Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Points de vue - Page 86

  • Quand la Chine instrumentalise l’Université...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Françoise Monestier cueilli sur Polémia et consacré aux opérations d'influence menées par Pékin dans l'Université française, au travers, notamment, de son Institut Confucius.

    Concernant, plus généralement, les opérations d'influences chinoises, on peut consulter le rapport très copieux de l'IRSEM (plus de 600 pages), évoqué dans l'article, sur le site de cet organisme du ministère de la défense.

     

    Institut Confucius_Université.jpg

     

    Quand la Chine instrumentalise l’Université

    Il y a belle lurette que l’on connaît le poids du gauchisme dans le monde enseignant français, de l’école maternelle à l’université en passant par les lycées, tous gangrénés par cette maladie infantile du communisme décortiquée en son temps par le camarade Lénine. Si vous y ajoutez l’islam et les élucubrations des décoloniaux (enfants naturels de Mai 68 et des guerres coloniales), vous comprenez que notre système éducatif est à bout de souffle, quoique puissent   en dire Jean-Michel Blanquer ou Frédérique Vidal, tout juste bons à essayer de colmater des brèches de plus en plus importantes. Et pendant qu’ils se livrent à ces différents rafistolages, la Chine communiste avance ses pions sur l’échiquier académique en voulant imposer sa conception du monde, comme le constate le sénateur Gattolin dans un récent rapport du palais du Luxembourg sur les influences étrangères dans les universités françaises.

    Raffarin porte-coton de Pékin

    Le cas de la Turquie est également évoqué mais il est consternant de constater la naïveté des autorités françaises qui ont laissé s’installer les successeurs de Mao faire leur nid dans le monde du savoir sans y prendre garde et qui se réveillent bien tard alors que le ver est dans le fruit et que Pékin a patiemment tissé sa toile avec la complicité – il est vrai- de Jean-Pierre Raffarin, véritable commis-voyageur des dirigeants communistes chinois.

    Depuis janvier 2018, Jean-Pierre Raffarin est le représentant spécial du ministère des Affaires étrangères pour la Chine.  Sept ans plus tôt, il avait rédigé avec son épouse Ce que la Chine nous appris, un ouvrage publié en chinois – et dont il n’a pas surveillé la traduction, n’étant pas sinophone. Dans ce bouquin à la gloire du régime, il déclare que « les dirigeants chinois sont tous d’une grande qualité, que l’Ecole du Parti est « l’ENA de la Chine » et souligne l’utilité de l’absence d’opposition politique. Bien sûr, il critique le Dalaï-Lama pour ses « objectifs séparatistes ».  Pourtant, dans un livre paru en 2019, il était écrit : « On observe un crescendo : après les services, l’industrie, puis l’alimentaire, ce sont nos principes et nos valeurs qui sont à présent visés » (Emmanuel Dubois de Prisque/ Sophie Boisseau du Rocher dans La Chine est le monde).

    Instrumentalisation des sciences humaines et sociales , pressions sur le monde universitaire français, étudiants chinois formés pour influencer le monde enseignant et étudiant français ou surveillés pour rester dans la droite ligne du parti communiste chinois, Pékin ne recule devant rien pour parvenir à ses fins comme le confirment d’ailleurs Pierre Charon et Jean-Baptiste Jeangène, auteurs d’un autre rapport, publié cette fois par l’Institut de de recherche stratégique de l’Ecole Militaire ( IRSEM) et révélant que « plus de 300.000 personnes seraient mobilisées par le ministère de la Sécurité de l’Etat [chinois]  pour organiser la propagande à l’étranger et débloqueraient une véritable manne financière permettant d’arroser les universités complaisantes ». Les deux chercheurs rappellent que « le Parti-Etat utilise les Universités pour des connaissances et des technologies par des moyens légaux ou illégaux et dissimulés comme le vol et l’espionnage ».

    « La Chine apparaît à ce jour comme l’État le plus en mesure de conduire une stratégie d’influence globale et systémique », précisent de leur côté les auteurs du rapport sénatorial qui décrit des tentatives d’influence ne se limitant plus aux questions d’intelligence économique mais s’étendant aux libertés académiques et à l’intégrité scientifique.

    Confucius à la conquête de Tahiti et de Nouméa

    Parmi les outils de Pékin figurent en particulier les Instituts Confucius (IC), présents partout dans le monde entier. Chez nous, le premier Institut Confucius a vu le jour à Poitiers avec le soutien – vous vous en doutez – de l’inévitable Raffarin. Ils sont aujourd’hui au nombre de dix-sept, de Montpellier à Clermont-Ferrand en passant par Strasbourg, Montpellier et bien sûr Paris. Pékin n’oublie pas l’outre-mer puisqu’elle a ouvert une succursale à Tahiti afin – je cite — « de créer des passerelles entre les cultures polynésiennes et chinoises » et compte bien installer une antenne à Nouméa, haut-lieu de toutes ses attentions dans l’attente d’une victoire des indépendantistes canaques au prochain référendum sur la Nouvelle-Calédonie qui deviendrait ainsi protectorat chinois, sans parler des eaux territoriales où la marine jaune pourrait s’ébattre en toute liberté.

