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Points de vue - Page 410

  • La grande infusion...

    Nous vous servons ci-dessous une petite tasse d'infusion préparée par J.H. d'Avirac sur Polémia...

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    DSK : la grande infusion

    La version « infusée » du Journal de la Femme de chambre est à coup sûr plus intéressante que sa version Twitter. Nous proposons ici une petite grille d’analyse un brin iconoclaste mais en phase avec les réflexes et la versatilité de l’Homo consumens, si omniprésent dans nos comportements.

    DSK : l’équivalent pour la gauche « morale » de la crise de la Vache folle pour l’élevage industriel

    Beaucoup de choses ont déjà été dites ou écrites sur l’affaire DSK et son ADN généreusement dispensé ; peu d’hypothèses, en revanche, ont été formulées sur l’effet produit chez « l’électeur consommateur » dans le temps. Dans le bref espace-temps de l’effet de « sidération », les -12 points encaissés par le présumé séducteur au baromètre du Figaro Magazine et le +2 points engrangé par tel ou tel ne sont rien… Ils ne sont rien en regard de l’effet « d’infusion », ô combien plus dévastateur pour la gauche morale et révélateur à long terme.

    Dans un monde où l’on consomme de la politique comme la dernière barquette micro-ondable de lentilles au petit-salé, la crise DSK est à la gauche ce que la crise de la Vache folle fut à la consommation de produits alimentaires : un électrochoc puis une révélation annonciatrice d’une mutation.

    L’évasion du consommateur est la conséquence de la crise de confiance

    Une fois la charge à haut voltage interrompue, nous aurons peut-être l’immense plaisir de déguster une toute nouvelle potion. Le parallèle « alimentaire » peut paraître trivial, mais il se révèle à n’en point douter pertinent car l’esprit de nos concitoyens a été formaté sur ce mode d’implantation des messages et sa désactivation peut-être tout aussi rapide et radicale que sa mobilisation. Demeureront peut-être quelques fâcheuses habitudes, mais l’évasion du consommateur est la conséquence immédiate et définitive de la rupture du contrat de confiance qui le lie à la marque.

    La ménagère sait que les « grands » groupes et les « grandes » marques peuvent mentir

    Retour au supermarché : les deux décennies qui viennent de s’écouler ont fait prendre conscience à la ménagère occidentale que les « grands » groupes et les « grandes » marques pouvaient mentir ; que derrière les emballages pimpants et les artifices marketing se cachaient trop souvent une recherche systématique de la marge brute à court terme ; que dans le sachet de tisane au thym et saveurs provençales pouvaient se cacher le pesticide, l’arôme artificiel, le conservateur et l’ionisation des plantes potentiellement cancérogènes.

    L’infusion socialiste est du même tonneau

    L’infusion socialiste « façon social-démocratie » était bien de ce tonneau : une touche de bons sentiments ; une morale apparemment inoxydable ; une bonne dose d’universalisme ; du cœur à toutes les sauces pour masquer jalousie, ambitions personnelles, absence de repères réels ou de principes et mépris rose/bobo/caviar/intello, le tout dans une crème ultradécadente où les addictions au sexe, à l’alcool et autres babioles deviennent le quotidien d’hommes pressés « aimant plaire »…

    La crise du discours publicitaire

    Retour au supermarché et sur l’extraordinaire mutation générée par les dernières crises alimentaires : notre ménagère de quarante ans s’est bien littéralement métamorphosée. Elle a ouvert les yeux sur un monde où désormais le progrès n’est plus synonyme de bonheur universel. Elle ne croit plus au discours publicitaire, même si ce dernier conserve subliminalement un certain impact. Elle détaille les listes d’ingrédients présentes sur les emballages. Elle veut du naturel sous label. La profusion de pseudo-labels l’oblige à un véritable parcours du combattant, parcours d’experts auquel elle se livre volontiers. Elle se méfie du « global » auquel elle préfère désormais le « local ». Elle demande un projet et une éthique d’entreprise suivis de faits concrets. Elle fonce dans l’ « équitable », le « solidaire », le « français » (cf. la dernière étude du CREDOC qui révèle que 64% des Français sont prêts à payer plus cher pour le « made in France »). On lui disait que la marque était tout, elle n’y croit plus et demande des preuves. Proposez-lui un litre de lait, elle vous demandera la carte d’identité du producteur et la photo de la vache, histoire de vérifier qu’elle n’est pas folle dingue !

