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Points de vue - Page 239

  • Poutine dans les pas de Churchill et de De Gaulle ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Guillaume Faye, cueilli sur son blog J'ai tout compris et consacré à la politique étrangère russe, qui contrairement à celle des pays occidentaux se révèle intelligente et cohérente...

     

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    La politique russe est la seule intelligente

    La politique étrangère de Vladimir Poutine, appliquée par Sergueï Lavrov (ministre des Affaires étrangères de la F.R.), est la seule à être constante et cohérente. Elle contraste avec les choix occidentaux. Dans l’actuel chaos guerrier du Moyen-Orient, face à la barbarie islamique, la Russie mène une politique fondée sur trois axes : 1) l’élimination du ”califat” totalitaire de l’EI Dae’ch qui exporte le terrorisme et le djihad partout dans le monde ; 2) le rétablissement d’un État syrien sur de nouvelles bases ; 3) la protection des chrétiens d’Orient, ou ce qu’il en reste. La différence fondamentale entre la politique de Vladimir Poutine et celle de ses homologues occidentaux est qu’elle possède un axe et un projet. 

    Washington est plus anti-russe qu’anti-islamiste…

    L’arrivée de militaires et de matériels russes en Syrie et les interventions aériennes de Moscou suscitent l’ « inquiétude » des Etats-Unis. À juste titre, les Russes (comme des membres de l’état-major français) mettent en doute l’efficacité et surtout les objectifs de la coalition menée par Washington contre Dae’ch. Le Pentagone ne fournit volontairement aucun renseignement fiable à ses alliés pour les frappes aériennes (au point que la France a dû décider, après une nouvelle volte-face, de faire des vols de reconnaissance au dessus de la Syrie et d’aller y faire des bombardements, par ailleurs désordonnés et inutiles), des gesticulations qui n’ont aucune efficacité, comme le confirment les conquêtes territoriales de l’État islamique. Tout se passe comme si les Américains, sous la direction d’un Obama qui joue un double jeu, ne voulaient pas réellement détruire Dae’ch.

    Disons les choses comme elles sont : Washington et le Pentagone, dans cette stratégie catastrophique dont ils ont le secret depuis longtemps dans la région, veulent d’abord éliminer le régime de Bachar el-Assad allié des Russes. La stratégie anti-russe et anti-Poutine (et non pas anti islamiste) prime sur toutes les autres, comme on l’a vu en Ukraine. Il s’agit d’expulser les Russes de Syrie et notamment de leur base navale de Tartous, la seule qu’ils possèdent en Méditerranée, ce qui est inadmissible pour les gouvernants américains.

    Le Pentagone a dépensé 500 millions de dollars pour former des troupes syriennes ”alternatives”, rebelles luttant contre Bachar el-Assad : ce fut un fiasco total. Les armes US et les combattants sont passés aux islamistes ! L’échec, l’impuissance et l’improvisation des Occidentaux au Proche-Orient contraste avec l’efficacité de l’engagement russe. Poutine s’est engouffré dans la brèche de ce désordre américano-occidental. La présence russe en Syrie date des années 60.

    Les chancelleries occidentales accusent le Kremlin de n’avoir comme seul objectif que le sauvetage du régime d’Assad en frappant les ”rebelles” et non pas de vouloir éradiquer Dae’ch. C’est stupide car l’aviation de Moscou frappe aussi Dae’ch qui a, ne l’oublions pas, incorporé dans ses rangs des milliers de musulmans caucasiens russes qui constituent un danger terroriste pour la Russie. Et surtout, lesdits ”rebelles” (Front Al-Nosra, proche d’Al-Qaida ou l’organisation Ahrar Al-Sham) que ciblent Moscou sont des milices terroristes islamiques au même titre que Dae’ch, qui ont – scandale international soigneusement dissimulé – été armées, entrainées, financées par la CIA ! 

    Voilà pourquoi l’influent sénateur russophobe John Mac Cain s’est montré furieux contre les « provocations de Poutine » qui osait bombarder les protégés de Washington. Il faut retourner l’argument et dire : la ”coalition” aérienne  dirigée par les USA depuis une base de l’US Air Force près de Doha, au Qatar, n’a pas pour but principal la destruction de L’EI Dae’ch mais l’éradication du régime de Bachar el-Assad. Projet partagé par l’inconsistant M. Hollande. Ce qui aboutirait automatiquement à la création d’un État islamique fanatique en Syrie, d’où disparaitraient les derniers chrétiens.  

    Objectifs géostratégiques de la Russie

    Quels sont les objectifs de Moscou ? Le premier est la destruction de l’État islamique Dae’ch, d’autant que ce dernier incorpore des contingents caucasiens très nombreux qui peuvent revenir frapper la Russie. Le second est de contester la catastrophique hégémonie unilatérale américaine (déclinante) qui viole les règles de l’ONU sous prétexte de bons sentiments. Le troisième est de rétablir un monde multipolaire respectueux du droit international dans lequel la Russie retrouverait sa place de grande puissance mais non pas de puissance hégémonique, (leader of the world) ce qui a toujours été impossible dans l’histoire de l’humanité. Ce que les stratèges de Washington n’ont jamais compris. 