    Officiellement, il s’agit de faire rayonner la culture chinoise, en autonomie ou en partenariat avec des universités. Mais ces instituts sont en fait des instruments de propagande qui menacent la liberté académique de leurs partenaires et, dans le pire des cas, peuvent abriter des espions. De plus, les manuels utilisés sont tous avalisés par le gouvernement chinois qui peut ainsi contrôler efficacement tous ceux qui apprennent le mandarin et réprimander ceux qui seraient tentés de parler du Tibet ou des Ouïghours dans leurs interventions.

    Décrits depuis 2019 par le Comité central du parti communiste comme les outils d’une « politique gouvernementale »,  ces VRP du président chinois qui présentent, par exemple, Taïwan comme faisant partie intégrante de la Chine, sont des relais du récit officiel dans les facultés qui n’ont pas leur propre département d’études chinoises. Hélas ! Par naïveté ou par bêtise, la plupart des universités françaises ont signé avec Pékin des partenariats et des formes de coopération qui place ainsi les hommes du régime chinois et imposent les vues de celui-ci en en finançant ses investissements…

    L’œil de Pékin

    Non content d’avoir à sa botte les Instituts Confucius, le Parti communiste chinois dispose avec le Front Uni d’un outil de contrôle de la diaspora, très actif au sein de la communauté et qui permet de « tenir » les résidents chinois à l’étranger et tout particulièrement les étudiants qui doivent faire valider par leur autorités leur diplôme afin de le faire reconnaître par Pékin. Le rapport Gattolin s’alarme « qu’il ait été confié à des étudiants des missions de renseignement au sujet d’autres étudiants chinois qui auraient manifesté des opinions dissidentes ». Il ne s’offusque cependant pas de la côte de popularité dont jouit Raffarin auprès de Pékin qui, par ailleurs, a jeté son dévolu sur un soutien de Mélenchon , Maxime Vivas. Cet obscur militant de l’Hérault a été cité par Wang Yi, ministre des affaires étrangères de Pékin, pour avoir écrit un bouquin (Ouighours, pour en finir avec les Fake News), dans lequel il affirme que les Ouïghours ne sont nullement l’objet d’une répression féroce de la part de Pékin. Dans le même ordre d’idées, les responsables communistes ouvrent grandes leurs portes à tous les enseignants gaulois qui acceptent ainsi de « devenir dépendants de la Chine et de devenir ainsi des relais d’influence », faute souvent pour la France de pouvoir financer leurs recherches.

    Ouvrir les yeux

    Pékin a donc une capacité incroyable à s’adapter selon l’endroit où elle souhaite opérer. Identifiant les manquements de notre système, elle cible ainsi les petites universités dont, par définition, les labos sont moins dotés, et où elle peut obtenir des résultats à peu de frais.

    Sur le territoire français, l’appareil de surveillance mis en place par le régime communiste cible ses ressortissants ou les Français issus de la diaspora chinoise et ayant donc des parents en Chine, moyen de pression efficace pour une puissance sans grands scrupules. Si un étudiant à Paris critique en classe la politique menée au Tibet, au Xinjiang ou à Hongkong, des policiers se mettent en mouvement dans une province chinoise. Si c’est un professeur, des menaces à peine voilées vont être prononcées, mettant en péril le partenariat tant vanté.

    En 2016, sous la pression de l’ambassade de Chine, les responsables de Sciences Po ont ainsi annulé une conférence du Dalai-Lama et il y a maintenant six mois, le chercheur Antoine Bondaz était traité de « petite frappe » et de « troll idéologique » par l’ambassadeur Lu Shaye. Son crime ? Avoir dénoncé les pressions de la Chine sur des sénateurs français qui voulaient se rendre à Taïwan. L’histoire ne dit pas si André Gattolin aurait été du voyage. Quoi qu’il en soit, et quelle que soit sa pertinence et sa justesse d’analyse, son rapport arrive trop tard. Le mal est fait.

    Françoise Monestier (Polémia, 03 novembre 2021)

    Lien permanent Catégories : Manipulation et influence, Points de vue 1 commentaire Pin it!
  • Les antifas, milices du mondialisme...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Nicolas Lévine, cueilli sur le site de la revue Éléments et consacré aux antifas, qui ont été lâchés par leurs maîtres sur Eric Zemmour lors de son passage à Nantes le 30 octobre...

     

    Antifas_Manifestation.jpg

    Zemmour face aux antifas, milices du mondialisme

    Les « antifas » ont encore sévi. Cette fois-ci, c’est Éric Zemmour qui en a fait les frais, le samedi 30 octobre, au Zénith de Nantes, où il intervenait. Tout le monde a pu voir les images. Un déchaînement de violences où « des fils et de filles de » ont pu, en toute impunité, faire valoir leur amour du débat. Sociologie d’une jeunesse dorée, rose et bourdieusienne, qui, en dernière analyse, est la gardienne objective d’un système qu’elle contrôle de bout en bout.

