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occident - Page 22

  • Alain de Benoist : La force du religieux, le pouvoir de mobilisation de la religion nous échappent...

    Nous reproduisons ci-dessous entretien avec Alain de Benoist, cueilli sur Boulevard Voltaire et consacré au djihadisme et à ses causes...

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    Alain de Benoist : Djihadisme et choc des civilisations ? Une formule fourre-tout

    Le djihadisme à la sauce Daech fait la une des gazettes, non sans raison. Mais de quoi s’agit-il exactement ?

    L’État islamique reste à bien des égards une énigme. Ce n’est pas un État, bien qu’il en ait certaines caractéristiques. Ce n’est pas un mouvement terroriste (il mène avant tout une guerre conventionnelle), mais il a aussi recours au terrorisme. Il se donne pour islamiste, mais quand on examine la liste de ses dirigeants, on ne trouve pratiquement aucun islamiste, mais plutôt des cadres déchus de l’ancien État irakien. Xavier Raufer le décrit comme une « armée mercenaire », ce qui n’est probablement pas faux, mais mercenaire au service de qui ?

    Le recours au « choc des civilisations » permet-il de mieux expliquer les choses ?

    Le « choc des civilisations » n’est qu’une formule dans laquelle chacun met ce qu’il veut. La principale faiblesse des explications « culturalistes » des conflits est de faire l’impasse sur les logiques politiques qui conduisent à ces conflits, et aussi de faire oublier que l’immense majorité des conflits ont toujours eu lieu (et continuent d’avoir lieu) au sein d’une même civilisation.

    Voir dans le djihadisme un phénomène qui s’inscrirait dans la lignée des conquêtes musulmanes ou ottomanes des siècles passés revient à faire abstraction d’un contexte totalement nouveau. Moins qu’un affrontement entre l’Occident et l’islam, j’y vois plutôt la reconstruction conflictuelle de deux imaginaires également travaillés par le déracinement et la mondialisation, ce qui permet de comprendre pourquoi le djihadisme manifeste si souvent une mentalité qui retourne la modernité contre elle-même (les djihadistes sont des modernes malgré eux). J’y vois moins un conflit entre une appartenance universaliste et une identité particulière qu’une lutte entre deux universalismes rivaux.

    Il faut aussi faire la part d’une immense frustration – qui n’est pas seulement de l’ordre de la frustration sexuelle. Il y a une envie et un amour frustré d’Occident dans la volonté destructrice (et autodestructrice) de le jeter à bas. La volonté des islamistes de recourir au djihadisme pour condamner sans appel une société par laquelle ils estiment avoir été eux-mêmes condamnés explique le continuum entre violence sociale de droit commun et violence politico-religieuse. La logique du ressentiment, le renversement classique du désir frustré en agressivité, aboutissent très logiquement à ce qu’Alain Badiou décrit comme un « mélange de propositions héroïques mortifères et, en même temps, de corruption occidentale ».

    Le père Hervé Benoît a été mis à pied par l’archevêque de Lyon, Mgr Barbarin, pour avoir publié une tribune dans laquelle il mettait en regard ceux qui ont trop de religion et ceux qui n’en ont pas assez. Peut-on placer sur le même plan deux sortes de zombies, les uns en proie à un hédonisme échevelé, les autres cherchant à transcender le vide de leur existence par un idéal religieux, fût-il dévoyé ?

    Sans doute, mais il faut aller plus loin. Les membres de Daech ne se présentent ni comme des résistants ni comme des rebelles (il n’y a aucun potentiel émancipatoire dans la violence fondamentaliste), mais comme des soldats d’une armée divine. C’est ce que nous ne parvenons pas à comprendre. Et c’est pour cela que nous nous obstinons à ne voir dans ces jusqu’au-boutistes de la vérité que des paumés ignorants, des barbares, des déséquilibrés ou des fous (d’où l’idée qu’ils n’ont « rien à voir avec l’islam »).

    Comme le dit Marcel Gauchet, nous sommes sortis de la religion, non pas au sens où il n’y aurait plus de croyants, mais en ce sens que les valeurs religieuses ne sont plus la clé de voûte de la société, qu’elles ne constituent plus le mode de structuration hétéronome des communautés humaines. La privatisation de la foi, la montée d’une laïcité qui tend à rabattre la croyance sur la sphère privée, sinon sur le for intérieur, sont allées de pair avec un apaisement de la façon dont l’engagement religieux est vécu par les croyants eux-mêmes.

