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Economie - Page 17

  • Tout va très bien, Madame la Marquise !...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Jacques Sapir, cueilli sur son blog RussEurope et consacré au dernier sommet européen que les médias, comme à leur habitude, nous ont vendu comme une réussite...

     

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    Tout va très bien, madame la marquise...

    « On ne déplore qu’un tout petit rien… »

    Le sommet européen des 18 et 19 octobre a abouti à un échec, que l’on cache plus ou moins sous des communiqués ronflants[1], et des articles où la flagornerie perce sous l’apparente objectivité[2]. À croire que la chanson de feu Charles Trenet, « Tout va très bien madame la marquise », est devenu le nouvel hymne des dirigeants français sur la question européenne. Il est ainsi frappant de voir que, même dans la presse européenne et française, les doutes commencent à se faire insistants[3]. Si le principe d’un accord de supervision bancaire a bien été accepté pour l’ensemble des banques de la zone Euro, les conditions de sa mise en œuvre n’ont pas été précisées. Elles font l’objet de discussions importantes, que ce soit par la Grande-Bretagne (qui entend bien garder le contrôle de ses banques) que de l’Allemagne. De fait, des obstacles juridiques importants existent et ils ont été rappelés par la Chancelière allemande elle-même[4]. Celle-ci a même déclaré : « Rien qu’à regarder le processus pratique, il est absolument clair que ceci ne se mettra pas en place en un mois et demi »[5], sonnant par là même le glas des espérances françaises et espagnoles de voir l’Union bancaire aboutir d’ici la fin de l’année.

    Ces obstacles devraient retarder l’application de l’accord au 1er janvier 2014 et surtout aboutir à ce qu’ils ne portent que sur les passifs accumulés à partir de cette date[6]. En d’autres termes, le projet d’une Union bancaire comme instrument de résolution de la crise des banques espagnoles, grecques et portugaises a lamentablement échoué, car les mauvaises dettes sont déjà présentes dans les passifs. D’ici à 2014 on estime que seront révélés 270 milliards de pertes pour les seules banques espagnoles[7].

    De même, si le communiqué final insiste sur la nécessité de briser le cercle vicieux qui entre les banques et les dettes souveraines des États, l’aide directe du MES, qui était sérieusement envisagée pour l’Espagne, se trouve de fait reportée après la mise en œuvre de l’Union bancaire, soit après le 1er janvier 2014. Il y a donc contradiction entre le discours et les actes, ce qui n’est pas pour étonner les observateurs. Le renvoi de la décision à une réunion de l’Eurogroupe n’a fait qu’acter l’existence du blocage[8].

    Sur l’intégration économique et politique, que des hommes politiques français de premier plan avaient annoncée à grand son de trompe, le blocage est encore plus total. En s’en remettant aux autorités nationales pour trouver un accord sue ce que l’on appelle le « six-pack » et le « two-pack », le Conseil a reconnu l’ampleur des divergences. De même, l’idée d’un budget européen renforcé n’a pas été retenue, et Mme Merkel a opposé une fin de non-recevoir à l’émission de « dettes communes » soit à l’émission des Eurobonds. À l’inverse, le projet allemand d’une supervision directe  des budgets nationaux par la Commission n’est même pas cité. C’est donc bien à un constat de blocage complet qu’il faut alors conclure.

    Enfin, sur la Grèce, si le Conseil donne acte au Premier ministre Samaras des efforts consentis par le peuple grec, il n’a été nullement question des deux ans supplémentaires réclamés à cors et à cris. Ici encore le Conseil a été incapable d’aboutir à un accord. Si la Grèce recevra très probablement les 31 milliards d’euros dont elle a besoin d’ici décembre sous peine de faire défaut, le problème de son financement se posera à nouveau dès la fin du mois de janvier 2013. Il semble donc bien que le Conseil européen des 18 et 19 octobre dernier n’ait fait que repousser de quelques semaines les échéances.

     

    Rien de ceci n’est glorieux, et il n’est aucune raison de pavoiser. La zone Euro s’achemine vers un terrible retour de crise, qui surviendra entre le début de 2013 et le printemps. Il sera alors bien tard pour prendre les mesures qui s’imposeront alors par la force du désastre. L’affirmation du Président François Hollande selon laquelle la fin de la crise de la zone Euro est en vue apparaît ainsi malencontreuse et quelque peu aventurée. Le 16 avril 1940, Paul Reynaud, nouveau Président du Conseil, déclarait devant le sénat que « la route du fer est coupée ». Moins d’un mois plus tard c’était l’offensive allemande sur l’ouest de l’Europe. Des hommes politiques responsables devraient se souvenir que l’avenir se plie fort rarement à leurs rêves.

