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europe - Page 80

  • Qui était Jean Thiriart ?...

    Les éditions Pardès publient cette semaine, dans leur collection Qui suis-je, un Thiriart signé par Yannick Sauveur. Docteur en sciences de l'information et de la communication, et ancien membre du mouvement Jeune Europe, Yannick Sauveur nous livre un portrait attendu d'une figure essentielle du nationalisme européen de l'après-guerre.

     

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    Jean Thiriart (1922-1992): «J'ai déjà pesté et tonné il y a 30 ans contre les petits nationalismes , le français, l'anglais, l'allemand. J'étais loin d'imaginer la déchéance dans laquelle nous allions tomber à la fin de notre siècle: la déchéance de l'esprit politique avec les micro-nationalismes.» (1992.)

    Naître à Bruxelles dans un pays où l'on se sentira toujours à l'étroit, cela scelle un destin européen. Au-delà d'un itinéraire qui l'amènera du socialisme au communisme spartiate via le national-socialisme et le soutien à l'OAS, une permanence habite Jean Thiriart : celle de l'unification européenne, qui sera son obsession tout au long de sa vie publique. Avec Jeune Europe, mouvement transnational qu'il crée en 1963, puis Un Empire de 400 millions d hommes : l'Europe, écrit en 1964, enfin avec la revue mensuelle La Nation européenne (1966-1969), Thiriart offre une vision géopolitique des grands espaces en opposition avec les nationalismes étroits. La Société d'optométrie d'Europe, qu'il fonde en 1967 et qu'il présidera jusqu'en 1981, préfigure, dans son domaine professionnel, l'Europe unitaire et communautaire qu'il appelait de ses vœux. Loin de l'activisme militant, il réapparut au début des années 80 en tant que théoricien avec une hauteur de vues qui dénote la clairvoyance de celui qui a toujours su se placer dans la longue durée et en dehors des contingences politiciennes. Son voyage à Moscou, en 1992, où il rencontre des personnalités de tous bords, précède de peu sa mort, que nul n'attendait si tôt. Ce « Qui suis-je?» Thiriart a pour ambition de sortir de l'oubli un homme injustement méconnu, dont un des mérites fut de dépasser les clivages droite/gauche. Révolutionnaire inclassable, « jacobin de la très Grande Europe », son esprit visionnaire, puisant son inspiration chez Machiavel et Pareto, demeure d une grande actualité dans un monde en pleine mutation.

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  • Europe de la défense, ou défense sans Europe ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue du général Desportes, cueilli sur le site de Bruxelles 2 et consacré à l'échec de la construction d'une défense européenne... Le général Desportes est l'auteur de plusieurs ouvrages de réflexion sur la guerre et la stratégie, tels que Comprendre la stratégie (Economica, 2001), Décider dans l'incertitude (Economica, 2004), La guerre probable (Economica, 2008), Le piège américain (Economica, 2011) ou dernièrement La dernière bataille de France - Lettre aux Français qui croient encore être défendus (Gallimard, 2015).

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    Europe de la défense, ou défense sans Europe

    Déciller les yeux

    Même aux plus aveugles, la réalité doit déciller les yeux : le monde a pris feu autour de nous et la guerre y est revenue en force. Au nord-est, avec l’Ukraine, à l’est avec l’incendie qui ravage le Moyen-Orient, au sud, en Libye, au Nigeria puis au Sahel jusqu’au Mali.

    Une seule évidence : contrairement à nos schémas parfois « simplistes » d’occidentaux chrétiens, le monde ne progresse pas de manière linaire du mal vers le bien. Le monde post-moderne est une utopie de nantis et notre perception du monde, née des rêves de San Francisco en octobre 1945, était une illusion du monde.

    Le retour de la guerre et de la force brute

    Il y a, et il y aura toujours des retours en arrière brutaux et nos manières de guerre devront pouvoir retrouver leurs caractéristiques les plus brutales lorsqu’aucun compromis n’est possible. Monsieur Poutine nous a rappelé que la force brute est un atout autant stratégique que tactique pour celui qui la possède et ne craint pas de s’en servir. Il nous a montré, en creux, que notre force, sans volonté, sans vision, n’avait rien à voir avec la puissance.

    A cela, s’ajoutent deux coups de semonce récents : le Brexit et l’élection de Donald Trump. Prenons-les pour ce qu’ils sont : de véritables opportunités à saisir mais, également, de nouvelles exigences, à court terme.

    Le fait est que : le monde a pris feu autour de l’Europe. L’Europe, et la France d’ailleurs, n’en tirent que des conclusions trop lentes et trop modestes quant au nécessaire renforcement de leur défense.

    L’Europe doit reconstruire l’esprit de défense

    Le problème de l’Europe est qu’elle a tué l’esprit de défense en même temps qu’elle a tué la guerre. Elle a retiré de l’esprit des jeunes générations d’Européens toute légitimité à la guerre comme outil de consolidation ou de défense d’un projet politique ; donc aussi, une grande part de légitimité aux dépenses de défense.

    Une Europe trop lente, trop modeste…

    Le grand problème de la défense européenne c’est qu’elle s’est fondée sur l’idée que la guerre était illégitime. Les processus européens freinent les progrès et empêchent, dans les faits, les interventions. L’Europe intervient moins vite que l’ONU ! Belle performance.