    Aucun média, dans la longue liste des organiques, des produits par le système et qui le renforcent jusque dans l’opposition prophylaxique qu’ils manifestent sporadiquement, aucun média, donc, en France, n’est plus calé sur la doctrine du régime progressiste que Le Monde. Sa lecture en est fascinante. Les journalistes, résilients, toujours du côté du manche, défendent les racisés et Greta Thunberg, des experts s’écharpent sur des taxes à « 2,3 ou 2,5 % ? », on y débat avec la même gravité de la précarité menstruelle et de la guerre au Sud-Soudan, et puis bien sûr, on tape à fond sur l’esstrêême droâte, encore plus depuis qu’elle vire zemmourienne. On le fait avec le sérieux qui a fait la réputation du journal, mais sous la plume d’anciens thésards d’extrême gauche reconvertis en Décodeurs avant vingt-cinq ans. C’est le journal du « cercle de la raison », des CSP+ des hypercentres, des élites sécessionnistes, des 20 % de l’électorat français qui adhèrent à Emmanuel Macron. C’est la Pravda du mondialisme, en somme.

    Quand les beaux quartiers font la révolution

    En 2018 se tenait à Paris le procès de Morillo et Dufour, les skins qui avaient frappé et tué le militant antifa Clément Méric. Curieux de voir à quel point la magistrature française allait se payer les fachos meurtriers, nouveaux SA au pays des droits de l’homme, du tampon hygiénique gratuit et des décapitations de professeurs et de curés, j’avais suivi le procès en direct sur le site du Monde. Sur le fil, c’était un festival. Le ou les journalistes responsables du live s’en donnaient à cœur joie dans le racisme de classe. Méric était le fils d’un couple de professeurs « très dignes », qui s’exprimaient clairement, qui n’avaient pas de « haine » – comme la plupart des rescapés du Bataclan qui, en ce moment, montrent à travers leurs témoignages l’influence mortifère du développement personnel, lequel est un sous-produit du libéralisme ; tandis que les parents de Morillo, eux, était de simples artisans, autant dire des ploucs, « mal à l’aise à l’oral », qui avaient inculqué à leur rejeton la-haine-de-l’Autre en lui apprenant à aimer la France – le patriotisme mène inexorablement au fascisme, c’est évident aux yeux du Monde. Les journalistes se délectaient des nombreuses interventions du juge, certaine Xavière Simeoni, qui refusait la thèse de l’unique coup hélas mortel alors que l’un des deux experts l’estimait plausible, qui mouchait à plusieurs reprises Morillo, Dufour et les témoins à décharge.

    La peine ? Onze années de prison pour le premier, sept pour le second. Des racailles qui massacrent pendant cinq minutes ceux qu’elles ont ciblés au hasard en tapant dans la tête afin d’en faire des paraplégiques, qui n’expriment ensuite aucun regret, aucune empathie pour leurs « victimes », ces racailles-là prennent en général moitié moins – les mineurs – et ils sont légion – ont même droit au centre éducatif fermé. On sait pourquoi. Comme on sait que, si les rôles avaient été inversés, si Méric avait tué Morillo, l’antifa, le facho, le verdict eût été différent. La magistrature protège ses enfants. En bons bourdieusiens qu’ils sont pour la plupart, les juges le reconnaîtront.

    Fils à papa, fille à maman

    Je me souviens d’un papier de L’Obs qui racontait les comparutions immédiates de quelques rares « black blocs » interpellés durant Nuit Debout. Au programme, pour l’essentiel, des jets de projectiles divers sur les forces de l’ordre. Ils venaient tous l’un après l’autre à la barre, ces jeunes gens qui se définissaient comme « révolutionnaires ». D’où venaient-ils ? Des « quartiers » ? De la France périphérique ? Oh que non. C’étaient des Hyppolite et des Charlotte, des Adelaïde et des Pierre-Jean. Ils étudiaient à Normale Sup’, à Polytechnique, dans des écoles de journalisme. Et à la barre, ils n’en menaient pas large. Ces fiers anars, qui pratiquent le cassage de gueule comme argument, qui prônent la violence politique sans ambiguïté, étaient parfois au bord des larmes en évoquant leur semestre à achever, la réputation de leur famille, un frein à leur employabilité future. Finalement, ils s’en sortaient très bien sur l’échelle des Gilets jaunes, rarement polytechniciens et fils d’avocats, eux.

    L’antifascisme des classes dominantes

    Ces révolutionnaires des beaux quartiers qui voient tout en termes de pouvoir et de domination, on se demande quel pouvoir et quelle domination ils subissent sinon ceux du réveillon de Noël chez leur « bonne maman » et de leur abonnement Netflix. Très présents en Île-de-France, près des postes occupés par leurs parents, les antifas sont visibles : sites Internet, webzines, fanzines, bars associatifs. Outre qu’ils s’agrègent à nombre de manifestations, ils ont les leurs, qui s’en prennent à un traité capitaliste, une loi « raciste » ou commémorent la Commune, la mort d’un camarade péruvien ou une révolution de trois heures dans une province du Kirghizistan.

