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  • Immigration : la délinquance est-elle vraiment le fond du problème ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Julien Dir cueilli sur Breizh-Info et consacré à la question de l'immigration de peuplement.

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    Immigration. La délinquance est-elle vraiment le fond du problème ?

    Depuis plusieurs décennies, les partis de droite comme les partis dits « patriotes » ou « identitaires » font leur soupe électorale notamment sur la question de l’immigration qu’ils lient, avec plus ou moins de force, à la délinquance qui explose littéralement dans tout l’Occident, quoi qu’en disent des « chercheurs » et autres « sociologues » aveuglés par leur propre idéologie.

    Le projet de loi sur l’immigration d’Emmanuel Macron, devrait d’ailleurs plaire à une partie de ces politiques, puisque le Président de la République entend à la fois sélectionner les futurs candidats à l’implantation dans l’hexagone, expulser une partie des délinquants (chose qui est actuellement non effective puisque l’Etat capitule en large majorité devant le panel de traités, de lois, et d’associations qui font barrage aux expulsions), mais aussi répartir l’immigration sur tout le territoire français. « Emmanuel Macron a aussi plaidé pour une meilleure répartition des étrangers sur le territoire français, notamment dans les « espaces ruraux, qui, eux, sont en train de perdre de la population », et a promis « d’améliorer l’efficacité des politiques de reconduite » à la frontière pour les étrangers en situation irrégulière » indique ainsi Le Monde.

    Le projet Horizon, bien engagé à Callac, dans les Côtes d’Armor, contre l’avis même d’une population locale qui n’a pas son mot à dire sur la question, apparait d’ailleurs comme la tête de pont de ce vieux rêve initié un temps par le Parti Socialiste, consistant à déconcentrer l’immigration extra européenne dans les métropoles, pour mieux l’étaler, la répartir partout dans les territoires y compris les plus ruraux. Toujours sous l’appellation « réfugiés » – pour mieux faire passer la pilule, comme si le migrant Malien ou Algérien avait un quelconque rapport avec le réfugié espagnol ou ukrainien fuyant la guerre.

    Toujours au prétexte de « redynamiser » des secteurs qui se meurent, forme d’aveu teinté de haine de son propre peuple, qu’il s’agit de remplacer progressivement une population autochtone sur le déclin, par une autre population, démographiquement plus jeune et que l’on veut faire passer pour plus vigoureuse.

    Mais face à ce remplacement de population annoncé (comment nommer autrement l’acte qui consiste à combler le vide laisser par une population autochtone majoritairement rurale et âgée par une population extra-européenne jeune ?), la « droite » au sens large, semble dépourvue d’argument franc.

    Car en effet, si les chiffres de la délinquance, et le lien avec l’immigration, ne sont même plus niés y compris par le Ministre de l’Intérieur M. Darmanin, il serait peut être temps d’aller plus loin, bien plus loin dans la critique de l’immigration, et de cibler sa conséquence principale à moyen et à long terme : le remplacement progressif d’une population autochtone, de cultures, de langues, d’histoire, de traditions, d’art de vivre, de façon de vivre ensemble, par d’autres, venues d’ailleurs.

    Sur les dizaines de millions d’étrangers extra-européens (qu’ils aient des papiers belges, français ou allemands d’ailleurs) qui sont aujourd’hui sur notre territoire (qui, si ils ont des papiers administratifs, est aussi le leur qu’on le veuille ou non du point de vue de la loi), une très large majorité d’entre eux ne sont pas des délinquants. Une très large partie d’entre eux ne sont pas des criminels en puissance. La plupart aspire, comme un bon nombre des autochtones de ce continent, à vivre tranquillement et à ce qu’on leur fiche la paix.

    C’est là qu’intervient l’argument principal qui devrait infuser dans la tête des autochtones de ce continent : même si les conséquences de l’immigration interpellent notamment à la vue de la délinquance exponentielle qui ravage les métropoles aujourd’hui, c’est de notre avenir en tant que Civilisation dont il est question. Et il faut avoir le courage de le dire : Au 1er janvier 2022, l’Union européenne comptait 446,8 millions d’habitants. Si ne serait-ce qu’un cinquième ou un sixième de cette population n’était plus demain, d’origine européenne mais bien extra-européenne,  alors progressivement, il y aurait un changement de paradigme dans nos contrées. Il faut le dire, encore et encore : il n y a pas que la question de la délinquance qui doit être mise sur la table (souvent à des fins plus électoralistes qu’avec de réelles volontés de traiter le problème à la racine). Il y a celle, fondamentale, d’avoir encore le pouvoir de décider avec qui, et à côté de qui,  nous souhaitons vivre au quotidien, et avec qui nous n’avons pas spécialement envie de partager nos terres ancestrales.

    Qu’il y ait deux famille d’extra-européens (mettons 12 personnes) dans un village de 2000 habitants, c’est à dire 0,6% de la population totale, ne pose en soi aucun problème en matière de projet commun, et même si délinquance il y avait, la question pourrait être résolue rapidement, avec les lois qui existent déjà. Qu’il y ait dix familles (donc 40 personnes selon le même calcul, c’est à dire 2% de la population) commence déjà à provoquer une différence. Qu’il y en ait 20 ou 30, et là, tout change, y compris le sentiment d’être ultra minoritaire et donc de vouloir s’intégrer sans bruit, qui peut rapidement se transformer en sentiment communautaire, mais aussi en influence (culturelle, linguistique, comportementale) sur une partie de la majorité. Il suffit de voir la vitesse fulgurante à laquelle la « culture banlieue » (c’est à dire une culture du ghetto diffusée majoritairement par des extra-européens) a percé à une vitesse folle y compris en fin fond de la ruralité (avec les conséquences qui vont avec en matière de mœurs et de culture), pour se rendre compte de l’influence que peuvent avoir ce qui ne constitue à la base que de petites minorités sur une communauté locale, régionale, nationale, civilisationnelle.