    Personne n’est venu aider la France dans sa phase offensive lorsqu’elle s’est engagée au Mali défendre la sécurité des Européens. La mission européenne de formation de l’armée malienne a été difficile à mettre sur pied. La constitution de l’EUFOR RCA (en Centrafrique) a relevé du feuilleton. Et la force n’a été constituée qu’avec un apport massif de la France d’une part et d’États non membres d’autre part.

    … et peu visible

    Dans la lutte contre l’État islamique — qui concerne pourtant tous les Européens —, l’Europe, en tant que telle, est absente et les Européens presque autant … de la même manière qu’en Afghanistan, l’Europe a conduit sa plus longue et sa plus massive opération sans jamais y exister. Plus que beaucoup d’autres, les Français ont été Européens, en matière militaire en particulier.

    Urgence à re-investir dans la défense

    La succession des désillusions nous contraint au réalisme. La première conclusion relève du principe de précaution. Allons vers l’Europe ! Mais arrêtons de nous départir des moyens nécessaires à l’exercice de nos responsabilités et à la protection de nos intérêts. L’Europe elle-même en a besoin pour que soient remplies les missions dont seules les armées françaises sont capables. Les réinvestissements rapides et massifs de l’État français et des États européens dans leur défense sont aujourd’hui d’une cruciale urgence.

    Construire une vision et des intérêts communs 

    Cependant, la défense ne peut être que la défense d’une vision partagée et d’intérêts stratégiques communs. Force est de constater que l’un et l’autre font défaut. Tant qu’il n’y aura pas de vision stratégique commune, d’intérêt stratégique commun, il n’y aura pas de défense commune car, dans chaque État membre, le sentiment de solidarité européen n’est pas assez fort pour imposer le risque politique national. Plus même, tant qu’il n’y aura pas de vision opérationnelle partagée, il n’y aura pas de forces mutualisées.

    Prenons l’exemple des équipements blindés. Quand l’Allemagne parle de blindés légers, elle pense à la classe 30 tonnes alors que la France rêve à des véhicules inférieurs à 10 tonnes

    Les interventions au sol : une prérogative qui reste nationale

    Pour longtemps encore, ne pourront être partagées que les capacités, aériennes et navales, dont l’engagement ne constitue justement pas un risque politique. Le « pooling and sharing » ne fonctionne que quand il n’y a pas de risque politique.

    [Pour les forces terrestres, c’est une autre question] L’intervention de troupes au sol est trop dangereuse pour dépasser les égoïsmes nationaux. Si nous voulons maîtriser notre action extérieure, nous devons augmenter les nôtres.

    On peut mutualiser des capacités mais pas des forces. Le temps n’est plus aux chimères dangereuses, au rêve longtemps caressé mais visiblement vain. Le temps est d’abord celui du retour à la dure réalité du monde et donc à celui de la restauration de nos capacités nationales de défense.

    Être réaliste : tout recommencer depuis le bas

    Aujourd’hui, il faut juste être réaliste. La démarche « bottom up » ne fonctionne pas : en soixante ans, l’accumulation de petits morceaux de défense européenne n’a jamais permis de créer la vision espérée. Il faut donc reprendre totalement la démarche, en repartant du bas, en exigeant la communauté de vues. Il faut cesser d’ériger l’argument de l’Europe de la défense comme excuse recevable pour la stagnation des budgets de défense.

    Le temps est ensuite au sacrifice de nos vaches sacrées, à la prise de conscience du paradoxe de la Reine Rouge de Lewis Carol. Cela fait soixante ans que le processus de construction de la défense européenne ne fonctionne pas, que dans un monde qui va très vite la politique des petits pas nous fait reculer. Cela fait soixante ans que nous touillons l’Europe de la défense, et il ne se passe rien.

    Ma grand-mère me disait : si au bout d’une demi-heure ta mayonnaise n’a pas pris, jette l’ensemble, reprend un nouvel œuf et de la moutarde nouvelle et mets toi sérieusement au travail. Cela relève désormais de l’urgence vitale

    Général de division Vincent Desportes, propos recueillis par Leonor Hubaut (Bruxelles 2, 28 novembre 2016)

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  • Fêtes païennes d'Europe...

    Les éditions Delachaux et Niestlé viennent de publier un livre de Jean-Dominique Lajoux intitulé Fêtes païennes - Les grandes heures du calendrier. Ethnographe, photographe et cinéaste, membre du CNRS, Jean-Dominique Lajoux a notamment travaillé avec Georges-Henri Rivière, le fondateur du regretté Musée national des arts et traditions populaires...

     

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    " Les fêtes célébrées dans les campagnes sont, au contraire de celles des villes, des survivances de rituels animistes dont les raisons sont à rechercher dans un besoin profond d'intégration de l'homme dans son environnement et dans l'univers. Que représentent la saint Antoine, la saint Eloi, les saint Jean, Catherine ou Nicolas, et toutes les autres fêtes de saints ? Quelles sont leur origine, leur relation avec les Eglises chrétienne et orthodoxe, les manifestations et les rituels qui en marquent leur jour de commémoration ? Sont-ils vraiment des intercesseurs auprès du Dieu chrétien ou bien les successeurs ou substituts des divinités du panthéon préchrétien de la Rome antique ? A moins qu'ils ne soient que la personnification de moments de l'année, c'est-à-dire une date célébrant un lever ou un coucher stellaire ou simplement un équinoxe ou un solstice sous les auspices de la Lune. En plus de 400 photographies, cet ouvrage présente de nombreuses fêtes d'origine païennes à travers 200 reportages exceptionnels et inédits tout autour de l'Europe. "

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  • Ce sont les Blancs des classes populaires et des classes moyennes qui ont choisi Donald Trump...

