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  • Georges Sorel contre la bourgeoisie décadente...

    Nous reproduisons ci-dessous un entretien donné par Rodolphe Cart à Eurolibertés, dans lequel il évoque la figure de l'auteur de Réflexions sur la violence à l'occasion de la sortie de son essai Georges Sorel - Le révolutionnaire conservateur (La Nouvelle Librairie, 2023).

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    Entretien avec Rodolphe Cart à propos de l’écrivain révolutionnaire conservateur Georges Sorel

    Les opinions politiques de Georges Sorel ont évolué au fil du temps. Quelles sont les grandes étapes de ce processus ? Lors de son rapprochement avec les nationalistes, qui a-t-il fréquenté dans cette mouvance ?

    Tout d’abord, en bon disciple de Proudhon, Sorel est un conservateur en matière de mœurs – notamment concernant ses positions sur le mariage ou sur le rôle de la femme et du père au sein de la famille. En revanche, Sorel est un auteur à phases ; c’est-à-dire qu’il va évoluer sur certaines de ses positions tout au long de sa carrière de penseur politique. Comme le disait très bien Michael Freund – un des premiers biographes –, le Normand fut à tour de rôle marxiste (1893-1897), révisionniste (1898-1901), syndicaliste révolutionnaire (1898-1911), nationaliste (1911-1913) et même bolcheviste (1917-1922). Concernant son lien avec le nationalisme, même s’il a quelques échanges avec Charles Maurras, c’est surtout Georges Valois qui représentera ce « pont » entre Sorel et le mouvement monarchiste. En même temps, grâce à la revue L’Humanité Nouvelle, les deux Georges, Georges Valois, le militant, et Georges Sorel, le penseur syndicaliste, étaient en contact depuis 1898.

    Qu’est-ce que le syndicalisme-révolutionnaire théorisé par Georges Sorel ?

    Faisons simple : Sorel va se poser exactement contre la ligne de Jean Jaurès. Cette ligne jaurésienne consistait à rattacher le socialisme à la République, au parlementarisme et aux Lumières. Comme l’a très bien montré Jean-Claude Michéa, cette jonction se réalisa partiellement lors de l’Affaire Dreyfus. Bref, pour en revenir au syndicalisme révolutionnaire, Sorel plaide pour la scission, puis la sécession, et enfin l’autonomie des classes prolétaires contre l’ensemble des institutions « bourgeoises ». Sorel, en un sens, va donc encore plus loin que la simple lutte des classes marxiste.

    Georges Sorel est avant tout connu pour son ouvrage Réflexion sur la violence paru en 1908. Quel est le contenu de ce livre et pourquoi Georges Sorel est-il favorable à l’utilisation de la violence dans le domaine politique ?

    On ne peut comprendre le rôle qu’entend donner Sorel au concept de violence, si on ne garde pas en tête cet idéal de sécession vis-à-vis du système bourgeois, parlementaire et démocratique. La violence est le point nodal pour qu’émerge ce conflit – on se souvient que Sorel est un lecteur de Karl Marx (lutte des classes) –, car elle représente le phénomène qui permettra aux ouvriers d’entrer dans une pratique journalière du combat contre leurs « oppresseurs ». Pour Sorel, il faut constamment qu’une tension anime le corps social ouvrier pour empêcher l’évanescence de la conflictualité. Toutefois, Sorel distingue nettement la violence de la sauvagerie. Dans le premier cas, la violence possède une idée directrice qui permet aux acteurs d’avoir un but précis à accomplir, et une réflexion sur les moyens pour arriver à leur fin ; dans l’autre, on ne dépasse pas les bas sentiments de la débauche, du pogrom et de la violence aveugle des foules (Gustave Le Bon). Le constat de Sorel est donc clair : oui à la violence, mais seulement à la condition qu’elle soit au service d’un objectif plus haut d’émancipation politique et sociale.

    Le rejet par Georges Sorel de la démocratie parlementaire libérale bourgeoise trouve-t-il ses racines dans le marxisme ? Quelle est la position de Georges Sorel par rapport à ce dernier ? Quelle est la différence entre le socialisme de Georges Sorel et celui de Karl Marx ?

