Propositions pour un renouveau autonomiste et sécessionniste en Bretagne
La Bretagne est en passe d’être entrainée en même temps que la République française dans le plus grand naufrage de sa longue Histoire. Elle pourrait même être effacée, civilisationnellement, identitairement, culturellement, ethniquement, d’ici quelques générations, si les Bretons encore conscients ne prennent pas rapidement les choses en main, pour contribuer, à leur niveau, à se relever, aux côtés de tous nos frères d’Europe.
Aujourd’hui, force est de constater que :
- La proportion de Bretons de souche, qu’ils habitent en Bretagne ou qu’ils fassent partie de la diaspora, y compris parisienne, diminue.
- La proportion d’extra-européens en Bretagne augmente significativement, dans les métropoles comme dans la ruralité, parallèlement à une augmentation elle aussi significatives d’Européens qui viennent en Bretagne sans que celle-ci ne signifie quoi que ce soit pour eux, si ce n’est une résidence secondaire, ou un appartement métropolitain suffisamment près de Paris pour continuer à travailler, suffisamment loin pour fuir les maux qu’ils ont eux mêmes parfois contribué à enfanter. Ajoutez à cela une partie de retraités de la génération des boomers qui voient dans la Bretagne un « Eldorado climatique » ou une possibilité d’y finir leurs vieux jours tranquillement, et vous avez une addition de population qui n’a plus grand chose à voir avec la Bretagne de nos ancêtres.
Dans le même temps, on déplore, en Bretagne (mais ce constat est aussi valable pour une bonne partie de l’hexagone) :
- Une paupérisation massive des classes moyennes, qui rejoignent les classes populaires dans l’obligation de se serrer la ceinture à la fin du mois, d’acheter des produits alimentaires de mauvaise qualité, de multiplier les combines pour nourrir sa famille, de compter chaque centime pour acheter de l’essence ou payer sa facture d’électricité
- Un effondrement du service public en Bretagne – celui qui justifiait éventuellement, je dis bien éventuellement, un lien quelconque entre les Bretons et la République. L’instruction n’a jamais été aussi lamentable, il suffit d’ouvrir n’importe quel programme scolaire du primaire au lycée pour s’en apercevoir. L’histoire et les langues de Bretagne ne sont par ailleurs pas enseignées à tous les élèves de Bretagne ce qui contribue à fabriquer des générations d’acculturés.
- Le service public hospitalier manque de bras, et de moyens, faute d’une administration tentaculaire, d’une sélection draconienne en médecine, d’études trop longues, de salaires dérisoires eu égard des tâches effectuées par infirmières ou aide-soignantes. Et surtout d’un manque de volonté politique à maintenir sur tout le territoire breton des hôpitaux, des maternités, des urgences accessibles dans la demi-heure à toute la population. Plus globalement, on assiste à une pénurie de soignants sans précédent, qui fait que vous ne pouvez plus trouver de dentistes, d’ophtalmos, d’ORL, à moins de vous déplacer à des centaines de kilomètres parfois.
- La sécurité des habitants de Bretagne est de moins en moins assurée. Combien de cambriolages déclarés pour combien de cambriolages résolus par les autorités ? Combien de gamins agressés ici ou là, à la sortie d’une boîte de nuit, en pleine rue ? Combien de gamines agressées sexuellement par des individus qui savent pertinemment que la Justice ne suivra pas derrière. Combien de dealers qui vendent la mort à toute une partie de la jeunesse (et de moins jeunes), à la vue et au su de tous, dans les quartiers des métropoles comme dans la ruralité oubliée ?
- Les autochtones de Bretagne ne peuvent plus se loger. Pour être propriétaire aujourd’hui sur sa propre terre bretonne, il faut déjà tirer une croix sur toutes nos côtes eu égard de faibles salaires et de banques qui ne suivent plus, eu égard aussi de la pression immobilière exercée par des spéculateurs venus d’ailleurs, et par des populations plus fortunées venues de Paris ou d’autres métropoles françaises. Pour trouver un logement, ne serait-ce qu’à louer, cela devient tout autant compliqué. Dans toute la Bretagne. Il y a beaucoup plus de demande que d’offre. Parce que la pression démographique est trop importante. Parce que depuis des années, des élus locaux font en sorte de faire venir de nouvelles populations, tout en dépossédant les autochtones de leurs propres terres. Le logement social ? Il est de plus en plus réservé à certaines catégories bien particulières de la population, qui font que certains quartiers des métropoles, de Nantes à Brest en passant par Rennes ou Saint-Brieuc, ou même Vannes, sont devenus des ghettos. Des ghettos que fuient ceux qui ont encore la possibilité de le faire, pour ne plus se voir imposer un « vivre ensemble » qui ne fonctionne que dans la tête de ceux qui vivent dans leurs quartiers protégés, de manière totalement déconnectée du réel.
