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libéralisme - Page 27

  • Retraites : pourtant d'autres pistes existent !

    Nous reproduisons ici un point de vue intéressant de Maurice Gendre, journaliste et agitateur d'idées sur la toile, sur la réforme des retraites, publié par le site Scriptoblog.

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    Retraites : pourtant d'autres pistes existent

    Alors que le vote définitif au Sénat devrait intervenir, après examen des 500 amendements, le jeudi 21 octobre dans la soirée (selon le philatéliste célèbre Gérard Longuet), le mouvement social ne cesse de se durcir.

    Pénurie d'essence, raffineries fermées, ports bloqués, lycées paralysés (1), trains annulés, grèves reconductibles, opérations escargots, cortèges de manifestants qui ne désemplissent pas, des sondages mettant une lumière crue sur le désaveu du gouvernement, tous les éléments sont là pour que ce projet de loi inique sur les retraites soit retiré comme le fut avant lui le SMIC-jeune balladurien, la « réforme » Juppé ou le CPE villepinien.

    Toutefois, si ce projet finissait par devenir une loi après publication au J.O, en raison de l'obstination du Narcisse pervers qui a posé ses valises à l'Elysée et/ou grâce à l'aide des racailles de banlieue (éternels idiots utiles), on peut douter de la volonté d'un gouvernement de « gauche », après un possible changement de majorité en 2012, de revenir sur cette contre-réforme. Surtout si l'on se base sur les précédents des réformes Balladur (1993) et Fillon (2003), qui semblent avoir été définitivement acceptées par la gauche de gouvernement.

     

    D'autant que la cacophonie régnant chez les sociaux-démocrates du PS laisse supposer une nouvelle félonie. Des déclarations du candidat préféré de l'oligarchie, le directeur du FMI, DSK, qui ne fait pas mystère que pour lui le "dogme" des 60 ans doit sauter, aux propos d'autres caciques PS qui veulent maintenir l'âge légal de départ à la retraite à 60 ans tout en réclamant l'allongement de la durée de cotisation à 41,5 annuités... comprenne qui peut.

    Comme toujours, il ne faudra donc pas compter sur cette formation de petits marquis manipulateurs et condescendants qu’est le parti socialiste pour mener une véritable réforme des retraites, une réforme qui serait juste, équitable et pérenne.

    Mais il n'est pas interdit d'espérer que le flambeau sera repris par un ou plusieurs candidats lors de la prochaine présidentielle…

    Quels pourraient alors être les axes de réflexion ? Est-il possible de faire autrement ?

    Des moyens existent. Il faut cependant faire preuve de courage et de volonté.

    Chaque année, ce sont des dizaines de milliards qui font défaut aux caisses de retraite au titre des baisses de cotisations patronales, des exonérations de charges et des conséquences funestes des licenciements massifs et de la politique des bas salaires (2).

    Depuis 1980, la part patronale des cotisations sociales a baissé de 4 points (passant de 34 à 30%), soit un manque à gagner annuel de 17 milliards pour la sécurité sociale.

    Si la cotisation patronale était relevée dans cette proportion, il n'y aurait plus de déficit dans les caisses de retraite du privé.

    De même, dans le budget de l'Etat, ce sont des dizaines de milliards de cadeaux fiscaux qui mettent en péril le financement des retraites, des rémunérations de fonctionnaires, de l'emploi et des services publics. A elle seule, la prise en charge par l'Etat des exonérations de charges sociales consenties au bénéfice des entreprises représente un coût pour le budget de l'Etat de 33 milliards d'euros chaque année.

    Or, le moins que l'on puisse dire, c'est que l'argent ne manque pas : 212 milliards d'euros de bénéfices pour les entreprises françaises du CAC 40 entre 2007 et 2009.

    Pour ces sociétés, on estime que le taux réel d'imposition est inférieur à 10%.

    Il faut aussi signaler les 3 milliards par an de niches fiscales réservées aux 1% les plus fortunés. Également, les 36 milliards de dividendes distribués aux actionnaires des entreprises du CAC 40 en 2009.

    Entre 2004 et 2007, les 0,01% les plus aisés ont gagné 40% de plus. Ceux-là mêmes, parmi d'autres, qui jouissent du bouclier fiscal.