    En proposant à la tribune de l’ONU une coalition mondiale contre Dae’ch, seule solution viable, Vladimir Poutine a été accusé par l’administration US et par tous les lobbies russophobes français et occidentaux de soutenir le ”criminel de guerre” Bachar el-Assad et de vouloir implanter un impérialisme russe au Levant. On a aussi accusé Poutine d’être un tyran qui soutiendrait un de ses amis tyran, Assad. Ces arguments relèvent d’une russophobie obsessionnelle, inopérante en politique. 

    Les Russes ont bien joué contre les Américains, ce qui rend furieux ces derniers, dont la stratégie est versatile et impuissante. D’abord en 2013, en proposant et en initiant la destruction des armes chimiques de Bachar el-Assad, la diplomatie russe a tué dans l’œuf les promesses de bombardement des présidents Obama et Hollande. Moscou a démontré au monde que Washington avait perdu la main : importante revanche sur l’humiliation des années 90 Eltsine post-communistes. En renforçant sa présence militaire en Syrie et en proposant d’organiser une coalition contre Dae’ch, la Russie de Poutine humilie les USA et leur coupe l’herbe sous le pied. ”La Russie est de retour” : ce message de Poutine est d’autant plus crédible que les hôtes de la Maison Blanche, de la famille Bush à Obama (et bien avant…) n’ont jamais été capables de jouer leur rôle imaginaire de ”gendarmes du monde”. Ils ont créé le désordre à chacune de leurs interventions. On le voit dans la dramatique situation de l’Afghanistan et de l’Irak aujourd’hui.

    Poutine dans les pas de Churchill et de De Gaulle ?

    La politique étrangère russe vise au contraire à réinstaurer une stabilité géopolitique mondiale. Le gouvernement chancelant de Bachar el–Assad n’est pas une solution à terme. Mais éliminer d’un coup cet autocrate, comme on l’a fait avec Ben Ali, Kadhafi, Saddam Hussein et Moubarak  reviendrait à augmenter encore le chaos actuel et le djihad mondial. La solution, comme l’a dit Poutine, est d’abord de battre militairement et d’éradiquer Dae’ch et ses alliés (éteindre l’incendie) et ensuite de résoudre le problème du régime syrien.

    Dans son discours à l’ONU, Vladimir Poutine a comparé la lutte contre la barbarie de Dae’ch à la coalition contre Hitler. Ni Churchill ni De Gaulle n’aimaient l’autocrate communiste Staline, mais ils furent obligés de s’allier avec lui pour combattre le nazisme, l’ennemi principal. M. Poutine fait le même raisonnement avec le régime syrien : il faut d’abord abattre Dae’ch avec l’aide de Bachar el-Assad, et ensuite, on discutera.

     Les frappes aériennes russes depuis le 29 septembre (Moscou a positionné 28 chasseurs-bombardiers Sukhoï) visent les milices islamistes et Dae’ch qui menacent Damas et la zone côtière syrienne où est la base navale de Tartous. Les Russes ont parfaitement compris que si Damas et cette zone tombaient aux mains des islamistes, ce serait une énorme catastrophe géopolitique, la Syrie devenant alors leur butin. Immédiatement beaucoup de médias et de gouvernements occidentaux ont accusé les Russes de ne chercher qu’à protéger le régime d’Assad contre les ”rebelles”, prétendus ”démocratiques” et de pas frapper Dae’ch. C’est un mensonge : les milices ”rebelles” (armées et financées par les gouvernements occidentaux, voir plus haut) et Dae’ch sont objectivement complices. Les Russes ne visent qu’à empêcher la pieuvre islamiste (Dae’ch et les ”rebelles”) de s’emparer du cœur de la Syrie.     

    Ivan Rioufol  souligne «  le choix des États–Unis et de la France de rallier la Russie à reculons pour affronter l’EI en Syrie par des raids aériens » (Le Figaro, 02/10/2015). Il ajoute : « le retour en force de Vladimir Poutine, imperméable aux subtilités du ”soft power ”, signe l’échec de la stratégie de Barack Obama et de François Hollande. Leur humiliation se devine dans la mise en scène de leur défiance sur l’efficacité des premières frappes de Moscou. Cette réaction, puérile, est celle des leaders occidentaux ayant perdu la face pour s’être montrés incapables de désigner l’islamisme comme leur ennemi prioritaire. Non seulement le Syrien Bachar el-Assad, bête noire d’Obama et Hollande, est consolidé, mais c’est l’ancien ”kagébiste” qui prend la tête de la lutte contre le totalitarisme et de la défense des chrétiens d’Orient. Les démocraties sont à la remorque ». C’est le moins qu’on puisse dire…