    La mutation de l’ « électeur-consommateur »

    Voilà ainsi préfigurée la mutation de l’ « électeur-consommateur ». L’infusion magique dont il est en train de s’imprégner pourrait bien se révéler étonnamment efficace… Une sorte de purge, en somme, évacuant (définitivement ?) la naïveté, la passivité, la mise en scène inquisitoriale des bons contre les méchants ou les mal-pensants, la primauté du melting-pot métisseur sur le très suspect combat de la préservation des identités.

    Tout ceci nous fabrique au bout du compte un consommateur-électeur mature, rebelle, légitimement révolté par ces donneurs de leçons vérolés, qui méprisent l’école de la vie et l’honnête citoyen.

    Pour faire de cette infusion un breuvage explosif, utiliser une théière d’un nouveau genre, véritable machine à faire tomber les masques : un doigt de réinfosphère, une pincée d’humour, de la hauteur, beaucoup de hauteur, du temps, encore du temps ; éloigner les facilités de langage, les récupérations hasardeuses, les tentations du poujadisme à deux balles ; lui préférer les valeurs sûres, les idées à l’endroit, les principes, les ancrages, les origines… bref, de la finesse, de l’excellence et de l’exigence dans un monde de brutes dépressives et dégénérées. A consommer et à faire consommer sans modération car il est des potions qui soulèvent des montagnes.

    J.H. d’Avirac (Polémia, 7 juin 2011)

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  • Intervention en Libye : un cruel révélateur...

    Nous reproduisons ci-dessous un éditorial du quotidien Le Monde (dimanche 12 - lundi 13 juin 2011) qui pose quelques bonnes questions sur la défense française et européenne... De renoncements en renoncements, diposerons-nous encore dans quelques années des instruments nécessaires à la souveraineté ?...

     

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    Le cruel révélateur de l'intervention en Libye

    Il ne faudrait pas que l'affaire libyenne dure encore plusieurs mois. Pour le peuple libyen martyrisé par son dictateur, bien sûr. Mais pas seulement. Les lendemains risquent d'être douloureux pour les armées européennes qui participent à cette intervention.

    Trois nations en donnent le tempo : les Etats-Unis, acteur hors catégorie par sa puissance, la France et le Royaume-Uni. Seize autres pays jouent les seconds rôles, pour ne pas dire les figurants.

    Il ne faut pas leur en vouloir, a tenu à dire le secrétaire américain à la défense, Bob Gates, le 9 juin, qui, pour la énième fois, appelait les Européens à "partager le fardeau" de la sécurité mondiale : "Franchement, bon nombre de ces alliés restent à l'écart, non parce qu'ils ne veulent pas participer, mais simplement parce qu'ils ne peuvent pas. Les moyens militaires ne sont tout simplement pas là."

    La France s'est vantée d'avoir été la première à frapper, le 19 mars. Elle fait remarquer à ses alliés plus frileux qu'elle assume ses responsabilités de membre permanent du Conseil de sécurité de l'ONU. Nos avions et nos bateaux sont partis à l'heure, avec des hommes prêts à servir, disent les chefs militaires. Mais demain, préviennent-ils, ce sera une autre affaire. Ainsi, comme l'admettent sans fard les responsables de la marine nationale, si le porte-avions Charles-de-Gaulle est engagé en Libye jusqu'à la fin de 2011, il devra s'arrêter totalement en 2012.

    Car les armées européennes, pourtant ultramodernes et ultra-coûteuses, ne savent plus durer. Les Rafale français dépendent des ravitailleurs américains. Les F16 danois n'ont plus de munitions après deux mois de frappes. Les Typhoon britanniques n'ont pas assez de pilotes qualifiés. Plus traumatisant pour cette grande puissance maritime, une bonne part de ses navires actuellement au combat dans le monde sont voués à la casse dans le cadre de la réforme budgétaire en cours.

    L'Irak (pour le Royaume-Uni), l'Afghanistan, le Liban, les conflits africains, ont placé aux limites de leurs capacités de déploiement des appareils militaires soumis aux sévères cures d'amaigrissement de l'après-guerre froide.