    Des solutions alternatives existent donc bel et bien.

    Mais on peut également réfléchir à beaucoup plus long terme.

    Le débat sur les retraites reviendra de façon lancinante tant qu'une réelle politique nataliste ne sera pas instaurée dans ce pays.

    La mise en place d'un vrai salaire parental, l'augmentation des allocations familiales, l'allongement du congé maternité (et paternité) sont des pistes essentielles à explorer.

    Autre point fondamental : la question des retraites est très étroitement liée à l'emploi.

    Ne pas aborder la question de la lutte contre le chômage dans cette affaire relève d'une malhonnêteté intellectuelle sans limite.

    Assurer la reprise en main économique de notre marché intérieur (application de droits de douane sur les produits importés), rompre avec la « chienlit laissez-fairiste » (dixit le regretté Maurice Allais), ainsi qu'assurer le lancement de grands projets de ré-industrialisation, de développement et d'équipement, sont des options qui s'avéreront très vite incontournables.

    Pour pouvoir mettre en place tout ceci, une sortie de l'Union européenne (UE) sera inévitable (3).
    Là encore, il s'agira donc d'une question de bravoure et de volontarisme politique.

    Maurice Gendre

    ( 1 ) Depuis plusieurs jours, on entend sempiternellement le même refrain : "En quoi les jeunes sont-ils concernés?". La réponse est fort simple. La jeunesse française subit un taux de chômage de l'ordre de 25%. Les différentes mesures de recul de l'âge de départ en retraite conduiront d'ici 2016 à ce qu'un million d'emplois ne soient plus disponibles pour les jeunes arrivant sur le marché du travail, auxquels s'ajouteront 300.000 emplois supprimés dans la fonction publique entre 2007 et 2013.

    ( 2 ) Entre 1981 et les années 2000, la part des salaires dans la valeur ajoutée a reculé de 10 points, la part du capital a augmenté d'autant, alimentant les marchés financiers et la spéculation. Certains experts avancent le chiffre de 100 milliards par an volés au monde du travail.

    ( 3 ) A ce propos, le plan Sarkozy-Woerth prétend s'inspirer des autres pays européens. Or, un observateur un tout petit peu attentif remarquera que la durée de cotisation est de seulement 30 ans en Grande-Bretagne, 35 ans en Allemagne, en Italie, en Belgique et en Espagne, 37 ans en Autriche et 40 ans en Suède. Certes, des modifications sont également en cours dans ces pays, et on recense de fortes disparités (hallucinant plan de régression social de Zapatero en Espagne, mise en place d'un système de pénalités en Allemagne à partir de 2012, minuscule retraite de base en Angleterre… de 116 euros par semaine). Mais on n’atteint tout de même pas les 41,5 ans que souhaite imposer le gouvernement français.

     

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  • Quelle économie pour demain ?...

    La ville d'Alençon (Orne) organise cette année la 14e édition de La pensée en question, son cycle de conférence, qui aura cette anné pour thème l'avenir de l'économie. C'est dans ce cadre qu'Alain de Benoist participera aux côtés de l'ancien ministre Claude Allégre et de l'économiste Philippe Jurgensen, à une table ronde, animée par un journaliste d'Alternatives économiques, portant sur les rapports entre l'économie et l'environnement. 

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    Être ou avoir ? Quelle économie pour demain ?

    La France peut-elle encore soutenir une croissance forte et durable ?
    Quels sont les moyens concrets de sortir de la crise ?
    La décroissance est-elle une solution d’avenir ?
    L’activité économique est-elle compatible avec la notion de Développement Durable ?
    Autant de questions auxquelles tenteront de répondre les différents intervenants de la Pensée en question.

    Moins abstrait, moins philosophique que les années précédentes, le thème de l’édition 2010 nous concerne tous. « La crise financière, économique et sociale a mis à mal le pays.
    Aujourd’hui, tout le monde sait que les modèles économiques actuels ne sont plus viables.
    La Pensée en question sera l’occasion de présenter des solutions nouvelles, concrètes et innovantes » annonce Maïté Vanmarque, chargée de l’organisation.

    « Les conférences apporteront des éléments de réflexion dans un vrai souci pédagogique.