    Certes, on compte parmi eux quelques vrais prolétaires, étudiants pauvres ou racisés qui excitent l’imagination de nos normaliens entre deux soirées MD dans un rooftop-squat du 10e arrondissement. Mais le mouvement antifasciste contemporain est bourgeois, une sorte d’école de formation de la bourgeoisie métropolitaine, c’est-à-dire de gauche, qui, à la fois ennuyée et fascinée par son idéalisme, laisse s’y perdre certains éléments de sa jeunesse. Certains, rares, iront élever des chèvres en Ardèche ; la plupart, comme les soixante-huitards dont ils sont les héritiers en pire, profiteront plutôt rapidement, après un rappel à la loi et un conseil de famille, des réseaux de papa et maman pour devenir ce qu’ils n’auront du reste jamais cessé d’être : des bourgeois.

    Les auxiliaires des forces de l’« ordre »

    Ceux qui n’avaient pas encore deviné pourquoi le pouvoir ne brise pas les antifas l’auront enfin compris en observant le mouvement des Gilets jaunes. Dès décembre 2018, par grappe de trente ou cinquante, ils débarquaient dans les cortèges, traquant les militants de l’Action française, les Identitaires parisiens, enfin, tout ce qui ressemblait à un patriote conséquent. Ils passaient plus de temps à faire ce travail d’auxiliaire des Renseignements territoriaux qu’à affronter les forces de l’ordre. Cent témoignages indiquent que la préfecture de police et Beauvau, alors, laissèrent les antifas casser des gueules, casser et brûler du mobilier urbain, des vitrines, des monuments. Objectif de la manœuvre ? Faire peur, derrière son écran, à la bourgeoisie, et dès lors incarner l’ordre face à des agitateurs pour qui les Gilets jaunes des débuts, c’est-à-dire l’immense majorité d’entre eux, les vrais et innombrables Gilets jaunes, étaient beaucoup trop à droite, soit des fachos, soit des imbéciles manipulés par des fachos.

    Heureusement, Hyppolite et ses copains étaient là, prêts à subir la colère de leurs mères énarques et leurs portraits enamourés dans Libération, pour expliquer au peuple que la révolution, c’est un truc d’extrême gauche ou ce n’est pas. J’ai vu de mes yeux des antifas se frayer un chemin en fracassant tout sur leur passage, devant d’épaisses rangées de CRS qui ne bougeaient pas. Pour mieux les attraper ensuite ? Que nenni. Le pouvoir a les noms, les adresses : il n’y a plus qu’à. Il faut quelques jours pour dissoudre Génération identitaire, il faut quatre années pour dissoudre Ligue de défense noire. De toute évidence, le pouvoir n’a aucune envie de dissoudre les groupuscules antifas.

    Contre Zemmour, tout est permis

    Ces derniers viennent de se distinguer lors de la venue d’Éric Zemmour à Nantes. Pour moi qui les observe depuis longtemps, cela n’a rien d’étonnant, et je suis même surpris qu’ils n’aient pas agi plus tôt. En effet, pour eux, le fascisme commence avec le PS – dans lequel ils feront ensuite souvent carrière car c’est le machin qui offre le plus de débouchés. Alors Zemmour, vous imaginez ? C’est le nazisme, c’est même la SS, c’est même carrément le bras droit de Reinhard Heydrich ! Ils menacent de tout casser dans leur fac quand cette dernière invite François Bayrou ; face à l’heureuse chevauchée de Zemmour dans les sondages, au réveil du peuple français qui, grâce au brillant écrivain et journaliste, prend conscience qu’il existe encore en tant que peuple, les antifas sont mobilisés comme jamais. On peut donc s’attendre à ce qu’ils se manifestent régulièrement durant la campagne, cherchant la bagarre avec les fascistes imaginaires, prêts à aller s’indigner ensuite chez Brut, Mediapart, Loopsrider et Quotidien – où iront travailler ceux qui auront été refusés par le PS. Dans une démocratie saine, et plus encore dans la nôtre qui fait de la non-violence un principe sacré, l’épisode de Nantes devrait suffire à provoquer la dissolution des groupuscules participants ou ayant appelé à la manifestation. Mais l’on ne voit que trop bien comment, au contraire, le pouvoir va utiliser les antifas contre Zemmour. « Voyez comme il divise », vont psalmodier les journalistes libertaires ; « Voyez comme il produit de la violence », fulmineront les éditorialistes libéraux. La violence des antifas avait soudé les membres des bourgeoisies des deux rives contre les Gilets jaunes. Leur violence va une nouvelle fois souder l’électorat d’Emmanuel Macron contre les « déplorables » qui suivent Éric Zemmour. Et comme toujours depuis un siècle, en définitive, les gauchistes ne seront rien d’autre que les idiots utiles du capital, qui est bien sûr le principal moteur de la mondialisation.

    Nicolas Lévine (Site de la revue Éléments, 5 novembre 2021)

    Lien permanent Catégories : Points de vue 0 commentaire Pin it!
  • Décision et souveraineté...

    Vous pouvez découvrir ci-dessous une nouvelle vidéo d'Ego Non qui évoque la conception de la souveraineté et de la décision politique chez Carl Schmitt, notamment au travers de son essai Théologie politique (1922).