    Derrière, les entrepôts sont vides. L'effort du moment, très important, entame la préparation de l'avenir, comme le coureur finit par consommer sa masse musculaire. Le hiatus entre les ambitions affichées et les moyens de les réaliser est donc cruellement mis à nu.

    A l'aube de la campagne présidentielle, les responsables militaires ne se privent donc pas d'interpeller la nation. C'est, si l'on ose dire, de bonne guerre pour tenter d'obtenir des moyens d'action plus consistants et convaincants.

    Mais, au-delà de ce classique plaidoyer pro domo, des questions cruciales sont posées : la France veut-elle conserver un modèle d'armée cohérent et complet ? Est-elle prête à en payer le prix ? Quelle indépendance stratégique entend-elle défendre ? Faute de réponses sérieuses, les ambitions affichées sur la scène mondiale ne feront pas longtemps illusion.

    Le Monde (12-13 juin 2011)

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  • Quand les chinois construisent l'Europe...

     Vous pouvez visionner ci-dessous sur Realpolitik.tv un entretien avec Hervé Juvin sur la menace que les entreprises chinoises font peser sur l'Europe et son modèle social à construire. Clair et percutant ! 

     


    Hervé Juvin : quand les Chinois construisent... par realpolitiktv

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  • Les intermittents du chaos...

    Nous reproduisons ci-dessous un article de Claude Bourrinet publié sur Voxnr et consacré aux bons petits soldats du système que sont intermittents du spectacles ou autres clowns transgressifs et artistes de rue décalés...

     

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    Les intermittents du chaos

    Jeudi 9 juin, Quimper. Le spectacle n’annonçait réjouissant. Pensez-donc : des clowns ! Les collégiens s’en pourléchaient le zygomatique. Le titre de la prestation était bien en anglais : Christmas Forever, mais bah ! il ne faut pas être plus royaliste que le roi… Drôle de nom, quand même, pour une troupe italienne : Tony Clifton Circus. Mais re-bah !, Johnny est bien considéré comme un chanteur national. Et puis, nos pré-ados en ont eu plein les mirettes : d’abord une grosse limousine noire qui se gare.

    Mais voilà comment un témoin, le principal du collège, raconte la suite : « On a eu affaire à quelque chose de totalement surréaliste et d'invraisemblable. Subitement, la troupe a commencé à balancer des paquets de cigarettes dans la foule alors que nous nous battons toute l'année contre le tabac. Une poupée gonflable a fait son apparition puis un homme complètement dénudé. C'était de la provocation. Les élèves étaient atterrés et choqués. Ce spectacle n'avait pas sa place dans une cour de récréation. »

    Les réactions ont été, et tant mieux !, très virulentes, de la part des parents, des autorités, et la reprise du « spectacle » a été annulée.

    A vrai dire, c’est la surprise qui est surprenante. Certains coins de France sont tellement habitués à ce genre de plaisanteries de mauvais goût qu’on n’y fait même plus attention. La presse, d’ailleurs, s’empresse d’applaudir à des performances festives qui « décoiffent », font « penser », « font table rase des préjugés », « animent les rues trop tristes » etc. Toute la topique du libéralisme potache et cucul y passe. Et nous sommes contraints, comme pour l’art contemporain, d’acquiescer, sous peine d’être taxés d’ « archaïques », d’ « incultes », de « réacs », voire de « cons ». On nous dit que c’est le monde d’aujourd’hui. On veut bien le croire.

    A quoi servent donc ce qu’on a l’habitude d’appeler les « intermittents du spectacle » - terme trop large, auquel qu’il vaut mieux, en l’occurrence, adjoindre la précision « de rue » ?

