plus grand danger est de s'imaginer que son pays "n'a pas les moyens" car c'est la porte ouverte aux pires renoncements et aux compromissions les plus abjectes. C'est pourquoi, il est indispensable de cesser de faire de la défense la variable d'ajustement du budget et tout mettre en œuvre pour maintenir et consolider un effort militaire qui, du reste, a toujours été à la pointe de la recherche et un formidable créateur d'emplois directs et indirects. 

    Plus que jamais, la défense nationale reste le prix de la liberté.

    Charles SAINT-PROT (Theatrum Belli, 28 septembre 2012)

    Lien permanent Catégories : Points de vue 0 commentaire Pin it!
  • Le Qatar et la banlieue...

    Vous pouvez regarder ci-dessous une très bonne chronique d'Éric Zemmour sur RTL, datée du 25 septembre 2012 et consacrée à la question du fond d'investissement du Qatar pour les banlieues...

    Lien permanent Catégories : Multimédia, Points de vue 0 commentaire Pin it!