Les éditions des Presses universitaires de France viennent de réédité, dans leur collection Quadrige, un essai de Jean-François Mattéi intitulé La barbarie intérieure. Professeur de philosophie grecque et de philosophie politique, Jean-François Mattéi, décédé en 2014, a notamment publié Le regard vide - Essai sur l'épuisement de la culture européenne (Flammarion, 2007) et Le sens de la démesure (Sulliver, 2009).
On trouvera un entretien avec Jean-François Mattéi, réalisé quelques mois avant sa mort, dans le dernier numéro de la revue Krisis (n°40 - mars 2015) consacré au thème de l'identité.
" «Nietzsche dénonçait en 1887 les excitants qui ravageaient son temps : erotica, socialistica, pathologica. On y reconnaîtra les trois métamorphoses d’'une même tendance à la régression : barbarica. La barbarie éternelle c'’est l'’informe, le matériau brut, la désolation qui crie la victoire du désert. Les Anciens avaient rejeté le barbare aux confins de la civilisation, les Modernes ont choisi une stratégie plus subtile : pour la dissoudre, la Raison a intégré la barbarie au fond d'’elle-même. En se coupant de la transcendance du sens, le sujet contemporain a engendré les formes de fragmentation psychologique et sociale les plus aberrantes. Les effets de barbarie se manifestent par la dissolution de l'’homme, l'’effondrement de l’'éducation, la destruction de la culture et l’'abolition du politique. Cette barbarie intérieure signe la faillite de l'’universel dans l'’avènement de “l’'immonde” moderne. Et s'’il n'’y a plus de déserts comme le regrettait Camus, c'’est que le désert a délaissé les horizons lointains pour assécher la civilisation en ce qu'’elle a de plus proche. Le désert est aujourd'hui au cœur de la cité parce que la barbarie est au cœur de la civilisation.» "