    Il faut se défaire de préjugés culturels, historiques et politiques.
    Le premier discours attendu, pour celui qui a encore une vision du théâtre marquée par l’après-guerre, serait celui de la Culture, de l’humanisme militant, de l’éveil du peuple par la transmission de la beauté et du savoir. Cette ligne est directement héritière de la génération de Jean Vilar, qui plaçait haut le métier d’artiste. Mais il faut se résigner à constater l’émergence d’un autre type de spectacle, qui relève de l’entertainement, du divertissement, parfois prétentieux lorsqu’il dérive vers l’agit prop. , ainsi qu’il s’avère avec le théâtre de rue, souvent de médiocre prestation. Et quand s’y mêle un discours idéologique, il est plaqué sur les poncifs de la nouvelle classe moyenne. Dans le fond, la rhétorique et l’éthos des luttes d’intermittents épousent la vision libérale mondialiste. Les nouveaux héros sont les sans papiers, les journalistes, les ONG, les sidéens, les homosexuels etc. La dialectique du réel est remplacée par une approche compassionnelle, droitdel’hommiste, où la victime a toujours raison. Dans les pratiques culturelles, le livre et la tradition (celle de la classe ouvrière) sont passés à la trappe de la néophilie, et les nouveaux moyens de communication, l’information par réseaux, la posture « rebelle » sont des marqueurs obligés. Les valeurs libertaires, contestataires ont été retournées comme des gants pour servir à la déterritorialisation, au déracinement, à l’émergence des flux marchands. L’intermittent du spectacle moderne est ignorant au sens classique, mais empli de vents médiatiques. Au lieu de lorgner sur Moscou ou Pékin, il a pour New York ou la Californie une préférence marquée. Il aime la langue anglaise, les goûts esthétiques anglo-saxons.
    La haine des intermittents du spectacle pour les nationalismes (sauf certains) ou tout simplement les frontières, le patriotisme, les traditions, le passé, relève d’une mentalité complètement attachée à l’idéologie marchande contemporaine, jusqu’à lier flux des choses et flux des hommes, nomadisme et liberté absolue.

    Il faut dire que la société marchande est friande d’un fait culturel qui lui rend tant service. Le nombre d’entreprises culturelles a subi une augmentation spectaculaire : de 1996 à 2003, par exemple, elle a été de 42% (jusqu’en 1999, le rythme annuel a été de 3%, puis à partir de 2000 de 6,5%, le spectacle vivant a crû de 54% de 1996 à 2000, contre 28% pour l’audiovisuel.
    Ce phénomène s’explique par ce que Philippe Muray nomme l’assomption de l’homo festivus. Les festivals se sont multipliés, les villes et les départements, les régions ont voulu attirer un public varié, souvent estivant. C’est là un secteur économique non négligeable, qui nourrit l’argumentaire des « luttermittents ». Ces entreprises hautement commerciales véhiculent un message très clair, tout à fait compatible avec la société libérale : il faut détruire le vieux monde, instaurer celui du jouir immédiat, de l’éternel présent, disloquer par des mises en situations décalées, « déjantées », les certitudes habituelles, les valeurs traditionnelles, et, comme l’explique bien Muray, occuper le territoire urbain pour le rendre invivable (qui a fréquenté un festival de spectacle de rue sait de quoi je parle). Derrière le paravent « ludique » (mot tarte à la crème, s’il en est) se dissimule une stratégie idéologique extrêmement élaborée, le pendant de celle des entreprises Walt Disney, dont l’alpha et l’oméga est de convaincre qu’il suffit de peu (de « délire ») pour rendre la société de consommation formidable. Les faux airs rebelles, qui s’attaquent surtout aux « beaufs », et réjouissent les ados en leur faisant croire qu’ils s’engagent, malgré leur superficialité stupéfiante, donnent un crédit fallacieux à ce business déstabilisant. Et quand bien même on voudrait, par mauvaise foi, que certains spectacles soient, comme l’était l’agitation soixanthuitarde, « subversifs », il suffit de rappeler que de nombreuses communes ou départements, qui ne sont bien sûr pas révolutionnaires, mais qui obéissent à des objectifs clientélistes ou électoraux, tombant ainsi dans le pire snobisme, financent généreusement ces agressions contre le bon goût et la société. Nous en sommes là : bêtise ou cynisme, militantisme ou intérêt, les autorités de notre pays contribuent à défaire ce que des siècles ont construit, dédaignant par ailleurs des types de spectacles autrement plus valorisants, mais qui ont le malheur, à leurs yeux, d’être « ennuyeux ». A moins qu’on ne reprenne Carmen et Le Cid pour en faire des plaisanteries d’après soûlerie de fin de semaine.