Le contrat qui lie les Bretons avec la République française est rompu depuis belle lurette. On paye tous les jours des taxes, des charges, des impôts, des redevances, dont on ne voit plus la couleur. Les routes sont globalement bien entretenues, c’est peut être une des seules notes positives. Même le secteur associatif, pourtant gavé de subventions publiques, perd de son dynamisme, la notion de bénévolat et d’investissement de soi au service de sa communauté devenant de plus en plus caduque, puisque la notion même de communauté s’effrite.
« Breton, tes impôts flambent dans les banlieues françaises » pouvait-on lire il y a vingt ans sur les affiches du parti nationaliste Adsav. Qui peut lui donner tort a posteriori ? Où va l’argent ? Pourquoi est-ce que l’Etat laisse augmenter l’essence sans baisser les taxes ? Pourquoi est-ce que la TVA ne baisse pas ? Pourquoi est-ce que les entrepreneurs et les artisans ne sont plus incités à embaucher à des salaires décents ? Pourquoi est-ce que les salariés sont globalement, de plus en plus mécontents de leurs conditions de travail ?
Partant de tous ces griefs qui sont légitimes vis à vis de la République française et de ses représentants y compris en Bretagne, ne serait-ce pas le moment de réfléchir, enfin, autour d’une table, à la constitution d’une plateforme politique résolument autonomiste bretonne, résolution sécessionniste vis à vis de la République française ?
N’est-il pas venu le moment de proposer aux citoyens, localement, régionalement, d’enfin pouvoir décider ensemble de leur avenir. Ne peut-on pas imaginer demain, que des citoyens, lors des prochaines élections municipales, forment des listes non partisanes, dont le seul objet serait de dire « Notre liste s’engage, à soumettre chaque décision municipale à un référendum local ». « Notre liste s’engage à récolter les doléances de chaque habitant de la commune, et à soumettre celles qui recueilleront le suffrage d’une certaine proportion d’habitants, à un référendum local ». « Nous ne serons plus des élus, mais des administrateurs chargés d’appliquer vos décisions ». Ne peut-on pas imaginer que ce qui soit local demain, devienne cantonal, et régional après demain ? Pour que la démocratie renaisse en Bretagne, par et pour le peuple ?
Il est temps d’arrêter de croire que des élus de plus en plus mal élus d’ailleurs, souvent par une minorité d’électeurs, ont une quelconque légitimité, pour prendre les grandes décisions politiques, pour lever l’impôt et redistribuer l’argent public (souvent à des fins électoralistes d’ailleurs, en ce qui concerne les subventions aux associations). Il est temps d’arrêter de tout attendre de l’Etat, qui ne rêve que d’instaurer un revenu universel pour vous soumettre tous (revenu universel, crédit social, et mise en subordination totale des citoyens d’avec l’Etat). Il est temps de cesser de penser que les autorités vous veulent du bien, elles qui ne jouent que sur les peurs, le stress global, la division, les intérêts particuliers, pour assurer une reproduction sociale perpétuelle des élites qui dirigent.
Un grand mouvement autonomiste et sécessionniste en Bretagne, outre le fait d’appeler à la démocratie directe totale, pour ne pas rapidement faire du jacobinisme breton à la place du jacobinisme français, doit se mettre autour d’une table, et se poser les questions suivantes :
- Qui est Breton, qui ne l’est pas ? Qui est Européen, qui ne l’est pas ? Quelles sont nos frontières ? Quelles sont les critères qui permettent à une communauté de fonctionner de manière juste et apaisée ? Qui peut aspirer à vivre en Bretagne et qui ne le peut pas ? Qui peut être aidé par la communauté, qui ne le peut pas ?