    L’homme de droite est honteux. Il n’ose pas affirmer clairement, sans aucune haine, sans aucun racisme non plus, qu’il ne croit pas à la fable, que dis-je, à la religion républicaine, et plus globalement à la religion « United Color of Benetton » du mélange et du métissage imposé. Pourtant, lui même dans la vie quotidienne (comme tous les humains sur cette planète) établit des préférences, familiales, amicales, conjugales…puis il discrimine, c’est à dire qu’il distingue et choisit, culturellement, linguistiquement, religieusement, ceux avec qui il a envie d’avancer et de vivre. Et ceux avec qui il n’a pas envie de le faire. Il en va de même pour la question ethnique, celle qui l’effraie le plus (il faut dire que les tribunaux ne sont jamais loin quand il s’agit de l’aborder, tout comme le lynchage médiatique, économique, et parfois social auquel conduit le fait d’aborder cette question).

    A cette question, les générations de sud-africains blancs qui partagent leurs terres avec les sud-africains noirs ont été obligés, contraints de rapidement répondre. L’exemple d’Orania en constitue un parmi beaucoup d’autres.

     Il sera sans doute difficile (impossible) de convaincre ceux qui veulent recréer (ou aboutir fatalement à) une nouvelle forme d’humanité, métisse, hybride, asexuée, et qui œuvrent pour cela au quotidien.

    Il sera compliqué de faire changer de vision ceux qui sont réellement persuadés, malgré le réel qui les frappe quotidiennement, que nous sommes tous des frères sur cette terre, et qu’il est possible de tous vivre ensemble dans la plus grande harmonie, qu’il n y a ni patrie, ni frontière, et que chaque morceau de terre appartient à tout le monde d’où qu’il vienne.

    Il est toutefois encore possible de faire ouvrir les yeux à ceux qui, et ils sont des millions en Europe (et des milliards de par le monde), ont conscience de qui ils sont, d’où ils viennent, et qu’il faut parvenir à convaincre que l’harmonie des peuples passe par le vivre chacun chez soi, et séparément des autres.

    Pour que demain, nos enfants, et les enfants de la planète entière, puissent vivre dans un monde multipolaire, multicivilisationnel, et apaisé, il devient urgent, vital, d’en finir avec l’immigration de peuplement. Pour vivre mieux, vivons séparés, chacun sur la terre de ses ancêtres.

    Julien Dir (Breizh-Info, 18 septembre 2022)

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  • Alain de Benoist : « La guerre qui se déroule actuellement en Ukraine est en fait une guerre des Etats-Unis contre la Russie »

    Nous reproduisons ci-dessous un entretien avec Alain de Benoist, cueilli sur Breizh-Info, dans lequel celui-ci donne son sentiment sur l'actualité récente, et notamment sur la guerre russo-ukrainienne.

    Philosophe et essayiste, directeur des revues Nouvelle École et Krisis, Alain de Benoist a récemment publié Le moment populiste (Pierre-Guillaume de Roux, 2017), Contre le libéralisme (Rocher, 2019),  La chape de plomb (La Nouvelle Librairie, 2020),  La place de l'homme dans la nature (La Nouvelle Librairie, 2020), La puissance et la foi - Essais de théologie politique (La Nouvelle Librairie, 2021) et L'homme qui n'avait pas de père - Le dossier Jésus (Krisis, 2021).

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    Alain de Benoist : « La guerre qui se déroule actuellement en Ukraine est en fait une guerre des Etats-Unis contre la Russie »

    Breizh-info.com : Tout d’abord, vous qui avez traversé la moitié du XXe siècle et le début du XXIe, diriez-vous que nous assistons actuellement, depuis quelques mois, à une accélération folle de l’histoire ?

    Tout dépend de quelle accélération vous parlez. Il y a incontestablement une accélération sociale, qui vient du fait que nous vivons aujourd’hui en temps zéro : tout événement qui se produit dans un endroit donné est immédiatement connu dans le monde entier. Cet accélérationnisme nourrit le présentisme (et le stress qui va avec) et a notamment pour conséquence de rendre éphémère tout ce qui auparavant cherchait à s’inscrire dans la durée. Mais cela concerne surtout les pays occidentaux : sous d’autres latitudes, on n’a pas nécessairement le même sens de la temporalité.

    Sur le plan historique, c’est plus complexe. On a effectivement le sentiment que beaucoup de choses sont en train de bouger, comme c’est souvent le cas lorsque différents cliquets jouent les uns sur les autres et déclenchent un ébranlement général. Mais s’agit-il vraiment d’une accélération ? On pourrait tout aussi bien penser qu’après une période glaciaire de quelques décennies, l’histoire reprend ses droits et que, comme dans toutes les époques de transition, on rebat les cartes. Mais il ne suffit pas de regarder ce qui se passe « depuis quelques mois », il faut aussi prendre un peu de recul. En l’espace de quatre ou cinq ans, il s’est plus passé d’événements sous la Révolution française qu’il ne s’en passe aujourd’hui ! Les processus en cours sont en outre loin d’être arrivés à leur terme. Sans vouloir cultiver le paradoxe, je leur trouve même une certaine lenteur… Quand on voit, par exemple, l’ampleur de la révolte sociale qui gronde, on se demande quand elle finira par éclater !

    Breizh-info.com : Que vous a inspiré l’assassinat de Darya Douguine, et le traitement médiatique occidental qui en a découlé ? Que pouvez-vous nous dire sur elle, mais aussi sur son père à qui on a voulu l’assimiler d’office comme s’il s’agissait presque du même personnage ?

    L’assassinat de Darya Douguine m’inspire ce qu’il devrait inspirer à tout homme normalement constitué : le dégoût qu’on ressent devant quelque chose d’abject. Les réactions des médias, elles, suscitent plutôt en moi un sentiment d’effroi. Que certains puissent trouver « remarquable » l’atroce attentat dont cette jeune intellectuelle, journaliste et philosophe – qui n’avait jamais fait qu’exprimer des idées –, a été la victime, certains n’hésitant même pas à s’en réjouir, montre que nous vivons dans le monde où, comme le disait Guy Debord, le vrai n’est plus qu’un moment du faux. C’est un monde orwellien, le monde de la terreur au nom du Bien.