    Jacques Sapir (RussEurope, 20 octobre 2012)

     

    otes :

    [1] Fredet J-G., « Bruxelles : accord a minima ou compromis en trompe-l’oeil ? », Le Nouvel Observateur, 19 octobre 2012, URL : http://tempsreel.nouvelobs.com/la-crise-de-l-euro/20121019.OBS64…-de-bruxelles-accord-a-minima-ou-compromis-en-trompe-l-oeil.html

    [2] Revault D’Allonnes D. et Philippe Ricard, « A Bruxelles, M. Hollande et Mme Merkel s’accordent sur un compromis minimum » Le Monde, 19 octobre 2012, URL : http://www.lemonde.fr/europe/article/2012/10/19/a-bruxelles-m-hollande-et-mme-merkel-s-accordent-sur-un-compromis-a-minima_1778028_3214.html

    [3] « Sommet européen : les avancées… et les blocages », La Tribune, 19 octobre 2012, URL : http://www.latribune.fr/actualites/economie/union-europeenne/2012…9trib000725970/sommet-europeen-les-avancees-et-les-blocages.html

    [4] RTT News, RTT Staff Writer, « Merkel Casts Doubt On Setting Banking Union By Year-End », 20 octobre 2012, URL : http://www.rttnews.com/1987133/merkel-casts-doubt-on-setting-banking-union-by-year-end.aspx?type=eueco

    [5] Mrs. Angel Merkel, “Just looking at the practical process, it is absolutely clear that this is not going to take place in a month and a half », cité par Die Welt, « Creation of EU banking union ‘will take years’ » le 19 octobre 2012, édition électronique, URL : http://www.dw.de/creation-of-eu-banking-union-will-take-years/a-16319868

    [6] Kanter J., « German Refusal on Bank Aid Mars End of Europe Summit » New York Times, 19 octobre 2012, URL : http://www.nytimes.com/2012/10/20/business/global/germany-spoils-party-with-refusal-on-bank-aid.html?_r=0&pagewanted=print

    [7] Penty C., « Spain Banks Faces More Losses as Worst-Case Scenario Turnes Real », Bloomberg, 17 octobre 2012, URL : http://www.bloomberg.com/news/2012-10-17/spain-banks-face-more-losses-as-worst-case-scenario-turns-real.html

    [8] « Sommet européen : les avancées… et les blocages », La Tribune, 19 octobre 2012 op.cit..

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  • Le protectionnisme est-il inévitable ?...

    Vous pouvez regarder ci-dessous un entretien avec Franck Dedieu, co-auteur de l'essai intitulé Inévitable protectionnisme (Gallimard, 2012). Cet entretien est mis en ligne par le club Politique autrement, fondé par Jean-Pierre Le Goff.


    Le protectionnisme est-il inévitable ? par PolitiqueAutrement

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  • Tobin or not Tobin ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'Auran Derien, cueilli sur Metamag et consacré à l'instauration d'une taxe sur les transactions financières dans onze pays de la zone euro... 

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    Tobin or not Tobin
     
    Onze Etats de la zone euro affirment qu’ils vont donner leur accord ferme en faveur d’une taxe Tobin sur les transactions financières. Certains pourraient s’imaginer que le temps est venu de se servir de la finance pour organiser l’Europe des peuples. Pourtant c’est faux. Une fois de plus, il s’agit de viser à côté, afin que rien ne change mais que les européens puissent penser que du nouveau est né.
     
    La taxe Tobin dans le système de prédation. 
     
    Lorsqu’en 1971 le président américain Nixon prit la décision de rompre la relation entre l’or et le dollar, les devises commencèrent à fluctuer et la spéculation s’installa pour le plus grand profit de gangs spécialisés et au détriment de tous les autres. Alors le professeur Tobin - qui reçut le “prix Nobel” d’Economie en 1981 - proposa d’instaurer un impôt sur les opérations de change pour mettre un grain de sable dans les rouages de la spéculation. A mesure que les "voyous" de la finance créaient des crises plus fréquentes, à mesure que l’enfer progressait en Europe et en occident, la réflexion de Tobin sortit de ses limbes sous une forme différente: utiliser les fonds pour aider les pays pauvres. 
     