    Notre ambition est de rendre l’événement accessible au plus grand nombre. » Le professeur, politologue et écrivain Paul Ariès, l’ingénieur agronome, économiste et homme politique Pierre Larrouturou, et le philosophe Christian Fauré seront quelques-uns des intervenants de l’édition 2010. « C’est une chance d’accueillir Paul Ariès car c’est l’intellectuel de référence du courant de la décroissance.

    Pierre Larrouturou, qui sort un nouveau livre à l’automne, propose des solutions nouvelles qui ont été mises en place avec succès dans certaines entreprises. Le philosophe Christian Fauré exposera les idées défendues par l’association Ars industrialis, parmi lesquelles le refus du capitalisme et l’ouverture vers l’économie de la contribution. » Pour la première fois, une table ronde de clôture, animée par un journaliste du magazine Alternatives économiques, devrait réunir le journaliste, philosophe et politologue Alain de Benoist, l’économiste Philippe Jurgensen, et le géochimiste et ancien ministre Claude Allègre.

    Cette table ronde sera consacrée aux rapports entre l’économie et l’environnement."

    La Pensée en question, en septembre et octobre à la Halle aux Toiles – Entrée gratuite - Renseignements à la médiathèque au 02 33 82 46 00

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  • Rompre avec la globalisation !

    Nous reproduisons ici le dernier d'une série de quatre article de l'économiste Jacques Sapir, publié par le site du magazine Marianne au cours de la dernière quinzaine. Cet auteur, qui devrait prochainement publier au Seuil un essai intitulé La déglobalisation, propose ici "un scénario de rupture décisive" pour remettre l'Europe sur les rails d'une politique indépendante.

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    Changer l'Europe pour rompre avec la globalisation

    Ainsi, il faut admettre les vertus de l’exemplarité. Les réformes qui nous conduiraient vers cette mise en parenthèses partielle vis-à-vis de la globalisation seraient d’autant plus efficaces si elles étaient partagées par un groupe de pays. La question se pose alors de savoir si ce groupe de pays pourrait être l’Europe, et sinon qui pourrait en faire partie.

    L’Europe telle qu’elle existe de manière institutionnelle, soit l’UE-27, ne remplit aucune des conditions pour une rupture avec la globalisation. Elle est trop engagée dans ce processus pour que l’on espère pouvoir attirer vers les positions que l’on a présentées les 26 autres pays. Les directives de Bruxelles en ont été les vecteurs. Mais d’un autre côté, elle est aussi trop étroite.

    En fait, le projet que l’on a dessiné s’adresse aussi à des pays qui sont hors de l’UE, mais qui ne sont pas nécessairement hors de l’Europe, entendu cette fois dans le sens géographique. La Russie pourrait être ainsi concernée. Ce projet concerne tous les pays qui seraient prêts à reconfigurer l’Europe. Le choix présenté -soit poursuivre dans la voie actuelle de l’Europe avec son cortège de faible croissance et de soumission à la globalisation, soit entamer un nouveau cours donnant la priorité à la croissance la plus forte possible, au plein-emploi et à l’émergence d’un nouveau projet social-, provoquera une cassure décisive au sein de nos partenaires. Mais encore faut-il que ce choix ne soit pas virtuel. C’est par la concrétisation unilatérale des premières mesures de ce choix que nous pourrons voir quels sont les pays qui sont réellement prêts à nous suivre.

    On dira que ceci nous mettrait au ban de l’Union Européenne dont nous ne respecterions plus la lettre des traités. Notons ici qu’un simple artifice permettrait de lever cette hypothèque. Les directives les plus nocives ne seraient pas abolies mais simplement suspendues jusqu’à de nouvelles discussions. Notons encore qu’il y a peu à craindre de Bruxelles. Les procédures y sont longues. De plus en cas de sanctions financières, il suffit de décider de prélever sur le montant de notre contribution au budget de l’UE la somme de l’amende. Nous n’avons pas à avoir peur d’un conflit pour ce genre de raison. Il faut regarder plus loin. Le vrai problème est celui de la légitimité. Or, sur ce point, un précédent nous donne raison.

    Il faut ainsi savoir que la supériorité des règles et lois nationales sur les directives européennes a été affirmée, une nouvelle fois, en Allemagne lors d’un arrêt de la Cours Constitutionnelle de Karlsruhe. Cet arrêt du 30 juin 2009 stipule en effet qu’en raison des limites du processus démocratique en Europe, seuls les États Nations sont dépositaires de la légitimité démocratique (1).