    J’ai bien connu Darya, comme j’ai bien connu son père. C’était une jeune femme délicieuse, charmante, intelligente, cultivée, intense, dotée d’un vif sens de l’humour, qui adorait la France depuis son adolescence. Elle adhérait en effet totalement aux idées de son père, mais elle en donnait une image plus légère, comme régénérée par l’eau fraîche. Quant à Douguine, son itinéraire et ses idées sont aujourd’hui bien connus, notamment pour ce qui concerne la géopolitique et l’eurasisme. On peut être en désaccord avec sa pensée, mais on ne peut nier qu’il s’agisse d’une pensée personnelle, qui ne s’est jamais ramenée à ânonner les slogans de tel ou tel milieu. C’est à mes yeux l’essentiel.

    Breizh-info.com : La guerre en Ukraine semble faire perdre la raison à beaucoup. On sent une haine par procuration entre « supporteurs » d’un camp ou de l’autre, quasi pathologique désormais. Comment expliquez-vous cela ?

    Je suppose que cela s’explique par la nature humaine. Peu d’hommes sont capables de faire la guerre sans haine, malheureusement. Mais dans le cas des « supporteurs », je crains que cette haine ne traduise bien souvent leur incapacité à décider de façon raisonnable de leurs positions et à argumenter pour les expliquer. En pareille occasion, beaucoup se déterminent par leurs sympathies ou leurs antipathies. Or, la sympathie et l’antipathie n’ont rien à faire en la circonstance. Seule importe l’analyse (on met les pour en abscisse et les contre en ordonnée) et les conclusions qu’on peut en tirer. Les gens de droite, je l’ai souvent écrit, ne sont pas des réflexifs, mais des réactifs. Au début de l’année, on les a vus s’emballer pour la candidature Zemmour alors qu’il suffisait d’en faire l’analyse pour comprendre que celle-ci déboucherait sur un échec. Il y a certes loin de la candidature Zemmour à la guerre en Ukraine, mais les réflexes sont les mêmes.

    Je n’ai pour ma part aucune sympathie pour le sinistre président Zelensky, mais j’en ai beaucoup pour le peuple ukrainien, qui se retrouve aujourd’hui bombardé en raison des orientations désastreuses de son gouvernement. Mais que montre l’analyse ? Que la guerre qui se déroule actuellement en Ukraine est en fait une guerre des États-Unis contre la Russie. La question n’est donc pas de savoir si l’on préfère les Ukrainiens ou les Russes, mais si l’on se sent ou non solidaire de l’Amérique. Le choix me semble alors pouvoir être vite fait.

    Breizh-info.com : Les répercussions en Occident, en plus des conséquences de la crise économique liée aux politiques covidistes, vont être énormes. Qu’avez-vous perçu dans le discours récent de M. Macron, qui, tel un mauvais Churchill, semble annoncer à son peuple du sang, de la sueur et des larmes ?

    Je pense qu’Emmanuel Macron a pris conscience de la gravité de la situation, mais qu’il sait en même temps qu’il ne peut plus revenir en arrière sans se déjuger. Il n’est que trop évident que les sanctions contre la Russie – des sanctions d’une ampleur encore jamais vue – auront les Européens pour premières victimes, puisque ces derniers sont moins autosuffisants que les Russes. Comme l’a dit Viktor Orban, l’Union européenne s’est « tiré une balle dans le poumon » en s’engageant dans une voie suicidaire et totalement contraire à ses intérêts industriels et énergétiques. S’y ajoute la menace de crise financière mondiale, qui est plus présente que jamais. Et aussi, disons-le, le risque d’une extension de la guerre jusqu’à un point qu’on peut seulement imaginer. Aujourd’hui, Macron cherche des arguments pour imposer le rationnement comme, au moment du Covid, il en a cherché pour imposer l’enfermement. Cela ne suffira pas à éviter le lent glissement vers le chaos.

    Breizh-info.com : La classe politique française est-elle selon vous aujourd’hui compétente, suffisamment qualifiée, pour être à la hauteur demain d’événements qui s’annoncent épiques mais aussi dramatiques pour nos populations ?

    La réponse est dans la question, et vous la connaissez aussi bien que moi. L’élément essentiel en politique est la décision, alors que la classe politique n’a été formée que pour la gestion. L’imprévu, le cas d’exception, la laissent ahurie comme un lapin pris dans les phares. La décision n’est pas affaire de dossiers techniques et de rapports d’experts. Elle requiert un sens quasi physiognomique. Il s’agit de prendre la mesure d’un moment historique, d’évaluer les rapports de force et de déterminer ce qu’il faut faire en fonction de la finalité qu’on s’est fixée. Les hommes d’État savaient faire cela, les politiciens ne le savent pas. Cela dit, on pourrait aussi se poser la question de savoir pourquoi les hommes qui ont le sens de la décision se dirigent aujourd’hui de plus en plus vers des domaines autres que la sphère politique. On s’apercevrait alors qu’en dernière analyse, la médiocrité de la classe politique est le résultat direct de la dévaluation du politique.

    Alain de Benoist, propos recueillis par Yann Vallerie (Breizh-Info, 6 septembre 2022)

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  • Feu sur la désinformation... (385)

    Vous pouvez découvrir ci-dessous un numéro de l'émission I-Média sur TV libertés consacrée au décryptage des médias et animée par Jean-Yves Le Gallou, président de la fondation Polémia, et Jules Blaiseau.

    Au sommaire :

    • 1 - L'image de la semaine
      Découvrez avec nous les images des manifestations de dimanche dernier à Belgrade. Des événements boudés par la presse française.
    • 2 - Algérie : Macron fait le paillasson
      Le déplacement officiel de Macron en Algérie est un véritable succès ! Du moins à en croire nos chers médias nationaux. Les médias algériens et les images sur place racontent une autre version de l'histoire. Revenons ensemble sur l'humiliation de Macron à Alger.
    • 3 - Revue de presse
    • 4 - Hassan Iquioussen : l'imam en cavale
      Voilà un feuilleton dont les médias ont raffolé cet été : l'âpre bataille judiciaire entre Gérald Darmanin et Hassan Iquioussen. L'imam, proche des Frères Musulmans, est aujourd'hui en cavale. Retour sur la plus grosse opération de communication de l'été.

     

                                               

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  • Feu sur la désinformation... (383)

    Vous pouvez découvrir ci-dessous un numéro de l'émission I-Média sur TV libertés consacrée au décryptage des médias et animée par Jean-Yves Le Gallou, président de la fondation Polémia, et Jules Blaiseau.