     

                                           

    Lien permanent Catégories : Multimédia, Points de vue 0 commentaire Pin it!
  • Pouvoir d’achat, vraiment ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'Hervé Juvin, cueilli sur son site personnel et consacré à la multiplication des pénuries et des hausses de prix depuis plusieurs mois.

    Économiste de formation et député européen, Hervé Juvin est notamment l'auteur de deux essais essentiels, Le renversement du monde (Gallimard, 2010) et La grande séparation - Pour une écologie des civilisations (Gallimard, 2013). Il a également publié un manifeste intitulé France, le moment politique (Rocher, 2018).

    Pénurie_Matières premières.jpeg

    Pouvoir d’achat, vraiment ?

    Une école américaine prévient les parents, que pour cause de rupture des chaînes d’approvisionnement, elle n'est pas en mesure d’assurer les petits déjeuners, ni sans doute les déjeuners. Les parents sont priés de nourrir leurs enfants avant l’école. Et des restaurants français s’inquiètent du nombre de produits en rupture de stock, des citrons aux mangues.

    Dans plusieurs secteurs industriels, dont l’automobile, la pénurie de semi-conducteurs arrête les chaînes de montage et provoque l’arrêt des livraisons. Et les garagistes signalent une impressionnante hausse du prix de vente des véhicules d’occasion ; jusqu’à 25 % depuis l’été !

    Des pénuries qui s’installent

    En Grande-Bretagne, plusieurs des premières usines de fertilisants, ces produits chimiques utilisés pour rendre la terre féconde et favorable aux cultures, sont arrêtées, en raison des difficultés d’approvisionnement en gaz naturel. Ce qui conduit les agriculteurs à s’interroger sur la récolte de 2022, et les prévisionnistes à pousser des cris d’alarme ; après la pénurie d’électricité à l’hiver 2021-2022 (espérons que les stocks de la France suffiront !), faut-il préparer les pénuries alimentaires pour le printemps-été 2022 ?

    Ajoutons à ces informations la réouverture d’une centrale à charbon au Royaume-Uni pour pallier la déficience des éoliennes due au manque de vent en cet automne, et nous pourrons retourner la question dans tous les sens ; comment ne pas s’inquiéter, non seulement du pouvoir d’achat, mais de l’approvisionnement en denrées essentielles, vitales, stratégiques, pour 2022 ? Car tout indique que les ruptures de chaînes, les retards de livraison, les goulots d’étranglement sont là pour durer.

    Trois facteurs expliquent une hausse des prix à la consommation que les indices de l’inflation reflètent mal, une tension croissante sur les approvisionnements, et une dégradation rapide et sensible de la qualité de vie des Français et des Européens.

    Un modèle obsolète

    D’abord, des modèles d’affaires délirants, dont le meilleur exemple est le « zéro stock, zéro délai, zéro trésorerie ». Les entreprises qui distribuent toute la trésorerie disponible à leurs actionnaires, notamment en rachetant leurs propres actions, qui ont supprimé tous leurs stocks (comme la France l’a fait avec ses masques sur recommandation de l’OMS !) et qui travaillent à flux tendu n’ont pas mesuré le risque qu’elles couraient en cas de toute rupture de chaîne logistique, en cas de tension géopolitique, ou simplement d’accident d’exploitation ?

    Voilà pourquoi l’État — le contribuable ! — a dû intervenir aussi vite et aussi massivement ; pour assurer la trésorerie de fins de mois que les dividendes servis aux actionnaires avaient sorti de l’entreprise ! Et voilà comment ce sont les déficits publics, donc les contribuables présents et futurs, qui paieront pour des modes managériales non durables, non soutenables — mais tellement rentables à court terme ! Et voilà comment l’entreprise privée reporte ses risques sur la collectivité — car nos modes de vie sont en jeu !

    L’argent ne remplace pas la stratégie

    Ensuite, l’erreur stratégique majeure, qui ignore qu’il y a des secteurs, des produits, des entreprises stratégiques. À l’inverse de ce qui s’enseigne à Sciences Po ou dans les écoles de commerce, tout ne se résume pas aux comptes, à la valeur boursière et au TRI (taux de rentabilité interne). L’argent n’achète pas tout. Il n’achetait pas des masques, des vaccins, il n’achètera pas le magnésium ou les engrais, pas plus que les semi-conducteurs et les puces — parce que ce sont là des produits stratégiques, des produits où peuvent se jouer la vie ou la mort, la puissance ou la dépendance, et que ceux qui ne sont pas capables de produire eux-mêmes ce qui leur est nécessaire ont d’avance perdu les guerres qu’ils ne pourront pas livrer. L’intelligence économique est l’arme décisive dans la guerre économique qui a remplacé la guerre des armes — ou qui décidera du sort des armes, qui sait ?

    La folie « écologique »

    Enfin, le totalitarisme écologique. La réalité du dérèglement climatique est utilisée pour porter les plus violentes attaques que l’indépendance des Nations et les libertés individuelles aient connues depuis les socialismes autoritaires. Et ce sont bien à des démocraties populaires que ressemblent de plus en plus ces pays qui souscrivent au pass sanitaire, instaurent le contrôle numérique permanent des populations, veulent faire payer pour tout et par tous les services gratuits de la nature, et plongent tout droit dans une dépendance aux maîtres du numérique dont les Etats ne semblent pas mesurer à quel point ils sont la nouvelle menace totalitaire du moment.