    En décidant de suspendre temporairement l’application de certaines des directives européennes, nous serions ainsi dans notre droit. C’est l’Union Européenne qui serait sommée, soit de les réécrire et de rouvrir le débat sur la globalisation financière et la globalisation marchande, soit d’entrer dans un processus d’explosion. Certaines des mesures que l’on a proposées auraient de tels effets sur nos voisins qu’il leur faudrait les imiter au plus vite ou accepter de voir leur propre situation se dégrader.

    La politique que nous préconisons loin de nous isoler susciterait l’imitation, et à partir de là ouvrirait la voie à de nouvelles coordinations. Mais, il est effectivement probable – et il faut le reconnaître et l’assumer - qu’elle signifierait la mort de l’Europe telle que nous la connaissons, et par là la naissance de nouvelles alliances. 
     
    Comment pourrait-on alors procéder ? On oublie trop souvent la présence au sein de la Constitution française d’un instrument adapté aux situations d’urgence. C’est l’article 16. Qui aujourd’hui peut contester que le fonctionnement de nos institutions (y compris sociales…) et l’indépendance de notre pays ne sont pas immédiatement et directement menacées ? L’usage de l’article 16 est ainsi parfaitement légitime. Les mesures concernant la mise en œuvre sont des actes de gouvernement que le Conseil d’État n’a pas à juger (2).

    Prenons alors le cas de l’euro. Il n’est nullement besoin de sortir immédiatement de la zone Euro. Au contraire, il serait plus intéressant de chercher à la faire évoluer dans le sens d’une zone de coordination des politiques monétaires autour d’une monnaie commune venant s’ajouter aux monnaies nationales. Dans le cadre de l’article 16, le gouvernement peut alors demande à la Banque de France qu’elle opère des avances de trésorerie libellées en euro pour couvrir une partie de la dette publique qui serait ainsi rachetée par échange de bons du Trésor. Non seulement nous ferions baisser le poids des intérêts (2,5% du PIB), mais nous nous libérerions de la pression exercée par les agences de notation. Il ne faut pas avoir de craintes pour le financement ultérieur de la dette, car notre taux d’épargne y suffit amplement, surtout si nous prenons les mesures qui s’imposent pour que cette épargne n’aille pas se perdre dans des spéculations étrangères. Avec le retour à un contrôle des capitaux, nous retrouverions la maîtrise de nos taux d’intérêt.

    Bien sur, il nous faut nous attendre à des protestations indignées du gouvernement allemand. Mais, quelles en sont ses possibilités d’actions ? Soit c’est l’Allemagne qui décide de sortir de la zone Euro avec certains de ses voisins immédiats (Pays-Bas, Autriche, etc…), et elle se tirera alors une magnifique balle dans le pied quant on connaît la structure de son commerce. En effet, le retour au mark s’accompagnerait d’une hausse brutale du taux de change (et donc d’une dévaluation en notre faveur). Soit elle accepte de négocier une évolution graduelle de la zone Euro vers le principe d’une monnaie commune, mais avec des garanties contre des dévaluations trop brutales de notre part. Dans un cas comme dans l’autre, nous sommes gagnants. Nous le sommes plus dans la seconde de ces hypothèses, qui correspond à une issue concertée à cette crise, mais nous le sommes aussi dans la première de ces hypothèses.
    On pourrait répéter l’exercice sur l’ensemble des points ici évoqués. Les avantages que nous retirerions d’une telle politique seraient tels qu’ils inciteraient immédiatement d’autres pays à nous imiter. Dès lors pourraient s’ouvrir des négociations, soit pour réviser les traités européens, soit pour les réécrire sur la base d’un nouveau noyau de pays et en y associant de nouveaux partenaires.

    Le scénario que l’on décrit ici n’est donc pas celui d’un « splendide isolement » de la France mais d’une rupture rebattant les cartes et mettant nos partenaires au pied du mur. C’est un scénario d’initiative décisive. Nous aurions enfin la possibilité de remettre la construction européenne sur ses rails, et de lui faire emprunter la voie dont elle n’aurait jamais du se départir de la recherche du plein-emploi et du progrès social.