    Il faut dire que cette « esthétique » est parfaitement adéquate avec les réquisits du nouveau capitalisme. La « praxis » professionnel des intermittents correspond étonnamment aux nouveaux rapports sociaux-économiques. Le personnage romantique du saltimbanque a été remplacé par le travailleur créatif et flexible, emblème du management issu des années 70. La création artistique est en effet revendiquée par le nouveau capitalisme, soit dans le domaine productif, soit dans le domaine sociétal. Elle irrigue par la publicité hédoniste, ludique, l’imaginaire des consommateurs, et l’art « contemporain », sous toutes ses formes, lui offre des thématiques idoines.

    Claude Bourrinet (Voxnr, 12 juin 2011)

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  • Eloge du colonel Olrik ?...

    C'est avec un certain dégout mais avec le souci d'informer nos lecteurs que nous reproduisons ci-dessous un texte particuliculièrement odieux qui prétend faire l'éloge du sinistre colonel Olrik. Le coeur au bord des lèvres, nous rappellerons brièvement, à l'attention de nos plus jeunes lecteurs, le parcours cet individu qui, par ses actes,  s'est de lui-même exclu du genre humain...

    Formé à la Junkerschule de Bad Tölz, l'école des officiers de la Waffen SS, Olrik échappe à la tourmente de la fin du Troisième Reich et disparaît de la circulation. D'après son biographe Edgar P. Jacobs, il aurait pu être récupéré et retourné par le KGB. C'est seulement dans les années 50 qu'on retrouve sa trace à Lhassa parmi les conseillers du tyran Basam Damdu. A l'évidence, il est l'un des promoteurs du programme de fabrication d'armes de destruction massive. A la tête du service de renseignement militaire au moment de l'offensive de l'Empire jaune, il va devenir l'un des artisans les plus féroces de la répression qui s'abat sur les résistants à l'oppression. Il s'illustrera dans la bataille du Raz de Musandan dans le détroit d'Ormuz au cours de laquelle il n'hésitera pas, pour s'emparer de la base secrète de la résistance, à  donner l'ordre d'utiliser des armes chimiques. Cherchant à éviter la disgrâce à la suite de sa défaite, il sera celui qui préconisera avec le plus d'énergie l'utilisation de l'arme atomique contre les forces du monde libre. Disparu dans l'effondrement de l'Empire jaune, il sera condamné à mort par contumace pour crime contre l'humanité au procès de Singapour. Pendant les trente années qui suivront, il échappera à toutes les polices du monde et poursuivra une carrière de mercenaire au service de divers états voyoux ou du crime organisé. On perdra définitivement sa trace à la fin des années 80. Sa présence sera néanmoins signalée, sans preuve tangible, en Corée, en Syrie, en Chine ou dans les zones tribales du Pakistan. Notons cependant que ses deux adversaires les plus résolus, le colonel Francis Blake et le physicien Philip Mortimer, qui n'ont jamais cessé de le traquer à travers le monde, sont curieusement décédés le 11 septembre 2001 dans le vol 93 d'United Airlines qui devait s'abattre sur le Capitole...

     

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    Eloge du colonel Olrik
     
    Par Jean-Jacques Langendorf
     
    Éloge du colonel Olrik, homme de goût, de savoir et d’action, chef du 13e Bureau pour la sûreté de l’État, directeur des services d’espionnage de l’Empire, conseiller de l’empereur Basam Damdu