    L’Église ne cherche plus à lancer des croisades, et ses fidèles résistent en général très bien à l’appel des sirènes de la violence sacrée. Nous avons oublié les épisodes de fanatisme religieux de notre propre histoire, les époques où l’on trouvait normal de tuer ad majorem Dei gloriam.

    Nous avons du mal à comprendre que des hommes veulent tuer et se faire tuer aussi vite que possible parce qu’ils pensent que c’est le moyen le plus sûr d’accéder au paradis. Les chrétiens eux aussi estiment que la mort ouvre la porte de la vie éternelle, mais ils ne sont en général pas très pressés de mourir. Persuadés que la foi est affaire de croyance personnelle, nous ne parvenons pas à imaginer que le religieux puisse être le moteur d’actions meurtrières. Nous avons tendance à y voir un alibi, une légitimation de surface. La force du religieux, le pouvoir de mobilisation de la religion nous échappent. Nous avons oublié le sens profond du théologico-politique.

    Une certaine gauche, depuis l’époque des Lumières, s’imagine de son côté que la religion, considérée comme « superstition » ou obscurantisme archaïque (Lénine parlait de « brouillard mystique »), est appelée à s’éteindre du fait des progrès de la science et de la raison – ce qui est absurde puisque la science, par définition, ne s’intéresse pas au pourquoi (elle ne s’occupe que du comment). Cette idée que la croyance est une chimère sans consistance nourrit notre conviction qu’aucun absolu ne mérite qu’on tue en son nom.

    C’est ce que dit très bien Jean Birnbaum dans son dernier livre : « Comment la gauche, qui tient pour rien les représentations religieuses, pourrait-elle comprendre la haine funeste de ces hommes vis-à-vis des chrétiens, leur obsession complotiste à l’égard des juifs, mais aussi la guerre à mort qui oppose chiites et sunnites à l’intérieur même de l’islam ? Comment pourrait-elle accepter que le djihadisme constitue désormais la seule cause pour laquelle des milliers de jeunes Européens sont prêts à aller mourir loin de chez eux ? » Plutôt que de répéter des banalités, c’est à cela qu’il faudrait réfléchir.

    Alain de Benoist, propos recueillis par Nicolas Gauthier (Boulevard Voltaire, 1er avril 2016)

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  • Au-delà des droits de l'homme...

    Les éditions Pierre-Guillaume de Roux viennent de rééditer un essai d'Alain de Benoist intitulé Au-delà des droits de l'homme - Pour défendre les libertés. Philosophe et essayiste, Alain de Benoist dirige les revues Nouvelle Ecole et Krisis et anime l'émission Les idées à l'endroit sur TV Libertés. Il a récemment publié Les démons du Bien (Pierre-Guillaume de Roux, 2013), un essai consacré à l'idéologie du genre, ainsi que Survivre à la pensée unique (Krisis, 2015), un livre d'entretien avec le journaliste Nicolas Gauthier.

     

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    " « Le sacre des droits de l'homme », a écrit Marcel Gauchet, « est à coup sûr le fait idéologique et politique majeur de nos vingt dernières années. » Les droits de l'homme tendent, en effet, à devenir la boussole unique d'une époque désorientée. Ils auraient même un caractère sacré. C'est pourquoi il paraît désormais aussi inconvenant, aussi blasphématoire de critiquer l'idéologie des droits de l'homme qu'il l'était autrefois de douter de l'existence de Dieu. Mais aujourd'hui, le discours des droits de l'homme n'a pas seulement pour but de fournir une idéologie de substitution après l'effondrement des " grands récits ". En cherchant à imposer une norme morale particulière à tous les peuples, il vise à redonner bonne conscience à l'Occident en lui permettant de s'instituer une fois de plus en modèle et de dénoncer comme des " barbares " ? ceux qui refusent ce modèle. Dans l'Histoire, les " droits " n'ont été que trop souvent ce que les maîtres de l'idéologie dominante avaient décidé de définir ainsi. Que les droits de l'homme soient proclamés avec force dans une société de plus en plus déshumanisée, où les hommes tendent eux-mêmes à devenir des objets, où la marchandisation des rapports sociaux crée partout des phénomènes d'aliénation inédits n'est pas un hasard. Associé à l'expansion des marchés, le discours des droits de l'homme constitue l'armature idéologique de la globalisation. Il est avant tout un instrument de domination et doit être regardé comme tel. Les hommes doivent pouvoir lutter partout contre la tyrannie et l'oppression. Contester l'idéologie des droits de l'homme, ce n'est donc évidemment pas plaider pour le despotisme, c'est bien plutôt contester que cette idéologie soit le meilleur moyen d'y remédier. C'est s'interroger sur la validité des fondements de cette théorie, sur le statut nomologique de ces droits, sur les possibilités d'instrumentalisation dont ils peuvent faire l'objet. C'est aussi proposer une autre solution. La question des libertés ne saurait se résoudre en termes de droits ou de morale. Elle est avant tout une question politique. Elle doit être résolue politiquement. "