    Ancienne membre du Conseil de sécurité national américain et responsable de la stratégie au ”Center for a New American Security”, Mme Julianne Smith, qui exprime la position officielle de Washington, a déclaré le 1er octobre que « la Russie ne résoudra pas le conflit en Syrie ». CQFD. Elle reflète la frustration américaine devant le retour en force de Moscou dans le concert international mais elle avoue aussi une volte-face de la diplomatie américaine – et de la diplomatie française qui lui obéit : «  il faut laisser Assad en place pour le moment, le temps qu’on se mette d’accord sur la suite et une sortie de pouvoir honorable pour lui ». Autrement dit : les Russes avaient raison. Intéressant de l’avouer…     

    Indispensable alliance avec la Russie

    Les frappes aériennes françaises en Syrie, soi-disant ”indépendantes” des Américains”, contre des ”camps d’entrainement de terroristes djihadistes” de Dae’ch au nom d’une ”légitime défense” n’auront aucune efficacité militaire. C’est une gesticulation  de M. Hollande, à usage électoral interne. Il veut se vendre (marketing politicien) en vue de la prochaine élection présidentielle de 2017 comme ”petit De Gaulle”. C’est assez pathétique…Il n’est pris au sérieux ni par les Américains ni par les Russes.  

    Comme l’écrit Frédéric Pons (Valeurs actuelles, 01–07/10/2015) : « Au Moyen-Orient, l’Amérique avance en tête du cortège des ”aveugles”. Sa responsabilité dans le chaos actuel est écrasante. Elle fit naître les Talibans, Al-Qaïda et détruisit tant de pays, de la Libye à l’Irak, aidée par ses alliés soumis jusqu’à l’absurde. En Syrie, notre ennemi est–il Assad ou les islamistes ? » Bon sens.

     Jean-Pierre Chevènement l’a reconnu : « l’élimination d’Assad ouvrirait les portes de Damas à Dae’ch ». Avec lucidité, d’accord avec les analyses de Poutine et de Lavrov, Chevènement estime que les frappes de la ”coalition internationale” dirigées par les É-U sont inopérantes et que les ”alliés” modérés n’existent pas. Les Russes sont les seuls à avoir compris le problème en bombardant à la fois l’ ”Armée de la conquête”, al-Nosra (émanation d’Al-Qaida) et l’EI Dae’ch, trois têtes de la même structure islamiste terroriste.  

    Pour éradiquer efficacement Dae’ch, il faudrait, évidemment, dans l’absolu, s’allier aux Russes et leur donner des gages, c’est-à-dire lever les sanctions absurdes contre la Russie, prises sur ordres américains. Renaud Girard suggère  (Le Figaro, 22/09/2015) : « suivons la politique de nos intérêts et suspendons les sanctions commerciales contre la Russie. Faisons-le, sans demander leur avis aux Américains. Attendons de recueillir les fruits d’un geste diplomatique aussi fort que celui d’une suspension unilatérale des sanctions. […] A-t-on imposé la moindre sanction à l’Amérique pour avoir envahi illégalement l’Irak, en mars 2003 ? » Vœux pieux. MM. Hollande et Fabius qui ont fait le choix de l’obéissance à l’Otan, à l’UE et aux USA, ignorent que les alliances franco-russes ont toujours été égalitaires et que les alliances avec les USA (politiques, militaires, commerciales) ont toujours été d’allégeance. Les gouvernants européens sont les seuls responsables de leur double soumission à Washington (1) et à l’islam invasif, deux forces conjointes.

    La Russie, relevée, régénérée, redevenue grâce à M. Poutine une puissance internationale et non plus régionale – en dépit de ses faiblesses économiques volontairement accentuées par les sanctions occidentales bien peu légales – s’impose comme une force de stabilité. Les accords de Minsk (sur la question ukrainienne) ont été parfaitement respectés par Moscou. Bien sûr, la Russie n’est pas parfaite. Mais qui l’est ? Et de quel droit nous mêlons-nous de son niveau de ”démocratie” et de ”droit-de-l’hommisme” intérieurs alors que nous tolérons tout, y compris l’esclavagisme, dans les monarchies autocratiques de la péninsule arabique ? La Russie est une grande puissance qui est notre premier allié naturel. La considérer comme un ennemi potentiel, un danger, une menace est une erreur d’analyse extrêmement grave.

    Guillaume Faye (J'ai tout compris, 6 octobre 2015)

    Note :

    (1) Mes critiques n’ont jamais visé les Américains en tant que tels, comme nation, mais la politique étrangère de l’oligarchie de Washington qui, depuis le début de ce siècle, est d’abord nuisible aux USA eux-mêmes.
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  • La violence est partout !...

    Vous pouvez découvrir ci-dessous une excellente chronique d'Éric Zemmour sur RTL, datée du 8 octobre 2015 et consacrée à la violence, condamnée avec grandiloquence, mais qui reste omniprésente au sein de la société...