    Dès la deuxième image du premier album des aventures de Blake et Mortimer, il s’impose, souverain et élégant. Entouré par un état-major d’hommes jaunes et déférents, issus d’un croisement nippo-himalayen, il inspecte chars lance-flammes et fusées à charges nucléaires dans le grand arsenal de Lhassa. Arrêtons-nous d’abord sur sa capote vert foncé, au col de vison, aux épaulettes discrètes, d’une coupe parfaite, œuvre du premier tailleur de la capitale tibétaine. Examinons ensuite sa toque de fourrure, dont la face supérieure est doublée de satin rouge, marquée de l’étoile dorée. Mais il y a autre chose encore, qui suscite immédiatement sympathie et respect : son visage aux traits fins et aristocratiques, sa lèvre supérieure bordée d’une fine moustache à la Clarke Gable, sa chevelure jeais et son haut front d’intellectuel que nous pourrons admirer lorsque il condescendra à enlever son couvre-chef. Revêtu de son uniforme, nous ne nous lasserons jamais de le contempler. Le voilà debout, près des énormes roues d’un bombardier, des jumelles sur sa poitrine, des sangles supportant un ceinturon qui retient un étui à revolver ou, plus exactement, à Browning, à ses pieds un petit bijou de MG 42. Cette fois, c’est une casquette bordée de jaune qui remplace la toque de fourrure. Quant aux bandes, également jaunes, du pantalon de cheval gris souris, mais un gris souris tendre, très tendre, qui virerait presque au rose, elles sont l’apanage de l’officier d’état-major de la grande armée impériale. À n’en pas douter, nous avons là un colonel tsariste, style 1904-1905, observant la progression des tirailleurs japonais lors de la bataille de Taampin, avec toutefois l’anormale présence de soldats nippo-himalayens derrière lui. Mais aussi un aristocrate, la manière dont il tient son fume-cigarette l’attestant à satiété. Dans toutes les circonstances de la vie d’ailleurs, circonstances qui lui sont souvent contraires, il ne se départit pas de cette correction vestimentaire, qu’il erre dans le désert (culotte de cheval, bottes d’équitation, chemise de coupe coloniale), qu’il vaque à ses affaires dans les souks du Caire (costume blanc, chemise noire, cravate jaune tendre, feutre mou), qu’il enquête sur l’île atlantique de Sao Miguel (complet bleu foncé à fines rayures, chemise assortie, mais d’un bleu plus léger, nœud papillon), qu’il séjourne à Paris pour s’y occuper de questions météorologiques (à nouveau complet bleu mais sans rayures, chemise blanche, noeud papillon bordeau), qu’il inspecte les catacombes de la Ville Lumière (complet brun, chemise crème, cravate noire pointillée de jaune, feutre beige). Et que dire de sa robe de chambre rouge, à gros pois blancs, revêtue au débotté ? Mais je m’arrête là pour ne pas tomber dans la revue de mode...
    Pour mieux saisir le niveau, on serait tenté de dire l’altitude, où se situe cette élégance, et derrière cette élégance, le personnage, il suffit de la comparer à la déliquescence vestimentaire des adversaires hargneux et acharnés du colonel, le professeur Mortimer et le capitaine Blake. Tous deux sont les rois de la confection, du prêt à porter et, certainement, des soldes. Voyez Mortimer qui, sur la quatrième de couverture, adresse un aguichant « hello » à ses lecteurs qu’il tient – fatale erreur – pour des admirateurs. Quelle tenue ! Celle du comptable d’une firme de sous-préfecture importatrice de pneus. La chemise s’affaisse sur une ceinture qui cerne un indécent bedon. La disharmonie entre un veston caca d’oie et un pantalon lie de vin, qui se prolonge par des souliers de souteneur napolitain, constitue une insulte à l’oeil. Et quelle est cette manière de faquin de s’adresser à son public, la pipe au bec ? À condition de revêtir l’uniforme, Blake s’en sort mieux, sauf s’il porte ces indécents shorts coloniaux, qui lui descendent jusqu’aux genoux. En tenue civile, cependant, il fleure le sous-officier qui, voulant échapper aux regards de ses supérieurs, se glisse subrepticement vers un lieu mal famé.
    Au-delà du vestimentaire, c’est ensuite le courage, la tranquille intrépidité d’Olrik, qui retiennent notre attention. D’emblée, ils s’affirment sous nos yeux, lorsqu’avec l’élégant chasseur « l’aile rouge », il poursuit le « Golden Rocket », le laid bombardier dans lequel les Dioscures britanniques s’efforcent de lui échapper. Un vrai pilote, qui court sus à l’ennemi et qui ne craint jamais d’affronter les situations les plus périlleuses. Ainsi, lorsqu’il se fait passer pour un prisonnier anglais échappé afin de pouvoir s’introduire dans la base secrète des Britanniques, qui contrôle le Détroit d’Ormuz, dans laquelle il sabotera la station de pompage fournisseuse d’énergie, puis s’enfuyant, dissimulé sous une tenue de scaphandrier, alors que les services de sécurité de la base sont à ses trousses. Il n’a pas son égal pour se glisser là où on l’attend le moins, car son ingéniosité est sans limite et cette ingéniosité quelqu’un qui est revenu à plusieurs reprises de derrière les lignes soviétiques en possède une bonne dose. Pour répondre aux nécessités du moment, pour s’introduire là où il veut s’introduire, il se fera éminent archéologue allemand, spéléologue, chef d’une tribu barbare, agent à bord d’un sous-marin, égoutier, bourgeois cossu, locataire d’un élégant appartement parisien, et j’en passe.
     