    La découverte de Marx est une révélation pour Sorel. Pour lui, le marxisme demeura longtemps l’unique réponse à l’avènement de la société industrielle et capitaliste, aux transformations sociales sans précédent qui s’annonçaient. Seule la doctrine de Marx pouvait mettre en place l’apparition d’une philosophie nouvelle, d’un droit audacieux et d’une morale inédite. Sorel a même pu dire qu’il voyait dans le marxisme la « plus grande innovation dans la philosophie depuis plusieurs siècles ».

    Pourtant, peu à peu, Sorel va se faire plus critique – notamment après la lecture d’auteurs comme Henri Bergson ou le philosophe italien Giambattista Vico. Comme le rappelle Pierre Andreu – un commentateur de Sorel –, l’auteur des Illusions du Progrès commence, à partir de 1897, à remettre en doute l’enseignement marxiste sur différents points comme la « négligence des facteurs moraux », la « confiance exagérée accordée à la science », l’« interprétation insuffisante ou erronée de l’évolution sociale et du mouvement ouvrier ». En 1898, Sorel n’hésite pas à écrire que Marx a laissé une « œuvre géniale » mais « inachevée ». Sorel devient alors, en préférant les thèses fédéralistes de Proudhon, un antiétatiste rabique contre les positions de Marx – rappelons que ce dernier prévoyait de passer par un État communiste avant son abolition. Aussi, contre la thèse de l’abolition des classes de l’auteur du Manifeste du parti communiste, Sorel ne pense pas que les classes sociales s’effaceront ; au contraire, il pense même que cette opposition tendra toujours plus à différencier les classes, à les séparer.

    Georges Sorel est le fondateur, dans le domaine politique, de la notion de mythe. Qu’en est-il ? La « grève générale » est-elle, pour Sorel, le principal mythe ?

    L’un des objectifs de la pensée sorélienne est de mettre les acteurs sociaux en mouvement. Lorsque Sorel dénonce le parlementarisme, les compromissions de la gauche socialiste et de la démocratie républicaine, il ne le fait jamais de manière gratuite mais toujours dans le but que cette dénonciation trouve un écho dans le corps social prolétarien. Or, Sorel se rend compte que tous les mouvements de masse de l’histoire des sociétés humaines n’ont été possibles que lorsque les individus étaient plongés, et cela avant même la mise en action, dans un univers mental qui les poussait à prendre telle ou telle décision. Ce rôle du mythe consiste à propager des images mobilisatrices dans des groupes humains, pour ensuite les faire réagir lors des évènements.

    Pour en revenir sur le mythe de la grève générale, Sorel mesure, à son époque, que le développement des syndicats les oppose directement, et de manière de plus en plus violente, au cadre de la IIIe République. Tous les « ingrédients » d’une révolte sont présents : une violence qui s’accentue, deux camps qui s’opposent et une fracture qui ne cesse de s’agrandir. En clair, il ne manque plus qu’une idée directrice pour ce conflit désormais inévitable. Pour Sorel, c’est le concept de grève générale insurrectionnelle qui devait être capable d’élaborer le paradigme dans lequel le mouvement ouvrier français doit pouvoir se projeter.

    Sorel a influencé, tant Maurice Barrès et Charles Péguy, que Lénine, Antonio Gramsci et Benito Mussolini. L’Italie fasciste et l’Union soviétique ont proposé d’entretenir sa tombe. Comment expliquer une telle situation, qui voit un théoricien influer sur les tenants d’opinions si différentes ?

    Effectivement, l’attrait des régimes de Mussolini et de Lénine pour Sorel a largement contribué à constituer cette « légende noire ». Après, cet amalgame entre ces régimes et la doctrine sorélienne est largement grossi, voire faux. Comme nous l’avons vu précédemment, Sorel a évolué tout au long de sa vie sur certaines de ces positions. Il n’existe pas de « sorélisme » à proprement parler, sauf quelques grands concepts (le mythe, l’antiparlementarisme, l’antidémocratisme, la violence émancipatrice et héroïque) qui, eux, ont pu être repris par les intellectuels de ces mouvements – et souvent de manière abusive.

    Il est vrai que Sorel, en 1922, a défendu Lénine contre les politiciens « démocrates » ; car, pour lui, le Russe incarnait « le marxisme en action, le marxisme vivant, ressuscité de la décomposition du socialisme parlementaire ». Tandis que les hommes politiques européens représentent l’effacement du sublime et la haine pour les « hommes supérieurs », Lénine se présentait comme la figure qui les ramenait à leur médiocrité, leur bassesse. La reconnaissance entre les deux hommes n’est pas pour autant réciproque, puisque l’auteur de Que faire ? décrit Sorel comme un « esprit brouillon ».