     


    Air France : "La violence est partout", note... par rtl-fr

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  • Au secours : les intellectuels reviennent... par la droite !

    Vous pouvez découvrir ci-dessous un point de vue de François-Bernard Huyghe, cueilli sur son blog, Huyghe.fr, et consacré à l'assaut des intellectuels dits "réacs" contre la doxa politico-médiatique et son refus du réel...

     

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    Réac attaque

    Les intellectuels reviennent et par la droite. Ou plus exactement, pendant que la gendarmerie de la pensée (Libé, télé & co.) s'épuise à constater les dérapages et franchissements de ligne rouge, quiconque a le malheur de commettre un livre d'un peu de portée se voit aussitôt soupçonné de faire partie du complot réac. Comme si penser c'était désormais regretter. Dès 2002, la première alarme fut tirée par le livre de Lindenberg "Le rappel à l'ordre" : il s'inquiétait du succès d'une intelligentsia odieuse à ses yeux - Gauchet, Finkielkraut, Besançon, Houelbecq, Ferry, Muray, Lévy, Taguieff, Nora et d'autres. Il étaient coupables de nostalgie identitaire, de déclinisme. Ils présentaient les symptôme contagieux des phobies qui nous ont fait tant de mal - refus de l'évolution des mœurs, des droits de l'homme, du métissage, etc..

    Treize ans plus tard, il suffit d'ouvrir n'importe quel hebdomadaire pour voir combien font débat chaque nouveau livre ou nouvelle déclaration des inévitables Debray, Onfray, Houelbecq, Finkielkraut, Michéa, Zemmour, sans oublier Renaud Camus, Elisabeth Lévy, Richard Millet, Olivier Todd, Christophe Guilluy, etc. ( gens dont nous convenons volontiers qu'ils ne pensent pas la même chose). Ils risquent le tribunal, du type ONPC où l'on commence par vous dire que vous êtes partout, que vous dominez le débat et que vous ne cessez de vous exprimer avant de vous reprocher la moindre ligne et de vous intimer de vous repentir. Et si possible de vous taire. Ou alors pour votre salut et repentance, vous devriez faire quelque opuscule propre à édifier les masses, tenir des propos antiracistes et pro-européens, exalter la mondialisation et la modernité, chanter l'Autre et le changement. Nous expliquer en somme que le monde tel qu'il est est le moins mauvais possible, employer votre énergie à une cause enfin courageuse et anticonformiste comme lutter contre le réchauffement climatique, Poutine, le Front National, la France crispée et le populisme, devenir de vrais rebelles, quoi !
    Pour ne prendre qu'un exemple, au cours des deux dernières semaines Onfray, Debray, Finkielkraut ont chacun fait la couverture d'un des principaux hebdomadaires. Ce sont de longs dossiers qui aideront le lecteur cadre à décider s'il doit croquer dans la pomme : d'un côté ces gens là disent des choses que l'on comprend. Leurs fulminations contre la bien-pensance ont un côté Bad Boys bien séduisant. De l'autre, il ne faudrait quand même pas faire le jeu de l'innommable et la blonde est en embuscade... On a moins hésité avant de goûter son premier joint.
    À chaque époque l'évolution des idées dominantes, montée et le déclin des représentations hégémoniques - se développe dans un rapport complexe. Il se joue entre la situation des producteurs d'idées, leurs organisations collectives, la forme des moyens de transmission, les groupes d'influence ou les détenteurs d'autorité, la doxa populaire et -il faut quand même le rappeler- la situation objective. Nous n'avons pas la place d'en traiter ici, mais il nous semble qu'il y a au moins deux phénomènes majeurs sur lesquels nous reviendrons :
    L'alliance qui s'esquisse entre la haute intelligentsia (producteur de thèses et idées générales) et le peuple ou du moins les tendances de l'opinion populaire. Elle se constitue autour d'un accord pour nommer un réel que refusent les politiquement corrects (basse intelligentsia, commentateurs médiatiques, classes urbaines assez matériellement protégées pour être soucieuses des "valeurs"). En clair, le conflit oppose ceux qui osent et ceux qui refusent d'aborder les sujets tabous - identité, effondrement de l'éducation, danger islamiste, existence d'ennemis, souveraineté, nation, peuple, culture et mœurs, continuité historique - autrement que comme des fantasmes répugnants nés des "peurs". Ceux qui s'inquiètent d'une permanence du tragique contre les partisans de ce qu'il faut bien nommer l'orde établi. Selon eux, ses principes seraient excellents, le triomphe historique inéluctable et il conviendrait seulement de corriger les excès et dérives avec un peu plus du même : plus de libéralisme, de gestion, de tolérance et d'ouverture, de gouvernance, d'Europe, de technologie et de vivre ensemble. À certains égards, cette bataille se fait à flancs renversés. Les positions entre pessimistes critiques s'attaquant aux élites et aux dominations idéologiques d'une part et, d'autre part universalistes moraux et bons gestionnaires ont été comme échangées entre "réacs" et "progressistes".
    Le retrait des seconds sur des positions purement défensives voire répressives (on n'a pas le droit de dire que..., on sait où cela nous mène). Une hégémonie idéologique peut-elle survivre en n'expliquant rien, en ne promettant rien, mais en se contentant de dire que ses ennemis sont méchants ? La criminalisation de la critique et le recours au tabou nous semblent plutôt être les armes du suicide idéologique. C'est, en tout, cas une question sur laquelle nous reviendrons ici.