    Au sommaire :

    • 1 - L'image de la semaine
      Avez-vous entendu parler des manifestations néerlandaises qui mobilisent des dizaines de milliers d’agriculteurs en protestation contre les nouvelles mesures anti-agricoles de leur gouvernement ? Si vous ne suivez que les médias de grand chemin, certainement pas ! C’est notre image de la semaine.
    • 2 - Macron fait son Narcisse sur France 2
      Nous savons qu’Emmanuel Macron est un adepte des apparitions médias trafiquées et des mises en scène grotesques et narcissiques de sa personne, en témoignent ses vidéos de campagne ou encore ses séries de portraits-photos dont le monde entier rit. Un reportage de France 2 de la semaine passée, "Un Président, l'Europe et la Guerre", est d'ores et déjà un grand classique en matière de mise en scène théâtrale et clownesque du président. Jean-Yves Le Gallou décortique en profondeur ce monument de propagande.
    • 3 - Revue de presse
      Les immigrés sont-ils surreprésentés dans la publicité ? Jean-Yves Le Gallou s'appuie sur la dernière vidéo de Nicolas Faure et dénonce le projet commun de promotion de l'immigration des médias et magnats de la pub !

     

                                            

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  • Alain de Benoist : « Ceux qui récusent l’existence de deux blocs iront dans le mur »...

    Nous reproduisons ci-dessous un entretien donné par Alain de Benoist à la revue Le Nouveau Conservateur, cueilli sur le site de la revue Éléments, et consacré, en particulier, au bilan politique des élections présidentielles.

    Philosophe et essayiste, directeur des revues Nouvelle École et Krisis, Alain de Benoist a récemment publié Le moment populiste (Pierre-Guillaume de Roux, 2017), Contre le libéralisme (Rocher, 2019),  La chape de plomb (La Nouvelle Librairie, 2020),  La place de l'homme dans la nature (La Nouvelle Librairie, 2020), La puissance et la foi - Essais de théologie politique (La Nouvelle Librairie, 2021) et L'homme qui n'avait pas de père - Le dossier Jésus (Krisis, 2021).

     

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    Alain de Benoist : « Ceux qui récusent l’existence de deux blocs iront dans le mur »

    LE NOUVEAU CONSERVATEUR : Commençons par la surface. Dans les termes que nous utilisons, l’actuelle séquence électorale aboutira sans doute à la pulvérisation de la droite, et à l’assemblée sans doute la plus à gauche de toute notre histoire politique depuis qu’existe le suffrage universel. On ne peut qu’être frappé depuis plusieurs années par la déliquescence des partis traditionnels. Ce furent ceux de gauche (PCF, PS), puis ceux de droite (UMP, LR). Qu’en penser ? Comme vous n’accordez pas beaucoup d’importance au clivage droite-gauche (et même le récusez), je devine que vous décririez différemment le nouveau tableau politique…

    ALAIN DE BENOIST. Pas très différemment, mais en replaçant les choses dans une plus longue durée. Vous parlez à juste titre de la « déliquescence » de ces grands partis qu’on dénommait naguère « partis de gouvernement ». Dans la plupart des pays européens, mais tout particulièrement en France, ces partis traditionnels, qui avaient gouverné en alternance depuis des décennies, voient en effet leur marge de manœuvre se réduire comme peau de chagrin pour des raisons à la fois politiques et sociologiques auxquelles la montée des populismes n’est pas étrangère. En France, cette tendance s’est accélérée de façon spectaculaire. L’élection présidentielle de 2017 a marqué l’effondrement du PS, l’élection présidentielle de 2022 celui de LR. Or, ces partis qui disparaissent sous nos yeux sont aussi ceux qui constituaient les vecteurs principaux du clivage droite-gauche. On ne peut pas séparer ces deux faits l’un de l’autre. La preuve en est qu’en 2017 comme en 2022, les deux finalistes avaient en commun de ne pas se situer par rapport au clivage droite-gauche. Ce n’est pas un hasard – mais c’est une première dans l’histoire de la Ve République. La leçon qu’il faut en tirer est que ce clivage droite-gauche, même s’il survit dans certains esprits, est aujourd’hui devenu obsolète. Il continue à jouer à la marge, mais de nouveaux clivages se sont imposés.

    Au premier tour de la dernière présidentielle, trois candidats ont franchi la barre des 20 %. Les autres se situaient entre 7 % et 0 %. Entre 7 % et 20 % : rien du tout ! C’est aussi cela qui est significatif. Quant au second tour, il a consacré l’existence de deux blocs désormais bien identifiés : un bloc populaire (ou national-populaire), regroupant l’essentiel des classes populaires et une partie des classes moyennes aujourd’hui en voie de déclassement, sinon de disparition, et un bloc élitaire ou bourgeois, rassemblé autour de Macron, sans équivalent depuis la monarchie de Juillet. Emmanuel Macron a été l’élu des riches et des vieux, ou si l’on préfère des libéraux de droite et de gauche, de la bourgeoisie d’affaires, de la bourgeoise intellectuelle, de la classe managériale, des notables de province et des retraités aisés. L’installation de ces deux blocs est aujourd’hui la principale donnée de la vie politique française. Ceux qui ne veulent pas l’admettre iront dans le mur.

    Vous parlez de la probable arrivée au Parlement de « l’assemblée la plus à gauche de toute notre histoire politique depuis qu’existe le suffrage universel ». Cela montre que vous vous illusionnez sur la « menace Mélenchon ». Celui-ci n’a dû son relatif succès du premier tour qu’à l’effondrement ou la dispersion façon puzzle des formations de gauche. Il a donc bénéficié d’un vote utile (Mélenchon faute de mieux), lequel n’est qu’un vote de circonstance. Sa nouvelle Union populaire n’est rien d’autre qu’une fédération de ruines et de restes : un PS en voie de disparition, un PC rachitique, des écolos à la ramasse. Rien à voir avec un nouveau Front populaire ! Quant à la France insoumise, je ne lui prédis pas un bel avenir, en raison de son hétérogénéité. LFI bénéficie actuellement du vote des quelques populistes de gauche restés sur les positions de Mélenchon 2017 (ce sont eux qui ont voté Marine Le Pen au second tour), d’une partie d’une vote musulman et communautaire, de celui des bobos indigénistes ou « wokistes », et de celui d’un certain nombre de jeunes diplômés sans revenu (ou à faible revenu). Tout cela ne fait pas un ensemble cohérent. Mélenchon, qui a contribué à la réélection de Macron, est devenu un « diviseur des classes populaires face à la bourgeoisie » (Jérôme Sainte-Marie). Cela veut dire qu’il n’y a pas un « bloc mélenchonien » comparable au bloc populaire et au bloc élitaire, et qu’il y a toutes chances pour que ses composantes se dispersent à nouveau à la première occasion.