    Le projet initial consistait à freiner la spéculation à court terme et à donner des ressources aux organisations internationales. Il s’agissait finalement de proposer une simple bifurcation au projet totalitaire de domination du "soviet suprême de la finance". Car le problème fondamental qu’il faut résoudre est très différent: il s’agit de changer de paradigme. L’obsession actuelle de donner le droit d’émettre la monnaie à une association de financiers spéculateurs débouche sur l’horreur des destructions massives de toutes les formes de vie civilisée. La monnaie n’est pas un bien comme les autres. Ce n’est pas une marchandise mais un système de créances et dettes qui circulent et se transforment sans jamais s’arrêter. On se réfèrera, une fois de plus, au dernier livre de B.Lietaer où il nous explique que les systèmes locaux de crédit mutuel dépassent aujourd’hui le nombre de 2.500, phénomène qui traduit bien l’inadéquation des "banksters" d’avec les besoins sociaux des populations.
     
    Ce projet de Taxe, pour lequel il faut que neuf pays envoient une lettre officielle, suppose un accord sur sa base de calcul, le taux appliqué et les modalités de perception. Comme les anglo-saxons ont truffé le monde de paradis fiscaux, qui prendra au sérieux les effets bénéfiques de cette utopie destinée à perpétrer les crimes financiers? 
     
    La canaille bancaire s’installera dans les centres off-shore, les opérations s’effectueront à l’ombre des confettis de l’Empire britannique fiscalement vierges, mais la commission de Bruxelles, thyase de sycophantes serviles, disposera d’un budget pour faire exécuter les ordres de ses maîtres, les néantologues occidentaux. La dérive de ce projet stupide est déjà prévisible lorsqu’il est annoncé que la Commission européenne prévoit de taxer à partir de 2014 les transactions portant sur les actions et les obligations à 0,1% et celles sur les produits dérivés à 0,01%. Les premiers promoteurs et défenseurs de cet impôt avaient pour leur part estimé qu’il faudrait taxer toutes les transactions à 0,1%. Pourquoi le pire, les produits dérivés, ne le seraient-ils qu’à 0,01%? En attendant, on suppose, que le "soviet suprême de la finance" obtienne 0,001%, etc... Bruxelles se moque de nous.
     
    Une concurrence institutionnelle féconde plutôt qu’une Tobinerie 
     
    L’économiste Pierre Leconte, entre autres, a affirmé qu’il est primordial de casser les monopoles de la finance car ils font régner la terreur sur les hommes politiques. Les fonctionnaires et élus de Bruxelles en sont une parfaite illustration, eux qui sont soudoyés par les 3.000 lobbys qui y sont enregistrés. Il convient aussi de supprimer le FMI qui est un appareil prédateur et destructeur, une centrale de justifications mensongères en faveur du "soviet suprême" de la finance. La mégère très apprivoisée qui occupe le fauteuil de président n’est-elle pas un excellent exemple de l’absence totale d’idées ? 
     
    Au FMI on aboie quand une idée originale passe…. Parmi les réformes indispensables à un monde plus harmonieux, il convient d’interdire le projet destructeur du grand marché transatlantique; de sanctionner la publicité mensongère sur les actifs financiers et d’éliminer les armes de destruction massive que sont les marchés à terme. 
     
    Mettre en concurrence des structures institutionnelles 
     
    Voilà la liberté nécessaire et le véritable progrès. Un autre monde européen pourrait aussi s’appuyer sur les quatre principes proposés par F. Lordon. Cela offrirait une véritable alternative aux agents économiques mondiaux. Il s’agit d’empêcher la formation des bulles spéculatives; d’imposer des régressions à l’activité financière qui, de auto-centrée, doit à nouveau se mettre au service de l’économie productive; de cloisonner le marché financier mondial ;  de faire de l’Europe une zone d’activité financière autosuffisante, en restreignant les mouvements de capitaux, ce qui passe par l’abrogation de l’article 63 du traité de Lisbonne
     
    Il y aurait donc la possibilité de choisir entre les structures des spéculateurs de la finance actuelle et les institutions alternatives de la Zone européenne reconstruite. La taxe Tobin, si elle voit le jour, est une esquive volontaire pour laisser le champ libre aux néantologues financiers, tout en remplissant les caisses de l’Europe qui pourra ainsi imposer plus fermement la mort à crédit de ses populations. Il serait plus judicieux de proposer une réforme fiscale pour taxer la nature et défiscaliser l’homme. 
     