    Nous reproduisons ci-dessous entretien avec Alain de Benoist, cueilli sur Boulevard Voltaire et consacré à la victoire de Donald Trump aux élections présidentielles américaines et à ses conséquences potentielles pour l'Europe...

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    Alain de Benoist : Évitons de « racialiser » la victoire de Donald Trump…

    Certains commentateurs jugent que l’élection de Donald Trump est une réaction de « l’Amérique blanche ». Certains s’en félicitent, d’autres la dénoncent, tandis que Marine Le Pen assure qu’« il ne faut pas “racialiser” ce scrutin ». Votre position ?

    Les États-Unis sont, de longue date, une nation multiraciale et, contrairement à ce qui se passe chez nous, les statistiques ethniques y sont d’usage courant. Concernant la dernière élection présidentielle, les choses sont claires : Hillary Clinton a obtenu 88 % du vote des Noirs et 65 % du vote des Latinos et des Asiatiques. Trump n’en a obtenu, respectivement, que 8 % et 29 % – ce qui n’est déjà pas si mal (c’est plus que n’en avait capté Romney en 2012). Ce clivage n’a rien de surprenant, les minorités ayant depuis longtemps l’habitude de voter massivement en faveur des démocrates : depuis 1952, seul Lyndon B. Johnson, en 1964, avait recueilli une majorité de votes chez les Blancs. On notera néanmoins qu’à cet égard, Obama avait fait mieux que Hillary, ayant remporté 93 % du suffrage noir en 2012 et 95 % en 2008.

    L’électorat blanc a été plus divisé. Trump a recueilli 58 % du vote des Blancs (64 % en Floride, 69 % au Texas), contre 37 % pour Clinton (50 % en Californie), qui fait mieux que Carter en 1980 (33 %) mais moins bien qu’Obama en 2012 (39 %). La majorité des Blancs a donc voté pour Trump, mais cela ne signifie nullement que sa victoire est uniquement due au facteur ethnique. La vérité est que ce sont les Blancs de la classe ouvrière, des classes populaires et des classes moyennes qui ont choisi Donald Trump (chez les Blancs non diplômés, il recueille 67 % des suffrages), tandis que les élites blanches, celles qui profitent de la mondialisation néolibérale, se sont en majorité reportées sur Hillary Clinton. De ce point de vue, le vote en faveur de Trump est aussi un vote de classe. S’en tenir à une analyse « raciale » du scrutin est donc une erreur (le « racialisme » est une forme classique d’impolitique). Hillary Clinton a joué, en fait, le rôle d’un véritable repoussoir pour la classe ouvrière. Il n’en aurait pas été de même si c’était Bernie Sanders qui avait représenté le Parti démocrate. À mon avis, en pareil cas, c’est Sanders qui l’aurait emporté.

    Dès le jour de sa victoire, le nouveau président paraît avoir « adouci » son discours. Le contraire aurait été étonnant, non ?

    Vous ne vous attendiez quand même pas à ce qu’il jette des pierres à Obama lorsque celui-ci l’a reçu à la Maison-Blanche ! Mais encore une fois, ne confondons pas le personnage Trump et le phénomène Trump, qui sont des choses bien différentes.

    Les commentateurs qui s’époumonent en ce moment à crier « Vive Trump ! » sont plutôt naïfs. À l’annonce du scrutin, l’ambassadeur de France à Washington, Gérard Araud, a déclaré qu’« un monde s’effondre sous nos yeux ». C’est aussi ce qu’a dit Marine Le Pen (mais elle, ce n’était pas pour s’en désoler !). Le problème est que l’on ignore tout du « nouveau monde » que laisse entrevoir la victoire du candidat populiste américain. Comme il n’a aucune expérience du pouvoir (il ne s’y connaît qu’en bâtiment et en télé-réalité), on ne peut se référer à son passé. On sait, aussi, que ce n’est pas un idéologue, mais un pragmatique. Déduire de ses tonitruantes déclarations de campagne l’annonce de ce qu’il fera effectivement à la Maison-Blanche serait pour le moins audacieux. Enfin, on ignore encore complètement qui seront ses conseillers et les principaux membres de son administration.

    C’est la raison pour laquelle la plupart des chefs d’État et de gouvernement, sortis de la cellule de dégrisement où le choc les avait conduits, se tiennent pour l’instant sur la réserve. Avant de se prononcer, chacun veut en savoir plus long sur les options en faveur desquelles Trump se prononcera. Dans l’immédiat, on en est réduit à de simples spéculations sur les nouvelles lignes de force qui vont émerger. On peut avoir d’excellentes surprises, mais on peut aussi en avoir de mauvaises. Comme l’a rappelé Jérôme Sainte-Marie, « les États-Unis n’ont ni la même culture ni les mêmes intérêts que la France ». Ce qui revient à dire que ce qui est bon pour l’Amérique ne l’est pas nécessairement pour nous.