    LE NOUVEAU CONSERVATEUR : Peut-on dire que ce qui surnage, LREM (recomposée en Renaissance), Reconquête ! et RN (celui-ci est curieusement le moins atteint de tous), sont de véritables partis ? Que pourrait-il s’y substituer ? À moins que toutes les formes actuelles de la représentation politique soient obsolètes…

    ALAIN DE BENOIST. Je pense que la forme-parti est elle aussi devenue obsolète. Quand on se penche sur l’histoire des partis politiques, qui ont fait depuis plus d’un siècle l’objet d’innombrables études, on découvre une trajectoire révélatrice. L’appartenance à un parti était autrefois une forme importante de citoyenneté active, et les partis eux-mêmes étaient de véritables lieux d’échanges et de sociabilité. Dans les années 1950, le parti communiste français, qui était d’ailleurs à cette époque tout autant nationaliste qu’internationaliste, avait réussi à créer une véritable contre-culture. Aujourd’hui, les partis politiques sont devenus de simples machines à faire élire tel ou tel, et les « communicants » y font la loi. Leurs effectifs sont en outre devenus dérisoires, et les « vieux militants » (qui concevaient l’engagement politique sur le modèle de l’engagement sacerdotal) ont quasiment disparu. À quoi servent aujourd’hui les partis politiques ? On se le demande. Vous aurez peut-être remarqué que ni Marine Le Pen ni Macron ne se sont retrouvés deux fois de suite au second tour de la présidentielle grâce à leur parti !

    Mais vous avez raison, c’est la notion même de représentation politique qui doit être questionnée. Les démocraties libérales sont des démocraties représentatives, un trait plus libéral qu’il n’est vraiment démocratique. Rousseau avait fait une critique du système représentatif, à laquelle je souscris entièrement. Faute de mandat impératif, faisait-il observer, le peuple se dessaisit de sa souveraineté au moment de l’élection pour la transférer à ses représentants, qui en usent ensuite à leur guise. Carl Schmitt a consacré plusieurs livres à cette question de la représentation. Sa conclusion est qu’un peuple est politiquement d’autant plus présent à lui-même qu’il n’a pas besoin d’être représenté.

    LE NOUVEAU CONSERVATEUR : Ne trouvez-vous pas qu’il y a une sorte de paradoxe dans la perpétuation du rite électoral – notamment présidentiel – qui a mobilisé bien des énergies, fait couler abondamment d’encre et de salive pendant près d’une année, tout cela pour aboutir à presque rien – et d’autant moins que la post-modernité soumet sans cesse davantage les États à des pouvoirs plus puissants qu’eux (Gafam, grandes firmes mondiales, notamment pharmaceutiques, cabinets de conseil…) qui réduisent à quia l’action des gouvernements ?

    ALAIN DE BENOIST. Vous savez que personnellement je n’attends rien de la politique en général, ni d’une élection (fût-elle présidentielle) en particulier. Je pense que le système est trop pourri, trop nécrosé jusqu’à l’os, pour pouvoir être transformé en profondeur par le jeu des urnes. Comme disait Guy Debord : « Si les élections pouvaient vraiment changer quelque chose, il y a longtemps qu’elles seraient interdites ! » Que la dernière élection présidentielle ait mobilisé autant d’énergie, déchaîné autant de passions inutiles et gaspillé autant d’argent pour n’accoucher finalement que d’une souris n’a donc rien pour me surprendre.

    Cela ne doit toutefois pas faire oublier que ce scrutin a quand même eu le mérite de confirmer l’installation dans le paysage politique des deux blocs dont j’ai déjà parlé, de pair avec l’effondrement des « grands » partis traditionnels, de constater que la dynamique est aujourd’hui du côté du bloc populaire (Marine Le Pen est arrivée en tête au premier tour dans 30 départements et 22 000 communes, a amélioré son score final de 2,7 millions de voix par rapport à 2017, passant de six millions de voix en 2012 à 13 millions en 2022, et parvenant même à battre Anne Hidalgo à Paris !), mais aussi de permettre de comprendre l’échec de la candidature Zemmour, en qui beaucoup avaient mis tous leurs espoirs.

    Éric Zemmour, dont on connaît le talent, s’est lancé avec courage dans l’aventure. Sa campagne a permis de faire entrer dans le débat public certaines notions (liées à la question de l’immigration) jusque-là tenues à l’écart ou mises sous le boisseau – avec néanmoins une tonalité qui a pu être jugée comme anxiogène, voire brutale. Mais en fin de compte, sa candidature s’est soldée par un échec, puisqu’il n’a pas dépassé 7 % (ce que j’avais personnellement prévu depuis le début). Cet échec a bien sûr des causes multiples, mais je ne crois pas un instant qu’il s’explique fondamentalement par quelques déclarations intempestives ou par les retombées de la guerre en Ukraine.

    Je pense que notre ami Zemmour a fait deux erreurs stratégiques qui, dès le départ, l’empêchaient de réussir. La première est de s’être accroché à l’arlésienne de l’union des droites, vieille lune dont j’entends parler depuis plus d’un demi-siècle, mais qui n’a jamais pu se réaliser pour la simple raison que ces droites se réfèrent à des idées, des valeurs, des conceptions du monde qui ne sont pas seulement différentes, mais bien souvent opposées. C’est le cas tout particulièrement de la droite conservatrice, pour qui l’homme est d’abord un héritier, et de la droite libérale, pour qui il est un être appelé à maximiser en permanence son meilleur intérêt personnel, censé décider de ses choix sans considération de ses appartenances ou de ses héritages (c’est l’idéal du self made men). Les conservateurs ont le souci du bien commun, les libéraux le seul souci des libertés individuelles et des droits de l’homme. Aussi longtemps que les premiers s’obstineront à ne pas voir que le système capitaliste, c’est-à-dire la logique du profit et le système du marché, est un « fait social total » qui détruit systématiquement tout ce qu’ils veulent conserver, ils resteront dans l’impasse. Sur le fond, les droites sont incompatibles entre elles, et c’est pourquoi la sympathique idée de l’« union de droites » n’est qu’une mystification parmi d’autres – surtout à une époque où le clivage droite-gauche est en voie de disparition !