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  • Le retour de Pan ?...

    Les éditions Arché ont récemment publié un essai de Stéphane François intitulé Le retour de Pan - Panthéisme, néo-paganisme et antichristianisme dans l'écologie radicale. Docteur en sciences politiques et historien des idées, Stéphane François est maître de conférences à l’université de Valenciennes et est déjà l'auteur de plusieurs essais comme  L'Écologie politique - Une vision du monde réactionnaire ? (Cerf, 2012), Au delà des vents du nord : L'extrême droite, le pôle nord et les indo-européens (PUL, 2014) et Les mystères du nazisme - Aux sources d'un fantasme contemporain (PUF, 2015).

     

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    " Dans cet ouvrage, l’auteur montre que l’écologie radicale, prise dans sa globalité, est profondément antichrétienne, le christianisme étant à l’origine, selon les partisans de cette écologie, de la rupture du lien entre humanité et nature.

    A contrario, elle est empreinte de sympathie, voire plus, pour Ie paganisme, cette spiritualité respectant, selon les mêmes, ce lien.

    De cet intérêt pour le paganisme découle une conception cohérente du monde, de nature romantique, rejetant l’Occident et les valeurs libérales (comprises dans leur acception politique et philosophique). Au terme de son analyse l’auteur montre, malgré Ie procès à charge organisé par les écologistes radicaux, que le christianisme, dans ses variantes catholiques, protestantes et orthodoxes, a réfléchi à une écologie conciliant foi et respect de la nature. "

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  • L’appartenance ethnique, au fondement des sociétés...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Cédric Bellanger, cueilli sur Polémia et consacré à la question taboue de l'appartenance ethnique...

     

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    L’appartenance ethnique, au fondement des sociétés

    Chaque société a ses tabous, surtout quand elle ne prétend pas en avoir. L’Occident hypermoderne a fort logiquement prohibé l’évocation de la question ethnique, qui est le démenti de son paradigme central, le triptyque rationalisme-individualisme-universalisme.

    Pourtant, la vigueur, osons dire l’hystérie, qui anime les gardiens dudit tabou indique la fébrilité des Occidentaux face à une réalité qu’aucune formule magique, qu’aucun volontarisme ne parviennent à éradiquer.

    Au fond, les simulacres de débats sur les questions dites de société comme la laïcité ou la délinquance ne sont que de longues et pénibles périphrases qui n’évoquent, tout le monde le sait, que la question ethnique, mais sans jamais prononcer le mot honni. L’admettre, même tacitement, c’est déjà reconnaître la nature et, partant, l’origine du problème.

    Intellectuels, experts, spécialistes ou publicistes tournent autour du pot, effleurent la question et au dernier moment se ravisent, y compris les plus lucides. De temps à autres, un téméraire ou un naïf propose une connexion, une causalité, qui peuvent prendre le nom d’islam ou d’immigration, pour se voir rétorquer les mots magiques : « amalgame », «stigmatisation». C’est ainsi que se prolongent indéfiniment les palabres républicaines.

    Les tabous, s’ils ont souvent leur utilité et leur raison d’être, voient parfois leurs fondements tellement sapés par la marche du Monde qu’ils deviennent un facteur de blocage potentiellement mortifère. Cette tendance à s’accrocher à des tabous obsolètes, à laquelle aucune civilisation ne peut prétendre se soustraire, s’explique aisément par la nécessité qu’ont les sociétés à élaborer un récit cohérent de leur devenir.