    François-Bernard Huyghe (Huyghe.fr, 8 octobre 2015)

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  • Vers la guerre civile ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de l'économiste hétérodoxe Jacques Sapir, cueilli sur RussEurope et consacré à l'aggravation de la crise politique, sociale et économique et à ses conséquences possibles...

     

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    Vers la guerre civile ?

    Les nuages qui sont en train de s’accumuler sur la société française, et dont les crimes commis en janvier 2015 sont la manifestation la plus immédiate, traduisent une perte de repères généralisée. On peut rattacher cela à une forme d’anomie politique. Celle-ci se manifeste tant par la montée de comportements narcissique que par des dérives communautaristes. On voit bien que cette anomie politique est le produit de la crise, mais on comprend aussi que la crise n’est pas la seule, ni même la principale cause de cette anomie. Car, nous avons connu, dans le passé, d’autres crises économiques qui n’ont pas produit ces effets. Cette anomie politique n’est en réalité que la conséquence de la perte de souveraineté dont souffre notre pays.

    Du quantitatif au qualitatif

    Cette perte de souveraineté a été progressive, et c’est probablement pour cela qu’elle a tardé à se manifester. Aujourd’hui, l’accumulation de petits renoncements, de petites soumissions, a induit un véritable changement qualitatif. Cette perte de souveraineté ne se fait pas au profit d’un Etat particulier, mais au système bureaucratique qui s’est mis en place à travers l’Union européenne, de Bruxelles à Francfort. Elle est devenue évidente avec les événements de l’état 2015 en Grèce qui ont montré aux yeux de tous quelle était la véritable nature des institutions européennes et pourquoi ces dernières sont radicalement incompatibles avec toute forme de démocratie. Bien des yeux se sont dessillés à cette occasion. On comprend aussi que cette perte de souveraineté ne peut que favoriser le glissement, désormais de plus en plus rapide, vers un Etat collusif, prélude à la mise en place d’un Etat réactionnaire. Mais, cette perte de souveraineté peut aussi conduire à la guerre civile, qui sera alors l’occasion rêvée qu’attendent certains pour mettre en place cet Etat réactionnaire.

    Le drame que nous avons connu les 7 et 9 janvier 2015, les assassinats commis de Charlie Hebdo à l’Hyper-Casher, sont autant de témoignages que ces nuages commencent à laisser passer l’orage. Il nous faut nous y préparer. Paradoxalement, c’est dans notre propre passé que nous pourrons trouver les principes nous permettant de nous projeter dans l’avenir et de faire face aux orages et aux tempêtes qui viennent. Mais peut-être n’y a-t-il rien de paradoxal à cela. Ces réflexions du passé qui éclairent notre avenir ne sont que l’expérience accumulée des crises que la France a connues et a surmontées. La volonté d’effacer le passé que l’on devine dans certaines décisions prises sur les programmes d’enseignement, que ce soit à droite avec le désastreux ministère de Luc Chatel, comme à gauche, n’est pas ici innocente ni sans conséquences.

    Il convient ici de le redire, la France est, et a toujours été, diverse. La société n’est pas la produit d’une quelconque homogénéité, qu’elle soit culturelle, religieuse, linguistique ou économique. La société n’est même pas le produit de décisions conscientes d’individus qui lui préexisteraient. Les individus sont en réalité le produit de la société et la construction de cette dernière est simultanée avec la construction des individus. Mais, ce processus de construction historique a une histoire et une inertie. Cette dernière n’est autre que la culture politique qui s’est construite en même temps que l’Etat et qui incorpore la mémoire des grandes crises traversées. Cette culture politique, dont le droit à la caricature est un exemple, constitue pourtant un invariant dans le court terme. Nul ne peut prétendre impunément s’en dissocier ou la rejeter sans s’exposer lui-même à un phénomène de rejet. 

    L’origine d’une Tyrannie

    Les individus qui composent la société sont donc divers car les processus de production sont eux-mêmes divers. Par ailleurs, les mythes fondateurs de la société peuvent aussi être contestés, ce qui implique une nouvelle diversité. Mais cela ne fait que nous ramener à une évidence : la société est politique. C’est par le politique que se construit le lien social, et cette construction implique un redéploiement permanent du politique. Le mot si décrié, et si oublié, de dialectique ici s’impose. Entre l’individu et le collectif s’établissent des liens complexes qui sont irréductibles à la vision tragiquement simplifiée que veulent en donner les libertariens de tout bord. Cette vision de la société n’est pas alternative à d’autres. Elle s’oppose en réalité à toute vision de l’organisation sociale. La vision libertarienne conduit immanquablement à ce que Hobbes appelait « la guerre de tous contre tous », et concrètement à la guerre civile.