    La seconde erreur de Zemmour a été d’ignorer la lutte des classes, au moment même où celle-ci bat son plein. Je sais bien qu’à droite, c’est un sujet dont il ne faut pas parler ! Ce serait donner raison à Karl Marx, disent les ignorants qui s’imaginent que c’est à l’auteur du Capital que l’on doit l’invention des classes et de la lutte des classes. Mais il faut ouvrir les yeux et consentir à voir ce que l’on voit. Jamais comme aujourd’hui, depuis un siècle, les oppositions politiques n’ont autant pris la forme d’une opposition de classe : bloc populaire contre bloc élitaire, bourgeoisie prédatrice contre classes populaires vivant dans la précarité, peuple soucieux de conserver sa sociabilité propre et Nouvelle Classe hors-sol, etc. Jamais les paramètres socio-économiques n’ont autant été à prendre en compte pour qualifier les électorats. Voyez ce qu’en disent Christophe Guilluy et Jérôme Sainte-Marie.

    Avec beaucoup de malhonnêteté, on a reproché à Marine Le Pen de s’être souciée en priorité du pouvoir d’achat (un « sujet démagogique », un thème pour « ménagères des plus de 50 ans »). Si elle l’a fait, ce n’est pas pour faire passer la question sociale avant la question nationale, c’est qu’aujourd’hui ce sujet vient au premier rang des préoccupations des Français, ainsi que le confirment tous les sondages. Mais c’est surtout qu’elle a bien compris que, derrière le pouvoir d’achat, il y a des revendications bien plus fondamentales, de même que chez les Gilets jaunes, derrière la protestation initiale contre une taxe sur les produits énergétiques, couvait une colère bien plus profonde. En parlant des menaces qui pèsent sur leur pouvoir d’achat, les classes populaires veulent aussi dire qu’elles en ont assez de la façon dont elles sont ignorées, méprisées, invisibilisées. En fait, ce que les classes populaires ne supportent plus, c’est le mépris de classe. Le problème est que, dans l’électorat Zemmour (17,4 % des suffrages dans le 16e arrondissement de Paris), je ne pense pas qu’il y ait beaucoup de gens qui aient jamais eu à souffrir du mépris de classe dans leur vie quotidienne… 

    Dans ces conditions, la fusion des classes populaires et de la « bourgeoisie patriote » que souhaite réaliser Zemmour me paraît mal partie. Dans une optique « interclassiste », cela voudrait dire qu’il faut amener les premières à croire qu’elles ont les mêmes intérêts que la seconde, ce qui est douteux. En réalité, rien ne justifie que la droite populaire, dont les intérêts passent par le maintien de l’État social, et donc de la dépense publique, fasse allégeance à la droite bourgeoise. La « bourgeoisie patriote » peut se sentir en état d’insécurité culturelle, elle ne se sent pas en état d’insécurité sociale. Historiquement, la bourgeoisie n’a jamais été patriote que dans les moments où ses intérêts matériels ou financiers étaient menacés. C’est d’ailleurs ici, dans les colonnes du Nouveau Conservateur, que Bernard Carayon a pu citer ces mots du général de Gaulle : « Nous avons réussi à contenir les Soviétiques, nous avons repoussé les Allemands, mais nous ne sommes pas parvenus à rendre la bourgeoisie patriote. » Propos révélateurs. Ce n’est pas demain que nous assisterons au jumelage de Hénin-Beaumont et de Saint-Tropez.

    Reste la question essentielle que vous soulevez dans votre question : l’impuissance grandissante des politiciens au pouvoir. Ce n’est pas une question dont on peut disserter en quelques mots, mais ce dont il faut être conscient, c’est que cette impuissance n’est jamais que la conséquence, somme toute logique, d’une neutralisation du politique entreprise de beaucoup plus longue date par (et au profit de) l’économique, de la technoscience, de la morale et du droit.

    LE NOUVEAU CONSERVATEUR : Le corps politique français est constitué par les 50,5 millions de citoyens âgés de 18 ans et plus. Le président de la République a obtenu au premier tour 9,7 millions et au second tour 18,7 millions – dont une moitié déclare le combattre dès les jours qui suivent son élection, ce qui nous ramène au même étiage de soutien, moins de 20 %. Ce constat que personne ne fait aboutit à deux questions graves : peut-on gouverner dans ces conditions ? Comment nommer un système qui ne peut plus être dit « démocratique » ?

    ALAIN DE BENOIST. Il y a longtemps que les présidents ne sont plus élus par une véritable majorité, mais le plus souvent par une minorité des électeurs inscrits. De plus en plus, ce sont des élus par défaut, qui utilisent leur adversaire comme repoussoir (« tout sauf Le Pen », « tout sauf Macron »). Peut-on gouverner dans ces conditions ? Oui, bien sûr, puisque l’on a été élu. Mais on gouvernera mal, car la légitimité fera défaut. C’est ici qu’il faut revenir à la différence essentielle qui existe entre légalité et légitimité, différence niée par le positivisme juridique.