    Sous les deux mandats de Barack Obama, les États-Unis ont commencé à se désintéresser de l’Europe. Donald Trump, lui, la menace de quitter l’OTAN si les Européens n’augmentent pas leur participation financière. En un sens, n’est-ce pas une bonne nouvelle pour l’Europe ?

    En théorie, c’est en effet une bonne nouvelle qui pourrait favoriser la mise au œuvre, jusqu’ici constamment reportée aux calendes grecques, d’une défense européenne autonome. Mais dans la pratique, qui veut aujourd’hui d’une Europe indépendante ? Regardez la brochette des sept candidats à la « primaire-de-la-droite-et-du-centre ». Tous bons élèves de Bruxelles derrière leur pupitre de chef d’orchestre sans orchestre. Tous libéraux (sauf un), tous experts en épicerie, tous incollables sur les chiffres, tous silencieux sur les vrais enjeux : la survie de la France et de l’Europe. Tous prêts à sauter dans les cerceaux que leur tendent des médias plus soucieux, comme l’a dit Slobodan Despot, de conjurer la réalité que de chercher à la comprendre. Sept nains, avec Ruth Elkrief dans le rôle de Blanche-Neige ! Qui peut les imaginer converser d’égal à égal avec Poutine ou Donald Trump ?

    Alain de Benoist, propos recueillis par Nicolas Gauthier (Boulevard Voltaire, 14 novembre 2016)

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  • L'Empire contre-attaque ?...

    Nous reproduisons ci-dessous une analyse de Caroline Galactéros, cueillie sur son site Bouger les lignes et consacrée aux conséquences pour l'Europe de la future politique étrangère américaine. Docteur en science politique et dirigeante d'une société de conseil, Caroline Galactéros est l'auteur de  Manières du monde, manières de guerre (Nuvis, 2013) et publie régulièrement ses analyses sur le site du Point et sur celui du Figaro Vox.

     

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    L'Empire contre-attaque !

    Donald Trump sera donc le 45ème président des États-Unis. Un revers cinglant pour l'Establishment mondial, les médias et les instituts de sondages occidentaux, qui ont, une fois encore, pratiqué la méthode Coué et refusé de prendre la mesure de la colère d'un peuple qui rejette sa marginalisation politique, culturelle et économique. Une auto-intoxication médiatique qui en France, menace d'atteindre aussi la primaire de la droite et du centre, celle de gauche et l'ensemble de la compréhension des enjeux du scrutin présidentiel…

    Ce qui est surprenant, c'est en fait que les grands «leaders» et analystes soient si surpris de cette victoire. Surprenant et inquiétant, pour ce que cela révèle du divorce des perceptions et des attentes entre cette superstructure composée des élites mondialisées occidentales et les «populations» qu'elles prétendent diriger ou informer, leur déniant le statut de peuples comme leur profond besoin de cohérence et de protection identitaire. Un besoin en somme, d'être des «Nations» plutôt que des agrégats d'atomes projetés nus dans la violence économique et sociale du monde.

    Le divorce est donc consommé. L'expression se libère. Les peuples se rebiffent. On objectera que c'est la victoire d'un populisme nauséabond, rétrograde et vulgaire. Celle d'une population blanche sous-diplômée, raciste, xénophobe, homophobe. Celle des «deplorables», celle de citoyens américains pitoyables selon Hillary Clinton. L'ancienne secrétaire d'État du Président Obama a ce jour-là dévoilé son mépris profond du peuple (pas uniquement blanc d'ailleurs) dont elle quêtait les suffrages, et elle a perdu une belle occasion de se taire. Alors, la victoire «du Donald» est-elle l'expression d'un populisme rance ou d'un sursaut démocratique? Je penche pour cette seconde possibilité et la tiens pour un cri d'angoisse d'une (grande) partie de l'Amérique - blanche, noire, hispanique - qui, lasse d'être ignorée, a saisi sa chance, ici incarnée en cet homme si représentatif du fighting spirit américain, de dire sa colère et son sentiment d'abandon.

    Besoin de frontières, besoin d'identité, ces thèmes ne sont pas très «hype» ni «bobos», on en conviendra. Mais ces crispations sont celles d'une société américaine qui réalise que son avenir est sombre. Non pas, comme chez nous, parce que l'État-providence est en faillite et ne peut plus payer pour tout… puisqu'on ne lui demande quasiment rien là-bas. Mais parce que la liquidité du monde, sa virtualisation galopante, ont mis à mal le rêve américain lui-même, et rompu la chaîne de l'espoir en un avenir meilleur pour ses enfants - non par l'opération du Saint-Esprit ou les largesses de l'État-providence - mais par l'effort et le travail acharnés.

    C'est là probablement la vraie rupture qui a noué la victoire de Trump. Le gouffre toujours plus grand des inégalités liées à la financiarisation de l'économie, le surendettement de la jeunesse étudiante, la précarisation structurelle de couches entières de la population a transformé le rêve américain en mythe de Sisyphe désespérant. Un rêve américain qui n'est pas un slogan outre-Atlantique, mais une conviction très profondément ancrée en chacun de la valeur du travail et du courage pour améliorer sa condition initiale, quelle qu'elle soit, ou pour y échapper spectaculairement.