    "Les généraux - hommes qui se situent nettement au-dessus des hommes"

    L’étude de ses actes et de ses pensées me permettent de conclure que le personnage est un remarquable stratège. Ce n’est pas pour rien que Basam Damdu, qui connaît les hommes, et mieux encore les généraux – hommes qui se situent nettement au-dessus des hommes – lui confie la conduite des opérations devant permettre de réduire la base secrète, nid redoutable abritant les derniers parangons de la démocratie agonisante, qui plus est parangons agressifs, prêts à se défendre. Et il va s’acquitter de sa tâche d’une main de maître ! D’ailleurs, ayant achevé sa mission de sabotage dans la base, ayant tout risqué (et gagné) avec une admirable détermination, ayant échappé à la mer qui avait menacé de l’engloutir, échoué sur une plage, que je situe sur l’actuelle côte iranienne, entre les bourgades de Gerk et de Serik, vêtu d’un méchant pantalon qui vient à peine de sécher, d’un maillot de corps, digne des vacances payées d’un syndicaliste du front populaire, il accueille les éléments aéroportés de l’armée nippo-himalayenne. Le général qui les commande l’informe aussitôt de l’estime dans laquelle on le tient, au sommet, et même au sommet du sommet : « Colonel, par ordre spécial de Sa Majesté, toutes les troupes disponibles ont été mises à votre disposition sous votre commandement direct. » Immédiatement, l’interpellé se penche sur la carte, prend ses dispositions tactiques, ordonne l’attaque, écarte les remarques pusillanimes d’un général : « Oh ! Certes, l’opération coûtera du monde, mais l’enjeu en vaut la peine. »). Puis il songe à son uniforme, car il ne sait que trop ce qu’il lui doit : « Et maintenant, Messieurs, permettez-moi d’aller revêtir une tenue digne de mon grade ». L’opération échoue, en raison de l’intervention du super-avion Espadon (d’une beauté fulgurante ; trop beau pour avoir été conçu par le professeur Mortimer comme on veut nous le faire croire) mis au point par les Britanniques. Mais n’est-ce pas là un épisode qui symbolise le drame de ces généraux aux capacités supérieures, de ces esprits éminemment tactiques et stratégiques qui, vers la fin de la Deuxième Guerre mondiale, ont succombé à la supériorité facile des Alliés, parce que matérielle ?
    La base du détroit d’Ormuz ! De ce rocher, jumeau de Gibraltar, situé près du cap Mussendon, situé par 57° de longitude est et 26° 8 de latitude nord, si j’en crois la belle carte publiée par le Bombay Marine Office après les expéditions organisées en 1821 et 1825, parlons-en ! Et parlons-en parce qu’il a joué un rôle non négligable dans mon existence. Lors du périple du début des années 1960 entrepris par Gérard Zimmermann et moi-même à la recherche des vestiges des monuments croisés au Proche-Orient, fatigués de tant d’architecture romane et gothique dans des lieux insolites, un appel s’est fait entendre en nous, germanique dans sa simplicité : Nach Osten ! Nach Osten ! Alors, vers cet Osten nous avons roulés : Ankara, Sivas, Erzerum, Tabriz, Téhéran, puis une inflexion vers le sud, puis le sud-ouest : Persepolis, Isfahan, Schiraz, puis encore un peu plus vers le sud-ouest : Bender Bouchir (où Wassmuss assuma les fonctions de consul du Reich avant 1914) en traversant une guerre brutale, d’ailleurs occultée jusqu’à nos jours, dont nous avons à peine pris conscience. Enfin, par des pistes ne méritant pas ce nom, sans cartes, virage en direction du sud-est, vers ce détroit d’Ormuz jacobsien et mythique, dans un paysage affichant effectivement, à peu de choses près, les caractères de celui du Secret de l’Espadon. Mais nous n’atteindrons jamais le lieu magique, l’armée impériale non pas de Basam Damdu mais de S.M.I. le Schah, ayant lancé à nos trousses deux jeeps et une automitrailleuse (l’automitrailleuse du Secret ?) afin de mettre un terme à cette ballade inconsciente dans une région alors aux mains des rebelles tengistanis, ceux-là mêmes soulevés par Wassmuss durant la Première Guerre mondiale.