    Au moment où la COP26 réunit à Glasgow un grand nombre de dirigeants venus se soumettre aux injonctions des ONG et des Fondations qui occupent la rue, mais aussi les médias avec des injonctions aussi péremptoires qu’infondées, il n’est pas inutile d’affronter les contradictions affolantes du système écologique qui se met en place, et qui aggrave les tensions déjà observées sur les prix, les approvisionnements, les modes de vie. Tout commence avec l’affirmation scientifiquement erronée qu’à problème global, réponse globale. Les écosystèmes ne sont jamais les mêmes, et la réponse aux changements du climat — qui entraînent ici ou là refroidissement ! — si elle doit être pertinente sera d’abord locale, elle sera choisie, et elle entraînera l’adhésion des populations concernées — ou bien son autoritarisme la condamnera. Tout continue avec le syndrome bien connu de celui qui cherche la pièce perdue là où il y a de la lumière.

    Rien ne justifie les oukazes portés contre la France, l’un des cinq pays les plus vertueux de la planète en matière d’émissions de CO2 (0,6 % du total, grâce au nucléaire !), l’un aussi de ceux qui a su le mieux préserver son territoire et ses côtes. Chacun le sait, c’est en Asie, c’est en Amérique du Nord et du Sud que se jouent les équilibres de la planète, et les privations de libertés, et les restrictions insensées exigées par le Green Deal n’auront que deux conséquences. D’abord ruiner des pans de l’industrie européenne et affaiblir l’Union, et surtout, fâcher durablement les Européens avec l’écologie. La protection de la qualité de la vie en Europe et la défense de nos territoires sont chose trop sérieuse pour être laissées à la Commission.

    Des migrants aux vaccins, les preuves de l’abandon européen ne manquent pas. Et pour finir, le hold up sur l’écologie par Fondations et ONG sert à tout, et d’abord à manipuler les consciences, pour cacher les réalités qu’il ne faut pas voir. Le vrai enjeu de l’écologie est d’en finir avec les chaînes logistiques qui font le tour de la terre, et de relocaliser massivement les productions ; c’est de réduire le commerce international par un découplage entre continents. C’est d’en finir avec le nomadisme des biens, des capitaux et des hommes qui procède à la grande expulsion de ceux qui sont d’ici et de chez nous, c’est de lutter contre des migrations de masse qui ne peuvent que converger vers les terres tempérées et détruire les équilibres écologiques construits depuis des siècles – non, la terre n’est pas à tout le monde, mais à ceux qui se sont battus pour la garder des invasions, la mettre en valeur et la rendre féconde.

    C’est d’en finir avec la liberté de mouvement des capitaux, qui conduit nécessairement à valoriser le moins-disant écologique, et c’est d’en finir avec le privilège insensé du capital protégé des politiques nationales et de la loi par les cours d’arbitrage qui l’immunisent des choix démocratiques. Et c’est de sortir de la globalisation par la prise de pouvoir des collectivités sur les territoires qui sont les leurs, et par la responsabilité familiale de la transmission d’un cadre de vie préservé, bienveillant et sain. Famille, territoire, frontières, démocratie ; rien ne saurait être plus éloigné du vocabulaire de ceux qui entreprennent d’en finir avec la démocratie par la peur, la fausse science et la vraie propagande.

    Le catastrophisme écologique et la panique pandémique s’ajoutent pour imposer aux Nations européennes des contraintes qui ne sont ni environnementales, ni sanitaires, mais qui servent l’agenda globaliste de nos pires ennemis ; en finir avec la liberté des peuples européens. Si l’Union européenne doit avoir un sens, c’est de rendre aux citoyens des Nations européennes le pouvoir sur eux, sur leurs terres et sur la technique qui leur a été enlevé. Et c’est de préserver cette qualité de vie qui a été leur apanage pendant tant si longtemps. Que le vertige qui saisit la COP26 devant les conséquences d’engagements aberrants le rappelle à ceux qui oublient si vite qui les a élus, et pour quoi !

    Hervé Juvin (Site officiel d'Hervé Juvin, 31 octobre 2021)

    Lien permanent Catégories : Points de vue 0 commentaire Pin it!
  • D'un délire idéologique à l'autre...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Gérard Dussouy cueilli sur Voxnr et consacré au déni du réel qui pèse sur l'Europe... Professeur émérite à l'Université de Bordeaux, Gérard Dussouy est l'auteur de plusieurs essais, dont Les théories de la mondialité (L'Harmattan, 2011) et Contre l'Europe de Bruxelles - Fonder un Etat européen (Tatamis, 2013).

     

     

    Cologne_Mosquée.jpg

    Mosquée centrale de Cologne...