    Le rapport intime entre la société et le politique impose de regarder comment s’est produit cette construction dans chaque société. Car, le processus de construction de la société et aussi un processus de différenciation des sociétés. Plus les sociétés se construisent, plus elles produisent des institutions, et plus elles affirment leurs différences. Vouloir le nier, prétendre qu’il y aurait des feuilles blanches sur lesquels des esprits forts pourraient écrire une histoire sans tenir compte de l’histoire passée, est la meilleur recette pour conduire à des drames affreux dont le pire est la guerre civile. C’est pourtant à cela que tendent aujourd’hui les institutions européennes et l’idéologie européiste autour de concepts « hors-sol » niant la pertinence de la souveraineté et par là de la légitimité. Affirmons qu’il ne saurait y avoir de démocratie sans peuple et que l’idée d’une « démocratie sans démos » n’est que le masque de la pire des Tyrannies. Il nous faut donc prendre garde à arrêter au plus vite cette inquiétante dérive. 

    La construction d’une société

    Le processus de construction de la société met aussi en évidence des formes dont on peut repérer la pertinence à travers les âges. Les anciens savaient qu’il n’y a pas de légalité sans légitimité, qu’en réalité c’est la seconde qui fonde la première. Des mythes grecs à la distinction romaine entre auctoritas et potestas il y a une leçon qu’il nous faut retenir. Mais, le fondement de la légitimité devient lui-même source potentielle de conflits dès lors que la pluralité des religions devient une réalité. C’est ce que révèle l’œuvre de Jean Bodin qui, dans un même mouvement, établit la suprématie du principe de souveraineté et le détache à jamais de tout lien avec une religion particulière. La seule réponse possible aux guerres de religions du passé ou à celles qui nous menacent, aux intégrismes des uns et des autres, aux lectures littérales, c’est l’union entre le principe de souveraineté et celui de laïcité. Mais, ceci implique la distinction entre sphère privée et sphère publique, distinction que l’idéologie actuelle prétend effacer. La parade ostentatoire des narcissismes, si elle est cohérente avec l’idéologie des libertariens, porte en elle la fin de la société démocratique.

    Un danger menace la société, que ce soit par l’accumulation de richesse qui est tellement extrême qu’elle en devient odieuse, ou par la corrosion sourde d’une idéologie individualiste qui ne produit désormais qu’un narcissisme exacerbé. Le politique se trouve aujourd’hui attaqué sur deux fronts, dans les formes de son fonctionnement mais aussi dans l’intimité de son rapport aux individus. Cette attaque du politique, et donc du cœur même de ce qui produit la société, a des conséquences importantes quant aux formes d’organisation de cette dernière. Cette double menace provoque en effet la crise de l’ordre démocratique qui, comme toute forme d’organisation, ne découle de nulle « loi naturelle » mais de l’expression d’une volonté collective. Dès lors, le futur ne semble nous promettre qu’un choix entre un retour à un ordre archaïque fondé sur des fantasmes d’homogénéité de la société ou un ordre despotique fondé sur lois « immorales ». 

    A nouveau sur le lien entre souveraineté et démocratie

    La remise en cause de la souveraineté et de la démocratie porte atteinte au plus profond de la nature de la société française. Certes, il peut y avoir des Etats souverains qui ne sont pas démocratiques ; mais on n’a jamais vus d’Etat démocratique qui ne soit pas souverain. Ce sont donc les fruits amers, mais sommes tout logiques, du processus de mondialisation et de construction de l’Union européenne.

    Prétendre que l’Union européenne aurait été conçue, peu ou prou, pour protéger les peuples contres les influences de la mondialisation comme le font ses thuriféraires est un mensonge éhonté. L’Union européenne a été en réalité à l’avant garde du mouvement qui défait les Etats au profit des grandes firmes multinationales. Elle n’est que l’héritière du projet américain qui fut conçu dans la guerre froide[1]. Elle se construit sur ce que Stathis Kouvelakis va, en se référant à un ouvrage relativement récent de Perry Anderson[2], décrire comme « …une mise à distance de toute forme de contrôle démocratique et de responsabilité devant les peuples est un principe constitutif du réseau complexe d’agences technocratiques et autres collèges d’experts qui forme la colonne vertébrale des institutions de l’UE. Ce qu’on a appelé par euphémisme le « déficit de démocratie » est en fait un déni de démocratie »[3].