    Concernant Mussolini, la relation est différente. En 1922, Mussolini déclare au journal espagnol ABC : « Pour moi, l’essentiel était : agir. Mais je répète que c’est à Georges Sorel que je dois le plus. C’est ce maître du syndicalisme qui, par ses rudes théories sur la tactique révolutionnaire, a contribué le plus à former la discipline, l’énergie et la puissance des cohortes fascistes. » En règle générale, on peut même dire que c’est en Italie, et même avant la France, que les thèses soréliennes vont être le plus reprises. Déjà bien imprégné de nietzschéisme, tout le mouvement syndicaliste et révolutionnaire italien va s’abreuver de l’éloge de la violence et de la guerre de Sorel.

    En quoi Georges Sorel était-il un révolutionnaire conservateur, en l’occurrence un opposant aux idées des Lumières qui ne désire cependant pas restaurer le monde d’avant, mais seulement trouver dans celui-ci des éléments afin d’instaurer un autre futur.

    La question morale est sans nul doute l’un des rares fils rouges de la pensée sorélienne. Il fut constamment le sujet d’une angoisse profonde quant à l’avenir de son pays, et même du continent européen. Pour lui, la classe dirigeante bourgeoise et républicaine a échoué dans son rôle d’élite, et c’est pour cela qu’il attaque sans cesse l’idéologie du progrès, les idées des Lumières ou la vulgate sur la tolérance et le bien-être, qui ne sont rien moins que la bien-pensance d’avant. Sorel croit donc en l’imminence d’une révolution prolétarienne qui renversera cet ordre décadent.

    Le pire, pour lui, étant sûrement la trahison des élites socialistes envers le peuple – sur ce thème, il écrira un texte ravageur, en 1909, intitulé La révolution dreyfusienne. Cette compromission de la social-démocratie représentait, à ses yeux, une faute d’ordre moral. C’est pour cela qu’il opposa constamment le prolétariat industriel – associée aux valeurs positives d’héroïsme, de conservatisme et de puissance – à la bourgeoisie corrompue et décadente. C’est en s’appuyant sur Proudhon, Renan et Nietzsche, qu’il trouvera une partie de ses arguments pour attaquer la « décadence de la bourgeoisie ».

    Rodolphe Cart, propos recueillis par Lionel Baland (Eurolibertés, 24 juillet 2023)

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  • La Condamnation de l’Action française...

    Les éditions Kontre Kulture ont réédité récemment une étude historique de Philippe Prévost intitulée La condamnation de l'Action française. Historien, essayiste et docteur es lettres, Philippe Prévost a publié de nombreux essais historiques, dont La France et la déclaration Balfour (Erick Bonnier, 2018).

     

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    " Le 29 décembre 1926, la Congrégation du Saint-Office met à l’index cinq livres de Charles Maurras ainsi que le journal de l’Action française. Bien que cette dernière multiplie les gestes de bonne volonté, Rome refuse toute discussion et durcit ses mesures disciplinaires envers les dirigeants de l’AF : privation des sacrements, de la confession, refus de l’enterrement religieux, etc., mais également contre les prêtres qui contourneraient ces interdictions. Une véritable chasse aux sorcières se met en place, avec délations et punitions. Mais alors que les dirigeants de l’Action française sont accusés de nier Dieu, les mystères de l’Incarnation, les dogmes et toute morale, on peut se demander si cette condamnation est véritablement religieuse ou si elle n’obéit pas en réalité à des motivations politiques. En effet, le plébiscite des idées de Maurras inquiète les démocrates-chrétiens et Rome n’a comme seul vrai reproche que le refus du ralliement par un mouvement royaliste et résolument antirépublicain. Pour répondre à cette question, l’auteur a mené une authentique enquête, fouillant dans les archives du Vatican, mais également dans divers fonds privés ou publics, découvrant lettres, notes personnelles, témoignages et coupures de journaux.