     

    D'un délire idéologique à l'autre

    De tous les bords en Europe, le déni du réel et le délire idéologique qui va avec l’emportent. Il est vrai que moins les hommes n’ont de prise sur la réalité et plus ils s’en remettent à des représentations mythifiées. C’est un constat vérifié depuis longtemps par les sociologues pragmatistes. D’un côté, Il y a tous ceux qui s’accrochent à leur vision universaliste et naïvement humanitaire, alors que la réalité du choc des civilisations et des empires s’impose à leurs yeux, et d’un autre côté, ceux qui entretiennent la nostalgie d’une souveraineté nationale perdue, et qui ne peut plus être parce qu’elle est déconnectée de la puissance.
    Le pic du délire du multiculturalisme, version postmoderne de l’universalisme, a semble-t-il été atteint en Allemagne. Après quelques autres villes allemandes, la bourgmestre de Cologne vient d’annoncer qu’à l’avenir, chaque vendredi, l’appel du muezzin à la prière lancé à tous les Musulmans, sera autorisé. Sous certaines conditions, et en fonction des quartiers, est-il dit. L’argument avancé est que la décision est commandée par la tolérance et l’équité et par la volonté d’aller vers une société plus homogène et plus fraternelle. Alors que ces autorisations sont clairement des capitulations sociétales, significatives, tout simplement, d’un basculement dans le rapport de force démographique en faveur de la composante musulmane (principalement turque) de la population allemande. Comme sa voisine la France et peut-être plus vite qu’elle, et de façon plus nette en raison du vieillissement plus accentué de sa population, l’Allemagne se transforme en une polyarchie ethnique. Soit une société où les communautés ethnoreligieuses font les votes et influencent la politique nationale (cf. l’attitude toujours passive ou consentante de l’Allemagne envers Erdogan, le dictateur turc). Il y a donc de quoi s’inquiéter pour la nation germanique quand on sait devant quelle crise démographique elle se trouve, et que les Musulmans ne représentent « encore » que 12% de la population d’une ville comme Cologne. Qu’en sera-t-il quand ce pourcentage aura augmenté, sinon explosé ?
    D’après Le Figaro, qui cite l’Institut de sciences sociales Insa-Consulere, 61% des Allemands se prononcent contre cette autorisation, qui fait tache d’huile, de l’appel musulman à la prière. Mais cette majorité reste bien silencieuse dans un pays où l’opinion est fortement conditionnée et où la repentance bat son plein. N’y voit-on pas la municipalité de la pourtant traditionnelle Munich envisager de débaptiser les rues portant les noms de Richard Wagner et de Richard Strauss soupçonnés du pire, c’est-à-dire d’avoir à leur manière, avec leur musique et les présupposés qu’elle colportait, fait le lit du nazisme… Rien de moins.

    Quant à la France qui s’enfonce dans le désordre communautaire induit par les politiques de laxisme migratoire conduites depuis cinquante ans , le débat public sur cette question vitale y devient plus vif, et plus ouvert, que chez sa voisine d’outre Rhin depuis quelques mois. Une première raison réside dans le triste et brutal spectacle permanent de ce désordre, dont la dénonciation fait le miel d’une chaîne de télévision privée (celles du service publique pratiquant au contraire l’omerta) dont le nouveau propriétaire a compris tout le profit qu’il pouvait en tirer en termes d’audience. Une seconde raison est la percée médiatique qu’effectue Éric Zemmour dans sa démarche présidentialiste en centrant son discours sur l’immigration et sur le déclin de la France. La justesse de son diagnostic, ses paroles sans circonvolutions et fondées sur une véritable culture à l’opposé de sa concurrente la plus à droite, en font dans le contexte actuel et face à un panel de protagonistes insipides, un excellent candidat de premier tour.
    Néanmoins, dans la perspective d’une victoire finale, le discours du polémiste, s’il entre dans l’arène électorale, est trop chargé de nostalgie. Car l’on ne construit pas l’avenir sur celle-ci (la France ne sera jamais plus celle de Louis XIV ou de Bonaparte). Mais au contraire sur des adaptations et des stratégies audacieuses. Il lui faudra donc se garder du délire souverainiste et ne pas prôner, comme nombre de ses partisans le souhaitent, le repli national. Il serait bien plus honorable et ambitieux pour la France, mais aussi bien plus adapté à un monde rempli de risques et d’hostilités, que de s’ériger en chef de file, car d’autres Etats suivraient, pour transformer l’Union européenne en une véritable puissance au service des peuples européens.
    On ne peut, bien entendu, préjuger du résultat du combat électoral à venir. Le passé incite à la prudence quant à tout pronostic et on se gardera bien d’en faire ici. Ce dont on peut, cependant, se réjouir à la lumière de ce que l’on observe, et à condition que cela dure, c’est au retour à la « guerre des dieux » de Max Weber, autrement dit à la guerre des représentations du monde qui marquerait le début de la fin de l’idéologie dominante.

    Gérard Dussouy (Voxnr, 25 octobre 2021)

    Lien permanent Catégories : Points de vue 0 commentaire Pin it!
  • Taïwan : une stratégie chinoise de la strangulation lente ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Renaud Girard cueilli sur Geopragma et consacré à la stratégie chinoise pour annexer l'île de Taïwan malgré le soutien des États-Unis dont celle-ci bénéficie...