    L’union européenne est en réalité un espace bien trop hétérogène pour que l’on puisse penser, comme l’évoque Arnaud Montebourg ou d’autres, à un protectionnisme « européen ». Il ne peut y avoir de Souveraineté, et donc de démocratie, à l’échelle européenne car il n’y a pas de peuple européen. De ce constat découle le fait que ce qui peut exister, et fonctionner, à l’échelle européenne ce sont des coopérations multilatérales. Elles sont absolument nécessaires pour pouvoir traiter de nombreux problèmes mais elles ne seront jamais suffisantes. 

    Reconstruire l’ordre démocratique

    Il nous faut donc nous atteler à la reconstruction de cet ordre démocratique et nous devons le faire en regardant les causes de sa crise et non point seulement ses conséquences. Pour ce faire, il faudra nécessairement une profonde recomposition des forces politiques. Il y a certes de nombreuses personnalités dans les partis qui sont ou qui ont été au pouvoir qui sont convaincues de la nécessité de formes de protection de l’économie française ainsi que d’une dépréciation forte de la monnaie. On sait que cela n’est en réalité possible que dans le cadre d’une sortie de l’Euro et d’un retour au Franc. Mais, ces partis sont constitués de telle manière que la « direction » de ces derniers, un groupe réduit d’hommes et de femmes, opèrent de manière quasi indépendante de ce que pense et la base et les cadres intermédiaires de ces partis mais en profonde et parfois directe connivence avec des intérêts privés et leur expression dans les grands médias. C’est ce que l’on a appelé l’Etat collusif qui n’est qu’un étape dans la marche vers l’Etat réactionnaire.

    Ces « directions » ne s’appuient pas seulement sur les institutions internes propres à leurs organisations, mais aussi sur des réseaux de clientélisme et des phénomènes importants de corruption, pour construire leur indépendance par rapport à leurs mandants. Ajoutons à cela une politique de pressions et de dénigrement systématique de tous ceux qui ne pensent pas comme eux. Au total, le niveau de démocratie dans ces partis se révèle très inférieur à ce qu’il est dans le système politique en général. Il faudra donc en passer par un éclatement et une recomposition de ces partis, en espérant que les partisans du recouvrement de la souveraineté nationale sauront s’unir ou à tout le moins travailler ensemble. Le processus d’éclatement est, semble-t-il, en marche dans ces partis du pouvoir.

    Celui de recomposition risque de se faire attendre. Le plus vite il se concrétisera, le mieux cela sera pour le pays. 

    Eviter la guerre civile

    La refondation de l’ordre démocratique est aujourd’hui, ici et maintenant, la seule démarche qui soit porteuse d’avenir et de paix civile. C’est la perspective qui apporte le plus de garanties au maintien d’une société qui soit relativement pacifiée et en conséquences, stabilisée. C’est pourquoi, aujourd’hui, la défense de l’ordre démocratique et de ses fondements, la souveraineté et la laïcité, prend la dimension d’un impératif catégorique. C’est pourquoi aussi une telle tache implique que l’on accepte de mettre temporairement de côté certaines divisions, qui sont tout à fait légitimes par ailleurs. L’ampleur de la tache implique que l’on pense les formes politiques d’une coordination dans le combat commun. C’est cela la logique des « fronts » que, par ignorance de l’Histoire, par sectarisme politique ou plus simplement par stupidité, certains s’emploient à refuser.

    Mais, cette refondation peut imposer ou impliquer des éléments de populisme. Pour combattre la tendance spontanée des bureaucraties à produire des lois sans se soucier de leurs légitimités, le recours à des éléments de légitimité charismatique s’impose. C’est le sens de la réintroduction, sur des questions essentielles, des procédures référendaires qui relèvent en partie de cette forme de légitimité. Surtout, il convient de se rappeler que les pouvoirs dictatoriaux, dans leur sens initial et non dans le sens vulgaire qu’a pris le mot de « dictature », font partie de l’ordre démocratique. Il ne faudra donc pas que notre main tremble, que l’action de tous soit interrompue, quand se posera la question de l’abrogation de lois prises dans des conditions certes légales mais entièrement illégitimes.

    La boussole en ces temps incertains devra être comme toujours la défense de la souveraineté de la Nation, et le rassemblement autour de son souverain, c’est à dire le peuple. La nature de ce dernier est en effet claire. Elle est toute entière dans cette magnifique formule héritée de la Révolution Française qui dit que la démocratie est le gouvernement « du peuple, par le peuple, pour le peuple ». Mais il convient d’affirmer que le peuple est conçu comme un ensemble politique soudé autour du bien commun, soit de la Res Publica. C’est cela, et cela seul, qui sera notre viatique pour affronter les tempêtes à venir.

    Jacques Sapir (RussEurope, 4 octobre 2015)

    Notes :

    [1] Ce qui fut déjà analysé par J-P. Chevènement La faute de M. Monnet, Paris, Fayard, 2006.

    [2] Anderson P. Le nouveau vieux monde, Marseille, Agone, 2011 (en anglais The New Old World (2009) Londres, Verso).

    [3] Kouvelakis S., in C. Durand (sous la direction de), En Finir avec l’Europe, Paris, La Fabrique, mai 2013, p. 51

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  • De Gaulle ne partageait pas le rêve assimilationniste et universaliste...