    Alors, plutôt que de déclarer légèrement que cette élection «ouvre une ère d'incertitude», comme l'a fait notre président, qui n'a manifestement toujours pas compris ce que la fonction présidentielle exigeait de hauteur de vue et d'intelligence de situation en matière internationale, nous devrions féliciter le nouveau président américain et l'assurer de la disponibilité de la France, au-delà de toute alternance politique, à consolider une relation bilatérale essentielle pour nos deux pays. Nous devons aussi sans attendre, tirer les conséquences de cette bascule géopolitique probable et majeure avec lucidité, et nous atteler à restaurer notre image abîmée d'allié secondaire trop docile. Peut-être en fait la réaction française s'explique-t-elle par un «vertige» (exprimé de manière intempestive par notre ambassadeur à Washington), non pas devant la victoire de Trump, mais devant le désaveu massif de la «politique» moyen-orientale de Paris depuis bientôt cinq ans que cette victoire augure. Nous avons «eu tout faux» depuis 2011 en Libye, mais bien plus encore en Syrie. L'heure est venue soit de changer radicalement d'approche, soit, si nous nous entêtons, d'en payer le prix par un isolement gravissime et une décrédibilisation durable dans toute la région et au-delà.

    Même les États-Unis en effet, ont besoin d'alliés forts et intellectuellement autonomes. Leur nouveau président, bien plus que son prédécesseur, croit manifestement dans le rapport de force comme vecteur de structuration de toutes les relations, d'affaires, internationales et interpersonnelles. Il s'accommodera parfaitement d'une France qui assume son indépendance d'esprit et de comportement et défend ses intérêts sans trahir ses alliances. Il sera très probablement bien entouré. On parle de Newt Gingrinch comme secrétaire d'État et du Général Michael Flynn - ancien directeur du renseignement américain -, connu pour son réalisme et sa clairvoyance sur la marche réelle du monde et des grands équilibres à préserver ou à restaurer notamment au Moyen-Orient et vis-à-vis de la Russie. Son conseiller pour la politique étrangère, le libanais Whalid Phares, paraît être aussi un facteur sinon de pondération, tout au moins de créativité pragmatique. Or, le monde à un urgent besoin d'innover pour s'apaiser. Par ailleurs, les fondamentaux géopolitiques de l'Amérique ne vont pas disparaître avec l'arrivée de Donald Trump et ils sont largement trans-partisans. Le style va changer, les méthodes sans doute aussi, mais le nouveau président sera très vite «bordé» et de fait contrôlé par un entourage sérieux mais probablement plus réaliste que celui d'Hillary Clinton, qui augurait d'un interventionnisme classique dogmatique et moralisateur. Le monde n'en veut plus et n'y croit plus.

    Néanmoins, on peut sans doute attendre - et espérer - quelques inflexions notables dans la façon qu'aura la nouvelle Administration de projeter la puissance américaine sur une scène internationale qui a considérablement évolué depuis 2008. Tout va donc dépendre de la confiance et du respect initial portés par les acteurs internationaux au nouveau leadership américain, mais aussi de la capacité de l'Europe à prendre son destin en main. Car le nouveau président, dont les discours de campagne ont souvent été contradictoires, a toutefois exprimé quelques convictions fortes: la Chine étant le peer competitor ultime de l'Amérique, le temps est venu pour l'Europe de se prendre davantage en charge pour sa sécurité, y compris au sein de l'OTAN, qui pourrait être appelée à évoluer vers une structure de lutte contre le terrorisme international plutôt que demeurer une alliance lourde préparant à grands frais des guerres … qui ne se mèneront pas.

    Un homme d'État au pouvoir en France saisirait cette occasion historique pour impulser enfin, autour d'un petit noyau structurant, une vaste initiative de défense et de sécurité européenne, sans naturellement nier l'OTAN, mais en prenant en compte les intérêts propres de notre continent, et en y associant activement Moscou. Cela nécessiterait peut-être d'oser parler de notre sortie éventuelle du commandement militaire intégré de l'Alliance. En effet, notre «réintégration» en 2009, si elle nous associe désormais à la planification des opérations auxquelles nous participons, n'a en vérité pas vu notre poids décisionnel augmenter sensiblement. Or, la France doit retrouver une voix libre, totalement indépendante et forte. Il existe un «besoin de France» qui s'exprime toujours aux quatre coins de la planète et que nous ne pouvons ni ne devons plus ignorer.

    Donald Trump a aussi dit vouloir en finir avec l'Accord sur le nucléaire iranien, essentiellement pour complaire à tel Aviv sans doute. Ce pourrait être une très forte source de tensions régionales…mais aussi une opportunité pour une nation telle que la France, dont le rôle doit être celui d'une puissance médiatrice et équilibrante. De mon point de vue, dans une politique étrangère nationale refondée, il faudrait au contraire savoir s'appuyer sur l'Iran et l'Inde pour promouvoir une stabilisation progressive de la région. La Russie l'a compris. La France devrait l'imiter, plus encore d'ailleurs, si l'Amérique ne le juge pas ou plus souhaitable, pour des raisons propres à sa relation particulière avec Israël. Nous avons ici aussi une belle carte à jouer.