     

    Libération de Taiwan_Propagande Chine populaire.jpg

    Taïwan : une lente strangulation chinoise

    Interrogé en public sur la question de Taïwan par un journaliste le 21 octobre 2021, le président américain actuel est sorti de l’ambiguïté stratégique que tous ses prédécesseurs avaient soigneusement conservée depuis que les États-Unis ont, en 1979, reconnu officiellement la République populaire de Chine et sa doctrine d’un seul pays. Joe Biden a affirmé que si les forces communistes de l’Armée populaire de libération chinoise attaquaient Taïwan, l’Amérique se porterait militairement au secours de la petite île démocratique agressée.

    Le sujet était dans tous les esprits, dans la mesure où l’ambassadeur de Chine à Washington, Zhang Jun, venait de critiquer publiquement « les dangereuses actions américaines dans le détroit de Formose ». Ce diplomate de haut rang manie parfaitement l’inversion accusatoire, procédé rhétorique consistant à accuser l’autre de ses propres noires intentions. C’est en effet l’armée de l’air chinoise qui a multiplié, aux mois de septembre et d’octobre 2021, les vols dans la zone de défense de Taïwan et non les chasseurs-bombardiers américains qui sont allés frôler les côtes de la Chine populaire. L’ambassadeur voulait-il critiquer le passage de bâtiments de l’US Navy à travers le détroit, qui fait quand même 170 kms de large ?

    Aucune nation occidentale, ni même asiatique, ne reconnaît la prétention de la Chine à accaparer ce détroit, comme elle prétend accaparer la Mer de Chine du Sud. Dans cette mer plus vaste que la Méditerranée, qui va lécher les rives du Vietnam, de la Malaisie, de Brunei et des Philippines, l’armée chinoise s’est emparée d’une demi-douzaine de récifs jusque-là inhabités et considérés par le droit maritime international comme des terrae nullius (des territoires n’appartenant à personne). Elle les a poldérisés, et y a construit des aérodromes. Elle y a placé des missiles et des bombardiers stratégiques. Elle veut contrôler cet espace maritime, pas seulement pour ses richesses halieutiques ou pétrolières, mais aussi parce que c’est le chemin qu’empruntent ses sous-marins nucléaires lanceurs d’engins pour rejoindre les eaux profondes de l’Océan Pacifique.

    En matière de dissuasion nucléaire, la Chine s’est longtemps tenue à la politique de modération prônée par Deng Xiaoping. Elle avait adopté le modèle français d’un armement nucléaire minimum, juste capable d’une dissuasion du faible au fort. Avec Xi Jinping, elle a changé de stratégie, pour passer à un armement nucléaire important, capable d’intimider les autres puissances nucléaires de la planète. Elle vient de tester une arme hypersonique orbitale, capable de déjouer tous les systèmes de détection existant.

    Assisterons-nous, au cours de cette décennie, à une guerre navale entre la Chine et l’Amérique pour le contrôle de Taïwan ? Rationnellement, la Chine communiste n’a aucun besoin de cette île montagneuse de 36000 km2 et de 23 millions d’habitants pour pouvoir continuer à se développer et à s’enrichir. Certes la firme taïwanaise TSMC (Taiwan Semiconductor Manufacturing Company) est la championne du monde des processeurs de smartphones et des microcontrôleurs de véhicules automatisés. Mais la Chine populaire, qui produit 50000 ingénieurs de très haut niveau par an, ne tardera pas à rattraper Taïwan dans le domaine des semi-conducteurs.

    Le problème n’est pas un quelconque désir de prédation mais plutôt l’orgueil. Xi Jinping est un nationaliste extrême, qui rêve de ramener Formose au sein de la mère patrie. Sa répugnance à la prise de risque est moindre que celle de ses prédécesseurs à la tête du parti communiste. Ces derniers rendaient des comptes auprès de leurs pairs du Comité permanent du bureau politique. Depuis qu’il a aboli toute limite à ses mandats, Xi ne rend plus de comptes qu’à lui-même. Par ses discours, comme par les films grand public que produit le régime, il chauffe à blanc le nationalisme de la population. Le « nationalisme porte la guerre comme la nuée porte l’orage » disait Jaurès. Depuis qu’il est président de la commission militaire du Parti, Xi Jinping a plus que doublé le budget des armées de son pays.

    Mais je ne crois pas qu’il envisage un débarquement en force, du type Normandie 1944. Depuis Sun Tsu, le summum de la stratégie en Chine est de vaincre sans porter le fer. Intimider pour faire céder. La stratégie sera plutôt celle d’une strangulation lente. Par un blocus naval et aérien qui se mettra progressivement en place, en profitant de tous les moments stratégiques d’absence américaine – dus à des crises dans d’autres régions, à des élections trop disputées, ou à des scandales du type du Watergate. C’est à la faveur de cette affaire que la Turquie s’était par la force emparée, à l’été 1974, de tout le nord de l’île de Chypre. Trop occupés par leur problèmes domestiques, les Américains n’avaient, alors, pas réagi.

    Renaud Girard (Geopragma, 27 octobre 2021)

    Lien permanent Catégories : Dans le monde, Géopolitique, Points de vue 0 commentaire Pin it!