    Lire la suite sur Le Polémarque

    On peut remercier Laurent Schang pour la mise en ligne de cet excellent texte de Jean-Jacques Langendorf !...

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  • Supprimer les lois : c'est la logique libérale !...

    Nous reproduisons ci-dessous un bon point de vue de Patrice de Plunkett, publié sur son blog, qui souligne à partir d'un fait divers symptomatique, l'anomie de la société ultralibérale qui nous entoure.

     

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    Moeurs, bioéthique, business, finance : supprimer les lois, c'est la logique libérale

    On dirait un gag, mais l'histoire est authentique. Elle se déroule en ce moment. Enseignant âgé de 59 ans, M. Stéphane Nicot veut être une femme ; sur la photo il porte une perruque blonde et une robe violette. A-t-il subi une opération chirurgicale ou une hormonothérapie ? On n'en sait rien : il refuse d'en parler. Il est donc toujours un homme aux yeux de l'état-civil. Il vit avec une femme : quoique celle-ci se déclare lesbienne, aucun argument légal ne s'oppose à leur mariage. Mais M. Nicot est un militant(e), cofondateur d'une association LGBT... Il veut donc donner à ce mariage une dimension « transgenre » et en faire une provocation : il proclame que ce sera un mariage homosexuel, tout en refusant de prouver être devenu  physiologiquement une femme !

    Cette provocation vise à disqualifier tout critère objectif et toute norme légale. Il s'agit de forcer la loi à s'incliner devant les exigences individuelles.

    L'association de M. Nicot, citant une résolution de l'assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe (2010), exige en effet que les « personnes transgenres » reçoivent « des documents officiels reflétant l'identité de genre choisie, sans obligation préalable de subir [...] une opération de conversion sexuelle ou une thérapie hormonale ».

    En clair : un homme se voulant femme n'aurait même pas à le devenir physiologiquement. Son « choix » ferait loi, et l'état-civil n'aurait qu'à s'incliner.

    Si cette procédure devenait la norme, il y aurait de quoi détruire non seulement la notion d'homme et la notion de femme, mais la notion d'état-civil, la notion de loi, donc la notion de pacte social... Seules compteraient les pulsions individuelles. C'est la mentalité libérale-libertaire, ce que Boltanski et Chiappello ont appelé « le nouvel esprit du capitalisme » : le mirage de la déréglementation de tout.

    Un groupe d'élus français (de la région de M. Nicot) vient de se déclarer en faveur du « droit au changement d'état-civil sur simple demande, pour les personnes transidentitaires » : autrement dit la validation légale de toute exigence individuelle subjective. Ces élus qualifient cela de « républicain » : détournement de sens qui abat le pilier de la notion de « république », l'autorité de la loi votée par les représentants du peuple.

    La forme politique du vivre-ensemble est ainsi attaquée par trois pressions : une pression (latérale) du lobby LGBT, une pression (de bas en haut) de groupes d'élus, une pression (de haut en bas) du Conseil de l'Europe.

    Cet exemple d'anomie – suppression de toute loi normative – concerne le domaine des nouvelles moeurs fabriquées par la société ultralibérale, où le consommateur (et ses « pulsions ») a remplacé le citoyen (et son « civisme ») ; depuis une quinzaine d'années, on appelle d'ailleurs « citoyennes » les pulsions du consommateur, pour achever le brouillage.

    Mais le domaine des moeurs n'est pas le seul concerné : cette liquéfaction des repères s'applique à tous les secteurs de la vie sociale. Les transgenres ne font que réclamer, dans leur style, le même anomie que celle dont bénéficie la sphère financière depuis vingt ans. L'ultralibéralisme s'est emparé de tout... L'urgence est d'aider les gens à s'en rendre compte, avant que cette société devenue factice ne leur tombe en morceaux sur la tête.

    Patrice de Plunkett (Blog de Patrice de Plunkett, 3 juin 2011)

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