    Donald Trump veut encore en finir avec l'État islamique, et pour cela agir en convergence avec Moscou. On ne peut que s'en réjouir. Vladimir Poutine appelle à une coordination occidentale contre le terrorisme international depuis 2001, et plus encore depuis son implication militaire en Syrie à l'automne 2015. Mais le nouveau président américain a-t-il bien pris la mesure des implications considérables d'une telle détermination? Cela signifie en effet d'en finir avec une politique du chaos et de la déstabilisation des grands États laïcs, menée depuis le milieu des années 2000 par l'Amérique, la Turquie et le Qatar notamment, au profit du courant Frères musulmans ; de cesser immédiatement le soutien aux groupes islamistes prétendument modérés (par contraste avec la sauvagerie spectaculaire de l'EI) qui déchirent le corps de la malheureuse Syrie depuis 5ans pour s'en attribuer le pouvoir et les richesses. Il faut donc décider de sauver l'État syrien et préparer une transition politique crédible et viable au régime d'Assad. Cela veut dire, parallèlement, une politique de grande fermeté vis-à-vis du Qatar, de l'Arabie saoudite et de la Turquie, qui pourrait aller jusqu'à les contraindre à constituer une coalition arabe sunnite véritablement modérée et à cesser leurs doubles jeux délétères. Cela suppose enfin de mener au plus tôt une action diplomatique sincèrement convergente entre Washington et Moscou, pour imaginer et aménager une place politique aux sunnites irakiens mais aussi syriens sans laisser s'y immiscer Al-Qaïda et ses succédanés mêlés à des «reconvertis» de Daech, qui gardent pour cible la déstabilisation des monarchies pétrolières, mais aussi à terme, la fragilisation des nations européennes et de la civilisation occidentale en général.

    Pour Paris, s'arrimer à une telle offensive en claire rupture avec l'actuelle politique occidentale au Moyen-Orient, lui permettrait de sortir d'une impasse et d'un piège aux implications sécuritaires majeures. Nous soutenons en effet de facto en Syrie un islamisme combattant qui nourrit la haine d'une frange de notre propre jeunesse sur notre territoire national et qui ourdit des attentats qui frappent nos concitoyens et minent notre résilience nationale. Nous devons là aussi faire un choix politique et identitaire, l'assumer sans états d'âme et le faire respecter en mettant notre action militaire extérieure enfin en cohérence avec cet objectif politique et sociétal intérieur.

    On compare ici ou là, l'élection de Donald Trump au Brexit. C'est effectivement un second coup de semonce qui affecte l'Europe et la met au pied du mur de ses trop longues inconséquences. Soit l'Europe se reprend et saisit sa chance historique de refonder sa légitimité et de trouver sa place dans un monde qui est en train de se réarticuler sans elle, soit la vague de fond populiste, protectionniste et xénophobe, nourrie par le ralentissement de la croissance mondiale et ses conséquences en termes d'emploi et de creusement des inégalités risque, en France, en Italie, en Autriche, aux Pays Bas et ailleurs, de faire imploser un édifice européen fragilisé qui ne survivra pas longtemps s'il persiste à refuser de répondre aux enjeux identitaires, d'immigration et de frontières qui fragilisent sa légitimité profonde.

    L'économisme béat a ses limites, le quantitative easing aussi. La croissance chinoise marque le pas, ce qui fait craindre une nouvelle crise financière et économique internationale, dont l'EU ne se relèvera pas en ordre dispersé et sans gouvernance politique forte. L'heure est donc au courage et à l'ambition.

    Finalement, au lieu de geindre et de pousser des cris d'orfraie, il faut sans doute se réjouir. Le verdict du peuple américain est rafraîchissant et même rassurant. «L'empire» n'est pas mort. Il renaît de ses cendres et veut exister face à son challenger chinois. Dans ce vaste mouvement géostratégique, la position russe et la manière dont l'Amérique de Trump mais aussi l'Europe vont être capables d'en finir avec leurs vieux cauchemars de Guerre froide pour y associer la Russie, sont rien moins que cardinales. Nul doute que des pressions immenses - à Washington mais aussi en Europe de l'est - vont s'exercer pour poursuivre l'ostracisation de Moscou et la «construction d'un ennemi» qui fait la fortune de l'Alliance atlantique et celle du complexe militaro-industriel américain.

    Pourtant le défi est bien plus grand. C'est l'Occident entier qui devrait faire taire des querelles dépassées pour conjuguer ses forces et stopper l'expansion d'un islamisme conquérant qui a décidé de déstabiliser le ventre mou européen, mais aussi la civilisation occidentale dans son ensemble dont l'Amérique se veut encore la championne. Or, n'en déplaise aux russophobes compulsifs à courte vue, la Russie est un bout d'Occident, et un bout d'Europe évidemment.