    Chaque société se pense en effet dans un champ relativement clos. La formulation d’une vision du monde, si complexe soit-elle, implique nécessairement la négation d’une portion de réel – ainsi, le marxisme a pu nier l’autonomie du religieux ou du culturel, vus comme simples reflets d’un ordre socio-économique. Le monde est trop complexe pour être embrassé totalement ; aussi, lorsque nous le pensons, nous trions, rejetons puis nions l’existence des éléments entrant en contradiction avec nos représentations. Bref, penser le monde, c’est, par le biais d’une narration linéaire et souvent unidimensionnelle, évacuer une part plus ou moins importante de ses composantes pour le rendre intelligible et par conséquent vivable.

    Indépassable limite de l’intelligence humaine !

    En cela, l’hyper-modernité occidentale ne déroge pas au schéma d’ensemble.

    Son moteur – le couple rationalisation/individualisation – suppose la négation de ce qui l’entrave : pas tant l’existence de groupes (la société au sens de Tönnies est avant tout perçue comme une association libre d’individus indépendants) que la survivance de communautés organiques, non choisies, qui s’imposent à l’individu car elles le précèdent, le déterminent et le perpétuent.

    L’individu-maillon communautaire n’a pas sa place dans la grande mythologie hyper-moderne, qui porte aux nues l’individu émancipé de tous les déterminismes, à l’identité rhizome, dont l’horizon ne peut être qu’universel. Or, à l’épreuve des vicissitudes de l’histoire, la résilience de telles communautés, essentiellement définies sur des critères ethniques, nous paraît incontestable : des éléments structurels l’expliquent.

    1/ L’ethnie, dans son principe comme dans sa réalité, ne se choisit pas et donc ne se défait pas.
    On peut adhérer à un système de croyances ou de représentations, puis s’en détacher. Il peut alors ne rester aucune trace de cette adhésion ; l’individu ne s’en trouve pas ontologiquement affecté, et l’adhésion audit système de représentations n’aura été qu’un moment, achevé et non structurant, dans l’existence longitudinale de l’individu. Au contraire, l’identité ethnique, qui est factuellement un lien de filiation, peut être défaite en pensée mais pas effacée irrémédiablement. Un individu peut bien nier radicalement son identité ethnique, la potentialité d’un retour à celle-ci demeure toujours possible. Aucun cliquet ne rend impensable sa résurgence.

    2/ L’ethnie est également prégnante car elle résiste aux mutations idéologiques. Elle n’obéit pas, contrairement aux religions et idéologies, à un régime de vérité : une foi ou une théorie peuvent tomber en déshérence, pas une filiation qui contient en elle toute sa vérité. Ainsi, elle survit au temps court de l’histoire, aux idéologies, aux utopies : soixante-dix ans de communisme n’ont pas éteint l’âme russe, et en soixante ans, c’est la Chine qui a absorbé le maoïsme – le retour à Confucius ou à l’orthodoxie (qui est un christianisme national à forte valeur identitaire) en témoignent.
    Presque immobile du point de vue des sociétés historiques, l’appartenance ethnique est le seul ferment identitaire qui ne peut s’épuiser tant que le peuple vit biologiquement.

    3/ C’est que l’ethnie correspond à un ensemble complet de référents qui intègre le corps et l’esprit : loin de se limiter à une noosphère éthérée, elle se lit sur la peau, sur le visage, dans l’ADN – autant de traces indélébiles qui, à défaut d’être structurantes en elles-mêmes (le sait-on vraiment ? peu importe) peuvent toujours être réactivées comme un signe incontestable et fixe (à notre échelle temporelle) d’appartenance. On observe la puissance de ce référent visuel qu’est le phénotype dans la tendance à l’ethnogenèse des minorités noires issues de l’esclavage dans le Nouveau Monde, coupées de leurs racines culturelles (langues, religions, systèmes de parenté…) mais qui re-forment un groupe ethnique (et pas seulement racial) par une appropriation détournée des codes sociaux majoritaires. D’où leur propension à se tourner vers une religion tout aussi minoritaire, comme l’illustre le succès des Églises évangéliques – voire d’un l’islam racialisé – chez les populations noires d’Amérique et des Antilles. Ici, la race (disons, le phénotype) va de pair avec l’ethnicisation, processus auquel le religieux semble soumis (car sur le fond, rien ne justifie, d’un point de vue théologique, l’existence de communautés religieuses « noires »).