    Vous pouvez découvrir ci-dessous une chronique d'Éric Zemmour sur RTL, datée du 1er octobre 2015 et consacrée à De Gaulle et à sa vision des Français comme « un peuple européen de race blanche, de culture grecque et latine et de religion chrétienne »...


    "Tout le monde en France a été, est ou sera... par rtl-fr

     

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  • La France au risque de l'immigration : le choc du réel...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Mathieu Bock-Côté, cueilli sur Valeurs actuelles et consacré à la question de l'immigration. Québécois, l'auteur est sociologue et chroniqueur à Radio-Canada et a déjà publié plusieurs essais.

     

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    La France au risque de l'immigration : le choc du réel

    On ne relit jamais sans étonnement les essais du début des années 1990, qui prophétisaient l’avènement de la mondialisation heureuse. Les frontières s’aboliraient progressivement et le métissage des peuples permettrait à l’humanité de faire l’expérience de sa profonde unité. D’ailleurs, les grands enjeux de notre temps, comme la lutte contre le réchauffement climatique ou contre les inégalités croissantes de développement, exigeraient d’en finir avec la souveraineté nationale.

    C’est un peu comme si l’optimisme progressiste des modernes les poussait à se croire délivrés de la part tragique de la condition humaine. On pourrait parler d’une “jacquesattalisation” de la pensée française. L’histoire d’avant la mondialisation n’aurait plus rien à nous dire, ce serait celle d’hommes divisés contre eux-mêmes. Les civilisations devraient désormais se fondre dans une même société planétaire et chaque société se convertir au modèle multiculturel. Vingt-cinq ans plus tard, on se demande comment on a pu errer autant.

    Les indices nous laissant croire qu’un tel récit n’était qu’une utopie ne manquaient pourtant pas. La migration de masse n’a pas commencé avec l’actuelle crise des migrants, que l’idéologie médiatiquement dominante entend réduire à sa part humanitaire, alors qu’elle représente aussi une révolution démographique majeure. Cela fait plusieurs décennies, en fait, que les observateurs nous prévenaient pourtant des risques liés à l’immigration massive et à l’idéologie multiculturaliste.

    Mais la “crise des migrants” agit à la manière d’un formidable révélateur. C’est une part du réel longtemps occultée mais pourtant déterminante qui remonte à la surface : les cultures, les civilisations et tout ce qui déborde d’une définition strictement juridique et administrative de la citoyenneté. La sociologie est la première surprise : elle avait décrété que les nations, les cultures et les civilisations étaient des constructions sociales artificielles, que les hommes pouvaient délaisser sans risque.

    On constate que c’est faux. Derrière la déconstruction, on trouve souvent une rage nihiliste, comme si l’intelligentsia désirait néantiser tout ce qui n’est pas recyclable dans son utopie globale. Mais ce n’est pas parce qu’on s’aveugle volontairement devant un pan du réel qu’il disparaît soudainement. Il est vrai que les nations occidentales ont cherché à se déraciner volontairement. On croyait émanciper les hommes en les affranchissant de leur culture. On les a plutôt condamnés à une forme terrible d’errance et de dépersonnalisation collective.

    Et pourtant demeure quelque chose comme un instinct de survie des peuples, qui les pousse à protester contre leur disparition, même s’ils n’ont plus les mots pour le dire. On les accuse de toutes les phobies lorsqu’ils protestent contre le progrès de l’indifférenciation. De la dénonciation de la xénophobie à l’europhobie, en passant par l’homophobie et la transphobie, c’est tout un dispositif de censure idéologique qui s’est mis en place. On psychiatrisera même la nostalgie : il est inconcevable de croire que le monde d’hier pouvait valoir mieux que celui qu’on nous impose.

    Sans faire du populisme à deux sous qui sacralise le peuple, on constatera néanmoins que c’est en se rapprochant des classes populaires qu’on retrouve un attachement aux vieilles vertus, aux appartenances nouées dans l’histoire et aux repères anthropologiques fondamentaux. On comprend dès lors pourquoi la politique contemporaine se clive autour des enjeux sociétaux : ce sont des visions de l’homme assez contrastées qui s’opposent. C’est ce qui se dévoile à travers la fameuse question identitaire.

    La réaction des élites médiatiques et intellectuelles est au mieux navrante, mais plus souvent qu’autrement désolante. Elles savent seulement reprocher aux peuples de ne pas s’enthousiasmer de leur possible dilution. Ils se rendraient ainsi coupables de repli identitaire et de fermeture à l’autre, ce qui est aussi une manière de les psychiatriser. On en comprend qu’il faut être malade ou simplement méchant pour ne pas consentir à la marée migratoire. Autour de la question nationale se joue aujourd’hui une nouvelle lutte des classes.

    Mathieu Bock-Côté (Valeurs actuelles, 28 septembre 2015)

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