    Aujourd’hui, et plus que jamais, la parole ne doit pas être aux apôtres du renoncement, à tous ceux qui se situent dans la filiation historique et morale de cette capitulation de fait que fut l’Armistice de 1940. Nous devons nous inspirer des préceptes que Danton fit un jour retentir : « de l’audace, encore de l’audace, toujours de l’audace ».
    (1) Voir H. Haenel, Rapport d’Information n° 119, Sénat, Session Ordinaire 2009-2010, Paris, 2009.

    (2) Arrêt Rubin de Serven du 2 mars 1962.

    Lundi 20 Septembre 2010
    Jacques Sapir - Economiste

    Source : http://www.marianne2.fr

    Pour lire les trois premiers volets de ce texte : Jacques Sapir: marché, monnaie, commerce, la France a été naïve, Jacques Sapir: France et Europe, prenez garde à la globalisation! et Jacques Sapir (3) : une autre croissance pour une autre société

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  • La nouvelle raison du monde...

    Publié en 2009 aux éditions de La Découverte, La nouvelle raison du monde - essai sur la société néolibérale, de Pierre Dardot et Christian Laval, reparaît au format poche chez le même éditeur. Nous reproduisons ici la recension qu'avait Alain de Benoist de ce livre dans la revue Eléments.

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    L'ORDRE NÉOLlBÉRAL

    Ceux qui croient que la crise financière actuelle sonne le glas du libéralisme se trompent. Ceux qui ne voient dans le néolibéralisme qu'une idéologie (l'« idéologie du capitalisme libéré de toute entrave») relevant avant tout de l'individualisme se trompent tout autant. Le néolibéralisme actuel est à la fois autre chose et beaucoup plus que cela. En ordonnant tous les rapports sociaux au modèle concurrentiel du marché, il constitue une norme de vie, et plus précisément une forme de rationalité s'imposant au « gouvernement de soi». Loin de se confondre avec la vieille vulgate du « laisser-faire» propre au libéralisme du XVIIIe siècle, le néolibéralisme (dont on doit rechercher l'origine dans le Colloque Walter Lippman de 1938) ne prône pas un illusoire retour à l'état naturel du marché (il ne se réclame pas d'une ontologie de l'ordre marchand), mais la mise en place volontaire d'un ordre mondial de marché impliquant une transformation radicale de l'action publique qui tend à restructurer, non seulement l'action des gouvernants, mais la conduite des gouvernés eux-mêmes. Bons lecteurs de Michel Foucault, Pierre Dardot et Christian Laval montrent de façon convaincante que le but ultime est d'amener l'individu à produire un certain type de rapport à soi. Le principe de la «gouvernementalité entrepreunariale» (la « bonne gouvernance » ) est que l'individu est tenu, tout comme l'État, de se considérer comme une entreprise à gérer et un capital à faire fructifier. L'effacement par les principes du management de la distinction entre la sphère privée et la sphère publique érode alors jusqu'aux fondements de la citoyenneté et de la démocratie. À cette rationalité désormais dominante, véritable dispositif stratégique global, les auteurs opposent, au terme d'une étude historique de haut niveau, des refus et des « contre-conduites» relevant de ce qu'on pourrait appeler la « raison du commun». L'un des meilleurs livres parus à ce jour sur le sujet.

    Alain de Benoist (Eléments n°132, juillet-septembre 2009)

     

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  • La quatrième dimension !

    Nous reproduisons l'éditorial de Robert de Herte (alias Alain de Benoist) dans le numéro 136 de la revue Eléments. Ce numéro, dont le dossier central est consacré au nécessaire dépassement, par le haut, du clivage droite - gauche, est disponible actuellement en kiosque ou ici :

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    La quatrième dimension



    Trois grandes doctrines politiques concurrentes ont été successivement engendrées par la modernité: le libéralisme au XVIIIe siècle, le socialisme au XIXe siècle, le fascisme au XXe siècle. La dernière apparue, le fascisme, est aussi celle qui a le plus vite disparu. La chute du système soviétique n'a pas mis fin aux aspirations socialistes, ni même à l'idée communiste. Le libéralisme, lui, semble être le grand vainqueur de la compétition. Ce sont en tout cas ses principes, portés par l'idéologie des droits de l'homme, qui dominent au sein de la Nouvelle Classe planétaire et restent aujourd'hui les plus diffusés dans le cadre de la mondialisation.