    Les projets de TVA verte comme la fiscalité sur les produits énergétiques sont cohérents avec le souci d’améliorer les finances publiques et de pousser à la transition vers une économie plus économe en carbone et énergies fossiles. Bien sûr, la fiscalité sur l’environnement doit remplacer celle qui pèse sur les ménages. La taxe Tobin alors, pourrait être étudiée dans la perspective de l’ancien Président Brésilien, Lula da Silva qui, en 2003, a proposé d’appliquer ce principe aux ventes d’armes et d’utiliser les ressources collectées pour lutter contre la famine et la pauvreté. 
     
    Auran Derien (Metamag, 15 octobre 2012)
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  • Honneur aux soixante-dix !...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue assez virulent de l'économiste hétérodoxe Jacques Sapir, cueilli sur son carnet RussEurop et consacré au vote du traité européen sur la stabilité, la coopération et la gouvernance.

     

    Pavé.jpg

    Honneur aux soixante-dix !

    Soixante-dix députés ont osé voter contre le TSCG.

    Soixante-dix sur cinq cent soixante-huit votants, c’est peu.

    Soixante-dix contre quatre cent soixante-dix-sept qui ont voté pour, c’est peu.

    Mais soixante-dix qui, venant de tous les horizons politiques, ont osé se dresser contre les consignes d’état-major, contre l’intense pression médiatique, contre le conformisme, contre les petits calculs politiciens, contre la lâcheté servile, cela, en vérité, fait beaucoup.

    Ce Traité sur la Stabilité, la Coordination et la Gouvernance, contient trois mensonges pour le prix d’un.

    Quelle stabilité, quand on voit dans le rapport récent du FMI, posté sur ce carnet[1], que les mécanismes mis en oeuvre depuis 2010 n’ont fait qu’aggraver la crise? Quelle stabilité encore quand on voit la dépression que connaissent certains des pays en crise? Parler de stabilité est ici un mensonge flagrant.

    Quelle coordination quand on sait qu’il n’y a de coordination qu’entre des agents libres, sinon c’est à une autorité hiérarchique que l’on a affaire, et qu’il n’y a dans ce traité qu’asservissement à des agences dites indépendantes ? Ce Traité organise en fait le dépérissement de la démocratie en Europe avec la fin de l’autorité suprême des Parlements nationaux en matière budgétaire. Or, il faut s’en souvenir, c’est par le consentement à l’impôt que commence la démocratie.

    Quelle gouvernance enfin dans un Traité qui est en fait inapplicable et qui n’a pas d’autres fonctions que d’être violé à peine signé ? Est-ce ainsi que l’on croit créer un « bonne gouvernance » dans les mots dont on se gargarise à Bruxelles et ailleurs ? 

    On dit aussi, et c’est un argument avancé en sa faveur, que ce Traité institue une solidarité en Europe. Mais quelle solidarité, dans un traité qui condamne l’Europe à l’austérité et à la récession ? C’est la solidarité de la matraque et du bâton, de l’oppression et de la répression, comme l’expérimentent les manifestants qui, d’Athènes à Madrid en passant par Lisbonne, se sont levés contre la misère qui leur est imposée. User alors d’un tel argument revient à déconsidérer pleinement l’idée d’une possible solidarité européenne

    Trouvera-t-on ces mots excessifs ? Que l’on regarde alors le rapport du Fond Monétaire International, le World Economic Outlook d’octobre 2012[2] qui explique bien la marche à la misère entamée au nom d’une austérité qui n’a donc pour but que de sauver un fétiche : l’Euro. Que l’on regarde ce rapport, qui reste prudent dans ses projections, mais qui n’en établit pas moins que la majorité des pays ne pourront respecter les clauses de ce traité qui vient d’être ratifié. Que l’on regarde aussi la note commune à trois instituts (l’INSEE, l’IFO et l’ISTAT) sur la récession dans la zone Euro[3]. Que l’on regarde enfin les rapports de l’UNICEF qui établissent la montée de la dénutrition et du manque de soin chez les enfants grecs[4]. Je pense avoir, par ailleurs, montré dans de nombreux textes et notes, tous les effets pervers de ce traité[5].

    De cela, les thuriféraires du TSCG, les sectateurs de l’Euro, n’en ont cure. Même l’appel des économistes hétérodoxes, avec lequel j’avais des désaccords suffisamment importants pour ne pouvoir le signer, a été scandaleusement censuré par Le Monde[6]. Il était dit que pour faire passer cette amère pilule, on ne reculerait devant aucune bassesse, devant aucune ignominie.