    Se tromper d'ennemi par paresse intellectuelle, intérêt immédiat ou dogmatisme est criminel. La France et l'Europe sont sous le feu. Il faut oser une rupture cognitive, intellectuelle et même morale pour réintégrer la Russie dans notre camp, au lieu de la pousser dans les bras chinois qui pourraient l'asphyxier. La Chine est en embuscade en effet. Avec son pharaonique projet de «Nouvelle Route de la Soie», qui vise la création d'un marché asiatique gigantesque unique, l'accaparement des ressources économiques et énergétiques des pays traversés, le désenclavement du Pakistan et de l'Afghanistan, mais aussi, au bout de la mire, l'endiguement des puissances américaine et russe et le contournement de l'Inde, la Chine change de modèle de puissance. Elle passe d'une croissance intérieure à un déploiement de puissance et d'influence vers l'extérieur. Elle prend ses points d'appui en Asie centrale et au Moyen-Orient (mais aussi en Afrique et en Amérique latine) pour atteindre les marchés européens, via un maillage d'infrastructures terrestres et maritimes sans précédent, adossé à une renaissance militaire considérable et à des structures bancaires aux moyens colossaux. Nos technocrates européens s'en rendent-ils compte? Comment comptent-ils réagir, se défendre et/ou saisir les opportunités liées à ce projet? Silence radio. À terme, c'est une alternative financière et normative complète au FMI et à la Banque mondiale qui s'ébauche, avec le rêve d'une nouvelle monnaie de référence -chinoise- des échanges internationaux qui détrônera le dollar. Un «système de Bretton Woods-bis» en somme, mais qui ne dit pas encore son nom et avance à petits pas. Pékin est en train, à bas bruit, de mettre en place un véritable «contre-monde» global.

    Alors? Et si l'on changeait enfin notre logiciel mental, et que l'on considérait ce nouveau président américain - après la «phase Obama» souhaitable pour faire oublier l'aventurisme militaire de Bush fils - comme une divine surprise, le héraut involontaire d'un «kairos» (moment opportun) stratégique inespéré pour l'Europe en pleine déconfiture? Cet homme est certes un peu «rough», rustique, emporté, mais aussi très humain, comme l'a montré son tout premier discours après la confirmation des résultats. C'est surtout un pragmatique. Il n'a pas peur du rapport de force et sans doute peut comprendre qu'un bon deal n'est pas forcément celui qui humilie le concurrent ou le détruit et que l'Amérique sera d'autant plus grande, admirée et suivie qu'elle saura nouer des relations plus équilibrées avec ses grands challengers et ses alliés. Dialoguer avec tout le monde est une marque de force et de confiance en soi, pas de faiblesse. Quant à «l'imprévisibilité» du nouveau Président, dont on veut croire qu'elle va rendre le monde plus instable, c'est sans doute l'une des marques même d'une personnalité de leader.

    Nous sommes bien dans «la fin de la fin de l'Histoire». La question est: veut-on écrire une nouvelle Histoire, plus intelligente et humaine, ou nier l'évidence et se scléroser dans des schémas de pensée dépassés que la réalité du monde dément quotidiennement?

    L'Amérique a en fait aujourd'hui l'occasion inédite de restaurer son crédit moral et politique mondial si entamé depuis 2001 et plus encore depuis 2003, et de retrouver un leadership basé sur une politique stabilisatrice plutôt que sur celle de l'organisation permanente du chaos au Moyen-Orient comme en Europe. Il faut s'en réjouir.

    Ironie du sort, c'est peut-être le nouveau possible «reset» de la politique américaine vis-à-vis de la Russie qui conduira l'Europe à devoir elle-même reconsidérer son ostracisation entêtée de Moscou. Le prochain président français devra tenir compte de cette bascule géostratégique majeure, et, il faut le souhaiter, avoir l'intelligence d'initier et de nourrir une relation constructive et de dialogue respectueux avec notre grand voisin qui n'est pas notre ennemi, mais le pôle asiatique naturel d'une Europe des Nations qui compte enfin dans les nouveaux équilibres mondiaux.

    «Qu'ils me haïssent pourvu qu'ils me craignent» disait l'empereur Caligula. Peut-être Donald Trump est-il tombé un jour sur cette citation.

    Caligula disait aussi: «j'aime le pouvoir car il donne ses chances à l'impossible». C'est plus engageant.

    Caroline Galactéros (Bouger les lignes, 11 novembre 2016)

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  • Le Marais et le Feu...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'Alexandre Douguine cueilli sur Katehon et consacré aux conséquences de la victoire de Donald Trump... Théoricien politique russe influent, nourri par les penseurs de la Révolution conservatrice des années 30 ainsi que par les idées des nouvelles droites européennes, Alexandre Douguine est la figure principale du mouvement eurasiste. Pour découvrir de façon plus précise ses idées, on pourra se reporter à L'appel de l'Eurasie (Avatar, 2013), le texte d'une longue conversation entre lui et Alain de Benoist, mais également à deux de ses œuvres traduites en français, La Quatrième théorie politique (Ars Magna, 2012) et Pour une théorie du monde multipolaire (Ars Magna, 2013).

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    Donald Trump : le Marais et le Feu

    « Le Marais » c’est le nouveau nom de la secte globaliste, des adeptes de la société ouverte, des pervers LGBT, de l'armée de Soros, des post-humanistes et ainsi de suite. Il est absolument impératif de dessécher le Marais non seulement pour les États-Unis: c’est un défi global pour nous tous. A nos jours, chaque peuple est prisonnier de son propre Marais. Nous, tous ensemble, devons commencer la lutte contre le Marais russe, le Marais français, le Marais allemand etc. Nous avons besoin de purger nos sociétés de l'influence du Marais. Au lieu de nous battre entre nous, desséchons-le ensemble. Assécheurs de Marais du monde entier, unissez-vous !