- Partant de ces définitions, de ces critères, qui pourra demain prétendre à être propriétaire d’un logement sur le territoire breton ? Qui pourra prétendre à être aidé pour le devenir ? Qui pourra prétendre à un logement social en Bretagne ? Qui pourra prétendre à une résidence secondaire sur le territoire ?
- Puis, il faudra décliner, sur toutes les thématiques qui préoccupent les habitants de Bretagne aujourd’hui. Qui peut bénéficier d’un emploi en priorité ? Sous quelles conditions de salaires les patrons, ainsi que les administrations régionales, doivent-elles rémunérer ? Qui peut prétendre à se faire soigner gratuitement, qui ne peut pas y prétendre ?
Une Bretagne émancipée de la République française et de la religion des Droits de l’homme qui va avec, pourra par ailleurs fermer la page des dogmes obligatoires, se questionner. Sur le sort à réserver à ceux qui écoulent de la drogue sur tout notre territoire, rendant dépendante toute une partie de la jeunesse, et provoquant une large partie des affaires judiciaires que nous connaissons aujourd’hui. Quel sort à réserver à ceux qui entrent illégalement sur notre territoire ? Quel code pénal devons-nous construire pour assurer à nos compatriotes la sécurité qui fait qu’ils acceptent de « vivre ensemble » ? La justice doit-elle être rendue par des professionnels, parfois idéologues, ou bien par des citoyens chargés uniquement d’appliquer le Code Pénal que les Bretons auront élaboré (et pourquoi pas des intelligences artificielles, sans doute plus neutres que des individus…si l’on pousse le bouchon plus loin…) ? La sécurité des Bretons doit-elle être assurée par une Police régionale, ou bien par une forme de milice permanente, qui ferait que chaque citoyen de Bretagne, durant un certain nombre de mois ou d’années, doit se rendre disponible, ici pour être gendarme, là pour être policier, là encore pour être secouriste, ambulancier, et même agent du service hospitalier ? Se former et servir sa communauté, tout au long de sa vie professionnelle, en accord avec les employeurs, n’est-ce pas finalement la garantie de mettre fin aux corporatismes, aux intérêts particuliers, aux dérapages, mais surtout, n’est-ce pas la possibilité d’être une nation d’hommes et de femmes libres et responsables vis à vis de leurs proches, de leurs voisins, de leur peuple ?
Qu’on est loin en lisant ces lignes, de l’évocation de thématiques traditionnellement chères à ce qu’on a appelé Le Mouvement Breton (ou Emsav), et qui ont fait qu’aujourd’hui comme hier, il n’a jamais pesé sur la société bretonne parce qu’il ne voulait pas prendre conscience de ses préoccupations et de ses aspirations. Les seuls qui ont réussi à peser politiquement, dans ce milieu, sont ceux qui ont prêté allégeance à la République française, et à certains partis politiques de pouvoir dont le rôle est de sans cesse, assurer la survie de la 5e République. Tout un programme…
Il est urgent que les bonnes volontés de Bretagne se réunissent, se mettent autour d’une table, et proposent une plateforme résolument tournée vers le 21ème siècle, résolument consciente des principaux enjeux qui détermineront si la Bretagne et le peuple Breton existeront encore demain. Qui dit bonne volonté, dit enfin de faire sans les sectaires qui veulent interdire de citer ceux qui ne pensent pas comme eux, sans les idéologues de salon, sans ceux qui, depuis des décennies, se sont évertués à échouer ou à regarder s’échouer le navire. C’est une nouvelle direction pour la Bretagne qu’il faut prendre, dès maintenant, dès demain.
Sans ce rassemblement nécessaire, notamment autour de la volonté d’instaurer la Démocratie directe dans une Bretagne qui aura divorcé de la République française, alors nous creusons notre tombe et, pire encore, celle de nos enfants et globalement, celle du peuple Breton. Alors au travail, chacun sait ce qu’il lui reste à faire pour convaincre, et enfin en finir avec le sectarisme et la trouille de déplaire, deux pathologies malheureusement bien trop répandues y compris parmi ceux qui aspirent aux libertés bretonnes.
Bevet Breizh Dieub !
Julien Dir (Breizh-Info, 24 septembre 2023)