    Les démocraties libérales sont par ailleurs devenues depuis longtemps des oligarchies financières. Est-on encore en démocratie ? Tout dépend comment on la conçoit. Pour moi, l’expression même de « démocratie libérale » est un oxymore, une contradiction dans les termes. La démocratie concerne les citoyens, le libéralisme ne s’occupe que des individus. D’un point de vue démocratique, le bien commun doit primer sur les intérêts particuliers. Le peuple est souverain en ceci qu’il détient la légitimité politique et possède à ce titre le pouvoir constituant. À un interlocuteur qui lui vantait les mérites de la Cour suprême aux États-Unis, le général de Gaulle avait répondu : « En France, la Cour suprême, c’est le peuple ! » Pour le libéralisme, les collectivités, les peuples et les cultures ne sont que des additions d’individus (« la société n’existe pas », disait Margaret Thatcher) et les frontières doivent disparaître pour ne pas faire obstacle à l’échange marchand et à la suraccumulation du capital à partir de l’argent s’engendrant de lui-même. Pour résumer les choses : il n’y a démocratie, quel que soit le régime, que lorsqu’un peuple peut disposer de son destin.

    LE NOUVEAU CONSERVATEUR : Un des thèmes favoris de la sociologie contemporaine est celui de l’imaginaire, de l’émiettement de l’imaginaire national (ou local) au bénéfice d’imaginaires nouveaux, commerciaux, tribaux, supranationaux, c’est-à-dire américains. La nation, qui se dépouille de ses figures traditionnelles et de ce que Régis Debray appelait ses « points de communion », peut-elle rester un cadre politique ? Avons-nous des cadres politiques de substitution ? Plus crûment : à quoi riment les élections nationales quand l’État n’a plus grand rôle et que la nation s’effrite ?

    ALAIN DE BENOIST. Les élections entretiennent le rite, mais ce n’est un secret pour personne que de plus en plus de gens s’en détournent. Toutefois, la politique ne disparaît pas « quand l’État n’a plus grand rôle et que la nation s’effrite ». Elle migre ailleurs. Ce qui montre que la vie politique n’est pas seulement du ressort de l’État-nation. Cela dit, vous avez raison de parler de l’importance de l’imaginaire. La substitution d’un imaginaire symbolique à un autre est un ressort puissant de l’évolution ou de la transformation de l’esprit public (Spengler aurait parlé de pseudomorphose). Mais il ne faut pas tout mélanger. Vous parlez d’imaginaires « supranationaux, c’est-à-dire américains ». C’est un raccourci, certes, mais il n’est pas exact. Je respecte votre attachement inconditionnel à la nation, et je serais le dernier à nier l’importance des nations. Mais la nation n’est jamais qu’une forme politique, propre à la modernité, parmi bien d’autres que l’on a connues au cours de l’histoire : cités-États, rapports féodaux, ligues diverses, empires, etc. Je récuse comme vous la supranationalité de l’Union européenne, qui ne représente qu’une Europe-marché acquise à l’atlantisme et à la l’idéologie dominante, mais je peux très bien imaginer une Europe-puissance qui pourrait se vouloir indépendante des États-Unis, voire ouvertement hostile à ce qu’ils représentent.

    L’imaginaire dominant, à l’heure actuelle, c’est en fait l’imaginaire de la marchandise. Cette colonisation des imaginaires symboliques par la logique du profit et le règne de la quantité est allée de pair avec la montée de la classe bourgeoise, le déploiement planétaire de l’axiomatique de l’intérêt, la désagrégation des « grands récits » des deux siècles derniers, l’épuisement des grands projets collectifs, l’effritement du lien social, la disparition des structures d’entraide organiques, l’individualisation et la privatisation tous azimuts (Heidegger parlait de « métaphysique de la subjectivité »). Il ne sera pas facile d’en sortir. Personnellement, j’ai plutôt l’impression que ce système se détruira de lui-même, car il est intrinsèquement porteur de chaos. Quand il aura tout dévoré, il se dévorera lui-même.

    LE NOUVEAU CONSERVATEUR : L’une des caractéristiques de la post-modernité est de surévaluer les apparences, lesquelles ont absorbé la politique pure dans la politique-spectacle avec ce que cela suppose d’émotions fabriquées par les médias – l’affaire ukrainienne en offre une illustration assez accablante. Voyez-vous un remède ?

    ALAIN DE BENOIST. D’abord une remarque, dictée par la modestie. Il ne faut pas demander des remèdes ou des solutions à ceux dont le seul rôle est de proposer des analyses à consulter et à méditer. Pour les remèdes, c’est chez les praticiens qu’il faut aller voir. Maintenant, la politique-spectacle. Elle est toujours là bien entendu, mais de l’eau a passé sous les ponts depuis l’époque où les situationnistes en donnaient une description pionnière. La situation a changé, et pas en mieux. Aujourd’hui, le spectacle est truqué, il a changé de nature. La politique-spectacle est elle-même dépassée par le simulacre (Jean Baudrillard) et le faux-semblant. On va vers une virtualisation du réel, ce qui veut dire que le réel n’est plus vraiment réel (Renaud Camus parle de « faussel »).

    LE NOUVEAU CONSERVATEUR : Vous avez bien connu et beaucoup lu Julien Freund, que nous aimons beaucoup au « Nouveau Conservateur ». Une de ses contributions au GRECE s’intitulait « Plaidoyer pour l’aristocratie » ; pensez-vous qu’une aristocratie (une escouade d’esprits fidèles aux traditions les plus lointaines de notre civilisation) pourrait redéfinir les termes, les cadres, et pourquoi pas les représentations politiques dans un avenir plus ou moins lointain ? Ou comptez-vous sur cet autre réceptacle de la tradition qu’est le peuple ?

    ALAIN DE BENOIST. Julien Freund m’a honoré de son amitié durant les quinze ou vingt dernières années de sa vie. C’était un homme d’une culture incroyable, d’un non-conformisme absolu, d’une totale simplicité, d’une grande drôlerie aussi, si bien que les discussions avec lui étaient inoubliables. Il avait fait la conférence à laquelle vous faites allusion à un colloque organisé en janvier 1975. Je me souviens qu’il avait pris le soin de distinguer l’aristocratie, au sens anthropologique et moral du terme, de la noblesse au sens social. La noblesse a été abolie en France, mais une aristocratie est toujours possible. D’aucuns y verraient le fondement d’un Ordre, voire une sorte d’assemblée des « fils de rois » dont parlait Gobineau dans Les Pléiades (1874). Mais croyez-vous vraiment qu’un tel cénacle, s’il existait – car pour l’heure il relève surtout du pieux souhait –, aurait le désir ou le goût d’œuvrer à un renouveau de la vie politique ? Je pense qu’il prendrait au contraire grand soin de ne pas aller perdre son temps dans ce marais !