    L'autre point c’est que l'anti-américanisme est fini. Non pas parce que c'était faux, mais exactement le contraire : parce que le peuple américain lui-même a commencé la révolution justement contre ce côté des États-Unis que nous avons tous haï. Maintenant l'élite dirigeante européenne, ainsi qu'une partie de l'élite russe (qui est encore libérale), ne peuvent pas être blâmées comme avant pour être trop pro-américaines. Ils doivent désormais être blâmées pour être ce qu'ils sont : une bande corrompue, pervertie, avare de banksters et destructeurs des cultures, des traditions et des identités. Alors, laissez-nous égoutter le Marais européen. Assez avec Hollande, Merkel et Bruxelles ! L’Europe pour les européens. Soros et sa secte doivent être publiquement condamnés !

    Dorénavant, le Marais est un phénomène extraterritorial, exactement comme un réseau terroriste international. Le Marais est partout et nulle part. Hier, le centre du Marais, son noyau, était situé aux États-Unis, mais plus maintenant. C'est une chance pour nous tous de commencer à les chasser. Le Marais ne se manifeste plus sous une forme fixée au niveau régional. Néanmoins, il existe et a toujours une puissance extrêmement grande. Mais son caractère antinational est maintenant explicitement évident. Le Marais ne peut plus se cacher derrière l'Amérique. Il est parti en exil. Mais où ? Au Canada ? En Europe ? En Ukraine ? Pour d'autres planètes où divers acteurs et actrices dopés promettaient d'émigrer dans le cas de la victoire de Trump ? Maintenant, il est temps pour eux de tenir leur promesse. Tout cela semble être l'ascension des globalistes. Ils sont maintenant absorbés dans un non-lieu, une utopie, dans la terre de l'utopie libérale - un « no man's land ». Nous sommes maintenant témoins de la déterritorialisation du Marais, de l'élite mondialiste et du gouvernement mondial.

    Quelle est la structure du Marais ?

    Premièrement, le Marais est une idéologie - le libéralisme. Nous avons besoin d'un procès de Nuremberg pour le libéralisme, la dernière idéologie politique totalitaire de la Modernité. Fermons cette page d'histoire.

    Deuxièmement, le Marais est une culture spéciale postmoderniste. Elle est basée sur la décomposition de toute entité par digitalisation, schizomorphisme obligatoire, et ainsi de suite. Le drainer signifie de rétablir l'unité de l'art apollinien. L'art doit revenir au holisme.

    Troisièmement, c’est le capitalisme mondial transnational. Ceci est le moteur matériel du Marais. C’est des emprunts et la Réserve fédérale qui imprime des billets verts virulents. Nous devons mettre fin à tout cela et revenir au secteur productif réel et à l’approche mercantiliste.

    Je propose de redécouvrir les idées de Pitirim Sorokin. Il a noté que la dynamique sociale de l'histoire est une chaîne de paradigmes sociaux qu'il appelait idéationnelle, idéaliste, et sensualiste. L'idéation est la domination absolue de l'esprit sur la matière, l'ascétisme et la soumission vigoureuse du monde matériel à l'aspiration spirituelle et religieuse. Le type idéaliste est équilibré et fondé sur la coexistence harmonieuse de l'esprit et de la matière, où la partie spirituelle est légèrement dominante, mais non exclusive (comme dans le type idéationnel). Le type sensualiste de la société est la domination de la matière sur l'esprit, le corps sur l'âme. Le Marais est le type sensualiste de la société. Jusqu'à récemment, il semblait que « sensualiste » et « américain » étaient synonymes. Mais après le triomphe de Trump, tout est différent. Maintenant sensualiste signifie global et excentrique. Il y a une sorte de "translatio imperii" nulle part et partout.

    Sorokin a souligné que la nature cyclique de la société suit l’unique chaîne de succession : de l'idéationnel à l'idéaliste, puis sensualiste. L'idéaliste ne peut pas succéder au sensualiste, comme il est impossible pour le Marais de se retransformer en semi-Marais. Après le Marais vient le Soleil, c'est-à-dire le Feu, l'Esprit - l'Esprit dans sa forme radicale et idéationnelle. Pour dessécher le Marais, nous avons besoin du Feu Solaire, un Grand Feu qui devrait être en abondance.

    Le Marais et le Feu sont deux éléments opposés répartis à travers la terre. La géopolitique devient alors verticale. Les deux peuvent être trouvés à tout endroit. Le sens du lieu maintenant est l'élan du processus de drainage du Marais. Où ? Ici et maintenant.

    Le Marais n'est plus l'hégémonie américaine car le Président de l'Amérique lui-même rejette une telle hégémonie. C'est donc l'hégémonie « tout court », l'hégémonie comme telle avec un vide purement postmoderniste au centre.

    Les Etats-Unis sont l'Extrême Occident du monde. C'est l'espace de Minuit. Et là, le dernier point de la Chute est atteint. Le moment qui se déroule est celui du changement de pôles. L'Occident se transforme en Orient. Poutine et Trump sont dans les deux coins opposés de la planète. Au XXème siècle, ces deux extrêmes étaient incarnés par les formes les plus radicales de la Modernité - le capitalisme et le communisme - deux monstres apocalyptiques - le Léviathan et l’Hippopotame. Maintenant, ils se sont transformés en deux promesses eschatologiques : la Grande Russie de Poutine et l'Amérique qui se libére sous Trump. Le XXIème siècle a enfin commencé.

    Donc tout ce dont nous avons besoin maintenant, c'est le Feu.

    Alexandre Douguine (Katehon, 14 novembre 2016)

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