    Aucune doctrine n'est intégralement fausse. Elle contient toujours des éléments de vérité. Faisons-en un panorama (plus que) rapide. A retenir du libéralisme: l'idée de liberté, associée à celle de responsabilité, le refus des déterminismes par trop rigides, la notion d'autonomie, la critique de l'étatisme, une certaine tendance girondine et décentralisatrice. A rejeter: l'individualisme possessif, la conception anthropologique d'un producteur-consommateur recherchant son meilleur intérêt du fait de ce qu'Adam Smith appelait son« penchant à trafiquer», c'est-à-dire de sa propension à l'échange, l'idéologie du progrès, l'esprit bourgeois, le primat des valeurs utilitaires et marchandes, le paradigme du marché, le capitalisme enfin. A retenir du socialisme: sa critique de la logique du capital, qu'il a été le premier à analyser dans toutes ses dimensions économiques et extra-économiques, le sens du commun et l'exigence de le renouveler, l'idée que la société se définit comme un tout (le holisme, fondateur de la sociologie), la volonté d'émancipation, la notion de solidarité, l'idée de justice sociale. A rejeter: l'historicisme, l'étatisme, la tendance à l'égalitarisme et à l'hypermoralisme doloriste. A retenir du fascisme: l'affirmation de la spécificité et de l'identité des peuples et des cultures nationales, le goût des valeurs héroïques, le lien entre l'éthique et l'esthétique. A rejeter: la métaphysique de la subjectivité, le nationalisme, le darwinisme social, le racisme, l'ordre moral, l'anti-féminisme primaire, le culte du chef, et encore l'étatisme.

    La 4e théorie politique, celle dont le XXIe siècle a de toute évidence besoin, sera-t-elle une doctrine radicalement nouvelle ou fera-t-elle la synthèse de ce qu'il y avait de meilleur dans celles qui l'ont précédée? C'est en tout cas à l'ébauche de cette théorie que ce que l'on a appelé la «Nouvelle Droite» n'a cessé, depuis plus de quarante ans, de s'employer.

    Le XXle siècle sera aussi celui du 4e Nomos de la Terre (l'ordre général des relations de pouvoir à l'échelle internationale). Le premier Nomos, celui des peuples vivant relativement à l'écart les uns des autres, a pris fin avec la découverte du Nouveau Monde. Le deuxième Nomos, représenté par l'ordre eurocentrique des États modernes (l'ordre westphalien), s'est achevé avec la Première Guerre mondiale. Le troisième Nomos fut celui qui a régné à partir de 1945, avec le système de Yalta et le condominium américano-soviétique. Que sera le 4e Nomos? Il peut prendre la forme d'un monde unipolaire américanocentré, d'un vaste marché planétaire, c'est-à-dire d'une immense zone de libre-échange, ou au contraire d'un monde multipolaire, où les grands blocs continentaux, à la fois puissances autonomes et creusets de civilisation, joueraient un rôle régulateur vis-à-vis de la mondialisation, préservant ainsi la diversité des modes de vie et des cultures qui font la richesse de l'humanité.

    Mais on peut tout aussi bien dire que nous sommes entrés dans une 4e guerre mondiale. La Première guerre mondiale (1914-18), qui s'est achevée au profit de la City de Londres, avait abouti au démantèlement des empires austro-hongrois et ottoman. Les deux grands vainqueurs de la Deuxième Guerre mondiale (1939-45) ont été les États-Unis d'Amérique et la Russie stalinienne. La troisième guerre mondiale correspond à la guerre froide (1945-89). Elle s'est terminée avec la chute du Mur de Berlin et la désintégration du système soviétique, principalement au profit de Washington. La quatrième guerre mondiale a commencé en 1991. C'est la guerre des États-Unis contre le reste du monde, guerre multiforme, aussi bien militaire qu'économique, financière, technologique et culturelle, indissociable de l'arraisonnement général du monde par l'infinité du capital.