    On pourrait croire que cette condamnation ne fut qu’un épisode sans conséquence de l’histoire tourmentée des relations de l’Église avec sa fille aînée, la France. Ce serait une grande erreur, car la déchirure qui se produisit alors au sein de la communauté catholique joua un rôle prépondérant dans son affaiblissement – faisant perdre la foi à de nombreux catholiques – et poussa à la nomination de cardinaux ralliés qui seront particulièrement actifs lors du concile Vatican II. Mais surtout, cette fracture est encore présente aujourd’hui, empêchant toute action cohérente des catholiques qui, par refus de tout lien avec ce qui est qualifié d’ « extrême-droite », finissent par se rallier, eux aussi, au système en place. "

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  • De Maurras à Houellebecq : le style réactionnaire...

    Les éditions Amsterdam viennent de publier un essai de Vincent Berthelier intitulé Le style réactionnaire - De Maurras à Houellebecq. Vincent Berthelier est agrégé de lettres et docteur en langue française.

     

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    " En matière de littérature et de style, dit-on, les conservateurs révolutionnent et les révolutionnaires conservent. Les amis du peuple parlent le français de Richelieu, les amis de l’ordre jargonnent comme des Apaches. L’idée a la peau dure : remontant au moins à Stendhal, il n’est pas rare de la trouver sous la plume des réactionnaires d’aujourd’hui, chez Houellebecq, par exemple, qui fait dire à l’un de ses personnages que tous les grands stylistes sont des réactionnaires. La droite ferait passer le style avant toute chose. À preuve, Céline, dont il serait dès lors possible d’ignorer les idées antisémites et exterminatrices, ou du moins de les dissocier radicalement du style constitutif de sa grandeur.

    Or, Vincent Berthelier le montre, ce discours remplit historiquement une fonction politique. Il se solidifie après- guerre, chez des Hussards soucieux de minimiser l’engagement vichyste ou hitlérien de la droite littéraire et de réhabiliter leurs aînés en les présentant comme des stylistes.

    Plus largement, en étudiant un large corpus d’auteurs de droite et d’extrême droite, ce livre ambitieux voudrait repenser les rapports entre style, langue et politique. Il s’intéresse d’abord à la conception du style et de la langue défendue par certains écrivains, tout en proposant des analyses précises de leur écriture. À chaque étape, il s’agit d’explorer la problématique du style à partir des enjeux idéologiques du moment : dans l’entre-deux-guerres (Maurras, les puristes, Bernanos, Jouhandeau), dans la période de l’essor du fascisme et de la Libération (Aymé, Morand, Chardonne), enfin des années 1970 à nos jours, dans la période où s’élabore une nouvelle pensée réactionnaire (Cioran, Millet, Camus, Houellebecq). "

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  • La contagion monégasque...

    Nous reproduisons ci-dessous entretien avec Alain de Benoist, cueilli sur Boulevard Voltaire, dans lequel il évoque la question royale. Philosophe et essayiste, directeur des revues Nouvelle École et Krisis, Alain de Benoist a récemment publié Le moment populiste (Pierre-Guillaume de Roux, 2017), Ce que penser veut dire (Rocher, 2017), Contre le libéralisme (Rocher, 2019) et La chape de plomb (La Nouvelle Librairie, 2020).

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    Alain de Benoist : « Le Journal officiel des familles royales, désormais, c’est Closer, Gala ou Voici ! »

    Entre le piteux exil du roi Juan Carlos en Espagne, le prince Andrew banni de Buckingham Palace en raison de ses frasques sexuelles auprès de Jeffrey Epstein, le prince Harry et Megan Markle qui soutiennent maintenant la campagne Black Lives Matter, comment jugez-vous le spectacle donné par les monarchies européennes ?

    Il y a, heureusement, de belles exceptions, mais les familles royales n’ont plus aujourd’hui de « royales » que le nom. Peut-être faudrait-il parler de contagion monégasque. Leurs représentants font tout simplement partie des « people », dont on suit les aventures conjugales ou extraconjugales exactement comme on suit celles des acteurs, des chanteurs ou des joueurs de football. On a pleuré la princesse Diana comme on a pleuré Michael Jackson. Le Journal officiel des familles royales, désormais, c’est Closer, Gala ou Voici.