    Le TSCG nous a donné l’exemple éclatant du cynisme en politique, quand un candidat à l’élection présidentielle se prononce pour sa réécriture et s’empresse, une fois élu, de le faire voter. Ce n’est pas le codicille sur la croissance, malheureux engagement de 140 milliards d’euros étalé sur trois ans, une aumône, qui peut en changer la nature. Même ses amis politiques le reconnaissent aujourd’hui publiquement. Ce Traité ne fut pas renégocié, et  d’ailleurs ce gouvernement n’a jamais cherché à s’en donner les moyens.

    C’est ainsi que l’on détruit la démocratie.Le mensonge électoral nourrit la colère et produit le mépris pour une classe politique qui affiche sa solidarité profonde contre le peuple. Bientôt montera le vieux cri de l’anti-parlementarisme : « tous pourris » ! On dira, c’est le populisme qui monte. Et l’on se trompera, car ce sera alors devenu la stricte vérité.

    Oui, le fétichisme de l’Euro – car c’est bien de cela qu’il s’agit avec cette transformation dans l’imaginaire d’un instrument en une fin en soi – et la volonté de pouvoir de ses grands prêtres nous condamnent à un appauvrissement généralisé, à une montée du chômage sans limites et, à la fin des fins, comme en Grèce et en Espagne, à la destruction de nos sociétés.

    Alors, si dire la vérité vaut que l’on soit taxé d’être excessif, je veux bien être excessif et je l’assume. Car, aujourd’hui, la raison et l’intelligence vomissent les tièdes.

    Honneur donc à ces soixante-dix députés !

    Ils ont eu le bon réflexe et ils ont raisonné de manière juste, en refusant d’accorder leurs suffrages à ce texte inique. Qu’importe leurs raisons circonstancielles ; qu’importe d’où ils viennent et à quel parti ils appartiennent ! Quand il s’agit de résister, on ne mégote pas sur ses alliés.

    Il y a soixante-douze ans de cela, le 10 juillet 1940, quatre-vingts parlementaires, députés et sénateurs (57 députés et 23 sénateurs) refusèrent d’accorder les pleins pouvoirs constituants à Philippe Pétain. Le vote de l’écrasante majorité mit fin à la République, et institua un régime de fait et non de droit. Le vote de ces quatre-vingts minoritaires fut, avec l’appel du 18 juin, le deuxième acte fondateur de la France Libre, préparant la résurrection de la République défunte.

    Ce rappel est aujourd’hui nécessaire.

    Puissent les soixante-dix députés qui ont refusé de voter être rejoints par autant de sénateurs que possible. Puissent-ils voir leur nombre croître quand ce texte viendra en seconde lecture.

    Les canons furent, par le passé, l’ultime raison des rois.

    Les traités sont aujourd’hui l’ultime raison des élites oligarchiques.

    Qu’ils se rappellent que l’ultime raison des peuples reste le pavé.

    Jacques Sapir (RussEurop, 9 octobre 2012)

     

    Notes :

    [2] IMF / FMI, « IMF Sees Heightened Risks Sapping Slower Global Recovery », Economic Outlook, 9 octobre 2012, URL : http://www.imf.org/external/pubs/ft/survey/so/2012/res100812a.htm

    [3] Association des trois Instituts Économiques Européens, La zone Euro en récession, www.ifo.de , www.insee.fr , www.istat.it

    [6] Jacques Sapir, “Sur le TSCG”, RusseEurope. Le Carnet de Jacques Sapir sur la Russie et l’Europe (Hypotheses.org), 23 septembre 2012. [En ligne] http://russeurope.hypotheses.org/133.

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  • Etats-Unis : vers un retour à l'indépendance énergétique ?...

    Sur Realpolitik.tv,  Hervé Juvin revient sur les conséquences géopolitiques de la politique américaine de recherche de l'indépendance énergétique dont il avait été l'un des premiers en juin dernier à déceler les signes ...


    De l'indépendance énergétique américaine par realpolitiktv

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  • Euro : nouvelles du front...

    Dans cette chronique, mise en ligne sur Realpolitik.tv,  Hervé Juvin , auteur de l'essai intitulé Le renversement du monde (Gallimard, 2010) revient ici la crise de l'euro, qui n'est évidemment pas terminée. D'ores et déjà, comme il le constate, l'euro n'a plus la même valeur partout en Europe...


    Euro : nouvelles du front (2) par realpolitiktv

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