    L'évolution de la guerre ne dépend pas seulement des avancées technologiques en matière d'armements, mais aussi de la succession des institutions et des formes politiques auxquelles elle a toujours été liée. On peut ainsi dire que les formes strictement militaires de conflit ont elles-mêmes connu quatre phases successives à l'époque moderne: d'abord la guerre des États souverains, liée à l'apparition avec Hobbes et Machiavel de la politique moderne, par dépossession de la théologie au profit de la souveraineté strictement politique. Les guerres sont alors menées au nom du seul intérêt des États. Ce sont encore des guerres limitées et circonscrites, des guerres à justus hostis, où l'on défend avant tout un ordre politique particulier. Vient ensuite la« guerre démocratique» des peuples devenus à leur tour souverains au XVIIIe siècle (qui est aussi celle des partisans irréguliers, avec les premières guérillas, dans le contexte d'une montée des nationalismes), où l'on défend avant tout un territoire. Au XIXe siècle, on voit apparaître la guerre au nom de l'humanité, moralisante et criminalisatrice, qui est aussi une guerre idéologique où l'on défend avant tout des principes abstraits. Elle marque déjà le retour de la «guerre juste» (sa première forme étant la guerre de Sécession américaine). La 4e forme de guerre est aujourd'hui la guerre contre la « terreur » (ou « guerre des étoiles ») qui est aussi une guerre asymétrique totale.

    A bien des égards, nous sommes ainsi entrés dans la quatrième dimension. L'entrée dans cette quatrième dimension fait approcher de l'heure de vérité. Il s'agit de savoir quels seront en ce nouveau siècle la configuration générale des choses, les lignes de force majeures, les enjeux principaux, les clivages décisifs. Pour l'heure, nous sommes encore dans l'inter-règne. Mais d'ores et déjà se pose la question essentielle: l'énigme du sujet historique dans un monde où la domination de la Forme-Capital, pourtant soumise à de terribles contradictions internes, semble se renforcer tous les jours. Quel sera le sujet historique qui fera basculer les choses? Être un sujet historique, et non pas un objet de l'histoire des autres, exige une pleine conscience de soi, ainsi que la conscience de la façon dont elle peut se déployer vers ses possibles. Heidegger parlait du Dasein, cet être-là tissé par le temps vécu, qui est toujours en attente de lui-même. Il y a un Dasein des peuples, au sens politique de ce terme. Les peuples sont en attente de la fin de leur aliénation en tant que peuples. Face à la forme objectivée du travail, qui est le capital, il leur faut s'instaurer comme le sujet historique de notre temps, afin de redevenir les sujets de leurs pratiques sociales.

    Robert de Herte

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  • Des souris dans un labyrinthe

    Architecte et urbaniste, Elisabeth Pélegrin-Genel vient de publier Des souris dans un labyrinthe aux éditions La Découverte, une étude et un décryptage de l'organisation des espaces dans notre société libérale marchande, dans laquelle tout est fait pour surveiller et orienter les individus et les transformer en consommateurs dociles.

     

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    "Quand on va au MacDo, a-t-on conscience de faire la queue pour obliger le personnel à travailler plus vite ? Que les cuisines ouvertes permettent aux clients d'assurer la surveillance ? Au bureau de poste, les guichets ont disparu pour faire place à une boutique : la Poste est déjà privatisée... En se promenant dans des lieux apparemment banals, on peut décrypter les mises en scène, observer les usages que l'organisation des espaces encourage ou interdit, décoder les incitations à nous comporter de telle ou telle façon. Ce n'est pas un hasard si le client se transforme en manager, l'usager en client, le flâneur en consommateur. L'auteure s'intéresse aux « lieux communs » (restaurants, poste), aux espaces de la mobilité (routes, ronds-points), aux « bulles » dupliquées à l'infini, accessibles presque exclusivement en voiture (zones commerciales, lotissements). Elle étudie autant le brouillage des repères entre ville et campagne que la fabrication de ces univers enchantés clos sur eux-mêmes (du grand magasin aux boutiques, des parcs de loisirs aux villages de vacances en passant par Paris-plage) dont l'objectif est d'étourdir le consommateur. Elle se penche sur la disparition des murs et la passion de la transparence dont découlent de nouveaux modes de contrôle. C'est un véritable manuel du savoir regarder qu'elle nous propose."
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