    4/ Aussi, l’appartenance ethnique conserve sa primauté car elle repose sur des liens de sociabilité plus solides que les autres, ayant pour cadre la famille (rappelons que l’appartenance ethnique est avant tout un fait de filiation). Les liens familiaux – parenté large ou étroite – ont comme force de ne pas relever d’un choix. On ne change pas de famille comme de parti. La famille est en outre une structure au fonctionnement relativement consensuel, dont l’organisation tend à atténuer la conflictualité inhérente aux relations sociales, ce qui la rend plus solide et durable. Bref, tant que la famille, sous des formes variées, reste la cellule de base de l’existence d’un peuple, l’identité ethnique n’est pas irrévocablement menacée, et peut toujours ressurgir.

    5/ Enfin, on devine un trait commun aux quatre points évoqués, qui les explique, les résume et leur donne toute leur perspective : l’appartenance ethnique est prégnante, incroyablement résiliente, car elle se situe dans le domaine de l’immanence. Elle ne se définit pas donc ne se contredit pas ; en deçà et au-delà de l’intellectualité, elle ne peut être réfutée sur la base d’arguments rationnels. Les origines des peuples se dérobent à la connaissance scientifique ; il est donc parfaitement vain d’en railler le caractère mythique. Cette absence de définition notionnelle et empirique précise explique la grande plasticité du fait ethnique, qui lui permet de se fondre dans un moule et d’en changer quand celui-ci est brisé : un sentiment ethnique peut se loger dans une idée (nationale, religieuse, politique) jusqu’à paraître dominé par celle-ci, mais presque toujours il lui survivra. La succession des rhétoriques anti-impérialistes des anciennes colonies, tour à tour nationaliste, socialiste ou religieuse, l’illustre de façon implacable.

    Par-delà les thématiques a perduré l’expression du particularisme ethnique de groupes qui ne veulent ni ne peuvent être dissous.

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    Au final, si nous arrivons à la conclusion que l’appartenance ethnique prime sur les autres, et qu’elle contribue au maintien des solidarités organiques en dépit du processus d’atomisation sociale qui caractérise l’hypermodernité, c’est qu’elle définit un nous cohérent et un eux bien délimité. L’existence d’une frontière entre les deux entités est une nécessité anthropologique absolue ; pour reprendre la métaphore de Régis Debray, cette frontière, qui peut être visible ou invisible, est aux sociétés ce que la peau est au corps : une protection, un filtre et une interface.

    L’hypermodernité prétend se passer de cette frontière et de son contenu comme éléments structurant la vie sociale ; un monde d’individus faisant société, harmonieusement, par des choix rationnels libres et consentis en est la finalité. Le spectacle du monde laisse perplexe quant à la réalisation de ce dessein.

    Cédric Bellanger (Polémia, 28 février 2016)

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  • Le déclin du courage...

    Les éditions des Belles Lettres viennent de rééditer Le déclin du courage, le texte d'un célèbre discours d'Alexandre Soljenitsyne. Ancien dissident soviétique, avant de devenir un dissident de l'Occident, passé par le Goulag, Alexandre Soljenitsyne est l'auteur d'Une journée d’Ivan Denissovitch ou de L'archipel du Goulag, mais aussi de La Roue rouge, son énorme récit romancé de la révolution russe et de ses prémisses...

     

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    " Le 8 juin 1978 Alexandre Soljénitsyne disait aux étudiants de l'université de Harvard :
    « Non, je ne peux pas recommander votre société comme idéal pour transformation de la nôtre. (…) Nous avions placé trop d’espoirs dans les transformations politico-sociales, et il se révèle qu’on nous enlève ce que nous avons de plus précieux : notre vie intérieure. À l’Est, c’est la foire du Parti qui la foule aux pieds, à l’Ouest la foire du Commerce : ce qui est effrayant, ce n’est même pas le fait du monde éclaté, c’est que les principaux morceaux en soient atteints d’une maladie analogue. » "

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  • La guerre des Amériques...

    Les éditions Perspectives libres viennent de publier un essai de Norman Palma intitulé La guerre des Amériques - Histoire de la domination occidentale de l'Amérique Latine. Économiste et philosophe, maître de conférence à la Sorbonne, Norman Palma a déjà publié plusieurs essais dont Autopsie d'un désastre économique (Perspectives libres, 2014).

     

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    " Pour comprendre le passé et le présent de l’Amérique latine, il faut comprendre que ce continent est passé d’une domination à l’autre. De l’empire espagnol à l’Empire du dollar, c’est l’histoire de cette domination et de la quête d’émancipation des peuples latino-américains que nous conte Norman Palma. C’est un hymne à Amérique latine et à sa liberté que nous propose l’auteur. "

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