    Beaucoup font partie de la jet-set, cette plèbe dorée parasitaire dont la vie se déroule entre aéroports et grands hôtels, croisières de luxe et jets privés, partouzes d’élite et conseils d’administration. Quand on lit les noms figurant dans le carnet d’adresses de Jeffrey Epstein, opportunément « suicidé » l’an dernier, on les retrouve à peu près tous : membres des familles princières et politiciens en vue, hommes d’affaires et financiers internationaux, play-boys et « masseuses » professionnelles, mannequins et vedettes du show-biz, traders et agents d’influence en contact avec les mafias, les « services » et les « réseaux ». Leurs femmes se présentent invariablement comme galeristes, décoratrices, architectes d’intérieur. Tous ont, bien entendu, leurs bonnes œuvres humanitaires pour mieux blanchir leurs spéculations et leurs trafics. Au total, cinq à dix mille familles sans aucun rapport avec les gens ordinaires. Si l’on faisait les enquêtes que l’on ne fait pas, on s’apercevrait que la grande majorité mériteraient d’être en prison.

    En Espagne comme en Angleterre, où la couronne bénéficiait naguère d’un large consensus, de plus en plus de voix s’élèvent en faveur d’un retour à la république. Ce débat vous semble-t-il légitime ?

    Je le crois surtout inutile. Ce qui frappe, quand on compare les sociétés européennes, c’est qu’elles ont toutes les mêmes problèmes, connaissent les mêmes dysfonctionnements, subissent la même idéologie dominante. On ne constate entre elles aucune différence politique, sociologique ou autre qui serait due à leur statut de république ou de monarchie. Les monarchies de droit divin étant devenues impensables, les seules qui puissent exister sont d’ailleurs des monarchies constitutionnelles et parlementaires, c’est-à-dire des démocraties couronnées. Il reste, bien sûr, des symboles dont je ne méconnais pas l’importance mais qui, par eux-mêmes, ne résolvent rien. De ce point de vue-là, le débat est complètement dépassé.

    Et à titre personnel, avez-vous la fibre monarchiste ? Le retour de la royauté serait-il une bonne nouvelle ou relève-t-il tout bonnement de la simple rêverie ?

    Dans l’abstrait, on peut discuter à perte de vue des qualités et des défauts du principe monarchique. On se souvient de la célèbre Enquête sur la monarchie, publiée par Maurras dans La Gazette de France, du 29 juillet 1900 au 1er juillet 1902 (et publiée sous forme de livre en 1909). L’auteur d’Anthinéa était allé poser à diverses personnalités la question suivante : « Oui ou non, l’institution d’une monarchie traditionnelle, héréditaire, antiparlementaire et décentralisée est-elle de salut public ? » Mais à cette époque, à peine plus d’un siècle après la Révolution, la France était encore partagée entre républicains et monarchistes, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui. Il y avait aussi un prétendant crédible, ce qui n’est plus le cas non plus. Pour restaurer la monarchie, Maurras prônait le coup d’État (Si le coup de force est possible, 1907). Quand on voit ce qui s’est passé ensuite, on comprend que sa grande erreur a été de surestimer le pouvoir des institutions (et d’avoir exagéré la coupure entre l’Ancien Régime et la Révolution).

    Le mouvement de Maurras, l’Action française, fondée en 1898 par Henri Vaugeois et Maurice Pujo, existe toujours aujourd’hui. On y rencontre de sympathiques et talentueux jeunes militants royalistes, de belles fidélités, des nostalgies qui sont respectables – comme le sont beaucoup de vœux pieux. Mais rien qui puisse empêcher la Nouvelle Classe de dormir sur ses deux oreilles.

    Je n’ai, personnellement, jamais été monarchiste, mais je ne méconnais pas certains mérites de la monarchie. Je n’oublie pas, en même temps qu’à partir de la fin du Moyen Âge, la monarchie s’est instaurée aux dépens d’un ordre féodal qui avait, à mes yeux, de plus grands mérites encore. Je n’oublie pas, non plus, que les monarchies n’ont pas toujours été héréditaires : les premiers rois, à commencer par Clovis, étaient désignés par l’assemblée des hommes libres (qui les « hissaient sur le pavois ») ; ils étaient donc élus, comme le furent ensuite les empereurs du Saint-Empire romain germanique, les doges de la République de Venise et les papes. Ces dernières années, c’est sans doute Jean Raspail qui a le mieux parlé de l’espérance monarchiste (Sire, 1991). Vous ne serez donc pas surpris que mon roi préféré soit Antoine de Tounens, le roi des Patagons !