    Le peuple, c’est autre chose. Vous n’avez pas tort de l’évoquer immédiatement après avoir parlé de l’aristocratie. Je suis de ceux qui considèrent que les valeurs populaires et les valeurs aristocratiques se rejoignent à bien des égards, et qu’elles sont tout aussi étrangères les unes que les autres aux valeurs bourgeoises. Bien sûr, il ne faut pas idéaliser le peuple. Qu’on le comprenne comme ethnos ou comme demos (les deux démarches étant inséparables), on voit bien qu’il est lui-même atteint par la décérébration, l’ahurissement, l’américanisation qui touchent la plupart de nos contemporains. Mais cela n’empêche pas que, sur les questions existentielles, il ait en général des réactions instinctives plus saines que les élites – des réactions qui ne se réduisent pas à la « décence commune » célébrée par Georges Orwell. À toute époque, il y a un sujet historique principal. Si on n’en tient pas compte, on ne peut savoir ce qu’est exactement le moment historique que l’on vit. Aujourd’hui, je suis convaincu que le sujet historique de notre temps, ce sont les peuples. Cause du peuple, cause des peuples, c’est la même chose à mes yeux.

    LE NOUVEAU CONSERVATEUR : Connaissez-vous Youval Noah Harari, essayiste israélo-étatsunien qui bat tous les records de vente, notamment aux États-Unis et en Grande-Bretagne, avec deux livres aux tirages plusieurs fois millionnaires, « Sapiens. Brève histoire de l’humanité » et « Homo Deus. Brève histoire de l’avenir » ? On y lit par exemple : « Maintenant, les humains sont en train d’acquérir de nouveaux pouvoirs. Des pouvoirs divins, de construction et de destruction. Nous sommes en train d’améliorer les humains pour en faire des dieux » ; ou encore : « Nous avons besoin de reconditionner l’être humain. L’être humain est désormais un animal que l’on peut pirater. Les humains ont cette idée qu’ils ont une âme, un état d’esprit, un libre arbitre. Demain, voter ou aller au supermarché ce sera fini ». Que vous inspirent ces propos ? Faut-il les écarter pour enfantillage incurable, ou les prendre au sérieux ?

    ALAIN DE BENOIST. J’ai bien sûr lu les livres de Youval Noah Harari, professeur à l’Université hébraïque de Jérusalem et grand défenseur de la cause végane, dont les citations que vous en faires décrivent assez bien le contenu. Harari est aujourd’hui l’un des auteurs dont se réclame la mouvance « transhumaniste ». C’est un libéral qui s’appuie sur les progrès de la technoscience pour annoncer l’avènement d’une humanité « augmentée » par la prothèse, l’intelligence artificielle et la manipulation du vivant. Un thème plus ancien qu’il n’y paraît, puisque l’idée d’un « homme nouveau » appelé à remplacer l’humanité qui a précédé se trouve déjà chez saint Paul. Chez Hergé, dans L’étoile mystérieuse, le « prophète » Philippulus annonçait : « Repentez-vous, faites pénitence, la fin des temps est venue. » Harari annonce lui aussi la fin des temps tels qu’on les a connus, mais il nous convie à nous en réjouir puisque c’est une ère radicalement nouvelle qui va commencer.

    On peut en effet voir dans ses propos de simples enfantillages (ou le dernier avatar en date d’un vieux messianisme). Mais ce n’est pas un motif pour les écarter : les enfantillages peuvent avoir aussi des conséquences considérables. L’idée que l’avenir sera nécessairement mieux que ne l’a été le passé, que toute nouveauté est meilleure au seul motif qu’elle est nouvelle, est aussi un enfantillage – mais c’est lui qui a donné naissance à l’idéologie du progrès. La pseudo-théorie du genre, relayé par le lobby LGBT, selon laquelle notre identité sexuelle provient exclusivement de nos choix individuels et n’a strictement rien à voir avec le sexe biologique ou physiologique, est un enfantillage. Cela ne l’empêche pas de faire de tels ravages que l’on peut se demander si l’on n’est pas à la veille d’une mutation anthropologique qui n’aurait comme précédent que la révolution néolithique.

    Il faut donc prendre au sérieux les enfantillages, tout comme il faut prendre au sérieux ce que l’on appelle parfois un peu trop vite des « utopies ». L’homme augmenté des transhumanistes – qui ne serait en réalité qu’un homme diminué – n’est pas une pure chimère, même s’il relève encore sous certains aspects de la science-fiction. L’avènement de l’intelligence artificielle dans un monde où nous serons de plus en plus connectés, fichés et surveillés, va dans le sens d’une fusion progressive de l’électronique et du vivant. Il ne suffit plus de parler d’un grand remplacement de l’homme par la machine, mais d’anticiper le devenir-machine de l’humanité. Ce sont là des choses sérieuses. Elles nous emmènent assez loin de l’enjeu des prochaines élections !

    Alain de Benoist (Le Nouveau Conservateur, juin 2022)

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  • Macron : le vrai bilan...

    Nous vous signalons la parution du nouveau numéro de Rébellion (n°95, Printemps 2022).

    Vous pouvez vous procurer la revue sur son site : Rébellion

     

    Rébellion 95.jpg

    Au sommaire :
     
    ÉDITORIAL
    La mascarade électorale
     
    ACTUALITÉS
    L’affaire ORPEA ( Yannick Sauveur)
     
    DOSSIER :
    La Macronisme à l’heure du dépôt de bilan ( David L’Epée)
    Coronacircus : la gestion d’une crise sanitaire ( Yannick Sauveur)
    La géopolitique française sous l’ère Macron ( Maxence Smaniotto)
    De l’importance des petites victoires ( Jean Ernice)
     
    HISTOIRE
    Entretien avec Jean-Paul Cruse : On a (toujours) raison de se révolter !
    Mao, un traditionaliste qui s’ignorait ? ( Louis Alexandre)
     
    PHILOSOPHIE
    Simone Weil : rencontre avec dieu ( Camille Mordelynch)
     
    INTERNATIONAL
    Notre position sur la guerre en Ukraine : Pas de guerre entre les peuples européens/Pas de paix avec le capital mondial !
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