    Alain de Benoist, propos recueillis par Nicolas Gauthier (Boulevard Voltaire, 11 octobre 2020)

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  • Pour découvrir Dominique de Roux...

    Le 8 janvier 2019, Martial Bild recevait, sur TV libertés, Olivier François, pour évoquer la figure de Dominique de Roux, écrivain, pamphlétaire et aventurier, à l'occasion de la sortie de l'ouvrage collectif qui lui est consacré, intitulé Dominique de Roux parmi nous (Pierre-Guillaume de Roux, 2018).

     

     

                                   

     

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  • Attention, un Marx peut en cacher un autre !...

    Le nouveau numéro de la revue Éléments (n°172, juin-juillet 2018) est disponible en kiosque, avec une couverture percutante de Marsault !

    A côté du dossier consacré au retour de Marx, on retrouvera l'éditorial d'Alain de Benoist, les rubriques «Cartouches», «Le combat des idées» et «Panorama» , un choix d'articles variés, de nombreux entretiens, les chroniques de Xavier Eman, d'Hervé Juvin, d'Olivier François, de Ludovic Maubreuil, de Michel Marmin, de Laurent Schang et d'Yves Christen et l'anti-manuel de philosophie de Jean-François Gautier...

    Bonne lecture !

    Vous pouvez commander ce numéro ou vous abonner sur le site de la revue : http://www.revue-elements.com.

     

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    Éditorial           

    Les idées, par Alain de Benoist

    Agenda, actualités

    L’entretien

    Marianne Durano : pour un féminisme intégral, propos recueillis par Iseult Prullé-Rousseau

    Cartouches

    Le regard d’Olivier François : Secouons le cocotier avec Maulin

    Une fin du monde sans importance, par Xavier Eman

    Le carnet géopolitique d’Hervé Juvin : Un monde en voie de sous-développement ?

    Petit Paysan deviendra grand, par Ludovic Maubreuil

    Champs de bataille : Patton perd son pari à Metz (2), par Laurent Schang

    Feu sur... Jérôme Leroy, par Michel Marmin

    Bestiaires : humains et chimpanzés, par Yves Christen

    Sciences

    Le combat des idées

    Rencontre avec Marsault, le phénomène de la BD, par François Bousquet

    La colère de la jeunesse de la France périphérique, par Pascal Eysseric

    La révolte des 16-25 ans, par David L’Epée

    La révolution spirituelle manquée de Mai 68, par Michel Marmin et Olivier Germain-Thomas

    La grande illusion de l’argent gratuit, par Pierre Fouques

    Crise monétaire : la bulle des bulles, par Guillaume Travers

    Olivier Delamarche : demain la faillite mondiale ?

    Le bitcoin : le phénomène des crypto-monnaies, par Guillaume Travers

    La trahison du général de Villiers, par Philippe Christèle

    Hervé Juvin, l’anti-Commission Attali, par François Bousquet

    Spinoza superstar, par Jean-François Gautier

    L’année Maurras, par Aristide Leucate

    Alain de Benoist, l’écologie sans modération, par Falk van Gaver

    Nos trois romans coups de cœur, par Pascal Eysseric, Michel Marmin, David L’Épée

    Carl Gustav Jung, un prophète païen, par Thibault Isabel

    Dossier

    Karl Marx, le retour ?

    La marchandise est l’opium du peuple, par Alain de Benoist

    Preve, le marxiste « communautaire », par Rémi Soulié

    Denis Collin et Pierre-Yves Gomez : Marx au XXIe siècle

    Le futur de Marx, par Jérôme Maucourant et Bruno Tinel

    Stéphane Courtois : Le léninisme est-il un totalitarisme ?, propos recueillis par Pierre Fouques

    Panorama

    L’œil de Slobodan Despot

    Série télé : La Servante écarlate, par Frédéric Dufoing

    Un païen dans l’Église : Saint-Pierre-et-Saint-Romain de Savennières, par Bernard Rio

    Philo : Qu’est-ce qu’une civilisation ?, par Jean-François Gautier

    L’esprit des lieux : Bruxelles, par Christopher Gérard

    C’était dans Éléments : une gauche pétainiste, par Jean-Claude Valla

    Éphémérides

     

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